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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 040 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 novembre 2009

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Français]

    Bonjour, chers collègues.

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 40e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international et nous sommes le jeudi 19 novembre 2009. Nous reprenons notre étude du projet de loi C-300, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières ou gazières dans les pays en développement, Loi sur la responsabilisation des sociétés à l'égard de leurs activités minières, pétrolières et gazières dans les pays en développement.
    Notre premier groupe de témoins comprend quelqu'un qui n'est certainement pas un étranger dans l'édifice de l'Ouest, ni dans l'édifice du Centre ou n'importe où sur la colline parlementaire puisque c'est l'honorable Perrin Beatty, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada.
    Il est accompagné de Susanna Cluff-Clyburne, directrice des Affaires parlementaires à la Chambre de commerce.
    Bienvenue devant notre comité. Nous avons hâte d'entendre votre déclaration liminaire, après quoi les membres du comité vous poseront quelques questions.
    Merci de votre présence.
    Je vous remercie, vous et vos collègues, de votre accueil chaleureux. Nous sommes très heureux de comparaître devant le comité et sommes tout à fait prêts à participer à un échange de vues avec vous.
    Comme vous l'avez dit, je m'appelle Perrin Beatty et je suis président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada. Je suis accompagné ce matin de Susanna Cluff-Clyburne, notre directrice des relations parlementaires.

[Français]

    La Chambre de commerce du Canada est l'organisme de gens d'affaires le plus représentatif du Canada. Grâce à notre réseau de plus de 325 chambres de commerce locales, nous parlons au nom de 175 000 entreprises de toutes tailles actives partout au pays.
    La Chambre de commerce du Canada compte de nombreuses sociétés pétrolières, gazières et minières parmi ses membres.
    Nos membres sont conscients de la responsabilité et de la valeur commerciale inhérentes à des opérations commerciales durables. Cela inclut, notamment, tenir compte de l'impact économique, social et environnemental dans l'exercice de leurs activités. Ils reconnaissent également qu'un seul mauvais joueur peut entacher la réputation de toutes les sociétés canadiennes actives dans un lieu ou un secteur particulier.

[Traduction]

    Monsieur le président, des entreprises et des gouvernements du monde entier s'efforcent de satisfaire aux attentes sociales et environnementales croissantes dans leurs activités domestiques et étrangères, ce qui se traduit par l'adoption de normes acceptées internationalement, que vous connaissez fort bien.
    Pour appuyer ses membres, la Chambre de commerce du Canada a participé à la contribution du Business and Industry Advisory Committee aux Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales, au travail de la Chambre de commerce internationale concernant le Pacte mondial des Nations Unies, et à l'enquête du représentant spécial des Nations unies, John Ruggie, sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales. La Chambre de commerce a également participé activement à la contribution du Canada à l'élaboration de la norme de responsabilité sociale ISO 26000.
    La Chambre de commerce du Canada applique depuis longtemps en matière de responsabilité sociale des entreprises une politique voulant que le comportement socialement responsable doit continuer d'être défendu et appuyé par le gouvernement. En oeuvrant avec les entreprises avant qu'elles connaissent des problèmes, puis en continuant d'oeuvrer avec elles lorsqu'elles en connaissent, le Canada et les entreprises canadiennes sont considérés comme des chefs de file mondiaux. Les chefs d'entreprise du Canada sont parfaitement conscients qu'il est dans leur intérêt commercial d'être perçus comme des agents respectant les normes les plus élevées possible.
    La Chambre de commerce du Canada a communiqué aux députés, par écrit et en personne, les préoccupations de ses membres concernant le projet de loi C-300 depuis son dépôt en février. Je suis donc certain que les membres du comité connaissent bien notre position.
    Renforcer l'avantage canadien concorde avec l'opinion de la Chambre de commerce et de ses membres des industries extractives selon laquelle le Canada contribue le mieux au travail des entreprises en leur donnant les outils nécessaires pour éviter de connaître des difficultés dans les pays en développement. En outre, si elles connaissent de telles difficultés, il est encore plus important de continuer à travailler avec elles pour les aider à les résoudre, afin de préserver la réputation du Canada. Renoncer et s'enfuir n'est tout simplement pas la bonne solution.
    La stratégie du gouvernement entérine le rôle crucial des régimes d'accueil des pays en développement et s'engage à leur fournir des ressources supplémentaires par le truchement de l'ACDI, de Ressources naturelles Canada, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, ainsi que des organismes internationaux tels que l'initiative de transparence des industries extractives.
    En qualité d'ex-secrétaire d'État aux Affaires étrangères, monsieur le président, je pense que c'est la bonne méthode. Tout comme nous résisterions à une ingérence étrangère quelconque dans nos affaires, les pays étrangers souverains n'apprécieraient pas que des agents du gouvernement canadien viennent faire enquête sur des projets réalisés sur leur territoire ou que nos lois déterminent quelles entreprises peuvent agir chez eux ou non. S'il est adopté, le projet de loi C-300 sera préjudiciable à la politique étrangère du Canada.
    La conseillère en RSE récemment nommée assure un juste équilibre entre les parties concernées tout en préservant la primauté du point de contact national du MAECI en ce qui concerne la promotion des Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales. D'aucuns prétendent que la conseillère ne pourra mener d'enquêtes qu'avec l'accord de toutes les parties mais nous savons bien que des enquêtes crédibles seraient impossibles sans la coopération non seulement des entreprises concernées mais aussi, et c'est tout aussi important, des gouvernements d'accueil. Selon nos informations, le refus de coopérer d'une partie quelconque serait mentionné dans le rapport annuel de la conseillère destiné au Parlement et ferait légitimement l'objet de critiques. Toute partie refusant de coopérer s'exposerait à l'opprobre du public. Cette disposition est un puissant aiguillon pour la bonne exécution des enquêtes.
    Le rôle de la conseillère en RSE ne diffère notablement de celui de l'ombudsman indépendant recommandé dans le rapport des tables rondes et de ce qui est proposé dans le projet de loi C-300 que dans la mesure où celle-ci n'aura pas le pouvoir de recommander que le gouvernement retire ses ressources des entreprises qui se sont mal comportées. Encore une fois, c'est la bonne méthode. Notre but ne doit pas être de punir mais de faire en sorte que toutes les sociétés respectent les normes les plus élevées possible. Notre but est de formuler des normes de pointe au niveau mondial, d'encourager les gens à les respecter et d'oeuvrer avec les entreprises pour s'en assurer. C'est de cette manière que nous pouvons être le plus utiles à tout le monde.
(0905)

[Français]

    Un des aspects malencontreux du projet de loi C-300 — qui pourrait hanter tout gouvernement forcé de l'administrer — consiste en ce qu'il pose un risque déraisonnable pour les finances et la réputation des sociétés du secteur extractif. Ce dernier est très exigeant en investissements, axé sur le long terme et généralement actif dans des régions très éloignées des pays développés et en voie de développement. Chaque projet, ou presque, aurait ses adversaires, peu importe le sens des responsabilités dont fait preuve la société qui le dirige. Des gens qui croient que le processus d'extraction des ressources est inacceptable s'opposeront pratiquement à tous les projets. C'est le cas ici, au Canada, et l'expérience est la même ailleurs dans le monde. Notons que les perspectives de ces détracteurs vont souvent à l'encontre de celles des collectivités qui profitent de ces projets.
    Le projet de loi C-300 fournirait une voie unilatérale, entérinée par la loi, aux organismes dont la survie dépend de leur capacité à faire des allégations contre les sociétés du secteur extractif. Les plaintes fondées sur une idéologie plutôt que sur le rendement occasionneraient d'énormes coûts aux contribuables et aux entreprises.
(0910)

[Traduction]

