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Je déclare ouverte la 23
e séance du Comité permanent des finances.
Conformément à notre ordre du jour, nous recevons aujourd'hui le gouverneur de la Banque du Canada, M. Mark Carney, et le premier sous-gouverneur, M. Paul Jenkins. Nous vous souhaitons le bienvenue à tous les deux, messieurs. C'est un honneur pour nous que de vous recevoir ici aujourd'hui au comité.
Nous vivons certainement une période très intéressante. Nous désirons vivement vous entendre nous parler de votre point de vue, des prévisions mises à jour ainsi que de certaines questions très importantes. Tous les membres du comité ont, bien entendu, reçu un exemplaire de votre Rapport sur la politique monétaire qui a été publié jeudi, je crois.
Monsieur Carney, bienvenue parmi nous. Vous pouvez faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, distingués membres du comité, bonjour.
Paul et moi sommes ravis de nous présenter devant ce comité pour discuter du point de vue de la Banque du Canada au sujet de l'économie et de l'orientation de la politique monétaire.
Avant que nous ne répondions à vos questions, j'aimerais vous donner un aperçu de la plus récente livraison du Rapport sur la politique monétaire, que le président vient de mentionner.
Nous traversons une période intéressante, mais également difficile sur le plan économique et l'économie canadienne est secouée par une récession prononcée et synchronisée à l'échelle du globe. Ces derniers mois, cette récession a été accentuée par des retards dans la mise en oeuvre de mesures visant à restaurer la stabilité financière dans le monde. Les décideurs des pays du G20 réagissent maintenant à la crise mondiale par un engagement renouvelé à l'égard de mesures concrètes et de plans détaillés. Selon notre scénario de référence, ces politiques seront mises en oeuvre rapidement et de façon efficace, et leurs effets se feront pleinement sentir l'année prochaine. Les discussions qui se sont déroulées à Washington la fin de semaine dernière vont dans le même sens.
Étant donné la situation économique et financière actuelle à l'échelle du monde, la banque prévoit maintenant que la récession au Canada sera plus profonde qu'elle ne l'envisageait en janvier. Le retour à la croissance sera retardé d'un trimestre, soit jusqu'à la fin de 2009, et la reprise au pays sera un peu plus graduelle. Les perspectives d'évolution de l'économie canadienne sont généralement les mêmes, mais leur profil s'est déplacé.
[Français]
On prévoit que le PIB réel du Canada reculera de 3 p. 100 cette année. La croissance reprendra à l'automne et s'accéléra pour atteindre 2,5 p. 100 en 2010, et 4,7 p. 100 en 2011.
Nos prévisions en matière d'inflation sont en gros conformes à celles exposées dans la « Mise à jour » de janvier du « Rapport sur la politique monétaire ». L'inflation mesurée par l' IPC global sera temporairement négative en 2009, mais le taux d'augmentation de l'IPC global devrait retourner à la cible de 2 p. 100 visée par la banque au troisième trimestre de 2011.
Dans ce contexte, la banque a abaissé, mardi dernier, son taux directeur d'un quart de point de pourcentage pour le ramener à un quart 0,25 p. 100, qu'elle estime être sa valeur plancher. Sous réserve des perspectives de l'inflation, elle s'est engagée à le maintenir à ce niveau jusqu'à la fin de juin 2010.
[Traduction]
Depuis décembre 2007, nous avons abaissé les taux d'intérêt de 425 points de base au total. Ils ont ainsi touché leur creux historique et leur niveau le plus bas possible. La banque est d'avis que cet assouplissement cumulatif, conjugué à son engagement conditionnel de maintenir les taux à un bas niveau pendant une période prolongée, représente l'orientation qu'il convient de prendre pour la politique monétaire afin que l'économie se remette à tourner à pleine capacité et que la cible d'inflation de 2 p. 100 soit réalisée.
Toutefois, nous vivons une période d'incertitude. Si une impulsion additionnelle se révélait nécessaire, la banque conserve une flexibilité considérable dans la conduite de la politique monétaire en contexte de bas taux d'intérêt. Parce qu'il est important de présenter ces autres mesures de façon structurée et transparente, nous avons publié la semaine dernière un cadre qui décrit la démarche suivie par la banque pour la conduite de la politique monétaire lorsque le taux cible du financement à un jour se situe à sa valeur plancher. Nous sommes heureux de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de discuter avec ce comité de l'application possible de ce cadre en vue de l'atteinte de la cible d'inflation.
La banque pourrait fournir une impulsion additionnelle à l'économie en procédant à un assouplissement quantitatif, qui consiste à acheter des actifs financiers en les finançant par la création de réserves. Elle peut aussi procéder à un assouplissement direct du crédit, qui consiste à effectuer directement des achats ciblés d'actifs privés.
Si la banque devait mettre en oeuvre des mesures d'assouplissement quantitatif ou d'assouplissement direct du crédit, elle le ferait de façon mûrement réfléchie et en s'appuyant sur des principes. L'objectif de ces opérations serait d'améliorer l'ensemble des conditions financières afin de soutenir la demande globale et d'atteindre la cible d'inflation. Les achats d'actifs seraient concentrés dans les échéances les plus susceptibles de maximiser l'effet des interventions sur l'économie. Les mesures seraient appliquées de la façon la plus globale et la plus neutre possible. La banque agirait prudemment, en limitant les risques liés à son bilan et en veillant à se désengager de ces stratégies au rythme approprié.
Permettez-moi de conclure en disant quelques mots sur les perspectives de l'économie canadienne.
[Français]
Bien que le niveau d'incertitude demeure élevé, surtout du fait que l'économie canadienne dépend de forces à l'extérieur de nos frontières, nous restons confiants dans la perspective d'une reprise économique future au Canada.
Cette reprise devrait être soutenue par les facteurs suivants: la remontée progressive de la demande extérieure; la fin de l'ajustement des stocks dans le secteur du logement au Canada et aux États-Unis; la solidité du bilan des banques, des entreprises et des ménages canadiens; le fonctionnement relativement efficace de notre système financier et l'amélioration graduelle des conditions financières au Canada; la dépréciation passée du dollar canadien; les mesures de relance budgétaire et la rapidité et l'ampleur des mesures de politique monétaire prises par la banque.
[Traduction]
Sur ce, monsieur le président et distingués membres du comité, Paul et moi serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président. Permettez-moi de commencer par un compliment. Je trouve que c'est une très bonne idée et une idée nouvelle, en tout cas pour moi, d'annoncer à l'avance que votre taux d'intérêt restera bas pendant un an environ, ce qui devrait avoir une influence sur les taux du marché. C'est la première fois que je vois cela.
Ma question concerne toutefois la différence entre les déclarations de M. Flaherty et celle que vous venez de faire aujourd'hui. Plus tôt ce mois-ci, à Londres, le ministre des Finances a déclaré que nous connaissions une légère récession et que l'inflation allait probablement poser un problème. Voici ce qu'il a dit au sujet de l'inflation:
Je suis très conscient du… danger de l'inflation. Nous allons surveiller la situation de près au cours des prochains trimestres… et nous prendrons alors les mesures voulues, en collaboration avec la Banque du Canada…
Il parle d'une légère récession tandis que vous dites qu'elle est plus profonde que prévu. Alors qu'il parle d'un sérieux problème d'inflation, vous semblez dire qu'il n'y en a pas. C'est du moins ainsi que j'ai interprété votre rapport.
J'ai donc une question double à vous poser. La déclaration de M. Flaherty au sujet de l'inflation empiète-t-elle un peu sur vos prérogatives, car je pensais que c'était de votre ressort? Deuxièmement, qui a raison compte tenu de cette contradiction apparente entre votre opinion et celle du ministre?
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C'est pour cela que je vous ai fait un compliment, car j'ai pensé que c'était une bonne initiative.
