FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 17 novembre 2009
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, chers collègues.
Nous sommes le mardi 17 novembre 2009 et nous tenons la 39e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Entre autres, nous revenons aujourd'hui à notre examen du projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement.
Notre premier groupe de témoins de la journée est formé d'Ian Dale, vice-président principal, communications et relations avec les intéressés, et de Donald Raymond, vice-président principal, placements sur les marchés publics, tous deux de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.
Bienvenue à vous.
Nous accueillons aussi Anthony Andrews, directeur exécutif, et Bernarda Elizalde, directrice de programme pour le développement durable, tous deux de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs.
Nous comptons aussi parmi nous Robert Wisner, qui est ici à titre personnel.
Je ne suis pas sûr si certains d'entre vous ont déjà assisté à des séances d'un comité, mais nous serons heureux de commencer avec vos déclarations préliminaires; nous passerons ensuite à diverses rondes de questions que les membres vous poseront.
Je pense que je vais lancer l'invitation à M. Dale; nous continuerons à partir de là.
Monsieur Raymond.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Donald Raymond et je suis vice-président principal des placements sur les marchés publics à l'Office d'investissement du RPC. Je suis accompagné de mon collègue, M. Dale, vice-président principal des communications et des relations avec les intéressés.
Je vous remercie de nous donner l'occasion d'entretenir le comité du projet de loi C-300.
L'Office d'investissement du RPC a été créé en 1997 par les gouvernements fédéral et provinciaux, dans la foulée des réformes globales du RPC qui ont eu lieu au milieu des années 1990. Ces réformes ont été mises en oeuvre à la suite de vastes consultations publiques menées auprès d'entreprises, de syndicats, d'organisations de personnes âgées et de Canadiens d'un océan à l'autre.
Le but des décideurs fédéraux et provinciaux était de créer un organisme de gestion de placements professionnel et indépendant, qui soit responsable devant les gouvernements sans toutefois avoir un lien de dépendance avec eux, pour investir les cotisations au RPC qui ne sont pas nécessaires au versement des prestations actuelles.
L'une des principales préoccupations soulevées par les Canadiens en 1997 — et qui persiste encore aujourd'hui —, c'est l'ingérence possible des gouvernements dans la prise des décisions de placement relatives au fonds du RPC. Notre indépendance, établie dans la Loi sur l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada, répondait à ces préoccupations et a contribué à notre succès. Nous avons pour objectif à long terme de contribuer à la solidité financière du RPC, sans doute l'un des plus importants programmes sociaux au Canada, et d'aider à soutenir la viabilité des prestations de retraite futures de 17 millions de cotisants et de bénéficiaires canadiens.
Nous sommes tenus à une reddition de comptes stricte auprès des ministres des Finances fédéral et provinciaux; toutefois, les artisans des réformes de 1996 et 1997 ont incorporé des mesures de protection importantes au fonds du CPP et à l'Office d'investissement du RPC. Par exemple, l'actif du fonds de la RPC est séparé des actifs du gouvernement et est financé directement par les employeurs et les employés, et non par les contribuables.
Le mandat de l'Office d'investissement du RPC, prévu par la loi, est simple et il constitue le fondement de toutes ses activités: maximiser le taux de rendement des placements sans prendre de risque indu de perte. En vertu des dispositions de la loi, nous ne pouvons participer à aucune autre activité. Pour accomplir ce mandat bien ciblé, nous avons joué un rôle de leader dans l'élaboration et la mise en oeuvre d'une politique d'investissement responsable. Cette politique décrit la manière dont nous intégrons les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance, appelés les facteurs ESG, à notre méthode de placement, y compris dans les sociétés canadiennes qui participent aux industries d'extraction.
Comme je vous l'expliquerai dans quelques instants, les efforts proactifs de l'Office d'investissement du RPC vont dans le même sens que le projet de loi C-300 et ils rendent inutile son inclusion dans les dispositions du projet de loi. Par ailleurs, le projet de loi stipule que les ministres pourront intervenir dans les décisions prises par l'Office d'investissement du RPC en matière de placement. Une telle disposition est contraire aux intentions des politiques publiques qui faisaient partie des réformes fédérales et provinciales du RPC adoptées en 1996 et 1997. De plus, compte tenu des dispositions de la loi, le projet de loi ne peut pas entrer en vigueur sans le consentement des gouvernements provinciaux.
Nous demandons donc respectueusement au comité d'amender le projet de loi C-300 afin de supprimer la mention de l'Office d'investissement du RPC, plus précisément celle concernant l'intervention gouvernementale auprès de l'Office.
En ce qui a trait à notre approche en matière d'investissement responsable, il est important de comprendre que l'horizon de placement du fonds du RPC est anormalement long, puisque l'actif est investi pour des décennies et des générations à venir. Nous n'évaluons pas nos progrès par période de trois mois, comme le font les investisseurs, mais plutôt par période de 10 ou de 25 ans. Dans le cadre de notre politique d'investissement responsable, il convient d'être un investisseur patient à long terme, car les facteurs ESG ont tendance à évoluer sur de longues périodes.
En outre, afin de tenir notre promesse d'aider à soutenir la viabilité du RPC, nous investissons dans plus de 2 900 sociétés ouvertes partout dans le monde, dont plus de 600 sont canadiennes. Environ 400 de ces sociétés participent aux industries d'extraction. En tant qu'investisseur et propriétaire à long terme, nous pensons que le comportement responsable de ces sociétés à l'égard des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance peut avoir une influence favorable sur leur rendement financier à long terme et, par conséquent, sur le rendement de nos placements.
Conformément à notre mandat, nous considérons les facteurs ESG uniquement du point de vue du risque et du rendement relativement aux placements. Pour l'expliquer simplement, il est dans l'intérêt du fonds du RPC que les sociétés dans lesquelles nous investissons respectent des normes rigoureuses en matière de rendement et d'information relativement aux facteurs ESG. Deux documents importants, qui sont devenus de puissants agents de changement — non seulement pour nous, mais aussi pour les investisseurs institutionnels dans le monde entier —, orientent la façon dont nous abordons les facteurs ESG.
Le premier document est publié par les Nations Unies et s'intitule Principes pour l'investissement responsable. Nous avons participé à l'élaboration de ces principes et nous avons compté parmi les premiers signataires de cet accord novateur, en 2006. J'ai eu le privilège de représenter l'Office d'investissement du RPC et j'étais le seul investisseur canadien à participer à l'élaboration de ce projet d'envergure. Je peux vous dire aujourd'hui qu'il y a plus de 500 signataires de ces principes, ce qui représente un actif sous gestion de plus de 18 billions de dollars. Comme notre propre politique d'investissement responsable, les principes des Nations Unies stipulent qu'une communication et une gestion efficaces relativement aux facteurs ESG peuvent avoir des conséquences positives sur le rendement financier à long terme des placements.
Les principes des Nations Unies sont mis en oeuvre grâce à une approche axée sur la collaboration et coordonnée par le PRI Engagement Clearinghouse des Nations Unies, où nous travaillons avec d'autres fonds mondiaux pour intervenir auprès des sociétés au sujet des facteurs ESG. En janvier 2009, ce groupe a écrit à 130 sociétés qui s'étaient engagées volontairement à respecter les normes de présentation d'information sur les droits de la personne, le travail, l'environnement et la lutte contre la corruption, dans le cadre du Pacte mondial des Nations Unies.
La politique globale de l'Office d'investissement du RPC est antérieure aux principes des Nations Unies, mais elle y est équivalente. Encadrée par notre mandat, notre politique décrit clairement la façon dont nous tenons compte des importants facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans nos placements. Un exemplaire de la politique a été remis au comité.
La mise en oeuvre de notre politique d'investissement responsable prend plusieurs formes, y compris celle d'activités qui traitent de manière proactive des questions abordées dans le projet de loi C-300. La première activité est l'engagement. L'engagement consiste à communiquer avec la haute direction et les membres du conseil d'administration des sociétés dans lesquelles nous investissons, de même qu'avec des organismes de réglementation, des associations industrielles et d'autres intervenants.
Nos activités liées à l'engagement direct sont très ciblées. La plupart des sociétés que nous choisissons sont canadiennes. Nous nous concentrons sur trois secteurs: les changements climatiques, la rémunération des cadres supérieurs et les industries d'extraction — les sociétés pétrolières, gazières et minières. Nous exigeons une présentation d'information et une transparence accrues de la part de ces sociétés. La présentation d'information permet à tous les investisseurs de voir et de comprendre le risque potentiel que présentent les facteurs ESG. Pour aborder ces risques, il faut d'abord les divulguer; nous encourageons aussi les sociétés à adopter des pratiques exemplaires dans la gestion des facteurs ESG afin d'améliorer leur rendement financier.
L'année dernière, nous sommes intervenus auprès de sociétés canadiennes et internationales qui exercent leurs activités dans des pays à risque élevé, y compris en Birmanie, en République démocratique du Congo et au Guatemala, afin d'encourager une plus grande transparence et de meilleures stratégies de gestion du risque. Nous tenons à souligner qu'il s'agit d'une initiative à nous, menée de manière proactive dans l'intérêt du fonds du RPC. Il ne s'agit pas d'une mesure prise pour satisfaire une exigence du gouvernement ou pour répondre à une plainte particulière déposée par un tiers.
Comme vous le savez, influer sur le comportement des entreprises prend du temps. L'engagement est une stratégie à long terme, ce qui cadre parfaitement avec la façon dont nous abordons les placements.
Parallèlement à nos processus d'engagement, nous encourageons le secteur des placements à produire des recherches et des analyses plus approfondies sur les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. Les recherches des courtiers en valeurs mobilières et d'autres chercheurs aident tous les investisseurs à intégrer les facteurs ESG pertinents à leurs décisions de placement.
Notre politique d'investissement responsable guide aussi la façon dont nous exerçons notre droit de vote sur les questions qui touchent les actionnaires, par l'intermédiaire de nos principes et directives de vote par procuration. Le vote par procuration des grands investisseurs est un moyen très efficace d'améliorer la présentation d'information, la transparence et le comportement sur le plan des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance.
En tant que propriétaires, nous votons sur les propositions soumises lors des assemblées annuelles et extraordinaires de sociétés ouvertes. Le vote par procuration nous permet d'intervenir auprès de toutes les sociétés ouvertes de notre portefeuille. Au cours de la période de vote par procuration de 2009, nous avons participé à plus de 3 000 assemblées d'actionnaires, dont 555 qui ont eu lieu ici au Canada. Ce nombre comprend des sociétés pétrolières, gazières et minières du Canada et de partout dans le monde.
Nous avons voté sur près de 18 000 points. Dans 15 p. 100 des cas, nous avons voté contre la direction. En outre, nous rendons ces résultats publics. Un sommaire de nos votes par procuration est présenté dans le rapport sur l'investissement responsable de 2009, et les résultats de tous les votes par procuration sont affichés sur notre site Web.
Nous sommes un investisseur respecté et actif à l'échelle mondiale; pour cette raison, nos actions sont étroitement surveillées et notre opinion est prise en compte, aussi bien par les sociétés dans lesquelles nous investissons que par l'ensemble du secteur des placements. Nous travaillons également avec d'autres investisseurs, et notre participation à l'Initiative pour la transparence dans les industries extractives est un exemple pertinent de notre approche axée sur la collaboration. L'ITIE regroupe des sociétés, des investisseurs, des organisations non gouvernementales et des gouvernements, dont celui du Canada. Elle cible les sociétés pétrolières, gazières et minières, précisément parce que celles-ci doivent tenir compte de divers facteurs ESG et les gérer de manière efficace pour assurer leur rendement financier à long terme.
Permettez-moi de vous expliquer en quoi consiste l'initiative. Grâce aux efforts concertés des signataires de l'ITIE, plus de 40 des plus importantes sociétés pétrolières, gazières et minières du monde encouragent maintenant une meilleure transparence dans plus de 29 pays candidats. Les signataires s'engagent à communiquer les paiements d'impôt et de redevances des sociétés, ainsi que les revenus des gouvernements provenant des sociétés pétrolières, gazières et minières. Cette pratique est cruciale pour faire la lumière sur les sources de corruption dans ces pays.
Notre approche proactive et notre rôle de leader dans le secteur ont été reconnus à l'échelle internationale. La Social Investment Organization du Canada a cité notre politique d'investissement responsable et l'approche d'engagement qui s'y rapporte comme des exemples positifs d'activités d'investissement responsable. Les principes des Nations Unies citent en exemple notre présentation de l'information sur les votes par procuration. En outre, notre politique d'investissement responsable et nos principes et directives de vote par procuration ont été nommés des pratiques exemplaires mondiales.
