Passer au contenu
;

FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 034 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 octobre 2009

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    Bonjour, chers collègues. Bienvenue à cette 34e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, séance du jeudi 22 octobre.
    Nous reprenons aujourd'hui l'étude du projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement. Comme témoins au cours du premier segment, nous accueillons Karen Keenan, agente de programme à la Coalition Initiative d'Halifax.
    Bienvenue parmi nous.
    Nous devrons interrompre le cours des délibérations à 10 h 30 pour nous acquitter de travaux du comité. Voilà ce qui avait été prévu. Nous entendrons deux témoins aujourd'hui. Au cours de la deuxième heure, nous accueillerons des représentants de l'ACDI. Je laisserai filer l'horloge jusqu'à 9 h 30 ou 9 h 45, et nous déciderons de la suite des choses en fonction du temps restant.
    Madame Keenan, bienvenue. Nous avons hâte d'entendre vos observations. Ensuite, nous aurons des questions pour vous.
    Comme son nom l'indique, notre organisme est une coalition d'organisations confessionnelles et de défense des droits de la personne, des droits des travailleurs et de l'environnement. Nous visons à transformer les institutions financières internationales publiques en vue d'éradiquer la pauvreté, d'assurer la durabilité de l'environnement et de permettre la pleine reconnaissance des droits universels de la personne.
    Mon travail est principalement axé sur le fonctionnement des institutions publiques qui viennent en appui au secteur privé, tout particulièrement la Société financière internationale du Groupe de la Banque mondiale, et Exportation et développement Canada. Cette société d'État est l'organisme de crédit à l'exportation du Canada et mon exposé portera principalement sur ses activités.
    Le secteur de l'extraction est le plus important bénéficiaire du soutien offert par Exportation et développement Canada; d'ailleurs, la société d'État prévoit étendre davantage son aide aux entreprises de ce secteur. Exportation et développement Canada n'a pas de bons antécédents dans ce domaine. L'organisme a appuyé un certain nombre de projets miniers qui sont à l'origine de graves répercussions environnementales et sociales à l'égard desquelles les personnes et les collectivités touchées n'ont pu être indemnisées ni exercer de recours.
    Le cas le plus notoire est peut-être celui de l'effondrement de la digue à résidus survenu à la mine d'or Omai en Guyane en 1995. Trois ans après le désastre, une poursuite a été intentée au Canada par les populations indigènes touchées par le déversement. Le tribunal canadien a refusé d'entendre l'affaire, soutenant que cette action devait être intentée en Guyane. Les demandeurs d'une affaire subséquente intentée en Guyane ont également été déboutés, laissant les victimes sans recours. Plusieurs autres projets appuyés par EDC sont dignes d'attention, y compris celui de la mine aurifère de Bulyanhulu en Tanzanie. Les habitants de la région allèguent que plus de 50 mineurs artisans ont été tués par des troupes tanzaniennes en vue de dégager la concession minière pour faire place à des activités commerciales.
    Les indigènes vivant à proximité de la mine et de la fonderie de nickel PT Inco en Indonésie se plaignent d'avoir perdu des terres agricoles de première qualité, allèguent que l'environnement local a été contaminé et se disent victimes de menaces et d'intimidation de la part des policiers.
    En 1998, un important déversement de cyanure est survenu à la mine de Kumtor au Kyrgyzstan, un autre projet appuyé par EDC. EDC a également financé la mine Marcopper dans l'île de Marinduque aux Philippines, où la contamination environnementale a décimé les populations de poissons, soit l'unique moyen de subsistance des villages de pêcheurs avoisinants. Si je ne m'abuse, ce comité a entendu un peu plus tôt cette semaine des témoignages à propos de cette situation.
    Plus récemment, la mine Veladero, appuyée par EDC en Argentine, a fait l'objet d'une plainte auprès de l'ombudsman national du pays. Le bureau de l'ombudsman national, qui agit indépendamment du gouvernement, a pour mandat de protéger les droits et les libertés conférés par la loi, y compris les droits de la personne. Les intervenants locaux, auteurs de la plainte déposée à l'endroit de la mine Barrick, étaient préoccupés des répercussions que pouvaient avoir les activités minières sur la réserve de la biosphère San Guillermo, sous l'égide de l'UNESCO. L'ombudsman a reçu la plainte et, en 2008, a publié un rapport dans lequel il indique que la concession minière contrevient à plusieurs lois nationales. Il a demandé la cessation immédiate des activités minières dans la réserve.
    Cette année, une organisation argentine vouée à la protection de l'environnement a déposé une plainte devant la Cour suprême à l'égard de la mine, pour faire connaître ses préoccupations selon lesquelles les activités minières causeraient des dommages irréversibles aux glaciers de la région. L'organisation s'est tournée vers le tribunal afin qu'il émette une ordonnance en vertu de laquelle l'entreprise serait contrainte de se soumettre à une vérification de la conformité aux lois nationales.
     Les parlementaires argentins continuent de débattre intensément de l'avenir des glaciers du pays. L'an dernier, le président Fernández de Kirchner a opposé son veto à une loi conçue en vue de protéger les dépôts glaciaires. La loi, qui interdit les activités minières, pétrolières et gazières sur les glaciers ou à proximité de ceux-ci, a été entérinée à l'unanimité par les membres du Congrès.
    EDC continue de venir en appui aux sociétés extractives canadiennes qui investissent dans des pays où les cadres de réglementation sont défaillants, dont la capacité institutionnelle est inadéquate et où l'application de la loi laisse à désirer. La société d'État envisage actuellement d'appuyer un important projet minier en République démocratique du Congo, un pays dépourvu de gouvernance où la violation des droits de la personne et les conflits brutaux associés aux minéraux extraits sont légion.
    De plus, EDC a récemment ouvert un nouveau bureau à Lima, au Pérou, à partir duquel il prévoit étendre le soutien offert aux sociétés extractives canadiennes actives dans ce pays. Selon l'ombudsman national du Pérou, les investissements dans le domaine de l'extraction sont la principale cause des conflits sociaux dans ce pays. Les membres de la collectivité qui s'opposent à l'entrée de sociétés extractives étrangères dans leurs terres sont victimes d'intimidation et de violence, et se font même parfois assassiner.
(0905)
    Plus tôt cette année, des populations indigènes du Pérou ont tenu une manifestation d'envergure pour protester contre l'adoption de nouvelles dispositions législatives venant faciliter les activités d'extraction dans leurs territoires. Le 5 juin, la police nationale a attaqué les manifestants, déclenchant du coup une violente confrontation qui s'est soldée par la mort de plus de 30 personnes. Le premier ministre a été contraint de démissionner en raison de la façon dont le gouvernement a géré le dossier et le Congrès a abrogé certains des décrets contestés.
    Pour éviter de devenir complice de ces actes qui transgressent si souvent les lois environnementales et les droits de la personne, Exportation et développement Canada doit appliquer des normes robustes et transparentes à l'endroit de ses clients, autant du point de vue social et environnemental que du point de vue des droits de la personne. EDC s'appuie actuellement sur les normes de rendement de la Société financière internationale et sur les principes de l'Équateur. Ce dernier instrument, élaboré par des banques privées, se fonde largement sur les normes de rendement. Les normes de rendement sont largement reconnues comme les normes de facto que doivent respecter les multinationales qui investissent dans des marchés émergents et en développement. Toutefois, ces normes sont défaillantes à bien des égards. Elles font peu de place aux droits de la personne. À l'exception des droits liés au travail, les normes de rendement ne tiennent pas compte des normes liées aux droits universels de la personne.
    Le groupe consultatif multipartite chargé de formuler des recommandations à l'intention des tables rondes nationales sur la responsabilité sociale des entreprises et sur l'industrie de l'extraction dans les pays en développement, dont je faisais partie, a reconnu cette lacune importante. Le groupe consultatif s'est servi des normes de rendement pour élaborer les normes canadiennes en matière de RSE qui ont été soumises au gouvernement du Canada pour approbation, mais a pris soin de les complémenter au moyen de normes qui régissent les droits universels de la personne.
    Le deuxième problème en lien avec les normes de rendement et les principes de l'Équateur vient de leur caractère discrétionnaire. Exportation et développement Canada n'est en aucun cas tenu d'appliquer ces normes, de voir à ce qu'elles soient respectées ni d'imposer des sanctions aux clients qui omettent de s'y conformer. EDC a adopté les normes de rendement par l'entremise d'une recommandation de l'OCDE qui permet explicitement aux signataires de déroger à ces normes, à leur discrétion. La conformité aux principes de l'Équateur est également facultative. En vertu des principes de l'Équateur, les entreprises doivent se conformer aux normes de rendement pour satisfaire aux exigences de l'institution financière responsable de la mise en oeuvre. De plus, la dérogation aux normes est acceptée pourvu qu'elle soit justifiée.
    Aucune ligne directrice n'est établie en ce qui a trait au seuil de conformité jugé satisfaisant ni à l'égard des dérogations soi-disant justifiées. Le projet de loi C-300 pallie ces lacunes. Il s'assure que les normes existantes d'EDC sont appliquées uniformément, et les complète au moyen de normes liées aux droits universels de la personne, auxquelles souscrit le Canada.
    Ceci permettra de renforcer la diligence raisonnable d'EDC, l'incitant à ne pas s'investir dans des projets qui risquent grandement d'avoir des répercussions négatives sur les droits de la personne. Cette démarche fournira aux clients d'EDC des directives utiles quant aux normes d'exploitation attendues de leur part. Enfin, elle fera en sorte que le Canada se conforme à ses obligations internationales en matière de droits de la personne dans le domaine du crédit à l'exportation.
    En tant qu'organisme du gouvernement fédéral, Exportation et développement Canada est tenu d'adhérer aux engagements du Canada relatifs aux droits de la personne dans le monde. Actuellement, aucun mécanisme ne permet d'assurer que les activités sont menées conformément à ces engagements. Le projet de loi C-300 harmonisera également les activités d'EDC avec les recommandations formulées à l'égard des agences de crédit à l'exportation par le représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies pour les entreprises et les droits de l'homme, John Ruggie.
    Dans un rapport destiné au Conseil des droits de l'homme, M. Ruggie soutient que les agences de crédit à l'exportation doivent exiger que leurs clients fassent preuve d'une diligence raisonnable adéquate en ce qui a trait aux répercussions potentielles de leurs projets sur les droits de la personne. Selon le représentant spécial, une telle diligence raisonnable permettra également à ces agences de déterminer quels sont les investissements qui nécessitent une plus grande surveillance et quels sont ceux qui présentent des risques trop importants du point de vue de l'implication des différents pays.