Lors de votre dernière visite ici, j'ai dit que vous étiez très optimiste, mais je crois avoir reconnu que cela dépendait toujours de la rapidité avec laquelle les États-Unis régleraient le problème des banques et que s'ils ne le faisaient pas, notre situation s'aggraverait. Je pense que c'est le cas. Je ne suis pas sûr du chiffre exact, mais selon le FMI, les prêts bancaires américains se chiffrent à 4 billions de dollars ou un chiffre absolument gigantesque. J'estime donc que le système bancaire américain pourrait ne pas se rétablir suffisamment rapidement.
Êtes-vous d'accord avec moi? Quelles sont les perspectives, ou que devront faire les États-Unis pour que cela fonctionne? Quelles preuves en aurons-nous? Quand et comment saurons-nous que ce problème d'une importance cruciale pour la communauté mondiale, pour les systèmes bancaires des États-Unis et de l'Europe, est en train de se régler?
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C'est une excellente question.
Je dirais simplement que, selon les estimations du FMI, cela représente 4,1 billions de dollars d'actif répartis dans le monde, mais qu'une importante proportion de cet actif problématique se trouve aux États-Unis. Par conséquent, le problème existe toujours. Pour que ce soit parfaitement clair, nos projections partent du principe que la stabilisation du système bancaire américain, et par conséquent du système financier mondial, va se faire progressivement.
Que doivent faire les États-Unis? La première étape sera franchie le lundi 4 mai quand on obtiendra les résultats des simulations de stress portant sur les 19 banques les plus importantes, qui représentent les trois quarts de l'actif bancaire des États-Unis. Nous examinerons les hypothèses concernant les perspectives économiques, ce que nous comprenons, et aussi ce que les résultats donneront sur le plan des pertes et des besoins en capital, ce qui fait partie de la méthodologie. Nous pensons que ce sera le cas, mais nous le saurons bientôt; nous avons besoin de voir les résultats.
Ensuite, les institutions devrons lever des capitaux, par l'entremise du secteur public ou par leurs propres moyens. C'est une autre dimension du problème. Cela prendra un certain temps. Il est très important de débarrasser les institutions de l'actif problématique, l'actif toxique et de mauvais qualité. Comme vous le savez sans doute, il y a une série de mécanismes qui permettent de le faire en faisant appel à des capitaux privés et publics. Il faut également que ces transactions aient lieu assez rapidement.
En dernier lieu, je dirais que nous avons besoin d'une stabilisation, non seulement aux États-Unis, mais mondialement. Nous avons besoin de mesures différentes, mais qui permettront un recapitalisation et l'élimination des actifs de mauvaise qualité afin que le système bancaire continue à fonctionner au Royaume-Uni et en Europe.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur Carney et monsieur Jenkins.
Monsieur Carney, durant les derniers mois, la Banque du Canada a consenti des facilités de crédit et des avances de fonds importantes aux banques en général pour qu'elles puissent mieux se restructurer ou mieux s'organiser face au crédit.
Y a-t-il des conditions associées à cette aide comme, par exemple, faire en sorte que l'accès au crédit soit facilité aussi — on comprend que ça l'est pour les banques — pour les entreprises et les particuliers en général? Cela fait-il partie du processus, des conditions associées à cela?
Vers la fin de l'année financière 2008, la Banque du Canada a fourni au maximum environ 40 milliards de dollars au système financier canadien sous forme de liquidités exceptionnelles. Maintenant, le montant de ces liquidités est d'environ 26 milliards de dollars. Il y a donc eu une diminution significative, mais c'est quand même un gros montant. Le fait de fournir des liquidités était et demeure encore très important pour le bon fonctionnement du système financier canadien.
Nos efforts visent à améliorer globalement les conditions financières au Canada. Nous avons fourni des liquidités et nous en fournissons maintenant aux participants clés du système financier. Il ne s'agit pas seulement des banques, mais aussi d'organismes comme la Caisse centrale Desjardins. Ce système comprend tous les membres du STPGV. Nous trouvons les résultats de ces opérations encourageants. À l'heure actuelle parmi les pays industrialisés, le système financier canadien dans son ensemble est celui qui se porte le mieux.
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Je pensais que M. Mulcair me poserait cette question de façon très élégante.
Si vous le permettez, pour aller plus rapidement, je vais répondre en anglais.
[Traduction]
Qu'est-ce qui est différent?
Premièrement, nos prévisions sont semblables à celles de janvier. La reprise est retardée d'un trimestre et sera un peu plus limitée que prévu, mais pas tant que cela. Nous avons dit en janvier que nous nous attendions à une reprise relativement modeste en 2010 et cela n'a pas changé, si ce n'est que la reprise sera un peu plus faible. Pourquoi? À cause du retard dans la stabilisation du système financier dont nous venons de parler. C'est aussi parce que le prix des produits de base, les termes de l'échange, sont tombés de façon assez spectaculaire et que cela aura un effet sur le revenu réel au Canada. Cela reflète des perspectives modérées, une reprise plus faible et en fait l'absence de reprise en Europe en 2010.
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Bonjour, messieurs Carney et Jenkins, et merci d'être ici avec nous aujourd'hui.
Dans l'annexe de votre « Rapport sur la politique monétaire » que vous avez déposé la semaine dernière, vous expliquez comment la Banque du Canada va procéder à ce que les experts appellent un assouplissement quantitatif ou, autrement dit, comment elle augmentera la quantité de crédit dans l'économie. Traditionnellement, vous le faites en achetant des bons du Trésor.
Dans le cadre de cette mesure exceptionnelle, vous pourriez le faire en achetant aussi des actifs financiers du secteur privé, c'est-à-dire des actions ou des obligations d'entreprises privées particulières. La banque va acheter ces actifs en créant de l'argent à partir de rien.
Je dois d'abord vous dire à quel point cette pratique de création monétaire à partir de rien et de gonflement artificiel de crédit m'inquiète. Les théories inflationnistes de Keynes sont discréditées depuis plusieurs décennies. Or, soudainement, on dirait que tout le monde est devenu keynésien. Si créer de l'argent neuf et gonfler le crédit pouvaient vraiment susciter la croissance, il n'y aurait jamais de récession ni de ralentissement économique.
En fait, plusieurs économistes croient que c'est une création monétaire trop forte qui a entraîné cette crise. Le crédit trop facile pendant la majeure partie de la présente décennie aurait entraîné des bulles, en particulier dans les secteurs de la finance et de l'immobilier. Une récession survient lorsque ces bulles éclatent et que l'économie doit se rajuster. Si c'est le crédit trop facile qui a suscité les bulles et la crise, j'aimerais bien comprendre comment on peut espérer sortir de la crise en augmentant encore plus la quantité de crédit. Ne risque-t-on pas ainsi de créer encore plus de distorsion dans l'économie?
Certains disent que l'assouplissement quantitatif est maintenant la voie à suivre, puisqu'il est pratiqué par la plupart des autres banques centrales des grands pays. Mais si le Canada connaît une crise moins grave parce que sa politique monétaire est justement plus conservatrice et plus prudente que celle de ses partenaires, il me semble que faire la même chose que les autres n'est pas nécessairement la meilleure option.
Monsieur Carney, dans votre rapport, vous admettez que l'achat d'actifs privés fera augmenter leur prix et que cela se fera de façon neutre à l'égard des secteurs et des actifs de nature similaire. Comment pouvez-vous rester neutre, alors qu'il y a des milliers d'actifs financiers différents dans différents secteurs? La banque ne risque-t-elle pas de se placer dans une position où elle favorisera certains secteurs ou certaines entreprises au détriment d'autres?