En résumé, l'Office d'investissement du RPC a été créé par les gouvernements fédéral et provinciaux pour exercer des activités de placement sans lien de dépendance avec les gouvernements. Notre mandat est de faire des placements et d'obtenir des rendements afin d'aider à soutenir la viabilité des prestations de retraite futures de 17 millions de cotisants et de bénéficiaires canadiens. Les dispositions de notre loi stipulent qu'elle ne peut pas être modifiée sans le consentement des gouvernements fédéral et provinciaux.
En outre, grâce à notre politique d'investissement responsable, nous avons été reconnus comme un chef de file mondial sur le plan du traitement proactif des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. Pour ces raisons, nous suggérons respectueusement que le projet de loi C-300 soit amendé pour supprimer la mention de l'Office d'investissement du RPC et celle concernant l'intervention gouvernementale.
Nous sommes heureux d'avoir eu l'occasion de nous présenter devant le comité et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour discuter de ce sujet important.
Je m'appelle Tony Andrews. Je suis directeur exécutif de l'Association canadienne des prospecteurs et des entrepreneurs. Avant de se joindre à l'ACPE, ma collègue, Bernarda Elizalda, a passé quelques années à conseiller les sociétés minières sur la manière d'instaurer des pratiques de RSE en Amérique centrale et en Amérique du Sud; elle apporte donc un point de vue intéressant à la discussion d'aujourd'hui.
L'ACPE est une association nationale axée sur l'exploration minière. Nos 7 000 membres travaillent partout dans le monde; un grand nombre d'entre eux sont de petites sociétés d'exploration minière. Le Canada est chef de file mondial sur le plan du nombre de petites sociétés qui s'y trouvent et de la proportion du total des fonds que celles-ci amassent et investissent dans l'exploration et l'exploitation, et ce, partout dans le monde. Ce sont de petites sociétés qui dépendent des marchés financiers pour amasser des fonds. Normalement, elles n'empruntent pas de capitaux aux banques ou aux institutions financières. En outre, nos membres sont des chefs de file mondiaux dans les domaines des finances et de la technologie, ainsi que dans le nouveau domaine de la RSE. Or, nous commençons tout juste à comprendre le développement de la RSE; il y a beaucoup de travail à faire. Il s'agit d'un processus en évolution.
Je faisais partie du groupe consultatif de la table ronde nationale sur la RSE; un des membres de notre conseil d'administration y a aussi participé. L'association a appuyé publiquement le rapport présenté par le groupe consultatif, avec quelques commentaires et recommandations. Ce que l'ACPE cherche à faire, c'est de créer des pratiques directrices. Elle a lancé récemment une initiative intitulée e3 Plus. Il s'agit d'un cadre global, accessible en ligne, pour une exploration responsable; son nom renvoie à l'excellence dans trois domaines: la responsabilité sociale, la gérance de l'environnement, ainsi que la santé et la sécurité. Un de ses composants est axé sur l'information et l'éducation; il consiste en des principes, des lignes directrices et trois trousses à outils complètes. L'initiative a été lancée en mars 2009. Nous sommes aussi en train de créer un composant sur la responsabilité, qui contiendra des objectifs de rendement, des lignes directrices sur les rapports et un processus de vérification.
Nous croyons comprendre que, dans le cadre de ses travaux actuels, le comité vise deux choses: l'amélioration continue des pratiques de RSE et la responsabilisation des sociétés canadiennes ayant des activités dans les pays en développement. Selon nous, la manière la plus efficace d'atteindre ces objectifs, c'est en employant une approche systématique et intégrée constituée d'une combinaison de mécanismes volontaires et obligatoires; cela ressemble essentiellement aux recommandations contenues dans le rapport du comité consultatif de la table ronde nationale sur la RSE et à la stratégie en matière de RSE présentée récemment par le gouvernement du Canada. À notre avis, la mesure législative proposée sous la forme du projet de loi C-300 n'aidera pas à atteindre les objectifs relatifs à l'amélioration des pratiques de RSE, ni ceux portant sur la responsabilisation. En fait, elle risque plutôt de nuire considérablement à l'industrie canadienne.
Je vais faire trois choses au cours des prochaines minutes: d'abord, je vais passer en revue certaines réalités principales qui définissent actuellement la RSE; ensuite, je vais les comparer à l'approche proposée dans le projet de loi C-300; puis, je vais décrire ce que nous considérons comme des occasions importantes de faire des progrès sur le plan de la responsabilisation et du rendement en matière de RSE.
Je vais vous présenter quelques réalités actuelles relatives à la RSE. Au cours des 15 dernières années, le public a modifié ses priorités: elles sont passées de l'environnement aux questions sociales; tout récemment, elles touchent particulièrement les droits de la personne et les pratiques éthiques. L'industrie minière a accompli des progrès importants sur le plan des questions sociales et environnementales. Les questions sociales sont beaucoup plus difficiles à résoudre, étant donné qu'elles tournent autour des relations humaines et du comportement humain, et qu'elles sont compliquées davantage par des cultures, des valeurs, des croyances, des perceptions et des besoins — souvent contradictoires — divers.
Les questions environnementales peuvent être gérées par un régime de réglementation normatif. Or, il n'en est pas de même pour la responsabilité sociale des entreprises. Toutes normes et toutes lignes directrices doivent être assez complètes pour satisfaire les attentes du public à l'égard du comportement des entreprises. En même temps, elles doivent être adaptables à la taille et à la nature de la société et du projet, ainsi qu'aux étapes de l'exploration ou de l'exploitation.
Les normes doivent être flexibles pour permettre de tenir compte de la grande variété des situations géographiques, culturelles et environnementales dans les endroits où les projets ont lieu. La réalité, c'est que ce qui fonctionnera dans un endroit ne fonctionnera pas nécessairement dans un autre; alors, l'application réussie de la RSE sera fondée sur l'expérience et le jugement des gestionnaires de l'industrie sur place.
Quel est notre degré de compréhension de la RSE? Eh bien, il s'agit d'un concept relativement nouveau que nous sommes encore en train d'assimiler. Il fait intervenir des attentes qui évoluent rapidement et de l'incertitude quant à la façon de répondre à ces attentes. Jusqu'à récemment, il n'y avait pas de lignes directrices internationales complètes qui tentaient de définir ce qu'est la RSE pour le secteur de l'exploration minière et ce qu'elle devrait faire à l'égard de ces attentes. E3 Plus, que j'ai décrit auparavant, est une tentative pour réaliser cela.
La plupart des entreprises essaient d'appliquer la RSE. Elles croient appliquer la RSE en utilisant le bon sens et, souvent, des approches maison, mais elles n'ont rien avec quoi comparer leurs pratiques. Par conséquent, il y a une grande variabilité dans les méthodes et les approches qu'elles utilisent à cet égard. C'est ici qu'entrent en jeu les lignes directrices et l'appui pour nos membres.
Cela ne concerne pas seulement les droits de la personne. Les droits de la personne sont un élément central de la question de la RSE, mais cette dernière ne s'arrête pas uniquement aux droits de la personne. La RSE fait intervenir les grandes dimensions de la responsabilité sociale, de la gérance de l'environnement et de la santé et sécurité, toutes comprises dans les règlements du gouvernement, dans la bonne pratique industrielle et dans les conventions et les instruments internationaux. Il s'agit d'un domaine très vaste et très complexe.
Combien de plaintes ont été formulées à l'endroit des entreprises minières canadiennes? Des travaux de recherches effectués cette année par le Canadian Centre for the Study of Resource Conflict ont révélé qu'au cours des 10 dernières années, on a recensé un total de 171 infractions présumées à la RSE par des entreprises minières. Ces plaintes proviennent de partout dans le monde et de toutes les sources. Environ 50 p. 100 de ces infractions présumées ont été signalées par des ONG de défense. Des 171 infractions présumées, 56 concernaient des entreprises canadiennes. Cela représente une moyenne de moins de six infractions présumées par année.
Depuis la création de son poste, le conseiller-médiateur de l’observation de la SFI, le CAO, a reçu et traité un total de 110 plaintes. De ce nombre, il y en avait huit qui touchaient quatre entreprises minières. De ces dernières, une était canadienne et une autre était partiellement canadienne.
Je vais simplement ajouter qu'en juin 2008, juste avant la crise financière mondiale, il y avait environ 1 000 entreprises canadiennes travaillant dans plus de 100 pays sur 5 000 projets à l'extérieur du Canada. Je pense que ces chiffres permettent de mettre cette situation en contexte.
Compte tenu de ces faits, le projet de loi C-300 constitue-t-il un système pratique et efficace pour imposer la responsabilisation? Il s'agit d'un système d'enquête punitif fondé sur l'imposition d'un blâme et de sanctions. Il dépendra du processus difficile de recueillir des preuves dans des pays étrangers. Il essayera de faire la distinction entre le bien et le mal.
Comment peut-on rationaliser cette approche dans une situation qui est aussi fluide et aussi variable et qui est compliquée par des cultures, des croyances, des perceptions et des besoins différents? Comment les entreprises seront-elles jugées par rapport à un ensemble de lignes directrices qui devront être échelonnables et flexibles? Comment les entreprises sauront-elles où sont les limites de l'observation? Comment le ministre établira-t-il s'il y a eu infraction? Pourquoi adopter une telle approche négative et à haut risque dans une situation où l'information, l'éducation et l'assistance font si cruellement défaut et qui fait intervenir si peu de cas où on peut démontrer une intention de blesser ou de tuer? Pourquoi adopter une telle approche punitive avant d'établir clairement les définitions fondamentales, l'information de base et des attentes claires?
Ce sont des problèmes fondamentaux qui ne peuvent être corrigés par une nouvelle rédaction créative du projet de loi C-300 ou par des amendements. Il y a d'autres questions légales importantes liées au projet de loi que mon collègue, M. Wisner, décrira, j'en suis sûr.
Les entreprises minières canadiennes sont déjà tenues de rendre des comptes de nombreuses manières différentes et à de nombreux niveaux différents, mais nous croyons qu'il y a certains domaines où on pourrait améliorer la reddition de comptes. Le premier de ces domaines, et le plus important, c'est accroître le renforcement des capacités de gouvernance dans les pays d'accueil. Il s'agit d'un domaine hautement important. C'est le fondement de la responsabilisation pour les entreprises canadiennes et il repose entre les mains du gouvernement du pays d'accueil où nous travaillons. Alors, il faudrait concentrer de l'attention et des ressources au renforcement des capacités de gouvernance dans les pays où la gouvernance est un problème déterminant.
Le deuxième domaine que nous devrions examiner, à mon avis, est l'accès au capital et le renforcement des exigences en matière de réglementation des valeurs mobilières autour de la notion d'importance. Cela est lié à la divulgation et à la présentation de rapports sur les questions de RSE aux enquêteurs et au public.
Dans le cas de l'industrie, des améliorations importantes doivent être apportées dans les domaines de la diligence raisonnable et de l'évaluation des risques, ainsi que dans le domaine de l'engagement dans la communauté. C'est notre propre évaluation. Cela contribuera à la reddition de comptes comme des mécanismes de prévention.
Enfin, le fait d'appliquer les éléments de base de la reddition de comptes à l'orientation donnée par la bonne pratique industrielle est très sensé à nos yeux. Cela comprend des mesures du rendement, des exigences en matière de divulgation, une fonction d'ombudsman pour s'occuper des plaintes et une forme de vérification. Pour nous, l'avantage de ce genre d'approche, c'est qu'elle est centrée sur la prévention, qu'elle aide les entreprises à faire mieux, qu'elle a une portée étendue de sorte qu'elle s'appliquera à une grande partie de l'industrie et qu'elle est franche et intégrée dans les pratiques entrepreneuriales.
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Français]
Membres du comité, c'est un grand honneur de comparaître devant vous aujourd'hui pour parler des problèmes juridiques posés par le projet de loi C-300.
[Traduction]
Les questions de droit international et d'équité dont je vais discuter aujourd'hui sont décrites en plus grands détails dans le mémoire que nous avons préparé à la demande de l'ACPE et qui sera distribué aux membres du comité plus tard cette semaine.
De mon point de vue d'avocat spécialisé en droit international, le projet de loi C-300 fera plus de tort que de bien aux causes louables qu'il cherche à promouvoir. Et cela est dû au fait qu'il comporte trois lacunes juridiques fondamentales qui ne peuvent être corrigées par des amendements mineurs.
Premièrement, ce projet de loi paralysera la capacité du gouvernement canadien de promouvoir les valeurs canadiennes à l'étranger parce que cela sera perçu par les pays en voie de développement comme une ingérence dans des domaines qui relèvent de leur compétence exclusive en vertu du droit international.