    Monsieur le président, la fonction de vérification proposée pour le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international dans le projet de loi C-300 mobiliserait des dollars et du personnel dont le ministère a désespérément besoin pour d'autres choses. Il est facile d'imaginer quelles serait les conséquences si l'un des associés d'un projet en participation perdait son crédit d'Exportation et Développement Canada. Seuls les avocats s'enrichiraient dans une telle situation.
    Les entreprises canadiennes réussiront-elles jamais à satisfaire ceux et celles qui s'opposent par principe à leurs activités? Probablement pas. On voit mal comment elles le pourraient. Malgré cela, elles seront confrontées au spectre de devoir constamment surveiller leur environnement pour voir qui lance ou risque de lancer une attaque contre elles par le truchement du mécanisme qu'institutionnaliserait le projet de loi C-300. Cela constituera-t-il un handicap pour les entreprises canadiennes? Absolument. La partie ayant déposé une plainte pourra-t-elle se satisfaire d'une investigation ministérielle? Probablement pas. En qualité d'ex-ministre, je dois dire que le processus d'investigation mal défini dans le projet de loi C-300 me préoccupe. En revanche, la stratégie du gouvernement comporte un processus bien défini en cinq étapes comprenant une analyse initiale, une médiation informelle, une enquête factuelle, l'accès à une médiation officielle et le dépôt d'un rapport.
    En droit pénal, monsieur le président, nous veillons scrupuleusement à respecter le principe voulant que toute personne est considérée innocente tant qu'elle n'a pas été trouvée coupable, et nous veillons attentivement à ce que sa réputation ne soit pas entachée par inadvertance. Avec le projet de loi C-300, par contre, le dommage sera causé à l'entreprise dès qu'une plainte aura été formulée et publiée. Ceux qui veulent empêcher les entreprises canadiennes de faire des affaires à l'étranger — catégorie qui comprend, c'est très important, nos concurrents étrangers — pourraient être fortement incités à faire des allégations. La publication dans la Gazette du Canada, plusieurs mois après le dépôt de la plainte, d'un rapport concluant que la plainte était frivole ou vexatoire arrivera bien trop tard pour rétablir la réputation de l'entreprise, voire la viabilité financière du projet concerné.
    Un tel rapport ne fera évidemment pas l'objet d'autant de publicité au Canada, et encore moins dans un pays en développement, que l'accusation d'origine, et il faudra peut-être des années à l'entreprise pour rétablir sa réputation. Entre-temps, ses concurrentes étrangères continueront leurs activités. Talisman Energy est un bon exemple de l'effet qu'aurait le projet de loi C-300. Le nom de cette entreprise est encore aujourd'hui associé à des allégations infondées de transgression effarante des droits humains au Soudan, plusieurs années après qu'elle ait été exonérée par les tribunaux et qu'elle ait dû dépenser des dizaines de millions de dollars en justice. En outre, et c'est peut-être ce qui est le plus tragique pour les citoyens soudanais, tout le monde convient que leur situation ne s'est pas améliorée quand cette entreprise canadienne à la réputation exemplaire a cédé sa participation au projet.
    Le fait est que la grande majorité des sociétés d'extraction canadiennes agissent de manière responsable et sont considérées comme des chefs de file mondiaux dans ce domaine. Plus tôt que cette année, Talisman Energy a été nommée par l'hebdomadaire Maclean's et par Jantzi Research comme l'une des 50 entreprises les plus socialement responsables du Canada. Une autre société canadienne d'extraction, Barrick Gold, a été nommée en 2009 pour la deuxième année de suite à l'indice mondial Dow Jones de durabilité. Cet indice, qui est l'un des premiers au monde en ce qui concerne les pratiques durables des entreprises, évalue la performance économique, environnementale et sociale à long terme de 2 500 entreprises de pointe du monde en utilisant des critères objectifs pour trouver les 10 p. 100 les meilleures. C'est une référence très importante.
    Il faut comprendre les bienfaits durables que les sociétés extractives apportent aux collectivités. Comme au Canada, elles créent pour les citoyens des pays où elles sont présentes des possibilités économiques et sociales. Elles contribuent de manière importante au produit intérieur brut des pays d’accueil, à l’infrastructure, aux recettes fiscales, à la formation professionnelle et à la qualification de la main-d’œuvre, ainsi qu’à un développement économique durable. Or, il arrive souvent qu’on ne tienne pas compte de l’incidence économique positive de ces activités et investissements.
    Exportation et Développement Canada vous a expliqué l'effet qu'aura le projet de loi C-300 sur son aptitude à passer des accords financiers avec les sociétés extractives canadiennes. On vous a aussi expliqué comment l'ingérence du gouvernement dans les décisions d'investissement de l'Office d'investissement du régime de pensions du Canada entravera son mandat consistant à maximiser les gains des employeurs et employés canadiens qui cotisent, en toute indépendance du gouvernement. Cela exigera aussi des modifications à la législation régissant l'Office d'investissement du RPC.
(0915)
    Certains se demandent s'il serait vraiment grave que les entreprises soient privées du financement ou des investissements du Régime de pensions du Canada. Après tout, les sociétés d'extraction sont grandes et ont de vastes ressources financières. Toutefois, le crédit d'EDC et les investissements institutionnels comme ceux du Régime de pensions du Canada sont des ressources financières essentielles pour les entreprises canadiennes, extractives ou autres. Les sanctions proposées dans ce projet de loi pourraient être très sévères et avoir un effet dévastateur sur les entreprises et sur leurs employés canadiens et étrangers, ainsi que sur les projets de pays en développement faisant l'objet d'allégations. Être privé du crédit d'EDC et de son assurance contre les risques politiques, et se retrouver sur la liste noire du Régime de pensions du Canada, entraînerait l'annulation de projets et la disparition d'emplois. Confrontées à l'incertitude d'une évaluation à l'aune de lignes directrices mal définies, bon nombre d'entreprises canadiennes décideront tout simplement de ne pas prendre le risque de lancer de nouveaux projets dans les pays en développement.
    Le projet de loi C-300 aura des conséquences non seulement sur les grandes sociétés extractives mais aussi sur les douzaines de petites entreprises qui les desservent.
    L'un des grands paradoxes est que nous exprimons tous des réserves au sujet du rachat d'entreprises canadiennes, en disant que nous voudrions que ce soient plutôt nos entreprises qui rachètent des entreprises étrangères, mais ce projet de loi C-300, qui aura un effet discriminatoire sur les entreprises canadiennes, ira totalement à l'encontre de cet objectif. Il dissuadera les entreprises canadiennes d'acheter des entreprises agissant de manière inappropriée dans les pays en développement, dans le but de rendre leurs activités conformes aux normes internationales. Pourquoi le feraient-elles si cela devait les exposer à des sanctions et à une perte de réputation? Les grands perdants, dans ce cas, seront les citoyens des pays en développement, réduits à accepter les entreprises de pays ayant des normes moins élevées.
    Les sociétés extractives du Canada sont touchées de plein fouet par la récession. Leurs problèmes sont exacerbés par l'incertitude issue de la publication du rapport des tables rondes, il y a quelques années, et par l'attente de la réponse du gouvernement. Le projet de loi C-300 rehaussera cette incertitude interminable. Même après son adoption, l'incertitude subsistera en attendant l'élaboration des lignes directrices. Or, il s'agit ici d'un secteur qui dresse ses plans des dizaines d'années à l'avance et qui a besoin du maximum possible de certitude, de cohérence et de clarté dans les politiques et règlements.
    La Chambre de commerce du Canada estime que toute entreprise canadienne oeuvrant à l'étranger se doit de respecter des normes élevées de responsabilité sociale. Le message que nous vous adressons est que le gouvernement devrait oeuvrer avec les entreprises et avec les gouvernements des pays en développement avant que des problèmes n'apparaissent pour s'assurer que le Canada et les sociétés canadiennes soient perçus comme des chefs de file mondiaux. Il est dans notre intérêt à tous que cela fasse partie de la marque Canada.
    Le projet de loi C-300 pourrait engendrer un environnement de conformité minimale au lieu d'un environnement dans lequel la concurrence pousse les entreprises à adopter les meilleures pratiques possible. Si une entreprise connaît des difficultés parce qu'elle manque d'expérience ou pour des raisons qu'elle ne contrôle pas, être privée des ressources du gouvernement parce qu'elle fait l'objet d'allégations de comportement répréhensible ne règle rien, les parties affectées restant dans une situation identique, si ce n'est pire, et l'entreprise n'étant pas en meilleure position pour apporter les correctifs éventuellement requis. Cela laisse en outre en lambeaux la réputation du Canada, la réputation du gouvernement du Canada et la réputation d'un des secteurs les plus importants pour notre économie.
    Je ne conteste aucunement la bonne foi des auteurs ou partisans du projet de loi. Comme nous tous, l'auteur du projet de loi souhaite que le Canada et les entreprises canadiennes aient la réputation de se conformer aux normes d'éthique les plus élevés au monde et, comme nous tous, il voudrait que les entreprises canadiennes connaissent du succès sur la scène mondiale. Paradoxalement, cependant, le projet de loi C-300 nous poussera exactement dans la direction opposée en encourageant des allégations désinvoltes et fausses et en donnant à nos concurrents appliquant des normes moins élevées une arme à utiliser contre les entreprises canadiennes.
    Les entreprises canadiennes ont besoin de l'appui du gouvernement par beau temps et mauvais temps. Elles n'ont pas besoin de fardeau bureaucratique supplémentaire, d'obstacles à l'investissement et d'encouragement à transférer leurs activités ailleurs.
    La stratégie de RSE du gouvernement est vieille de sept mois à peine et il convient de lui donner le temps d'être complètement mise en oeuvre avant d'en déclarer l'échec. Une fois qu'elle aura eu la chance de faire ses preuves, nous pourrons bien évidemment l'examiner et voir si des changements s'imposent. Si tel est le cas, nous devrons veiller à ce que ces changements reposent sur l'expérience acquise. En attendant, donnons-lui au moins la chance de faire ses preuves.
    À première vue, le projet de loi C-300 procède d'une bonne politique mais un examen plus attentif montre qu'il ne permettra pas d'atteindre ses objectifs car il lui manque un contexte important et il risque de causer au secteur extractif plus de dégâts qu'on ne peut l'imaginer. Voilà pourquoi, monsieur le président, nous implorons les membres du comité de rejeter ce projet de loi.
    Je vous remercie sincèrement de nous avoir invités à témoigner et je serais ravi de répondre aux questions.
(0920)
    Merci, M. Beatty.
    M. Rae.
    C'est un plaisir de vous voir, M. Beatty. Je dois dire à l'intention des membres du comité que mon amitié et mes contacts avec M. Beatty remontent loin et que je suis toujours très heureux de le revoir en comité.
    J'ai bien reçu votre message. Vous l'avez exprimé avec beaucoup de vigueur. Vous avez donné l'exemple de Talisman. Vous avez donné d'autres exemples en ce qui concerne l'impact sur la réputation. Vous conviendrez cependant qu'il n'y avait pas de projet de loi C-300 lorsque des questions se sont posées au sujet de Talisman. Nous avons aujourd'hui une conseillère qui se penchera sur les dossiers qui seront publiquement connus. Ce sera dans les journaux, sur Internet, sur la Toile.
    Croyez-vous vraiment qu'il est juste de... On pourrait adopter une autre position consistant à dire que le projet de loi C-300 a au moins l'avantage d'offrir à l'entreprise la possibilité d'être complètement exonérée par la déclaration d'un ministre. Vous dites que cela prendrait longtemps.
    Toutefois, il est dit au paragraphe 4(3) que, si l'on
juge la plainte futile, vexatoire ou entachée de mauvaise foi, le ministre qui la reçoit peut refuser d'examiner la question. Sinon, il est tenu de procéder à l'étude de la question qu'elle soulève et d'en évaluer la conformité...
    Je crois pouvoir déduire de cette disposition que le ministre pourrait très rapidement... Il faudrait qu'un processus soit instauré pour permettre au ministre de recevoir ces plaintes et de les examiner rapidement, et je suppose que ce processus comprendrait la participation de la conseillère, mais je ne suis tout simplement pas convaincu que le but du projet de loi C-300 soit nécessairement d'aller loin au-delà de la position exprimée par le gouvernement dans ses propres recommandations sur la RSE.
    En outre, il me semble que M. McKay est peut-être allé un peu plus loin que le consensus qui s'était dégagé, mais je dois dire que ce que le gouvernement a fait est bien inférieur à ce qui avait été convenu. Le rôle de notre comité devrait être de trouver un juste équilibre reflétant parfaitement le consensus auquel les parties étaient arrivées, lesquelles comprenaient des sociétés minières, des syndicats et des organisations environnementales.
    Ce qui me préoccupe au sujet de la stratégie du gouvernement, c'est qu'elle va moins loin que ce que nous souhaitions, et je pense sincèrement que nous pourrions apporter à cette mesure des améliorations qui nous permettraient de toucher la cible.
    Merci beaucoup, M. Rae, de cette question mûrement réfléchie.
    Parlons d'abord de Talisman. Vous avez raison, le problème de Talisman est apparu avant même le dépôt du projet de loi C-300 en Chambre. Donc, même en l'absence de ce mécanisme formel qui, selon nous, favorisera des allégations frivoles, vexatoires ou de mauvaise foi contre des entreprises canadiennes, celles-ci risquaient déjà de voir leur réputation entachée, avec des pertes énormes pour toutes les parties concernées. Notre crainte est que ce projet de loi ne fasse qu'empirer la situation. Il incitera en fait les concurrents des entreprises canadiennes, dont les normes seront peut-être bien intérieures aux leurs, et en tout cas à celles auxquelles nous supposons que toute entreprise canadienne aspire, à formuler ce genre de plainte. Cela les y encouragera.
    Certes, comme vous le dites, il est prévu à l'article 4 que le ministre pourrait refuser d'examiner la question, mais une telle décision serait sujette à une révision judiciaire et, de manière générale, le critère pour rejeter d'office une plainte serait sans doute très élevé. Le ministre ne pourrait pas rejeter d'emblée une plainte parce qu'elle émane d'un groupe connu pour nuire délibérément à la réputation d'entreprises canadiennes. Il ne pourrait pas dire qu'il ne la prend pas au sérieux.
    Il y aurait un processus. On devine aisément que, si une entreprise canadienne désire s'établir à l'étranger et demander des licences d'exploitation, ses concurrentes seront incitées à encourager le dépôt de plaintes alléguant qu'elle transgresse les normes environnementales, les normes de droits humains ou diverses normes internationales de RSE.
(0925)
    Mais elles peuvent déjà le faire aujourd'hui.
    Oui, elles peuvent le faire aujourd'hui.
    L'hon. Bob Rae: Et elles le font aujourd'hui.
    L'hon. Perrin Beatty: Ce qu'elles pourraient faire avec le projet de loi C-300, c'est provoquer une enquête officielle, en vertu de la législation canadienne, enquête qui pourrait déboucher sur le retrait de tout appui gouvernemental à l'entreprise. De quoi parlera-t-on dans la presse? De l'allégation. Du fait que des sociétés minières et pétrolières canadiennes sont accusées d'infractions aux droits humains ou aux règles environnementales. Quand on aura conclu, plusieurs semaines ou mois plus tard, qu'il s'agissait d'allégations frivoles ou émanant de sociétés concurrentes, on en parlera très peu dans la presse, vous le savez bien, et le mal aura été fait. Il nous incombe donc de trouver des mécanismes qui nous permettront de faire mieux qu'aujourd'hui en ce qui concerne le respect des normes les plus élevées possible mais en veillant à causer le moins de tort possible aux sociétés concernées.
    Vous demandiez aussi si le projet de loi de M. Mckay va plus loin ou non que le consensus, et si le gouvernement va moins loin. Ma réponse est que, si nous croyons que le projet de loi de M. Mckay risque de nuire à des intérêts canadiens, il risque de nuire aussi aux pays d'accueil. Évitons donc de faire des choses qui pourraient être dommageables.
    Si l'on constate à l'expérience que la démarche du gouvernement est déficiente, nous devrons évidemment l'améliorer. Nous devrons l'amener à la norme que nous jugeons adéquate à ce moment-là, mais en fonction de l'expérience acquise. Ce qui compte avant tout pour moi, et pour vous aussi, je n'en doute pas, c'est d'avancer avec prudence dans ce domaine, d'améliorer les normes pour toutes les parties concernées et d'éviter de nuire par inadvertance ou par mauvaise foi à la réputation et au bien-être de toutes les parties concernées.
    Merci, M. Beatty.
    Je passe rapidement à M. Patry.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Beatty, merci d'être ici. Je vais vous parler en français, car j'ai à faire un commentaire. Tout au début, j'aurais beaucoup apprécié, de la part de la Chambre de commerce du Canada, que votre mémoire soit soumis dans les deux langues officielles. Il aurait dû l'être. Vous savez très bien, pour avoir été ici, qu'il est beaucoup plus difficile de vous écouter par l'intermédiaire de l'oreillette mise à notre disposition pour entendre l'interprétation que de lire le texte. Vous avez seulement soumis ce texte en français; j'aurais aimé l'avoir dans les deux langues.