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Je vous remercie de votre question. Premièrement, je voudrais souligner quelques points. L'objectif de ces opérations serait... J'emploie à dessein le conditionnel. Ce n'est pas le plan de la Banque du Canada, mais cela constitue une carte dans notre manche, seulement au cas où il serait nécessaire de favoriser une plus grande détente monétaire à cause d'un choc négatif. Nous aurions des possibilités, par exemple l'assouplissement des règles du crédit. L'objectif de ces opérations serait l'augmentation des conditions financières, des conditions de crédit dans l'ensemble du Canada.
En ce qui a trait à la neutralité à l'égard des secteurs de nature similaire, nous pouvons utiliser l'adjudication, par exemple. C'est une manière d'être neutre par rapport à certains secteurs. C'est un outil utilisé par la Banque d'Angleterre pour assouplir le crédit.
En ce qui concerne votre référence à M. Keynes, je voudrais seulement souligner que ce n'est plus une question de M. Friedman contre M. Keynes, cette idée de la relation entre le montant de la masse monétaire et de l'inflation. Dans ce contexte, même si notre situation et nos conditions financières au Canada sont meilleures qu'ailleurs — et c'est la vérité—, elles sont tout de même difficiles, elles restent difficiles. La [Note de la rédaction: inaudible] de la monnaie a chuté, alors cette relation, ce danger est beaucoup moindre, à cause de la récession et de la crise financière mondiale.
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Bienvenu, monsieur Carney et monsieur Jenkins. C'est toujours un plaisir de vous recevoir.
Monsieur Carney, vous avez bien répondu, plus tôt, à la question de mon collègue M. Laforest à propos de la différence entre vos prévisions, plutôt optimistes, et celles qui sont tempérées. Vous avez bien fait les distinctions qui s'imposent.
Je partage l'opinion de mon collègue M. McCallum qui vous félicite en disant que vous faites bien de donner une certaine assurance aux gens qui planifient peut-être l'achat d'une maison. C'est une manière de stabiliser la situation et de donner confiance. Je pense que c'est un peu le but, même si vous vous êtes gardé de dire que vous pouviez parfois faire du cheerleading. Vous avez dit que vous donniez seulement les chiffres. Je pense qu'il y a quand même une question de confiance que les gens doivent avoir dans l'économie. Quand vous donnez cette garantie d'une durée de plus d'un an sur le taux d'intérêt, il y a quelque chose de rassurant qui ne peut qu'aider, en fin de compte.
La conclusion est qu'il est beaucoup plus sécuritaire de faire des prédictions à propos des choses qu'on contrôle que de celles qu'on ne contrôle pas, ce qui est très bien. On a plus de chances de ne pas manquer notre shot.
Je veux revenir sur le thème de l'inflation, qui a surgi dans les discussions.
Vous vous souviendrez sans doute — parce que vous avez une bonne mémoire pour ces choses-là et pour bien d'autres aussi —, que je vous avais parlé de cela il y a quelques mois déjà. Vous m'avez rassuré en disant que vous aviez tous les outils nécessaires.
Vous avez dit plus tôt qu'on parlait, à l'échelle mondiale, de 4,1 billions de dollars. Je prends toujours la peine de dire que « billion » en français correspond à « trillion » en anglais, parce que ça peut porter à confusion. Le billion français, c'est 1 000 milliards. On parle donc de 4 billions de dollars en termes de mauvaises dettes, de mauvaises créances de la part des banques.
Monsieur Obama a déjà imprimé des billions de dollars, comme s'il était créditiste. Il est en train de faire le channeling de Camil Samson. On imprime de l'argent allègrement, et vous êtes quand même certain que cet argent aura un effet sur le marché et qu'on ne vivra pas le même genre d'inflation qu'on a vécue dans la foulée de la guerre du Vietnam.
Rappelons que le prix de la guerre du Vietnam, outre le prix en matériel et en vies humaines, a été une inflation terrible parce qu'il fallait rembourser les coûts de cette guerre. On a déjà dépensé des billions de dollars en Irak et en Afghanistan qu'il faudra rembourser tôt ou tard en imprimant de l'argent.
Rassurez-moi en me disant que ce n'est pas avec de l'inflation zimbabwéenne qu'on va rembourser les billions de dollars en question.
Premièrement, vous avez raison. C'est absolument préférable, dans le moment, d'avoir un certain degré de stabilité. Avec notre engagement conditionnel, je crois que nous l'avons fourni en partie. Toutefois, c'est un engagement conditionnel, et les conditions sont les perspectives d'inflation au Canada. C'est clair.
Deuxièmement, en ce qui concerne les tendances inflationnistes aux États-Unis et dans le monde, je voudrais souligner qu'il y a présentement des pressions désinflationnistes mondiales. La grande différence entre aujourd'hui et les années 1960 aux États-Unis — la période du Vietnam, etc. — est que la croissance mondiale est très faible. Elle sera probablement négative en 2009, et en 2010, selon la Banque du Canada, elle sera de 2,2 p. 100 à l'échelle mondiale. Le taux de croissance potentielle à l'échelle mondiale est probablement d'à peu près 3,5 p. 100. Il y a donc un écart qui continuera d'augmenter l'année prochaine. Les pressions désinflationnistes pourraient persister pendant un certain temps.
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Je vais partir sur une autre piste, car je ne suis pas certain que nous aurons droit à un deuxième tour. Je vais maintenant aborder un sujet légèrement différent qui concerne le suivi de l'argent placé dans des abris fiscaux.
[Français]
Je parle des paradis fiscaux.
[Traduction]
Je veux parler des paradis fiscaux.
Il y a certaines constantes dans la théorie de la réglementation. La première est que nous avons toujours un peu de retard sur les gens que nous essayons de soumettre à des règles. La deuxième est que les gens restent souvent dans le même domaine et qu'ils ont donc tendance à voir les choses de la même façon. Si les gens ont l'habitude des paradis fiscaux et si cela a toujours fait partie de leur vie, lorsqu'ils se retrouvent dans le secteur public pour s'occuper de la réglementation, ils vous disent que c'est quelque chose de normal.
Cela devrait-il faire partie de la solution pour nous sortir de cette situation? Nous allons chercher à restructurer certaines choses comme les pensions. Nous avons eu des audiences assez intéressantes à ce sujet aujourd'hui. En tant que parlementaires, nous avons beaucoup de travail à faire pour mettre en place les structures voulues pour que les choses reposes sur des bases plus solides la prochaine fois. Nous devons nous dissocier des gens comme Milton Friedman qui nous ont dit de cesser de nous inquiéter, que nous ne pouvons pas comprendre de toute façon. Apparemment, personne n'a compris ou du moins, n'a pas tout compris.
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Merci, monsieur le président.
Merci, gouverneur. Merci, sous-gouverneur. Après les interventions de M. McCallum et M. Mulcair, je me sens libéré de l'obligation de dire quelque chose de gentil à votre sujet.
Je voudrais faire suite à ce qui a été dit quant au fait que vous jouez un rôle macroprudentiel dans le système bancaire, que vous allez passer du rôle de banquier central à celui de superbanquier, et du conflit potentiel entre votre fonction première, qui est une fonction monétaire, et cet autre rôle selon lequel vous laisserez la partie prudentielle au BSIF, mais vous superviserez le système financier sur tous les autres plans, particulièrement les institutions sous réglementation fédérale.
L'analogie qui me vient à l'esprit, et qui n'est pas de moi, est le regroupement du ministère de l'Environnement et du ministère de l'Énergie en un seul et même ministère. Les problèmes ne sont pas toujours les mêmes et les solutions politiques non plus. Votre enthousiasme vis-à-vis de l'assouplissement quantitatif, par exemple, qui semble consister à injecter de l'argent dans le système en achetant des actifs ayant divers degrés de toxicité, a pour effet d'accroître la masse monétaire et risque donc d'augmenter l'inflation alors que la solution monétaire ou politique serait peut-être de maintenir l'inflation dans une certaine fourchette ou de la maîtriser. Je sais qu'en réponse à M. Mulcair vous avez dit quelque chose à ce sujet, mais vous n'avez pas répondu à cette question en ce qui concerne votre désir apparent de jouer un rôle macroprudentiel dans le système financier.
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Très bien. Je suppose que c'était suivi d'un point d'interrogation.
Je dirais d'abord que les leaders du G20 ont convenu, à Londres, de l'importance d'une approche macroprudentielle de la réglementation. C'est donc un objectif déclaré de la part de l'ensemble des grandes puissances économiques mondiales.
La question est de savoir comment procéder. Comme vous le dites fort justement, les différents organismes ont des points de vue différents et j'ajouterais qu'il y a différentes façons de mettre cela en place d'un pays à l'autre. Cela dépend de l'histoire de votre réglementation. Cela dépend de la structure de votre système financier. Au Canada, je crois que nous avons une coopération extrêmement efficace entre les organismes de réglementation fédéraux — je compte parmi eux le ministère des Finances dans l'exercice de ses responsabilités et bien entendu le BSIF, la SADC et l'ACFC — et que cela permet d'envisager certaines solutions.
Il faut probablement, d'abord et avant tout, déterminer les instruments et mécanismes précis permettant de mettre les règles en place.
Je dirais, sans relever vos observations quant à mes aspirations, que ce que la banque peut apporter à ces discussions, c'est une perspective macro. Quand vous examinez en quoi consiste la réglementation macroprudentielle ou la surveillance macroprudentielle, il s'agit de voir à partir de quel moment les règlements ou les comportements sont alimentés par les perspectives macroéconomiques et le cycle économique et contribuent à exacerber ces cycles.
Nous constatons certainement que le fait de ne pas avoir tenu compte de ces problèmes dans les pays du monde qui sont nos partenaires a des conséquences très négatives et nous ne voulons pas nous placer dans cette situation à l'avenir.
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Merci, monsieur le président.
Dans le même ordre d'idées, monsieur Carney, quelques années plus tôt, personne n'avait vu venir la crise actuelle.
M. Duguay a dit au Comité des finances, en réponse à une question que je lui avais posée à savoir si la Banque du Canada avait lancé des avertissements relativement à la toxicité des papiers commerciaux, que oui, cela avait été fait dans votre revue financière, en 2005.
Actuellement, c'est certain qu'à peu près tout le monde dans le domaine financier travaille dans le but de sortir de cette crise le plus rapidement possible. Cependant, à la lumière des expériences passées, pensez-vous qu'il y a quelque chose que vous auriez pu ou dû faire, en vertu du pouvoir que détient la Banque du Canada, et que vous n'avez pas fait? Si oui, allez-vous corriger le tir afin d'essayer d'éviter qu'une crise comme celle que l'on traverse présentement se produise de nouveau dans l'avenir?
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J'aurais deux choses à dire à ce sujet.
Premièrement, comme l'a mentionné M. Duguay, la banque a averti des problèmes que posaient les papiers commerciaux canadiens adossés à des actifs en 2005 et en 2007, je crois. Elle l'a fait clairement à deux reprises, je pense.
La deuxième question portait sur ce que nous aurions pu faire de plus pour résoudre ce problème. Je dirais d'abord qu'en ce qui concerne la crise globale, comme l'a mentionné M. McKay, nous n'avons pas eu, au Canada, de crise autogénérée au-delà des PCAA non bancaires. Ce n'est donc pas la même chose.
Toutefois, si vous examinez quel est le rôle de la banque telle qu'elle est constituée actuellement, la banque peut faire des analyses, lancer des exhortations en privé et en public pour que les autres s'ajustent si nous croyons qu'il y a des problèmes, et nous travaillons en collaboration étroite avec nos partenaires. Néanmoins, pour ce qui est des leviers directs au-delà de notre responsabilité de surveillance à l'égard du système de paiement, ce qui est important mais très technique, nous n'en avons pas et l'objectif de notre politique monétaire est très clairement un taux d'inflation de l'IPC de 2 p. 100.
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Merci, monsieur le président et merci, messieurs, de vous joindre à nous aujourd'hui.
Vous allez m'instruire un peu. En lisant votre rapport, aux pages 12 et 13, il est question de la production potentielle de l'économie. Je suis en train de lire la phrase où il est dit « la productivité tendancielle du travail est surtout liée à la quantité de capital par travailleur » — ce qui est sans doute mesurable, je pense — « et au rythme du progrès technique ». Je ne vois pas comment vous pouvez le mesurer. On peut lire que la production potentielle et la croissance potentielle vont se redresser graduellement en 2009, 2010 et 2011. Puis, à la page suivante, il est question des pressions sur la capacité de l'économie.
Parlons-nous exactement de la même chose ou s'agit-il de deux concepts différents? N'ai-je pas compris la différence entre la production potentielle et la capacité économique?
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Carney et monsieur Jenkins.
Ma question porte surtout sur le fait que vous venez nous voir depuis deux ans et que tous les deux mois, la situation et vos priorités sont différentes. Si je me souviens bien, il y a sans doute un an ou un an et demi, nous avons parlé de la productivité et de ce que la banque allait faire pour l'augmenter.
Monsieur Jenkins, je pense que vous avez parlé, avec M. Dodge, des différents outils que vous aviez à votre disposition pour accroître la productivité et des différents aspects et domaines que vous alliez examiner. Il y a un an environ, nous avons parlé de la croissance et de la probabilité que nous serions en situation déficitaire ou non il y a six ou huit mois.
Quel objectif poursuivez-vous avec la politique monétaire que vous nous présentez aujourd'hui? Attaquons-nous… qu'essayons-nous de combattre? L'inflation? La déflation? Essayons-nous d'augmenter la croissance? Quel est le principal objectif de votre politique monétaire aujourd'hui? J'entends toutes sortes de choses différentes. Je sais qu'il n'est pas facile de répondre à cette question, mais essayez de faire de votre mieux.
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Je préciserais simplement que l'assouplissement quantitatif consiste, d'abord et avant tout, en l'achat d'actifs qui peuvent être des obligations du gouvernement ou des titres privés. Pour être quantitatifs, ces achats seront financés par la création d'une nouvelle réserve de la banque centrale. Cet argent servira à acheter des actifs.
Il pourrait très bien s'agir d'obligations du gouvernement, si nous décidions de le faire. Nous le ferions seulement si c'était nécessaire pour atteindre la cible d'inflation visée. La décision de la banque tiendrait alors compte de ce qui serait le plus rentable pour améliorer les conditions financières globales.
Par conséquent, si nous comparaissions devant votre comité, le milieu des affaires ou l'ensemble des Canadiens et qu'on nous demandait: « Ce taux a baissé tandis que cet autre a augmenté, alors quel est l'impact net? », la réponse serait que notre but est de produire l'impact le plus important sur l'ensemble des conditions financières.
Pour ce qui est des bases de comparaison, je vais vous en nommer deux. Premièrement, il y a un petit groupe de banques centrales incluant notamment la Riskbank, en Suède et la Norges Bank, en Norvège, qui annoncent leurs intentions chaque fois qu'elles prennent une décision à l'égard de leur taux de financement à un jour.
Il y a des exemples de banques centrales qui le font. Leur raisonnement est que pour que chacune de leurs décisions ait un impact général, il faut que l'ensemble du marché sache à quoi s'en tenir. C'est, si vous voulez, le summum de la transparence.
D'autre part, pour répondre à votre question, prenons ce qui s'est passé au début de cette décennie quand on s'est inquiété d'un risque de pressions déflationnistes aux États-Unis. La Federal Reserve a indiqué verbalement que les taux resteraient bas pendant très longtemps. Diverses déclarations ont été faites pour indiquer au marché quels seraient les taux afin de dissiper toute ambiguïté, notamment quant à la stratégie de sortie, diraient certains.
La banque et le conseil de direction — ses six membres, M. Jenkins et moi ainsi que les quatre sous-gouverneurs — avons décidé que la meilleure chose pour les marchés était de bien clarifier les choses étant donné que le taux frise le zéro et que nous sommes allés aussi bas que nous le pouvions??.
Pour répondre à la dernière partie de votre question au sujet des risques, je dirais que le principal problème est que les gens commencent à confondre un engagement conditionnel avec une garantie. Ce n'est pas une garantie. Cela dépend des perspectives d'inflation. Nous estimons que le maintien des taux à ce niveau jusqu'en juin 2010 correspond à notre cible d'inflation. J'attirerais votre attention sur nos prévisions à l'égard de l'inflation à la page 24 où nous présentons les probabilités concernant les perspectives d'inflation.
Par conséquent, si vous êtes optimiste à l'égard de l'inflation ou des perspectives, vous pouvez voir quelle est la probabilité relative que nous ayons à modifier cet engagement pour atteindre la cible plus tôt.
Je voudrais parler brièvement des actifs toxiques. J'aimerais savoir comment vous définissez un actif toxique. Quels sont les repères? Quels sont les paramètres?
Bien entendu, il n'y a pas de définition universelle, mais si nous voulons que les gouvernements interviennent, que ce soit ou non en achetant une participation dans quelque chose, il doit y avoir un moyen de savoir ce qui constitue un actif toxique. Comment pourrait-on le définir afin que nous puissions, en tant que parlementaires, décider d'acquérir ou non un actif toxique?
Je pense que tous les partis sont en faveur de votre baisse du taux d'intérêt pendant plus d'un an. C'est rare.
Je voudrais poursuivre sur le sujet de l'inflation. Vous connaissez la vieille métaphore du bol de punch selon laquelle la banque centrale a pour rôle de retirer le bol de punch avant que la fête ne commence. En période de crise, je pense que son rôle est d'obliger tout le monde à boire dans ce bol de punch et de le retirer rapidement quand le risque d'inflation apparaît.
Je suis d'accord avec vous, avec votre point de vue, et non pas de celui de M. Flaherty. Tant que notre production est en dessous de son potentiel et que nous avons un taux de chômage élevé, je ne crois pas que nous aurons un problème d'inflation. C'est à peu près ce que vous dites. Mais je crois aussi que le fait de retirer cette munition monétaire juste au bon moment, ni trop ni trop peu, ni trop tôt ni trop tard, est une manoeuvre sans précédent et très délicate. Par conséquent, vous vous aventurez dans un territoire inconnu, d'une certaine façon, ou du moins qui n'a pas été parcouru depuis longtemps, s'il l'a jamais été.
Je voudrais savoir comment vous envisagez une opération aussi délicate?
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Merci pour cette question.
Nous envisageons vraiment d'appliquer notre cadre de ciblage de l'inflation. Nous examinons les effets de la politique monétaire qui se manifestent généralement de quatre à six trimestres plus tard. Nous examinons la différence entre le potentiel de l'économie et son niveau de production. À cet égard, je crois très important, monsieur McCallum, de porter un jugement rigoureux au sujet du potentiel économique, car une des erreurs qu'on peut faire dans ce genre de situations, c'est de surestimer la limite de vitesse de l'économie quand il y a une grave récession.
En réalité, malheureusement, pendant ce processus d'ajustement, la capacité diminue, les investissements sont retardés et la productivité est plus faible qu'elle ne le serait autrement. Ce qui veut dire que les pressions inflationnistes risquent de revenir plus tôt. Nous avons fait une important révision de notre potentiel de production dans nos dernières prévisions, comme l'a mentionné M. Wallace.
De plus, nous nous sommes engagés à ce que, compte tenu de l'importance relative de nos projections relatives à l'inflation et du lien avec notre engagement conditionnel, nous réexaminerons également la situation dans notre rapport d'octobre sur la politique monétaire.
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Merci, monsieur le président. Merci, monsieur Carney et monsieur Jenkins.
Monsieur Carney, dans le rapport que vous nous avez présenté tout à l'heure, vous avez mentionné que lorsque l'économie canadienne commencera à se rétablir, espérons-le plus tard cette année et au début de l'année prochaine, nous devrions voir la fin de l'ajustement des stocks dans le secteur du logement au Canada et aux États-Unis. Je pense qu'il y a eu des bonnes nouvelles récemment, aux États-Unis, à cet égard. J'ai passé un certain temps, hier, avec des représentants de la Chambre d'immeuble de Mississauga, la ville que je représente. Ils me disent que les prix de l'immobilier se stabilisent à Mississauga et que les ventes sont en hausse.
Constatez-vous le même phénomène dans l'ensemble du Canada? Peut-être pourriez-vous également nous parler de la situation aux États-Unis.
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Je vais commencer brièvement. Nous nous attendons à ce qu'il y ait cette année, sur le marché résidentiel canadien, un ajustement de prix relativement important frisant les 10 p. 100. Le phénomène a commencé et se concentre surtout dans l'ouest du pays. La situation a beaucoup progressé là-bas. Nous avons constaté un ralentissement des mises en chantier au Canada, à tel point que leur nombre est en dessous… À l'heure actuelle, le taux de formation des ménages est d'environ 170 000 à 175 000. Il y a donc un ajustement des stocks qui se fait au Canada.
Après avoir surpassé la tendance, le nombre de mises en chantiers est tombé nettement en dessous de la tendance, en dessous de 600 000 logements. Quand on pense à l'écart qui a commencé à se creuser, malgré les faillites et les difficultés de financement… Maintenant que les autorités américaines commencent à sérieusement abaisser les taux d'intérêt hypothécaires — j'ai mentionné 3 p. 100 tout à l'heure et elles essaient de les faire baisser en dessous de 5 p. 100 — elles remportent un certain succès. À notre avis, cela va commencer à se répercuter de plus en plus sur l'achat des maisons aux États-Unis jusqu'en 2010, ce qui va stabiliser le marché.
Je voudrais dire une chose qu'il est facile d'oublier au sujet des États-Unis. Il faut d'abord que le nombre de mises en chantier cesse de tomber. Cela fait un certain temps que ce phénomène diminue de un point de pourcentage le taux de croissance des États-Unis. Nous en sommes maintenant à des niveaux extraordinairement bas et nous allons commencer à constater un ajustement. Nous nous attendons également à un ajustement dans le secteur automobile.
J'attirerais l'attention des membres du comité sur la page 21 du rapport, le graphique 17 où la ligne bleue représente le PIB des États-Unis; la partie en pointillé correspond à nos prévisions. La ligne verte, qui représente l'activité économique aux États-Unis pondérée par les échanges est importante. Pour les secteurs de l'économie américaine qui sont importants pour le Canada, vous constatez un écart très marqué de 2007 à 2008 et vous voyez ensuite nos projections à l'égard de certains ajustements de stocks. La croissance n'augmente pas beaucoup aux États-Unis, mais l'activité dans le secteur du logement et de l'automobile commence à se rééquilibrer, ce qui se répercute sur le Canada. C'est une de raisons pour lesquelles nous prévoyons une croissance de 2,5 p. 100 au Canada l'année prochaine plutôt qu'un niveau plus bas.
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On va poursuivre sur le thème abordé dans votre dernière phrase, parce que c'est le sujet que je voulais soulever à la suite de la conversation que nous avons eue plus tôt, monsieur le président:
adjusting policy.
[Traduction]
Vous exercez un contrôle important sur la politique. Vous avez été très généreux avec nous aujourd'hui, car vous avez abordé à peu près tous les sujets allant de l'intervention du gouvernement dans le secteur automobile à votre propre expérience. Comme nous examinons certains des changements politiques qu'il faudra apporter au cours des deux prochaines années pour éviter les problèmes du passé, quel rôle voyez-vous pour la Banque du Canada?
Je vais vous dire une chose. Il semble qu'il y ait toujours quelqu'un qui a vu ce qui se passait. Que ce soit les personnes qui ont parlé de ce que Madoff s'apprêtait à faire à New York… et certains ont vu clair au sujet de Madoff, mais n'ont trouvé personne à qui parler.
Nous avons eu une conversation absolument kafkaïesque avec les représentants de Dominion Bond Rating Service quand ils ont expliqué comment ils avaient pu évaluer comme ils l'ont fait les PCAA non bancaires. C'était une expérience extraordinaire. Il y a donc des gens qui ont vu venir les choses.
Vous jouez un rôle crucial pour nous dans tout ce processus, car vous avec un point de vue qui vous permet de voir beaucoup plus loin que la plupart des gens et beaucoup plus profondément. Quel rôle la Banque du Canada va-t-elle jouer pour redresser la situation?
J'ai déjà donné quelques exemples de ce que nous allons examiner au cours des prochaines semaines, et cela va des cartes de crédit aux pensions. L'important ici c'est, bien sûr, la liquidité ou la disponibilité du crédit. Comment faire en sorte, avec les structures que nous mettons en place, de ne pas aller dans la direction opposée et créer des entraves inutiles?
Je vais me permettre d'émettre une opinion. Suite à l'affaire Enron et à quelques autres débâcles, certaines des règles comptables qui ont été inventées aux États-Unis pour bâtir un mur de protection ont finalement eu des effets pires que le mal auquel elles étaient censées remédier.
Comment éviter certains de ces pièges? Quels sont les pistes de solution? Et comment la Banque du Canada peut-elle nous aider à cet égard?
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C'est une question extrêmement importante.
Je vais vous donner, dans un instant, quelques exemples de facteurs à examiner, mais je dirais d'abord, en réponse à une question antérieure, que nous pouvons faire des analyses et des recherches et que nous avons ensuite la responsabilité de rendre publiques ces analyses, de façon constructive, pour que ceux qui sont chargés de la réglementation ou de la législation puissent prendre des décisions éclairées.
À cet égard, je pense qu'il nous incombe, par l'entremise de notre rapport sur la stabilité financière, de nos discours et d'autres mécanismes et conférences, d'aborder avec vous les questions qui, selon nous, se situent au niveau macro; elles auront un impact sur l'économie.
Quelles sont certaines de ces questions pour le moment? L'une d'elles est la procyclicalité des normes de capital. Nous l'avons vu s'intensifier. Nous avons assisté à un certain redressement en ce sens que les institutions ont des coussins de capitaux qu'elles ne sont pas toujours en mesure d'utiliser. Autrement dit, elles ne peuvent pas toujours augmenter leurs prêts autant qu'elles pourraient le faire autrement, parce que le plancher ne se situe pas au minimum, mais à un niveau plus élevé.
Il y a divers aspects qui sont techniques, mais importants en ce qui concerne le traitement des marchés et la mesure du risque dans les marchés, qui contribue à cette procyclicalité. En période de récession, les entreprises conservent davantage de capitaux ou s'efforcent d'en conserver davantage qu'elles ne le feraient autrement, ce qui aggrave la récession. C'est un exemple.
Un deuxième facteur extrêmement important, que vous avez mentionné indirectement, est le marché de la titrisation. Il est de la plus haute importance pour le marché mondial que la titrisation soit bien relancée. Étant donné le problème de crédibilité des cotations — les agences essaient d'y remédier, mais cela reste encore problématique — il faut envisager sérieusement des possibilités d'amélioration du crédit ou d'autres mécanismes, y compris la transparence, pour relancer la titrisation de toute urgence. C'est moins nécessaire au Canada, mais ça l'est au niveau mondial et il n'y a aucune raison pour laquelle le Canada ne devrait pas jouer un rôle de chef de file dans ce domaine, car cela servirait les intérêts de notre système.
Quant au troisième facteur, que nous examinons en détail, il s'agit des marchés de financement classiques, des opérations de pension. Par exemple, comment assurez-vous…? Il s'agit notamment de voir quel est notre rôle en tant que fournisseur de liquidités dans ces marchés. Mais cela soulève également des questions de réglementation, de fiscalité et autres questions comptables. Il faut faire en sorte que ces marchés restent ouverts, car c'est ainsi qu'on évite la catastrophe.
M. Jenkins peut parler longuement et de façon très compétente des opérations de pension et des questions de comptabilité. Ce sont des problèmes évidents.
La dernière chose, et je terminerai là-dessus, est qu'en ce qui concerne notre rôle, comme je l'ai dit, nous faisons des analyses et nous soulignons les problèmes que nous jugeons les plus importants. Nous nous faisons un plaisir de partager nos analyses. Nous n'avons aucune hésitation à le faire. Nous avons aussi pour fonction de travailler efficacement avec les autres organismes, tant fédéraux que provinciaux, pour veiller à ce qu'ils tiennent compte des changements.
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Merci, monsieur le président.
À cette réunion du G20, on s'est engagé à resserrer la réglementation et la surveillance sur les institutions, les instruments et les marchés financiers, y compris les fonds de couverture et à se pencher sur le risque macroprudentiel. On reconnaît généralement, je pense, que la principale lacune de notre architecture financière est l'absence d'un organisme de réglementation des valeurs mobilières et il faut reconnaître que le gouvernement a fait certains progrès sur ce front.
Si nous ne créons pas un organisme de réglementation des valeurs mobilières, ce rôle macroprudentiel ne deviendra-t-il pas un moyen détourné d'exercer un certain contrôle sur ces fonds de couverture et ces institutions, instruments et marchés financiers et ce genre de chose?
Monsieur Carney, je voudrais faire suite à votre réponse à M. Laforest quant à la différence dans les prévisions de croissance économique entre aujourd'hui et la dernière fois que vous êtes venu. Vous avez dit que la reprise allait se stabiliser et vous avez mentionné le prix des produits de base. Si je me souviens bien, dans votre dernière présentation, vous avez déclaré qu'une augmentation du prix des produits de base à long terme était un des facteurs de reprise. Vous nous avez demandé de nous reporter à la page 27 concernant la demande américaine d'exportations canadiennes. Je me demande dans quelle mesure le prix des produits de base est inclus dans ces exportations.
À propos de la deuxième raison pour laquelle la reprise est retardée ou la récession s'aggrave, vous avez parlé du caractère plus synchronisé du ralentissement mondial. Vous avez également mentionné des mesures politiques moins ambitieuses de la part des autres économies industrielles, y compris les États-Unis et l'Europe. Je sais qu'il est assez délicat de parler de mesures prises dans les autres pays et par les autres banques centrales, mais j'aimerais que vous nous donniez votre opinion au sujet du prix des produits de base et des mesures prises dans les autres pays.
Je ne sais pas dans quelle mesure la banque prévoit les prix des produits de base, mais celui du gaz naturel est en augmentation, par exemple. Il est intéressant de mentionner que pour l'Alberta, le prix du gaz naturel est plus important que le prix du pétrole.
Donc, vous pourriez peut-être nous parler du prix des produits de base et des mesures prises dans les autres pays, surtout au niveau de la politique monétaire.
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Merci pour cette question.
Nous faisons deux choses en ce qui concerne les produits de base. Nous faisons la distinction entre les produits de base énergétiques et non énergétiques. Pour les produits de base énergétiques, nos prévisions portent sur les prix du gaz naturel et du pétrole. Vous avez parfaitement raison de dire que le gaz naturel est beaucoup plus important que le pétrole pour la croissance du Canada et l'activité en Alberta, du moins pour le moment. Comme vous le savez, le prix du gaz naturel a nettement baissé depuis janvier, de près de 17 ou 18 p. 100. Cela fait partie de la dégradation des termes de l'échange.
En deuxième lieu, nous faisons des prévisions à l'égard du prix des produits de base non énergétiques, à partir de nos perspectives mondiales. Nos perspectives mondiales sont moins optimistes dans ce rapport que dans le dernier. Il y a donc un ralentissement des perspectives mondiales à l'égard des produits de base.
Si vous voulez un résumé très simple à ce sujet, consultez le tableau 3, à la page 19, portant sur le produit intérieur brut réel, qui est un moyen de regrouper les divers éléments, plus d'autres facteurs. Il y a une nette réduction des perspectives pour 2009 et 2010. Par conséquent, il y a là un effet sur le revenu qui a des conséquences.
Le ralentissement brutal du premier trimestre, qui correspond à une contraction annualisée de 7,3 p. 100 au Canada, et le fléchissement légèrement plus prononcé du quatrième trimestre par rapport à ce que nous avions prévu, ont pour conséquence que les entreprises ont des inventaires beaucoup plus importants qu'elles ne le souhaitaient. Cela contribue à une partie du ralentissement de la croissance aux deuxième et troisième trimestres, car les entreprises ne produisent pas autant et doivent liquider leurs inventaires. Cela a des conséquences à court terme. Ces facteurs sont donc importants.
Pour ce qui est des exportations des produits manufacturés vers les États-Unis, ma réponse à la question précédente reste valide.
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Ah! les moins ambitieuses. Il y a deux aspects à considérer. La politique financière mondiale a bougé moins rapidement et a été moins ambitieuse que la cible de 2 p. 100 du G20. Les autres pays vont maintenant sans doute y arriver, en tout cas, ils en ont annoncé l'intention. Toutefois, la mise en oeuvre est importante et elle est différée jusqu'en 2010 au lieu d'avoir lieu plus tôt.
L'aspect le plus important est que les efforts déployés pour stabiliser les systèmes bancaires ont pris plus de temps. La mise en oeuvre des mesures a été moins importante que prévu aux États-Unis. La dernière fois que nous sommes venus ici, c'était le jour de l'annonce d'un élément du plan plutôt que de l'ensemble de ce plan aux États-Unis. Cela a eu certaines répercussions.
Nous avons eu beaucoup de discussions avec nos collègues des États-Unis et d'Europe, y compris le week-end dernier où nous avons examiné certaines questions en détail. Cela nous rassure, car la volonté d'agir est certainement présente et des plans d'action sont en place. La mise en oeuvre pose de sérieuses difficultés, mais elles sont proportionnelles à l'importance de la situation.
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Merci, monsieur Menzies.
J'aurais plusieurs choses à dire. D'abord, pour que ce soit parfaitement clair, le chiffre de 4,1 billions de dollars est celui qu'a estimé le FMI et sur lequel nous ne sommes pas forcément d'accord. Mais je dirais deux choses sans essayer de finasser. Si ces actifs sont qualifiés de « toxiques », c'est en partie parce que leur présence dérange ou empoisonne la direction actuelle des institutions qui les détiennent. La direction doit consacrer une partie disproportionnée de son temps à ces actifs au lieu de gérer l'institution en fonction de l'avenir, en se concentrant sur les nouveaux prêts et les nouvelles activités auxquelles elle pourrait se livrer.
Voilà pourquoi en général, en cas de crise bancaire — et il y a eu une bonne centaine de crises bancaires au cours des 30 dernières années, dans le monde, malheureusement — la stratégie préférée consiste à débarrasser de ces actifs les institutions qui vont poursuivre leurs activités, car on a besoin de banques prêtes à accorder du financement au lieu de passer la majeure partie de leur temps à essayer de récupérer du crédit défaillant.
Donc, où vont ces actifs? Il y a diverses stratégies. Les différents pays adoptent des stratégies différentes et ils peuvent soit acheter ces actifs, soit les transférer dans un autre instrument de façon à ce que le contribuable récupère à la fois l'aspect positif et l'aspect négatif des actifs en question. C'est ce que certains pays font et feront. Il est possible de le faire au moyen d'une nationalisation et d'une séparation. Il est possible de le faire en vendant ou en acquérant ces actifs en échange de nouveaux capitaux. Il est possible de le faire au moyen d'un régime d'assurance. Il y a diverses façons de procéder et les différents pays choisiront des méthodes différentes.
Selon le plan des États-Unis, les institutions pourront vendre ces actifs à des participants du marché à qui les autorités publiques américaines auront accordé un financement pour stimuler la vente de ces actifs. Cela vaut autant pour les titres que pour les actifs toxiques et les prêts défaillants dans le cadre de certains programmes extrêmement importants. C'est un élément de ce programme de stabilisation que nous allons surveiller de très près.
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C'est une question extrêmement importante.
J'insisterais d'abord sur le fait que nous l'utiliserons uniquement si c'est nécessaire.
Deuxièmement, l'étape importante est l'achat des actifs et les répercussions de ces achats sur l'ensemble de la situation financière, que ce soit les obligations du gouvernement ou certains autres titres, pour améliorer le coût du crédit et l'accès au crédit pour les entreprises et les ménages du pays.
En même temps… j'en arrive à votre question.
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Non, et nous n'achèterons pas non plus… J'aurais dû le préciser. Une question a été posée tout à l'heure au sujet des titres. Ce n'est pas le but visé.
Toutefois, comme vous l'avez dit, la création d'une nouvelle réserve de la banque centrale en fait partie. Par conséquent, la première chose est d'acheter des titres, d'améliorer l'ensemble des conditions financières, d'améliorer la production et d'atteindre la cible d'inflation. Le deuxième aspect est toutefois que ce sera financé par la création de nouveaux fonds de la banque centrale. Selon nous, cela aurait un impact moins important sur la production et l'inflation. Il suffit de regarder ce qui s'est passé au Japon dans les années 1990 pour en avoir un bon exemple. L'objectif, ou du moins le principal objectif de la politique nippone était la création d'argent — le côté passif du bilan de la banque centrale — plutôt que l'achat d'actifs, qui représente le côté actif du bilan.
Nous devons être prudents, délibérés et méfiants à l'égard de cette deuxième voie, car quand la confiance commence à se rétablir, quand la croissance commence à reprendre… Il y a toujours un lien entre l'argent de réserve, de l'argent très limité et les agrégats de la monnaie au sens large ainsi que la demande nominale, dans une économie. Quand les taux d'intérêt frisent le zéro, ce lien est très, très faible. Toutefois, quand la reprise s'amorce, le lien se raffermit. Vous avez donc besoin d'une stratégie de sortie. Vous avez besoin d'un moyen de ralentir les choses et vous devez poursuivre cette stratégie de façon disciplinée.
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Merci, monsieur le président.
J'apprécie vraiment le temps que vous nous consacrez aujourd'hui, monsieur Carney et monsieur Jenkins. Ce n'est pas souvent que vous restez avec nous pendant deux heures après un discours de cinq minutes. C'est une bonne chose, car cela nous laisse beaucoup de temps pour vous poser des questions.
Pour revenir là où j'en étais au sujet des pressions prévues sur la capacité économique, dans votre déclaration, des questions de main-d'oeuvre et je vais donc me concentrer sur ce sujet. Si je comprends bien, vous dites que les pénuries de main-d'oeuvre que nous avons connues et que vous avez examinées dans vos enquêtes, ont maintenant disparu. Je ne sais pas si vous voulez dire qu'elles ont disparu ou qu'elles ont diminué. Y a-t-il encore des pénuries de main-d'oeuvre? Est-ce encore ce qu'on vous dit? Voilà ma première question.
Ensuite, quel problème cela représente-t-il pour nous du point de vue de la capacité?
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Le problème que pose la valeur plancher du taux directeur est qu'il y a divers marchés monétaires ou marchés financiers à court terme qui auraient beaucoup de difficulté à fonctionner à ce niveau étant donné les coûts de transaction qui y sont associés et le rendement net effectif de ces transactions… Dès que les coûts de transaction sont positifs, si le rendement net se rapproche de zéro, ces marchés ne peuvent plus fonctionner. Certains frais sont associés aux fonds du marché monétaire, donc, il s'agit de voir quel est le rendement sur les titres sous-jacents et s'ils couvrent ces frais.
Nous avons longuement réfléchi à la valeur plancher du taux directeur au Canada. Nous avons jugé — et je pense que cela a été validé — que nous pourrions ramener le taux à 25 points de base et le maintenir à ce niveau afin que les Canadiens obtiennent tous les stimuli dont ils ont besoin compte tenu de la situation, tout en permettant aux marchés de continuer à bien fonctionner. Tel a été le cas au Canada.
Ce niveau diffère d'un système financier à l'autre. Au Royaume-Uni, on a estimé que la valeur plancher se situe à 0,5 p. 100. Aux États-Unis, elle oscille entre zéro et 0,25 p. 100. Au Japon, on l'a fait descendre jusqu'à 0,10 p. 100.
Cela varie donc d'une économie ou d'un système à l'autre, mais nous avons tenu compte de divers marchés financiers et voilà pourquoi nous nous sommes arrêtés là où nous l'avons fait.
:
Je dispose de quatre minutes environ? D'accord.
[Traduction]
Je voudrais d'abord profiter de l'occasion pour vous remercier. Vous nous avez beaucoup éclairés aujourd'hui.
Je voudrais passer un peu plus de temps avec vous sur la question des paradis fiscaux. Vous avez mentionné qu'à la dernière réunion du G20 cette question a été abordée. Je sais que le président Sarkozy est le seul à avoir beaucoup insisté sur ce dossier. À une conférence à laquelle j'ai assisté à Paris, en janvier, il a tenu un discours très énergique à ce sujet, de même qu'Angela Merkel. C'était une expérience fascinante.
Je vais vous raconter une anecdote. Le chef du Parti socialiste néerlandais a raconté une anecdote très amusante au sujet de son accession à la tête de son parti, tout récemment. Il a décidé qu'il allait moderniser son parti en débarrassant sa constitution de certaines dispositions très anciennes. La première chose qu'il a voulu faire, il y a deux ans, à son arrivée, a été de se débarrasser de l'idée de nationaliser les banques. Bien entendu, deux ans plus tard, le principe est revenu à la mode. Par conséquent, il arrive parfois que l'histoire nous rattrape.
En ce qui concerne les paradis fiscaux, il est très préoccupant qu'une bonne partie de l'argent dont on pourrait disposer pour faire des choses productives ait disparu dans ces puits sans fond. Il n'a jamais été soumis à l'impôt et n'a jamais été suffisamment comptabilisé.
J'ai déjà mentionné Madoff, en passant, et certaines personnes avaient vu clair. À mon avis, une des surprises que nous réserve Madoff est la suivante. Ce sera comme pour les coffres de sécurité de la Banque Lloyds, à Londres, après le vol qui a eu lieu il y a une vingtaine d'années. Rares sont les gens qui ont révélé ce que contenaient leurs coffres. J'ai l'impression que c'est ce qui pourrait se passer également dans le cas de Madoff. Il n'y a pas beaucoup de gens qui se souviendront comment cet argent est arrivé là, d'où il venait et où il était censé aller.
Plus sérieusement, je pense que les législateurs, les organismes de réglementation et les organismes d'application de la loi doivent se pencher sur ce problème. Si nous sommes censés avoir un système fermé dans lequel nous pouvons comptabiliser l'argent, l'imposer et le rendre productif, s'il est possible d'en siphonner une bonne partie et de le conserver dans un coffre, de le retracer. Est-ce idéaliste? Est-ce réaliste? Pensez-vous qu'il faudrait aborder plus souvent le sujet aux réunions du G20 ou dans le cadre de comités comme le nôtre?
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, messieurs Carney et Jenkins. J'ai manqué votre présentation, car j'étais pris à la Chambre. Par contre, j'ai eu le temps de lire votre présentation.
À la fin de votre présentation, vous parlez de différents facteurs dont dépend la reprise et sur lesquels vous n'avez pas beaucoup d'influence. Avez-vous une préférence quant aux différentes mesures de relance économique qui pourraient être implantées par le gouvernement? Vous dites que si une impulsion additionnelle se révélait nécessaire, vous auriez d'autres moyens d'influencer les taux d'intérêt.
Préféreriez-vous que la reprise économique se fasse par ces différents facteurs? Pouvez-vous faire des recommandations au gouvernement sur différentes mesures de relance budgétaire, en gardant à l'esprit qu'il est sûrement plus productif de créer de l'activité économique au sein de la population que de devoir agir sur la politique monétaire, ce qui, selon moi, est un dernier recours face à un gouvernement qui n'a pas réussi à stimuler adéquatement l'économie?
:
Premièrement, je dois être prudent en ce qui concerne cette question parce que la prestation de conseils officiels au gouvernement à propos du budget ne relève pas de notre mandat.
Deuxièmement, les mesures budgétaires qui ont été prises par le Canada et les États-Unis sont un des facteurs qui expliquent la reprise canadienne. Ces mesures auront de plus en plus d'impact sur notre économie d'ici la fin de l'année, surtout en 2010 et surtout aux États-Unis.
À cause de la récession profonde au Canada et à l'échelle internationale, il est important de considérer des mesures qui pourraient augmenter la productivité de notre économie, comme nous venons d'en discuter avec M. Wallace. Je parle de mesures comme celles que contiennent le dernier budget fédéral et plusieurs budgets provinciaux qui pourront améliorer l'infrastructure de notre économie et avoir un grand impact sur l'économie et la productivité mondiales, ainsi que sur le prix des produits de base.
:
Merci, monsieur le président.
Bien entendu, ce qui est toujours constant, c'est le changement. Dans le monde d'aujourd'hui, je pense qu'aucun d'entre nous n'a encore assisté aux changements qui s'opèrent, sur les marchés, dans la politique économique ou dans la situation désastreuse à l'échelle mondiale, en tout cas certainement pas de mon vivant. Mais comment devons-nous réagir et dans quel délai?
Bien entendu, beaucoup de gens réclament, chaque semaine ou chaque mois, des initiatives budgétaires de grande envergure. Honnêtement, nous reconnaissons tous, je pense, que ce n'est pas faisable ou réalisable. Toutefois, les gouvernements doivent réagir et ils ne peuvent pas toujours attendre de le faire après coup. Nous ne pouvons pas nous contenter de présenter un budget une fois par an alors que la situation évolue de façon aussi spectaculaire.
Devriez-vous présenter vos renseignements et vos rapports sur la politique monétaire chaque semaine, chaque mois ou chaque trimestre? En conséquence, pour les grandes initiatives budgétaires ou les grands énoncés de la politique financière, quel échéancier suggérez-vous au gouvernement?
:
Pour ce qui est du
Rapport sur la politique monétaire ou de nos prévisions, je crois personnellement que le modèle actuel est sans doute le bon. Je comprends que vous souhaitez être informés plus souvent, mais cela représente beaucoup de travail. Lorsque les projections sont mises à jour quatre fois par an, elles sont de meilleure qualité, si vous voulez.
Cela dit, pendant la période intermédiaire, nous avons la responsabilité d'établir clairement si nos prévisions sont sur la bonne voie. Bien entendu, nos hypothèses sur lesquelles s'appuient nos prévisions doivent être bien claires.
En ce qui concerne les mesures gouvernementales, je laisse à votre comité le soin de conseiller le gouvernement. Nous examinerons les mesures du gouvernement et ajusterons la politique monétaire en conséquence. Nous traversons une période de grande incertitude et je peux vous garantir que nous ferons le nécessaire — mais pas plus — pour atteindre la cible d'inflation.