Deuxièmement, les obligations prévues dans le projet de loi sont si vagues qu'elles créeront un degré élevé d'incertitude au plan juridique pour les entreprises minières, pétrolières et gazières canadiennes.
Troisièmement, le projet de loi ne prévoit aucune garantie même pour un degré minimal d'équité en matière de procédure pour les entreprises qui seront accusées d'actes répréhensibles. C'est un problème qui, comme je vais l'expliquer, est inhérent à un projet de loi d'initiative parlementaire, qui ne peut pas accorder des fonds pour fournir le degré nécessaire d'équité en matière de procédure. Cette incertitude et l'absence d'équité en matière de procédure dissuaderont même les entreprises canadiennes les plus responsables d'investir à l'étranger. Cette dissuasion à l'égard des investissements à l'étranger nuit non seulement à l'économie canadienne, mais nuit également à l'économie des pays en voie de développement.
Laissez-moi commencer par expliquer comment le projet de loi fait en sorte qu'il sera plus difficile pour le gouvernement canadien de promouvoir les valeurs canadiennes à l'étranger.
Il est important de comprendre que la question ici n'est pas une question de normes volontaires ou de normes obligatoires. Les normes de RSE volontaires que l'ACPE et d'autres groupes ont élaborées sont prévues pour compléter, et non pas remplacer, les normes légales obligatoires. La question, c'est plutôt de savoir qui décidera quelles devraient être les exigences légales obligatoires. Cette décision devrait-elle appartenir aux gouvernements des États où les activités se déroulent ou devrait-elle appartenir à un gouvernement situé à des milliers de milles de distance?
L'hypothèse sous-jacente du projet de loi C-300, c'est que dans tous les pays en voie de développement, tels qu'ils sont définis dans le projet de loi, il existe un vide juridique en ce qui concerne la réglementation en matière d'environnement, de main-d'oeuvre ou de droits de la personne. Cette supposition est tout simplement incorrecte. Comme vous le verrez dans mon mémoire, toutes les autorités compétentes avec lesquelles traitent les entreprises minières canadiennes ont des lois et des règlements détaillés obligeant les entreprises à rendre des comptes dans ces domaines, des lois qui sont habituellement rédigées avec l'aide des agences de l'ONU ou des institutions financières internationales.
Ce que les défenseurs du projet de loi C-300 font, c'est vraiment de demander au gouvernement du Canada de porter un jugement sur la façon dont d'autres pays mettent en application leurs propres lois. En même temps, le projet de loi C-300 ne fait pas de distinction entre les gouvernements qui ont la capacité de mettre en application leurs propres lois et ceux qui n'en ont pas la capacité. Ainsi, par exemple, dans les témoignages que j'ai entendus devant le présent comité, les disputes dans des démocraties comme le Chili et l'Argentine ont été regroupées avec des disputes dans des zones de conflit qui sortent d'une guerre civile.
Nous sommes tous d'accord pour dire que certains pays en voie de développement pourraient profiter d'une certaine aide pour bâtir leur capacité de mise en application des lois, ce que le gouvernement canadien a accepté de leur fournir. Toutefois, la question est de savoir si nous devrions faire abstraction des décisions en matière de mise en application de la loi prises par des pays en voie de développement simplement à cause du fait qu'une entreprise qui est active sur leur territoire est de propriété canadienne. À quelques rares exceptions près, le Parlement du Canada et ses organismes gouvernementaux ne peuvent exercer de compétence à l'extérieur du territoire canadien. Ces limites découlent des fondements mêmes de l'ordre juridique international, qui est le respect de la souveraineté étatique.
À d'autres occasions, j'ai entendu M. McKay laisser entendre que le projet de loi C-300 évite toute question de compétence extraterritoriale parce qu'il ne fait qu'imposer des conditions sur l'aide du gouvernement canadien. Si c'était le cas, le projet de loi serait redondant, parce que, comme vous l'avez entendu ce matin, le RPC et d'autres organismes gouvernementaux fixent des conditions et filtrent l'aide qu'ils fournissent. Mais l'essentiel de ce projet de loi, c'est qu'il fixe des normes et exige des enquêtes portant sur des entreprises qui pourraient ne pas recevoir un sou d'aide gouvernementale. De plus, ces entreprises ne répondent même pas à la définition d'une entreprise canadienne en vertu du droit international.
Le projet de loi C-300 viole le droit international exactement de la même manière que la loi américaine, que le Canada a dénoncée, qui visait à réglementer les filiales canadiennes d'entreprises américaines qui commerçaient avec Cuba. Nous avons même adopté des lois, en vertu de la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, pour empêcher ces entreprises de se conformer à ces directives.
Imaginez, si vous voulez, ce qui arriverait si le ministre des Affaires étrangères du Brésil ou son représentant venait au Canada un jour, commençait à entendre des témoins à Sudbury, par exemple, et ensuite, faisait pression sur un actionnaire brésilien d'une entreprise minière canadienne pour mettre fin à ses activités parce qu'elle ne respecte pas les vues de ce ministre concernant les normes environnementales appropriées. Je ne pense pas que les Canadiens considéreraient cela comme un exercice approprié de la compétence du Brésil.
Cette transgression du droit international rendra beaucoup plus difficile la promotion des droits de la personne et de l'environnement par nos propres diplomates. Il nous sera difficile de nous faire entendre si nous sommes perçus comme étant sélectifs dans notre propre façon d'appliquer le droit international.
Laissez-moi parler de certains des problèmes précis liés à la façon dont ce projet de loi impose des règles aux entreprises minières, pétrolières ou gazières canadiennes. Le projet de loi C-300 n'établit pas, dans les faits, ce que seront ces règles. Il ordonne plutôt aux ministres d'élaborer des normes fondées sur deux types de documents.
Premièrement, vous avez des lignes directrices volontaires, comprenant plus de 260 pages, qui couvrent presque tous les aspects de la conduite d'une entreprise. Ce sont certainement des documents précieux, mais ils n'ont pas été rédigés avec l'intention d'en faire des règles juridiques obligatoires. Ils sont censées être des lignes directrices pour aider la gestion à prendre de meilleures décisions d'affaires. Cela veut dire qu'elles ne sont pas rédigées en conformité avec les conventions législatives et n'ont pas la clarté et la spécificité que vous retrouvez normalement dans la loi.
Pour vous donner un exemple, c'est comme la différence qui existe entre un manuel sur la conduite sécuritaire publié par une école de conduite et le Code de la route. Le manuel sur la conduite sécuritaire est très utile; c'est un document important qui aide les gens à être de meilleurs conducteurs, mais il ne comporte pas les règles et les définitions claires que vous retrouvez habituellement lorsque des sanctions légales sont appliquées.
Le deuxième ensemble de documents incorporé dans le projet de loi est constitué de conventions internationales sur les droits de la personne dont le Canada est partie. Ces règles sont effectivement des règles juridiques obligatoires, mais elles sont conçues pour être obligatoires pour les États, et non pas pour les particuliers. En conséquence, elles n'ont pas de signification claire lorsqu'elles s'appliquent à des entreprises. C'est comme si, du jour au lendemain, l'application de la Charte canadienne des droits et libertés était étendue des gouvernements aux particuliers. Si cela arrivait, il y aurait beaucoup d'incertitude quant à la signification exacte des obligations qui sont imposées.
Lorsque vous prenez des normes qui ont été conçues à une fin et que vous ne faites que les transposer dans un autre domaine, vous soulevez toute une série de questions sur leur signification. Par conséquent, ce projet de loi fait de toutes les entreprises minières, pétrolières ou gazières canadiennes qui sont actives dans les pays en voie de développement, peu importe avec quel sens des responsabilités elles sont dirigées, une cible pour des enquêtes coûteuses et imprévisibles.
Enfin, comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire et qu'il ne peut entraîner la création d'un nouveau bureau, le projet de loi ne comporte pas de garantie d'équité en matière de procédure qui doit accompagner toute enquête ministérielle concernant un acte répréhensible présumé. Par exemple, dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, nous avons créé la Commission des droits de la personne pour examiner les plaintes, et ensuite, un Tribunal canadien des droits de la personne indépendant pour tenir des audiences afin de déterminer si les normes ont été violées. Le projet de loi C-300 reste absolument muet sur tous ces éléments de l'équité en matière de procédure, parce que le fait de les inclure dans le projet de loi le rendrait irrecevable.
Ceci dit, je note que même si ce genre de tribunal administratif était créé, cela continuerait d'exposer les entreprises canadiennes aux stigmates des enquêtes gouvernementales et aux décisions de bonne foi prises après coup par les agences et les diplomates canadiens. Cela est complètement différent des organismes non gouvernementaux qui ont été recommandés dans le rapport du groupe consultatif suivant les Tables rondes nationales sur la responsabilité sociale des entreprises.
Nous avons déjà eu une certaine expérience avec ce genre de diplomatie des demandeurs, et cela n'a pas très bien fonctionné. Une entreprise canadienne, Talisman, a été poursuivie par les États-Unis pour le seul fait d'avoir payé des redevances au gouvernement du Soudan et d'avoir amélioré l'infrastructure. Après un procès de plusieurs années, la plainte a été rejetée par le tribunal par manque de preuves. Mais il était trop tard, les dommages étaient déjà faits. Après avoir subi la publicité défavorable liée à cette plainte, Talisman s'est départie de ses intérêts. Le rejet ultime de la plainte est passé pratiquement inaperçu dans les médias et les nouveaux propriétaires n'ont pas fait grand-chose pour faire avancer la cause de la responsabilité sociale des entreprises.
Le projet de loi C-300 entraîne des risques très semblables. Effectivement, des témoins qui ont comparu devant le présent comité ont déjà laissé entendre que simplement en payant des redevances à de mauvais gouvernements ou en construisant des routes qui peuvent être utilisées par les forces gouvernementales, les entreprises canadiennes commettent des violations aux droits de la personne à l'étranger. Si c'est là une norme à appliquer, aucune entreprise canadienne ne peut éviter de faire l'objet d'une enquête et cela signifie que de nombreux projets utiles n'iront pas de l'avant. Ce n'est pas mauvais uniquement pour le Canada, mais c'est également mauvais pour les pays en voie de développement.
Merci.
[Français]
Je remercie également nos invités.
Monsieur Raymond, le comité prend note de vos recommandations, dont celle consistant à vous retirer, en ce qui a trait au projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement. J'ai lu votre rapport 2009, qui traite de l'investissement responsable. Dans vos observations préliminaires, vous nous dites aujourd'hui que vous êtes intervenu l'année dernière au Guatemala, en Birmanie et en République démocratique du Congo, notamment. Vous utilisez les termes suivants: « [...] afin d'encourager une plus grande transparence et de meilleures stratégies de gestion du risque. »
Monsieur Raymond, pouvez-vous soumettre au comité une copie de ces lettres ainsi que les réponses de ces compagnies, le cas échéant, et nous dire si vous avez fait un suivi auprès de ces compagnies minières? J'aimerais savoir qui fait ce suivi, de quelle façon il est fait, si ces compagnies ont fait des progrès et, dans le cas contraire, en quoi consistera pour vous l'étape suivante?
[Traduction]
Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration liminaire, je pense que l'aspect le plus important à signaler à propos de nos pratiques d'engagement, c'est qu'elles s'inscrivent dans le cadre d'une stratégie à long terme. Nous n'obtenons pas nécessairement des résultats immédiats. Au sein de mon secteur de l'Office d'investissement du RPC, il y a une équipe responsable de l'engagement qui assure un suivi auprès des entreprises et qui veille à ce qu'elles se soumettent progressivement à des obligations plus poussées en matière de divulgation afin que tous les investisseurs puissent observer leurs pratiques.
Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose pour répondre à la question du membre. Sur notre site Web, il vous est possible de voir comment nous avons voté sur les propositions des actionnaires. Tous ces renseignements se trouvent là. Je vais répéter l'argument que mon collègue a avancé. À nous seuls, nous n'avons peut-être pas une influence considérable, mais l'une des mesures que nous prenons consiste à nous allier à d'autres investisseurs. Lorsque les 10 principaux actionnaires d'une entreprise cognent à sa porte pour lui demander de communiquer de plus amples renseignements, les choses ont tendance à bouger et les problèmes ont tendance à se régler.
Je veux simplement poursuivre cette discussion. D'abord, je vais vous poser quelques questions.
Consentez-vous à présenter au comité les lettres que vous avez envoyées aux entreprises et les réponses que vous avez reçues d'elles, le cas échéant?
