Lorsque la Fondation autochtone de guérison a été mise sur pied en 1998, elle avait pour principal objectif de briser le cycle de la violence physique et sexuelle associée à l'expérience des pensionnats indiens au Canada et d'améliorer le bien-être des Autochtones. J'aborderai aujourd'hui plus particulièrement la question des Inuits.
Les programmes de la FADG ont été conçus pour appuyer un processus de guérison holistique et communautaire à l'intention des survivants et de leur famille et pour répondre aux besoins particuliers des Inuits. Le travail était axé sur la collectivité. Les projets financés par la FADG ont été élaborés par des collectivités inuites. Le financement reposait sur la préparation communautaire, et, comme une telle préparation prend du temps, certains programmes commençaient tout juste à démarrer lorsque le financement de la FADG a pris fin le 31 mars.
La FADG a financé plus d'une trentaine de programmes communautaires dans les quatre régions inuites visées par des revendications territoriales, à savoir la région désignée des Inuvialuits, dans les Territoires du Nord-Ouest; le Nunavut; la région du Nunavik, dans le Nord du Québec; et la région de Nunatsiavut, dans le Nord du Labrador.
J'aimerais vous parler d'un de ces programmes appelé « Guérir ensemble grâce à nos valeurs et nos cérémonies traditionnelles ». Ce programme fournissait des ressources à 14 collectivités du Nunavut et était géré par la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavut. Ce programme a donné des résultats énormes. Comme il est mentionné dans le rapport d'évaluation de 2009 de la FADG, il a permis d'aider des parents et des enfants à mieux se comprendre les uns les autres. On explique d'ailleurs dans le rapport que nombre de survivants tentaient de trouver des réponses et des solutions aux traumatismes, à la détresse et au dysfonctionnement. Les ateliers organisés dans le cadre du programme leur ont permis d'acquérir les outils nécessaires pour composer avec ces problèmes.
Ces ateliers offraient un endroit sûr où les jeunes et les aînés pouvaient échanger et raconter leurs expériences, bien souvent pour la première fois. Il y avait des aînés qui n'avaient jamais raconté leurs expériences à des jeunes ou à qui que ce soit d'autre. Les programmes financés par la FADG offraient un milieu sûr, une occasion de parler de ses expériences et d'amorcer un processus de guérison.
Les Inuits qui ont participé à ces ateliers affirment qu'ils ont une vie plus saine et plus heureuse, mais nombre d'entre eux craignent que l'interruption du financement de la FADG entraîne une augmentation de la consommation de drogue et du taux de suicide chez les survivants. Si vous avez déjà voyagé dans l'Arctique, alors vous savez qu'il n'existe pas vraiment d'autres ressources en santé mentale. Le budget de 2010 du gouvernement fédéral a alloué environ 199 millions de dollars aux survivants des pensionnats indiens, et une partie de cet argent allait à Santé Canada pour qu'il renforce le Programme de soutien en santé pour la résolution des questions des pensionnats indiens, communément appelé le PSS.
Le PSS offre un soutien à la santé mentale et au mieux-être aux anciens élèves des pensionnats indiens et à leur famille, quel que soit leur statut ou lieu de résidence, mais seulement s'ils sont admissibles au Paiement d'expérience commune et qu'ils ont présenté une demande de règlement. Certains anciens élèves ne sont pas admissibles au Paiement d'expérience commune, notamment les Inuits vivant au Nunatsiavut. Cela signifie que le Nunatsiavut ne sera pas doté de l'infrastructure du PSS qui lui aurait permis d'aider les survivants dans le cadre de la Commission de vérité et de réconciliation.
Le PSS complémente les programmes offerts par la FADG et fournit des services à nombre d'Inuits voulant obtenir un soutien. Toutefois, les programmes gérés par la FADG étaient différents à quelques égards. D'abord, ils étaient axés sur la communauté, tandis que le PSS s'adresse à des personnes. Le financement de la FADG contribuait à mettre en place des ressources de guérison au sein des collectivités, tandis que le PSS fait appel à des conseillers qui viennent du sud. Lorsqu'ils veulent se prévaloir des services associés au PSS, les Inuits doivent composer un numéro 1-800 où les services sont uniquement en français et en anglais, ce qui limite considérablement l'accès pour les survivants dont la langue maternelle est l'inuktitut.
Comme le souligne le directeur exécutif du centre Tukisigiarvik d'Iqualuit, les Inuits qui souhaitent obtenir les services associés au PSS doivent téléphoner au coordonnateur régional du Nunavut, qui se trouve à Whitehorse, à trois fuseaux horaires de distance. Si on compare les deux modèles, on constate que la FADG offrait aux Autochtones des programmes qui complémentaient le PSS de Santé Canada.
Je crois qu'il y a de la place pour les deux modèles de prestation de services aux Inuits. Les résultats de l'évaluation du FADG révèlent que l'utilisation conjointe des deux ensembles de programmes permettait d'obtenir d'excellents résultats.
Au Nunavut, la FADG a financé des programmes à Pangnirtung, Clyde River et Iqaluit. Ces trois collectivités ont utilisé les fonds alloués par la FADG pour renforcer et intégrer les programmes de guérison au sein des centres de santé mentale. Ce réseau intégré de services de soutien à la guérison donnait aux Inuits l'occasion de se retrouver dans un milieu où ils pouvaient acquérir des outils pour faire face à leurs problèmes de dépendance et aux traumatismes.
