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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 008 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 9 mars 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Nous en sommes à la huitième réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, en ce lundi 9 mars 2009. Aujourd'hui, c'est également le Jour du Commonwealth. Je crois que c'est le 60e anniversaire du Commonwealth.
    Nous vous souhaitons la bienvenue. Nous continuerons notre étude des éléments clés de la politique étrangère du Canada.
    Aujourd'hui, nous recevons Stephen Clarkson, professeur de science politique à l'Université de Toronto. De l'Université d'Ottawa, nous avons le professeur Donald McRae, titulaire de la chaire Hyman Soloway du droit des affaires et du commerce. Comparaît également, à titre personnel, M. Carl Grenier, professeur associé au département des sciences politiques de l'Université Laval. Bienvenue messieurs.
    Notre comité vous invite à faire une déclaration préliminaire d'une dizaine de minutes, après quoi nous passerons à la première série de questions. Je ne sais pas si vous avez tiré à la courte paille, mais comme j'ai d'abord mentionné le nom de M. Clarkson, je l'inviterais, si cela vous convient, à prendre la parole en premier.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    C'est un grand privilège pour moi de pouvoir échanger des idées avec les élus qui me gouvernent. Mais c'est évidemment un peu difficile de résumer 40 ans de recherches et d'enseignement sur cette question dans un exposé de 10 minutes.
    Alors, permettez-moi de le faire en abordant trois sujets. D'abord, je vous parlerai de ce qui a changé — j'ai commencé à travailler dans le domaine des relations canado-américaines vers la fin des années 1960 —, après quoi je me tournerai vers quelques éléments fondamentaux de la nouvelle réalité à laquelle est confronté le Canada en Amérique du Nord. Je terminerai en vous exposant quelques idées sur les choses que vous voudrez peut-être aborder et sur les recommandations qui pourront vous être soumises.
    Ce qui a changé, surtout dans nos relations avec les États-Unis, c'est que le Canada joue un rôle moins important dans certains domaines, mais un rôle plus grand dans d'autres. Sur le plan militaire, depuis la fin de la guerre froide, parce que nous ne sommes plus sur la trajectoire de vol, NORAD n'est plus un organisme crucial. Notre importance a aussi diminué sur le plan économique en ce sens que le Canada est un pays considérablement petit, dont l'économie est bien moins importante que celle de la Chine, de l'Inde et d'autres grands pays émergents. Enfin, nous occupons une moins grande place sur la scène politique en ce sens que nous ne sommes pas une source de problèmes — je le dis sans sarcasme — et pour Washington, nous ne constituons pas une préoccupation; nous ne sommes pas sur son écran radar.
    D'un autre côté, le Canada joue un rôle plus important relativement à trois aspects liés à la sécurité. Étant donné la paranoïa des Américains en matière de terrorisme, le Canada a un rôle immense à jouer afin d'éliminer toute possibilité que des terroristes franchissent la frontière. Pour ce qui est de la sécurité énergétique, on sait que le Canada est le plus grand fournisseur de pétrole et le seul véritable fournisseur de gaz naturel des États-Unis. Le Canada a par conséquent un grand rôle à jouer dans l'esprit des Américains, qui s'inquiètent de la sécurité énergétique. Étant donné que le nouveau président des États-Unis a inscrit l'environnement sur sa liste des priorités, le Canada jouera un rôle très important, voire positif, dans le dossier de la sécurité environnementale, compte tenu du fait que les sables bitumineux sont à la fois une source de pétrole et une énorme source de pollution. En résumé, on peut donc affirmer que le premier grand changement tient au fait que les domaines où le Canada occupe une place importante ont considérablement changé.
    Le deuxième changement est l'évolution du contexte international. Pendant la guerre froide, à cause de la menace soviétique, le Canada était présent sur la scène mondiale en raison de NORAD et de sa participation importante à l'OTAN. Maintenant, ce sont l'ALENA et tout ce qui est en lien avec l'Organisation mondiale du commerce qui occupent le Canada, et c'est d'ailleurs là-dessus que porte la majeure partie de ses rapports avec les États-Unis. Voilà donc des changements très importants survenus durant les 30 ou 40 dernières années touchant l'importance de la place qu'occupe le Canada et le contexte dans lequel il traite avec les États-Unis.
    Je vais vous décrire très brièvement la situation actuelle. Aujourd'hui, en Amérique du Nord, 15 ans après l'entrée en vigueur de l'ALENA, nous constatons l'échec presque surprenant de cet accord, qui visait principalement l'intégration économique en Amérique du Nord. C'est un échec essentiellement parce que les inégalités se sont accrues plutôt que de s'atténuer entre les pays et au sein même des pays.
(1535)
    Ce qui veut dire que l'ALENA n'est pas du tout considéré comme un succès, certainement pas au Mexique ni aux États-Unis, même s'il est vu de façon beaucoup plus positive chez nous. C'est un élément important de la réalité actuelle. Et n'oublions pas les énormes difficultés du Mexique; d'après Washington, il s'agit d'un État non viable.
    Effectivement, l'Amérique du Nord se désintègre; le symbole en est le mur — en fait un double mur — que les États-Unis construisent le long de leur frontière méridionale. Il s'agit là de la première grande réalité sur laquelle le comité devra se pencher avec le plus grand sérieux.
    La deuxième nouvelle réalité concerne la sécurité. Les Américains craignent beaucoup que des terroristes traversent la frontière. Que cela nous plaise ou non, le Canada se trouve logé à la même enseigne que le Mexique. Le département de la Sécurité intérieure considère le Canada comme une menace tout aussi importante sinon plus grave que la menace mexicaine. Vous le savez tous probablement mieux que moi — et on ne l'entend pas seulement à la télévision de la bouche des gens de droite —, on pense qu'il est plus facile pour les gens du Moyen-Orient d'entrer au Canada qu'au Mexique. Si bien que des terroristes islamistes peuvent venir au Canada plus facilement, ce qui rend encore plus réelle la possibilité qu'ils traversent ensuite la frontière. Les États-Unis établissent une distinction entre le Canada et le Mexique, mais je ne pense pas qu'ils considèrent le Canada de façon différente du Mexique pour ce qui a trait à la menace que peuvent représenter nos deux pays, pas à cause des citoyens, mais à cause de ceux qui viennent dans nos pays. Tout comme ils sont considérés comme des sources de drogues illégales.
    Monsieur le président, quant à l'avenir, l'ironie de la situation actuelle tient au fait que les élites politique et économique canadiennes, qui nous ont donné l'ALENA, nous disent maintenant que nous devrions quitter cette alliance, essayer de nous déconnecter du Mexique et de rétablir les relations canado-américaines des années 1960, qui étaient considérées comme spéciales — il faut dire que chaque pays aime bien considérer qu'il entretient des relations spéciales avec les États-Unis, bien entendu. En effet, d'après les anciens ambassadeurs Dereck Burney et Allan Gotlieb et les anciens conseillers du gouvernement qui nous avaient poussés vers le libre-échange, comme Michael Hart, nous sommes contaminés par notre relation avec le Mexique et nous devrions créer une nouvelle relation canado-américaine qui se distinguerait d'une façon ou d'une autre de celle que nous entretenons avec le Mexique.
    Je veux aborder cette question, parce qu'il serait naïf d'essayer de revenir en arrière, de tout défaire. Je suis sûr que les députés de l'Ouest connaissent bien mieux que moi les problèmes liés aux drogues qui touchent le sud de la Colombie-Britannique. À ce sujet, j'ai lu dans le Globe and Mail  — c'est donc la vérité — que la crise de la drogue en Colombie-Britannique est liée directement aux cartels mexicains. Si vous aviez lu leGlobe and Mail deux jours auparavant, vous y auriez trouvé un reportage expliquant que les cartels de la drogue au Mexique sont en contact direct avec la mafia sicilienne, qui a maintenant un nouveau plan d'affaires, c'est-à-dire travailler avec le Mexique.
    Mais ce que je tiens à dire c'est qu'il est impossible de rompre nos liens avec le Mexique. Il n'est pas possible de dire à Bombardier de fermer son usine d'aéronefs à Querétaro. Il n'est pas possible de dire à Magna de fermer ses 19 usines du Mexique et de rapatrier ses activités chez nous. Je pense qu'il faut se rendre à l'évidence que nous ne pouvons pas prétendre que le Mexique n'existe pas.
    Ce que je pense, c'est que nous devrions faire face à la situation en ce qui concerne le Mexique plutôt que de nier l'existence de ce pays. Nous ne pouvons pas ignorer les grands problèmes auxquels le Mexique est confronté. Nous ne pouvons pas ignorer non plus qu'il s'agit d'un marché pour nous en pleine croissance. Nous ne pouvons pas nier que ce pays a une population de 110 millions d'habitants, c'est-à-dire trois fois celle du Canada, qu'il deviendra plus puissant que le nôtre un jour et qu'il a déjà plus d'influence que le Canada à Washington.
(1540)
    Avant les dernières élections, plus de 5 000 citoyens américains d'origine mexicaine avaient été élus à divers postes au sein du gouvernement fédéral, des gouvernements des États et des administrations municipales. Quelque 60 p. 100 des immigrants illégaux aux États-Unis sont Mexicains. Quelque 30 p. 100 des immigrants légaux aux États-Unis sont Mexicains. Au sein du dernier Congrès, il y avait un caucus formé de 27 Hispaniques, dont la plupart étaient Mexicains.
    Ce que je veux dire, c'est que le Mexique donne peut-être des maux de tête aux Américains, mais ils le prennent au sérieux. Je crois que le Canada devrait collaborer avec le Mexique quand il s'agit de traiter avec Washington des nombreux dossiers où les deux pays ont des intérêts communs, dont celui des frontières et celui de la réglementation régissant le commerce et l'investissement.
    Je concluerai en vous disant que si nous avions dépensé 20 milliards de dollars pour bâtir un partenariat en vue d'aider le Mexique à améliorer ses infrastructures afin de favoriser son développement au lieu de consacrer cette somme à nos vains efforts militaires en Afghanistan, alors je pense... Quoi qu'il en soit, ce sont des conjectures, mais il demeure que le Canada doit collaborer avec le Mexique quand vient le temps de traiter avec Washington des questions qui leur sont communes.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Clarkson.
    Nous allons passer à M. Grenier.
    Je constate qu'à 16 h 30 précises, nous ferons une pause pour permettre au témoin suivant de s'installer. Il faudra aussi se garder du temps pour les questions et réponses.

[Français]