M. Dale vient de signaler le site Web. Sur celui-ci, je peux consulter tous vos votes et d'autres choses de ce genre, mais cela ne prouve vraiment rien. Vous votez contre la nomination de certaines personnes. Vous mentionnez beaucoup de choses mais, en réalité, vous votez contre des décisions qui ont des répercussions uniquement sur les entreprises elles-mêmes. Nous parlons de l'environnement, des aspects sociaux et de la bonne gouvernance. C'est l'idée derrière le projet de loi C-300, et j'aimerais obtenir des réponses ayant trait à celui-ci.
Vous affirmez que vous surveillez ce qui s'est passé là-bas, mais comment y parvenez-vous? Si une entreprise au Guatemala... Il n'y a pas tellement d'entreprises là-bas. Savez-vous quelle entreprise vous envisagez? Que faites-vous au Guatemala?
Je veux obtenir de vraies réponses à ce sujet; je ne veux pas qu'on se contente de me renvoyer à un site Web. Un site Web ne me suffit pas.
Monsieur Patry, demandez-vous qu'ils nous remettent les lettres qu'ils ont envoyées à ces entreprises, de les divulguer et maintenant...
Oui, bien sûr. Je veux obtenir les lettres. Ils peuvent les divulguer. Ces renseignements sont du domaine public.
D'accord, merci. Je serais heureux de répondre à la question.
Je pense que nous entamons un dialogue avec les entreprises de trois façons. Nous avons parlé des votes par procuration. Je pense que notre moyen le plus persuasif consiste à former des coalitions avec d'autres investisseurs. De plus, nous dialoguons directement avec les entreprises. En ce qui concerne les entreprises minières, si un dialogue est en cours avec elles, nous ne divulguons pas la nature de cette conversation. Mais si les choses ne se déroulent pas comme nous le voulons, nous nous réservons le droit de le faire. Dans un certain nombre de cas, nous avons divulgué les lettres que nous avons échangées avec certaines entreprises minières canadiennes. Nous pourrions remettre celles-ci au comité.
J'adresse cette question à nos invités du RPC simplement dans le but de clarifier leur position. Vous opposeriez-vous à ce que les conclusions du ministre, comme l'indique l'article 4 de la loi, soient renvoyées à l'office d'investissement à titre de renseignements pertinents pour vos propres activités en matière de responsabilité sociale? Vous ne voudriez pas ignorer un rapport du ministre dont les conclusions sont claires.
Je peux comprendre la raison pour laquelle la formulation de l'article 10 pose un problème, mais j'essaie toujours de voir s'il n'y aurait pas une façon d'indiquer simplement un appel au bon sens qui sous-entendrait que, si le ministre découvrait qu'une ligne directrice a été transgressée de manière flagrante, comme la loi l'indique, on en tiendrait évidemment compte.
Merci, monsieur le président. Je serais heureux de répondre à cette question.
Évidemment, je ne pense pas que nous ferions abstraction de cette constatation, mais nous envisageons cela vraiment de deux manières.
Ce que nous espérions démontrer au comité ce matin, c'est que nous nous soucions des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. Ils sont intégrés dans notre processus de placement; nous le faisons pour des raisons d'investissement, et cela cadre avec notre mandat.
La mesure législative nous pose un problème parce qu'elle créerait un précédant qui donnerait à un ministre d'un gouvernement le pouvoir d'influencer la façon dont les décisions sont prises, ce qui va à l'encontre de l'orientation publique des réformes du RPC et de la façon dont nous sommes institués.
Je comprends cela.
Supposons que nous acceptons cet argument ou ce point de vue à propos de l'indépendance du RPC mais, précisément parce que vous avez déjà mentionné que vous preniez la responsabilité sociale de votre organisation très au sérieux, pourquoi auriez-vous une objection à ce que le ministre vous envoie simplement une copie d'un rapport et vous indique que c'est une chose dont vous devriez tenir compte — pas suivre à la lettre, mais tenir compte — lorsque vous prenez vos décisions? Pourquoi cela serait-il répréhensible?
Comme je l'ai dit, il y a un groupe de recherche indépendant dans mon secteur qui examine ces facteurs. Donc, dans la mesure où le rapport contient des renseignements que les membres du groupe trouvent pertinents sur le plan des investissements, je pense que nous accueillerions avec reconnaissance ces renseignements.
En outre, monsieur le président, nous utilisons toute une gamme de ressources. Comme Don l'a signalé, nous avons un groupe de recherche interne, nous faisons appel à des fournisseurs de service de recherche externes, et nous échangeons avec des groupes d'ONG. Nous nous servons de divers avis mais, comme je l'ai déjà dit, c'est simplement dans le but de juger de son profil risque-rendement.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Mesdames, messieurs, bonjour. Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
Vos témoignages me donnent à penser que la question de la responsabilité canadienne est traitée de façon plutôt aléatoire.
Monsieur Raymond, vous avez bien sûr été félicité relativement à vos politiques en matière d'investissement responsable. Toutefois, je crois que vous n'appliquez pas ces politiques depuis longtemps. S'il n'y avait pas eu toute cette question de l'investissement canadien en Birmanie, on n'aurait pas su que vous aviez adopté des politiques en matière d'investissement responsable.
Je suis ce dossier depuis plusieurs années. Or on n'a jamais su, avant les dernières années, que le Régime de pensions du Canada avait investi des fonds dans des compagnies minières canadiennes qui violaient systématiquement les droits de la personne. Il semble que vous ayez fait des avancées extraordinaires en amenant ces entreprises à porter attention aux droits de la personne. J'en suis vraiment étonnée.
Par ailleurs, je pense que vous avez une responsabilité envers ceux qui cotisent au Régime de pensions du Canada. Je suis extrêmement déçue de voir que vous axez votre responsabilité surtout sur la volonté de faire de l'argent.
Avez-vous fait des études pour déterminer jusqu'à quel point il pourrait être rentable pour les Canadiens d'investir dans un régime de pensions qui investirait à son tour dans des compagnies minières qui respectent l'environnement et les droits de la personne?
[Traduction]
Monsieur le président, je serai heureux de répondre à certaines des observations.
D'abord, l'Office d'investissement du RPC est une organisation relativement nouvelle. Quand je suis entré à son service, en 2001, il n'y avait que 12 employés. Le développement de nos capacités est survenu progressivement. Lorsque je suis entré en fonctions, l'office avait déjà une politique en matière d'investissement responsable, mais c'est parce que nous avons joué un rôle de premier plan à l'échelle nationale, et même à l'échelle internationale en travaillant avec l'ONU à l'élaboration des principes des Nations Unies, que nous sommes devenus un chef de file canadien en matière de politiques d'investissement responsable. Nous sommes très préoccupés par ces questions en grande partie parce que nous croyons que les entreprises qui se comportent bien du point de vue de l'environnement, de la société et de la gouvernance représentent en général de meilleurs investissements à long terme. Donc, de ce point de vue là, nos intérêts coïncident énormément avec ceux du projet de loi C-300.
Comme le membre l'a signalé, nous choisissons nos investissements en comparant leurs risques à leur rendement, et c'est ce qu'exige la Loi sur l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada. En fait, elle stipule très clairement que notre objectif vise à obtenir un taux de rendement maximal tout en évitant des risques de perte indus et qu'en outre, nous ne sommes pas autorisés à entreprendre d'autres activités contradictoires. Un des principes fondamentaux d'investissement stipule qu'en écartant des entreprises, ou autrement dit en éliminant certaines entreprises de son ensemble d'investissements possibles, soit on accroît le risque, soit on réduit le rendement. Dans cette optique, nous croyons qu'éliminer des entreprises est moins efficace que de dialoguer avec elles — en fait, bon nombre d'ONG et d'autres intervenants du milieu de l'investissement social seraient d'accord avec cette affirmation —, car lorsqu'on vend une entreprise ou ses actions, premièrement on les vend à une autre personne, donc, cela ne nuit nullement à l'entreprise et deuxièmement, on perd tout droit de parole auprès de l'entreprise.
[Français]
Merci.
Messieurs Andrews et Wisner, j'ai l'impression que vous n'êtes pas sur la même longueur d'onde. Monsieur Andrews, vous dites qu'il faut renforcer la capacité de gouvernance des pays hôtes, alors que vous, monsieur Wisner, dites qu'accroître cette capacité serait de l'ingérence de la part du Canada.
Monsieur Wisner, j'aurais aimé que vous nous remettiez votre présentation par écrit. En effet, ce que vous nous avez présenté était quand même assez technique.
Par ailleurs, vous nous dites que les pays où les compagnies canadiennes font des investissements ont des lois sur les droits de la personne et sur l'organisation du travail. J'ai l'impression que nous ne sommes absolument pas sur la même planète.
Tout d'abord, je vais essayer de répondre à votre question concernant la traduction. Je m'excuse. Il y a un texte écrit, mais on est en train de le traduire. On m'a informé qu'une copie serait distribuée aux membres du comité avant la fin de la semaine.
[Traduction]
Permettez-moi de me référer à mes notes.
Comme je l’ai mentionné clairement, je ne crois pas que ma déclaration et celle de M. Andrews se contredisent du tout. Nous nous entendons tous les deux pour dire que la capacité de gouvernance des pays hôtes peut être améliorée. Donc, nous sommes exactement sur la même longueur d’onde à ce propos.
Je n’ai pas laissé entendre que le fait d’aider des pays à appliquer leurs propres lois constituait, d’une manière ou d’une autre, une violation de leur souveraineté. Au contraire, j’encourage le gouvernement canadien à poursuivre cette politique qu’il a entrepris de mettre en oeuvre. Ce que j’essayais de dire, c’est que le projet de loi C-300 ne les aide pas vraiment à accroître leur capacité de gouvernance. Un projet de loi d’initiative parlementaire ne peut pas le faire, étant donné qu’il n’a pas la possibilité d’affecter des fonds. Ce que ce projet de loi C-300 tente d’accomplir, c’est d’instaurer des lois qui s’appliquent dans d’autres pays, et c’est une toute autre chose.
Pour ce qui est de vivre sur la même planète que tout le monde, dans ma déclaration, j’ai fait la distinction entre les lois et la mesure dans laquelle elles sont appliquées. En ce qui concerne les lois, je peux vous renvoyer à une enquête portant sur 32 États partout dans le monde; mon mémoire y fait allusion. Cette enquête passe en revue leurs lois, notamment celles de nombreux pays d’Afrique et de pays pauvres. Elle décrit en détail les lois, y compris celles qui visent l’environnement, le travail et d’autres normes qui s’appliquent à ces pays. Toutefois, comme je l’ai mentionné, il y a une différence entre les lois qui ont été adoptées et la mesure dans laquelle les représentants du gouvernement ont la capacité technique, politique et financière de les appliquer. Si c'est ce qui vous ennuie, la solution consiste à les aider à le faire.
Je veux faire une observation à propos des remarques que M. Rae a formulées plus tôt, selon lesquelles les personnes responsables du Régime de pensions du Canada pourraient tenir compte des dispositions du projet de loi lorsqu’elles prennent des décisions en matière d’investissement. Cela étant dit, je veux simplement souligner le fait que, si j’interprète bien ce que je lis, ce projet de loi n’émet pas des suggestions, il donne des directives. Si l’on jette un coup d’oeil à l’article 10, il est clair que le texte ne dit pas seulement « tiennent également compte des dispositions », mais aussi « ...veillent à ne pas investir… dont les activités sont incompatibles… avec les lignes directrices… ».
Donc, ce n’est absolument pas une suggestion, c’est un ordre. Et, j’imagine que cela crée d’énormes difficultés, car il faut alors déterminer si la société se conforme aux lignes directrices.
En outre, si nous revenons aux questions liées aux autres directives données par le projet de loi, nous constatons que, lorsque les sociétés sont informées dans les huit mois que la plainte est frivole ou vexatoire, le ministre doit expliquer les raisons pour lesquelles il est arrivé à cette conclusion et les publier. Donc, le ministre est non seulement responsable de préciser si une entreprise a contrevenu aux lignes directrices, mais il doit également publier les motifs qui lui ont permis de le déterminer. Je pense qu’en elle-même, cette entreprise serait très coûteuse.
Monsieur Andrews, dans huit mois, vous pourriez faire l’objet d’accusations frivoles ou vexatoires. Qu’arrive-t-il à une entreprise pendant une période de huit mois? Est-elle assez longue pour permettre à une entreprise de décider de fermer ses portes? Vous avez mentionné l’exemple d’une entreprise qui a finalement abandonné l’idée de se débarrasser du spectre des poursuites. Combien d’entreprises de l'industrie minière canadienne décideront, à l'instar de la Canada Steamship Lines, de déménager leurs pénates à la Barbade? Dans quelle mesure l’industrie minière canadienne sera-t-elle touchée?
Merci, monsieur le président.