    À la suite de la publication du rapport du représentant spécial, EDC a publié une déclaration de cinq paragraphes sur les droits de la personne. EDC décrit la déclaration comme une articulation de principes. La déclaration ne prévoit pas le niveau de diligence raisonnable réclamé par M. Ruggie. Elle n'aborde pas non plus la question de savoir si et comment EDC évaluera les incidences négatives potentielles sur les droits de la personne associées aux activités de ses clients, et ne parle pas non plus de ses attentes à l'égard des clients en matière de droits de la personne ni des mécanismes auxquels elle a recours pour s'assurer que les clients sont à la hauteur de ces attentes tout au long de la durée de vie des projets.
(0910)
    J'aimerais maintenant parler un peu de la façon dont sont examinées les plaintes qui concernent les activités menées par les clients d'EDC. EDC fait partie d’une poignée seulement d’agences d'exportation au crédit dotées d'un mécanisme de plaintes. Toutefois, le bureau de l’agent de la conformité n'a traité que deux plaintes depuis sa création en 2001.
    Les collectivités touchées et certaines organisations de société civile ont choisi de ne pas avoir recours à ce mécanisme en raison de son manque d'indépendance, de transparence et de pouvoir. Le bureau est tenu et doté en personnel par EDC. Les vérifications de la conformité, lorsqu'elles sont menées, se font à l’interne. Les auteurs des plaintes reçoivent peu d'information leur expliquant les constatations de l’agent de la conformité. De plus, la société d'État n'est en aucun temps tenue d'adopter l'une ou l'autre des recommandations formulées par l’agent de la conformité à l'issue d'une vérification.
    Le mécanisme de plaintes créé en vertu du projet de loi C-300 corrige ces problèmes. Le mécanisme est indépendant d'EDC et nécessite une reddition de comptes publique. En outre, toute situation jugée non conforme sera assortie de conséquences. Bien que le mécanisme de plaintes ne permette pas aux gens ni aux collectivités touchées par les projets d'extraction appuyés par EDC d'exercer de recours juridiques — une question qui, à elle seule, mérite l'attention du gouvernement —, il permettra l’examen de leur situation et pourrait donner lieu à une modification des façons de faire des entreprises.
    De plus, le mécanisme de plaintes prévu dans le projet de loi C-300 est conforme à la recommandation formulée par le groupe consultatif à l'intention des tables rondes en ce qui a trait à la nomination d'un ombudsman. Comme le prévoit le projet de loi C-300, la recommandation voulait que ce bureau reçoive et examine des plaintes qui concernent les activités menées outre-mer par des sociétés extractives canadiennes.
    En terminant, le projet de loi C-300 pallie les lacunes des politiques et des pratiques d'EDC en matière de diligence raisonnable ainsi que les faiblesses observées à l'égard de son mécanisme de plaintes. En outre, le projet de loi est conforme aux recommandations convenues par tous, formulées par le groupe consultatif dans le cadre du processus des tables rondes.
    Les réformes prévues dans le projet de loi C-300 feront en sorte qu'EDC ne puisse plus financer de projets d'extraction minière à l'origine de maux environnementaux et sociaux.
    Merci.
(0915)
    Merci, madame Keenan.
    Nous entamons dès maintenant la première série de questions. Je vais surveiller l'horloge de près aujourd'hui. Nous devons prévoir environ une demi-heure pour les travaux du comité.
    Nous aurons un invité au cours de la deuxième heure. Nous allons donc commencer par une première série de questions de sept minutes par personne, avant de passer à la prochaine.
    Est-ce que cela vous convient?
    Monsieur Patry, la parole est à vous.
    Merci, madame Keenan.
    Madame, selon l'article 5 du projet de loi, les normes doivent être exposées dans les lignes directrices du gouvernement « qui exposent clairement les normes de responsabilité des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières ».
    Selon vous, quels types de normes doivent être prévus dans les lignes directrices et en quoi ces normes seront-elles différentes des normes internationales existantes comme les Principes directeurs de l'OCDE pour les entreprises multinationales ou le Pacte mondial des Nations Unies?
    Parlez-vous bien de l'alinéa 5(2)d)?
    Oui.
    C'est-à-dire « toute autre norme compatible avec les normes internationales en matière de droits de la personne ». Bien, la norme articulée aux alinéas 5(2)a) à c) est très exhaustive. Si cette norme englobait également les normes de rendement de la SFI, ses lignes directrices, ses principes volontaires et ses dispositions connexes, de même que tout le complément à nos obligations en matière de droits universels de la personne, tout cela deviendrait très, très exhaustif.
    L'alinéa 5(2)d) pourrait viser d'autres traités internationaux dont le Canada est signataire. Il pourrait peut-être englober des traités environnementaux, étant donné que l'alinéa 5(2)c) traite précisément de la question des droits de la personne. Je pense à des choses comme les traités qui concernent la biodiversité, les changements climatiques et ainsi de suite, qui ne seraient pas nécessairement visées par l'alinéa 5(2)c) mais qui ont une incidence sur ces projets.
    Certaines dispositions de ces traités peuvent être prises en compte dans les normes de rendement, mais on peut penser que certaines ne le seraient pas, notamment les traités liés à l'environnement. Hormis ces choses, j'estime que la norme articulée dans le projet de loi est très exhaustive.
    Monsieur McKay.
    Le projet de loi C-300 a été mis de l'avant un peu par effet d’entraînement. Par cela, j'entends qu’il n’y a pas eu de réaction au processus des tables rondes, après quoi le projet de loi a été présenté, ce qui a incité le gouvernement à réagir en créant le poste de conseillère en RSE. La conseillère en RSE s'est vu confier un mandat en vertu duquel elle pourra s’acquitter de choses nobles et utiles dans ce domaine.
    Donc essentiellement, il nous reste à combler ces deux derniers mètres des 100 mètres que nous avions à parcourir. Je serais intéressé à connaître votre point de vue sur l'interaction possible entre le projet de loi C-300 et les fonctions de la conseillère en RSE.
    Je pense que vous illustrez bien la situation. Selon moi, la réponse du gouvernement englobe certains éléments clés du rapport publié par le groupe consultatif et qui sont essentiels à la réforme des politiques dans ce domaine, mais il n’en demeure pas moins que cette réponse est incomplète. Pour ce qui est des sujets abordés dans mon allocution en particulier, elle est incomplète du point de vue de la prestation des services aux sociétés extractives.
    Le gouvernement du Canada fournit tout un éventail de services aux entreprises et il n'existe à l'heure actuelle aucun mécanisme permettant de s'assurer que ces services sont dispensés conformément à nos obligations internationales, tout particulièrement en ce qui a trait aux droits de la personne. Il s'agit là en soi d'une transgression du droit international. Le Canada a l'obligation de protéger les droits de la personne, ce qui sous-tend, comme nous l'ont expliqué les organismes responsables des traités des Nations Unies, l’obligation de promulguer des lois qui protègent les citoyens des activités menées par de tierces parties, y compris des entreprises.
    Ce projet de loi nous permet de parcourir les deux mètres restants, tout particulièrement du point de vue de la prestation des services gouvernementaux, et crée par la même occasion un fondement législatif en vertu duquel il sera possible de vérifier si les activités menées par des clients potentiels du gouvernement sont conformes aux obligations internationales du Canada.
    La lacune la plus importante dans la réponse du gouvernement, c'est que la conseillère ne soit pas dotée du pouvoir d'entreprendre un examen en toute autonomie ni même de mener à bien un examen une fois celui-ci amorcé, car tout le processus dépend du consentement de l'entreprise visée. C'est une omission plutôt flagrante, mais le projet de loi C-300 viendrait y remédier.
    Quelle est votre opinion à ce sujet? Que pensez-vous du fait que la conseillère n’ait pas le pouvoir de faire enquête?
(0920)
    Je ne pense pas qu'il vaille la peine de mener cette bataille.
    Chaque jour ou presque, j’ai affaire à des collectivités aux prises avec des effets indésirables attribuables aux activités d'extraction menées par des entreprises canadiennes. Ces gens sont mes partenaires et mes collègues. Nous étions tous impatients de voir comment le gouvernement allait réagir au processus des tables rondes. Bon nombre des collègues dont je vous parle ont participé à ce processus à titre de témoins experts, et la réponse du gouvernement en a grandement déçu plus d'un.
    Certaines collectivités et sociétés civiles de pays du Sud m'ont demandé et ont demandé à d'autres de mes collègues canadiens à quoi bon déposer une plainte — et sont tout à fait justifiés de poser ce genre de question. Pourquoi se donneraient-ils la peine de rassembler des ressources déjà rares, d'investir tout ce temps, de documenter leurs préoccupations puis ensuite de les présenter à cette conseillère alors qu'ils savent que l'entreprise n'est en aucun cas obligée de participer?
    Je suis d'accord avec vous; partout dans le monde, les gens ont été déçus d'apprendre que ce mécanisme était facultatif pour les entreprises et, pour cette raison, le projet de loi est extrêmement important.
    Semble-t-il que mardi dernier, ce comité a entendu un témoignage plutôt troublant à propos d'une certaine entreprise canadienne. Si vous soumettez cette situation particulière à l'attention de la conseillère en RSE, pensez-vous qu'elle pourrait alors faire enquête pour tirer les choses au clair?
    Si j'étais conseillère auprès de Barrick, je leur déconseillerais de participer. Je ne sais pas ce que vous feriez dans pareille situation.
    Il est vrai que la réponse semble quelque peu évidente.
    Ma dernière question se rapporte aux entreprises qui sont préoccupées par le manque d'équité de la procédure et qui, d'une manière ou d'une autre, finiront par être exposées à des lignes directrices qu'elles ne comprennent pas ou encore à des procédures avec lesquelles elles ne sont pas familières, dont elles ne connaissent pas les avantages et les désavantages, à des normes qu’elles ne connaissent pas, etc. Que diriez-vous à ces entreprises?
    Le projet de loi contient des dispositions aux fins de l’application d'un processus participatif inclusif pour en arriver à ces lignes directrices et procédures, comme le font toutes les autres lois de ce genre, donc contrairement à d'autres, cette question ne me préoccupe guère.
    En outre, il est important de se rappeler que beaucoup de travail a été accompli dans ce domaine. Partout dans le monde, des gens se penchent sur ces questions. Ces questions ont longuement été examinées par des tribunes multilatérales internationales, des gouvernements de différents pays, des sociétés civiles, des entreprises et diverses associations, ce qui a permis l’élaboration de lignes directrices, de principes et d’ensembles de normes. Les organes de défense sont pour nous une importante référence et nous aident à élaborer ces lignes directrices. Nous pouvons donc nous fier à de nombreux spécialistes et à de nombreuses ressources. De plus, grâce au processus participatif, je suis certaine que nous saurons en arriver à des procédures et à des lignes directrices claires, équitables et faciles à comprendre.
    Merci beaucoup, madame Keenan.
    Nous passerons maintenant au Bloc. Madame Deschamps.