[Traduction]

    Voici donc ma question. Je reviens aux tables rondes. La Chambre de commerce a-t-elle présenté un mémoire? Avez-vous présenté quelque chose aux tables rondes lors de vos déplacements dans le pays?
    Nous avons présenté un mémoire après le dépôt du rapport des tables rondes.
    Après le dépôt du rapport?
    Partagiez-vous la conclusion des tables rondes?
    Nous avons approuvé bon nombre des conclusions des tables rondes mais pas toutes.
    Approuvez-vous la création d'un poste d'ombudsman?
    Pourquoi? Le rapport des tables rondes a été adopté à l'unanimité et a été approuvé par toutes les associations minières. Pourquoi la Chambre de commerce n'approuve-t-elle pas la création d'un ombudsman?
    Tout d'abord, la Chambre de commerce n'a pas participé au processus des tables rondes. En ce qui concerne l'ombudsman, nous pensons que le gouvernement dispose déjà de la structure bureaucratique nécessaire avec le point de contact national du MAECI. Au lieu de créer une nouvelle bureaucratie, nous pensons qu'il faudrait donner des ressources supplémentaires au point de contact national mandaté par l'OCDE.
    Autrement dit, vous n'êtes pas d'accord parce que vous pensez que le gouvernement a déjà suffisamment de pouvoir. Pensez-vous que la conseillère, Mme Evans, est une personne qui représente... Pensez-vous vraiment que les grandes sociétés canadiennes, comme Barrick Gold ou Inco, ont vraiment besoin d'une conseillère?
    Le président: Merci, M. Patry.
    L'hon. Perrin Beatty: Besoin? Veuillez m'excuser, je ne comprends pas.
    M. Bernard Patry: Je vous interroge au sujet du rôle de Mme Evans comme conseillère en RSE auprès des entreprises.
(0930)
    Toutes les entreprises n'ont pas besoin d'une conseillère mais ce poste est utile pour aider celles qui en auront besoin. En fait, vous validez ce que je disais tout à l'heure, c'est-à-dire qu'il y a au Canada un certain nombre d'entreprises exemplaires qui fixent la norme pour le monde entier en matière de comportement socialement responsable. Nous devrions simplement les encourager à continuer d'être des modèles pour les entreprises qui ne sont peut-être pas aussi avancées dans ce domaine. Nous sommes parfaitement d'accord avec l'idée de les aider à atteindre des normes élevées.
    Merci, M. Beatty.
    C'est maintenant au tour de M. Laforest.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Moi aussi, j'aimerais quand même, d'entrée de jeu, vous souligner que je trouve extrêmement regrettable que nous n'ayons pas la copie de votre déclaration. Cela nous aurait permis de beaucoup mieux comprendre et suivre votre argumentation, et de vous poser des questions en fonction d'un meilleur suivi. Je vais donc y aller selon ce que j'ai entendu et ce que j'interprète.
    Monsieur Beatty, tout au début, vous avez dit que les chambres de commerce favorisent en règle générale le développement économique, environnemental et social, et, sauf erreur, que les membres que vous représentez voient dans le projet de loi C-300 un obstacle important au développement économique de ces entreprises. Vous avez aussi dit qu'elles ont un souci environnemental et social, et vous faites référence à d'autres moyens.
    À partir du moment où vous analysez un projet de loi, comme groupe représentant ces entreprises, êtes-vous en mesure de souligner s'il y a dans ledit projet de loi des normes ou des protections environnementales ou des protections sociales aussi — notamment par rapport aux droits de l'homme — qui ne seraient pas éventuellement supérieures au statu quo ou à d'autres mesures que vous envisagez? N'y a-t-il pas de bonnes choses là-dedans?

[Traduction]

    Merci.
    M. Beatty.
    Merci beaucoup, monsieur Laforest, de votre mot de bienvenue.
    Je vous réponds d'abord au sujet de notre déclaration liminaire. Elle n'a été distribuée ni anglais ni en français. J'aurais souhaité avoir une version finale pour pouvoir la distribuer mais nous avons mis la dernière main au texte hier soir, alors que j'étais à Washington, en tenant compte des témoignages reçus hier par le comité. Il n'était donc tout simplement pas possible de faire traduire le texte. Si nous avions eu une traduction, nous aurions distribué le texte en anglais et en français.
    Votre deuxième question consiste à savoir s'il y a quoi que ce soit de positif dans le projet de loi. Oui, je pense que l'intention est certainement positive. Nous sommes tous favorables à l'idée que les sociétés canadiennes devraient respecter les normes les plus élevées possible.
    J'estime personnellement, tout comme les gens d'affaires et les sociétés minières, que le fait que le Canada ait la réputation d'appliquer les normes les plus élevées au monde est un avantage compétitif pour nous. Nous ne souhaitons pas que des entreprises tombent en dessous des pratiques exemplaires. Nous voulons encourager tout le monde à appliquer les normes les plus élevées possible.
    Donc, l'objectif est positif, mais le problème est que les mécanismes prévus dans le projet de loi pourraient causer des dommages extraordinaires, ce qui irait à l'encontre du but visé.

[Français]

    À un moment donné, dans votre déclaration, vous avez dit que le projet de loi était fondé sur une idéologie. J'aimerais que vous me disiez de quelle idéologie cela relève.
    Mettez-vous l'idéologie du développement des entreprises, du développement à tout prix, en opposition à l'idéologie du respect des droits humains avant tout? Est-ce de cela que vous parlez?

[Traduction]

    Permettez-moi de préciser ma pensée, monsieur Laforest. Je n'ai pas dit que le projet de loi a un caractère idéologique, car je ne le pense pas. Je pense qu'il procède des meilleures intentions possibles, c'est-à-dire du souci de veiller à ce que nos entreprises respectent des normes élevées dans le monde entier. Mon souci est que des gens dont les activités ont un caractère idéologique, des gens qui sont viscéralement opposés par principe aux industries extractives ou aux activités des entreprises canadiennes à l'étranger, et dont l'approche est essentiellement idéologique, pourraient se prévaloir des mécanismes du projet de loi pour nuire aux intérêts canadiens et nuire aux intérêts des gens et des collectivités où ces entreprises sont actives. Voilà ma préoccupation.
    Avec ces mécanismes, le projet de loi leur donne un incitatif. On n'a prévu aucune sanction si quelqu'un porte délibérément atteinte à la réputation d'une entreprise canadienne. Par contre, nos concurrents étrangers seront fortement incités à essayer de nuire à la compétitivité des entreprises canadiennes oeuvrant à l'étranger, et ce mécanisme du projet de loi sera un outil qu'ils pourront utiliser pour tenter de nuire délibérément à la réputation d'entreprises canadiennes. C'est cela qui nous inquiète, mais certainement pas le principe fondamental du projet de loi ou le souci de son auteur de défendre les normes les plus élevées possible.
(0935)

[Français]

    Vous savez que ces dernières années, on a assisté à d'importants dégâts environnementaux de la part d'entreprises d'extraction minière qui soutiennent des régimes régressifs, des assassinats de personnes associées à des groupes syndicaux. S'opposer à une loi qui exercerait quand même un certain contrôle et un meilleur contrôle sur les responsabilités des entreprises... Contrairement à vous, je pense que de ne rien faire va alimenter les gens, les idéologues qui pourraient se servir de cela. Si rien n'est fait, eux s'en serviront: ils continueront à s'opposer et à entretenir des idéologies qui peuvent parfois être très néfastes.

[Traduction]

    Puis-je vous demander une précision, monsieur Laforest? Êtes-vous en train de dire qu'une entreprise canadienne appuierait l'assassinat de représentants syndicaux?

[Français]

    Ce n'est pas ce que je dis du tout; je dis qu'on a assisté à de telles situations et qu'une loi comme le projet de loi C-300 permettrait un meilleur encadrement des activités des entreprises, notamment dans des pays où se sont produites de telles situations. Cependant, je ne dis pas que les compagnies ont favorisé cela; ce n'est pas du tout ce que j'ai dit.

[Traduction]