Certains de nos membres nous ont dit que le projet de loi C-300 leur semblait suffisamment menaçant pour qu’ils envisagent de déménager leur siège social dans un autre pays s’il était adopté.
La Barbade.
C’est une conséquence qui devrait inquiéter tout le monde. Et, comme si cela ne suffisait pas, il y a aussi le fait que les sociétés observent toutes les lois internationales et toutes les lois des divers pays que même le gouvernement du Canada a du mal à observer pour diverses raisons. En outre, obliger des sociétés à suivre des lois que le gouvernement canadien ne suit même pas, cela ne pose-t-il pas un énorme problème?
Je pense que oui. Mais ce qui, selon moi, représentera un défi encore plus important, c’est la façon dont le gouvernement canadien enquêtera là-dessus et s’assurera que les entreprises respectent les lignes directrices alors que les situations sont très mouvantes et varient d’un site à l’autre. À mon avis, c’est la plus grande difficulté que le projet de loi C-300 comporte.
Les gens doivent comprendre que les entreprises sont tenues responsables à divers niveaux, à commencer par les lois, les conventions et les accords internationaux, les institutions financières, et les principes de l’Équateur que je sais que vous connaissez tous.
Nous parlons des lois et des règlements sur la gouvernance du pays hôte. Les gouvernements régionaux et municipaux tiennent également les entreprises responsables là où elles sont établies. Les collectivités locales obligent aussi les entreprises à rendre des comptes.
Si une collectivité locale s’oppose à votre projet — parce que vous ne l’avez pas fait participer au processus —, elle peut le ralentir considérablement. Les gens peuvent vous forcer à abandonner votre projet. Les collectivités ont ce pouvoir. Elles obligent les entreprises à rendre des comptes, et il y a eu des cas où cela s’est produit.
Enfin, il y a les investisseurs. Ils tiennent également les entreprises responsables. Par exemple, si une entreprise ne mobilise pas adéquatement la collectivité et que cela retarde le projet ou que l’entreprise est forcée de l’abandonner, les investisseurs puniront l’entreprise en lui retirant leur confiance, et le prix de ses actions chutera alors considérablement. Voilà ce que j’appelle de la responsabilisation.
Ces entreprises sont responsables à de nombreux niveaux distincts.
En ce qui concerne le commentaire émanant des représentants du Régime de pensions du Canada à propos de l’élimination de toute allusion à leur organisation dans le projet de loi, est-il juste de dire que le problème dont souffre le projet de loi est plus généralisé que cela?
On pourrait certainement suggérer de modifier le projet de loi en supprimant toutes les mentions du RPC mais, en réalité, il y a des éléments partout dans le projet de loi qui sont problématiques tant pour l’industrie que pour nous et notre compréhension de la Charte des droits et libertés et de la responsabilisation organisationnelle. Ce projet de loi est truffé de problèmes.
Je suis tout à fait d'accord. Il comporte des problèmes généralisés. Pour cette raison, nous estimons qu’il n’est pas amendable. C'est comme couper une pomme; lorsqu’on voit une meurtrissure, on essaie d’enlever la partie meurtrie et tout ce qui est mauvais en dessous, et il s’avère qu’après avoir enlevé toutes ces parties, il ne reste plus rien de bon.
Notre plus grande préoccupation par rapport à ce projet de loi, c'est qu’il s’agit d’un processus d'enquête punitif. L’enquête sera menée par le plus haut fonctionnaire du gouvernement du Canada, et il y aura immédiatement atteinte à la réputation de toutes les entreprises soumises à l'enquête, même si elles sont innocentes. Ce processus peut entraîner toutes sortes de répercussions, particulièrement dans les pays d'accueil.
Ainsi, pour être indulgent, c'est bien de vouloir faire la bonne chose, car nous le voulons tous en tant que citoyens du monde, mais nous risquons de nous écraser les doigts en utilisant un marteau de forgeron pour enfoncer une punaise.
C’est ce que je crois.
Si vous voulez un moyen sensé d’assurer la reddition de comptes, la méthode de l’ombudsman serait convenable. C'est la démarche proposée par le comité consultatif de la table ronde sur la responsabilité sociale d’entreprise, ou RSE. Selon moi, il s’agit d’une approche collaborative très constructive, car l’ombudsman se penche sur une situation en tenant compte de toutes les parties et non pas d’une seule, et il essaie de résoudre ce différend. Cette démarche apportera sa part d’avantages.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remarque que le gouvernement n’a pas tenu compte des dernières observations du témoin. En fait, beaucoup de gens ont demandé de créer un poste d'ombudsman, mais je ne m'étendrai pas sur le sujet.
J’aimerais d’abord poser des questions aux témoins du RPC.
En ce qui concerne les investissements collectifs, le RPC a-t-il encore des avoirs dans Ivanhoe, TransCanada et Canadian Helicopters? Continuons-nous d’investir, ou le RPC continue-t-il d'investir dans ces sociétés?
Bien.
Ce n'est pas CHC, et je vais vous dire pourquoi. C'est un exemple d’obligation. L'an dernier, en concomitance avec un autre investisseur, nous avons cherché à faire un investissement majeur dans Canadian Helicopters dont une très petite partie des opérations avaient lieu en Birmanie. Nous avons eu recours au processus de diligence raisonnable, et il a été déterminé que le risque associé à l’exploitation de cette entreprise ne valait pas la peine de poursuivre. La société et les investisseurs ont donc arrêté leurs opérations en Birmanie.
D'accord. Revenons toutefois en arrière, lorsque le RPC a investi pour la première fois dans ces portefeuilles. Ces personnes savaient-elles qu'il se brassait des affaires en Birmanie? Avez-vous passé l'investissement au crible pour déterminer s'ils investissaient en Birmanie?
Tout d'abord, il importe de reconnaître que, du point de vue des grands investisseurs mondiaux, nous investissons selon une politique de diversification qui comporte 2 900 entreprises, comme je l'ai mentionné. Nous ne sélectionnons pas les entreprises individuellement.
Cela peut être considéré comme une exposition passive, comme on le ferait dans le marché des actions canadien en investissant dans le TSX 60, où l’on est exposé à chacune des 60 entreprises sous-jacentes. Nous faisons de même pour les entreprises du monde entier, y compris les marchés émergents. Cela fait partie de notre stratégie globale de diversification.
Pour ces raisons, …
Je répète ma question. Saviez-vous que ces entreprises faisaient des affaires et avaient des investissements en Birmanie?
Oui, vous l’étiez? D’accord.
J'essaie de mettre en évidence le fait que ces placements et ces fonds de pension canadiens ont été investis en Birmanie. Dans certains cas, la moitié des actifs a été répartie avec la junte. Le gouvernement voulait manifestement que les entreprises canadiennes retirent, à juste titre, leurs investissements en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales — et non pas les investissements existants. J’espérais qu’on adopte cette façon de faire.
J’en parle parce qu'il a été dit qu’il ne faudrait pas faire de tri. Or, il est probable que la plupart des Canadiens, s'ils avaient su que c’est ce qui se produisait… Beaucoup de Canadiens semblent effectivement en avoir pris conscience, et il leur a fallu des mesures de répression brutales d’un régime immonde pour ce faire. Nous sommes en train de concevoir un règlement juste, de sorte que tout le monde sera au courant des responsabilités.
Et je dois dire que certaines observations qui ont été faites ici, comme si nous allions dire aux gens comment gérer leurs affaires… Certes, vous pouvez exposer cet argument, mais beaucoup s’y opposent. Sauf votre respect, nous avons entendu les témoignages de juristes qui s’opposent entièrement à ce que nous avons entendu aujourd'hui.
Ce que le comité s’efforce de faire, c’est de voir à ce que, dans des cas comme ce dont je viens de parler, l’on définisse des responsabilités et un règlement clairs et que l’excellent travail des gens autour de cette table continue d’avancer. Ainsi, si des problèmes se présentent relativement à des entreprises canadiennes à l'étranger, il y aura une manière de les régler.
Vous venez tout juste de m’exposer les raisons pour lesquelles c’est nécessaire. En toute franchise, il a fallu que le gouvernement invoque la Loi sur les mesures économiques spéciales pour que le RPC soit vraiment obligé de faire ce qu'il a fait. Je sais que vous êtes peut-être en désaccord avec moi, mais je tenais à le mentionner en raison de ce que vous avez dit.
L’une de mes préoccupations, et je me tourne vers les autres témoins, c’est que d'autres pays l’ont fait. Certains pays nous ont dit que, lorsqu’une de leurs marques se trouve à l'étranger, elles veulent que leurs entreprises procèdent différemment. En fait, la Norvège a mis en oeuvre certaines dispositions par rapport aux normes, en ce qui a trait à ses fonds de pension.
Je suis très inquiet, car vous dites que, si ce projet de loi est adopté, vous allez donner aux gens l'instruction de ne pas investir au Canada. Cela me préoccupe, mais c'est votre droit. Nous avons huit mois ou plus pour adopter un règlement. Comment ce projet de loi va-t-il serrer l’étau sur les entreprises innocentes? Il y a un processus ici. Il n’est pas question d’imposer une procédure à un autre pays. Le processus consiste à exiger de nos entreprises canadiennes qui font des affaires à l’étranger qu’elles se conforment à certaines normes. Que craignez-vous?
Merci.
Tout d'abord, mon organisation ne va pas recommander qu'une société se retire du Canada. Cette décision lui appartient.
Parfait.
Ainsi, nous voulons vraiment que nos entreprises agissent de manière responsable où qu'elles soient. Cependant, ce projet de loi apporte des risques très importants, car c'est au gouvernement de mener l'enquête. Cette situation entraîne une stigmatisation majeure, ce qui crée un risque immédiat pour la société dans le pays d'accueil, même si elle est innocente. Ce genre de processus deviendra très litigieux.
Je vais les utiliser. Je vous remercie, monsieur le président.
En ce moment, des affaires sont devant les tribunaux. Nous venons d’en avoir une au Mexique, où l’entreprise canadienne New Gold n’a pas respecté ce qui était demandé. Son permis a enfin été suspendu, mais l’affaire traîne depuis 2005. Il y a des différends partout, alors je ne crois pas qu’il soit juste de dire qu'il ne va plus y en avoir avec le projet de loi C-300. En fait, je l'ai déjà dit, nous devons nous protéger contre les litiges, et c'est le moyen d’y arriver. Vous n’êtes peut-être pas d’accord.
Merci, monsieur le président.
D'abord, je tiens à parler de la réponse du RPC en tant qu'investisseur dans la promotion de la RSE et des facteurs ESG. Il s’agit d’un excellent exposé. J'ai examiné votre rapport sur la RSE et j’aimerais en savoir plus, mais je voudrais d’abord poser une question. S’il me reste du temps, je vais revenir à vous pour vous poser une question.
Monsieur Wisner, en tant que juriste en droit international, vous aviez soulevé la question de l'équité procédurale. Je voulais vous interroger sur l'un des articles du projet de loi. Cet article ordonne au ministre de recevoir les plaintes concernant les sociétés canadiennes qui exploitent des mines, du pétrole et du gaz. Ces plaintes peuvent provenir de tout citoyen ou résident permanent canadien, ou encore de tout résident ou citoyen d'un pays en développement dans lequel ces activités se sont produites ou se produisent.
Il s’agit d’un article du projet de loi. Selon vous, est-ce que cela signifie que des plaintes peuvent provenir non seulement de tous les Canadiens, mais aussi des résidents étrangers, dont certains ne sont même pas résidents du pays en question ou touchés directement? Les plaintes pourraient également provenir d’entreprises concurrentes. Ce genre d’enjeu — d’exiger qu’un ministre s’en occupe — n’augmente-t-il pas les possibilités d'abus qui occasionneraient beaucoup de publicité négative pour une entreprise et l’ébranlement de la confiance quant à leur capacité à investir? J’aimerais seulement connaître votre position à cet égard, si vous le voulez bien.
Vous misez juste. Je n’avais pas assez de temps pour en parler dans ma déclaration préliminaire, mais c'est l'une des nombreuses dispositions du projet de loi dont la formulation est très vaste et ambiguë.
La plupart des lois comportent une exigence quelconque selon laquelle la personne qui dépose une plainte doit être touchée d'une certaine manière par l'activité dont elle se plaint. Ce projet de loi donne le droit de comparaître à des gens qui n'ont aucun intérêt direct dans l’affaire. Quelle qu'en soit la raison, peut déposer une plainte n’importe quel résident du Canada ou du pays en développement où se déroulent les activités, même s'il n’est pas près du projet ou qu’il n’est pas touché directement par le projet. Le ministre doit examiner et évaluer cette plainte, et faire enquête.