[Français]

    Bonjour, madame Keenan, bienvenue à notre comité ce matin.
    Votre témoignage m'a interpellée, lorsque vous avez dit qu'Exportation et développement Canada a mis en place un bureau de plaintes en 2001 et qu'il n'avait reçu que deux plaintes.
    Y a-t-on fait le suivi de ces plaintes? De quel genre de plaintes s'agissait-il? Provenaient-elles d'organismes qui voulaient dénoncer une situation irrégulière? Pourquoi les gens trouvent-ils maintenant que ce bureau de plaintes n'est pas pertinent, qu'il n'est pas assez transparent, qu'ils n'y sont pas bien représentés? Craignent-ils d'avoir recours à ce bureau? On semble dire que ce bureau de plaintes est un peu bidon.

[Traduction]

    L'une des plaintes à laquelle j'ai fait référence a été déposée par mon organisation. C'était avant que je commence à travailler pour l'Initiative d'Halifax, mais je suis au courant de ce cas. Ça concernait une installation nucléaire, plus précisément l'examen de ce projet. C'est donc Exportation et développement Canada qui a effectué une vérification approfondie dans le cadre de l'examen du projet et qui a pris la décision de l'appuyer ou non.
    Si, à partir de ce moment, mon organisation a été découragée de déposer d'autres plaintes ou de conseiller à nos collègues pour lesquels les projets d'EDC avaient des répercussions de le faire, c'est en raison des problèmes que j'ai énumérés dans mes commentaires. En d'autres termes, c'est un processus interne très fermé. En fait, je crois que mes collègues ne savaient pas exactement en quoi consistait ce processus. À la fin du processus, nous n'avons reçu qu'une seule réponse, à savoir que la société respectait ses politiques internes. On ne nous a pas donné d'explications concernant la manière dont l'agent en était venu à cette conclusion, en quoi consistait l'enquête, et ainsi de suite.
    C'est très fermé, il est difficile d'accéder à l'information, et, comme je l'ai dit plus tôt, même si l'on conclut à une non-conformité à la suite d'une vérification, rien n'oblige EDC à prendre la situation en main et à y apporter des changements. À nouveau, les organisations de la société civile qui sont efficaces disposent de ressources insuffisantes — humaines et autres — pour consacrer le temps et l'énergie nécessaires au dépôt d'une plainte devant ce type d'organisme, et sachant que les chances qu'elles obtiennent des résultats sont minimes, tout compte fait, le jeu n'en vaut pas la chandelle.
    C'est pourquoi nous nous intéressons vivement au mécanisme découlant du projet de loi C-300, parce qu'il est plus transparent, parce qu'il est indépendant, parce que le processus sera connu et compris, que les résultats seront rendus publics et qu'il y aura certaines répercussions en cas de non-conformité.
(0925)

[Français]

    En réponse au rapport qui a découlé des consultations et des tables rondes, le ministre a décidé de nommer une conseillère, de créer un bureau de conseiller en responsabilité sociale des entreprises.
    Cela est-il suffisant, à votre avis? Cette personne aura-t-elle un mandat supérieur à celui du bureau de plaintes que les gens d'EDC ont mis en place? Cette personne peut-elle avoir plus de pouvoirs?

[Traduction]

    Elle en aura, dans la mesure où elle ne sera pas limitée à EDC. Elle aura le pouvoir d'examiner n'importe quel cas d'extraction, pas seulement ceux qui ont reçu l'appui d'EDC. Mais comme nous l'avons expliqué, elle a les mains liées. À moins que les sociétés ne consentent de façon explicite à participer, il n'y aura aucune enquête. Je crois qu'il est important de revenir au rapport du groupe consultatif et de se rappeler qu'il s'agissait d'un rapport collectif. Les présidents et PDG des deux principales associations minières de ce pays se sont prononcés en faveur d'un ombudsman qui aurait le pouvoir de contraindre les sociétés à participer aux enquêtes. Si les dirigeants des associations de l'industrie étaient disposés à mettre en oeuvre ce type de mécanisme, il est dommage que le gouvernement ne l'ait pas fait. À nouveau, je crois que ce projet de loi corrige cette lacune en créant un mécanisme relatif aux plaintes auquel les entreprises devront se soumettre.
    Vous avez encore deux minutes, madame Lalonde.

[Français]

    Madame, le fait que cette loi ne s'applique qu'aux entreprises bénéficiant d'un appui du gouvernement du Canada — c'est l'objet de la loi — peut-il entraîner des changements dans l'attitude des entreprises par rapport à une demande d'aide financière à EDC, pour ne pas être soumises, justement, aux dispositions de la loi? Avez-vous vu des signes que cela pourrait effectivement avoir un tel effet?
(0930)

[Traduction]