    Attaquons-nous bien sûr aux problèmes réels. S'il existe réellement des déficiences dans les activités d'entreprises canadiennes, corrigeons-les. C'est précisément ce que je voulais dire plus tôt. Nous devons faire extraordinairement attention à ne pas nuire délibérément ou par inadvertance à la réputation des entreprises canadiennes, surtout lorsque ce sont elles, en réalité, qui fixent les normes pour le reste du monde. Continuons à améliorer ces normes. Travaillons avec les entreprises. Assurons-nous qu'elles offrent le maximum de bienfaits aux collectivités où elles travaillent, mais essayons de le faire sans causer de tort à ces entreprises qui sont peut-être des chefs de file mondiaux dans ce domaine.
    Merci, M. Beatty.
    M. Abbott.
    Merci de votre présence, monsieur Beatty.
    Permettez-moi de faire une remarque qui n'a rien à voir avec les questions précédentes. Il s'agit du fait qu'on n'est pas particulièrement porté, dans certains milieux, à faire l'éloge d'organisations telles que la Chambre de commerce du Canada, mais plutôt à les présenter comme des monstres. Le fait est que votre organisation représente le coeur même de l'économie du Canada. Je sais que beaucoup de mes collègues tiennent votre organisation et vous-même en haute estime, d'autant plus que vous aviez acquis une excellente réputation lorsque vous étiez ministre, et je vous remercie de votre présence aujourd'hui.
    Voici ma question. Pourriez-vous nous donner une estimation du pourcentage que représentent à la bourse de Toronto et à la bourse de Vancouver les sociétés extractives qui pourraient être touchées par le projet de loi C-300?
    Je ne peux pas vous donner de chiffres exacts mais je sais que c'est très élevé.
    Très élevé. Quelque chose comme 20 p. 100? Nous ne connaissons pas la proportion exacte mais, comme vous dites, elle est très élevée.
    Oui, elle est très élevée et vous pourriez demander le chiffre au TSX.
    EDC nous a dit avoir appuyé en 2008... Si je me souviens bien, c'était beaucoup plus que 20 milliards de dollars cette année-là pour les entreprises extractives. Si cet appui disparaissait, étant donné qu'EDC nous a dit ne pas pouvoir fonctionner avec ce projet de loi, et si l'appui du RPC disparaissait aussi, quel impact cela aurait-il sur la bourse de Toronto et sur la bourse de Vancouver et, partant, sur l'activité économique au Canada?
(0940)
    Ce serait très négatif pour l'activité économique au Canada.
    Je constate que vous faites preuve de prudence, et je vous comprends, mais j'aimerais avoir une meilleure description. Quelle serait la conséquence? J'ai l'impression qu'elle serait immense. Je ne voudrais pas employer le mot catastrophique et je ne le ferai pas. Que pensez-vous de ma qualification?
    Ce serait certainement très important. Vous avez raison, je fais toujours preuve de prudence dans mes déclarations. Je préfère en dire moins que trop. Cela dit, les entreprises extractives représentent une part très importante des actions cotées en bourse au Canada. Toutefois, toutes ne seraient pas touchées par le projet de loi étant donné que beaucoup d'entre elles oeuvrent uniquement au Canada, pas à l'étranger. Celles qui oeuvrent à l'étranger ne sont cependant pas négligeables, loin de là, et le projet de loi aurait par conséquent une incidence négative sur l'économie canadienne et aussi, incontestablement, sur le bien-être des personnes qui travaillent pour ces entreprises ou qui achètent leurs actions.
    Il y a des dizaines de milliers de personnes, voire des centaines de milliers, qui travaillent pour ces entreprises, même ici, au Canada.
    Oui, il y a également beaucoup de retraités dont le revenu provient des investissements qu'ils ont faits dans ces entreprises. Ils s'attendent eux aussi à ce que celles-ci respectent des normes élevées, mais ils s'attendent également à ce que notre pays — comme vous, en qualité de gouvernement — fasse le nécessaire pour qu'elles soient traitées de manière équitable.
    Bien. Merci.
    Le président: M. Goldring.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de comparaître aujourd'hui. J'apprécie vos remarques, notamment celles concernant Talisman. Je veux rappeler les préoccupations exprimées par EDC et exprimer les miennes, issues de mes 30 années d'expérience dans l'industrie extractive, dont je connais fort bien les normes de travail élevées — pas seulement les normes, d'ailleurs, mais aussi la fierté des participants. Ce n'est pas un simple slogan, ce n'est pas simplement une note sur l'en-tête des lettres, c'est quelque chose qui est sérieusement appliqué. Ce sont des normes tout à fait remarquables.
    Ce qui est préoccupant, je suppose, c'est l'effet paralysant du projet de loi. Comme l'a dit EDC, les entreprises considéreront que le projet de loi leur imposera des conditions lorsqu'elles dresseront des plans pour agir dans d'autres pays. Si elles sont obligées de souscrire à des conditions onéreuses pour faire concurrence dans un pays étranger, il sera peut-être préférable pour elles, ou plus facile, d'aller s'établir ailleurs pour être compétitives à partir de là, tout comme la Société maritime CSL l'a fait en s'établissant à la Barbade, car il vaut mieux battre le pavillon de la Barbade que celui du Canada. Croyez-vous que c'est ce qui va arriver? Croyez-vous que les entreprises canadiennes risquent de déménager leurs pénates pour pouvoir travailler à partir d'un pays qui ne souscrit pas aux dispositions de ce projet de loi?
    Oui, il y a plusieurs facteurs à prendre en considération mais celui qui compte avant tout, c'est que le projet de loi est discriminatoire envers les entreprises canadiennes. Il instaure pour elles un régime onéreux qui ne s'appliquera pas aux entreprises des autres pays, lesquelles fonctionnent pourtant exactement dans le même contexte que leurs homologues canadiennes au plan international.
    Les entreprises canadiennes seront-elles incitées à transférer leur siège social à l'étranger? Oui. Seront-elles dissuadées de racheter d'autres entreprises dont les activités sont aujourd'hui déficientes, en espérant les amener aux normes internationales, aux normes canadiennes? Oui, elles le seront.
    Les entreprises canadiennes soucieuses de préserver des normes plus élevées que leurs homologues étrangères seront-elles désavantagées sur le plan concurrentiel? Oui, absolument.
    Dans tous ces domaines, les effets pervers du projet de loi risquent d'aller directement à l'encontre de l'objectif du législateur et des auteurs du projet de loi.
    Merci, monsieur Goldring, c'est tout pour vous.
    Madame Brown, vous avez une très brève question.
(0945)
    Oui, monsieur le président. Merci.
    Je voudrais rester sur ce sujet, monsieur Beatty. Vous dites que le projet de loi ira à l'encontre de l'objectif visé. Pourriez-vous parler aussi du développement des capacités auquel contribuent les entreprises canadiennes dans divers pays étrangers? Contribuent-elles au bien-être social des pays où elles sont présentes?
    Oui. Qu'il s'agisse d'entreprises d'extraction, de fabrication ou d'autres secteurs, les entreprises canadiennes apportent avec elles des normes canadiennes qui sont au minimum égales aux normes internationales, et sont d'ailleurs généralement supérieures en termes de pratiques exemplaires, et nous essayons de faire en sorte que les mêmes pratiques et normes soient appliquées dans les autres pays.
    Personne ne recommandera à une entreprise canadienne d'agir à l'étranger en fonction de normes moins élevées que celles qu'elle applique au Canada. Par conséquent, les entreprises canadiennes font des investissements massifs dans les pays étrangers, que ce soit pour le développement des compétences ou pour l'infrastructure sociale, ce qui est bénéfique pour ces pays. Elles considèrent que cela fait partie d'un comportement socialement responsable dans les régions où elles sont présentes.
    Merci, M. Beatty.
    M. Dewar.
    Merci, monsieur le président. Je remercie nos invités et je suis heureux de vous revoir, monsieur Beatty.
    Merci.
    Je voudrais revenir sur une remarque de M. Patry concernant le rôle... Je m'étonne que votre organisation ne soit pas favorable à l'idée d'un ombudsman. Je dis cela parce que nous avons entendu des représentants d'entreprises extractives qui appuient cette idée et qui aimeraient que ce poste soit créé. J'aimerais comprendre votre position. Je parle ici de personnes qui représentent des entreprises et qui sont vos alliées, je suppose. Pourquoi avez-vous un point de vue différent?
    Si vous le permettez, je demanderai à Susanna de compléter ma réponse.
    M. Paul Dewar: Très bien.
    L'hon. Perrin Beatty: Je peux vous dire, monsieur Dewar, que nous avons largement consulté nos membres pour bien cerner leurs préoccupations. Nous pensons que la position de la Chambre de commerce du Canada reflète celle de ses membres, notamment de ce secteur qui sera le plus directement touché.
    Il importe également de souligner que, dans ce processus, bon nombre des personnes de cette industrie qui ont participé aux consultations l'on fait à titre personnel plutôt qu'au titre de leur entreprise ou de leur secteur industriel.
    Nous avons voulu interroger directement nos membres sur ces questions. Par exemple, nous leur avons demandé quelle serait l'incidence sur leur société. Cet incidence sera-t-elle positive ou négative? Comment pouvons-nous essayer de respecter des normes qui soient raisonnables pour toutes les parties concernées?
    Pouvez-vous continuer, Susanna?
    Certainement.
    Ce que dit Perrin est tout à fait juste. Je ne travaillais pas pour la Chambre à l'époque mais j'ai parlé à certaines des personnes ayant participé aux tables rondes et elles nous ont dit qu'elles l'ont fait à titre personnel. Elles ont été invitées aux tables rondes parce qu'elles étaient des expertes de ce secteur. Elles n'y ont pas nécessairement représenté leur entreprise.
    Lorsque le rapport des tables rondes a été publié, plusieurs de nos membres sont venus nous voir pour exprimer des réserves au sujet de la création d'un poste d'ombudsman étant donné qu'il y a déjà un point de contact national mandaté par l'OCDE qui pourrait fort bien faire le travail souhaité par les tables rondes s'il obtenait des ressources supplémentaires.
    L'argument présenté au comité par les représentants de l'industrie — je ne parle pas ici de représentants d'associations mais de gens qui travaillent réellement dans ce secteur — est qu'ils craignent qu'il y ait une sorte de préjugé tendancieux s'il était établi à l'intérieur, c'est-à-dire s'il relevait du gouvernement ou était relié au gouvernement.
    Je m'étonne que la Chambre ait un problème avec ça. Comme on l'a dit, un conseiller est un conseiller, n'est-ce pas? Cela dit sans vouloir offenser qui que ce soit. Ils voulaient que le poste soit libre de toute influence de façon à ce que les problèmes qui lui seront présentés puissent être arbitrés de manière équitable. Je trouve donc ça surprenant.
    Je voudrais revenir sur plusieurs remarques antérieures.
    Monsieur Beatty, vous avez dit que cela pourrait... Je laisse de côté la thèse de fin du monde évoquée par l'un de mes collègues. Je regrette, ce n'est pas mon avis. EDC ou le RPC ne nous ont certainement pas dit qu'ils retireraient tous leurs investissements de la bourse.
    Ce que nous souhaitons tous, je pense, c'est que les règles soient équitables. Quand on voit les poursuites actuellement intentées contre des entreprises canadiennes — et il y en a de plus en plus —, je ne comprends pas comment on peut dire que ce projet de loi puisse faire autre chose que rehausser la réputation du Canada et la marque Canada.
    Vous savez, Talisman a changé ses méthodes. Je parlais l'autre jour de la LCEE. Vous connaissez bien la LCEE. On l'a utilisée pour s'assurer que les entreprises canadiennes ne continueraient pas d'investir en Birmanie. Et cela ne s'est pas produit avant qu'on invoque la LCEE. Lorsque nous nous occupions de l'Afrique du Sud et de l'apartheid, il y avait un dilemme. En fait, c'est un gouvernement conservateur qui a créé la LCEE.
    Certains d'entre nous diront peut-être que ce projet de loi n'est qu'une évolution de ce que nous avons vu. Je me souviens très bien des débats sur l'Afrique du Sud : nous ne devions pas en partir, nous ne devions rien faire, nous devions simplement laisser les entreprises se débrouiller. Nous avons finalement eu un débat à ce sujet et les choses ont changé. Je pense qu'on a agi intelligemment en créant la LCEE comme outil que le Cabinet peut utiliser.
    Cela dit, les choses continuent d'évoluer. Nous ne sommes pas figés.
    Je n'ai rien vu dans votre exposé, quand je regarde le projet de loi, qui corresponde à votre... Je vois beaucoup de qualificatifs — des pourraient, des si, des peut-être — mais ce projet de loi donnera la possibilité de consulter les entreprises et d'analyser les règlements, et aussi un certain temps pour se pencher sur les problèmes.
    Ce que j'essaie de dire, M. Beatty, je suppose, c'est que bien des gens pourraient contester votre prémisse que cela provoquera du désinvestissement ou ternira la marque. Au contraire, diront certains, cela rehaussera la marque Canada car nous aurons un processus. Quand nous ferons l'objet d'une action en justice, nous pourrons montrer que nous avons fait preuve de toute la diligence voulue.
(0950)
    Merci, M. Dewar.
    Brièvement, s'il vous plaît, M. Beatty.
    Merci de votre question, monsieur Dewar.
    Des gens vont-ils contester notre position? Bien sûr. C'est pourquoi le comité tient ces audiences. Auront-ils raison? Nous croyons que non.
    Vous dites que j'emploie beaucoup de qualificatifs, des mots comme « pourraient » ou « peut-être ». Il y a une bonne raison à cela: le projet de loi n'est pas encore en vigueur. Nous ne savons pas avec certitude quelle en sera l'incidence. C'est d'ailleurs aussi pourquoi j'affirme que les partisans du projet de loi ne peuvent pas dire avec certitude qu'il atteindra les objectifs établis et pourquoi nous devons faire preuve de prudence en avançant pas à pas, avec mesure et en tenant compte de l'expérience acquise.
    Vous et moi ne sommes pas en désaccord sur les objectifs visés, mais ce qui nous préoccupe avant tout, c'est qu'il est parfaitement clair que ce projet de loi met en place un mécanisme qui encouragera des gens à formuler des allégations injustifiées contre des entreprises canadiennes, des allégations qui pourraient porter préjudice aux intérêts canadiens et aux intérêts des collectivités dans lesquelles...
    Mais ça existe déjà, n'est-ce pas?
    Ce serait accéléré avec ce projet de loi.
    Peut-être. Nous ne le savons pas.
    Pourquoi empirer la situation?
    Eh bien, nous ne sommes pas d'accord.
    Je le répète, M. Dewar, si le plan mis en oeuvre par le gouvernement — il n'existe que depuis sept mois — ne fonctionne pas, nous pourrons l'améliorer à la lumière de l'expérience acquise. En attendant, ne faisons pas quelque chose qui aura des conséquences perverses que nous ne pourrons pas corriger plus tard.
    Merci beaucoup, M. Beatty, et merci à la Chambre de commerce du Canada. Nous vous remercions de votre témoignage et de votre participation au débat.
    Je vais maintenant suspendre la séance pendant quelques instants pour permettre aux autres invités de s'installer. Nous avons cinq minutes de retard sur l'horaire.