Des aînés passaient prendre un café et s'entretenaient souvent avec les Inuits qui attendaient de recevoir des services. Au cours de ces conversations amicales, les aînés contribuaient grandement au processus de guérison d'autres Inuits. Ces endroits — gérés par des Inuits et où le personnel parlait l'inuktitut — créaient un sentiment d'appartenance, de fierté, d'indépendance et d'autodétermination. Ils favorisaient l'établissement de liens de confiance entre le personnel de la FADG et les groupes communautaires administrant les programmes de la FADG.
La FADG était progressiste et permettait aux Inuits de prendre en main leur guérison et leur vie. Son financement était essentiel à la santé et au mieux-être des Inuits. Mais certains des programmes qui venaient tout juste d'être mis en place ont subitement pris fin, et, pour nombre de survivants, le processus de guérison qui venait tout juste de s'amorcer a été brusquement interrompu. C'est vraiment désolant.
Le message que je souhaite vous transmettre aujourd'hui, c'est que, si nous voulons véritablement répondre aux besoins en santé mentale des Inuits, nous devons absolument fournir un financement durable aux programmes de mieux-être communautaire.
Merci.
Chers membres du comité, je vous remercie de me donner le privilège de témoigner ici aujourd'hui en appui à la Fondation autochtone de guérison.
J'exprime ma gratitude aux Algonquins de la région pour m'avoir permise d'être ici aujourd'hui.
Comme le président l'a mentionné, je m'appelle Yvonne Rigsby-Jones. Je suis membre de la première nation Snuneymuxw et je me voue au processus de guérison de nombre de nos membres qui bénéficient des conseils de nos aînés et d'une approche réunissant des méthodes de traitement traditionnelles et occidentales.
Je suis directrice exécutive du centre de traitement Tsow-Tun Le Lum, situé sur l'île de Vancouver, en Colombie-Britannique. Au cours des 20 dernières années, nous avons fait œuvre de pionnier au chapitre de la guérison des anciens élèves des pensionnats indiens.
Toutefois, aujourd'hui, je témoigne non seulement en ma qualité d'administratrice, mais également en tant qu'épouse d'un survivant, mère d'enfants qui ont subi les répercussions intergénérationnelles des traumatismes et grand-mère. Je suis tout à fait déterminée à créer un milieu exempt de violence pour nos enfants, qui le méritent pleinement.
Mon époux, John, est un ancien élève du pensionnat indien de Port Alberni. Au début des années 1990, il a participé à l'une des premières poursuites intentées contre un surveillant de dortoir au pensionnat de Port Alberni.
En vérité, personne ne comprend bien la situation. Le gouvernement actuel remplit les obligations prévues dans le règlement hors cour, et je le reconnais, mais je constate également qu'il faut continuer d'offrir des programmes communautaires et culturellement adaptés. Nombre de nos anciens résidents et de nos résidents actuels sont tout à fait incroyables. Ils font preuve de résilience et de force jour après jour pour faire face à la vie.
Nous constatons les effets positifs des programmes financés par la FADG, qui ont été soulignés dans la récente évaluation de la Fondation par le ministère des Affaires indiennes. L'expérience du passé nous a appris que l'absence de programmes semblables expose de nouveau les collectivités aux méfaits, ce qui crée une réaction en chaîne où il y a une hausse des méfaits, des sommes dépensées en services d'intervention — comme l'hospitalisation et la protection de l'enfance — et du nombre de cas de violence conjugale.
En raison du travail de la Commission de vérité et de réconciliation et du nombre d'audiences qui doivent encore avoir lieu, les souvenirs des anciens élèves remonteront à la surface. Ils revivront certaines situations qui leur causeront beaucoup d'anxiété et, tout comme les membres de leur famille, ils réagiront à de nombreux éléments déclencheurs.
Les activités de recherche de Bessel van der Kolk, psychologue de renommée internationale, ont fait ressortir que les retours dans le passé ne s'apparentent pas seulement à des mauvais rêves; ils amènent la victime à revivre entièrement l'expérience traumatisante du passé et à ressentir de nouveau les sentiments qu'il avait alors éprouvés. La violence physique et sexuelle compte pour une grande part des séquelles des pensionnats indiens et faisait partie intégrante des problèmes visés par les programmes de la FADG.
Comme le but de ma présence aujourd'hui est d'aborder la question du manque de financement pour la FADG, j'ai recueilli de l'information tirée de quelques projets de recherche pour démontrer qu'il est rentable de continuer à financer les programmes communautaires autochtones. Je tiens également à souligner que, pour nombre de survivants des pensionnats indiens, il est difficile de faire confiance à des non Autochtones, vu les nombreuses expériences négatives qu'ils ont vécues, et cette méfiance est une caractéristique qu'ils ont transmise à leurs enfants. Par conséquent, l'existence de programmes communautaires, les services offerts par Santé Canada et la présence de thérapeutes permet de construire des ponts qui améliorent les relations des Autochtones avec les non Autochtones.
Santé Canada offre différents services. Il s'agit de services rémunérés à l'acte, et ils ne sont pas toujours adaptés aux Autochtones ou facilement accessibles. Le personnel du Programme de soutien en santé peut offrir une aide initiale et un aiguillage, mais il n'est pas censé répondre aux besoins psychologiques à long terme.