    C'est une bonne question. Je crois que dans ce contexte économique, les entreprises devraient avoir tendance à continuer de solliciter ce type d'appui, parce qu'il est difficile d'obtenir du crédit ailleurs. Je crois aussi, si les entreprises tiennent parole, que cela ne devrait pas poser problème.
    Une grande partie des entreprises qui sont actuellement des clients d'EDC semblent se conformer aux normes de rendement et aux Principes de l'Équateur. Ils se veulent des leaders du monde des affaires dans ce domaine, alors si la nécessité de se conformer à ces normes devient soudainement une obligation légale au lieu d'être un engagement volontaire, ça ne devrait pas leur poser problème.
    Pour ces deux raisons, je ne crois pas que cela devrait avoir des répercussions sur le nombre de clients.
    Merci.
    Nous passerons au parti ministériel. Monsieur Abbott.
    Merci, madame Keenan, pour l'exposé très bien documenté que vous nous avez présenté aujourd'hui. Je poserai des questions qui montreront que je suis en désaccord avec nombre de choses que vous avez dites. Je respecte réellement le fait que vous ayez effectué des recherches sur ce projet de loi et que vous vous exprimiez avec détermination, même si nous ne partageons pas le même point de vue.
    Ça me renverse que vous ayez balayé l'idée de la conseillère en RSE. Le fait qu'il s'agisse d'un processus public, que n'importe qui puisse avoir été porté à l'attention de la conseillère — et par conséquent du public —, ne croyez-vous pas que si ces entreprises ne respectaient pas les normes, ça engendrerait une pression publique que les ONG et les autres organisations comme la vôtre pourraient utiliser à leur avantage?
    Je trouve simplement très intéressant le fait que vous ayez écarté cette position — que vous estimez inutile — et je voulais vous demander des explications à ce sujet.
    Il existe un certain nombre de possibilités et de forums permettant de présenter de l'information sur les activités des entreprises extractives canadiennes, et les organisations de la société civile — canadiennes ou autres — se servent de ces forums. Certains sont internationaux, d'autres nationaux, et ainsi de suite, et nous les utilisons.
    À nouveau, nous devons nous rappeler qui sont ces gens et ce qui se passe. Il arrive souvent que leur sécurité physique soit compromise. Ce sont souvent des Autochtones, ils viennent de régions rurales, ils sont économiquement et politiquement marginalisés. Mobiliser le temps, les ressources et l'énergie nécessaires pour présenter une autre plainte, et possiblement voyager au Canada pour témoigner, et ainsi de suite, devant un forum envers lequel ils n'ont aucune attente — ou qui ne leur laisse aucun espoir de changement — serait dénué de sens. Il est beaucoup plus sensé pour eux de continuer à utiliser les autres forums, aussi imparfaits soient-ils, mais cela nous a amenés au point où nous en sommes maintenant. Le fait que nous soyons au Parlement du Canada à discuter de cette question signifie que ces forums ont eu une certaine influence et un certain succès, et, à mon avis, ça a beaucoup plus de sens.
    Au Canada, nous avons eu de mauvaises expériences avec le point de contact national, qui est un autre mécanisme de traitement des plaintes ayant été établi par le gouvernement. Les gens, notamment au sein de mon organisation, ont déposé des plaintes, mobilisé des ressources, rassemblé des témoignages et des déclarations écrites sous serment, et ça s'est avéré complètement inutile. Les gens ne sont pas convaincus que ce sera différent, et ils ne veulent pas dépenser de précieuses ressources à le vérifier.
    Le diable se cache dans les détails en ce qui concerne ce type de loi. Il y a deux jours, lors de mon témoignage, j'ai utilisé comme exemple le fait que nous ayons deux différents vaccins contre la grippe parce qu'il existe deux virus distincts. En d'autres mots, les remèdes doivent être bien ciblés. Dans ce cas particulier, si nous pouvons appliquer l'analogie au projet de loi C-300, le diable se cache dans les détails. On peut croire qu'il faut s'attaquer à la grippe, alors qu'il faut en fait s'attaquer à la grippe H1N1. Ce projet de loi ne touchera pas la pandémie potentielle de grippe H1N1, si vous comprenez mon analogie.
    Je suis en train d'examiner les pouvoirs et fonctions des ministres. Je vous lirai rapidement la clause à laquelle je pense:
Dans l'exercice de leurs attributions en vertu de la présente loi, les ministres reçoivent les plaintes relatives aux sociétés canadiennes qui exercent des activités minières, pétrolières ou gazières, déposées par tout citoyen ou résident permanent canadien ou tout résident ou citoyen d'un pays en développement où de telles activités ont lieu ou ont eu lieu.
    Ne voyez-vous pas que ce trou est suffisamment grand pour que le Queen Elizabeth 2 puisse y passer? Je veux dire, pourquoi ne se trouverait-il pas, parmi les six milliards d'habitants que compte la terre, des gens pour entreprendre des poursuites vexatoires contre les entreprises canadiennes? C'est un trou immense. N'êtes-vous pas d'accord avec moi?
(0935)
    Je suis en train de chercher cette disposition.
    Si nous descendons une dizaine de lignes plus bas, au paragraphe 4(3), on tient expressément compte de votre préoccupation. La loi s'occupe clairement du problème des plaintes futiles et vexatoires.
    En effet, mais ça fait partie d'un processus. Je crois que cette clause ouvre cette possibilité. Elles peuvent être futiles et vexatoires, mais ça ne fait pas de différence. Une fois qu'elles ont fait la une du Globe and Mail, on ne peut reprendre l'édition en disant: « Désolé, veuillez retirer cette page du fond de la cage de votre canari. »
    Il est vrai que des personnes pourraient tirer avantage de ces dispositions et présenter des plaintes futiles et vexatoires, mais ces plaintes seront présentées pour ce qu'elles sont. Je crois que les groupes constateront l'inefficacité de cette stratégie lorsqu'ils réaliseront que ce mécanisme ne fonctionne pas — parce que leurs plaintes seront réfutées —, et que les entreprises, je n'en doute pas, s'emploieront à diffuser ces résultats. Je ne doute pas un instant de la capacité des entreprises de faire connaître les conclusions des plaintes futiles et vexatoires de façon à ce que ça leur soit profitable.
    Je peux concevoir que certaines personnes puissent, au départ, en tirer avantage. Mais je ne crois pas que le mécanisme fonctionnera longtemps, parce que je crois que les ministres utiliseront leur jugement pour rejeter ces plaintes qui n'iront nulle part.
    D'après la clause que je vous ai lue — « activités ont lieu ou ont eu lieu » —, les entreprises pourraient faire l'objet d'un examen pour tout événement ayant eu lieu depuis 1867. Il s'agit à nouveau d'un trou suffisamment énorme pour qu'un autre navire de ligne puisse y passer.
    Comme je l'ai expliqué dans mes commentaires, il existe un certain nombre d'incidents qui se sont produits partout dans le monde et qui ont eu des répercussions considérables sur les communautés touchées, des incidents demeurés irrésolus pour lesquels les gens n'ont pas été en mesure d'obtenir réparation. Des gens ont perdu leur moyen d'existence, ils ont perdu leurs terres, ils sont tombés malades, et il ne leur a pas été possible d'obtenir réparation. J'aurais tendance à faire valoir que si certains de ces cas devaient se présenter, ce serait juste et équitable.
    Si une compagnie devait acquérir une autre entreprise, elle devrait préalablement effectuer une vérification approfondie. Parce qu'il pourrait exister certaines histoires remontant à 20, 30, 40 ou 50 ans, alors que des pratiques que nous trouvons maintenant odieuses et inacceptables en 2009... Si l'on revient 50 ans en arrière, avec les meilleures connaissances scientifiques et la compréhension la plus approfondie de ce qui se passait alors en matière d'exploration, ces pratiques sont maintenant complètement inacceptables. Nous creusons à nouveau un trou gigantesque dans lequel on pourrait pousser les problèmes associés à toutes les activités minières qui n'ont pas toujours respecté les normes de 2009.
    Je crois que je n'ai pas été claire. Une enquête concernant un cas qui s'est déroulé pendant un certain temps et pour lequel il existe des problèmes serait faite sur ce cas. Si cette mine est toujours exploitée, mais qu'elle l'est selon des normes conformes à celles prévues par la loi, alors cette entreprise remplirait les conditions requises pour obtenir à nouveau l'appui du gouvernement.
    La loi s'applique aux opérations actuelles. Prenons une mine, disons Omai, où il y aurait eu des problèmes par le passé, mais qui est toujours exploitée par une entreprise canadienne et qui n'a aucun problème en ce moment — l'entreprise exerce maintenant ses activités conformément à ces normes —, alors cette entreprise aurait manifestement droit à l'appui du gouvernement.
    Cette loi ne s'intéresse pas aux recours judiciaires. Elle n'offre pas de recours judiciaires aux gens qui ont été trompés dans le passé. Mais s'il subsiste des problèmes avec une mine et qu'une enquête a lieu, alors cette entreprise pourrait ne pas avoir droit à un autre appui.
    Mais non, ça n'a aucune incidence sur les entreprises qui ont causé des dommages pour lesquels les gens n'ont eu aucun recours. La loi n'offre pas de recours judiciaire.
    Merci beaucoup.
    Nous passerons à M. Dewar, s'il vous plaît.
    Merci monsieur le président et merci à notre invité pour son témoignage.
    Pour donner suite aux commentaires de M. Abbott, peut-être pourriez-vous nous éclairer un peu sur un point. En effet, certaines personnes s'adressent aux tribunaux pour obtenir réparation. Est-ce que vous êtes au courant de telles situations? À votre avis, de quelle façon ce projet de loi devrait-il traiter ces situations?
    En d'autres mots, nous constatons, qu'ailleurs, des griefs sont présentés aux tribunaux parce qu'il n'y a aucun autre moyen de recours. Avez-vous un point de vue sur le sujet?
(0940)
    Un certain nombre de dossiers canadiens sont portés devant les tribunaux judiciaires de nations étrangères, y compris certains dossiers concernant des projets financés par EDC. D'ailleurs, vous avez entendu parler de l'un d'eux plus tôt cette semaine. Il s'agit du cas d'une mine de Placer Dome, devenue une mine de Barrick Gold, située dans les Philippines et pour laquelle une poursuite est en cours aux États-Unis parce qu'il n'y a aucune possibilité de mener de telles poursuites au Canada.
    Malheureusement, le projet de loi n'aborde pas ce problème. Peut-être que je n'ai pas été suffisamment claire dans ma réponse à la question précédente, mais ce projet de loi ne contient pas les fondements juridiques requis pour intenter des actions en justice dans notre pays. Dans mes commentaires, j'ai mentionné que c'est peut-être un aspect auquel le gouvernement pourrait réfléchir parce qu'à mon avis, c'est une question très importante. De telles poursuites montrent qu'il y a un vide juridique et administratif dans ce pays en ce qui a trait aux activités de nos sociétés outre-mer et qu'il faut s'en occuper.
    J'estime que ce projet de loi est un pas important dans la bonne direction pour combler ce vide. Bien qu'il ne contienne aucun fondement juridique visant les actions en justice pour les sociétés ayant subi des préjudices, il permet de veiller à ce que les plaintes soient recevables pour examen à la Chambre. De plus, le projet de loi assure que les services publics fournis à nos entreprises le sont d'une façon conforme à nos valeurs et à nos obligations de respect des droits de la personne sur la scène internationale. Voilà ce qui, à mes yeux, semble être une priorité.
    Je suis d'accord.
    Puisque M. Abbott est friand d'analogies, je vais lui fournir un exemple. Les grandes compagnies de tabac font actuellement l'objet de poursuites. Le litige porte sur le fait qu'elles connaissaient l'existence des problèmes. Elles étaient au courant des problèmes. On avait produit des preuves selon lesquelles leurs activités avaient des répercussions sur la santé des gens.
    C'est une cause que le gouvernement devrait soutenir afin de protéger les Canadiens. On parle ici de deniers publics dans des entreprises privées à l'étranger. Nous ne voulons pas constater dans dix, dans cinq ou même dans deux ans que la population canadienne a été exposée à certains dangers parce que nous n'avons pas fait ce que nous avions à faire. Je crois qu'il est important que cela soit dit. Il n'est pas question de dire que nous ne pouvons faire plus. Et comme vous l'avez expliqué, les outils dont nous disposons actuellement ne suffisent pas. Je crois que vous avez été très explicite dans vos commentaires.
    Ma dernière question porte sur l'inclusion de lignes directrices justes, transparentes et applicables dans le projet de loi, une question qui préoccupe certains d'entre nous. Pour être plus précis, il s'agit d'un aspect qui fera l'objet de discussions et de consultations. J'aimerais savoir si vous croyez qu'il est juste d'avoir la possibilité de discuter avec tous les intervenants de la façon dont ces lignes directrices devraient s'appliquer dans le contexte de ce projet de loi et de l'importance de tenir ce genre de consultations en vertu du paragraphe 5(2).
    À ceux et celles qui seraient tentés de dire que la question sera réglée une fois le projet de loi adopté, j'aimerais signaler que ce projet de loi prévoit justement des discussions sur ces lignes directrices et la tenue de consultations. Croyez-vous que cette démarche est juste ou devrions-nous simplement considérer que c'est chose faite, que le projet de loi est rédigé et que nous n'avons plus qu'à aller de l'avant?
    En fait, je crois que c'est le paragraphe 5(3) qui aborde la question de la consultation. Le paragraphe 5(2) prévoit l'inclusion des normes alors que le paragraphe 5(3) traite de la consultation.
    Comme vous l'avez dit, c'est très explicite. On y définit les différents intervenants et secteurs à consulter, y compris les ministères et les organismes gouvernementaux, sans oublier ceux qui seront visés par cette législation: les représentants de l'industrie et des organisations non gouvernementales. C'est très vaste parce que cette disposition vise également « les autres intéressés, tant au Canada qu'à l'étranger ».
    Comme je l'ai mentionné précédemment, nombreux sont les intervenants, tant au Canada qu'à l'étranger, qui ont consacré beaucoup de temps et d'attention à cette question. L'un des intervenants qui me vient en tête est le gouvernement danois qui a déployé beaucoup d'efforts pour élaborer des lignes directrices en matière de droits de la personne pour les sociétés afin d'appliquer les normes internationales en matière de droits de la personne. Ce gouvernement s'est également doté d'un instrument très bien conçu pour y parvenir, un instrument pouvant présenter un intérêt pour le gouvernement du Canada lorsqu'il élaborera les lignes directrices en question.
    Je crois que les lignes directrices sont très explicites et exhaustives. Je crois que parce qu'elles sont intégrées à la loi, elles constituent une garantie de mise en place de ce processus et assurent que celui-ci sera ouvert, transparent et assez juste, comme vous l'avez si bien dit.
(0945)
    Il vous reste quelques minutes.
    Non, j'ai terminé.
    Alors, laissez-moi poser une question.
    Ma question, qui s'inspire de tout ceci et peut-être particulièrement de notre rencontre de mardi, porte sur le risque politique. Je sais que vous n'êtes pas ici en votre qualité de représentant élu, mais, il me semble, à la lecture de ce passage — « les ministres reçoivent les plaintes relatives aux sociétés canadiennes... » — que, sur le plan politique, la responsabilité sociale des sociétés est l'un de ces principes partisans auxquels tout le monde s'attend.
    À certains égards, lorsque vous interrogez le Canadien moyen, celui-ci craint que nous n'en fassions jamais assez pour assurer la responsabilité sociale des sociétés. Lorsqu'une plainte est transmise à un ministre, qu'il fasse partie du gouvernement actuel ou de tout autre gouvernement futur, celui-ci a la très grande responsabilité de démontrer qu'il a fait tout ce qu'il pouvait à cet égard.
    Mardi, on a soulevé certaines questions au sujet des forces policières dans d'autres pays et on a dit que rien ne justifiait la responsabilité imputée à certains comités. Nous avons donc un politicien, un ministre, qui reconnaît la souveraineté des pays, qui interroge le gouvernement, les forces policières et toutes les personnes concernées dans ce pays et produit un rapport qui conclut que rien ne justifie la mesure prise. Mais il peut toujours y avoir une personne ou une ONG qui dépose une plainte pour que, tout de suite, ça se retrouve dans les médias et aux nouvelles. Le ministre sera toujours poussé à l'extrême limite.
    Quel degré de responsabilité devons-nous confier à un ministère pour qu'il puisse mener à terme ce genre d'enquête? Quel degré de risque estimez-vous que le ministre concerné doit assumer pour prouver qu'il s'est acquitté de sa part de responsabilité pour ce qui est de donner suite à ces plaintes? Abandonner une poursuite lorsqu'elle est frivole peut avoir de grandes conséquences politiques.
    Avant de répondre à la question de savoir jusqu'où un ou une ministre doit aller pour respecter ses obligations, j'aimerais réagir à un point que vous avez soulevé concernant la souveraineté des autres pays. Vous ne l'avez pas dit explicitement, mais je crois que cela laissait entendre qu'il pourrait y avoir des difficultés à mener à terme ces enquêtes parce qu'elles se dérouleraient effectivement dans d'autres pays.
    Si je me souviens bien, M. Richard Janda, professeur à l'Université McGill, a présenté au comité un mémoire juridique portant sur cette question et nous rappelant que le gouvernement du Canada a déjà entrepris des enquêtes semblables relativement à toute une gamme de questions et dans un éventail de contextes en vertu d'autres lois. Tout simplement pour dissiper tout malentendu éventuel au sujet de ce que l'on peut faire ou ne pas faire, disons que cela fait partie des diverses possibilités qui s'offrent à nous.
    Quant à l'autre question, à savoir jusqu'où nous devons aller pour respecter nos obligations, je crois que, dans une telle situation, l'élément clé est de s'assurer que le travail est transparent et que les résultats de toute enquête, y compris une description précise des mesures prises, soient rendus publics — une mesure qui est, évidemment, prévue par la loi.
    Personne ne s'attend à ce qu'un ou une ministre donne suite indéfiniment à une plainte s'il apparaît clairement qu'aucune preuve future ne pourra le ou la convaincre que celle-ci est valable. Il y a un degré de raisonnabilité à respecter dans l'interprétation de cette loi. Cependant, je crois que nous avons la compétence nécessaire pour y parvenir. Dans le cas où une plainte ne pourra être justifiée, ce sera là la conclusion du rapport pertinent.
    Et une telle plainte sera rejetée. J'ai confiance dans la capacité des sociétés extractives canadiennes de veiller à ce que ces résultats soient divulgués, non seulement à leurs actionnaires mais à l'ensemble de la population canadienne afin que l'on puisse les disculper.
    Alors, je ne suis pas inquiète au sujet de ces questions.
    Si une ONG ou des personnes présentent de nombreuses plaintes frivoles pendant un certain nombre d'années, ne devrait-il pas y avoir des sanctions à leur endroit?
    Je crois que, dans de telles situations, le ministre qui a reçu sept, huit ou neuf plaintes frivoles ou vexatoires d'une ONG ou d'un autre intervenant, deviendra sans aucun doute de plus en plus sceptique vis-à-vis de la personne ou du groupe concerné et sera peut-être porté à être plus expéditif lorsqu'il étudiera la nature des plaintes. Cependant, il y aurait peut-être lieu d'inclure dans le processus d'examen prévu par la loi une disposition à cet égard si, à la lumière de l'expérience du ministre, c'est effectivement une situation qui se répète.
    Mais encore là, pour revenir à ce que j'ai déjà dit, je ne crois pas que cela arrivera. Il faut consacrer beaucoup d'efforts et de ressources pour monter un dossier de plainte de ce genre et si des plaintes sont régulièrement rejetées en raison de leur nature frivole et vexatoire, je ne crois pas que ce soit une stratégie très efficace pour un groupe et je ne peux imaginer qu'il continue à le faire.
(0950)
    Je crois que toutes sortes de situations peuvent se produire lorsque l'on parle d'un projet de loi comme celui-ci.
    Nous en resterons là.
    Merci beaucoup d'être venue nous rencontrer.
    Mme Karyn Keenan: Merci.
    Le président: Je suis d'accord avec M. Abbott comme vous tous, je crois; merci de nous avoir fait part d'un témoignage très bien documenté au sujet de ce projet de loi. Nous apprécions votre présence parmi nous.
    Nous allons interrompre la séance pour quelques minutes afin de permettre à l'ACDI de prendre place.