Dans ce projet de loi, le critère servant à déterminer s’il doit y avoir une enquête est très faible. Par conséquent, une enquête ministérielle peut être ouverte à la suite de toute plainte intelligemment rédigée qui satisfait un simple critère de présomption, comme nous l'appelons dans le langage juridique. Cette enquête est publique. Ainsi, le gouvernement hôte est mis au courant, ce qui soulève immédiatement des questions quant aux permis que possède la société et sa capacité à obtenir les permis nécessaires. L’enquête entraînera des problèmes sur les marchés financiers canadiens, et les fonds vont être épuisés bien avant que le ministre ne rende sa décision.
Je voulais seulement revenir à la question de M. Dewar en ce qui a trait à la Loi sur les mesures économiques spéciales.
Manifestement, comme mon collègue, M. Raymond, l’a souligné, notre politique sur l'investissement responsable, semblable aux principes des Nations Unies, est entrée en vigueur en 2005 et 2006. Les groupes d’investissement des quatre coins du monde ont vraiment connu une métamorphose quant à la manière d’envisager ce genre de questions. Elles nous ont donc préoccupés jusqu’à ce moment-là, et ce n'était pas relié spécifiquement à la Loi sur les mesures économiques spéciales.
Merci.
Je tenais à dire qu’il est très louable que le RPC ait participé au processus. D’après ce que je comprends, vous aidez à développer les principes de l'ONU sur l'investissement responsable et vous collaborez avec de nombreux autres instituts. Au cours de la dernière décennie, le domaine de la responsabilisation a pris de l’ampleur.
Je voulais savoir ce que vous pensez du geste du gouvernement canadien. Nous avons un point de contact national. Nous emboîtons le pas aux lignes directrices de l'OCDE. Vous en avez mentionné d'autres, comme les Principes de l’Équateur qui ont été mis en œuvre. Or, on entreprend de créer un nouveau rôle, celui de conseiller en matière de RSE pour aider à mesurer ces choses. Cette mesure ne prévoit pas d'obligations envers le RPC.
J’aimerais simplement savoir ce que vous pensez d'un conseiller de RSE. M. Dewar a parlé d'un ombudsman, et nous l'appelons un conseiller; ce n’est qu’une autre partie de ce rôle. J'aimerais savoir si vous croyez que cela va aider.
Je vais seulement souligner qu’une série de principes sont conçus pour les entreprises et certains sont conçus pour les investisseurs. Je ne m’y connais pas vraiment; je présume que ce serait pour les entreprises. Pour ce qui est des mesures telles que les Principes pour l’investissement responsable des Nations Unies et de l’Initiative de transparence des industries extractives, elles visent les investisseurs.
Je vous remercie, monsieur le président.
Merci, chers témoins.
J’aimerais interroger l’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada en ce qui concerne certains de vos investissements. Il y a Banro Corporation en République démocratique du Congo. Vous avez investi 351 millions de dollars dans la mine d'or de Bulyanhulu en Tanzanie. Je vois encore d'autres placements en République démocratique du Congo. Vous avez également un investissement dans la mine de Veladero, en Argentine, où l’ombudsman du pays a demandé l’arrêt de l'exploitation de l'entreprise. Apparemment, ses activités ont continué. Exportation et développement Canada a investi là-dedans, comme le RPC. En Nouvelle-Guinée, vous avez des placements considérables. Or, la caisse de pension de la Norvège a cédé ses actions dans la société en raison de pratiques d'élimination des déchets. D’après une analyse approfondie des opérations, le conseil d'éthique de la caisse de retraite a conclu que les investissements contribuaient à de « graves dommages environnementaux », un risque inacceptable pour la caisse. Le conseil a ajouté que l’on ne peut pas faire confiance aux affirmations de l'entreprise quant au fait que ses activités ne causent pas de dommages à long terme et irréversibles pour l'environnement.
Par simple curiosité, monsieur Raymond, comment l’OIRPC peut-elle maintenir ces investissements quand d'autres affirment qu’ils contreviennent à diverses normes en matière d’environnement et de droits de la personne?
Certainement. Permettez-moi tout d'abord de mettre en lumière certaines différences importantes entre le Fonds pétrolier norvégien et la caisse du RPC. Premièrement, le fonds norvégien provient de redevances et de recettes pétrolières. Il est constitué essentiellement de l'argent du gouvernement, ce qui n'est pas notre cas. Les fonds appartiennent aux cotisants et aux bénéficiaires canadiens ainsi qu'aux employeurs.
Je ne suis pas certain de voir une différence. Les Canadiens sont sûrement aussi intéressés de savoir si leurs fonds sont gérés de façon éthique que le gouvernement canadien, ou le gouvernement norvégien d'ailleurs.
De cette différence dans la gouvernance, il en résulte que le gouvernement norvégien a mis en place un conseil d'éthique et qu'il a décidé de faire le filtrage de 20 compagnies sur 8 000. En revanche, nous n'avons aucun lien de dépendance avec le gouvernement et nous avons mis en oeuvre une politique d'investissement responsable qui s'applique aux 2 900 entreprises dans lesquelles nous investissons. En désinvestissant, la Norvège perd toute occasion de nouer le dialogue avec ces compagnies pour tenter de favoriser l'utilisation de meilleures pratiques éthiques dans ces pays.
Je comprends que vos investissements sont limités; néanmoins, une nation souveraine a constaté qu'elle ne peut continuer à investir dans une certaine compagnie, alors que nous continuons à le faire.
Comme je l'ai dit, elle a le mandat de faire un filtrage éthique. Nous avons un mandat fiduciaire fondé sur le risque et le rendement. Contrairement à ce que dit le député, nous n'investissons pas directement dans les mines de ces pays. Nous investissons dans les sociétés ouvertes, qui peuvent avoir des activités modestes dans ces pays. Nous croyons qu'en favorisant une meilleure transparence sur les risques d'avoir des activités dans ces pays, qu'en faisant la lumière sur les pratiques, les compagnies s'amélioreront sur les plans environnemental et éthique.
Donc, il est préférable de faire un investissement modeste avec peu d'informations plutôt que de simplement tout arrêter.
Alors, en théorie, ce genre d'investissement pourrait se poursuivre des années sans qu'il n'y ait aucun vrai progrès. Il n'y a pas de conséquences. Au bout du compte, il n'y en a pas.
Comme je l'ai dit, nous voyons cela dans un contexte de risque par rapport au rendement. Si nous croyons que le risque est trop élevé, nous modifierons notre position concernant notre investissement.
Je suis reconnaissant du travail de l'ACPE. Je suis heureux que vous ayez établi ce plan de e3 et je suis heureux de constater que vous l'ayez fait un ou deux mois après que le projet de loi C-300 a été déposé en Chambre.
Ce que j'ai trouvé curieux dans votre témoignage, monsieur Andrews, c'est que vous dites qu'il n'y a que six plaintes par année. Je ne sais pas, mais à mon avis, c'est beaucoup. Pour faire une analogie boiteuse, devrait-il ne pas exister de loi sur les tirs d'armes à feu parce que dans la ville d'Ottawa, où vivent un million de personnes, seulement six personnes par année sont atteintes d'un coup de feu? Je me demande comment vous en arrivez à six par année, car j'en trouve huit ici et nous n'avons rien préparé. Je serais curieux d'entendre vos commentaires là-dessus.
Merci, monsieur le président.
J'ai une question très brève pour l'Office d'investissement du RPC. Avez-vous été consulté pour l'élaboration de ce projet de loi?
Vous n'avez pas été consulté durant son élaboration.
Monsieur Andrews, les prospecteurs et les mineurs ont-ils été consultés au cours de l'élaboration de ce projet de loi?
Monsieur Wisner, vous qui êtes avocat, pensez-vous qu'ils auraient dû être consultés au cours de ce processus? Pouvez-vous commenter sur les raisons pour lesquelles on ne les a pas consultés?
Et j'ai une question complémentaire. Dans quelle position cela place-t-il le Canada en vertu du droit international?
Merci.
J'ignore pourquoi ils n'ont pas été consultés. M. McKay devrait peut-être répondre à cette question. L'explication que j'ai entendue parfois, c'est que l'on suivait simplement le processus de la table ronde. Mais il y a une différence fondamentale entre ce que recommandait le groupe consultatif sur les tables rondes et le contenu de ce projet de loi. Dans son rapport, le groupe consultatif recommandait la création d'un organisme non gouvernemental qui pourrait faciliter le règlement de différends provoqués par des ONG ou par des compagnies qui ont des problèmes avec les ONG. Dans une certaine mesure, l'opinion de la conseillère en RSE va dans le sens de cette recommandation. Il s'agit d'une approche très différente. Comme l'a dit monsieur McKay, il s'agit d'une approche qui tente de punir les gens plutôt que de les rassembler. C'est mon premier commentaire concernant la consultation.
Pour ce qui est du droit international, je ne connais aucun pays au monde qui dispose d'une loi similaire. J'ai lu le rapport du professeur Janda, qui a tenté de donner des exemples dans son rapport. Aucun de ces exemples ne ressemble au contenu du projet de loi.
Aujourd'hui, M. Dewar a parlé de la Norvège, par exemple, mais comme on l'a expliqué, la loi norvégienne n'établit des conditions que pour l'aide ou les investissements gouvernementaux. Le projet de loi va beaucoup plus loin. Il ne se limite pas à établir des conditions pour l'aide gouvernementale; il établit des lois qui s'appliquent dans d'autres pays à des sociétés non canadiennes. Aucun pays au monde n'agit ainsi sans que le Canada proteste.
Le cas qui s'en rapproche le plus est l'adoption par les États-Unis de la modification à la loi Helms-Burton selon laquelle les filiales canadiennes des sociétés américaines ne peuvent pas faire du commerce avec Cuba. Il est généralement admis que c'était illégitime et non conforme au droit international et nous avons protesté.
Monsieur Wisner, à ce sujet, la loi norvégienne prévoit-elle uniquement que le gouvernement ne doit pas investir dans cette société, ou bien prévoit-elle qu'aucun investissement norvégien ne doit se faire dans cette société?
Comme le présente le professeur Janda dans son rapport, la loi norvégienne est très similaire aux disposition de la Loi sur le développement des exportations, par exemple, qui établit des conditions concernant l'endroit où le gouvernement investira. On ne parle pas d'établir des normes pour les compagnies norvégiennes à l'étranger; il s'agit de mécanismes différents.
Oui, je veux répondre aux commentaires de M. McKay. Il a fait allusion à un lien entre le lancement du e3 Plus et le projet de loi C-300. En fait, le e3 Plus a eu un prédécesseur, le e3 — vous ne l'avez peut-être pas connu — qui a été lancé en 2003.
Concernant les six allégations par année, nous avons simplement tenté de mettre ce problème en contexte. Tout ce débat, qui a commencé au CPAECI avant le rapport de la table ronde sur la RSE, se caractérise par un manque de faits systématiques. Nous avons essayé d'ajouter quelques données. Il s'agit de six allégations par année, et non de plaintes, qui selon nous, devraient être prises en charge de façon adéquate par un ombudsman, sans ainsi prendre les risques que le projet de loi C-300 comporte.
Je voudrais souligner une chose sur la question de la consultation: le rapport du groupe consultatif national sur les tables rondes contenait une recommandation très importante. C'était la toute dernière recommandation et elle portait sur la formation d'un groupe consultatif multilatéral pour poursuivre le processus. Ce groupe aurait pour jouerait le rôle précis d'aider à la concrétisation des concepts contenus dans le rapport. Ce processus n'a certainement pas été utilisé pour le projet de loi C-300. Dans ce dernier, on recommande quelque chose qui diffère complètement d'un ombudsman. Le projet de loi va à l'encontre de l'esprit du rapport du groupe consultatif, ce qui est très décevant.
Merci beaucoup, monsieur Andrews.
Le créneau réservé au premier groupe tire à sa fin. Si vous consultez l'ordre du jour, vous constaterez qu'il se termine à 10 h 25.
Nous tenons à remercier nos témoins d'avoir comparu devant notre comité et de nous avoir signalé des sujets de préoccupation. Nous allons suspendre la séance quelques instants pour permettre au premier groupe de laisser sa place au groupe suivant.
Le président: Nous reprenons la séance. Nous accueillons de nouveau une représentante de l'Institut Nord-Sud. Il s'agit de Viviane Weitzner, chercheuse principale à Commerce et ressources naturelles. Elle est accompagnée d'un collègue. Nous vous encourageons à recourir à l'interprétation au besoin.
Nous sommes impatients d'entendre votre déclaration, madame Weitzner.