(0955)
    Nous reprenons notre étude du projet de loi C-300.
    Nous accueillons maintenant, de KAIROS: Initiatives oecuméniques canadiennes pour la justice, M. Ian Thomson, coordonnateur de programme, Justice écologique et responsabilité sociale des entreprises, et Mme Connie Sorio, coordonnatrice de programme, Partenariats en Asie. Nous entendrons ensuite Stephen Hunt, directeur du District 3 du Syndicat des métallos.
     Je crois comprendre que chaque organisation souhaite faire une déclaration liminaire. Nous allons vous écouter avec beaucoup d'attention.
    Monsieur Hunt, je vous invite à commencer.
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité pour vous entretenir de ce très important projet de loi d'initiative parlementaire.
    Je m'appelle Stephen Hunt. Je suis un dirigeant élu du district no 3 du Syndicat des métallurgistes unis d'Amérique. Le district no 3 englobe tout l'ouest du Canada, de la frontière du Manitoba jusqu'à l'océan Pacifique, et concerne essentiellement les industries extractives.
    Nous représentons un très grand nombre de mineurs, de travailleurs forestiers et de travailleurs du secteur du pétrole et du gaz naturel. Beaucoup de ces personnes seront directement touchées par le projet de loi C-300.
    Avant de commencer, j'aimerais faire connaître mon parcours. Je me suis joint aux Métallurgistes unis d'Amérique alors que j'étais tout jeune et que je travaillais à la mine Utah, une mine de cuivre à ciel ouvert à l'extrémité nord de l'île de Vancouver. J'ai aussi travaillé à la mine Afton, une mine de la société Teck située à l'extérieur de Kamloops, en Colombie-Britannique.
    J'ai été étroitement lié au secteur minier pendant une trentaine d'années, plus particulièrement au domaine des pratiques en matière de santé et de sécurité dans l'industrie minière. J'ai beaucoup voyagé à l'étranger pour visiter des exploitations minières canadiennes. J'ai travaillé au Pérou pour aider des mineurs luttant contre la silicose, qui était alors une nouvelle maladie. C'est une chose que nous avons éradiquée au Canada il y a des années mais qui se répand aujourd'hui dans des mines d'entreprises canadiennes au Pérou. Je suis également allé au Chili pour travailler avec des mineurs d'entreprises canadiennes qui sont exposés aux problèmes de l'altitude et qui souffrent terriblement de maladies de haute altitude.
    Je suis également relié à des sociétés minières canadiennes dans ce contexte puisque j'ai témoigné comme expert lors de l'enquête Westray. À cette occasion, j'ai témoigné sur les raisons de l'explosion qui s'était produite à la mine de charbon de Westray à Stellarton, en Nouvelle-Écosse, provoquant la mort immédiate de 26 mineurs dont 11 sont encore ensevelis dans la mine. Leurs corps n'ont jamais été retrouvés. Une société minière canadienne...
    Comme vous le savez, l'enquête Westray a débouché sur des pressions exercées par les métallurgistes pour obtenir des modifications au Code criminel du Canada afin de le renforcer et d'y inclure la responsabilité des entreprises en matière de santé et de sécurité au travail.
    Maintenant que vous savez qui je suis, vous ne serez pas surpris d'apprendre que j'appuie le projet de loi C-300 et l'activité minière, puisque nous représentons les travailleurs de l'industrie minière. Par définition, c'est elle qui paie mes factures.
    Nous nous sommes souvent surnommés « le syndicat des mineurs du Canada ». Nous avons à coeur cette industrie et la façon dont nos employeurs respectent nos droits. C'est pour cette raison qu'il y a des négociations collectives et c'est aussi pour cette raison que nous nous préoccupons de la façon dont ces employeurs respectent les droits des travailleurs et des collectivités dans les pays en développement.
    Tout comme nous pensons que les entreprises ne devraient pas pouvoir fonctionner ici sans avoir à respecter les conventions collectives qui protègent nos droits, nous pensons qu'elles ne devraient pas pouvoir fonctionner à l'étranger sans des mécanismes formels pour protéger les travailleurs, les collectivités et l'environnement. Nous estimons que les droits des travailleurs sont des droits humains et c'est dans ce contexte que nous appuyons le projet de loi C-300.
    Une dernière chose à mon propos. J'ai été accrédité par la DeGroote School of Business à titre d'administrateur agréé, ce qui signifie que j'ai les qualifications requises pour siéger à des conseils d'administration aux États-Unis et au Canada. Au 21e siècle, le rôle de ces conseils s'est élargi pour porter non seulement sur les intérêts des actionnaires mais aussi sur ceux des parties intéressées. Cela veut dire que les travailleurs, les collectivités et les défenseurs de l'environnement doivent être inclus dans le processus décisionnel des entreprises.
    Le syndicat des métallurgistes n'a pas découvert par hasard l'existence du projet de loi C-300. Il a participé activement aux tables rondes nationales de 2006 sur la responsabilité sociale d'entreprise. Nous avions prévu que le gouvernement tiendrait compte des 27 recommandations du rapport de consensus et qu'il mettrait en place un cadre réglementaire plus solide pour que les entreprises canadiennes soient tenues responsables de l'application des droits de la personne, des droits des travailleurs et de la protection de l'environnement lorsqu'elles exercent leurs activités dans les pays en développement.
    Ce n'est pas ce qui est arrivé. Il a fallu près de deux ans pour que le gouvernement réagisse et il l'a fait comme si les tables rondes n'avaient jamais eu lieu.
(1000)
    La stratégie dite de responsabilité sociale d'entreprise, ou RSE, a constitué un recul car elle privilégiait l'autoréglementation volontaire des entreprises et supposait que l'inertie des gouvernements des pays en développement, et non le comportement des entreprises, était la cause des problèmes de l'industrie extractive dans ces pays.
    Les entreprises minières, pétrolières et gazières représentent le Canada à l'étranger. Composantes de la politique officielle du Canada, elles sont d'autant plus crédibles qu'elles sont cofinancées par Exportation et Développement Canada et sont appuyées par les missions d'Équipe Canada et les ambassades canadiennes.
    Toutefois, quand les membres de notre syndicat travaillant dans les entreprises minières et de minéralurgie participent à des échanges de personnel avec d'autres pays comme l'Argentine, le Chili, le Pérou, l'Afrique du Sud et le Guatemala, ils constatent d'énormes différences de comportement chez ces entreprises selon qu'elles oeuvrent au Canada ou à l'étranger.
    Après de longues et difficiles négociations, notre syndicat a pu obtenir des pensions et des salaires décents pour les employés, des lieux de travail sûrs, grâce à des initiatives conjointes en matière de santé et de sécurité, et des mesures environnementales pour protéger les collectivités environnantes. Les entreprises prétendent qu'elles appliquent ces « pratiques exemplaires » dans les pays en développement où elles s'installent mais nous avons constaté le contraire sur place.
    Nos membres travaillant chez Teck, par exemple, ont oeuvré pendant plusieurs années auprès des syndicats représentant les travailleurs des mines que possède Teck au Chili et au Pérou. Ces mineurs travaillent à 4 000 m au-dessus du niveau de la mer. Malgré les nombreux rapports portant sur les effets à long terme du travail en altitude, et les pressions constantes exercées par les représentants des travailleurs au Chili et au Pérou, Teck refuse de reconnaître l'exposition à long terme à de hautes altitudes comme une maladie professionnelle. Cette entreprise ne tient pas compte des solutions pratiques ou les considère comme « trop coûteuses ». Ces conditions de travail causent des maux de tête, la perte d'appétit et l'insomnie. L'exposition à l'altitude augmente considérablement le risque de crise cardiaque ainsi que d'oedème pulmonaire et cérébral. Les travailleurs incapables de travailler jusqu'à leur retraite ne reçoivent aucune compensation, si bien qu'ils ne peuvent soutenir leur famille. Nous appelons souvent cela « du chantage économique » ou « de l'héroïne économique » lorsque les travailleurs travaillent parce qu'ils le doivent et qu'ils n'ont pas le choix.
    Pendant que les entreprises canadiennes continuent de résister aux pressions visant à protéger les travailleurs en haute altitude, Exportation et Développement Canada appuie la mine Antamina au Pérou avec 650 millions de dollars d'assurance contre les risques politiques.
    Plus tôt cette année, en Argentine, on a demandé à notre syndicat de faire un geste de solidarité en réaction au congédiement injuste par Barrick Gold Corporation de Jose Vicente Leiva, dirigeant syndical de la mine de Veladero. En 2004, la société avait reçu 75 millions de dollars d'Exportation et Développement Canada pour financer son projet et 125 millions de dollars d'assurance contre les risques politiques. Veladero est une autre mine de haute altitude où les travailleurs vivent sous la tente sans équipements d'hiver alors que la température peut descendre jusqu'à -20°C. Des glissements rocheux se produisent régulièrement et deux travailleurs ont été tués en 2006.
    M. Leiva a parcouru 4 600 m pour rencontrer les gestionnaires de Barrick au bas de la montagne et il leur a présenté une liste de propositions en vue d'améliorer les pratiques de sécurité. Les gestionnaires lui ont demandé de revenir une semaine plus tard afin de lui transmettre leur réponse. Lorsqu'il est redescendu pour rencontrer les gestionnaires, ceux-ci se trouvaient en compagnie de fonctionnaires argentins et n'ont démontré aucune volonté de régler les problèmes.
    Comme la loi argentine protège la liberté d'association, M. Leiva et d'autres travailleurs de Barrick ont pris des mesures pour former un nouveau syndicat indépendant et ont fait des démarches pour s'affilier avec la centrale des travailleurs argentins (CTA). Avant même que leur demande ait été approuvée, M. Leiva a reçu un avis de congédiement de Barrick sans motivation. La raison en est que M. Leiva et ses collègues avaient exercé leurs droits et avaient contesté les pratiques injustes ayant cours à la mine de Barrick. M. Leiva a récemment récupéré son emploi, non pas parce que Barrick à soudainement eu une révélation mais en raison des pressions nationales et internationales.
    L'histoire de Jose Leiva et de ses collègues prouve encore une fois la véracité de l'adage que nous avons sans cesse répété au cours de notre lutte pour la dignité et la sécurité dans les mines canadiennes : une entreprise minière est aussi bonne que dans la mesure où elle doit faire face à une forte opposition. Sans un outil comme le projet de loi C-300, il n'y a aucun contrôle, aucune surveillance, seulement un mandat fiduciaire.
(1005)
    Le fait que nos entreprises minières se soient installées à l'étranger nous a poussé à étendre nos tentacules partout dans le monde. Nous avons suivi nos gestionnaires dans des pays comme l'Afrique du Sud, le Chili et le Nicaragua. Nous construisons des réseaux mondiaux avec des travailleurs qui ont le même employeur transnational.
    Nous avons acquis des connaissances sur les pratiques des entreprises et les conditions de travail dans les autres pays qui nous aident à relever les nouveaux défis liés à la venue au Canada de propriétaires de mines étrangers. Les géants miniers d'hier comme Inco, Falconbridge et Noranda ont été remplacés par des entreprises comme Vale Inco et Xstrata. Les employés de trois des quatre exploitations de nickel de Vale au Canada sont en grève depuis plus de trois mois pour s'opposer aux concessions demandées par l'employeur sur le plan des salaires et du régime de pensions.
    Le projet de loi C-300 n'est ni punitif ni contraignant pour les entreprises extractives. Il prévoit simplement un cadre transparent pour la reddition de comptes et qui ne peut être invoqué qu'en cas de violation manifeste des règles. Il correspond aux normes reconnues à l'échelle internationale et prévoit que l'assistance financière et diplomatique est conditionnelle à la bonne tenue des entreprises. C'est un contrat social qui permet aux entreprises de prospérer sans sacrifier le pouvoir d'examen des contribuables canadiens qui facilite leurs activités à l'étranger.
    Je vous remercie de votre attention et je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Hunt. Soyez sûr que vous serez interrogé.
    M. Thomson.
    Veuillez m'excuser, je ne devrais jamais rien supposer.
    Mme Sorio.
    KAIROS: Initiatives oecuméniques canadiennes pour la justice, réunit 11 organisations religieuses de 7 confessions. Elle oeuvre en faveur de la justice sociale au Canada et à l'étranger.
    L'une de nos principales activités consiste à appuyer nos partenaires de l'hémisphère sud pour les aider à défendre et à promouvoir les droits humains. En qualité de coordonnatrice du programme Asie-Pacifique de partenariats mondiaux, je me suis rendue dans divers pays d'Asie pour contacter nos partenaires et consulter des collectivités. Le message que j'en ai retenu est leur appui absolu au projet de loi C-300.
    Je sais que certains de nos partenaires ont écrit au comité pour appuyer le projet de loi. Je peux ainsi mentionner JATAM, le réseau de défense des droits des mineurs en Indonésie, qui a envoyé une lettre signée par 50 organisations représentant des défenseurs des droits humains, des groupes de la société civile à caractère religieux et des écologistes. Aux Philippines, la Cordillera Peoples Alliance a aussi écrit pour appuyer le projet de loi. Sa lettre avait été signée par 198 organisations touchées de près ou de loin par des activités minières.
    Je mentionne aussi l'appui du Center for Environmental Concerns, des Philippines, ainsi que la présence de nos partenaires du Sud, de Marinduque, aux Philippines, collectivité touchée par Placer Dome, et aussi de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
    J'aimerais exprimer les préoccupations de nos partenaires qui sont touchés par les activités d'entreprises minières canadiennes dans leur région. Bon nombre de ces collectivités ont souffert de la transgression de leurs droits humains par des militaires qui protègent les intérêts des entreprises minières. Beaucoup de ces collectivités ont été chassées de leur région et ont perdu leur gagne-pain à cause des activités minières.
    Aux Philippines, par exemple, les Cordilleras ont récemment été frappées par une calamité dévastatrice, le typhon Pepeng, mais ce n'est pas le typhon lui-même qui a provoqué cette calamité. C'est plutôt la détérioration des sols causée par les mines. J'ai avec moi une note d'information de la Cordillera Peoples Alliance qui mentionne les différentes sociétés minières canadiennes oeuvrant dans la région et causant plus ou moins cette destruction.
    Les partenaires que KAIROS appuie dans l'hémisphère sud ne rejettent pas d'office l'activité minière. Ce sont des organisations de droits humains qui souhaitent simplement protéger des gens qui veulent continuer à mener une vie simple, rester dans leur collectivité et bâtir des collectivités durables. Toutefois, à cause des sociétés minières qui viennent sur place se comporter de manière irresponsable, ces organisations veulent maintenant se faire entendre. Elles veulent exprimer leurs préoccupations.
    Si vous me permettez ce rappel, c'est précisément votre comité qui a recommandé au gouvernement en 2005 — après avoir entendu la cause des Subanons de Mindanao et la cause de TVI — qu'une enquête parlementaire soit effectuée au sujet des allégations de transgression des droits humains par les forces militaires avec la complicité de sociétés minières. Des tables rondes de consultation sur la responsabilité d'entreprise ont été organisées en 2006 et beaucoup de partenaires de l'hémisphère sud sont venus y participer pour exprimer leurs préoccupations et faire connaître leur situation. Jusqu'à ce moment-là, elles attendaient que le comité et le gouvernement fassent preuve leadership en veillant à ce que les sociétés minières canadiennes agissent de manière responsable et respectent les collectivités locales ainsi que le droit de ces dernières d'accepter ou de rejeter des projets miniers.
(1010)
    Mon collègue va maintenant parler de la recommandation globale de KAIROS. Comme je viens tout juste de rendre visite à nos partenaires et de parler aux collectivités, c'était ce que j'avais à vous dire. Les collectivités de l'étranger appuient le projet de loi C-300.
    Merci, Mme Sorio.
    M. Thomson, très rapidement.
    Merci, monsieur le président. Je m'appelle Ian Thomson et je coordonne notre travail sur la justice écologique et la responsabilité sociale des entreprises.
    Je pense que Connie vous a exposé les raisons pour lesquelles les Églises canadiennes s'intéressent à ce sujet. Il s'agit pour elles de répondre aux appels qu'elles reçoivent quotidiennement de l'hémisphère sud, non seulement d'organisations de droits humains et communautaires mais aussi de nos homologues confessionnels du Sud — d'évêques des Philippines, d'une commission oecuménique de Tanzanie. Tous ces appels nous sont envoyés de l'étranger pour réclamer un comportement responsable des entreprises canadiennes. Ces organisations étrangères font ce qu'elles peuvent pour améliorer la situation sur place, dans leurs propres pays.
    Mais c'est à nous qu'il incombe d'agir et c'est pourquoi je pense que ce projet de loi offre au Canada la chance de relever le défi. De nombreux dirigeants religieux s'expriment à ce sujet. Des Églises ont participé aux tables rondes nationales sur la responsabilité sociale des entreprises et cette question est l'une des questions d'éthique les plus pressantes pour le Canada en matière de politique étrangère, et c'est une question de cohérence.
    Allons-nous d'une part promouvoir les droits humains, essayer d'établir la paix et régler les problèmes des zones de conflit alors que, d'autre part, certains acteurs canadiens agissent en sens contraire et reçoivent peut-être l'aide de notre gouvernement pour ce faire? Cela ne veut pas dire que tous les membres de cette industrie soient problématiques, loin de là, et nous avons entendu un témoignage à ce sujet tout à l'heure.
    KAIROS et tous ses membres de huit confessions chrétiennes appuient sans réserve le projet de loi C-300, comme l'a dit Connie. Ce projet corrige certaines des carences de la stratégie de RSE annoncée plus tôt cette année. Je vous rappelle d'ailleurs qu'elle a été annoncée après le dépôt du projet de loi C-300.
    Je crois cependant que nous pouvons collaborer. Dans son rapport de 2005, le comité permanent avait lancé un appel explicite pour l'utilisation de l'aide financière et diplomatique du gouvernement canadien comme incitatif, comme outil de stimulation de la responsabilité sociale des entreprises. Le projet de loi C-300 rend cela possible en établissant un lien entre la performance et l'aide gouvernementale.
    Vous constaterez que le projet de loi a également reçu l'appui du professeur John Ruggie, le représentant spécial de l'ONU sur les droits de l'homme. C'est un diplomate de l'ONU et il a été très diplomatique dans le rapport qu'il a adressé au Conseil des droits de l'homme l'an dernier. Il fallait beaucoup chercher pour y trouver une recommandation concrète adressée aux États.
    Il avait indiqué que les agences de crédit à l'exportation peuvent être un outil puisque ce sont des organismes d'État susceptibles d'aider les gouvernements à s'acquitter de leur devoir de protéger et de promouvoir les droits humains. Il avait dit aussi que ces agences devraient exiger que leurs clients fassent preuve de la diligence voulue en ce qui concerne les droits humains, et il avait ajouté que bon nombre des agences de crédit à l'exportation avec lesquelles il avait discuté officieusement lui avaient dit attendre que leurs instances gouvernementales leur donnent le pouvoir explicite d'agir dans ce domaine. Avec le projet de loi C-300, EDC aura ce pouvoir.
    Ce sujet n'est pas sans précédent pour les parlementaires. Quand une directive de révision environnementale a été ajoutée à la Loi sur l'expansion des exportations, EDC l'a respectée en formulant un processus d'évaluation environnementale qui est en vigueur aujourd'hui. Si les Canadiens examinent le rapport de 2005 du comité permanent et les délibérations du comité depuis quelques mois, ils y trouveront un parallèle avec l'adoption de normes environnementales et l'établissement d'un processus d'évaluation qui est devenu une pratique courante des entreprises.
    Nous entrons ici dans un nouveau domaine en donnant à EDC, au Régime de pensions du Canada et à nos missions à l'étranger le mandat explicite d'étoffer leur capacité et leurs politiques en matière de droits humains et de responsabilité sociale. Voilà ce que ce projet de loi rendra possible et c'est pourquoi je prie instamment tous les membres du comité de l'approuver de façon à instaurer ces changements, à atteindre la cible identifiée par le consensus des tables rondes, comme le disait un membre du comité tout à l'heure, cible que n'a pas atteinte la stratégie actuelle de RSE annoncée par le gouvernement plus tôt cette année. Je sais que c'est nouveau mais je pense que nous savons bien qu'elle ne règle pas les problèmes qui avaient été soulevés lors des tables rondes. Ces problèmes persisteront avec la stratégie actuelle.
(1015)
    En ce qui concerne le point de contact national, s'il y a eu un consensus lors des tables rondes, c'est bien sur le fait que les mécanismes actuels ne fonctionnent pas et qu'il en faut de nouveaux. Il y a eu un consensus à ce sujet.
    Je vous implore donc d'appuyer le projet de loi qui permettra de créer les nouveaux mécanismes qui nous mèneront dans la voie vers laquelle le Canada s'est inévitablement engagé et qui rendra les Canadiens fiers de constater que notre agence de crédit à l'exportation, notre régime de pensions et nos ambassades contribuent à des pratiques socialement responsables partout dans le monde.
    Merci de votre attention.
    Merci, M. Thomson.
    M. Pearson et M. Rae.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    M. Hunt, je suis né à Calgary, en Alberta, où j'ai été élevé. Mon père et mon frère travaillaient tous deux dans l'industrie extractive. Pour ma part, j'ai oeuvré sur le terrain dans beaucoup de pays du tiers-monde et je suis vraiment partagé en ce qui concerne l'évolution de ce débat.
    À mon avis, plus le débat avance, plus on présente les entreprises comme des monstres faisant fi des lois, et les ONG, dans les collectivités locales indigènes, comme des groupes prêts à employer n'importe quelle excuse pour causer du tort aux entreprises. Voilà pourquoi on ne cesse de parler de plaintes frivoles ou vexatoires.
    Je voudrais vous poser une question d'ordre pratique car je sais que vous connaissez les deux côtés de l'industrie.
    Tout à l'heure, M. Beatty, de la Chambre de commerce du Canada, a indiqué ce qui allait arriver aux entreprises canadiennes d'extraction à l'étranger. Si ce projet de loi est adopté, nous donnerons un avantage concurrentiel à nos concurrents internationaux. À son avis, les ONG des diverses régions où existe l'industrie extractive pourraient collaborer avec des ONG locales pour essayer de formuler des plaintes frivoles et vexatoires. Personne ici ne souhaite cela, s'il s'agit de plaintes injustifiées, mais je voudrais vous demander si vous pensez que ce serait vraiment possible? Si le projet de loi C-300 est adopté, croyez-vous qu'il risque d'avoir cet effet?
(1020)
    Oui, je le crois. C'est mon avis personnel, mais c'est assez léger. Ça ne va pas assez loin.
    Je pense que les entreprises minières canadiennes exportent une technologie merveilleuse. Les mines, nous connaissons. Vraiment. Nous savons comment faire. Notre savoir-faire, notre équipement minier et nos technologies et processus sont probablement les meilleurs au monde. Nous avons une énorme industrie minière. Nous en sommes très fiers et nous sommes très fiers du travail que nous faisons.
    L'une des choses que nous avons apprises au cours des années est qu'il faut surveiller de près les sociétés minières canadiennes. Si vous leur laissez la bride sur le cou, elles causent du tort aux gens. Elles font de mauvaises choses. Pas toutes, c'est vrai, mais cette mauvaise réputation existe. Il y a eu Elliot Lake, il y a eu Westray, il y a eu le barium au Québec, il y a eu l'amiante partout, et le plomb à Trail. Cominco a reçu la plus grosse pénalité de toute l'histoire de la Colombie-Britannique pour avoir exposé ses travailleurs.
    Nous sommes l'industrie la plus réglementée au Canada lorsqu'il s'agit de protéger les travailleurs et l'environnement. Nous pouvons vraiment être des chefs de file. Nous pouvons hisser le drapeau canadien avec fierté car, si quelqu'un voulait investir dans une société étrangère, il pourrait s'adresser à une société minière canadienne, pas seulement parce que nous possédons la bonne technologie mais aussi parce que nous avons la volonté et la capacité de protéger les travailleurs, l'environnement et les collectivités environnantes. Voilà ce que nous pouvons faire. Voilà où les sociétés minières peuvent briller. Je parle évidemment de celles qui sont très responsables, et il y en a beaucoup.
    Je pense que cela réglerait le problème de certaines des petites sociétés qui tombent parfois du mauvais côté. Comme je l'ai dit, c'est parfois simplement de l'héroïne économique. Allez dans l'un de ces pays, ou dans une collectivité du Canada, pour annoncer que vous voulez ouvrir une mine et que vous allez créer beaucoup d'emplois très bien rémunérés, vous verrez que les gens se plieront en quatre pour vous accueillir. Parfois, nous laissons certaines des choses les plus importantes derrière nous. Nous possédons manifestement la technologie d'extraction mais nous oublions souvent les choses importantes : les gens eux-mêmes.
    Merci, M. Hunt.
    M. Rae.
    Je dois déclarer d'emblée que j'ai travaillé pour les Métallurgistes unis dans ma jeunesse, lorsque j'étais avocat, et que j'ai toujours été très fier de leur être associé.
    J'aimerais demander aux témoins... cela va un peu au-delà du consensus des tables rondes. Je crois que nous essayons tous de trouver une meilleure manière d'exprimer ce consensus dans le projet de loi et non pas de critiquer sa formulation en détail. Que pourriez-vous dire à ce sujet?
    Vous conviendrez que le projet de loi va un peu au-delà du consensus. On n'y trouve pas l'idée d'un ombudsman, qui provenait des tables rondes, ni celle d'un mécanisme de résolution des différends, qui en provenait aussi. Comment pourrions-nous inclure cela dans le projet de loi? Comment pouvons-nous y intégrer un processus reflétant réellement le consensus des tables rondes?
    Vous me suivez, M. Thomson, M. Hunt ou Mme Sorio?
    Je pense qu'il est regrettable que la stratégie annoncée par le gouvernement ne comporte manifestement pas les éléments clés du consensus.
(1025)
    Vous avez raison.
    On en est presque au point où ce que fait le gouvernement serait mieux fait par les associations industrielles qui ont participé aux tables rondes. À certains égards, je dirais que c'est presque une indication du rôle légitime du gouvernement, créer un centre d'excellence, qui sera maintenant logé au sein d'une association industrielle, d'avoir une conseillère pour conseiller les entreprises. Il y a des choses qu'il est souvent préférable de laisser aux soins de l'industrie elle-même.
    Ce que nous attendons vraiment du projet de loi C-300, c'est un processus équitable par lequel Exportation et Développement Canada, le RPC et les Affaires étrangères pourront, de manière uniforme, appliquer les normes des droits humains et les attentes touchant la responsabilité sociale des entreprises quand ils leur offrent leur aide. Je crois que la force du projet de loi, pour ce qui est d'avoir une approche générale et cohérente, provient précisément de cela: que les entreprises canadiennes, et d'autres, très franchement, qui sollicitent l'aide du gouvernement canadien sauront à quoi s'en tenir et ne seront pas à la merci de politiques différentes ou même contradictoires provenant d'organismes étatiques différents. L'avantage du projet de loi est qu'il instaure une approche générale et uniforme parmi toutes ces juridictions différentes.
    En ce qui concerne l'environnement, il est clair que l'industrie a fait d'énormes progrès, et ce n'est pas parce qu'on s'en est remis à une approche strictement volontaire. C'est parce qu'on a prévu des conséquences réelles et qu'on a relié certaines de ces attentes environnementales aux deniers publics dont les entreprises ont besoin pour réaliser leurs projets. C'est un levier important que le gouvernement n'utilise pas actuellement et que le projet de loi C-300lui donnera l'occasion d'utiliser.
    Merci, M. Thomson.
    Monsieur Cardin, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, madame, bienvenue au comité.
    M. Beatty, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada, nous disait que ceux qui appuient le projet de loi C-300 étaient animés d'une certaine idéologie. Lors de la question de mon collègue, il nous a précisé que cette idéologie était notre position contre l'extraction minière.
    Monsieur Hunt, vous êtes l'exemple par excellence, à savoir que ceux qui appuient le projet de loi C-300 ne sont pas contre l'industrie minière. Vous voulez effectivement que les travailleurs de votre domaine soient protégés et en sécurité, qu'ils puissent vivre dignement de leur travail et respecter l'environnement. C'est ce que vous avez exprimé. En plus, vous avez une expérience internationale. Vous avez vu plusieurs pays. Vous avez vu plusieurs compagnies minières exploiter des régions différentes dans des conditions différentes.
    On nous dit que près de 60 p. 100 des compagnies minières sont enregistrées au Canada. Cela semble quand même curieux.
    Cela nous indiquerait-il que la situation dans les autres pays qui chapeautent leurs compagnies minières, au chapitre de la responsabilité sociale... Comment pourrait-on comparer la responsabilité sociale du Canada envers les compagnies minières, par rapport à ce qui se fait dans d'autres pays? Est-ce cela qui incite des compagnies à venir s'enregistrer au Canada pour ensuite aller exploiter des gisements un peu partout dans le monde?

[Traduction]

    Comme je l'ai déjà dit, j'estime que les sociétés minières canadiennes sont des chefs de file mondiaux sur le plan de la technologie et de la méthode d'extraction des ressources. La raison pour laquelle elles vont dans les pays en développement est que ces derniers n'ont pas le capital nécessaire pour mettre leurs ressources en valeur. À la différence de l'activité manufacturière, par exemple, on ne peut pas prendre un dépôt de minerai de fer ou de cuivre pour le transporter en Chine ou en Inde. On doit extraire le minerai là où il se trouve. Nos entreprises ont le savoir-faire requis et, évidemment, le capital et les appuis nécessaires. Elles peuvent réunir des fonds par la bourse de Vancouver ou la bourse de Toronto. En règle générale, ce sont les entreprise dites juniors qui font la prospection et les entreprises dites seniors qui s'occupent de l'exploitation. C'est le processus qui s'est instauré dans l'industrie minière du Canada.
    Il n'y a rien de magique là-dedans: elles vont là où se trouvent les ressources. Il y a des réserves massives de capitaux. Si l'on voit les choses de cette manière, pourquoi les sociétés minières canadiennes vont-elles à l'étranger? C'est simple : l'extraction des ressources doit se faire en fonction de l'économie du pays. Si c'est en pesos chiliens, ça sort en pesos et c'est vendu sur les marchés mondiaux en dollars américains. Il y a donc un avantage évident pour les entreprises à agir de cette manière.
    À certains égards, une société minière canadienne... Quand je vais négocier au Canada avec des sociétés minières, elles me disent toujours qu'elles sont en concurrence directe avec des mines d'Amérique latine. Bien souvent, ce sont des mines dont elles sont propriétaires, et elles se font donc concurrence à elles-mêmes. C'est un peu un jeu de bonneteau.
(1030)

[Français]

    Je crois avoir été mal compris. Je voulais savoir ce qu'il en était de la responsabilité sociale des compagnies minières autres que celles provenant du Canada.
    Ces autres pays ont-ils des lois encadrant leurs compagnies minières qui opèrent à l'étranger —, des lois sur la responsabilité sociale plus restrictives qu'elles ne peuvent l'être au Canada?

[Traduction]

    Il y a actuellement un conflit de travail chez Vale Inco à Sudbury et à Voisey's Bay. Il s'agit d'une société minière brésilienne qui ne semble pas adopter des normes brésiliennes quand elle travaille au Canada. En fait, elle essaye de nous écraser. S'il y a une norme au Brésil, nous ne la voyons pas.

[Français]

    Non, cela ne répond pas tout à fait à ma question. On parle de compétitivité. Si une loi encadre la responsabilité sociale des compagnies minières canadiennes à l'étranger, on a peur de perdre certains niveaux de compétitivité et, par conséquent, de perdre du marché et des choses semblables.
    En même temps, des pays ont une réglementation, aux chapitres des droits du travail et de l'environnement, qui est au niveau le plus bas. Les compagnies minières sont donc intéressées à aller y exploiter des gisements, justement pour en profiter. Dans un contexte de mondialisation, on sait qu'il s'agit d'abord d'aller là où cela coûte moins cher, où les ressources sont disponibles, où il y a moins de restrictions concernant les lois du travail, l'environnement et tout cela. Dans un tel contexte, une loi qui encadre les compagnies minières canadiennes aide la population à l'étranger contre — probablement — ses propres dirigeants qui sont tentés, en raison d'investissements majeurs dans leur pays, de laisser un peu aller les choses.
     D'après moi, c'est une responsabilité qu'on devrait avoir envers les autres pays. Dans un contexte de commerce international, de mondialisation, quand on négocie des accords de libre-échange bilatéraux, ce n'est pas comme s'il s'agissait d'accords multilatéraux où des normes pourraient être fixées pour l'ensemble. Il y a des dangers dans ce sens.
    À cet égard, je demanderais à Mme Sorio si elle a une idée de la situation des compagnies minières en Colombie, par exemple.

[Traduction]