    Au cours de la deuxième partie de notre rencontre d'aujourd'hui, nous allons poursuivre l'étude du projet de loi C-300.
    Nous avons parmi nous, de l'Agence canadienne de développement international, M. Christopher MacLennan, directeur général, Direction des politiques thématiques et sectorielles, M. Bill Singleton, conseiller principal en politiques économiques à la Direction générale des politiques stratégiques et du rendement, ainsi que Mme Hélène Giroux, directrice générale, Amérique du Sud et Amériques, Direction générale des programmes géographiques. Bienvenue parmi nous.
    Je crois savoir que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Nous vous invitons donc à la présenter puis nous passerons à la première ronde de questions.
    Monsieur MacLennan.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion d'expliquer au Comité permanent des affaires étrangères et du développement international le rôle que joue l'ACDI par rapport à la Stratégie de responsabilité sociale des entreprises qu'a établie le gouvernement. Nous en profiterons également pour donner au comité une idée de l'importance que revêt le secteur de l'extraction pour les pays en développement et du genre de programmes que l'ACDI réalise et planifie actuellement.
    Comme vous l'avez mentionné, je me nomme Christopher MacLennan, et je suis directeur général de la Direction des politiques thématiques et sectorielles à l'ACDI. Je suis accompagné de Mme Hélène Giroux, directrice générale de la Direction de l'Amérique du Sud, et de M. Bill Singleton, responsable à l'ACDI de la liaison en matière de responsabilité sociale des entreprises, la RSE. Les membres du comité se souviendront sans doute que la stratégie du gouvernement prévoyait l'établissement, à l'ACDI, d'un centre de liaison doté d'une expertise en développement de l'industrie extractive. C'est M. Singleton qui assume les fonctions à ce chapitre pour le moment.
    Avant de décrire ce que fait l'Agence relativement à la Stratégie de RSE du gouvernement, je tiens à attirer l'attention du Comité sur un point précis du projet de loi C-300. Dans les définitions, au paragraphe 2(1), il est question des pays ou territoires inscrits à la « Liste établie par le ministre de la Coopération internationale des pays et territoires admissibles à l'aide au développement du Canada », liste qui n'existe plus. L'ACDI publie dans son rapport annuel au Parlement la liste des pays en faveur desquels elle a fait des décaissements, ce qui diffère de la liste des pays admissibles à l'aide au développement.
    Cela dit, le gouvernement annonçait en février 2009 que, dans le contexte de son plan d'action pour accroître l'efficacité de l'aide, l'ACDI allait consacrer 80 p. 100 de son aide bilatérale à 20 pays dits de concentration. Là non plus, il ne s'agit pas d'une liste de pays admissibles, mais de pays où l'ACDI concentrera ses efforts en vertu du programme d'action sur l'efficacité de l'aide.
    En dehors de cette définition, le projet de loi C-300 ne fait aucunement référence à l'ACDI. Par contre, puisqu'il traite de questions visées par la stratégie de RSE pour les sociétés extractives canadiennes présentes à l'étranger, je vais expliquer au comité les activités menées par l'ACDI dans le secteur de l'extraction dans les pays en développement.
    La stratégie de RSE, rappelons-le, comporte quatre grands volets. L'un d'entre eux touche le « développement des capacités des gouvernements hôtes ». C'est ce volet qui concerne l'ACDI de plus près.
    Maintes études révèlent que le produit de l'exploitation des ressources minérales et des hydrocarbures est trop souvent, pour bien des pays en développement, source de problèmes plutôt que de possibilités. Voilà qui fait contraste avec la réalité économique de pays comme le Canada, les États-Unis et l'Australie, qui sont parvenus avec le temps à mettre à profit leurs ressources naturelles, qui ont appuyé la croissance économique, la création d'emplois et la production de gains à l'exportation.
    Invariablement, ces études arrivent à la conclusion que la transparence et l'efficacité du régime de gestion des ressources d'un pays constituent le facteur le plus significatif. Ce régime englobe l'établissement de cadres juridiques et de cadres de réglementation de la fiscalité qui soient stables, pour assurer la gestion et le développement durables des ressources, ainsi que d'institutions et d'organismes chargés de réglementer et de surveiller les activités dans ce secteur.
    En l'absence d'institutions solides, les ressources naturelles telles que les minéraux, le pétrole et le gaz risquent de devenir une « plaie » qui engendrera divers problèmes, que l'on pense à la corruption, aux conflits, à l'agitation sociale et aux incidences néfastes sur l'économie et l'environnement. Les recettes tirées des ressources ne sont pas stables, ce qui complique la gestion des dépenses gouvernementales. Enfin, comme vous le savez, certains pays puisent dans les recettes provenant des ressources naturelles pour financer un conflit.
    Les Canadiens savent très bien les choix que doivent faire les pays en développement: Faut-il extraire les ressources ou non? À quel rythme? Doit-on faire appel à des sociétés nationales ou à des entreprises privées de l'étranger? Comment s'y prendre pour établir les lois, les règlements et les contrats les plus avantageux pour le pays? Comment éviter ou limiter les frais d'ordre social et environnemental? Chacun des choix qui sont faits a de grandes conséquences susceptibles d'orienter le développement d'un pays pendant des années.
    La majorité des programmes que l'ACDI a réalisés récemment dans le secteur de l'extraction ont visé des pays des Amériques. Et, conformément aux principes de l'efficacité de l'aide, ces programmes ont eu pour but de soutenir des pays qui ont eux-mêmes placé la gestion de ce secteur en tête de liste de leurs priorités de développement.
    Au Pérou par exemple, l'ACDI a collaboré de très près avec les administrations publiques nationale et régionales et avec les collectivités concernées, en vue de définir des exigences réglementaires pour promouvoir une gestion responsable, sur les plans social et environnemental, du secteur de l'extraction. L'ACDI a notamment offert des outils et de l'expertise dans les secteurs des mines et des hydrocarbures, outre un appui au dialogue social et environnemental multipartite, à la participation communautaire et au règlement des conflits.
(0955)
    L'ACDI a par ailleurs aidé la Bolivie à mettre sur pied une unité de perception fiscale, grâce à laquelle, entre 2004 et 2008, ce pays a pu quadrupler ses recettes, qui ont atteint plus de 2 milliards de dollars par année. En majeure partie, cette somme est investie dans les services publics et le soutien social.
    L'ACDI met également au point en ce moment une initiative en faveur de la région des Andes, qui permettra de renforcer la capacité des administrations régionales et locales ainsi que des collectivités de planifier, d'élaborer et de mettre en oeuvre des projets de développement durable et, enfin, de consolider la capacité des collectivités à traiter avec les entreprises du secteur de l'extraction.
    À l'échelle multilatérale, l'ACDI travaille en partenariat avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et avec Ressources naturelles Canada dans le cadre de l'Initiative relative à la transparence des industries extractives, l'ITIE, laquelle a pour objectif d'améliorer la transparence à propos des recettes que tirent les pays en développement des ressources naturelles et, ainsi, de réduire la corruption. L'ACDI a en outre contribué au financement accordé par le Canada au Fonds fiduciaire multidonateurs de l'ITIE, géré par la Banque mondiale.
    Comme le veut la stratégie de RSE du gouvernement, l'agence s'affaire actuellement à trouver la personne qui travaillera avec la Banque mondiale à la mise en oeuvre de l'ITIE dans un certain nombre de pays d'Afrique.
    Dans l'avenir, le soutien consenti par l'ACDI pour aider les pays en développement à gérer leurs ressources naturelles entrera dans la priorité thématique que représente la croissance économique durable, l'une des priorités du programme d'aide internationale du gouvernement du Canada.
    J'ai déjà expliqué en quoi les ressources naturelles peuvent favoriser la croissance économique. Il s'avère que la saine gestion de ces ressources, tout particulièrement par rapport à leur impact environnemental et social, peut contribuer à la durabilité de cette croissance.
    Nous avons communiqué avec les organismes de développement d'autres pays, par exemple de la Norvège et du Royaume-Uni, afin de déterminer quelle forme pourrait prendre notre collaboration. De plus, l'ACDI a organisé en juillet des tables rondes sur la responsabilité sociale des entreprises, auxquelles étaient invités le secteur privé et les organisations de la société civile, avec qui nous poursuivons le dialogue. Nous collaborons étroitement avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et avec Ressources naturelles Canada à la mise en pratique des trois autres volets de la stratégie de RSE.
    J'espère que cet aperçu de l'approche adoptée par l'ACDI à l'égard du secteur des ressources naturelles dans les pays en développement sera utile au comité pour l'étude du projet de loi C-300. Hélène, Bill et moi-même sommes disposés à répondre à toute question que vous auriez au sujet de l'expérience de l'ACDI et du travail qu'elle accomplit dans le sens des objectifs du gouvernement.
    Merci.
(1000)
    Merci, monsieur MacLennan.
    Monsieur Rae.
    Merci, monsieur MacLennan.
    Je comprends le travail que vous faites. J'en ai vu des preuves dans une autre vie, et même aujourd'hui, dans les pays andins. Diriez-vous qu'il n'y a rien d'incompatible entre le projet de loi C-300 et le travail que vous faites actuellement? Le projet de loi C-300 n'enlève rien à votre travail. En réalité, il s'en sert comme assise. Les infrastructures que vous créez, de même que vos connaissances sur l'industrie minière en Amérique latine et en Afrique, seraient tout à fait pertinentes pour un ministre qui reçoit une plainte et qui exerce ses pouvoirs en vertu de la loi C-300. Êtes-vous d'accord?
    Le projet de loi ne touche pas le travail de l'ACDI dans les pays en voie de développement. De ce point de vue, le projet de loi n'aurait selon moi aucun effet sur les activités de l'ACDI dans les pays.
    Non, mais regardons le gouvernement dans son ensemble pour décompartimenter le tout. Un ministre qui reçoit une plainte voudra obtenir de l'information sur l'activité en question de la part de l'ensemble du gouvernement canadien. Vous avez des renseignements du Pérou, de la Colombie ou d'ailleurs, dans lesquels on nomme des entreprises et on décrit ce qu'elles font. J'imagine que les ambassades canadiennes dans ces pays connaissent très bien ce que font ces entreprises là-bas, et leurs représentants locaux sont continuellement en communication avec l'ambassade. Comment le projet de loi C-300 serait-il incompatible avec le travail que vous faites?
    Je ne m'objecte pas au travail que vous faites. Je crois qu'il est important. Mais je ne comprends pas tout à fait comment le projet de loi C-300 serait incompatible avec ce que vous faites. Je crois que M. McKay l'a bien énoncé ce matin lorsqu'il a dit que vous deviez considérer le projet de loi C-300 comme les deux dernières étapes de la table ronde que le gouvernement a décidé de ne pas mettre en oeuvre. Nous pourrions probablement résoudre la plupart de nos problèmes si nous donnions à la conseillère quelques pouvoirs qu'elle ne détient pas actuellement. Je crois qu'on pourrait ainsi résoudre tout conflit, qu'il soit apparent ou réel, entre la proposition de M. McKay et celle du gouvernement.
    Comme je l'ai dit, et comme vous en avez parlé dans votre exposé, le projet de loi C-300 n'a pas d'effet direct sur les activités de l'Agence canadienne de développement international sur le terrain. Donc, du point de vue du bon fonctionnement du projet de loi, je crois qu'il a plus d'impact sur le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et qu'il serait probablement plus approprié de poser la question aux Affaires étrangères.
    Donc, il n'aura pas de répercussion sur le rôle de l'ACDI dans la stratégie de responsabilité sociale.
    Mais ce que fait l'ACDI se rattache aux grandes orientations politiques du gouvernement concernant le développement en Amérique latine. Ça fait partie de notre politique étrangère, ce n'est pas distinct. L'ACDI est présente dans les activités du Canada dont nous parlons.
    Je veux seulement dire que si le projet de loi C-300 prévoit que le ministre se penche sur les activités lorsqu'il reçoit une plainte, alors évidemment les renseignements... Ce que fait l'ACDI et ce qui a un lien avec une société en particulier seraient très pertinents pour le ministre des Affaires étrangères. Ce serait ridicule de dire que l'ACDI n'est pas dans le tableau. Bien sûr que oui. La conseillère en responsabilité sociale va vouloir vous parler de ce que vous faites et de ce que vous avez vu sur le terrain. Mme Giroux recevra de l'information de son personnel en Amérique latine, tout comme l'ambassadeur sur place. Vrai?
(1005)
    Pour en revenir à ce que vous disiez, et comme je l'ai mentionné, j'en conviens, le contenu de ce projet de loi n'aura pas d'impact sur les activités de l'ACDI sur le terrain...
    Négatif?
    Personnellement, je n'ai pas d'opinion arrêtée là-dessus. Nous n'avons pas encore d'opinion arrêtée sur le projet de loi vu qu'il relève de la compétence d'autres ministères. Quant à son impact sur l'ACDI, nos activités dans ces pays se poursuivraient de la même façon.
    Peut-être que je pourrais me tourner vers Mme Giroux.