J'ai appris très tôt dans ma formation qu'une personne ayant été victime d'agression sexuelle dans l'enfance a besoin de suivre une thérapie de façon soutenue pendant au moins trois ans pour se rétablir. Si on ajoute les traumatismes liés à l'expérience dans un pensionnat indien et la perte d'identité, on constate que les problèmes auxquels font face les survivants et leur famille sont extrêmement complexes.
L'affectation de ressources limitées et le fait de continuer à financer les services de placement d'enfants en familles d'accueil, l'incarcération et les initiatives relatives à l'itinérance ne constituent pas les meilleures façons d'employer l'argent des contribuables canadiens.
Les chercheurs du Cedar Project, en Colombie-Britannique, affirment qu'ils mènent des activités de recherche dans un but précis. Leurs travaux sont publiés dans le milieu universitaire, et leur crédibilité comme chercheurs est reconnue. Dans l'une de leurs récentes études, ils déclarent que les traumatismes sexuels continueront d'avoir une incidence sur la victime, sa famille et sa collectivité jusqu'à ce qu'elle soit traitée de façon efficace au moyen de programmes axés sur le client et adaptés à sa culture.
Les antécédents d'agression sexuelle sont liés à de nombreux problèmes de santé, y compris au chapitre de la santé mentale, de la sexualité et de la dépendance aux drogues. J'ai également travaillé dans le cadre de l'entente conclue avec le Service correctionnel du Canada, qui avait organisé de nombreuses réunions portant sur ce travail.
Les données récentes concernant les jeunes en détention révèlent que, actuellement, plus de 50 p. 100 des jeunes détenus en Colombie-Britannique sont autochtones. D'ailleurs, dans une évaluation récente, le Service correctionnel du Canada fait état de la surreprésentation des Autochtones dans les établissements correctionnels fédéraux.
Permettez-moi de citer le Dr Stephen Duckett, président-directeur général des Services de santé de l'Alberta, qui, en 2009, a déclaré ceci:
La science de l'économie est perçue de toutes sortes de façons. Parfois, on la réduit à une compression irréaliste des coûts, mais je ne crois pas que les personnes ici présentes retiendraient une telle définition. Comme vous le savez tous, l'économie consiste à savoir comment affecter des ressources limitées...
En continuant de financer la FADG, on peut résoudre de bien d'autres façons de nombreux problèmes de coûts qui touchent le réseau des soins de santé. Il y a beaucoup de personnes, environ 1 700 jusqu'à maintenant, qui ont suivi avec succès le traitement offert dans notre centre. Nous ne représentons qu'une des nombreuses initiatives ayant contribué à la guérison communautaire rendue possible par la FADG.
Au centre Tsow-Tun Le Lum, nous faisons ce travail depuis tant d'années que nous avons vu trois générations d'une même famille participer aux programmes de guérison. J'ai personnellement travaillé auprès de personnes incarcérées. L'un de nos anciens résidents n'a jamais regardé en arrière. Il est maintenant à l'âge adulte et travaille pour un organisme fédéral, après être passé par le système correctionnel pour jeunes au système provincial, puis au système fédéral. Il n'a eu aucun démêlé avec la justice depuis le début des années 1990. Et c'est un exemple parmi tant d'autres.
Comme les pensionnats ont existé pendant plus de 100 ans, il semble désespérément inadéquat de financer les programmes de guérison pendant une si courte période. Cela prend des générations avant de briser le cycle de la violence. J'ai une petite-fille de six ans, et je suis la seule de ses grands-parents qui n'a pas fréquenté un pensionnat. Nous avons un employé de 40 ans qui a fréquenté un pensionnat. Les conséquences intergénérationnelles ne sont pas chose du passé: elles sont encore bien présentes aujourd'hui.
Les programmes de la FADG ne sont pas une solution universelle. Ils reflètent clairement la détermination des membres de nos collectivités à se prendre en main et à travailler ensemble pour apporter des changements qui favoriseront le mieux-être et la paix dans toute la collectivité. Pour nombre de survivants et de membres de leur famille, il est difficile de ne plus toucher à la drogue ou de rester sobre tant qu'ils ne se sont pas rétablis du traumatisme qu'ils ont vécu.
Pour nombre de personnes chargées d'allouer des fonds, les statistiques ne sont que des chiffres; pour les membres de nos collectivités, ces chiffres représentent nos soeurs, nos frères, nos parents ou nos enfants.
La FADG a une mine de travaux de recherche documentant les approches efficaces. Pour nous, il est très important d'être en mesure de continuer de guérir nos collectivités dans un milieu sûr et adapté à notre culture. Si moins d'enfants sont placés dans des familles d'accueil, si moins de personnes sont incarcérées et si moins d'enfants grandissent entourés de violence familiale, il en résultera des économies de coûts importantes pour le gouvernement dans d'autres domaines.
Pendant que je préparais mon exposé, j'ai perdu deux ou trois paragraphes de statistiques. Ils doivent être en train de flotter dans le cyberespace ou quelque part dans mon ordinateur. Mais, à la lumière du projet que nous avons réalisé...
Est-ce que mon temps est écoulé?
Nos programmes s'inspiraient fortement des enseignements de la roue de la médecine qui sont axés sur la guérison physique, mentale, spirituelle et émotionnelle. Dans le cadre du projet « Préparons la septième génération », nous avons créé des postes en tenant compte des besoins des survivants, pour contrer les effets de l'expérience dans les pensionnats et de la rupture avec la culture, les enseignements et le processus de guérison.
Les survivants des pensionnats n'ont acquis aucune compétence interpersonnelle et familiale, et l'absence de soutien émotif et d'accompagnement spirituel a eu des effets dévastateurs sur leur rôle parental. Pour citer J.R. Miller: « On a souvent déclaré que le manque de compétences parentales était un problème majeur touchant encore aujourd'hui les familles et les communautés autochtones. L'éclatement des familles — qui entraîne de la violence conjugale et de la violence à l'endroit des enfants, l'abandon du foyer, l'alcoolisme et la toxicomanie — continue de faire des ravages dans les communautés autochtones. »
Par conséquent, au foyer, nous avions mis en place différents postes. Il y avait d'abord l'intervenante auprès des familles. Sa fonction principale était d'aider les mères à acquérir les diverses compétences parentales — par exemple, l'hygiène, la nutrition, la surveillance des enfants, la création d'un milieu sain, les liens affectifs, etc. — au moyen d'ateliers hebdomadaires, de séances de thérapie individuelle et familiale et de services d'aiguillage. L'intervenante se chargeait également d'organiser des activités pour les enfants et pour les familles, d'offrir du counselling et des ateliers éducatifs et de planifier des sorties et les repas.
Quelle était l'incidence du programme? Il permettait d'enseigner aux clients les compétences parentales de base qui se sont perdues en raison des pensionnats. Il renforçait la cellule familiale, encourageait les mères à être autonomes et amenait les participants à prendre des décisions éclairées au sujet de la nutrition et de l'hygiène et à éprouver un sentiment d'identité et d'appartenance au sein d'une famille.
Notre équipe comptait également une coordonnatrice de programmes qui préparait le calendrier mensuel des activités, qui distribuait, recueillait et analysait les formulaires d'évaluation concernant toutes ces activités, qui organisait les activités de mieux-être, les cérémonies et les retraites dans les sueries, qui planifiait les séances de thérapie et de guérison traditionnelle, et qui organisait les cercles de la parole et les cercles de guérison, les ateliers d'enseignements et d'artisanat traditionnels, les pow-wow, les ateliers éducatifs, les fêtes traditionnelles et les séances de tambour. Elle s'occupait également de rédiger le bulletin mensuel et de tenir des réunions bimestrielles avec les résidents. De cette façon, elle obtenait les commentaires des clients et faisait en sorte qu'ils soient satisfaits des programmes.
Nos programmes permettaient aux clients de recourir à des méthodes de guérison traditionnelles pour composer avec les séquelles des pensionnats indiens et pour renouer avec leur culture et leurs traditions. Ils étaient initiés aux enseignements culturels, par exemple, les rites de passage et les rôles traditionnels des hommes et des femmes, et pouvaient tenter de régler des problèmes comme les dépendances chroniques, le sentiment de honte et les dysfonctionnements.
Nos clients pouvaient également compter sur les services d'une coordonnatrice des retraites dans les sueries. Cette employée ne travaillait que l'été, et elle organisait les retraites à l'extérieur du foyer, à Saint-Adolphe-d'Howard. Il s'agissait de retraites dans les sueries. Les participants assistaient à des cérémonies, des ateliers d'artisanat traditionnel et des cours d'autodéfense et faisaient de la randonnée. Il y avait aussi des activités pour les enfants et les familles. Les participants pouvaient alors renouer avec la nature et leur spiritualité, obtenir un soutien social et retrouver l'équilibre intérieur et l'harmonie.
Nous avions également une conseillère en violence sexuelle. Elle s'occupait de l'intervention en cas de crise, de l'écoute bienveillante, de l'aiguillage ainsi que des ateliers d'information et d'éducation. Les clients pouvaient s'affranchir des effets de la violence sexuelle intergénérationnelle, briser le cycle de la violence sexuelle, promouvoir la justice et la guérison et se libérer de la honte et des dysfonctionnements.
Nous comptions également dans nos rangs une superviseuse clinique. Elle se chargeait d'organiser des ateliers à l'intention de tout le personnel du foyer, de superviser le traitement des dossiers des clients et de fournir des directives à tous les conseillers. Cela a donné lieu à la mise en œuvre d'un modèle de guérison holistique qui était appliqué aux plans de guérison de l'ensemble des clients.
Nous avions également une coordonnatrice des conférences. Elle organisait une conférence annuelle portant sur tous les aspects de la guérison des traumatismes vécus dans les pensionnats et informait la communauté autochtone urbaine des activités qu'offrait le foyer au chapitre de la guérison. Il en résultait une sensibilisation accrue à l'égard des problèmes liés aux pensionnats indiens, et cela permettait à la collectivité d'être mieux outillée pour aider les survivants à se libérer de la honte et des dysfonctionnements.
Les ateliers durent généralement trois jours. Ils sont très courus. Des aînés venant de partout y participaient.
Le dernier poste, coordonnatrice des évaluations, est celui qu'occupe maintenant Mme Carrie Martin. Elle a été chargée d'évaluer le projet « Préparons la septième génération » et de superviser la clôture de tous les rapports et dossiers.
Notre travail nous a permis d'avoir une meilleure compréhension de la nécessité d'offrir à long terme des programmes et des techniques de guérison traditionnelle. Faute de ces programmes essentiels, les clients n'auront plus accès à des méthodes de guérison traditionnelle et culturelle. L'abandon de ces programmes a eu des répercussions partout au Québec. Les collectivités éloignées avaient l'habitude d'orienter les clients vers nos services. Or, nous ne pouvons plus leur offrir ces programmes de guérison.
Les pensionnats sont apparus il y a près de 350 ans. Nous croyons fermement que dix années de travail sur le plan de la guérison nous ont à peine permis de commencer à nous attaquer aux multiples problèmes découlant de l'expérience vécue dans les pensionnats. Par conséquent, nous vous exhortons à rétablir le financement de la FADG.
Dans l'esprit de la guérison, nous vous remercions.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
J'aimerais souhaiter un bon après-midi à tout le monde,
[Traduction]
à vous, chers membres du comité permanent, et bonjour aux autres témoins.
Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous parler brièvement du travail de la Commission de la santé mentale du Canada et de la façon dont les organismes autochtones, y compris la FDAG, contribuent aux efforts de la commission.
D'abord, je vais faire une petite mise en contexte. La Commission de la santé mentale du Canada est un joueur relativement nouveau sur la scène nationale. Elle a été créée en 2007 par le gouvernement fédéral, dans la foulée de l'étude la plus importante jamais réalisée au pays sur la santé mentale, la maladie mentale et la toxicomanie au Canada.
La commission a pour mandat d'attirer l'attention de la population nationale sur les problèmes de santé mentale et de travailler à améliorer la santé et les conditions sociales des personnes atteintes de maladies mentales. Fait important, contrairement à la FADG, la Commission de la santé mentale du Canada n'assure pas la prestation de services et de programmes, mais agit comme catalyseur du changement.
La commission a, entre autres, pour objectif d'élaborer une stratégie en santé mentale pour le Canada. Vous vous demandez peut-être si nous en avons vraiment besoin d'une. Je vous répondrais que, bien qu'il y ait des milliers de personnes qui tentent d'améliorer la qualité des soins en santé mentale au Canada, la dure réalité est qu'on ne répond pas de façon adéquate à nombre des besoins pressants des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale.
Un des autres aspects qui a une incidence sur l'élaboration d'une stratégie en santé mentale pour le Canada est le fait que le pays compte une population très diversifiée. Il est important que ce travail ne mène pas seulement à un beau document qui se retrouve sur une tablette. Il doit s'agir d'une initiative concrète, qui est significative pour tous les Canadiens, à toutes les étapes de leur vie, d'un océan à l'autre, pour les enfants et les jeunes, les aînés, les anglophones, les francophones et les immigrants, et, évidemment, pour les premières nations, les Inuits et les Métis du Canada. Une stratégie universelle n'aurait aucun sens; je suis persuadée que vous seriez tous d'accord avec moi.
En 2009, après de vastes consultations publiques, nous avons publié un document intitulé Vers le rétablissement et le bien-être. Ce document fournit le cadre de ce qui deviendra la toute première stratégie en santé mentale du Canada.
Je tiens à souligner que ce document est le fruit d'une collaboration entre la Commission de la santé mentale et le Comité consultatif des Premières nations, des Inuits et des Métis, l'un des comités consultatifs qui s'appliquent à orienter les efforts de la commission. Préalablement, nous avons consulté des organismes autochtones nationaux, et des personnes et des intervenants autochtones de tout le pays, y compris du Nord, ont eu l'occasion de donner leur avis dans le cadre d'un processus de consultation en ligne. À l'évidence, ce ne sont pas seulement des gens du Nord qui ont participé aux consultations: le processus était ouvert à tous. Tous les Canadiens pouvaient transmettre leurs opinions. L'information obtenue auprès de la FADG et de ses divers intervenants a également enrichi ce document.
Le cadre, ayant résulté de tout ce travail de consultation, présente une vision à l'égard du rétablissement et du bien-être de tous les Canadiens qui est holistique, est axée sur l'environnement, l'autodétermination, l'identité culturelle, la guérison, l'espoir, le mieux-être et le développement communautaire et accorde de l'importance au savoir traditionnel et coutumier. Ce que j'aime dire au sujet de la Commission de la santé mentale, c'est que, pour nous, la tradition est plus moderne que ce qui est moderne aujourd'hui, et c'est comme ça que les choses doivent être dans une économie en récession.
Je vous explique tout cela parce que j'espère vous montrer à quel point la participation des premières nations, des Inuits et des Métis est importante pour le travail de la Commission de la santé mentale.
J'ai déjà mentionné le travail du Comité consultatif des Premières nations, des Inuits et des Métis. Ce comité veille à ce que la composante culturelle fasse partie intégrante des soins en santé mentale au Canada. Ils s'appliquent également à élaborer un code de déontologie prévoyant la façon dont on doit fournir des soins de santé de première ligne, particulièrement dans le domaine de la santé mentale et des problèmes de dépendance, où certains des Autochtones les plus vulnérables ont besoin d'aide.
En outre, la Commission de la santé mentale du Canada réalise actuellement un projet de recherche sur l'itinérance dans cinq villes du pays: Moncton, Montréal, Toronto, Winnipeg et Vancouver. On estime qu'il y a entre 150 000 et 300 000 itinérants au Canada, dont la moitié serait également atteint d'une maladie mentale.
Dans chacune de ces villes, on cible un groupe précis pour comprendre comment mieux aider les itinérants également aux prises avec des problèmes de santé mentale. À Winnipeg, le projet mise sur une approche holistique pour contrer le phénomène de l'itinérance et des problèmes de santé mentale chez les Autochtones urbains. Ce modèle propre à Winnipeg comprend des services s'inspirant des enseignements autochtones traditionnels.
Je voudrais maintenant faire quelques commentaires sur le travail de la FADG, à la lumière de mon expérience et de mes connaissances personnelles. À bien des égards, je suis le visage et la voix des marginaux que la Commission de la santé mentale tente vaillamment de mettre au cœur de son travail, car, en tant que survivante d'un pensionnat, je vis moi aussi avec les séquelles de cette expérience.
Lorsque notre premier ministre, Stephen Harper, a prononcé des excuses historiques au sujet des torts infligés aux membres des premières nations, des Inuits et des Métis, à leur famille et aux collectivités par suite des traumatismes vécus dans les pensionnats, la population du Canada a observé un moment de silence en hommage aux victimes, tandis que les premières nations, les Inuits et les Métis se sont tenus debout fièrement, confiants et le regard tourné vers l'avenir, dans les endroits où nous jouons, travaillons et prions, partout au pays.
Les aînés nous apprennent qu'il faut confier à l'univers uniquement les choses dont nous voulons être redevables et uniquement celles que nous voulons voir se réaliser. Les excuses du premier ministre ont été l'un des plus beaux moments de l'histoire du Canada. Mais ses mots et ses actions louables — si je peux me permettre d'utiliser ce terme — seraient restés lettre morte si la FADG n'avait pas au préalable encouragé, entretenu et encadré la sensibilisation au sujet des séquelles et des répercussions de l'expérience des pensionnats grâce à ses activités de recherche et de financement.
Le degré de participation élevé des premières nations, des Inuits et des Métis aux projets de la FADG montre également à quel point les Autochtones sont déterminés à instaurer des changements qui permettront de renforcer l'identité personnelle, familiale et nationale.
Nous pouvons continuer sur cette lancée en renouvelant le financement de la FADG.
D'abord, la FADG doit avoir la possibilité d'examiner et de concevoir des indicateurs de guérison comme les taux de violence physique et sexuelle, le nombre d'enfants placés dans des familles d'accueil, le nombre de personnes incarcérées et le taux de suicide. La FADG n'a pas été en mesure de compiler ces données parce qu'elle devait fonctionner sur un horizon de financement très court.
La FADG et la Commission de la santé mentale peuvent collaborer à la tenue d'un nouveau dialogue sur la santé mentale et le mieux-être, car elles partagent des croyances comme la suivante: « Nous sommes maintenant guéris parce que nous savons ce que sont l'espoir, le rétablissement, le sentiment d'appartenance et d'utilité et la confiance. »
Deuxièmement, nous pouvons sentir nos cœurs battre, ce qui nous rappelle que nous sommes tous les mêmes.
Troisièmement, nous rayonnons parce que nous croyons que la vie vaut la peine d'être vécue et qu'il vaut la peine d'investir dans la vie et que nous avons tous la capacité de le faire.
Quatrièmement, nous profitons du moment présent. Nous sommes conscients que, lorsque le présent s'évanouit, nous pouvons encore embrasser l'avenir. Il n'est pas derrière nous.
La Fondation autochtone de guérison a fait le travail sur lequel s'appuiera la Commission de la santé mentale du Canada, c'est-à-dire protéger nos identités culturelle et ethnique, renforcer la cohésion sociale, non seulement entre nous, les membres des premières nations, les Inuits et les Métis, mais aussi avec les autres Canadiens — et je crois que nous avons réussi, en partie, à tisser de meilleures relations avec eux —, et faire la promotion de la santé mentale et de la prévention des maladies mentales auprès des premières nations, des Inuits et des Métis.
La Fondation autochtone de guérison, en permettant à des survivants comme moi de s'exprimer, en valorisant notre optimisme, notre pragmatisme, notre capacité d'agir et notre résilience, nous a beaucoup encouragés à regarder vers l'avenir et à faire partie des stratégies d'action, dont certaines, et non les moindres, sont exécutées en ce moment même par la Commission de la santé mentale du Canada.
Parce que la Fondation autochtone de guérison est passée par là, nous ne sommes plus autant des étrangers sur nos terres. Nous voulons récupérer nos enfances perdues et faire face à nos problèmes de santé mentale. Nous envisageons le monde d'un point de vue autochtone, entre autres parce que la Fondation autochtone de guérison nous a permis de le faire.
Merci beaucoup.
Je vais m'arrêter là. Je n'avais plus que des commentaires généraux à faire à partir de maintenant.
[Français]
Merci beaucoup à tout le monde.
:
Bonjour, monsieur le président, et merci.
Certains de mes collègues affirment que, si j'adopte mon rythme très rapide, vous essayerez probablement de trouver une autre fréquence sur le fil de traduction pour parvenir à véritablement comprendre ce que je dis.
Je veux simplement souhaiter la bienvenue à chacun d'entre vous et vous remercier de vos interventions et des mesures vigoureuses que vous prenez pour défendre le travail de la Fondation autochtone de guérison. Vos témoignages soulignent à quel point ce travail est capital pour de nombreux membres de nos collectivités et, certainement, pour les collectivités en tant que telles.
Je veux aussi certainement souhaiter la bienvenue à cette jeune témoin, qui — d'après ce que j'ai compris, en tout cas — s'oppose sûrement elle aussi à la décision du gouvernement conservateur de mettre fin au financement de la Fondation autochtone de guérison. À tout le moins, c'est ce que je comprends.
J'aimerais poser quelques questions, et j'aimerais que l'on s'attarde plus particulièrement à la question des Inuits.
Bon nombre de ces collectivités sont isolées. Évidemment, je viens du Labrador. Nous avons le Nunatsiavut, qui veut dire « notre beau pays ». Vous avez fait un commentaire intéressant: vous avez dit que, au cours des dernières années, nous avions, au Nunatsiavut, un programme de la Fondation autochtone de guérison, mais il n'y avait aucun paiement d'expérience commune parce qu'il y a encore des procédures en cours, il y a des négociations et des pourparlers en cours pour déterminer s'ils seront, au bout du compte, visés par la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. Une partie de la guérison aura donc eu lieu puisque les collectivités se sont préparées et ont assumé cette partie — leur responsabilité. Maintenant, vous dites que, si nous abolissons la Fondation autochtone de guérison et si nous décidons, même, d'adopter le programme de soutien en santé en établissement, ils n'auront alors accès à aucune guérison, ce qui signifie qu'il y aura là un écart important puisque le programme est offert seulement à ceux qui recevront des paiements d'expérience commune ou qui seront visés par la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens. C'est donc une répercussion.
L'autre répercussion, d'après ce que je vous ai entendu dire, c'est qu'il y a très peu de ressources, voire aucune, mis à part ce qui a été mis sur pied au cours des dernières années dans bon nombre de collectivités et de hameaux inuits du Nunavut, et que l'assemblée législative du Nunavut a adopté à l'unanimité une résolution selon laquelle il faudrait conserver la Fondation autochtone de guérison.
Je veux donc simplement vous donner des exemples concrets de ce qui se passe dans certaines de ces collectivités autochtones. Que se passera-t-il si la fondation n'existe plus? Est-ce qu'une personne devra prendre le téléphone et composer un numéro sans frais pour que son appel soit réacheminé à quelqu'un, quelque part au Canada, qui ne parle pas sa langue et qui ne sait pas qui elle est? La personne à l'autre bout de la ligne lui dira: « Allez voir un conseiller ». Si vous êtes à Gjoa Haven ou à Pangnirtung, ça peut être difficile à trouver.
Pouvez-vous donc simplement nous donner un exemple concret de ce qui est différent quand les programmes de la Fondation autochtone de guérison sont offerts et quand ils ne le sont pas.
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Merci, monsieur le président. Je veux aussi remercier les témoins d'être venus aujourd'hui.
Voici quelques sujets que j'aimerais aborder.
D'abord et avant tout, j'aimerais souligner que je pense que chacun d'entre vous a, d'une façon ou d'une autre, parlé des réussites de ses programmes. En fait, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a fait faire une évaluation qui traitait de la réussite de vos programmes. Je voulais simplement le souligner aux fins du compte rendu.
Dans la deuxième partie, et je me reporte à Mme Dion Stout... Le document De l'ombre à la lumière comporte de fait quelques sections très intéressantes sur l'accès aux programmes. Il y est mentionné qu'il y avait des problèmes en ce qui concerne l'équité d'accès aux programmes du gouvernement fédéral, et pourtant, il a été proposé que les programmes de la Fondation autochtone de guérison soient remplacés par des services offerts par Santé Canada, qui, comme nous le savons déjà, forment un ensemble disparate et sont souvent inaccessibles.
La deuxième chose que je voulais dire à propos du rapport De l'ombre à la lumière, c'est qu'on y recommande fortement la reconduction de la Fondation autochtone de guérison. Mme Rigsby-Jones a abordé les aspects économiques de ce que nous mesurons. Dans ce rapport — on parle de 2004 — on dit clairement que, chaque fois que les gouvernements provinciaux et fédéral versent 2 $ au programme communautaire des cercles de guérison à Hollow Water, un des endroits cités, ils économisent de 6 $ à 16 $ en frais d'incarcération. Cela signifie que pour chaque tranche de 2 $ investie dans des programmes communautaires de guérison, les gouvernements économisent de 6 $ à 16 $, en dollars de 2004.
Je vais commencer par Mme Rigsby-Jones, et les autres pourront ajouter quelque chose. Vous avez dit clairement que l'un des avantages des programmes de la Fondation autochtone de guérison, c'est qu'ils sont axés sur la collectivité. Tous les programmes de Santé Canada que nous avons examinés sont axés sur les personnes. Ils supposent des processus complexes, des plans de traitement. La personne peut devoir fournir toutes sortes de choses. Je me demandais donc si vous pouviez nous dire ce qui se passera, à votre avis, avec les personnes qui ont actuellement recours aux programmes communautaires si elles n 'ont plus accès qu'aux programmes de Santé Canada.
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Merci beaucoup d'être venus, chacun d'entre vous.
J'aimerais seulement mentionner que je sais que vous avez tous un travail difficile à faire et que vous devez respecter des modalités que vous aimeriez probablement modifier de temps à autre, et que un financement adéquat à tous points de vue serait apprécié.
J'ai pris connaissance d'un article très récent, publié le 26 avril, sur le groupe Aboriginal Survivors for Healing de Charlottetown. Il avait perdu son financement dans le cadre de la FADG et avait présenté une demande de financement par l'entremise de Santé Canada, demande qui a été acceptée. D'après ce que j'ai lu, le groupe continue essentiellement à organiser des cercles de guérison et à fonctionner comme il le faisait par le passé dans le cadre de la stratégie autochtone de guérison.
Donc, quand je lis dans quel type de contexte se situe le Programme de soutien en santé, je ne lis pas la même information que celle dont vous m'avez fait part, puisque ce contexte semble essentiellement communautaire. Il est question d'offrir du soutien culturel et affectif, d'aînés et d'organismes autochtones locaux qui offrent des services professionnels de counselling, et de guérisseurs traditionnels qui sont disponibles. Certains services dépendent des besoins des personnes, et peuvent prendre la forme de dialogues, de cérémonies, de prières ou de techniques traditionnelles de guérison. Des organismes autochtones locaux offrent aussi des services de soutien affectif.
Je suis donc un peu perdu. Par exemple, madame Rigsby-Jones, vous parlez d'offrir des traitements à des personnes de partout — de l'île de Vancouver, essentiellement, d'où je viens aussi, en passant. Est-ce que cela ne signifie pas que ce sont des traitements individuels? Je veux dire, vous avez affaire à des personnes et non à des collectivités, puisque ce sont des personnes qui se présentent chez vous pour un traitement, n'est-ce pas?
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Merci, monsieur le président.
Merci de vous être déplacés pour nous faire connaître les problèmes que vous vivez actuellement.
Comme vous le savez, je représente le comté d'Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, et je me demande sérieusement comment vous avez réussi à trouver des personnes ressources au Nunavik. C'est une partie du Québec qui est en manque de personnes ressources compétentes.
Je suis parti de la Vallée de la Matapédia, où il y avait des Micmacs. On regardait des films de cow-boys et d'Indiens, ces méchants Indiens qui enlevaient leurs cheveux aux blancs — j'ai réussi à préserver ce qui reste des miens. Quand je suis arrivé en Abitibi, à l'automne, on allait mener des enfants dans un orphelinat à Saint-Marc-de-Figuery, près d'Amos, où mon collègue est né. Quand on retournait les chercher au printemps, ils ne comprenaient plus leurs parents ni leurs grands-parents qui leur parlaient anishinabe. Bien souvent, les grands-parents ne parlaient ni français ni anglais. J'ai personnellement vécu cette expérience dans les orphelinats, puisque j'y ai fait mes études. J'ai réalisé plus tard qu'un enfant n'en vit pas les conséquences immédiatement. Il n'en est pas conscient. Il retourne avec ses parents et il est heureux. C'est plus tard qu'il en souffre, quand il atteint l'âge de 18 ou 20 ans. Il réalise alors à quel point sa famille, sa culture et sa langue lui ont manqué.
Dans l'exercice de mon travail, j'ai pris conscience d'un autre problème au sein des collectivités: on donne un peu d'argent aux communautés, puis on leur dit de se taire. Aucun développement économique ne s'y fait. Je pense que la guérison serait plus facile si les Premières nations et les Inuits pouvaient s'intégrer.
Je me demande aussi — je vous pose toutes ces questions — si vous seriez capables de nous dire aujourd'hui quelles économies il serait possible de réaliser quant aux frais d'incarcération, qui sont énormes. De plus, ça dépend de ce qui est arrivé antérieurement. Qu'est-ce qu'on pourrait épargner si on pouvait intégrer ces personnes et assurer leur suivi en collectivité?
Je vous laisse la parole.
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Merci, monsieur le président.
À titre de survivante, j'aimerais simplement souligner ce qu'ont dit les autres participants, mais aussi que je crois que, à force de peler cet oignon, on atteindra le cœur, et cela signifie qu'il faudra faire face à nos problèmes psychosociaux. Cela me convainc aussi très fermement qu'il n'y a pas que moi qui fais face au problème de l'héritage laissé par les pensionnats, mais que c'est aussi le cas de nos collectivités. Il faut donc envisager sérieusement des changements structurels.
Les personnes qui se trouvent au sommet de la pyramide, celles qui sont ici présentes à titre de parlementaires, doivent participer aux changements structurels. Mais des organismes catalyseurs, comme la Commission de la santé mentale du Canada doivent aussi y participer, de même que les gens du peuple qui sont sur le terrain. Quand je vois des approches sur le terrain axées sur la collectivité et le peuple, je conclus toujours qu'il y a d'autres niveaux qui participent.
Je voulais simplement répondre à une question que vous m'avez posée un peu plus tôt, monsieur le président, au sujet de ce qui se fait entre les divers ordres de gouvernement pour garantir la durabilité des changements. C'est cela, à mon avis, des changements structurels.
Certains d'entre vous connaissent sûrement un peu l'initiative de la Colombie-Britannique, l'entente tripartite, dans le cadre de laquelle le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les premières nations collaborent dans le secteur de la santé. Ils effectuent une véritable réforme de la santé de façon à ce que, au bout du compte, les premières nations possèdent et administrent leurs propres programmes de santé. Ça me semble très prometteur. Cela n'a jamais été fait ailleurs auparavant, et je crois que ça mérite qu'on s'y intéresse.