    Merci, M. Cardin.
    Mme Sorio.
    Nous avons à KAIROS un coordonnateur de partenariats pour l'Amérique latine, et la Colombie est l'un de nos pays prioritaires en ce qui concerne les droits humains et l'extraction des ressources.
    Je ne connais pas très bien notre travail en Colombie dans ce domaine mais je sais que des partenaires d'Amérique latine, du Honduras et du Guatemala, sont venus au Canada il y a deux semaines pour rencontrer des députés afin d'exprimer leur appui au projet de loi C-300.
    Si vous me permettez de répondre aux questions précédentes, nos partenaires à l'étranger estiment que les sociétés minières canadiennes sont à la pointe de l'industrie et que le fait que le gouvernement canadien fasse preuve d'une telle ouverture à l'égard des organisations, de l'industrie et des ONG en ce qui concerne la formulation de ce projet de loi témoigne de notre processus démocratique. Les partenaires sont très sensibles à ce facteur car ils n'ont pas ça dans leurs pays.
    Quand nous parlons de l'incidence des sociétés minières canadiennes sur les collectivités locales, ils viennent nous voir et nous disent que telle ou telle société fait telle ou telle chose, et cela porte atteinte à la réputation du Canada, selon nous. Donc, adopter ce projet de loi rendant les entreprises plus responsables rehaussera la réputation du Canada à l'étranger. Cela ne veut pas dire non plus que les sociétés minières d'autres pays, par exemple d'Australie, ne font pas l'objet de pressions à cause de leur comportement.
    Merci, Mme Sorio.
    C'est maintenant au tour de M. Abbot ou de M. Lunney.
(1035)
    Je vais commencer et M. Lunney me suivra.
    Monsieur Hunt, simplement pour établir ma propre crédibilité à vos yeux, comme vous l'avez fait avec nous ce matin, je sais exactement de quoi vous parlez quand vous évoquez Westray. Je suis allé sur place peu après l'explosion et j'ai eu le plaisir de collaborer avec Alexa McDonough à ce qui est devenu un effort de tous les partis pour faire adopter la législation.
    J'ai eu une relation très productive avec votre syndicat dans ma circonscription et, même si nous avons certaines divergences d'opinion, nous réussissons à trouver des terrains d'entente. Je vous appuie donc totalement dans vos efforts.
    Cela dit, si j'ai bien compris votre argumentation, vous considérez que le projet de loi C-300 est un moyen pour établir les normes du travail canadiennes ou même les méthodes de négociation dans d'autres pays. C'est bien ça?
    Non. Nous savons que ce n'est pas possible. Par exemple, si vous comparez les salaires du Pérou à ceux du Canada, cela perturberait terriblement l'économie du pays. Vous auriez des mineurs gagnant plus que des médecins, par exemple, et ce n'est pas ce que nous recommandons. En revanche, nous réclamons au moins des normes minimales de santé et de sécurité et des normes environnementales. Nos recommandations concernent l'adoption de normes très minimales. Ce sont les normes de la Banque mondiale, ce qui veut dire que ce ne sont même pas les normes de l'OIT, par exemple.
    Serait-il donc plus exact de dire que vous considérez le projet de loi C-300 comme le moyen d'instaurer certaines normes du travail dans d'autres pays, par le truchement d'une législation canadienne?
    Non, je ne pense pas que nous recherchons cela par le biais d'une loi canadienne.
    Mais il s'agit du projet de loi C-300. Votre idée est que ce projet de loi, qui est bien canadien, serait pour votre syndicat un moyen permettant d'établir le genre de normes dont vous parlez dans les autres pays.
    Si une plainte était déposée et qu'on pouvait démontrer au ministre que des travailleurs sont affectés, qu'ils tombent malades ou qu'ils perdent la vie à cause de leur travail, vous pourriez au moins formuler une plainte pour essayer de faire avancer les choses afin de voir s'il y a une norme qui serait acceptable quelque part.
    Donc, ce que vous dites — et je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit mais nous devons essayer de trouver une entente —, c'est que le projet de loi C-300 serait à vos yeux un moyen pour le gouvernement canadien, armé de ce projet de loi, pour porter ces normes à la connaissance des gouvernements chilien, péruvien ou équatorien et faire en sorte que ces normes canadiennes soient imposées à ces pays.
    Non. Ce que nous souhaitons, c'est que le gouvernement fédéral, avant d'accorder une aide financière aux sociétés minières canadiennes, se penche sur leur responsabilité sociale, avec des règlements concernant la santé et la sécurité des travailleurs ou l'environnement lorsque cela affecte les collectivités qui sont proches d'une mine.
    Je ne propose pas qu'on impose la loi canadienne à ces pays, ça ne marcherait pas.
    Votre industrie emploie 350 000 personnes et EDC et le Régime de pensions du Canada nous ont dit que l'adoption du projet de loi C-300 aura une incidence sévère sur ces 350 000 personnes, comme l'a dit M. Beatty ce matin. Êtes-vous prêt à les mettre en péril?
    Bien sûr que non, et M. Beatty non plus, j'en suis sûr. Je pense simplement qu'il se trompe en disant que cela mettrait les travailleurs en péril. Vous ne pouvez pas croire que je viendrais ici en risquant de mettre en péril des travailleurs du Canada ou d'ailleurs. La raison pour laquelle je suis ici, c'est que je me soucie des travailleurs étrangers qui sont maltraités par les sociétés minières canadiennes. C'est une bonne chose à faire et ça ne me met aucunement mal à l'aise. Je suis très à l'aise de m'adresser à votre comité en disant que je représente des travailleurs. Le pays dont il s'agit m'importe peu. Je ne m'intéresse pas aux drapeaux. S'ils travaillent pour une société canadienne, nous devrions être capables d'exporter nos pratiques exemplaires, ce qui englobe la protection des travailleurs, de leurs collectivités et de leurs familles. Ça me paraît très cohérent et c'est une bonne chose.
    Merci, M. Hunt.
    M. Lunney.
    Par cette réponse, vous admettez que vous essayez de faire appliquer les lois du travail canadiennes extraterritorialement, ce qui nous pose un problème. Nous nous efforçons de développer les capacités des autres pays mais pas de faire appliquer nos lois à l'étranger. Vous en conviendrez certainement.
(1040)
    Je souhaiterais qu'on y applique les lois qui protègent les travailleurs au Canada. À ce moment-là, nous n'aurions plus d'histoires d'horreur comme Westray ou Elliot Lake.
    Reconnaissez cependant qu'il s'agit là de cas minoritaires. Il y a une réglementation très stricte au Canada et la plupart des pays aimeraient bien avoir les mêmes règlements que nous.
    À condition qu'ils soient appliqués.
    Je m'adresse maintenant à nos amis de KAIROS.
    Brièvement, s'il vous plaît, M. Lunney.
    À la table ronde, vous disiez attendre une réponse. Nous apprécions que les Églises souhaitent aider les peuples des autres nations mais cela nous ramène à l'application extraterritoriale de nos lois. Nous ne pouvons tout simplement pas imposer les lois canadiennes aux autres pays. Ils tiennent à leur souveraineté. Bon nombre des abus dont on parle résultent en réalité d'actions commises par les gouvernements eux-mêmes. C'est à l'absence de capacité de gouvernement que nous essayons de remédier. Nous essayons de trouver des solutions à cela au Canada.
    Vous avez mentionné le professeur John Ruggie, le représentant spécial des Nations Unies. Il y a les Principes de l'Équateur. Nous avons constaté toute une évolution des principes de RSE au cours de la dernière décennie. Je me demande si vous ne craignez pas que les sanctions qu'on trouverait dans le projet de loi C-300, si elles étaient appliquées comme prévu, ne risqueraient pas de provoquer le genre de problèmes que nous avons eus avec Talisman. Voilà une société canadienne responsable qui a dû partir et qui a été remplacée par une société d'un autre pays ayant une réglementation beaucoup moins rigoureuse que la nôtre, ce qui fait que les gens souffrent encore plus qu'avant.
    Merci, M. Lunney.
    Vous exprimez une préoccupation légitime quand vous parlez de compétitivité. Quelle incidence cela aura-t-il sur les sociétés canadiennes par rapport à leurs concurrentes? Le Canada est un pays auquel s'adressent des gens du monde entier pour réunir des capitaux parce que nous avons certains des meilleurs géophysiciens et des meilleurs analystes miniers au monde. Les gens savent qu'ils doivent procéder à la diligence voulue quand ils réunissent des capitaux. Les règlements de notre bourse concernant les réserves et la divulgation sont certains des plus exigeants et on peut s'y fier.
    Si nous faisions la même chose avec la responsabilité sociale, il n'y aurait pas de fuite des capitaux. Nous avons acquis la réputation d'être l'un des meilleurs pays au monde pour réunir des capitaux miniers. Si nos règles en matière de réserves étaient des règles volontaires, pensez-vous que nous serions dans la même situation qu'aujourd'hui? Non. C'est parce qu'elles sont obligatoires. C'est parce qu'elles s'appuient sur des règlements gouvernementaux. Si nous faisions la même chose en matière de responsabilité sociale, nous continuerions quand même à attirer le même niveau de capitaux. Toutefois, nous nous occuperions en même temps des autres risques sociaux et environnementaux auxquels nos sociétés extractives sont confrontées quotidiennement, sans mécanisme de correction permettant d'agir.
    Merci, M. Thomson.
    M. Dewar.
    J'attends les déclarations fascinantes de M. Goldring sur la Constitution mais je ne suis pas pressé. Il me donne de nouveaux arguments et c'est très bien.
    Si cela convient au comité, je prendrai sept minutes.
    Bien.
    Merci.
    Merci à nos témoins. Désolé pour la cuisine interne.
    Au sujet de ce projet de loi, d'aucuns prétendent — nous venons juste de l'entendre dire — que nous allons imposer la loi canadienne à d'autres pays.
    Nous avons reçu un mémoire juridique indiquant clairement que tel n'est pas le cas. C'est également ce que vous venez de nous dire.
    L'un des arguments des opposants est que, puisque nous appliquions un filtre, si vous voulez, aux comportements canadiens à l'étranger, il devrait y avoir une sorte de lien. Si vous obtenez des fonds canadiens, ou si vous voulez investir des fonds canadiens, vous devriez fondamentalement rendre des comptes.
    Je m'adresse d'abord à KAIROS puis à M. Hunt.
    Quand vous êtes à l'étranger, vous entendez les collectivités exprimer leurs préoccupations au sujet de sociétés canadiennes et de leur comportement. Comment ce projet de loi pourrait-il modifier ce discours, si vous voulez, entre les gens qui sont dans ces collectivités et la réputation du Canada comme pays? En quoi le projet de loi pourra-t-il être utile à ce chapitre?
(1045)
    Tout d'abord, dans une collectivité dont les droits humains, l'environnement et le gagne-pain sont affectés, la première chose à faire est de s'adresser à la communauté locale pour se plaindre. Toutefois, ces plaintes ne débouchent pas sur des correctifs. Le contexte économique actuel de ces pays les amène à appuyer les multinationales qui viennent y investir de l'argent.
    Essentiellement, le projet de loi C-300 offrirait aux collectivités le moyen de s'adresser à l'ambassade canadienne pour formuler une plainte, exprimer une préoccupation, dans l'espoir que l'ambassade canadienne de ce pays se penchera sur la situation, mènera une investigation et apportera une solution.
    Quelles solutions existent actuellement à ce sujet?
    Prenons l'exemple de la Cordillera Peoples Alliance au nord des Philippines. Olympus, une société minière canadienne qui fait de la prospection dans la région, ne respecte pas les normes environnementales mais, aux Philippines, vous ne pouvez pas vous attendre à ce que le gouvernement fasse respecter ses propres normes environnementales.
    Essentiellement, la communauté pourra s'adresser au gouvernement canadien ou le projet de loi C-300 lui donnera cette possibilité ou cet espace pour...
    Veuillez m'excuser, Mme Sorio, je dois vous interrompre un instant.
    Je dois signaler aux membres du comité qu'il y aura bientôt un vote. Si je comprends bien, la cloche sonnera pendant 30 minutes et le vote se tiendra à 11 h 15.
    En vertu de notre Règlement, je dois demander le consentement unanime du comité si nous voulons continuer. J'espère que nous aurons largement le temps de nous rendre en Chambre pour voter.
    Les membres du comité sont-ils tous d'accord?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Très bien.
    Veuillez m'excuser de vous avoir interrompue, madame Sorio. Vous pouvez continuer.
    Mme Connie Sorio: Merci, monsieur le président.
    Au fond, vous dites que les gens qui ont des réserves au sujet du comportement des sociétés canadiennes n'ont qu'un recours limité, voire inexistant.
    Monsieur Hunt, je me tourne vers vous. Je constate qu'il y a actuellement des causes devant les tribunaux au sujet de cette limitation. Il y a des poursuites. Vous avez indiqué très clairement que cela aurait pour effet, selon vous, non seulement de rehausser le profil du Canada mais aussi de redorer sa réputation, si je peux m'exprimer ainsi. Vous pensez que nous pourrons faire ça avec le projet de loi C-300.
    Oui. Je pense que c'est un aspect positif. Si vous adoptez une loi qui obligera à mettre une situation en lumière avant d'accorder un appui, et si l'on est obligé de respecter les conditions, ce sera une très bonne chose.
    Je ne pense pas du tout que ce soit irréaliste. Je pense que c'est assez facile. Comme je l'ai dit, nous avons la technologie et le savoir-faire nécessaires pour aller de l'avant au sujet de l'extraction et de l'équipement. Nous savons clairement ce qu'il faut faire pour protéger les travailleurs et l'environnement quand nous allons dans le pays de quelqu'un d'autre.
    Vous savez, dans certains cas, nous laissons sur place des situations vraiment pourries. Quand vous exploitez une ressource non renouvelable, vous laissez un grand trou avec beaucoup de scories. Bien souvent, cela a des répercussions.
    Nous savons comment réagir à cela au Canada. Prenez l'exemple de Yellowknife, la capitale mondiale de l'arsenic. Il n'y a plus d'exploitation minière là-bas mais il y a encore suffisamment d'arsenic pour tuer chaque homme, femme et enfant du Canada. Il y a des écoulements d'acide à partir des bassins de résidus. En Colombie–Britannique, la mine d'argent d'Equity provoquera des écoulements pendant les 100 prochaines années. Ce sont les citoyens du Canada, de la Colombie–Britannique, qui vont payer les pots cassés.
    Si nous n'imposons pas de règlement aux entreprises canadiennes oeuvrant à l'étranger, que vont-elles faire? À Yellowknife, par exemple, ce sont les contribuables canadiens qui ont payé l'assainissement. C'était de l'or. Ça a duré 40 ans. Une mine d'or : avez-vous une idée de l'argent qu'ils ont gagné? Une fois qu'ils ont fermé les portes, ils sont partis.
    C'est effarant.
    Finalement, si vous avez d'autres informations à fournir au comité, n'hésitez pas à le faire. Qu'il s'agisse de votre expérience à l'étranger ou de recommandations sur des dispositions qu'il faudrait renforcer, selon vous — comme vous avez dit, monsieur Hunt —, nous vous en serions reconnaissants.
    Merci d'être venus aujourd'hui.
(1050)
    Merci beaucoup, M. Dewar.
     La Chambre est actuellement saisie de plusieurs autres projets de loi, des projets concernant le libre-échange. Est-ce que KAIROS a une politique sur l'accord de libre-échange avec la Colombie? Êtes-vous en faveur du libre-échange avec la Colombie?
    Comme l'a dit Connie, nous avons un collègue qui se concentre sur cette région. Je sais que notre organisation a appuyé ce que votre comité a réclamé, c'est-à-dire une évaluation exhaustive de l'impact que pourrait avoir cet accord sur les droits humains en Colombie avant que le Canada prenne une décision.
    Donc, de manière générale, KAIROS n'a pas pour politique de s'opposer systématiquement aux accords de libre-échange.
    Considérant la situation des droits de la personne en Colombie, il ne conviendrait pas de signer un tel accord sans savoir quelle incidence il pourrait avoir sur les conflits et sur les infractions aux droits humains. Ce serait très problématique.
    Donc, un accord de libre-échange avec d'autres pays ne poserait pas nécessairement de problème?
    Je crois que c'est le genre d'analyse que devrait faire le gouvernement canadien de manière générale. Nous ne réclamons pas cela uniquement dans le cas dont vous parlez. Je pense qu'il s'agit plus d'intégrer les normes des droits humains à notre politique étrangère et aux accords internationaux que nous passons. Je ne limiterai pas nécessairement cela à ce cas particulier.
    Est-ce que KAIROS a un site Web?
    Oui, vous pourrez y trouver beaucoup d'informations.
    Y trouverai-je votre politique sur les accords de libre-échange?
    Absolument.
    Merci beaucoup. C'est tout ce que je voulais savoir.
    Nous allons suspendre...
    J'aimerais répondre à votre question. Nous n'appuyons par l'accord de libre-échange avec la Colombie, et je vais vous dire pourquoi. Si j'étais aujourd'hui en Colombie après avoir témoigné devant un comité, je me ferais assassiner avant d'avoir franchi la porte de sortie. C'est la vérité.
    Très bien. Merci de votre point de vue sur la Colombie.
    Nous allons... Je constate que M. Dewar s'en va mais c'est pour un autre comité.
    M. Goldring, pour un rappel au règlement.
    Monsieur le président, j'ai certaines remarques extrêmement importantes à faire au sujet de la motion de M. Dewar et j'aimerais donc savoir si j'aurai la possibilité de les faire à la première occasion?
    Monsieur Goldring, je peux vous assurer que vous aurez autant de temps que le comité voudra bien vous accorder et que nous avons hâte d'entendre vos remarques.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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