[Français]

    Il y a des représentants de l'ACDI qui sont sur place. Ils sont en train de discuter de la situation en Colombie, au Pérou, etc. Nécessairement, vous avez des rapports sur les activités actuelles des compagnies canadiennes.
    Nous avons des rapports indirects par le truchement des gouvernements des pays hôtes avec lesquels on travaille.
    Il m'est impossible de croire que vous n'entendez pas parler des activités des compagnies canadiennes en Colombie ou au Pérou. Dans les journaux locaux, on parle des activités des compagnies canadiennes. Cela existe, vous recevez des rapports.
    De nos ambassades, oui.
    De vos ambassades et des gens qui travaillent pour l'ACDI et pour l'ambassade, n'est-ce pas?
    Généralement, oui. D'habitude, c'est par le truchement de notre secteur politique, dans le cadre d'une approche pangouvernementale, comme vous l'avez dit. Nous recevons des rapports de nos ambassades à ces sujets.
    Que se passe-t-il quand vous recevez des plaintes de gens sur le terrain?
    Vous avez un programme de responsabilité sociale, et un conseiller vient d'être nommé. Que faites-vous de l'information que vous recevez?
    Votre question concerne le volet corporatif. J'espère que je vais bien répondre et je vais demander à mon collègue de m'appuyer.
    Du point de vue de la section des Amériques, l'initiative andine ou l'initiative en faveur de la région des Andes pour promouvoir une responsabilité sociale corporative efficace est en cours de planification et n'est pas encore en marche. Nous travaillons directement avec les gouvernements hôtes, et s'ils ont des plaintes, ils les adressent directement à notre ambassade.
     Cependant, il n'est pas du mandat de l'ACDI de traiter les plaintes des gouvernements hôtes à l'égard des compagnies canadiennes sur le terrain qui peuvent ne pas répondre aux exigences nationales ou internationales.

[Traduction]

    Il est temps de passer à un autre membre.
    L'hon. Bob Rae: Oui, je le vois.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Madame Lalonde.