    Monsieur Grenier, vous disposez de 10 minutes.
    Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à vous adresser la parole aujourd'hui. Je vais essayer de diviser mes propos en trois segments, un peu comme l'a fait M. Clarkson.
    D'abord, je vais rappeler pourquoi le Canada a conclu un accord de libre-échange avec les États-Unis, qui s'est étendu éventuellement au Mexique. Je vais ensuite parler de la façon dont cet accord a évolué vis-à-vis des priorités d'alors du Canada. Finalement, je vais faire quelques suggestions pour l'avenir, vu le changement de contexte et d'administration à Washington.
    Je suis bien conscient que ce comité est celui des affaires étrangères et du développement international et qu'il y a un comité distinct traitant du commerce international. Mais vous conviendrez avec moi qu'une grande partie des relations avec les États-Unis sont d'abord commerciales.
    Lorsque M. Mulroney a écrit au président Reagan en septembre 1985, il avait énoncé deux objectifs pour le Canada: d'abord, il voulait un accès plus sûr au marché américain et, ensuite, un meilleur accès. Qu'est-ce que ça voulait dire? Que le Canada, essentiellement, recherchait cet accord de libre-échange avec les États-Unis, qui était le fruit de 150 ans d'efforts, d'abord pour solidifier les gains qu'il avait faits au cours des négociations du GATT. Il y en avait eu sept à l'époque. On voulait solidifier ces gains parce qu'on utilisait à l'occasion des mesures de protection contingente comme les droits compensateurs, en cas de subventionnement, et les droits antidumping, en cas de dumping allégué. En payant un prix en termes d'ouverture de son propre marché, il y avait érosion des gains faits par le Canada auprès des États-Unis. Déjà à l'époque, on a eu la première cause sur le bois d'oeuvre; en fait, c'était il y a plus de 25 ans. C'était un souci très évident du Canada.
     Le deuxième objectif était d'améliorer l'accès. Effectivement, des tarifs américains d'environ 4 p. 100 étaient appliqués aux exportations canadiennes.
    Lorsqu'on fait un bref bilan, on peut constater qu'on a amélioré notre accès: la plupart des tarifs ont été éliminés, de part et d'autre. Au Canada, on a gardé des tarifs assez élevés sur certains produits agricoles à cause des négociations du GATT qui ont eu lieu au cours des années 1990 et qui ont transformé un certain nombre de quotas qu'on estimait nécessaires à l'époque pour le système de gestion de l'offre canadienne pour les produits laitiers, la volaille et les oeufs. Ces quotas ont été transformés en tarifs, et malgré certaines coupes, ces tarifs restent quand même assez élevés. On a eu un meilleur accès; on peut le confirmer.
    Un accès plus sûr voulait dire un meilleur système de règlement des différends commerciaux. C'est devenu rapidement le principal enjeu des négociations de 1987, notamment, de telle sorte qu'à la fin, le négociateur en chef du Canada, M. Reisman, avait rompu les négociations parce qu'on ne faisait pas de progrès sur la question, cruciale pour le Canada, d'un meilleur système de règlement des différends commerciaux.
     Éventuellement, les négociations ont repris et on a obtenu ce qu'on appelle le chapitre 19. Ce chapitre a créé un système de règlement des différends complètement nouveau. Pour la première fois, les États-Unis acceptaient que des décisions de leurs agences soient revues par des non-Américains. Ils n'ont pas aimé ça dès le départ, mais il faut dire que pour la première phase, celle de l'Accord de libre-échange Canada—États-Unis, ce système a bien fonctionné comme prévu, c'est-à-dire qu'on a réduit les délais à environ 315 jours, alors que les anciens délais, avec les cours américaines, étaient de plus de 1 000 jours. On a aussi réduit les coûts parce qu'il n'y avait pas d'appel; en vertu de ce système, la décision de ces panels était définitive.
    Les choses se sont gâtées sérieusement lorsqu'on a conclu l'ALENA. Est-ce parce qu'on a ajouté un nouveau pays, le Mexique, qui est un pays en développement? J'en doute. Je crois plutôt que les groupes d'intérêt américains, les lobbys qui sont très puissants à Washington, ont réussi à convaincre les autorités américaines de s'opposer systématiquement au chapitre 19. Une panoplie de moyens ont alors été déployés pour contrer l'opération du chapitre 19.
(1545)
    Je ne ferai pas la généalogie de tout cela: je pense que c'est déjà assez bien documenté. Quoi qu'il en soit, il en résulte qu'aujourd'hui, une moyenne de près de 1 000 jours est nécessaire pour régler un différend. Certaines causes, par exemple celle du magnésium, ont nécessité 2 300 jours. Lors du dernier épisode, les nombreuses causes relatives au bois d'oeuvre ont pris environ 1 700 jours. Évidemment, dans ces conditions, on ne peut pas dire que ce processus a répondu avec succès au deuxième objectif du Canada. Il faut se le rappeler, c'était le principal enjeu pour le Canada. Le principal enjeu des États-Unis, comme nous l'avons appris plus tard, était un accès plus sûr aux ressources énergétiques. Le professeur Clarkson vient d'y faire allusion.
    Donc, en ce qui nous concerne, ça n'a pas fonctionné. C'est dû non seulement aux pressions protectionnistes des États-Unis et aux efforts des lobbies visant à détruire littéralement ce qui avait été convenu au moment de la première négociation, mais aussi à notre propre gouvernement. En effet, le gouvernement canadien a commis une série de négligences plus ou moins volontaires — et je pense qu'elles étaient, dans certains cas, plus volontaires que moins — qui ont aussi miné ce système, par exemple en ne nommant pas de panélistes dans les délais prescrits, en acceptant les délais inacceptables des États-Unis ou en ne contestant jamais les décisions américaines par l'entremise du mécanisme de contestation extraordinaire, alors que les Américains en ont fait littéralement un mécanisme d'appel. Je ne pense pas que ce soit là une critique partisane, étant donné que plusieurs gouvernements successifs ont eux aussi eu des torts, ce qui est malheureux. Ce mécanisme est érodé, et je pense qu'on peut se demander sérieusement s'il va vraiment être utile dans l'avenir.
    Un peu comme M. Clarkson, je ne crois pas non plus qu'on puisse défaire l'omelette. On est dedans, et il faut donc faire du mieux qu'on peut. Que peut-on faire? La nouvelle administration américaine et l'arrivée de M. Obama suscitent évidemment beaucoup d'espoir partout sur la planète. De toute évidence, M. Obama voit les choses de façon très large et très pratique. La crise dans laquelle il s'est trouvé plongé dès son arrivée à la Maison-Blanche va probablement renforcer cette attitude. Par exemple, à la lecture de son énoncé sur la politique commerciale, paru le 27 février dernier, on est frappé par le fait qu'il met beaucoup de choses dans le même panier. Je pense que s'il veut se faire entendre du nouveau président, le Canada va devoir tenir compte de cette réalité.
    La liste d'épicerie, c'est-à-dire l'approche voulant que nous nous rendions à Washington avec une liste des sujets qui nous intéressent, ne fonctionne pas. Par contre, le Canada a beaucoup d'avantages. Le président lui-même en a d'ailleurs souligné un quand il est venu ici il y a quelques semaines, à savoir la réglementation de notre système bancaire. On a beaucoup d'avantages à faire valoir et sur lesquels on peut fonder une nouvelle approche face à la nouvelle administration américaine. Je pense, par exemple, à un environnement moins dégradé et à des sources d'énergie — dont certaines sont très polluantes — qui intéressent déjà beaucoup les États-Unis.
    Je pense que si nous voulons améliorer nos relations avec les États-Unis, tout en laissant un peu de côté cette approche moraliste qui est souvent la nôtre, nous allons devoir littéralement nous insérer dans l'agenda du président Obama.
    Merci.
(1550)

[Traduction]

    Merci, monsieur Grenier.
    Nous allons passer à M. McRae.
    Merci, monsieur le président. Je suis très heureux de pouvoir m'adresser à vous aujourd'hui.
    Je voudrais m'en tenir à une question un peu moins vaste, quoiqu'elle se rattache à ce que M. Grenier vient de nous dire. Il s'agit des modes de règlement des différends entre le Canada et les États-Unis.
    De toute évidence, nous avons toujours des différends ou des divergences avec les États-Unis. Parfois, nous arrivons à les résoudre à l'amiable. D'autres fois, on parvient à une solution à la suite du soulèvement de l'opinion publique. Il arrive aussi qu'on doive avoir recours aux processus de règlement des différends. Ce que je voudrais étudier avec vous aujourd'hui, c'est la question de savoir si les processus de règlement des différends ont été utiles et s'il y a lieu de les développer davantage.
    Je commencerai par un bref survol historique. Avant que le Canada ne commence à gérer lui-même ses relations extérieures, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont eu recours à l'arbitrage à plusieurs reprises pour régler des différends touchant les frontières et le partage des eaux, tant du côté de l'Atlantique que du côté du Pacifique, y compris le tristement célèbre litige concernant la frontière de l'Alaska en 1903. Après cette année-là, peut-être à cause de cette querelle, nous n'avons plus eu recours à ce genre de mécanisme pendant longtemps. En effet, ce n'est qu'en 1984 que cela s'est reproduit, lorsque nous nous sommes adressés à la Cour internationale de justice au sujet de la frontière maritime du golfe du Maine. Bien entendu, à ce moment-là, on s'inquiétait beaucoup de savoir si c'était une bonne idée. On se demandait quelles seraient les retombées politiques pour le Canada, qui avait porté en justice un différend avec les États-Unis. Est-ce que les États-Unis se vengeraient s'ils devaient perdre? Je crois que l'affaire du golfe du Maine a démontré que nous pouvions contester une décision américaine, que nous pouvions avoir gain de cause et que nos relations politiques n'en seraient pas affectées.
     La principale modification en matière de règlement des différends entre le Canada et les États-Unis découle de l'Accord de libre-échange canado-américain, l'ALENA, et de l'OMC. L'ALENA comporte trois processus distincts de règlement des différends. Le chapitre 20 concerne le mécanisme permettant de régler les différends entre le Canada et les États-Unis — on ne l'a utilisé qu'une seule fois; le chapitre 19, dont M. Grenier nous a parlé, porte sur le mode de règlement des différends en matière de droits antidumping et de droits compensateurs, qui a été discrédité par suite du désastre de l'affaire du bois d'oeuvre, si l'on peut dire. Il y a enfin le chapitre 11, qui permet aux investisseurs de présenter des requêtes en justice contre l'un des gouvernements signataires de l'ALENA.
    L'Organisation mondiale du commerce possède un seul processus de règlement des différends. Les désaccords au sujet de l'interprétation des ententes de l'OMC sont présentés à un comité. Ce qui est bien, c'est que les décisions du comité peuvent être soumises à un organe d'appel. Le processus est obligatoire, il comporte des délais fixes et il est généralement considéré comme efficace. Un certain nombre de litiges entre le Canada et les États-Unis ont été traités par l'entremise du processus de règlement des différends de l'OMC.
    Donc, dans le domaine des différends commerciaux, le Canada et les États-Unis ont une assez longue expérience du recours aux processus de règlement. Quant aux autres types de litiges, l'expérience est très limitée. J'ai parlé de l'affaire du golfe du Maine, qui est en fait le seul exemple d'un recours aux mécanismes officiels de règlement des différends dans ce genre de cas.
    Quelles leçons avons-nous tirées de tout ceci? Notamment, nous pouvons dire que nous avons appris que le Canada n'est pas nécessairement désavantagé par ces processus. L'idée que les États-Unis gagneront toujours et que nous perdrons toujours est tout simplement fausse. Dans le cas des différends commerciaux, on constate que les gains et les pertes sont plutôt équilibrés, qu'il s'agisse des différends réglés en vertu du mécanisme de l'OMC ou des processus prévus dans l'ALENA.
    Deuxièmement, l'idée que les États-Unis ne respecteront pas les décisions ne résiste pas à l'analyse, si vous étudiez la gamme des causes réglées par l'OMC et en vertu de l'ALENA. L'affaire du bois d'oeuvre saute aux yeux, mais c'est l'exception plutôt que la règle. Je ne m'attarderai pas à ce dossier.
    En troisième lieu, ce ne sont pas tous les différends qui risquent d'être soumis à l'arbitrage ou traités par un tribunal. Parfois, il existe un meilleur moyen de régler un différend. J'illustrerai mon propos en vous parlant du différend concernant le saumon du Pacifique, dossier auquel j'ai travaillé vers la fin des années 1990. Au milieu des années 1990, le problème du saumon du Pacifique semblait parfaitement insoluble. Nous ne pouvions pas nous entendre sur les allocations des prises. Les esprits se sont échauffés sur la côte du Pacifique. On a empêché un traversier de l'Alaska d'entrer au port de Prince Rupert. À ce moment-là, on soutenait que le différend devait être soumis à l'arbitrage. Les États-Unis n'étaient pas disposés à accepter l'arbitrage et nous ne pouvions pas les y forcer, comme nous aurions pu le faire s'il s'était agi d'un différend commercial ou au moins d'un litige relevant de l'OMC.
    Même si nous avions forcé les États-Unis à accepter l'arbitrage et que nous avions gagné, je ne suis pas persuadé que les Américains se seraient conformés à la décision. Je ne dis pas cela parce que je pense que les États-Unis ne respectent pas leurs obligations internationales, c'est plutôt à cause de la nature du différend. C'était une affaire très complexe impliquant des intérêts divergents relativement à la gestion des pêches aux États-Unis, précisément les intérêts de l'Alaska, de l'État de Washington et des pêcheurs autochtones. C'était des intérêts que le gouvernement fédéral américain n'était pas en mesure de concilier. Par conséquent, il n'aurait pas été à même de respecter la décision résultant d'un arbitrage.
(1555)
    À bien des égards, nous pouvons établir un parallèle entre le différend du saumon du Pacifique et celui du bois d'oeuvre résineux. Les deux parties avaient des interprétations fort différentes des règles applicables et incarnaient des conceptions fondamentalement différentes de l'objectif de règles. Il existait aussi des clientèles puissantes dans chacun des deux pays, et les gouvernements fédéraux devaient en tenir compte. M. Grenier y a fait allusion. Comme nous l'avons vu, le différend du bois d'oeuvre a fini par se régler par un accord. Et ce fut la même chose pour le différend du saumon du Pacifique. Je reviendrai sur quelques enseignements à tirer de cette expérience, mais il faut retenir que ce ne sont pas tous les différends qui doivent être soumis à une tierce partie. Tous ne se prêtent pas à un règlement imposé par une tierce partie.
    Selon moi, il y a trois conditions à prendre en considération, quand on songe aux modalités de règlement des différends. Il faut d'abord établir des règles claires et convenues, des règles qui peuvent s'interpréter au moyen de processus juridiques et ont une certaine légitimité. Le résultat doit avoir une certaine légitimité dans les processus d'interprétation.
    Deuxièmement, il faut être sûr que l'autre partie aura une bonne chance d'appliquer toute décision de la cour ou du tribunal.
    Troisièmement, et je crois qu'il y a un rapport, les deux parties doivent pouvoir assumer les conséquences, au plan intérieur, de l'issue de tout processus de règlement des différends. En d'autres termes, et pour dire les choses simplement, si on se présente devant la cour ou devant un tribunal d'arbitrage, il faut être prêt à perdre.
    Compte tenu de ces faits, on se demande si les processus de règlement doivent être appliqués en dehors du domaine du commerce et, je dirais, celui de l'investissement. On a proposé par le passé des mécanismes de plus grande portée pour le règlement des différends entre le Canada et les États-Unis. Certains différends pourraient se régler de cette façon. Un exemple évident est celui du différend frontalier entre Alaska et Yukon dans la mer de Beaufort. Il existe un ensemble clair de règles sur la délimitation des frontières maritimes. Les tribunaux ont de l'expérience en la matière, et cette formule est applicable. Le Canada et les États-Unis ont également de l'expérience.
    Hormis ce genre de différend, je dirais qu'il faut faire preuve de prudence lorsqu'il s'agit d'adopter des processus d'arbitrage ou de règlement des différends dans d'autres domaines des relations entre le Canada et les États-Unis. Jusqu'à un certain point, les différends commerciaux sont uniques. Les accords commerciaux ont des règles assez précises qui peuvent s'interpréter. Elles ne sont pas toujours précises — c'est l'une des critiques visant les accords de l'OMC —, mais elles peuvent être interprétées. Dans d'autres domaines, la nature du différend tient au fait qu'il n'y a pas toujours de règles claires et qu'il y a souvent désaccord sur les règles qui s'appliquent.
    Que pouvons-nous dire généralement du processus? Dans les différends commerciaux, il nous faut nous demander, dans le contexte canado-américain, si nous voulons recourir à l'OMC ou à l'ALENA. Selon moi, l'OMC a été le meilleur mécanisme. Son mécanisme de règlement des différends est meilleur. Il y a un processus d'appel et un dispositif qui peut jouer en cas de non-observation. Beaucoup de ces éléments manquent dans l'ALENA. Le chapitre 20 de l'ALENA est la solution de rechange, mais il y a des raisons si les parties ne s'en sont pas prévalues.
    En dehors du commerce, au lieu de chercher de nouveaux mécanismes de règlement, nous pourrions peut-être prendre appui sur des mécanismes existants. La Loi du Traité des eaux limitrophes internationales prévoit un dispositif d'arbitrage pour la Commission mixte internationale, mais les parties ne l'ont jamais utilisé. Il est là, et la commission pourrait arbitrer un différend entre le Canada et les États-Unis, mais aucune des parties n'a été disposée à lui soumettre un différend.
    Les Accords additionnels de l'ALENA prévoient des dispositifs que nous pourrions développer. Des plaintes pourraient être portées à l'encontre des parties à l'ALENA parce qu'elles n'appliquent pas leurs propres lois en matière d'environnement. Les gouvernements ont beaucoup répugné à permettre la présentation de plaintes et elles ont limité à la fois la portée des plaintes et celle des dossiers factuels, qui est le résultat du différend. Ce dispositif mérite d'être renforcé.
    Si nous voulons renforcer le mécanisme de règlement des différends, nous devons aussi mettre l'accent sur une leçon du différend du bois d'oeuvre: le critère ultime de tout processus est sa mise en oeuvre. La décision d'une cour ou d'un groupe spécial ne sert pas à grand-chose si l'une des parties a la liberté de n'en tenir aucun compte. Cela a des conséquences pour la façon dont nous assurons la mise en oeuvre. Cela veut dire que les décisions découlant du mécanisme de règlement doivent être exécutoires dans le droit national des deux parties.
(1600)
    Dans l'Union européenne, on parle d'effet direct. Les décisions de la Cour européenne sont automatiquement exécutoires. Si nous évoluons vers un plus grand nombre de mécanismes de règlement des différends, il faut que ces mécanismes soient intégrés aux lois nationales des deux pays. Cela veut dire une intégration plus étroite entre les deux pays. Cela soulève toute une série d'autres questions et de préoccupations au sujet du degré d'adaptation de ce type d'intégration. Mais si nous voulons avoir un mécanisme de règlement, c'est la seule solution, selon moi.
    En réalité, la plupart des différends entre le Canada et les États-Unis seront négociés. Il n'y aura pas de Cour nord-américaine. Je reviens brièvement aux négociations sur le saumon du Pacifique, dans les années 1990, pour voir ce qu'elles nous ont appris. Nous avons appris que l'asymétrie des deux parties ne veut pas nécessairement dire que l'accord sera mauvais. Beaucoup d'accords que le Canada a signés avec les États-Unis ne peuvent pas être considérés comme plus favorables à l'une des parties.
    Deuxièmement, négocier avec les États-Unis, ce n'est pas simplement négocier d'État à État. Le Canada ne peut pas présumer que le gouvernement fédéral américain est le bon interlocuteur dans tous les différends. Dans les années 1970, lorsque nous avons négocié l'Accord sur les ressources halieutiques de la côte est avec des représentants de haut rang et l'appui de la Maison-Blanche, le Congrès a rejeté l'accord.
    Dans le différend sur le saumon du Pacifique, nous avons négocié avec l'État de Washington, avec l'Alaska, avec les pêcheurs tribaux. Au lieu de penser que nous négocions seulement avec les États-Unis, nous devons aller au-delà et tenir compte des intérêts internes.
    Beaucoup de différends entre le Canada et les États-Unis sont ainsi multiples et variés. On ne peut compter simplement que le gouvernement fédéral américain est le bon interlocuteur et qu'il sera en mesure de mettre en oeuvre le résultat des négociations.
    Merci.
    Merci, monsieur McRae.
    Nous allons passer rapidement à MM. Patry et Pearson, qui partagent leur temps de parole.
    Nous n'aurons probablement qu'un cycle de questions. M. Grenier doit prendre l'avion à 17 h 30. Nous allons faire le plus vite possible. Et il n'y aura probablement qu'un tour.
    Monsieur Patry.
    Merci à tous les invités de cet après-midi. C'est toujours très intéressant.
    Monsieur Clarkson — je m'adresse aux trois témoins —, vous avez dit, à propos de l'ALENA, que nous devons en accepter le contenu actuel, même s'il laisse à désirer, et essayer de l'améliorer.

[Français]

    Monsieur Grenier, vous nous avez dit que le président Obama suscitait beaucoup d'espoir. Vous nous avez parlé de son discours du 27 février dernier. Vous avez aussi dit que le Canada devait obtenir l'attention du président Obama, mais ne pas se présenter avec une liste d'épicerie.
    Ma question est très simple. Comment peut-on s'insérer dans l'agenda du président Obama? Doit-on le faire d'une façon continentale ou internationale, tout en n'oubliant pas d'inclure dans les négociations les problèmes que l'on a en ce qui concerne l'Arctique ou encore l'Afghanistan, de même que les questions de sécurité?

[Traduction]

    Merci, monsieur Patry.

[Français]

    Je pense que cela dépend de la question négociée précisément. Étant donné que le Canada a peu de poids politique à Washington, je pense que sa participation aux questions internationales sera très importante, en vue de cultiver chez M. Obama une attitude qui lui ferait considérer avec sérieux ce qu'Ottawa a à dire.
    J'ai de la difficulté à répondre parce que votre question est très générale. Pourriez-vous la préciser un peu, monsieur.
(1605)
    Monsieur Grenier.

[Traduction]

    Très rapidement. Nous avons cinq minutes pour les questions et les réponses.

[Français]

    J'ai probablement la même difficulté que M. Clarkson à répondre à cette question. Cependant, je pense qu'il est clair que M. Obama, lui, n'a pas d'expérience précise en politique commerciale. En fait, il voit les choses de façon très globale. Je crois que c'est comme cela que nous devons les voir, nous aussi. Je pense qu'il n'a pas non plus une approche très idéologique par rapport à celle de certains de ses prédécesseurs, immédiats notamment.
    Il a une approche pratique, pragmatique, surtout que les théories sur lesquelles on se reposait sur le plan économique ont pris du plomb dans l'aile récemment.
    Il faudra qu'on décèle nos propres priorités — elles demeurent très générales — et qu'on essaie de voir dans quels domaines ou secteurs le Canada peut apporter sa contribution. J'en ai mentionné deux ou trois, tout à l'heure. En ce qui touche les questions environnementales, par exemple, je ne pense pas qu'on ait vraiment à rougir de nos politiques environnementales, à une ou deux exceptions près, par rapport aux politiques américaines ou mexicaines. Il est certain que sur le plan de la régulation financière, on a un certain avantage; c'est maintenant reconnu mondialement. Pour ce qui est de l'équité entre les classes sociales, c'est tout de même un peu mieux ici que ça ne l'est aux États-Unis, où la situation s'est beaucoup détériorée ces dernières années.
    Il y a des dossiers auxquels on pourra probablement contribuer, mais j'ai l'impression que cela débordera très largement des questions commerciales. Vous avez mentionné l'Afghanistan. J'ai l'impression que ce sujet va être mis très rapidement sur le tapis.

[Traduction]

    Merci, monsieur Grenier.
    Très rapidement, monsieur Pearson. Laissez-lui le temps de répondre.
    Une question et une précision. Vous avez dit que le Canada avait tendance à laisser tomber la dimension mexicaine et à se concentrer davantage sur les relations canado-américaines. Étant donné que le gouvernement actuel essaie de mettre l'accent sur les Amériques, n'est-il pas contradictoire de laisser tomber le Mexique pour nous concentrer sur les Amériques?
    Deuxièmement, de quelle manière M. Obama envisage-t-il le Mexique et l'avenir de l'ALENA?
    À propos de la première question, je crois que le gouvernement a parlé de réorienter son aide pour favoriser moins l'Afrique et davantage les Amériques. Je travaille tous les hivers au Mexique parce que je ne peux pas étudier les relations canado-américaines sans connaître les relations du Mexique avec nous et avec les États-Unis. Il n'y a pas beaucoup d'éléments qui permettent d'affirmer que le gouvernement canadien fait plus d'efforts et injecte plus d'argent dans ses relations avec les États-Unis. Par exemple, nous n'avons que 17 bourses pour permettre à des étudiants mexicains de faire des travaux de cycle supérieur au Canada.
    Quant à M. Obama, dans sa campagne d'investiture et sa campagne présidentielle, je ne crois pas qu'il ait beaucoup parlé du Mexique. Sous l'administration Bush, il a voté en faveur de la construction du mur. Il a été conciliant avec la National Rifle Association pendant la campagne électorale.
    Cela donne à penser que, au moins dans son premier mandat, il ne s'attaquera pas à la cause profonde du problème de la drogue, soit la demande du consommateur, qui permet aux cartels de réaliser des profits énormes et de tuer des milliers de personnes au Mexique. Il ne s'est pas montré très disposé non plus à risquer son capital politique dans le dossier de l'immigration.
    Néanmoins, il est conscient du problème mexicain, à l'évidence, mais vu ses autres priorités, qui sont urgentes en économie et sur le plan financier international, je ne serais pas porté à penser qu'il consacrera du capital politique au dossier du Mexique.
    Merci, monsieur Clarkson.
     Nous passons à M. Crête.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je partagerai le temps qui m'est alloué avec Mme Deschamps.
    Je demanderais à chacun d'entre vous de suggérer une action à laquelle il faut donner priorité. Tout le monde au Canada est d'accord sur l'importance de notre relation avec les États-Unis. Y a-t-il une action que vous aimeriez voir amplifiée ou mise de l'avant? J'apprécierais une réponse brève de la part de chacun des trois participants.
    Il faudrait changer la perception du terrorisme, parce que la paranoïa américaine est le facteur principal qui fait que toute la vision d'une Amérique du Nord intégrée tombe à plat. C'est cette paranoïa tellement irréelle qui conduit les Américains à fermer leurs frontières autant que possible. C'est aussi la priorité mexicaine.
(1610)
     Monsieur Grenier.
    Je dirais que la priorité se situe ici même, à Ottawa. Je crois que lorsqu'on s'est engagé, par exemple, dans un système de règlement des différends — et là je diffère d'opinion avec M. McRae —, il faut s'y fier. Il faut être prêt, justement, comme il le dit, à perdre si on perd et à appliquer les sanctions. Évidemment, le partenaire doit faire la même chose. Étant donné l'asymétrie des rapports entre le Canada et les États-Unis, qui ne va pas s'évanouir bientôt, il ne faut vraiment pas constamment revenir à la diplomatie. On n'a pas le poids pour faire cela. Il faut donc se fier au système et le faire fonctionner correctement.
    L'asymétrie, ce sont nos 30 millions de citoyens versus les 300 millions aux États-Unis. C'est 10 p. 100 du poids économique.
    M. Carl Grenier: Voilà.
    M. Paul Crête: Monsieur McRae.

[Traduction]

    Je voudrais passer à un sujet un peu différent, mais qui me préoccupe également, l'Arctique. Sauf erreur, vous tiendrez des audiences à ce sujet un peu plus tard. Je dirais qu'il faut arrêter d'avoir une attitude aussi défensive à l'égard de la position des États-Unis sur l'Arctique et aller de l'avant, simplement, en faisant comme si l'archipel et le passage du Nord-Ouest étaient canadiens et gouvernés par le Canada, sans se préoccuper de ce que disent les États-Unis.
    Merci.
    Madame Deschamps.

[Français]

    Peut-être de manière plus globale, comme M. Grenier l'a mentionné, vous avez dit, monsieur Clarkson, que le Canada a perdu beaucoup sur le plan militaire, sur le plan économique et sur le plan politique. Il y a probablement aussi la montée des marchés, en lien avec la montée des marchés émergents. Il y a eu aussi plusieurs changements, avec la venue d'une nouvelle administration américaine.
    Compte tenu de tous ces éléments et devant le constat de ces pertes, le Canada ne devrait-il pas revoir sa propre politique en matière d'affaires étrangères? Devrait-elle être actualisée en tenant compte, justement, de ces changements importants auxquels le Canada est confronté présentement?
    Quelle est votre question, précisément?
    La politique en matière d'affaires étrangères du Canada devrait être revue, réactualisée, mise à niveau, car je dirais qu'elle est un peu déficiente, compte tenu de tous les nouveaux événements survenus sur la scène internationale, entre autres l'arrivée de l'administration Obama. Avant d'être missionnaires à l'extérieur, il faudrait peut-être revoir notre politique à l'intérieur.
    Madame, je pense que le gouvernement est en train de revoir sa politique internationale principale, c'est-à-dire la guerre en Afghanistan. En même temps, il est évident que M. Obama, bien qu'il envoie plus de soldats dans ce pays, est en train de revoir sa politique, lui aussi, s'il commence à négocier avec certaines factions des talibans. La chose la plus importante que fait Ottawa est probablement de revoir cette politique. Maintenant, le premier ministre admet qu'on ne peut pas gagner.
    Vous avez aussi mentionné le paradigme du terrorisme. Dans le contexte actuel, le Canada et le Mexique augmentent-ils la puissance des Américains ou la diminuent-ils? Contribuent-ils à cette force américaine?
    Je vous répondrai de façon générale. Le Canada et le Mexique sont les deux pays les plus importants sur le plan de la construction de l'économie américaine, en raison de nos marchés, de nos ressources, de notre pétrole et de notre main-d'oeuvre. Le Canada et le Mexique sont très importants pour les États-Unis, même si ces derniers ne reconnaissent pas cette réalité. Je dis cela parce que le Canada et le Mexique peuvent négocier avec moins de crainte et plus de confiance avec Washington. Maintenant, Washington reconnaît aussi que sa sécurité dépend du Canada et du Mexique. Il y a deux ans, M. Bush a signé un accord avec le Mexique, le Plan Mérida, afin de fournir une aide très importante aux forces mexicaines pour contrer les cartels de narcotrafiquants. Maintenant, Washington reconnaît sa dépendance envers ses voisins, et cela donne à Ottawa et à Mexico plus de poids lors des négociations.
(1615)

[Traduction]

    Merci, monsieur Clarkson.
    Nous allons passer à M. Goldring.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de comparaître aujourd'hui. Je vais partager mon temps de parole avec Mme Brown et, s'il reste quelques minutes, M. Lunney.
    Je vais faire une observation, suivie d'une question, et peut-être pourrez-vous répondre une fois que nous aurons terminé nos questions, de façon que nous puissions en caser un peu plus.
    Vous avez parlé du commerce avec les États-Unis et du recul, peut-être, de l'engagement au Mexique. Il y a la récession et la question de la sécurité, une frontière plus opaque entre le Canada et les États-Unis et la possibilité, qui n'existe plus, de transporter directement des marchandises par train jusqu'au Mexique. La situation devient de plus en plus difficile. C'était plus facile lorsque nous pouvions expédier des marchandises vers les Antilles par les États-Unis et la Floride.
    Ne devrions-nous pas plutôt multiplier nos possibilités en expédiant davantage à partir de nos ports du Pacifique et de l'Atlantique, le long des côtes américaines, pour faciliter l'accès? Ensuite, nous serions prêts à aller vers les Antilles, la Jamaïque, Trinité-et-Tobago et d'autres pays. Nous pourrions aussi descendre jusqu'à San Diego, aux États-Unis, d'où nous pourrions expédier directement au Mexique. Est-ce que ce ne serait pas une occasion à saisir?
    S'il s'agit d'une approche à paliers multiples du commerce et de l'expansion de notre présence auprès des États-Unis et via leur territoire, la chose est-elle compliquée par l'ALENA ou d'autres de nos accords?
    Je cède la parole à Lois.
    Posez vos questions, et les témoins pourront répondre ensuite.
    Monsieur Clarkson, vous avez parlé de choses qui ont changé et dit plus précisément que nous avions perdu une certaine importance relative sur certains plans: militairement, à cause de NORAD et économiquement, parce que notre pays est plus petit. Ce que j'ai trouvé le plus curieux, est que nous avons perdu de l'importance au point de vue politique parce que nous ne faisons pas beaucoup de bruit.
    Depuis un certain nombre d'années, nos relations avec les États-Unis ne sont pas au mieux. Depuis trois ans, je dirais, nous essayons d'améliorer ces relations. Peut-être pourriez-vous revenir sur cette affirmation selon laquelle nous ne faisons pas de bruit. Pensez-vous que nous entrons dans une nouvelle ère parce que nous rebâtissons nos relations avec les États-Unis et essayons d'établir des relations de coopération?
    Je crois que M. Lunney a une question à poser également.
    Le temps de parole est déjà presque terminé.
    Monsieur Clarkson.
    Monsieur Goldring, la réponse est oui. Le transport maritime est évidemment très efficace, et il est important de le développer.
    Pour ce qui est de faire du bruit, je voudrais parler d'un membre très important du parti du député, Mike Harris. Lorsque les gouverneurs des États des Grands Lacs et le gouvernement fédéral américain ont fait entre eux une entente sur la dérivation d'eau des Grands Lacs, ce fut la consternation en Ontario. Mike Harris a donné son approbation à une entreprise pour qu'elle exporte un volume énorme d'eau du lac Supérieur. À Washington, la consternation a été telle que les autorités ont voulu renégocier avec l'Ontario et le Québec un accord bien meilleur sur les conditions de dérivation de l'eau.
    Ce que je veux dire, c'est que, lorsque les Américains ont vu que nous pouvions leur causer du tort — et je ne préconise pas que nous cherchions de nouveaux moyens de leur faire du tort —, ils ont fait attention. L'un de nos problèmes, c'est que nous sommes tellement gentils, comparés au Mexique, à la Chine et à la Corée du Nord, qu'ils n'ont pas à se préoccuper de nous. Voilà le dilemme. Nous sommes de très bons scouts. Nous ne voulons pas ne pas l'être, mais cela veut dire qu'ils ne se soucient pas vraiment de nous.
    Je ne suis pas sûr que les questions aient été adressées uniquement à M. Clarkson.
    Messieurs Grenier et McRae, avez-vous quelque chose à dire?
    Oui.
    À propos de l'intervention de M. Goldring, je signale que seulement deux pays ont des frontières terrestres avec les États-Unis, et c'est un énorme avantage, puisque nous pouvons expédier nos marchandises par camion. Aucun autre pays n'a cet avantage. Si nous utilisons les liaisons maritimes, par exemple à partir de la côte ouest, cela nous met en concurrence directe avec toute l'Asie. Aux dernières nouvelles, nos ports maritimes de la côte ouest étaient très congestionnés, problème que nous essayons maintenant de régler. Les distances sont considérables. Le centre manufacturier du Canada est toujours situé en Ontario et au Québec. Je me demande si la proposition de M. Goldring est une aussi bonne idée.
(1620)
    J'ai une nuance à apporter à propos de la façon d'attirer l'attention en n'étant pas trop gentil. Cela n'a pas marché dans le cas du différend du saumon du Pacifique, sur la côte ouest. Nous avons pratiqué la surpêche pour punir les Américains et, ce faisant, nous avons fait du tort à nos propres pêches. Il faut être très prudent, quand on emploie ces tactiques. Parfois, cela peut marcher, et parfois pas du tout.
    Pour en revenir à ce que M. Grenier a dit, j'estime que le choix entre le camion et le bateau est une question d'économie. Mais j'en conviens avec M. Clarkson, nous ne pouvons pas simplement établir des relations avec les États-Unis sans tenir compte du Mexique. Nous ne pouvons pas revenir à l'époque antérieure à l'ALENA. Nous devons donc emprunter les deux voies, avec le Mexique et les États-Unis, pour maximiser les possibilités offertes par l'ALENA.
    Merci, monsieur McRae.
    Nous allons passer à M. Dewar.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins d'être là et d'avoir pris le temps de faire des exposés.
    D'abord vous, monsieur Clarkson. En vous écoutant, je hochais de la tête, surtout lorsque vous avez parlé de la guerre contre le terrorisme et de la nécessité de la repenser. Heureusement, c'est déjà amorcé à Washington. Certaines des mesures que nous avons prises rappellent la ligne Maginot. Nous avons dépensé des milliards de dollars, et cela n'a pas nécessairement eu le maximum d'effet. D'autres diront que cela a garanti notre sécurité. Je n'en suis pas sûr. Le verdict n'a pas encore été rendu. Si nous voulons remettre cela en question, modifier le paradigme, il nous faut une victoire.
    Il y a eu des problèmes à l'ALENA, comme vous l'avez dit. M. McRae ne sera peut-être pas tout à fait d'accord: « Nous l'avons, servons-nous-en. » Mais si nous cherchons une victoire, au moins sur le plan bilatéral — je parlerai peut-être du Mexique dans une minute —, nous en avons eu par le passé. La victoire décisive la plus récente a été celle des pluies acides. Le gouvernement était militant. C'était un gouvernement conservateur. Si nous considérons ce modèle, n'est-il pas de notre devoir de nous engager vraiment en ce qui concerne l'environnement? Le modèle qui nous est proposé est celui du plafonnement des émissions et de l'échange des droits d'émission. Si ce n'est pas ce dossier qu'il faut choisir, alors lequel dossier, à votre avis?
    Pour ma part, je suis d'accord pour dire qu'il serait très bien que le Canada ait une position progressiste au sujet de l'environnement, ou au moins aussi progressiste que celle de M. Obama, mais les gouvernements libéral et conservateur ont eu une position complètement... C'est-à-dire pas les conservateurs; le gouvernement libéral avait une position complètement fourbe au sujet de Kyoto. Le gouvernement conservateur a été beaucoup plus ouvert. Il reste que, à l'égard de cet enjeu international majeur, nous sommes très rétrogrades.
    Au Canada, nous ne pouvons pas envisager de remporter une victoire sur les États-Unis dans ce dossier. Nous devrions changer de position et devenir de meilleurs environnementalistes avant que M. Obama ne nous accorde beaucoup d'attention. Pour le moment, le gros problème, c'est l'énorme catastrophe environnementale qu'est l'exploitation des sables bitumineux. Il y a une terrible contradiction. Les Américains veulent notre pétrole, mais ils se trouvent à faire faire de la pollution chez nous, en fait. Comment aborder ce problème à court terme, alors que les technologies ne peuvent résoudre le problème, c'est pour moi un mystère.
    Comment avoir une position gagnante avec M. Obama? Ce n'est pas clair à mes yeux. Il a été proposé que nous adoptions une approche générale favorable à ses efforts dans les instances internationales. Je crois que cela permettrait probablement d'établir une nouvelle coopération avec les États-Unis dans les dossiers où ils ont une bonne politique, par exemple en matière d'environnement. Mais il faut pour cela modifier notre propre position.
    Je ne suis pas en désaccord.
    Monsieur McRae, et monsieur Grenier aussi peut-être, nous avons accueilli récemment mon bon ami Tom d'Aquino. Nous avons discuté du Partenariat pour la sécurité et la prospérité. J'ai été étonné de l'entendre dire que le PSP était à peu près mort. D'autres témoins se sont également prononcés. Vous avez parlé des accords additionnels sur l'environnement et la main-d'oeuvre et de l'ALENA. M. Obama a dit, lorsqu'il est venu au Canada — son ton était fort différent de celui qu'il avait pendant la campagne —, qu'il souhaitait l'intégration de ces accords. Certains ont dit que ce serait un énorme progrès que ces accords additionnels soient intégrés à l'accord officiel.
    Qu'en pensez-vous? Le premier point, c'est le fait que le PSP soit chose du passé — ce qui est heureux pour certains d'entre vous, car personne ne savait vraiment de quoi il s'agissait — et le deuxième est l'intégration des accords additionnels à l'ALENA.
(1625)
    J'ai peu de choses à dire du PSP. Ceux qui annoncent sa mort ont probablement raison.
    Quant à l'intégration des accords additionnels à l'ALENA, je crois que ce peut être très attrayant pour les États-Unis. Comme candidat, Obama a parlé de façon plutôt franche des modifications à apporter à l'ALENA. Ces modifications sont peu probables, mais l'intégration des accords additionnels à l'ALENA aurait l'apparence d'un changement à l'ALENA. Il ne faut pas oublier que nous avons obtenu les accords additionnels parce que le président Clinton voulait un peu de maquillage pour justifier son opposition à l'ALENA, qu'il acceptait ensuite. L'histoire se répéterait, jusqu'à un certain point.
    Il faut se demander si quelque chose de valable en sortirait. Que donnerait cette intégration? Conserverions-nous les mêmes dispositions, de sorte qu'il pourrait y avoir des plaintes et que les gouvernements en restreindraient la portée, si bien qu'il n'arriverait pas grand-chose? Ou y aurait-il quelque chose de plus substantiel à l'égard des questions de la main-d'oeuvre et de l'environnement, qui ne sont pas prises au sérieux dans l'ALENA? C'est un grand défi, mais je crois qu'il en vaut la peine.
    Merci, monsieur McRae.
    Monsieur Grenier.
    Comme M. McRae vient de le dire, la question de l'intégration des accords additionnels à l'ALENA remonte à M. Clinton. Je ne crois pas que le Canada ait quoi que ce soit à redouter. De toute évidence, comme M. Clarkson vient de le signaler, il nous faudrait améliorer notre politique environnementale, mais nous avons eu par le passé des politiques qui auraient très bien fait l'affaire.
    Cela veut dire aussi, bien entendu, qu'il y aurait des sanctions commerciales si les dispositions sur l'environnement ou les droits des travailleurs étaient violés. Cela ne s'est jamais fait nulle part. Ce serait tout à fait nouveau. Même dans le contexte de l'OMC, cela ne se fait pas.
    Nous voudrons peut-être y réfléchir très sérieusement, mais au fond, ces initiatives visent le Mexique, pas nous.
    Monsieur le président, puis-je ajouter un mot au sujet du PSP?
    Très rapidement.
    L'un des résultats constructifs du PSP est le sommet annuel des trois chefs de gouvernement. Le PSP a été conclu à Cancun, en mars 2006. En 2001, lorsque les États-Unis ont bloqué leur frontière et, dans les faits, violé l'ALENA, et il n'y avait pas de sommet des trois chefs de gouvernement, mais aujourd'hui, le président du Mexique et le premier ministre du Canada se rencontrent personnellement, à la même table, avec le président américain. C'est très précieux pour nos deux gouvernements.
    Soit dit en passant, cela étaye ma thèse voulant que nous ayons accès à Washington en participant avec le Mexique. Je conseille vraiment au comité de s'accrocher à cela et de recommander le maintien de cette institution.
    Merci beaucoup. Nous vous remercions tous non seulement de vos exposés, mais aussi de vos réponses aux questions. Nous avons hâte de vous entendre de nouveau.
    La séance est suspendue pendant quelques instants pour que les nouveaux témoins prennent place.
(1630)
    Pendant la deuxième heure, nous accueillons comme témoin, de l'Association canadienne des anciens parlementaires, l'ancien premier ministre du Canada et ancien ministre des Affaires étrangères, le très honorable Joe Clark.
    Bienvenue. C'est toujours un plaisir de vous accueillir.
    Nous entendrons également André LeBlanc, directeur général du Bureau canadien en Caroline du Sud.
    Certains ont dit qu'il était regrettable que, parfois, nous ayons trois témoins et que, d'autres fois, nous ne puissions avoir un témoin qui comparaît seul. Nous essayons de dégager des dates et d'accueillir les témoins que nous pouvons. Je dois vous dire à tous deux que nous avions très hâte que vous comparaissiez. Merci d'avoir, dans certains cas, modifié votre programme pour pouvoir comparaître. Le comité vous remercie et a hâte de vous entendre.
    Ce sera d'abord le très honorable Joe Clark.

[Français]

    C'est avec plaisir que je comparais devant ce comité parlementaire. Je m'y sens un peu chez moi.
    Je crois que c'est le moment propice pour revoir le rôle important et large que joue le Canada à l'échelle internationale.
    Je voudrais présenter neuf observations brèves. J'ai fait circuler des graphiques, et j'espère qu'ils ne seront pas distribués de façon à distraire l'auditoire des propos très sérieux que je vais tenir. Mais, de toute façon, il faudrait les distribuer.
    D'abord, le Canada jouit d'une réputation solide et enviable dans le monde. Il s'agit d'un actif national comparable à nos richesses en ressources et qui peut être investi pour notre plus grand avantage mutuel.
    Deuxièmement, au moment où les clivages religieux, culturels et économiques s'accentuent dans le monde, les compétences les plus importantes en ce moment et dans l'avenir prévisible, ce sont celles qui permettent de transcender les différences, de créer des alliances et de trouver des terrains communs, de gérer la diversité et de susciter la confiance. Ce sont là les qualités traditionnelles et authentiques du Canada dans les affaires internationales
    Troisièmement, utiliser cet atout est dans notre intérêt national. L'un des graphiques qui sont distribués ou le seront illustre une projection de Goldman Sachs — ce ne sont pas des conseils sur l'économie, mais des prévisions  — sur la situation économique dans le monde de divers pays d'ici 2050. Le Canada sera alors une économie respectable: un peu plus petit que le Vietnam et un peu plus grand que les Philippines.
    Dans ces circonstances, pendant combien de temps le Canada pourra-t-il conserver sa place au sommet du G-8? Serions-nous même assez importants pour participer au sommet du G-20? Autrement dit, pourrions-nous garder notre place au sein du groupe restreint de pays qui définissent la politique sur le commerce international et la politique militaire et diplomatique? Pas si nous mettons l'accent de façon étroite sur la politique commerciale et économique ou définissons notre profil international par la seule présence militaire. Mais il y a des chances pour que nous restions un pays influent si nous renouvelons notre position comme pays de confiance sur les plans du militantisme, de la diplomatie et du développement.
    Quatrièmement, le Canada a été particulièrement efficace au plan international — et je le dis parce que j'ai été secrétaire d'État à une époque où, simultanément, nous avons dit non à l'initiative de défense stratégique du président Reagan et persuadé les Américains de conclure un accord de libre-échange et un traité sur les pluies acides — lorsqu'il a poursuivi simultanément deux priorités. Nous avons cultivé avec soin notre amitié avec les États-Unis, et nous nous sommes efforcés d'affirmer notre rôle indépendant et innovateur dans l'ensemble du monde. Monsieur, ce ne sont pas là des positions contradictoires. Ce sont les deux faces d'une même pièce.
    Le fait que nous ayons nos entrées à Washington ajoute à l'influence que nous acquérons dans d'autres pays, car nous sommes perçus comme capables d'influencer notre puissant voisin.
(1635)
    Dans le même ordre d'idées, notre solide réputation dans les pays en développement ainsi que notre rôle actif au sein de la communauté multilatérale représentent des atouts non négligeables pour le Canada. Les États-unis ne peuvent en dire autant.
    En effet, depuis au moins 60 ans, le Canada a établi des partenariats et s'est mérité la confiance ainsi que le respect de régions où les États-unis suscitent parfois l'envie ou la peur. Cette capacité du Canada est certainement comprise par l'administration du président Obama.
    Cinquièmement, le pouvoir dans le monde est en train de changer. Le nouveau monde qui prend forme offre un double avantage au Canada. Nous sommes une économie et une société industrialisées et novatrices. Nous sommes un pays indépendant et respecté, souvent un pont entre les pays industrialisés et les pays en développement.

[Traduction]

    Comme Fareed Zakaria prend soin de le signaler dans son ouvrage, The Post-American World, le déplacement du pouvoir ne s'explique pas par le déclin de qui que ce soit, mais plutôt par la montée et l'affirmation de forces nouvelles. Le Canada est plus à même que la majeure partie du monde industrialisé de bâtir et d'étendre des relations avec les cultures et les sociétés dont l'influence grandit dans le monde. Beaucoup de ces cultures sont des éléments dynamiques de l'identité canadienne et ce que nous avons fait par le passé nous a mérité le respect du monde en développement.
    Sixièmement, le Canada peut avoir, relativement, plus d'influence en politique et en diplomatie que sur les plans commercial et économique. La puissance économique dépend de la taille. La diplomatie dépend davantage de l'imagination, de la souplesse et de la réputation. Les forces politiques et diplomatiques du Canada resteront plus d'actualité si nous décidons de nous en servir, mais nous les laissons se dégrader alors que nous devrions les renforcer.
    Septièmement, et là encore, l'un des graphiques distribués concerne ces chiffres, il y a trois entités fédérales qui ont une vocation internationale explicite. Ils sont classés ici d'après les rapports gouvernementaux publiés sur les dépenses de 2008-2009. La Défense nationale accapare 8,29 p. 100 des dépenses fédérales de programme; le budget de l'ACDI représente 1,39 p. 100 et celui des Affaires étrangères et du Commerce international 1 p. 100. Par rapport à 2007-2008, le budget du ministère de la Défense nationale a augmenté de près de 8,4 p. 100 et celui de l'ACDI de 0,68 p. 100, alors que celui du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a diminué de 17,96 p. 100. Le MAECI estime que cette diminution va se poursuivre pendant au moins les deux prochaines années et que, d'ici 2010-2011, son budget fléchira encore de 13,38 p. 100. En chiffres absolus, il s'agit d'une perte de 700 millions de dollars en trois ans, sur un budget qui s'élève maintenant à environ 2,4 milliards de dollars.
    Huitièmement, et c'est à l'honneur du gouvernement Harper, le Canada a accru ses dépenses au titre de la défense pour réparer le tort causé à l'époque où nous avons laissé d'autres pays se charger d'une part croissante du fardeau de notre défense. Pourtant, nos ressources diplomatiques et notre capacité en développement diminuent aussi régulièrement et sûrement que nos ressources en défense l'ont fait par le passé. Pourquoi deux poids, deux mesures? Pourquoi sommes-nous plus disposés à accepter notre part du fardeau militaire que notre part du travail diplomatique et du développement?
    Je voudrais aborder un certain nombre de questions, mais peut-être le ferons-nous pendant les questions.
    Enfin, je veux faire ressortir un point au sujet de ce que les ministères des Affaires étrangères modernes peuvent faire, car je suis peut-être plus conscient que d'autres des différences entre l'époque où j'ai eu l'honneur d'être ministre des Affaires étrangères et aujourd'hui. Le monde a changé profondément, ce qui a eu un effet sur ce que les pays peuvent faire. Un changement saisissant a été l'accroissement du rôle et du pouvoir des ONG et des militants — particuliers ou organisations — depuis l'International Crisis Group, qui donne des séances d'information qui sont peut-être les meilleures qu'on puisse trouver sur les affaires internationales, et la Fondation Gates, jusqu'au mouvement écologiste.
    Très souvent, ces nouveaux protagonistes sont plus agiles et ont moins de contraintes que les gouvernements ou les grandes institutions comme l'ONU, mais, s'ils font un travail complémentaire de celui des gouvernements et des institutions internationales, ils ne les remplacent pas. C'est encore un monde d'institutions. Les États souverains prennent toujours des décisions d'une importance cruciale: réduction ou augmentation des budgets, respect ou dénonciation des traités, envoi ou retrait de troupes, versement de leurs contributions aux institutions, intervention ou non dans les crises.
    Actuellement, pour un pays comme le Canada, le défi et la chance, c'est d'allier mandat et imagination, de conjuguer la créativité de ces forces indépendantes et la capacité d'agir des institutions. Dans l'expérience canadienne, c'est ce qu'on a observé dans la lutte contre l'apartheid, la signature du Traité sur les mines antipersonnel, le processus de Kimberley visant à mettre un terme au trafic des diamants de la guerre, et une longue série d'autres initiatives moins connues.
(1640)
    Cela pourrait devenir une pratique canadienne si le développement et la diplomatie redevenaient prioritaires.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Clark.
    Nous allons passer à M. LeBlanc
    D'abord, je remercie le comité de l'honneur qu'il m'a fait en m'invitant à prendre la parole cet après-midi. Et je suis d'autant plus honoré que je comparais en compagnie de M. Clark.

[Français]

    La Caroline du Sud entretient depuis longtemps d'importantes liaisons à la fois économiques et culturelles avec le Canada. En 2007, nous avons reçu au-delà de 850 000 visiteurs canadiens. La plupart d'entre eux, environ 80 p. 100, ont passé leurs vacances sur nos plages. Les autres sont des visites d'affaires.
    Selon l'ambassade du Canada à Washington, le commerce entre la Caroline du Sud et le Canada soutient environ 85 000 emplois dans notre État. Même si nous avons de la difficulté à réconcilier ce niveau d'emploi, je peux vous assurer que nous en sommes reconnaissants et que les relations entre le Canada et notre État sont de la première importance.

[Traduction]

    Je dois souligner que je représente la Caroline du Sud et non un pays. Nous sommes un bureau de commerce et d'investissement. Je pourrais peut-être vous présenter, pour contribuer à vos délibérations, notre conception de la façon de développer les relations commerciales et les occasions de développement économique ou d'investissement.
    La Caroline du Sud est un très petit État d'environ quatre millions d'habitants. Sa superficie est un peu plus grande que celle du Nouveau-Brunswick. Elle est peut-être égale lorsque la marée est basse dans la baie de Fundy. Sinon, la superficie des deux régions est à peu près semblable. Par le passé, l'économie était fondée sur l'agriculture et les textiles. Certains d'entre vous sont peut-être au courant, mais depuis 20 ans, nous redéveloppons l'État. Nous déployons maintenant des efforts très ciblés, et très fructueux du reste, visant le développement économique et la croissance des secteurs de la fabrication, de la logistique, de la distribution et du tourisme. Le ralentissement économique a un impact majeur. Il s'agit d'un État manufacturier, mais il est très conservateur sur le plan budgétaire. Voilà pourquoi nous croyons que nous serons parmi les premiers à ressentir la relance.
    Je suis conscient que le temps est limité. Au lieu de débiter une foule de statistiques sur le commerce, que vous connaissez probablement tous, je vais conclure par ceci: que l'État soit une destination touristique ou un lieu favorable aux affaires pour l'industrie canadienne qui veut établir et élargir ses marchés aux États-Unis, nous avons derrière nous une longue et belle histoire d'accueil des Canadiens, et nous comprenons qu'il est essentiel de nous appuyer sur cette relation très importante.
    Merci.
(1645)

[Français]

    Encore une fois, je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.

[Traduction]

    Merci, monsieur LeBlanc.
    Nous allons amorcer le premier cycle de questions.
    Monsieur Pearson.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être là. Vous nous honorez.
    Monsieur Clark, c'est fascinant. Je me déplace passablement au Canada pour prendre la parole dans des universités. Je perçois chez les Canadiens un vif désir de redorer l'image de leur pays à l'étranger. Et cela, au moment même où, d'après ce que vous dites, nous perdons nos repères depuis quelque temps.
    Ma question sera brève, mais un peu compliquée. Le monde change, et l'ordre mondial aussi, je le sais. Si le Canada commençait à investir de nouveau dans le service diplomatique à l'étranger, en faisant du développement par l'intermédiaire de l'ACDI, etc... Mais nous ne voulons pas injecter de l'argent de ce côté. Quelle serait la meilleure façon d'utiliser nos ressources, si nous les augmentions, pour profiter de la volonté des Canadiens d'être présents sur le terrain? Je ne pense même pas que les Canadiens attendent quoi que ce soit du gouvernement; ils trouvent leurs propres instances pour agir.
    Étant donné que l'ordre mondial change, le Canada risque de perdre de l'importance parce que d'autres pays deviennent plus importants. Quelle est la meilleure façon d'exploiter nos ressources si nous voulons avoir de nouveau une présence qui compte, aux plans de la diplomatie et du développement?
    Merci.
    Il y a un risque, celui que les jeunes n'attendent rien des gouvernements. Je comprends et encourage leur intérêt pour les ONG et ce qu'ils peuvent faire eux-mêmes. C'est un élément bien plus important que dans les générations antérieures. Voilà pourquoi j'insiste sur le fait que les décisions prises dans un monde d'institutions sont prises par les gouvernements. Nous devons trouver le moyen de conjuguer les deux mouvements.
    Une des choses regrettables que j'ai à dire sur le Canada, c'est que, si on tenait un référendum sur la politique étrangère — je ne recommande pas la tenue de référendums, mais s'il y en avait un —, il n'y aurait pas un appui très solide pour les initiatives internationales. Notre bilan éclatant sur le plan international a toujours été le fait de dirigeants. Le mouvement a été multipartite, et il existe à la base un vif intérêt pour ces questions, mais ce n'est pas une chose qui vient de la base. Il faut des dirigeants qui donnent le ton.
    Troisièmement, les anciennes modalités du travail de l'ACDI et des Affaires étrangères de l'époque où j'étais ministre ont changé. Il faut notamment susciter la confiance envers les fonctionnaires et d'autres agents, envers ceux qui travaillent avec les ministères, pour qu'ils abordent les changements dans une optique créative.
    Ce qui m'inquiète le plus maintenant, lorsque je discute avec ceux qui travaillent dans nos services diplomatiques et de développement, c'est qu'ils sont abattus, qu'ils sont peu disposés à parler avec confiance de missions qui, il n'y a pas très longtemps, leur inspiraient la confiance. C'est un problème institutionnel, et je crois que le comité peut aider à le résoudre.
    Il faut d'abord reconnaître qu'il existe un vaste monde où des personnes peuvent mener une action déterminante. Mais, au bout du compte, il faut consolider nos institutions. Celles-ci doivent se réexaminer dans un contexte moderne et contemporain. Certains des meilleurs architectes du changement seront ceux qui ont travaillé dans ces institutions, mais qui sont maintenant paralysés par l'impression que leur contribution n'est pas respectée. Eux et d'autres pourraient selon moi beaucoup contribuer au changement.
    Autre chose: que nous le méritions ou non, nous avons toujours une excellente réputation dans le monde. Elle ne restera pas aussi bonne éternellement, mais elle est toujours excellente dans le monde, y compris, je crois, dans la nouvelle administration Obama. Il est reconnu que nous pouvons faire dans l'hémisphère et dans le monde des choses que les États-Unis ne peuvent pas faire. Je ne veux pas commenter les comportements récents. Je veux simplement dire que cette réputation demeure solide et qu'elle est un atout pour le Canada.
    Je vais laisser du temps aux autres.
    Monsieur Patry.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur LeBlanc et monsieur Clark.
    Monsieur Clark, vous avez mentionné

[Traduction]

le rôle des ONG et des militants dans le monde en ce moment. Comment situer le ministère des Affaires étrangères par rapport à ces rôles? On dirait que, en ce moment, les ONG ont plus de pouvoir que le MAECI. Comme vous l'avez dit, bien des gens quittent le MAECI en ce moment. Le nombre de jeunes qui partent du ministère est également très élevé, il n'y a pas de relève. Il n'y a personne pour les remplacer. Ils ont l'impression qu'il n'y a rien à y faire parce que les solutions ne sont pas trouvées au ministère, mais ailleurs.
(1650)
    J'ai deux observations à faire à ce propos. D'abord, les gens ne partent pas parce qu'il n'y a rien à faire, mais parce que les budgets diminuent. Les gens ne restent pas dans les organisations dont les maîtres ne manifestent pas beaucoup d'intérêt pour eux. Malheureusement, c'est ce qui se passe. Selon moi, cela changera si on accorde plus d'attention et un plus grand rôle aux Affaires étrangères et à l'ACDI.
    J'ai une opinion personnelle. Je ne comprends pas, et ce n'est pas d'hier, que les Finances demeurent un organisme central tandis que les Affaires étrangères ont été ramenées à leur rang actuel, alors que la dimension internationale prime en ce moment. Un très grand nombre de nos décisions, beaucoup plus que jamais au cours de notre histoire, sont influencées par des facteurs internationaux.
    Nous avons reconnu ce fait sur le plan économique. Nous avons un ministère puissant qui coordonne les activités sur ce front. Pour ce qui est de notre présence internationale, cette reconnaissance n'a pas eu lieu. Nous nous sommes dispersés dangereusement. Il y a une foule de raisons. Des ministères veulent se représenter directement à l'étranger. Pour moi, c'est une grave erreur. Cela laisse aux spécialistes un sentiment de désespoir.
    Concurrencer les autres? Il ne faut pas. Il faut coopérer. On m'entend rarement faire l'éloge de Lloyd Axworthy, mais il a fait une importante contribution au traité sur les mines antipersonnel. Le mouvement est venu des ONG — les gouvernements s'y refusaient —, mais les ONG ne pouvaient agir de façon décisive sans que le gouvernement intervienne. Ce n'est pas un fait isolé. La Norvège agit de cette façon régulièrement, et d'autres pays le font aussi. Le Canada le faisait régulièrement, et il peut le faire encore.
    Merci beaucoup, monsieur Patry.

[Français]

    Monsieur Crête, vous avez sept minutes.
    Je partagerai mon temps de parole avec Mme Deschamps.
    Bonjour, messieurs Clark et LeBlanc.
    Monsieur Clark, j'aimerais m'assurer de bien vous avoir compris. Comme meilleure façon de montrer à M. Obama notre reconnaissance face à son élection et face à sa façon différente de faire les choses, vous nous suggérez ce virage qui consisterait à nous lancer dans un rattrapage en fait d'investissement dans la démocratie et le développement, plutôt que dans le militaire. Est-ce bien ce que vous nous dites?
    J'aimerais que vous nous précisiez quels gestes significatifs et symboliques le Canada pourrait poser d'une façon particulière.
    Une chose est intéressante en ce qui concerne l'administration Obama. Dans son premier discours à titre de secrétaire d'État, Mme Clinton a souligné l'importance du développement, d'une part, et l'importance de la diplomatie, d'autre part.
    Bien sûr, les États-Unis comme le Canada continueront à jouer un rôle militaire et un rôle traditionnel de sécurité. On a donc accepté cela, dans leur cas, et nous devons accepter qu'il y ait, dans notre cas, une diminution de l'importance des rôles, autres que ceux liés à la défense nationale, qui sont essentiels dans le monde actuel.
    Nous sommes chanceux, au Canada. En effet, le Canada a adopté cette position bien avant les États-Unis. Cette position est maintenant adoptée par M. Obama.
    Une possibilité s'offre à nous. Nous avons les dispositions nécessaires pour être un partenaire qui corresponde aux aspirations de la nouvelle administration américaine.
    Y a-t-il un dossier symbolique dans lequel vous attendriez une action de notre part?
    Par exemple, le président des États-Unis vient d'inviter M. Ban Ki-moon à le rencontrer. Il s'agit là d'une reconnaissance des Nations Unies que n'avait pas l'administration de M. Bush.
    Le Canada, et pas nécessairement en la personne du premier ministre, pourrait-il poser un geste qui vous apparaîtrait plus pertinent, par exemple par rapport à l'Afrique?
    Le Canada ne pourrait probablement pas poser un grand geste. En effet, il nous est plus difficile de poser de grands gestes. Par contre, il pourrait s'agir d'un engagement spécifique en Afrique ou dans les Caraïbes, par exemple. Les Caraïbes connaissent des problèmes épouvantables. Les autres pays ignorent les îles des Caraïbes. Compte tenu de la crise économique actuelle et de ses répercussions profondes sur les petites îles, et compte tenu en particulier de la menace du crime organisé qui existe dans cette région et en Amérique centrale, le Canada aura peut-être un rôle à jouer. Le Canada pourrait jouer un tel rôle beaucoup plus efficacement que les États-Unis.
(1655)
    Monsieur LeBlanc, vous occupez une fonction très stratégique, qui consiste à promouvoir un État américain au Canada et vice versa.
    Vous êtes ici, au Canada. Selon votre perspective, quels sont les gestes les plus importants que le Canada devrait poser pour que son image aux États-Unis et ses actions contribuent à l'accroissement des échanges entre les deux pays, par exemple?
    Je ne sais pas si vous connaissez la SEUS-CP Alliance, qui est une association de provinces canadiennes et d'États américains. C'est précisément cela.
    Si vous me le permettez, je vais vous répondre en anglais.

[Traduction]

    J'habite aux États-Unis depuis 12 ans, et je suis maintenant un peu plus à l'aise en anglais.
    Ce que les politiques peuvent apporter, selon nous, c'est leur gravité. Il est très difficile de réunir des chefs de sociétés commerciales à un endroit donné et à un moment donné, et nous y avons très bien réussi. SEUS est un bon exemple. Nous avons vraiment pu faire progresser le commerce en réunissant les dirigeants politiques et les entreprises. Nous avons constaté que la formule était très fructueuse, en tout cas avec SEUS-Japon, SEUS-Europe et maintenant SEUS-Canada, qui remonte à 2007. La réunion inaugurale a eu lieu à Montréal en 2007, vous vous en souviendrez. C'est un cas où nous avons remporté un très grand succès.
    Pour ma part, j'ai pu travailler avec les consulats canadiens d'Atlanta et de Raleigh, ce que j'ai trouvé utile, assurément, mais il ne semble pas y avoir la même réaction au niveau commercial que nous observons, en tout cas dans notre État, lorsque nous travaillons seulement avec l'industrie. Je ne suis pas un spécialiste du travail que le Canada fait par l'entremise de ses consulats, mais les personnes avec qui j'ai travaillé semblaient toujours manquer de ressources et être généralement peu disponibles. Ce peut être une approche à envisager.

[Français]

    Vous êtes d'accord avec M. Clark que la diminution du nombre de ressources et leur disponibilité ou la formation additionnelle seraient pertinentes.
    Assurément.
    De cette façon, les multiplications seraient plus effectives.

[Traduction]

    Je vais prendre l'exemple du U.S. Commercial Service. La plupart des États américains, lorsqu'il veut donner de l'expansion à leur commerce dans une région donnée, font appel au U.S. Commercial Service et à ses bureaux consulaires sur place, qui mobilisent des ressources considérables. Je précise que c'est un mode de financement au fur et à mesure et que les programmes s'autofinancent, si on veut. Pour être honnête avec vous, j'ignore si ce genre de service est offert par les consulats canadiens. Chose certaine, je suis un agent commercial de la Caroline du Sud, et les services consulaires ne m'ont jamais contacté. Je dois présumer que ce n'est pas une chose qui se fait, de façon générale.
    Merci, monsieur LeBlanc.
    Madame Deschamps, vous aurez probablement un autre tour, mais allez-y. Vous avez une minute.

[Français]

    Je vais poursuivre dans la foulée de M. Crête.
    Monsieur Clark, vous avez dit d'entrée de jeu que le Canada a une solide réputation sur la scène internationale. Vous avez relevé sept points saillants dans votre allocution. Vous avez aussi parlé du financement accru que le Canada consacre à la défense, au détriment de la diplomatie et du développement.
    Je m'occupe particulièrement de dossiers qui concernent l'Afrique. Je suis très en lien avec les organismes non gouvernementaux sur le terrain ou qui doivent le quitter par manque de financement ou parce que des programmes arrivés à terme ne sont pas reconduits.
    Est-ce un peu inquiétant de voir nos ONG quitter l'Afrique, compte tenu de la vision qu'ont ces pays du rôle du Canada? La crédibilité du Canada est très minée, faute d'ONG et d'aide humanitaire. C'est d'autant plus inquiétant quand on sait que le gouvernement vient encore de couper dans ce domaine. Je crois qu'il a enlevé sept pays de la liste des personnes...
    Je vais vous laisser vous exprimer à ce sujet.
(1700)
    Le Canada a diminué sa présence en Afrique, et je regrette cette approche. Toutefois, nous n'avons pas perdu notre réputation. Elle peut être regagnée ou renforcée.
    Je n'ai pas dit que les dépenses consacrées à la défense l'étaient au détriment du développement. Je ne peux pas comprendre pourquoi on a donné la priorité à la défense, et non au développement et à la diplomatie.
    L'ACDI vient de revoir sa politique en ce qui concerne sa présence au niveau mondial. Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour l'Afrique. Personnellement, je ne comprends pas les raisons pour lesquelles l'ACDI a pris ces décisions. Je crois que ce n'est pas lié aux politiques de développement. Bref, l'Afrique risque d'être ignorée par plusieurs grandes puissances. La présence du Canada n'est pas la même que lors de la guerre contre l'apartheid ou du G8 à Kananaskis. C'est la région la plus difficile du monde.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer du côté du gouvernement.
    Monsieur Lunney, je vous en prie. Ce sera ensuite M. Young.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup aux deux témoins.
    Monsieur Clark, je voudrais revenir sur vos propos de tout à l'heure. Vous avez parlé de notre fière histoire d'engagement et de travail acharné concernant deux priorités: nos relations avec les États-Unis et notre politique étrangère indépendante. Vous avez dit que le monde changeait beaucoup et que notre politique devrait être innovatrice et indépendante.
    Vous avez fort justement décrit la nature multiculturelle du Canada, qui nous donne la possibilité d'établir des ponts avec de nombreuses régions du monde, puisque nous avons beaucoup de liens historiques et culturels.
    Comme vous l'avez dit, la difficulté, pour un petit pays, est d'orienter ses efforts. Pendant nos audiences, jusqu'à maintenant, beaucoup d'échanges ont porté sur le Canada et les États-Unis, et il a été question aussi des relations entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Vous avez peut-être entendu les témoins précédents se demander si nous devions nous concentrer sur les relations trilatérales ou si nous devrions faire porter nos efforts davantage sur les relations bilatérales.
    Je voudrais simplement vous demander d'abord ce que vous pensez de cette question. Le Canada devrait-il mettre l'accent sur les relations bilatérales ou sur les relations trilatérales?
    Je vous signale, monsieur le président, que je vais céder la place à mon collègue, M. Young, pour qu'il puisse poser des questions.
    Nous allons passer à M. Young, puis nous allons laisser M. Clark répondre. M. LeBlanc pourra répondre au même moment.
    Merci. Je vais essayer d'être bref.
    Monsieur Clark, nous le savons, le monde est dangereux depuis les attentats du 11 septembre. En Afghanistan, nos militaires, une fois équipés correctement, ont pu faire régner l'ordre avec l'aide de 36 autres pays pour que nous puissions bâtir des barrages et des écoles. Autrefois, il y avait quelques centaines de garçons à l'école. Il y a maintenant cinq millions d'écoliers. L'action militaire, le développement et l'aide semblent aller de pair.
    Est-ce une question d'argent? Vous approuvez la décision de doter les militaires du meilleur équipement. Ils sont sans doute les mieux équipés sur le terrain. Au gouvernement, il faut faire des choix difficiles, comme vous le savez. Si c'est une question d'argent, d'où viendrait cet argent? Si ce n'est pas une question d'argent, de quoi avons-nous besoin pour réussir?
    D'abord, dans le dossier nord-américain, j'estime qu'il faut insister sur l'arrangement trilatéral. L'arrangement canado-américain est très important et exige beaucoup d'attention. Une grande partie de la difficulté consiste à obtenir sans cesse l'attention des Américains. Je ne crois pas que mettre le Mexique à l'écart serait utile.
    Je voulais éviter de parler du passé, mais le premier problème qui m'a été soumis, comme ministre des Affaires étrangères, en 1984, a été une requête du Mexique, qui demandait notre aide pour adhérer au GATT. À l'époque, notre partenaire de l'ALENA n'était pas membre du GATT. Chose curieuse, il n'a pas demandé l'aide des États-Unis, mais la nôtre. Nous avons une foule de raisons de maintenir cet arrangement tripartite.
    Le très difficile problème du Canada et du comité sera celui des choix déchirants à faire: à quoi faut-il consacrer l'argent? Dans l'enveloppe du développement et de la diplomatie, où faut-il dépenser? Et, à l'inverse, où faut-il éviter de dépenser? Les questions sont étroitement liées. J'espère que vous aurez la possibilité d'étudier de très près ces deux questions.
    La question afghane est très intéressante, car, entre autres choses, il y a eu un élément du dispositif militaire qui n'était pas largement connu. Cet élément a une réelle compétence, une vraie aptitude en développement et dans d'autres capacités militaires non traditionnelles. Mais ce n'est pas le premier travail des militaires, et, naturellement, leur approche est colorée par leur mission première. Des membres extrêmement compétents des Affaires étrangères et de l'ACDI ont travaillé aux côtés du MDN en Afghanistan, mais je soupçonne que notre approche du développement, de l'après-conflit, si on veut, aurait été plus solide si ces gens des Affaires étrangères et de l'ACDI avaient eu un meilleur morale, un enthousiasme et une confiance plus solides.
    Un débat très vif se déroule aux États-Unis, où on se demande si le développement doit être dirigé par un personnel militaire. Ce débat n'a pas eu lieu chez nous, et nous n'avons pas tendance à tenir ce genre de débat. Il n'y a pas eu de débat sur l'accroissement des dépenses militaires. Pas de vote, pas de débat.
(1705)
    Pas de vote, pas de débat. La discussion sur l'Afghanistan a duré des années sans vote ni débat officiel.
    Merci.
    Monsieur Abbott.
    Très rapidement. Le très honorable Joe Clark et moi ne serons sans doute pas d'accord. Si on ne peut préserver l'intégrité d'un barrage qu'on construit, si les écoles sont détruites par les Talibans, à quoi bon les construire? La divergence d'opinion tient au fait que je crois que nous avons cette capacité de développement parce que les soldats canadiens sont sur place pour faire leur travail, et parce qu'ils font leur travail, nous pouvons apporter de l'aide et accorder l'aide au développement que nous souhaitons.
    Sauf votre respect, nous ne sommes aucunement en désaccord. J'appuie fermement les activités militaires du Canada en Afghanistan. J'appuie même de façon générale l'augmentation du budget de la défense. J'aurais voulu qu'on en débatte, qu'il y ait alors une large discussion sur les priorités, et j'espère que vous pourrez faire cette discussion maintenant au comité.
    Il ne fait pas de doute que les efforts de développement peuvent être inutiles s'il n'y a pas de sécurité. La question est de savoir si nous aurions plus de sécurité, un meilleur développement ou un développement plus durable si nous avions adopté à l'égard des programmes de développement une perspective plus large dans laquelle nous sommes des partenaires nécessaires dans les investissements en sécurité. Je ne propose pas d'enlever de l'argent à la Défense pour le donner aux Affaires étrangères et au développement. Je chercherais ailleurs, dans les budgets des ministères. C'est un moment difficile pour le faire, et je ne propose pas de le faire immédiatement, mais je chercherais l'argent ailleurs.
    Notre présence internationale est essentielle. L'augmentation des dépenses en défense est une bonne première étape, mais nous dévaluons l'investissement consenti dans la défense si nous ne l'appuyons pas dans les domaines associés à la défense, à mon avis.
    Merci, monsieur Clark.
    Monsieur Dewar.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos invités.
    Je dois dire que c'est un honneur, monsieur le président. Le Canada doit profiter beaucoup plus du fait que les anciens premiers ministres ont beaucoup à apporter. Je suis heureux d'entendre les judicieux conseils d'un ancien premier ministre. Je recommanderais peut-être au comité de mieux exploiter cette ressource. Les États-Unis font beaucoup mieux que nous sur ce plan.
    Il est agréable que vous soyez parmi nous aujourd'hui.
    J'ai eu l'occasion de vous entendre parler récemment du rôle du Canada par rapport aux États-Unis. Vous avez abordé certains des points sur lesquels vous êtes revenu aujourd'hui. J'ai aussi hâte de voir les données que vous nous avez remises, notamment en ce qui concerne les budgets. Nous savons tous, ici, que l'argent est important et que la façon de le dépenser l'est tout autant. J'ai toujours dit que, par son budget, tout gouvernement montre aux Canadiens où se situent ses priorités. Les données sont importantes pour que nous puissions comprendre.
    Je commence par vous, monsieur Clark. Il s'agit du rôle du Canada auprès des États-Unis en ce qui concerne le Mexique. Nous en avons parlé un peu avec les témoins précédents. Selon vous, comment pouvons-nous les amener à s'investir dans le dossier de l'environnement?
    Il a été intéressant d'entendre M. Obama aborder les changements climatiques dans une optique trilatérale. J'ai demandé à un fonctionnaire qui était le ministère principal, en environnement, pour ce qui est du plafonnement des émissions et de l'échange de droits d'émission. Ce n'était certainement pas celui des Affaires étrangères. Néanmoins, nous entendons parfois le ministre des Affaires étrangères dire qu'il s'agit d'une initiative majeure. Je voudrais connaître votre opinion, vu votre expérience dans le dossier du traité des pluies acides. Comment le Canada devrait-il s'attaquer à la question du plafonnement et de l'échange de droits, car ce semble être l'orientation prise — selon moi, c'est une bonne chose, et nous avons fait campagne à ce sujet —, et où se situe le Mexique? Quel devrait être le ministère de première responsabilité?
(1710)
    Voici une observation. L'une des conséquences de l'élection d'Obama, dans le dossier environnemental, est qu'on aura tendance à ne plus opposer le monde industrialisé au monde en développement. Cela semble révolu. Je ne pense pas que ce soit sa façon de voir les choses. Étant donné l'influence immense des Américains dans ce dossier, puisqu'ils ont été considérés comme récalcitrants, nous pourrions avoir un débat plus productif sur la façon de progresser tous ensemble.
    La question que vous soulevez a des ramifications qui vont plus loin qu'une simple conversation entre les trois partenaires de l'ALENA. Si nous pouvons trouver une formule qui tient compte des situations différentes à partir desquelles ces pays abordent les questions environnementales, cela pourrait nous guider à l'avenir.
    Qui fait ce travail? Vous savez qui l'a fait, dans le dossier des pluies acides? Les ministres se sont arrogé le mérite, mais ce sont les députés qui ont agi. Il y avait un mouvement très actif dirigé par le regretté Stan Darling, député de Parry Sound—Muskoka, mais épaulé par plusieurs de ses collègues. Ils ont simplement utilisé les messages que vous connaissez tous auprès des représentants et des sénateurs au Congrès américain et ils les ont persuadés qu'il existait là un vrai problème. Les ministres leur ont emboîté le pas.
    Dans ce cas, sans doute parce que c'était une autre époque, les Affaires étrangères — Affaires extérieures, disait-on — étaient probablement le premier responsable. Toutefois, dans un autre sens, le CPM était le ministère premier responsable. Le premier ministre s'est beaucoup occupé de ce dossier. Et le député de Parry Sound—Muskoka a été la grande influence. Ces problèmes environnementaux, au moins dans le contexte canado-américain, sont des questions internationales, mais aussi très locales. Ils se prêtent fort bien à la collaboration entre les membres du Congrès et les députés du Canada.
    Quant au Mexique, je ne saurais rien dire. Mon expérience ne s'applique pas.
    J'ai deux autres questions. Je vais commencer par une et voir où cela nous mène.
    Dans les relations canado-américaines, les affaires internationales sont extrêmement importantes, et la sécurité est aussi très importante, évidemment. Le Canada souhaite obtenir un siège au Conseil de sécurité de l'ONU. Des témoins nous ont dit qu'il fallait déployer des efforts bien concertés si nous voulions l'obtenir. Personne n'est en désaccord, j'en suis sûr, mais nous devons avoir l'occasion de montrer que, en votant pour le Canada, au Conseil de sécurité, on obtiendra ceci ou cela.
    Il est possible que le Canada propose une démarche à suivre pour les prochaines étapes en Afghanistan. On nous a dit qu'il ne suffisait pas d'avoir un envoyé, car on dépêche des envoyés, etc. Le Canada pourrait participer à l'établissement d'un groupe de personnalités éminentes pour préparer le terrain à un groupe de contact. Cela ferait partie d'une démarche de l'ONU.
    Que pensez-vous d'une initiative semblable du Canada? Pensez-vous que cela l'aiderait à obtenir un siège au Conseil de sécurité?
    Je séparerais les deux. Obtenir un siège au Conseil de sécurité est plus difficile que d'être élu dans les circonscriptions où se sont présentés la plupart d'entre nous, et certains facteurs particuliers s'appliquent.
    L'importance des initiatives, dans l'optique du Canada, c'est que le pays a des antécédents que d'autres pays n'ont pas, mais on ne peut prendre ces initiatives seulement pour satisfaire les intérêts canadiens. Le Canada ne peut agir seulement pour le plaisir de le faire. Il doit répondre à un besoin réel. Si, comme c'est peut-être le cas, on a vraiment besoin d'un groupe équilibré et respecté qui pourrait planifier les prochaines étapes en Afghanistan, alors, oui, le Canada devrait jouer un rôle actif parce qu'il a de l'expérience sur le terrain — une très grande expérience sur le terrain —, et il jouit également d'une crédibilité qui surpasse celle de pays qui ont également une expérience sur le terrain et qui pourraient apporter une contribution. Mais il faut éviter de prendre des initiatives si ce n'est pas nécessaire.
(1715)
    Merci, monsieur Dewar.
    C'est au tour de madame Brown.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux simplement faire un commentaire.
    Monsieur LeBlanc, il y a quelques années, j'ai travaillé pour une entreprise canadienne qui a brassé beaucoup d'affaires dans les Carolines. Le bureau se trouvait en fait à Raleigh-Durham. J'ai passé six merveilleux mois là-bas à titre de représentante de l'entreprise, et j'ai beaucoup apprécié l'hospitalité des gens du Sud. Je leur recommanderais toutefois d'apprendre à se servir d'une théière. Il est bien malheureux que, étant donné qu'il y a eu le Boston tea party, ils n'aient jamais vraiment appris à se servir d'une théière.
    Ma question s'adresse à M. Clark, et je vous remercie beaucoup de votre exposé.
    J'aimerais parler de ce que vous avez dit au sujet du rôle accru des ONG et des militants en particulier, aspect que j'aimerais explorer davantage dans le cadre de mes fonctions. L'une des choses que nous avons constatées, c'est qu'ils sont capables de réagir très rapidement, particulièrement dans des situations catastrophiques. Pensons au tsunami et à la façon dont ces ONG ont été capables d'acheminer l'aide jusque dans les pays touchés, et il y a des organismes comme ceux que vous avez mentionnés, la Fondation de Bill et Melinda Gates. Cela me fait penser à Vision mondiale et à l'excellent travail que fait cet organisme partout dans le monde, ou à la Croix-Rouge internationale, capable d'intervenir dans une foule de situations.
    J'aimerais revenir à la discussion sur les budgets, qui nous a permis de constater que l'ACDI dispose de plus d'argent dans son budget que le MAECI. Je me demande, et il s'agit de pure spéculation de ma part, s'il y a eu un changement considérable de la capacité de la technologie. Ma soeur a travaillé pour USAID au Kenya pendant un certain nombre d'années, et elle a expliqué comment, au cours des années où elle était en poste là-bas, l'amélioration de la technologie — même pendant les années où elle travaillait au bureau — a permis à USAID d'acheminer plus facilement les biens de première nécessité jusqu'aux personnes qui en avaient besoin. Cela explique-t-il en partie ce que nous constatons dans le cas présent, à savoir que le gouvernement alloue plus d'argent à l'ACDI qu'au MAECI? Fait-il cela pour la très bonne raison que le Canada peut ainsi fournir davantage de services de santé, de nourriture et de services d'éducation? Cela fait-il partie de l'équation?
    J'ai lu le livre de Thomas Friedman, La terre est plate: Une brève histoire du XXIe siècle, et l'auteur parle abondamment des possibilités dans le domaine des communications et de l'incidence considérable qu'elles ont eue sur nos vies. Est-il possible d'affirmer que cela explique en partie ce qui se produit actuellement dans notre monde en constante évolution?
    Il ne fait absolument aucun doute que la technologie a accru l'efficacité et la capacité des gouvernements et des organisations non gouvernementales, et il faut tenir compte de cette situation, car elle soulève de très grandes questions au sujet des approches traditionnelles dans le domaine de la diplomatie et du développement
    Mais cela explique-t-il la situation au Canada? Je ne crois pas. J'aurais aimé qu'une stratégie ait mené à cela. J'ai le sentiment que... J'ai mentionné plus tôt dans mon exposé que le leadership en matière de politiques internationales doit émaner des dirigeants. Il doit y avoir un défenseur quelque part.
    Au cours des dernières années, je ne crois pas qu'il y ait eu un défenseur de l'ACDI ou d'Affaires étrangères lorsque le gouvernement a établi les priorités nationales. Et peut-être qu'il s'agit ici d'un commentaire sur les priorités que doit examiner le comité.
    Je crois donc que, si le budget de l'ACDI est important, c'est en partie parce que les gouvernements précédents ont pris des engagements dans le contexte des sommets du G-8, particulièrement envers l'Afrique, et il est très difficile pour tout gouvernement de se soustraire à de tels engagements. Je crois que ces engagements ont peut-être fait gonfler certains des budgets et des engagements actuels de l'ACDI.
    Je crois également qu'il serait urgent de revoir très attentivement le mandat de l'ACDI. Il s'agirait d'un examen difficile, car il y a eu tellement de dérapages — il y a eu beaucoup de réussites, mais l'ACDI a connu tellement de ratés au cours des décennies que le débat pourrait être trop axé sur des échecs en particulier. Un tel débat ne nous mènerait nulle part.
    Le modèle que j'aimerais que l'on préconise, c'est de prendre l'idée qui a inspiré une présence canadienne dans le domaine de l'aide internationale — et je tiens à préciser que l'idée a d'abord été enchâssée dans la loi par le gouvernement progressiste conservateur de M. Diefenbaker, avant la création de l'ACDI — et de jeter un coup d'oeil à la façon dont le Canada pensait pouvoir intervenir dans le monde d'alors, puis de se demander comment on pourrait appliquer les principes du passé au monde d'aujourd'hui et élaborer une politique d'aide efficace.
(1720)
    Merci, monsieur Clark.
    La parole est à M. Patry.

[Français]

    J'aimerais poser une question à M. LeBlanc et, par la suite, une autre à M. Clark.
    Monsieur Leblanc, vous dites qu'en Caroline du Sud, vous dépendez un peu du consulat qui est à Atlanta, en Géorgie. Par le passé, ce comité avait fait une étude sur le commerce international et avait suggéré au gouvernement d'augmenter énormément le nombre de consulats aux États-unis. Il l'a fait dans un des derniers budgets. Souvent, on nous dit que la personne responsable du commerce dans tel consulat peut aller dans différents États américains, mais cela ne fonctionne pas de cette façon.
    Pensez-vous que si on augmentait le nombre de consulats et le nombre de gens travaillant dans le domaine du commerce dans ces consulats, comme en Caroline du Sud, cela pourrait vraiment aider à accroître le commerce entre le Canada et les États-unis?

[Traduction]

    Monsieur Clark, j'aurais également une question pour vous. La semaine dernière, Peter Harder, ancien sous-ministre des Affaires étrangères, nous a parlé de la projection pour 2010 et 2015. J'ignore s'il s'agissait d'un objectif ou d'une projection, mais il a souligné que le Canada serait, comme vous l'avez mentionné, un pays respectable. Mais, en fait, le Canada n'est pas représenté dans les pays émergents. Ma question est la suivante: comment pouvons-nous collaborer avec les pays émergents? Je parle principalement de la Chine, de l'Inde, du Brésil et de certains autres pays, car il est maintenant temps de collaborer avec ces pays pour l'avenir; il ne faut pas attendre de le faire dans 10 ou 12 ans.
    Souhaitez-vous répondre, monsieur Leblanc?

[Français]

    Ça revient un peu à ce que j'ai dit plus tôt. Nous travaillons souvent par l'entremise d'un consul américain. C'est très efficace, cela permet de rejoindre et de rassembler les gens d'affaires. Si cette possibilité n'existait pas autant, il y aurait un impact direct. C'est très rentable, en effet. Bref, je vous réponds oui. Il n' y a pas de doute à ce sujet. S'il y avait une plus grande présence, une plus grande disponibilité de gens qui peuvent appuyer les missions aux États-unis, cela serait très profitable, j'en suis certain.

[Traduction]

    Le Canada entretient diverses relations très solides avec les principaux pays émergents. Prenons l'Inde. Non seulement le Canada compte une importante population originaire de l'Inde qui maintient des liens très étroits avec ce pays, mais le Canada et l'Inde sont tous deux membres du Commonwealth. On doit le voir non pas comme une organisation, mais comme une tradition. L'Inde a parfois une vision différente de la loi et de l'ordre, mais les deux pays s'inspirent de la même source. Pour des raisons difficiles à cerner, le Canada n'a pas suffisamment utilisé ce genre de liens, mais il s'agit de liens naturels.
    Lorsque le Canada participait très activement aux processus de médiation, il n'était pas rare de voir des Canadiens et des Indiens coprésider divers comités. Nous étions au Cambodge. Nous étions au Vietnam. Nous sommes intervenus partout dans le monde. Il s'agit d'une base très solide, et le Canada pourrait en tirer profit. Les liens sont à la fois historiques et actuels. Ils nous permettent de nourrir de grandes ambitions. Ce sont des liens très actifs en raison de la diversité de la population canadienne. Nous devrions donc être en mesure d'accomplir beaucoup de choses grâce à cela.
    Les liens du Canada avec le Brésil sont plus ténus, mais pleins de possibilités. L'un des aspects intéressants de la situation actuelle en Haïti, c'est que le Brésil joue un rôle de plus en plus actif et qu'il est appuyé par le Canada. S'il y a une région dans le monde où le Canada peut accomplir des choses que les États-Unis ne peuvent faire pour aller de l'avant, ce sont les Amériques; notre propre hémisphère. Les États-Unis ont l'inconvénient d'être les gros joueurs dans l'hémisphère. Le Canada s'est joint à l'OEA précisément parce qu'il avait la capacité exceptionnelle d'accomplir des choses que les États-Unis ne pouvaient faire et que les autres pays voulaient réaliser. Le Canada pourrait former un partenariat très solide avec le Brésil et avec d'autres pays émergents.
    En Chine, la tradition occupe une place très importante. Je ne souhaite pas aborder la question de la Chine ici; je veux simplement mentionner que le premier ministre a clairement fait savoir qu'il a l'intention de visiter la Chine sous peu. Je suis de ceux qui recommandent fortement au premier ministre d'adopter une approche globale où sa visite serait probablement précédée d'un certain nombre de visites ministérielles. La relation avec la Chine est d'une très grande importance pour le Canada. Je crois qu'il est juste d'affirmer que la Chine est moins ouverte au Canada qu'elle l'a peut-être été il y a deux ou trois ans parce qu'elle n'a pas compris la politique initialement suivie par le Canada. Mais je crois que cette relation peut être facilement rétablie.
    Je crois que, si nous y mettons du temps, nous pouvons créer un certain nombre de liens très forts avec les pays émergents. Ce que je veux dire, c'est que nous devons tirer profit de ces liens, dont certains sont de nature économique et d'autres, de nature politique et diplomatique, si nous voulons aller plus loin qu'où peut nous mener notre seule force économique.
(1725)
    Merci beaucoup, monsieur Patry.
    J'aimerais revenir à M. Abbott, mais, avant, je voudrais poser une question.
    Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles nous devrions ou non faire cela. Il y a des chevauchements sur le terrain. Je me demande donc si vous croyez que nous devrions fusionner l'ACDI et les Affaires étrangères.
    Je ne crois pas, car le mandat de l'ACDI serait confondu dans celui des Affaires étrangères. Cela dit, je crois qu'il faudrait examiner très sérieusement la façon dont le gouvernement actuel entend définir le mandat de l'ACDI. Je ne crois pas que quiconque se soit encore penché sur cette question.
    Je ne fusionnerais pas ces deux organismes, car je crois — et il s'agit d'une idée qui n'a pas encore fait ses preuves, mais qu'il faut étudier — que l'ACDI a toujours un rôle à jouer dans le monde, mais il n'a pas encore été défini. Mon expérience avec l'ACDI me permet d'affirmer que, si les activités de l'ACDI sont trop liées à celles d'Affaires étrangères, l'ACDI pourrait perdre sa capacité de remplir son mandat.
    La question a été posée la semaine dernière à Paul Heinbecker, qui a répondu oui sans la moindre hésitation, pour deux ou trois raisons, qu'il a expliquées. C'est une question qui avait été lancée comme ça.
    Nous sommes heureux que vous nous donniez votre avis à cet égard.
    La parole est à M. Abbott.
    Je serai très bref, monsieur Clark. J'ai été heureux d'entendre votre commentaire sur les Amériques, car, comme vous le savez bien, notre premier ministre a décidé d'aller de l'avant en ce qui concerne l'initiative des Amériques. Mais j'aimerais vous donner l'occasion de clarifier peut-être votre commentaire sur l'Afrique. Le fait est que le gouvernement actuel a doublé l'aide à l'Afrique. Nous sommes en voie d'atteindre l'objectif qui consiste à doubler cette aide d'ici la fin du mois en cours. Je ne pense pas que vous vouliez dire que nous avons laissé tomber l'Afrique, car, en fait, nous avons doublé l'aide.
    De plus, grâce à notre politique à l'égard des pays ciblés, nous allons être en mesure de faire deux choses à la fois. D'abord, la politique du premier ministre nous permettra d'accorder aux Amériques la reconnaissance qu'elles méritent. Deuxièmement, nous pourrons concentrer notre aide et nos activités de développement. Comme vous le savez fort bien, il y a des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes au Soudan et au Darfour et dans d'autres régions de l'Afrique qui sont en vie grâce au Canada et à sa générosité. Je suis persuadé que, réflexion faite, vous ne voudriez pas donner l'impression aux lecteurs du compte rendu de cette audience dans le hansard que vous disiez que notre gouvernement a laissé tomber l'Afrique.
    Il y a des millions de Canadiens qui lisent le compte rendu des délibérations du comité.
    Monsieur Clark.
    Si j'étais toujours un parlementaire et que je participais à un débat partisan, je serais tenté de dire que les lecteurs du hansard n'auraient pas eu cette impression si vous n'aviez pas fait consigner cette idée dans le compte rendu.
    Des voix: Oh, oh!
    Le très hon. Joe Clark: Néanmoins, sur la question des Amériques, je crois qu'il est heureux que le gouvernement actuel ait adopté sa politique sur les Amériques avant l'élection du nouveau président, car, de cette façon, les gens n'ont pas l'impression qu'il s'agit d'une initiative de dernière minute. Je crois que, maintenant, le problème qui se pose — et les changements apportés dans l'attribution de l'aide font entre autres partie de l'intervention —, c'est d'être capable d'utiliser efficacement cette initiative.
    Je suis très impressionné par le travail du nouveau ministre sur le terrain. Je viens tout juste de passer deux ou trois jours à Washington, où j'ai discuté avec des personnes qui travaillent dans ce domaine; le travail du ministre a bel et bien des répercussions, et on comprend bien quelle est la capacité du Canada.
    En ce qui concerne l'Afrique, je crois que nous pourrions tenir un débat sur le montant de l'aide accordée, mais cela ne vous servirait probablement pas à grand-chose. Je crois que le Canada accorde moins d'attention à l'Afrique qu'auparavant, particulièrement du côté du gouvernement. Vous avez tout à fait raison, et les autres ont également raison: ce n'est pas le cas des ONG, des groupes confessionnels et d'autres organismes, qui sont plus présents et plus efficaces que jamais en Afrique. Et je crois que cette question ne devrait jamais être de nature partisane.
    Selon moi, l'Afrique est un continent qui est à la fois très débrouillard et très troublé, et il a besoin de notre attention, il a besoin d'alliés parmi les pays développés. Bien souvent, nous avons été en mesure de lui tendre la main. Nous sommes capables de réaliser de grandes choses avec peu de moyens, simplement parce que cela fait partie de notre tradition. J'espère que nous poursuivrons activement notre travail dans ce domaine.
(1730)
    Merci, monsieur Abbott.
    Monsieur Crête.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Très brièvement.

[Français]

    Monsieur Clark, j'aimerais revenir à ce que vous venez de dire au sujet de l'Afrique. On va entreprendre une étude au comité, c'est une de nos prochaines priorités. J'aimerais que vous expliquiez un peu plus quelles devraient être les deux ou trois questions principales à étudier en ce qui a trait aux choix à faire pour que dans six mois ou un an, le Canada ait une politique révisée relative à ce continent, et non pas seulement des décisions à la pièce.
    Puis-je réfléchir à cette question et vous soumettre, peut-être, quelque chose par écrit?
    C'est bien.

[Traduction]

    Monsieur LeBlanc.
    Pour revenir brièvement à la question de M. Patry, seulement pour que les choses soient claires, mieux vaut en avoir plus. Je ne voulais pas laisser entendre par là que les bureaux consulaires du Canada manquaient de personnel ou de fonds. Donc, en ce qui concerne votre question, oui, il vaut certainement mieux en avoir plus. C'est un moyen extraordinaire, mais je ne voulais certainement pas laisser entendre que vous manquiez de personnel ou de ressources financières.
    Merci.
    Monsieur Clark, j'aurais seulement une autre petite question à vous poser.
    Dans les années 1980, lorsque vous étiez à la tête de ce ministère, le Canada entretenait des liens très étroits avec les États-Unis. En fait, nous avons entendu, au cours de séances précédentes, que George Shultz et vous-même aviez noué des liens d'amitié assez solides en plus de votre relation professionnelle. Il appelait cela « s'occuper de son jardin ». Il pouvait se déplacer partout dans le monde, mais il jugeait bon de s'occuper de son jardin, de sorte que vous vous rencontriez presque aux trois mois.
    Craint-on que notre politique étrangère à l'égard des États-Unis finisse pas reposer sur la personnalité des gens au pouvoir? Peut-être était-ce la bonne façon de faire; peut-être qu'il faut entretenir ce genre de liens personnels. Mais, maintenant, tout le monde estime que la nouvelle administration donne de l'espoir au monde. Craint-on que le gouvernement du Canada modifie sa politique étrangère selon la personne qui est au pouvoir, pour ensuite faire marche arrière si une autre personne est élue et que, à long terme, une telle approche nuise aux liens d'amitié et à la relation entre le Canada et les États-Unis?
    Je crois qu'une telle situation devrait être évitée. Il s'agit d'une question très importante. En fait, la relation entre le secrétaire Shultz et moi-même était très efficace en raison de la structure qui avait été mise en place, et, pour rendre à César ce qui appartient à César, cette structure existait déjà quand je suis arrivé. En effet, elle avait été mise en place par le secrétaire Shultz et Allan MacEachen lorsqu'il était ministre, mais nous avons tous deux fait en sorte qu'elle fonctionne. Elle procurait l'avantage suivant. Le ministre des Affaires étrangères du Canada ne peut échapper aux événements qui surviennent aux États-Unis, mais le secrétaire d'État américain doit faire beaucoup d'efforts pour prêter attention à ce qui se passe au Canada. Grâce à ces réunions trimestrielles, il y avait un moment où le secrétaire d'État américain devait laisser de côté tout le reste et s'attarder à certains détails — souvent des détails très précis — concernant le Canada, de sorte que nous recevions constamment une très grande attention.
    J'ai eu de la chance: lorsque j'étais ministre, le bureau qui s'occupait des questions liées aux Amériques comptait de nombreux experts canadiens. Par la suite, les experts venaient le plus souvent d'autres pays des Amériques, de sorte que, sur le plan structurel, il y avait un déclin de la fréquence et de la qualité, si je puis dire, des activités de consultation. Je crois que, si nous avions l'occasion de remettre sur pied ce genre de structure, nous devrions la saisir, et je crois que c'est le genre d'initiative à laquelle il faudrait rapidement donner suite pour amener l'administration américaine à la considérer comme une bonne idée. Cette structure a survécu aux différentes personnes qui se sont succédées au pouvoir; elle ne reposait pas sur la personnalité des dirigeants. Elle a fonctionné avec MacEachen et Shultz, Shultz et moi-même, Baker et moi-même, et avec d'autres ministres et d'autres homologues américains. Si ce mécanisme ne convient pas — car il pourrait ne pas être adapté aux besoins actuels —, il faudrait trouver une structure semblable.
(1735)
    Merci beaucoup.
    Nous avons un peu dépassé l'heure prévue. Je vous remercie tous d'être venus témoigner ici aujourd'hui, et je vous souhaite tous beaucoup de succès dans vos entreprises. Nous espérons avoir peut-être de nouveau l'occasion de vous entendre.
    La séance est levée.
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