C'est un privilège que de pouvoir vous faire part aujourd'hui du point de vue de l'Institut Nord-Sud au sujet du projet de loi C-300, qui comporte des mesures essentielles engageant le gouvernement canadien à responsabiliser les sociétés canadiennes qui extraient des ressources minérales à l'étranger. À titre d'information, l'Institut Nord-Sud est un groupe de réflexion indépendant et non partisan qui effectue de la recherche visant à examiner l'élaboration des politiques, à stimuler le débat public et à appuyer les efforts déployés afin de réduire la pauvreté et les inégalités.
Depuis 1998, l'institut s'est penché sur des questions touchant à la fois les responsabilités sociales des entreprises, les droits de la personne et les sociétés d'extraction. Dans la foulée de l'intensification des investissements des sociétés d'extraction canadiennes en Amérique latine et dans les Caraïbes à la fin des années 1990 et de l'augmentation des conflits graves signalés dans des endroits appartenant à des groupes autochtones et tribaux, l'Institut Nord-Sud a entrepris un programme de recherche en partenariat pour mettre en lumière le point de vue des groupes autochtones et des populations de descendance africaine sur les méthodes d'extraction pertinentes, l'objectif étant de faciliter la consultation et la prise de décision dans cette région.
Mon exposé portera sur ce programme de recherche exhaustif. J'aborderai deux études de cas pour faire ressortir la nécessité des mécanismes établis dans le projet de loi C-300 et montrer que cette mesure législative offre des solutions judicieuses pour régler les problèmes auxquels sont confrontées les localités aux prises avec les activités des sociétés d'extraction canadiennes à l'étranger.
Prenons tout d'abord le cas de la Colombie. Je voudrais tout d'abord vous présenter Carlos Rosero du groupe Proceso de Comunidades Negras, une organisation nationale qui est composée de personnes de descendance africaine et qui est l'un de nos partenaires de recherche en Colombie. Je vous encourage à lui poser des questions sur la situation en Colombie lorsque j'aurai terminé ma déclaration. Nous disposons d'un service d'interprétation pour vous faciliter la tâche à cet égard.
Théoriquement, la Colombie possède l'un des régimes les plus progressistes au monde lorsqu'il s'agit de protéger les droits des populations autochtones et de descendance africaine dans la constitution et les lois. En pratique cependant, ces droits sont violés systématiquement. Effectivement, malgré les rapports officiels signalant un éventuel apaisement des conflits armés entre les autorités et les collectivités autochtones et afro-colombiennes, c'est plutôt une intensification de ces conflits que l'on observe dans la réalité. Il semble y avoir un lien direct entre l'accroissement de cette violence et l'intérêt pour les ressources naturelles, particulièrement les minéraux et les métaux. Voici des exemples concrets et récents mettant en cause des collectivités et des organisations avec lesquelles nous collaborons.
Le 22 octobre, un groupe paramilitaire a fait parvenir un message par télécopieur à des organisations et à des dirigeants de descendance africaine de Buenos Aires et de Suarez, les menaçant de représailles militaires pour s'être « opposés aux multinationales qui apporteront des retombées dans les collectivités ».
Loin de s'opposer aux activités minières, ces collectivités s'adonnent principalement à l'extraction artisanale, mais leurs terres et leurs zones de travail sont cédées à titre de concession ou vendues à de grandes sociétés; de plus, elles doivent composer avec l'arrivée de petits mineurs, dont des paramilitaires démobilisés. Dans la foulée des modifications apportées au code minier de la Colombie, les Afro-Colombiens s'adonnant à l'extraction artisanale depuis les années 1600 sont susceptibles de voir leurs activités être déclarées illégales et d'être expulsés de leur localité.
Je connais au moins une petite société minière canadienne dont les activités créent des tensions dans cette région. Ses activités n'ont pas fait l'objet de consultations préalables avec les collectivités de descendance africaine, conformément à la Convention 169 de l’OIT qui est inscrite dans les lois colombiennes ou n'ont pas obtenu le consentement préalable donné librement en connaissance de cause, condition minimale figurant dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones que la Colombie appuie
Les collectivités autochtones et leurs dirigeants sont également victimes d'une recrudescence d'actes de violence, qui sont parfois même commis par des forces policières locales. Le 26 octobre notamment, le Resguardo Indígena de Cañamomo Lomaprieta, une réserve autochtone et un de nos partenaires de recherche, a été attaqué un après-midi par quatre hommes masqués et armés qui ont interrompu un match de soccer et ont ouvert le feu, blessant deux hommes de 84 ans et de 26 ans. On a appris ultérieurement que ces quatre hommes étaient des policiers locaux, qui ont été appréhendés puis libérés. Cette attaque montre non seulement le manque de protection de la part des forces policières, mais également les violations des droits de la personne des peuples autochtones, même si ces droits sont clairement protégés dans les lois nationales et les mesures spéciales mises en oeuvre par le ministère de la Défense.
Fait important, les terres collectives de cette réserve et celles des collectivités afro-colombiennes avec lesquelles nous collaborons dans la région de Cauca font partie d'un important territoire qui a été cédé, dans le cadre d'une concession d'exploration, à une multinationale sud-africaine qui est en partenariat avec une petite société minière canadienne.
Entre mars et avril 2008, des avions ont survolé les collectivités autochtones de Cañamomo Lomaprieta, notamment des terres sacrées, pour faire de l'exploration, et ce sans préalablement avoir obtenu de consentement ni tenu les consultations nécessaires. La situation a immédiatement entraîné diverses répercussions négatives,
Vous vous demandez pourquoi je vous raconte tout cela. Je vous brosse à dessein un tableau détaillé de ce que vivent les collectivités autochtones et afro-colombiennes pour bien montrer que les échanges commerciaux avec la Colombie débouchent sur des répercussions extrêmement complexes sur le plan des droits de la personne. Dans la foulée des négociations sur l'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie et de la promotion de ce pays comme un endroit sûr pour faire des affaires, les entreprises extractives canadiennes y investiront davantage et les collectivités colombiennes subiront sans doute davantage de pression et de violence.
L'actuelle stratégie de RSE du gouvernement canadien n'est tout simplement pas adaptée à une telle situation complexe. Les Principes volontaires sur la sécurité et les droits de l’homme ne régissent qu'une des fort nombreuses formes de violation des droits de la personne dont pourraient se rendre involontairement complices les entreprises extractives canadiennes et par conséquent le gouvernement canadien, en dépit des meilleures intentions.
Je voudrais aborder brièvement le deuxième exemple, celui du Suriname. Cet exemple prouve qu'il y a une exception notoire aux propos de M. Wisner, qui prétendait que tous les pays ont mis en oeuvre des modalités exhaustives de responsabilisation. Le Suriname est le seul pays de l'hémisphère occidentale qui ne reconnaît pas et ne protège pas les droits autochtones ou tribaux; de plus, il ne dispose d'aucune loi exigeant les évaluations des répercussions environnementales et sociales. En bref, le Suriname constitue l'exemple parfait qui nous permettra de déterminer la faisabilité et l'efficacité des mesures volontaires pour assurer la protection des droits de la personne et de l'environnement.
Depuis 2004, l'Institut Nord-Sud a établi un partenariat avec l'Association des dirigeants de villages indigènes du Suriname pour venir en aide à ces collectivités, qui sont aux prises avec les répercussions du grand projet d'exploitation d'une mine de bauxite et de ses activités connexes. Les promoteurs initiaux font partie du Conseil international des mines et métaux, qui regroupe les plus grandes multinationales au monde dans ce domaine.
Nos recherches révèlent de nombreux cas où ces sociétés n'ont pas mis en oeuvre les politiques de leur conseil, ni respecté leurs engagements. Voici un des exemples les plus frappants: une société à entrepris les travaux d'exploration avancée sur 2 800 km2 dans la forêt tropicale humide, le territoire traditionnel des Lokono, sans avoir effectué une évaluation des répercussions environnementales et sociales, contrairement à la politique qu'elle avait établie. La société en question s'est excusée plusieurs fois publiquement de ce grave oubli. Cependant, il est tout simplement inacceptable de s'excuser de ne pas avoir pris les mesures adéquates d'atténuation de ces répercussions. C'est également un présage de ce que fera cette société.
Nos recherches au Suriname débouchent sur deux conclusions: premièrement, laissées à elles-mêmes, les sociétés chercheront à en faire le moins possible sur le plan de la diligence raisonnable, faisant fi de leurs propres politiques; deuxièmement, les mesures volontaires ne sont tout simplement pas efficaces pour protéger l'environnement et les droits de la personne.
Je suis désolé de vous interrompre, mais je dois vous demander de ralentir un peu le débit, car nos interprètes à l'arrière de la salle parviennent difficilement à vous suivre.
Merci de me l'avoir rappelé.
Si même les sociétés les plus importantes et les plus riches du monde ne respectent pas leurs engagements volontaires, il est fort peu probable que les petites entreprises canadiennes le feront.
Dans des pays qui, comme la Colombie et le Suriname, sont aux prises respectivement avec un conflit armé et avec de graves problèmes en matière de gouvernance, il ne faut tout simplement pas compter uniquement sur les mesures volontaires de protection des droits de la personne et de l'environnement. Le projet de loi C-300 n'est pas censé prendre en compte intégralement ces réalités, mais il offre un mécanisme important qui renforce la stratégie canadienne actuelle en matière de RSE. Il prescrit notamment la tenue d'une enquête lorsqu'une collectivité est susceptible d'avoir fait l'objet de violations des droits de la personne commises par une entreprise canadienne, et le consentement préalable de l'entreprise en question n'est pas nécessaire. Actuellement, le conseiller en RSE n'est pas autorisé à mener une telle enquête sans avoir obtenu un tel consentement.
En vertu du projet de loi C-300, le gouvernement canadien peut également cesser d'appuyer financièrement et politiquement l'entreprise si l'enquête devait révéler que les droits de la personne ont effectivement été violés. Autrement dit, le gouvernement peut ainsi rendre des comptes à la population canadienne, et les entreprises sont davantage incitées à respecter les droits de la personne et l'environnement, particulièrement si elles ont reçu des fonds publics, ce qui est fort différent du régime de mesures volontaires annoncé récemment par le gouvernement canadien.
De plus, la population canadienne sait ainsi que l'argent des contribuables ne servira pas à financer des activités d'extraction qui vont à l'encontre de la protection des droits de la personne et de l'environnement, du moins à long terme. Lorsqu'il est avéré qu'une entreprise a violé les droits de la personne ou n'a pas protégé l'environnement, celle-ci peut toujours modifier son comportement et demander de nouveau des fonds publics.
En fin de compte, le projet de loi C-300 intègre l'esprit des recommandations formulées dans le document qui a recueilli un consensus et qui a été rédigé par le groupe consultatif multilatéral dans le cadre du processus de tables rondes nationales sur la RSE. S'il est adopté, il permettra d'adapter la stratégie actuelle du gouvernement aux recommandations formulées dans le cadre de ce processus démocratique de consultation publique. En outre, il mettra en oeuvre des mécanismes qui obligeront nos entreprises à rendre compte de leurs activités à l'étranger, conformément aux recommandations du Comité des Nations Unies pour l'élimination de la discrimination raciale. Enfin, il donnera au Canada un rôle prépondérant en matière de responsabilisation des entreprises et du gouvernement. Nous ne serons plus à la traîne à ce chapitre.
Merci.
Merci.
Madame Weitzner, si vous connaissez bien le projet de loi, que pensez-vous de l'étude qui peut être menée par les ministres aux termes de l'article 4?
Il faut simplifier et préciser le processus permettant de déterminer si la plainte est fondée et doit être examinée davantage. J'estime qu'il faut le faire de concert, peut-être au moyen d'un comité consultatif. Je crois que c'est possible.
Je ne saurais vous indiquer maintenant quelles mesures précises il faudrait prendre. Cela reste à déterminer. Cependant, c'est ce qu'il faudrait viser.
Non, je pense qu'on envisage la création d'un poste d'ombudsman. Je ne crois pas que le projet de loi empêcherait cette création. Il serait peut-être possible également de modifier les attributions du conseiller en RSE pour qu'il puisse s'acquitter de certaines de ces fonctions. Je ne pense pas qu'on parte de rien à cet égard.
On peut donc très bien envisager que le ministre autorisera une étude qui débouchera sur certains résultats dans le délai de huit mois fixé. Un tel délai pose-t-il problème? Disons qu'une telle enquête est menée au Suriname ou en Colombie. Il faudrait trouver les témoins et organiser le tout. Il faudrait probablement que le mandataire du ministre se rende sur place en Colombie ou au Suriname.
Je pense que ce délai de huit mois pourrait être approprié. Il reste à déterminer s'il convient de le prolonger. Le projet de loi prescrit un examen de l’application de la loi. Des modifications pourront donc y être apportées, notamment aux délais. Je ne pense pas qu'il faille couler le tout dans le béton.
Avez-vous entendu les propos des représentants de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada au sujet de leur politique actuelle sur les responsabilités sociales des entreprises et de l'incidence de ce facteur sur les décisions d'investir de l'office?
Quelle est mon opinion sur l'incidence des responsabilités sociales d'une entreprise sur les décisions d'investir de l'office?
Nous avons, je pense, des responsabilités concrètes en tant qu'investisseurs.
Veuillez m'excuser, mais je ne vois pas très bien comment cela...
Comprenez-vous qu'il est difficile que le Régime de pensions du Canada soit régi par neuf gouvernements et non par dix gouvernements...
Oui, et je comprends également que des modifications pourraient renforcer le projet de loi à cet égard.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Bonjour, madame Weitzner. Votre présence ici est très appréciée parce que vous nous rappelez qu'il existe dans le monde des situations où nos entreprises minières canadiennes sont responsables et qu'il faut absolument agir. Dans la foulée des exemples que vous nous avez donnés, on aurait pu parler de la Siocon Subanon Association, aux Philippines, qui a elle aussi fait l'objet de plaintes il y a quelques années.
Je suis très heureuse de constater que des représentants d'associations qui se sont assis à cette table il y a quelques moments à peine pour nous faire part de leurs préoccupations face au projet de loi C-300 sont encore présents dans la salle. Vous parlez de faits concrets, et je pense que ces gens, qui sont extrêmement brillants, vont réfléchir à ce que vous venez de nous dire.
À mon avis, le projet de loi C-300 est perfectible. Tout projet de loi l'est.
En tant que membre de ce comité et à titre de députée du Bloc québécois, j'apprécierais que toutes les personnes venues ici ce matin pour nous dire que c'est par l'entremise du dialogue et de mesures volontaires qu'on va arriver à adopter des comportements responsables envers les communautés où l'on fait de l'extraction viennent dialoguer avec les promoteurs du projet de loi C-300, faire la promotion de l'investissement responsable et nous dire comment améliorer ce projet de loi de sorte que les gens ne soient pas lésés et que les droits des Autochtones de même que les droits de la personne soient respectés dans les pays où on fait de l'extraction.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis sensible à ce que vous avez dit et je conviens avec vous qu'il reste beaucoup d'aspects susceptibles d'être perfectionnés ou modifiés. La réponse que vous avez donnée à M. Rae à propos de l'article 4.... C'est ambigu et loin d'être clair. Vos propos antérieurs étaient également intéressants, en l'occurrence lorsque vous avez parlé de la Colombie, de ses lois très progressistes et du fait que les Colombiens eux-mêmes ne les respectent pas nécessairement.
D'après vous, peut-on s'attendre à ce que les entreprises canadiennes obéissent aux lois dans un pays où les citoyens ne les respectent pas?
Je pense que les entreprises doivent agir d'une façon responsable. La plupart des politiques — même les attentes e3 — reconnaissent que les entreprises doivent respecter les lois du pays où elles font des affaires ainsi que les normes internationales pertinentes et leurs engagements internationaux. C'est à ce titre qu'elles doivent être responsables...
Faudrait-il donc en conclure que les entreprises doivent respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, déclaration à laquelle le Canada n'a pas adhéré?
Tout à fait. Le gouvernement colombien respectant les droits fondamentaux et inhérents de ses peuples autochtones et de ses populations tribales, les entreprises qui font des affaires dans les territoires autochtones et tribaux ou près de ceux-ci devraient faire de même. En fait, c'est ce qui est exigé ici également au Canada, que nous ayons adhéré ou non à la déclaration des Nations Unies.
Comme il ne nous reste plus de temps, j'aimerais que notre invité de la Colombie nous expose par écrit quelles sont les préoccupations éventuelles de sa collectivité à propos des sociétés extractives, quelles sont les mesures que le Canada devrait prendre et quelle est son opinion sur le projet de loi.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur Dewar.
Je m'adresse également à monsieur Rosero. N'hésitez pas à nous présenter un mémoire. M. Dewar vous a invité en quelque sorte à nous faire part de vos préoccupations. Soyez assuré que, le cas échéant, nous en prendrons connaissance.
Nous vous remercions d'avoir assisté à la séance d'aujourd'hui et de nous avoir formulé vos commentaires sur le projet de loi C-300 ainsi que sur la responsabilité sociale des entreprises.
Nous allons suspendre la séance une minute, puis nous reprendrons nos travaux pour aborder les affaires du comité.
Nous reprenons la séance et passons aux travaux du comité. La séance a lieu en public et non à huit clos.
À la fin des travaux du comité, lors de la dernière séance, qui s'est tenue le jeudi 5 novembre, M. Paul Dewar a déposé une motion. Le débat a été ajourné suite à l'adoption d'une motion proposée par Mme Francine Lalonde. Cette motion était la suivante:
Que, dans le contexte de son étude sur le traitement des Canadiens à l'étranger, le comité fasse rapport à la Chambre des communes des recommandations suivantes, appelant le gouvernement à reconnaître son devoir constitutionnel de protéger les citoyens canadiens à l'étranger; adopter une loi visant à garantir que les services consulaires soient fournis de façon systématique et non discriminatoire à tous les Canadiens en détresse; et créer un bureau d'ombudsman indépendant chargé de surveiller la conduite du gouvernement et d'ordonner au ministère des Affaires étrangères de protéger un Canadien en détresse si le ministre n'a pas agi dans un délai raisonnable.
Voilà la motion dont nous débattions à la fin de la dernière séance. Nous reprenons donc le débat.
Monsieur Goldring.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai des réserves concernant les fondements mêmes de cette motion, car je ne crois pas que l'on trouve dans la Constitution du Canada une référence constitutionnelle autorisant ces démarches. Je doute donc des fondements mêmes de la motion, et je crois qu'il s'agit du type de motion qui, en ignorant la teneur de la Constitution, vise en fait à modifier cette dernière, ce que notre comité n'est pas habilité à faire. La modification de la Constitution s'effectue selon un processus précis, qui exige l'approbation de 50 p. 100 de la population et de six provinces et territoires sur dix, ainsi qu'une procédure voulant que la motion soit adoptée non seulement par le Parlement, mais également par le Sénat et chaque législature du pays. Je crois donc que les fondements mêmes de la motion sont invalides.
Je renforcerai mon point de vue en commençant pas examiner la Constitution. J'inviterais donc...
Vous allez devoir commencer au début.
Des voix: Oh, oh!
M. Peter Goldring: Absolument, absolument.
Une voix: Je n'ai pas apporté mon sac de couchage.
L'hon. Bob Rae: Ne nous lisez pas la version intermittente.
Merci, monsieur Rae.
Comme M. Rae vous invite à le faire, monsieur Goldring, vous pouvez poursuivre, si c'est ce que vous comptez faire.
Merci beaucoup.
C'est vraiment de la plus haute importance, parce que le libellé de la Constitution est la trame et l'âme de notre pays. Nous devrions être très fiers de la constitution que nous avons adoptée.
Je commencerai donc par la Loi constitutionnelle de 1982, la Charte canadienne des droits et libertés, parce qu'on nous a indiqué par le passé que c'est elle qui prévoit ce droit, alors qu'en fait, ce n'est pas le cas.
Ainsi commence la Charte canadienne des droits et libertés:
Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit.
Nous passons ensuite à la garantie des droits et libertés:
La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.
Eh bien, cette disposition laisse clairement entendre qu'il s'agit de droits et libertés prévus par le droit canadien, non par le droit international. Ce serait des lois du Canada.
Libertés fondamentales:
Chacun a les libertés fondamentales suivantes:
a) liberté de conscience et de religion.
Nous savons fort bien que tout le monde ne jouit pas de ces libertés à l'échelle internationale. Il est vraiment un peu naïf que les Canadiens croient qu'ils devraient bénéficier de ces droits et libertés dans tous les pays du monde.
b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse...
Eh bien, non. Mais un membre intervient ici en ignorant complètement le fait que son propre gouvernement a reconnu les droits constitutionnels dans l'affaire de M. Abdulrazik, droits que la Cour fédérale à reconnu également. Il discute donc d'un aspect reconnu par les tribunaux et son propre gouvernement. Je crois que...
Bien, monsieur Dewar. Ce que j'essaie de faire dans le présent débat, c'est de m'assurer que même si M. Goldring nous fait un discours sur la Constitution, il y a...
Une voix: Un lien?
Le président: ... un lien avec la motion.
Je crois qu'il essaie d'en faire un. Il tente de démonter qu'il existe au Canada des droits précieux et aimés...
... des droits constitutionnels, mais est-ce que ces mêmes droits s'appliquent dans tous les pays, comme il l'a souligné?
Non, ce sont les droits des Canadiens, et non des pays. C'est là où je veux en venir. C'est un fait qui a été reconnu par la Cour fédérale et le gouvernement...
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
C'est exactement là où je veux en venir. Je tiens à faire extrêmement attention pour ne pas manquer le passage de la Constitution où se trouve cette expression, et peut-être qu'on pourra mettre le doigt dessus au cours de cette discussion. Je ne la trouve pas; je vais donc soigneusement lire ligne par ligne: « liberté de réunion pacifique » et « liberté d'association ».
Nous avons également des droits démocratiques: « Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives fédérales ou provinciales. » Il est évident qu'il ne s'agit pas de la Chambre des communes de Grande-Bretagne, mais de celle du Canada. On ne peut supposer que la Constitution s'applique d'une quelconque manière à l'étranger. C'est du Canada dont il s'agit.
La Constitution indique également que « Le mandat maximal de la Chambre des communes et des assemblées législatives de cinq ans à compter de la date fixée par le retour des brefs relatifs aux élections générales correspondantes. »
En effet. J'allais faire remarquer que nous pourrions bien, même lorsque le gouvernement est minoritaire comme c'est le cas aujourd'hui, avoir le privilège de garder notre mandat pendant cinq ans, dans la mesure où les partis de l'opposition nous appuient. Je crois que c'est très approprié. En tant que gouvernement, nous voudrions certainement être là pour un certain temps afin de pouvoir vraiment agir et assurer une certaine continuité.
On peut lire ensuite que « Le mandat de la Chambre des communes ou celui d'une assemblée législative peut être prolongé respectivement par le Parlement ou par la législature en question au-delà de cinq ans en cas de guerre, d'invasion ou d'insurrection, réelle ou appréhendée, pourvu que cette prolongation ne fasse pas l'objet d'une opposition exprimée par les voix de plus du tiers des députés de la Chambre des communes ou de l'assemblée législative. » Nous avons ici la possibilité de poursuivre notre mandat, pourvu que nous ayons l'accord des partis de l'opposition.
Ensuite, « Le Parlement et la législature tiennent une séance d'au moins une fois tous les douze mois. »
Nous n'avons toujours pas rencontré de mention de la protection à l'étranger en vertu de la Constitution. Je poursuivrai donc pour voir si nous trouverons quelque chose.
En ce qui concerne la liberté de circulation, il est écrit que « Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir. » La loi stipule également que « Tout citoyen canadien et toute personne ayant le statut de résident permanent au Canada ont le droit... de se déplacer dans tout le pays et d'établir leur résidence dans toute province. » J'ajouterais ici que les rédacteurs ont peut-être fait une légère omission; j'inclurais « ou territoire ». Les citoyens peuvent également « gagner leur vie dans toute province ». Ici encore, je serais tout à fait disposé à ajouter une référence aux territoires.
Mais, de toute évidence, rien qui laisse entendre qu'on a le droit d'aller d'un pays à l'autre et d'un État à l'autre au sein de ces pays.
La loi stipule en outre que « Les droits mentionnés au paragraphe (2) sont subordonnés... aux lois et usages d'application générale en vigueur dans une province donnée, s'ils n'établissent entre les personnes aucune distinction fondée principalement sur la province de résidence antérieure ou actuelle » — et je suggérerais d'ajouter « ou territoire ». Ce sont clairement des lois nationales et non internationales.
On peut lire ensuite « ... aux lois prévoyant de justes conditions de résidence en vue de l'obtention des services sociaux et publics ». Il existe donc des restrictions, même ici, au Canada. Le document indique que « Les paragraphes (2) et (3) n'ont pas pour objet d'interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer, dans une province ... »
Puis-je déposer une motion pour lever la séance? Il fait systématiquement obstruction. Nous pouvons lever la séance et retourner chacun à nos activités. Pouvons-nous tous nous entendre là-dessus?
D'accord. On propose une motion pour lever la séance, laquelle ne peut faire l'objet de débat.
Que tous ceux qui sont d'accord pour lever la séance lèvent la main.
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