[Français]

    Voudriez-vous répéter cela? Ce n'est pas le mandat de l'ACDI...
    Le mandat de l'ACDI est de réduire la pauvreté pour favoriser le développement durable. Par l'intermédiaire de nos projets sur le terrain — en Bolivie et au Pérou, c'est surtout dans le secteur minier et dans celui des hydrocarbures —, nous travaillons directement avec les gouvernements des pays hôtes, par exemple avec le ministère de l'énergie et des mines au Pérou et en Bolivie, afin de renforcer la capacité de ces gouvernements à rendre responsables les compagnies canadiennes et autres qui travaillent dans leur pays.
    On renforce leur capacité à mettre en place, par exemple, des cadres législatifs et réglementaires transparents, et ce, pour assurer des mécanismes de dialogue entre les gouvernements, les compagnies et les communautés, et pour assurer des systèmes fiscaux qui peuvent permettre de percevoir des revenus de ces compagnies pour des programmes sociaux. C'est là notre mandat.
(1010)
    Vous aidez donc les pays plutôt que de veiller à ce que les entreprises elles-mêmes soient des bons citoyens. Est-ce bien cela?
    C'est exact. Dans le...
    Il y a quelques années, j'ai suivi les mésaventures de la compagnie Talisman, dont vous vous souvenez sans doute. Cela avait fait l'objet de débats à la Chambre des communes à plusieurs reprises. Cela a sans doute eu quelque chose à voir avec le départ du ministre Axworthy.
     Dans un des paragraphes de la deuxième page, monsieur MacLennan, vous parlez de l'absence d'institutions solides et dans une des dernières phrases de ce paragraphe, on peut lire ceci: « Enfin, certains pays puisent dans les recettes provenant des ressources naturelles pour financer un conflit. » C'était exactement ce que faisait le Soudan, à l'époque, à partir des revenus provenant du pétrole. C'est ce qui avait relancé la guerre dans le sud, qui était en train de s'arrêter, faute de combattants.
    Dans un cas semblable, l'ACDI ne peut rien faire. Même si vous allez voir le gouvernement et que vous lui dites que prendre les revenus du pétrole qui est extrait par une compagnie canadienne n'a pas de sens, il peut ne pas vous écouter du tout. Vous n'avez aucune façon d'agir sur la compagnie elle-même et on laisse faire.
    En effet, ce que vous dites est exact. Le rôle de l'ACDI n'est pas de traiter des plaintes contre les compagnies canadiennes. Cela est clair.
    À votre connaissance...
    Par contre, le rôle de l'ACDI est véritablement de travailler dans le cadre des plans de développement des pays en voie de développement. Présentement, on est au Soudan. Dans ce cadre, on travaille avec le pays pour déterminer où exactement l'ACDI peut aider. Nous ne sommes pas actifs dans le secteur de la gestion des ressources naturelles dans tous les pays. Souvent, nous le sommes dans le domaine de l'éducation et de la sécurité alimentaire. Cela peut être la santé et l'éducation. Nos programmes cadrent dans le plan de développement du pays. Nous ne sommes pas nécessairement actifs partout.
    En somme, vous seriez très bien placés pour voir les effets positifs de cette loi si elle était appliquée.
     La réponse est oui.

[Traduction]

    Madame Deschamps.

[Français]

    J'aimerais poser deux brèves questions, dont une par pure curiosité. Avez-vous participé à la vaste consultation des tables rondes?
    Vous avez été des participants actifs?
    Oui, on a surtout participé au rapport.
    Vous avez participé au rapport qui a émané de cela. Vous me dites qu'en plus, vous avez organisé des tables rondes en juillet dernier.
(1015)
    Dans ce cas également, ça portait sur la responsabilité sociale des entreprises. Les participants ont probablement été les mêmes, à savoir des gens de la société civile, du secteur privé et du monde de l'industrie. Quel était le but? Est-ce qu'un rapport a émané de ces consultations? En est-il ressorti quelque chose que nous pouvons consulter?
    Ces consultations ont été demandées par la ministre de la Coopération internationale.
    Quel était l'objectif?
     C'était d'échanger avec les compagnies et les organisations non gouvernementales, respectivement, et de voir comment l'ACDI pourrait mettre en oeuvre sa partie de la Stratégie de responsabilité sociale des entreprises. Dans mon témoignage, j'ai expliqué comment l'ACDI pouvait aider les pays en voie de développement à créer des agences, des institutions, des règlements et ainsi de suite, et ce, en vue de mieux gérer leurs ressources naturelles. Il s'agissait de connaître le point de vue des compagnies canadiennes qui sont actives dans ces endroits, de même que celui des organisations non gouvernementales qui sont impliquées activement dans cette situation.
    L'ACDI finance-t-elle les compagnies minières par l'entremise de programmes?
    Non, pas à ma connaissance.
    Notre rôle est d'aider les pays en voie de développement, soit les gouvernements nationaux, locaux ou régionaux, les communautés, la société civile et ainsi de suite, dans un contexte de décentralisation. C'est ce qui se passe en Amérique latine, entre autres. C'est avec eux que nous travaillons et que nous contribuons à faire en sorte qu'ils puissent tenir responsables les compagnies du monde entier qui travaillent dans leur pays. Ça se fait dans le cadre de la souveraineté de leur propre pays, de leur propre réglementation. Notre but est de travailler avec le pays hôte et la gamme de ses acteurs.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Le temps est écoulé.
    Passons maintenant à M. Abbott et à Mme Brown.
    Je vous remercie.
    Je vais tâcher de laisser assez de temps à Mme Brown.
    Monsieur MacLennan, je n'ai pas tout à fait compris les propos de Mme Lalonde. Avez-vous bien dit que, en tant que directeur général de l'ACDI, vous étiez en faveur du projet de loi C-300?
    Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai plutôt dit très clairement que le projet de loi n'a pas d'impact direct sur les activités de l'ACDI. Je pense qu'il ne se rapporte d'aucune façon aux activités que l'ACDI mène actuellement dans sa stratégie de responsabilité sociale des entreprises.
    Je suis content de vous avoir posé la question.
    Je dois dire qu'en tant que secrétaire parlementaire de la ministre, j'ai été un peu surpris par un passage dans votre exposé, qui dit ceci:
En l'absence d'institutions solides, les ressources naturelles telles que les minéraux, le pétrole et le gaz risquent de devenir une « plaie » qui engendrera divers problèmes...
    Puis, vous énumérez les problèmes.
    Je me demandais si, après coup, vous vouliez reconsidérer le choix du mot « plaie ». N'est-ce pas dérangeant que vous ayez cette opinion? Je me serais attendu à ce genre de déclaration d'une ONG qui a travaillé là-bas et qui a constaté certaines choses. Nous avons entendu ce genre de témoignage. Mais dans ce cas-ci, je suis stupéfait que vous utilisiez le mot « plaie ». Même si ça fait partie du vocabulaire courant, je me demandais maintenant si, en tant que directeur général, vous vouliez revoir ce choix de mot.
    Remarquez que le mot « plaie » est placé entre guillemets. Je l'utilise par allusion à un débat particulier au sein de la communauté du développement quant aux problèmes qui sont susceptibles de se produire avec l'exploitation de ressources. Mon collègue Bill Singleton peut parler mieux que moi de la source exacte et des différents aspects du débat en question.
    Comme M. MacLennan l'a dit, le mot est placé entre guillemets. Il est très largement utilisé et, en effet, il n'est pas anodin. Mais prenons une certaine distance pour un instant. Ce que ce mot vise à exprimer, c'est la nature du phénomène que l'on a trop souvent observé dans les pays en développement, à savoir l'apparition de problèmes importants, y compris au niveau macro-économique. Un des éléments de la « plaie », celui qui est souvent le premier dont on parle, est appelé « syndrome hollandais » par allusion à une situation qui s'est présentée aux Pays-Bas. Ce pays avait découvert des gisements de gaz en mer. Sur le plan économique, cette découverte a entraîné une élévation du taux de change de leur devise et porte gravement atteinte aux secteurs manufacturier et agricole du pays — c'était avant l'euro — parce qu'il n'était plus possible d'exporter de façon rentable.
    Voilà un des phénomènes qui guettent les pays en développement. Il faut également mentionner le fait que les prix internationaux des produits fluctuent considérablement et, par conséquent, leurs recettes également. C'est très difficile à gérer parce qu'il est impossible de prédire ni l'un... le boom économique, c'est bien, mais attention à l'effondrement économique qui suivra.
    Un certain nombre d'autres facteurs s'associent pour constituer ce qu'on en est venu à appeler une plaie. Certains ont dit — vous vous en réjouirez sûrement — et nous tiendrons compte de ce volet... qu'il fallait parler davantage de l'impact. Il y a l'impact négatif et l'impact positif. Il faut bien comprendre que le mot « plaie » est un terme que les ONG ne sont pas seules à utiliser. C'est un mot qui exprime en abrégé tous les problèmes susceptibles de se présenter, mais cela aussi il est possible de le gérer.
(1020)
    Nous pourrions poursuivre ce débat mais je veux m'assurer que Mme Brown ait la possibilité de s'exprimer.
    Merci, monsieur le président, et merci pour votre présence ici aujourd'hui. Je vais enchaîner sur la même réflexion en l'abordant sous un angle légèrement différent.
    D'abord, je veux vous remercier de votre présence ici parce que tous les Canadiens et les Canadiennes souhaitent savoir, je crois, ce qui est fait avec l'argent consacré au développement par l'intermédiaire de l'ACDI. C'est une occasion pour eux d'en avoir un petit aperçu, surtout si on peut observer à quel point ses effets sont multipliés quand on travaille avec le secteur industriel des pays concernés et que l'on voit que l'argent est bien utilisé.
    Dans votre exposé, vous avez souligné l'importance du secteur de l'extraction dans les pays en développement. Plus loin, vous avez dit que l'une des responsabilités qui vous incombaient était le développement des capacités des gouvernements hôtes. Plus loin encore, vous avez dit que, en majeure partie, les sommes sont investies dans les services publics et le soutien social. Le dernier intervenant que nous avons entendu a parlé des conséquences, en termes la plupart du temps négatifs.
    Monsieur Singleton, j'aimerais enchaîner là où nous venons de laisser et parler des conséquences davantage positives qu'ont nos industries extractives dans ces pays. Nous avons entendu parler des allégations vexatoires dont certaines de ces entreprises font l'objet. Que se passerait-il dans les pays dans lesquels nous sommes actifs si les entreprises en question faisaient l'objet d'une accusation vexatoire et décidaient de ne plus y poursuivre de travaux d'extraction?
    Il y a deux parties dans votre question.
    Je vais d'abord parler de l'impact positif des entreprises canadiennes actives dans les pays en développement; d'une certaine manière, ce qui arriverait si elles se retiraient serait le contraire de cet impact.
    D'abord, il y a l'investissement. L'investissement direct étranger est affecté à l'exploration et à l'exploitation minières. Il faudrait également inclure le pétrole et le gaz, mais les mines nous serviront d'exemple. D'abord, il y a l'investissement initial qui crée de l'emploi à long terme pour les membres de la communauté et pour leur famille. L'un des sujets qui reviennent souvent dans les discussions sur la RSE en général — pour parler des aspects positifs — c'est que les entreprises assurent également des services de santé, d'éducation et d'autres services sociaux aux communautés concernées. Au Canada, ces responsabilités incombent aux gouvernements. Dans les pays en développement, c'est en général l'entreprise qui assure les services de ce genre auprès de la communauté, en particulier dans les régions rurales. Les gouvernements n'en ont généralement pas la capacité. Voilà donc un élément de réponse.
    Il y a également le transfert de technologie. Les entreprises canadiennes apportent avec elles de la technologie de pointe à l'industrie minière et les gens reçoivent une formation en conséquence. Il faut aussi parler des recettes. Des redevances et des impôts sont versés. Ils diffèrent d'un pays à un autre, mais certaines de mes recherches personnelles font ressortir clairement toute l'importance pour le pays concerné des recettes issues de ce secteur. Prenez le cas du Pérou. Près de 50 p. 100 des recettes que touche le gouvernement national proviennent du secteur de l'extraction, sous forme d'impôts, de redevances et d'autres rentrées.
    Je n'essaierai pas d'imaginer ce qui arriverait si les entreprises se retiraient parce que premièrement, elles y ont un intérêt important s'étalant parfois sur des périodes de 35 à 50 ans dans le cas d'une mine; ce serait une grosse décision à prendre, mais effectivement, certains des avantages qu'elles ont apportés s'en iraient avec elles.
(1025)
    Merci beaucoup, monsieur Singleton.
    Je donne maintenant la parole à M. Dewar.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos invités.
    L'un des aspects du mandat de l'ACDI est de rechercher l'efficacité de l'aide accordée et la réduction de la pauvreté. Je relève dans vos commentaires le passage où vous dites que « l'agence s'affaire actuellement à trouver la personne qui travaillera avec la Banque mondiale à la mise en oeuvre de l'ITIE dans un certain nombre de pays d'Afrique ».
    Pourriez-vous nous dire où vous en êtes à cet égard? Y a-t-il un délai de fixé pour trouver la personne que vous recherchez? Pourriez-vous nous dire ce que vous attendez d'elle?
    Nous visons le début de 2010. Notre approche consiste à travailler avec la Banque mondiale à ce stade-ci afin de déterminer le secteur, le programme où nous pourrons apporter la meilleure contribution. L'agence fournira les fonds pour le financer, mais c'est la Banque qui se chargera de l'exécution. L'employé ferait partie de l'effectif de la banque. Voilà les détails du projet. Nous chercherions ainsi à travailler avec les gouvernements locaux dans la région où la personne retenue travaillerait.
    Nous travaillerions avec les gouvernements locaux. En ce qui concerne la mise en oeuvre de l'ITIE, l'initiative relative à la transparence, un certain nombre de pays ont présenté leur candidature pour y adhérer. Ils doivent se soumettre à un important processus de validation pour obtenir leur attestation, si je puis dire. Dans tous les cas, il y a le volet du travail avec les communautés, parce que la raison d'être même de l'ITIE est d'accroître la transparence et de permettre aux communautés de poser les bonnes questions à leurs gouvernements.
    Le candidat que nous recherchons réunira en sa personne la capacité de travailler confortablement et efficacement dans un pays en développement, y compris au niveau local, et une connaissance raisonnable — ou peut-être la capacité d'acquérir cette connaissance — du secteur lui-même, parce que les défis à relever dans le secteur de l'extraction seront différents de ceux que présenterait le secteur de l'éducation, par exemple.
    L'une des raisons pour laquelle j'ai posé cette question, c'est que j'ai eu l'occasion au printemps dernier d'aller en République démocratique du Congo avec la Banque mondiale pour examiner les projets qu'elle a financés. J'ai parlé à des fonctionnaires de notre ambassade. J'ai parlé à l'ambassadrice des préoccupations qu'elle avait entendues sur le terrain au sujet du rendement des entreprises en général et des entreprises canadiennes en particulier. Ensuite, j'ai parlé aux Congolais. J'ai parlé à leurs ministres et aux gens dans les collectivités, et j'ai examiné les projets de grande et moins grande envergure.
    De toute évidence, ils veulent la distribution d'une aide plus efficace et la réduction de la pauvreté — ce qui complète les objectifs de l'ACDI —, mais ils ont aussi dit très clairement que le plus important, c'est que les pays développés qui peuvent surveiller leurs activités internes doivent faire plus. Il ne s'agissait pas seulement d'une opinion exprimée par l'ambassadrice, mais elle communiquait ce qu'elle entendait, et j'ai parlé à d'autres ambassadeurs également.
    Quand on s'engage dans quelque chose qui, selon moi, serait admiré de tous, c'est-à-dire améliorer la transparence et étudier les avantages financiers de tout développement, mais en particulier des matières extractibles parce qu'elles sont si profondes dans des endroits comme le Congo et l'Amérique latine, ce projet de loi compléterait cela. Je sais que vous êtes dans une position où vous ne pouvez pas vraiment donner une opinion, mais je remarque que la direction prise par l'ACDI que vous présentez ici — et je crois que personne ne la conteste — consiste à accroître l'efficacité de l'aide et des investissements en même temps.
    Je dirais donc à mes collègues d'en face que je ne vois aucun problème quant au mandat de l'ACDI et à ce projet de loi. En fait, je dirais qu'ils sont parallèles et complémentaires, certainement par rapport à ce que j'ai vu et entendu sur le terrain.
    Quand l'ACDI déclare qu'elle met l'accent sur la réduction de la pauvreté, pouvez-vous vraiment affirmer que vous êtes en mesure de réduire la pauvreté sans considérer les investissements directs du secteur privé? N'est-ce pas une partie du problème?
    C'est tout à fait vrai. Comme vous le savez sans doute, le ministre de la Coopération internationale a annoncé en mai cinq priorités thématiques concernant l'enveloppe de l'aide internationale, dont trois visent particulièrement l'aide au développement international par l'entremise de l'ACDI.
    La croissance économique durable en est une, et le seul et l'unique moyen consiste à attirer des investissements dans les pays en développement pour favoriser la croissance économique — un type de croissance inclusif et durable qui peut réduire la pauvreté. Sans croissance économique, il est très difficile d'avoir un véritable impact à long terme sur la réduction de la pauvreté dans les pays en développement.
(1030)
    Si une croissance économique durable permet de réduire la pauvreté, j'estime qu'il incomberait aux sociétés canadiennes de suivre cette même voie. À l'heure actuelle, on renforce les capacités, on forme les gens sur le terrain, du moins du point de vue de l'ACDI, mais vous ne pouvez pas — et ce n'est pas dans votre mandat — dire aux entreprises ce qu'elles devraient faire. Est-ce exact?
    Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n'avez pas dites, mais l'aide de quelqu'un pourrait être la bienvenue.
    Nous avons pour mandat d'aider les pays en développement à faire face à ce genre de problèmes. Notre mandat, et ça marche dans les deux sens... La création d'institutions solides, d'organismes, de compétences dans les pays en développement ne crée pas seulement un environnement plus propice aux investissements. Les entreprises extractives ne veulent pas aller dans des endroits où elles n'ont aucune idée... Il faut bien le dire, elles sont là pour rester. Aller à des endroits très risqués dans lesquels elles n'ont aucune garantie de l'application des règlements et où il existe de la corruption au sein des administrations locales ou nationales ne fait qu'augmenter les risques de l'entreprise.
    L'ACDI vise à aider les pays à créer ce genre de cadre pouvant offrir un environnement propice qui ne permettra pas seulement d'attirer des investissements et de réduire la pauvreté — c'est notre objectif —, mais aussi de leur donner des moyens de faire face aux problèmes, que les entreprises soient canadiennes, allemandes, norvégiennes ou russes. À mon avis, les pays en développement se préoccupent peu de la nationalité de l'entreprise. En réalité, ils ne veulent qu'avoir les outils pour affronter ces problèmes.
    Avant de céder la parole, monsieur le président, je dirais que si c'est le mandat de l'ACDI de renforcer les capacités sur le terrain afin que les gens puissent faire du mieux qu'ils peuvent et qu'on peut y contribuer, alors je crois qu'il incombe au Canada de voir à ce que ces entreprises à l'étranger fassent de même. Selon moi, il serait très hypocrite que l'ACDI effectue ce travail à l'étranger — du bon travail, en passant par la Banque mondiale et d'autres institutions — et qu'on reste là à rien faire en disant: « Vous savez quoi? Nous serons volontaires, et nous laisserons les entreprises agir comme elles l'entendent en espérant qu'elles ont des objectifs idéalistes. »
    Je terminerai en disant que je considère le mandat et la direction de l'ACDI et où elle s'en va avec la RSE et ce projet de loi comme étant complémentaires et parallèles. Mais je peux le dire; vous n'avez pas à le faire, mais merci.
    Merci, monsieur Dewar, de conclure en nous donnant votre opinion sur ce projet de loi.
    Et merci à l'ACDI d'être venu et de nous avoir donné son point de vue sur la responsabilité sociale d'entreprise, sur ce que fait l'ACDI et sur une partie du projet de loi également.
    Nous allons nous arrêter quelques instants. Nous allons reprendre les travaux du comité. Je vais demander au comité... Il y a quelques points dont nous devons parler: certainement les motions que nous allons étudier et que, j'imagine, nous voudrons publiques et une partie des travaux du comité porte sur un sujet que nous traiterons peut-être à huis clos, juste avant la motion. Ensuite, la séance publique reprendra.
    Je disais donc que nous allons nous arrêter. La séance se tiendra à huis clos pour la première partie des travaux du comité. Nous vous demandons d'en profiter pour quitter, si vous n'êtes pas avec un député. La séance publique reprendra ensuite et nous aborderons la motion.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU