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Merci beaucoup de m'avoir invitée à comparaître devant le comité aujourd'hui.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Carolyn Loeppky et je représente le ministère des Services à la famille et de la Consommation du Manitoba. J'occupe ce poste et je suis au service des gens du Manitoba depuis quatre ans, et je compte plus de 35 ans d'expérience dans le secteur public.
J'ai assisté à de nombreux changements dans les divers secteurs du gouvernement du Manitoba, et dans le secteur de l'aide à l'enfance plus que dans tout autre secteur de la province. Par le passé, les services à l'enfance et à la famille étaient offerts, au Manitoba, par des organismes privés sans but lucratif, ou encore, dans certaines régions rurales et du Nord, par des bureaux régionaux du ministère.
Avant l'entrée en vigueur de la Loi sur les services à l'enfant et à la famille, qui prévoit le recours à des organismes particuliers des Premières nations, les services dans les réserves étaient offerts par des employés du bureau régional, et le gouvernement fédéral remboursait à la province les coûts et les services.
Dans les années 1980, les organismes des Premières nations ont commencé à recevoir des mandats du gouvernement provincial pour offrir des services dans les réserves. À mesure que les organismes se voyaient accorder ce mandat dans le cadre de notre Loi provinciale sur les services à l'enfant et à la famille, ils commençaient à recevoir du financement de la province pour offrir des services à des enfants sous une autre autorité provinciale.
Avec l'adoption par le Manitoba de la Loi sur les régies de services à l'enfant et à la famille en novembre 2003, un modèle unique de gouvernance est apparu au Canada avec la création de quatre régies des services à l'enfant et à la famille. Il s'agit de la Régie des services à l'enfant et à la famille des Premières nations du Nord du Manitoba, de la Régie des services à l'enfant et à la famille des Premières nations du Sud du Manitoba, de la Régie des services à l'enfant et à la famille des Métis et de la Régie générale des services à l'enfant et à la famille. Ces régies ont reçu comme mandat la responsabilité de superviser les activités des organismes de services.
Le processus qui a mené à la délégation de la responsabilité des services d'aide à l'enfance aux peuples des Premières nations et des Métis a été entrepris à la suite de la Commission d'enquête sur l'administration de la justice et les Autochtones et de l'Initiative de protection de l'enfance. À la suite de cette Commission, la province du Manitoba a commencé à financer les régies qui, à leur tour, ont financé leurs organismes.
La collaboration et les communications entre la province du Manitoba et le ministère fédéral des Affaires indiennes ont mené à la création d'un nouveau modèle de financement pour le Manitoba. C'est un modèle de financement qui reconnaît l'approche unique et historique du Manitoba en matière de services d'aide à l'enfance et qui reconnaît et utilise les pouvoirs, les droits et les responsabilités uniques des peuples des Premières nations et des Métis en ce qui concerne le respect et les soins des enfants.
Ce modèle se distingue de celui des autres provinces puisque le Manitoba est la seule province où les organismes des Premières nations fournissent des services autorisés autant dans les réserves qu'à l'extérieur de celles-ci. On parle de « compétence concurrente », ce qui signifie que ces organismes des Premières nations offrent des services aux membres de leurs communautés et de leurs bandes qui vivent tant dans les réserves qu'à l'extérieur de celles-ci.
Le gouvernement provincial, le ministère des Affaires indiennes, les régies et les organismes de notre province ont travaillé en partenariat pour mettre sur pied le modèle du Manitoba. Il n'a pas été possible, pour l'instant, d'inclure dans le modèle toutes les requêtes présentées, mais le modèle fournit aux organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations d'importants avantages.
Voici les grandes lignes de notre modèle:
La province et le MAINC partagent le financement des principaux postes au sein des organismes des Premières nations selon un ratio de 60 p. 100 pour la part du gouvernement provincial et de 40 p. 100 pour le gouvernement fédéral. Pour le volet fédéral, le modèle du Manitoba est fondé sur l'hypothèse selon laquelle 7 p. 100 des enfants sont pris en charge, par rapport à 6 p. 100 dans les autres provinces. Pour le volet provincial, nous utilisons les chiffres réels.
Selon notre modèle, les services de prévention s'étendent sur trois ans, à partir de 2010-2011, pour permettre le renforcement des capacités afin d'être en mesure d'offrir les services de prévention. Ce sera une approche progressive sur trois ans.
Il faudra effectuer une mise en valeur généralisée des ressources dans les réserves afin d'offrir des services comparables en matière d'accessibilité et de prévention. Les organismes, les régies, la province et le MAINC ont collaboré pendant probablement plus de deux ans et demi pour établir les modalités du modèle de financement.
Nous en sommes présentement seulement à l'étape du début de la mise en œuvre. Le gouvernement fédéral s'est engagé pour plus de cinq ans à entreprendre la première étape de la mise en œuvre.
Il faudra analyser étroitement, examiner et surveiller le modèle de financement pour savoir comment nous y prendre pour mettre en œuvre cette nouvelle approche pour les Premières nations du Manitoba et pour déterminer si des changements ou des rajustements devront être apportés au fil du temps.
Merci beaucoup.
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En Nouvelle-Écosse, l'organisme des Services à la famille et à l'enfance des Mi'kmaws a fait récemment l'objet d'une vérification de la part du ministère des Services communautaires, qui voulait s'assurer que nous nous acquittions des responsabilités qui nous ont été conférées à titre d'organisme de services d'aide à l'enfance. Le ministère a cerné quelques aspects pour lesquels nous ne respections pas les normes. Nous collaborons actuellement avec lui pour déterminer quelles sont les ressources dont nous avons besoin pour corriger les problèmes.
Nous recevons du financement dans le cadre de l'approche améliorée de financement. Le MAINC adopte la position selon laquelle l'approche améliorée constitue la solution; ce n'est toutefois pas ce que nous dit notre expérience. On s'attend à ce que nous fournissions les mêmes services que la province, avec environ 75 p. 100 du financement. Cette approche continue à placer nos enfants vulnérables en situation de risque de préjudice.
Jusqu'en 2006, les Services à la famille et à l'enfance des Mi'kmaws de la Nouvelle-Écosse étaient financés dans le cadre de la directive 20-1. Celle-ci a fait l'objet d'un examen de la part de la vérificatrice générale du Canada et du Comité permanent des comptes publics, et tous deux ont établi que la directive 20-1 était inéquitable et qu'elle n'était pas fondée sur les besoins des enfants et des familles des Premières nations.
Une fiche de renseignements du MAINC en date de 2007 établit un lien entre la directive qui souhaitait que l'on augmente le nombre d'enfants des Premières nations pris en charge et l'incapacité des organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations à s'acquitter des responsabilités qui leur ont été confiées.
La directive 20-1 du MAINC a aussi des répercussions sur les activités de notre organisme. Même si notre organisme et les membres de notre personnel ont gagné de nombreux prix à l'échelle nationale, nous devions travailler dans un local qui a été déclaré inhabitable par les inspecteurs en bâtiment du MAINC lui-même. Le câblage électrique représentait un danger, il y avait fréquemment des fuites des tuyaux d'égout dans l'immeuble, la moisissure était un problème constant, et le local était surpeuplé. Ce ne sont pas des conditions que l'on imposerait à des employés du gouvernement fédéral.
En 2005, notre demande pour une approche souple du financement a été approuvée, mais nous devions tout de même respecter la structure de la directive 20-1, selon laquelle notre organisme avait droit à un montant précis pour les dépenses d'entretien, montant qu'on nous a permis d'affecter plutôt à une approche plus proactive de la protection de l'enfance, qui correspondait davantage à l'orientation du ministère des Services communautaires de la Nouvelle-Écosse.
Cela nous a permis d'offrir des services visant à permettre aux enfants de rester à la maison, avec leur famille. L'augmentation moyenne des coûts par année dans le cadre de la directive 20-1 et du remboursement des dépenses réelles pour les enfants vivant à l'extérieur du domicile familial de 1996 à 2004 était de 25,3 p. 100. Quand nous avons pu consacrer des fonds à un modèle plus proactif, le taux moyen d'augmentation par année de 2005 à 2010 a été de 4,3 p. 100. De 1996 à 2004, le nombre de cas dont nous nous sommes occupés est passé de 81 à 279, soit une augmentation de 244 p. 100. De 2005 à 2010, ils sont passés de 279 à 323, soit une augmentation de 12 p. 100. Il s'agit là, pour le moins, de chiffres qui semblent indiquer qu'une approche plus proactive est aussi plus rentable.
Le nouveau modèle flexible de financement élimine en partie le besoin de travailler de façon plus proactive; il ne règle toutefois en rien le manque de financement pour les activités. La directive 20-1 ne prévoit aucun financement pour les dépenses en immobilisations sur les lieux, pour l'équipement informatique ou pour tout autre besoin financier lié aux installations. Les fonds destinés à l'administration et au personnel étaient toujours inadéquats. Aucun organisme ne peut fonctionner efficacement sans local, sans soutien administratif approprié ou sans le personnel requis. Comment le MAINC peut-il s'attendre à ce que des organismes soient efficaces s'ils n'ont pas les ressources dont ils ont besoin?
Le MAINC semble accorder la priorité aux mesures qui visent à réduire les coûts du gouvernement fédéral et, par conséquent, le bien-être des enfants, même quand de multiples rapports de spécialistes et les dossiers mêmes du ministère indiquent qu'il faut investir davantage pour protéger la sécurité et le bien-être des enfants dans ces régions.
Comme nous avons pu le constater en Nouvelle-Écosse, les mesures censées accorder la priorité à la sécurité et au bien-être des enfants semblent, de fait, avoir aussi comme incidence de réduire les coûts.
Nous avons reçu du financement dans le cadre de la directive 20-1 jusqu'à 2009, et notre directrice générale précédente, Joan Glode, a participé très activement aux trois examens de la directive menés par le MAINC pour la période allant des années 1990 à 2007. L'organisme qui représente les Mi'kmaws était heureux de collaborer avec nos collègues des Premières nations de partout au Canada et avec le MAINC pour documenter les injustices et trouver des solutions aux problèmes pour que nous puissions garantir à nos familles des services comparables et adaptés sur le plan culturel.
Nous étions aux premières loges pour constater à quel point le manque de services à la famille nuisait à la réussite des familles et entraînait le placement en familles d'accueil des enfants micmacs.
Nous avons aussi connu une certaine réussite quand nous avons pu adopter une approche préventive plus proactive. Nous avions alors beaucoup de difficultés à offrir des services à nos gens en sachant que nous ne pouvions pas offrir le même niveau de service que nos homologues provinciaux à cause des régimes de politiques restrictifs du MAINC. Comme il est écrit dans ce document du MAINC obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, le ministère reconnaît que ses programmes entraînent des préjudices pour les enfants et l'empêchent de respecter ses propres exigences selon lesquelles les agents doivent s'acquitter de leurs responsabilités à l'échelle provinciale. Plutôt que de s'appuyer sur l'approche axée sur des résultats employée pour rédiger le rapport Wen:de, le personnel du MAINC a élaboré le modèle amélioré de façon unilatérale et nous a présenté le modèle de financement amélioré comme seule option pour remplacer la directive 20-1, même si la vérificatrice générale avait conclu, en 2008, qu'il s'agissait d'un modèle inéquitable.
Il est écrit, dans les dossiers mêmes du MAINC, que le ministère dispose d'un modèle national rigide pour orienter la mise en œuvre dans les régions, et il est écrit clairement dans ces documents que le MAINC a le mandat de seulement discuter de l'approche améliorée avec les provinces et les Premières nations, mais n'a pas le mandat de négocier à ce sujet. Même si la vérificatrice générale du Canada a conclu que le financement amélioré constituait une amélioration par rapport à la directive 20-1, la situation demeure inéquitable, et la nouvelle approche intègre certaines des lacunes de la directive 20-1, comme le fait que le financement n'est pas fondé sur les besoins réels des enfants et des familles des Premières nations. Cela correspond à ce que nous vivons en Nouvelle-Écosse.
En 2009, l'organisme a adopté l'approche de financement améliorée fondée sur l'entente avec l'Alberta. Cela nous a permis d'accroître notre financement de 10 millions de dollars, soit environ 2 millions de dollars par année sur cinq ans, et nous en avions bien besoin pour éviter d'importants déficits. Grâce à ce nouveau financement, l'organisme a pu disposer d'un financement presque équivalent à celui qui était offert à un organisme provincial en 2007. Cela n'a toutefois pas réglé les injustices actuelles en matière de financement. Cette augmentation ne correspond pas aux besoins actuels véritables de l'organisme; il s'agit simplement d'un montant fixé par le MAINC. Le financement amélioré est une politique publique que l'on pourrait comparer à un financement qui servirait à couvrir la construction d'un pont jusqu'aux trois quarts de la rivière. Le MAINC peut dire qu'il a fait quelque chose, mais cela ne permet toujours pas aux enfants de traverser en toute sécurité. On ne peut pas se permettre de sous-estimer la vulnérabilité de nos familles, et si l'on décide de faire payer les enfants, cela entraînera, d'après nous, des coûts beaucoup plus élevés pour le gouvernement dans l'avenir.
Le MAINC a entrepris une évaluation interne de la mise en oeuvre de la formule améliorée de financement à l'Alberta, et il résume les constatations de cette évaluation dans un exposé intitulé « Évaluation de la mise en oeuvre de l'approche améliorée axée sur la prévention en Alberta: résultats provisoires, 14 mai 2010 ». Cette évaluation révèle d'importantes lacunes dans l'approche améliorée axée sur la prévention. Pourtant, le MAINC continue à faire de l'approche améliorée, avec toutes ses lacunes, la seule possibilité de financement. Il semble que le ministère n'a pris aucune mesure importante pour corriger les lacunes de l'approche améliorée cernée par la vérificatrice générale en 2008.
Les Services à la famille et à l’enfance des Mi'kmaws de la Nouvelle-Écosse en sont à la troisième année d’un plan opérationnel quinquennal. Comme nous l’avions prévu dès le départ, nous avons de nouveau de la difficulté à nous acquitter de notre mandat en raison de ressources inadéquates, surtout des ressources humaines. Nous nous retrouverons fort probablement avec un déficit dès la fin de l’exercice 2010-2011. Au cours de cet exercice, la province a accru le tarif de la pension pour les enfants de 5 p. 100. Le salaire du personnel a augmenté de 6,8 p. 100 depuis l’adoption du modèle de l’approche améliorée axée sur la prévention. Nous faisons face à une augmentation inhabituelle du nombre d’enfants ayant des besoins spéciaux particulièrement élevés. Tous ces facteurs ont eu d’importantes répercussions sur les coûts, et pourtant, aucune disposition ne prévoit de financement supplémentaire pour couvrir ces coûts accrus.
Nous avons inclus des recommandations.
Le MAINC doit prendre des mesures immédiates en plein partenariat avec les Premières nations pour corriger entièrement les inégalités et les problèmes structurels associés à la Directive 20-1 et à l'approche de financement améliorée, problème souligné par la vérificatrice générale du Canada dans son évaluation du modèle de l'Alberta. Il n'y a aucune explication rationnelle acceptable pour les inégalités dont les enfants des Premières nations continuent d'être victimes compte tenu de toute la gamme de solutions auxquelles le ministère a accès pour corriger les problèmes compte tenu de la richesse du pays.
Deuxièmement, le MAINC doit soutenir d'autres possibilités de financement et de politiques proposées par les Premières nations en ce qui concerne les services à l'enfance et à la famille des Premières nations, autres que celles prévues dans l'approche améliorée, dans la directive 20-1 et dans l'Entente sur les programmes de bien-être à l'intention des Indiens de 1965, qui ont été jugées inéquitables par la vérificatrice générale.
Troisièmement, le MAINC doit prévoir des changements des niveaux de financement à la suite de l'affaire McIvor, puisque l'augmentation du nombre d'enfants et de familles qui reçoivent des services entraînera des pressions encore plus grandes sur le financement actuel des organismes de service d'aide aux enfants des Premières nations.
Quatrièmement, le MAINC doit adopter en entier et dès maintenant le principe de Jordan pour tous les services du gouvernement de façon à faire en sorte que nous soyons certains qu'aucun enfant des Premières nations ne se voie refuser l'accès à des services gouvernementaux offerts à tous les autres enfants. Le gouvernement doit éviter d'adopter l'approche au cas par cas inefficace et inefficiente actuellement mise de l'avant par le MAINC et par d'autres ministères fédéraux.
Et cinquièmement, la dernière, le MAINC doit fournir immédiatement de la formation aux membres de son personnel pour qu'ils soient pleinement au courant de tous les rapports, y compris les rapports de la vérificatrice générale du Canada sur le programme de services à l'enfance et à la famille des Premières nations du MAINC afin qu'ils soient mieux en mesure de mettre en oeuvre les recommandations en suspens.
Merci beaucoup.
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Bonjour. Merci de me donner l'occasion de m'adresser au comité ce matin.
On compte, au Manitoba, 14 organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations à l'échelle de la province qui fournissent des SEF dans les réserves. Huit de ces 14 organismes font partie du Southern First Nation Network of Care, que j'appellerai la régie du Sud. Les deux autres organismes offrent des services seulement à l'extérieur des réserves.
Au Manitoba, les organismes de SEF des Premières nations ont été créés au début des années 1980. Bon nombre d’entre nous avons récemment fêté notre 25e ou notre 30e anniversaire, et certains organismes ont accumulé une expérience considérable. Cependant, jusqu’à la fin de 2003, les capacités des organismes de fournir des services autorisés dans les réserves étaient limitées. Au Manitoba, depuis la restructuration des SEF à la suite de la Commission d’enquête sur l’administration de la justice et les Autochtones et de l’Initiative de protection de l’enfance, les mandats ont été élargis, ce qui fait que tous nos organismes offrent maintenant des services dans les réserves et à l’extérieur de celles-ci. Ils reçoivent du financement des gouvernements provincial et fédéral, ce qui fait qu’ils sont très au courant de la façon de faire affaire avec ces deux bailleurs de fonds et des inégalités qui existent parfois entre les financements.
La régie du Sud a été créée en 2003 aux termes de la Loi sur les régies de services à l’enfant et à la famille. Il s’agit de l’une des quatre régies. À ce titre, nous sommes responsables de réglementer et de surveiller les services fournis par les organismes, et nous avons aussi le pouvoir de donner des mandats aux organismes, de les limiter, et même de les supprimer. Nous sommes aussi responsables du financement des services provinciaux offerts par les organismes. Nous sommes donc bien au courant du financement qu’ils reçoivent de la province et, en raison de notre rôle de surveillance, nous sommes bien au courant de ce qu’ils reçoivent du gouvernement fédéral.
Nous avons aussi, à la régie du Sud, dans le cadre de notre collaboration avec nos organismes, collaboré assez activement avec la province et le MAINC au sein du groupe de travail en vue d'établir un nouveau modèle de financement dans le cadre de l'approche améliorée axée sur la prévention.
J'ai aussi été, jusqu'en 2003, directrice générale de l'organisme West Region Child and Family Services, un organisme des Premières nations qui a participé, avec le MAINC, à un financement unique et complet de l'entretien. Nous avons donc une certaine expérience d'un modèle de financement proactif qui tente de réinvestir les économies dans le fonds pour l'entretien.
Étant donné que le Manitoba se prépare à adopter le modèle de financement axé sur la prévention, je ne vais pas trop m’attarder sur la Directive 20-1. On m’a dit que le comité est déjà très bien informé à ce sujet. Je pense toutefois que nous devrions prendre en considération certaines expériences que nous avons eues concernant la directive parce qu’il y a là des leçons à tirer. À mesure que nous adoptons un nouveau modèle de financement avec la province et le MAINC, certaines des expériences et des leçons que nous vivrons seront, de fait, des occasions d’apprendre de façon à que nous évitions de refaire les mêmes erreurs et de nous retrouver dans la même situation que celle dans laquelle se sont retrouvés les organismes.
J'ai été personnellement très engagée quand la Directive 20-1 a été mise en œuvre pour la première fois. À l’époque, les organismes avaient rejeté la directive. Le MAINC était tout de même allé de l’avant et l’avait mise en œuvre. Pour nous, à l’époque, il était clair que le ministère avait fixé une limite de base puis élaboré une formule qui respecterait, en quelque sorte, cette limite. C’est l’une de nos préoccupations: nous craignons que cela se reproduise avec l’adoption du financement amélioré axé sur la prévention.
La façon dont la formule de financement avait été établie dans le cadre de cette directive avait suscité un certain nombre de préoccupations, préoccupations qui reviennent avec le nouveau financement axé sur la prévention. Par exemple, les effets à long terme du modèle sont essentiellement liés à la population d’enfants. Les services d’aide à l’enfance ne forment pas un programme universel; ils sont adaptés aux enfants à risque et à leur famille. Un modèle qui s’appuie fortement sur la population d’enfants ne répond pas toujours nécessairement aux besoins. Les besoins en matière de services d’aide à l’enfance ne sont pas toujours plus grands dans les grandes collectivités. En fait, il y a de nombreux exemples de petites collectivités qui se retrouvent avec un nombre de cas beaucoup plus élevé. Dans les grandes collectivités, il y a souvent plus de ressources, comme des garderies et des écoles, par exemple, qui peuvent aider les familles dans le besoin ou aider les familles à élever leurs enfants, et de telles ressources ne sont pas toujours présentes dans les petites collectivités.
Parmi les autres préoccupations, mentionnons le fait que la directive ne prévoyait pas suffisamment de financement axé sur la prévention, de même que les montants de base utilisés dans la formule. Je pense que l’une de nos plus grandes inquiétudes au sujet de la directive concernait l’absence de méthodes claires d’examen continu du financement. La directive est en vigueur depuis plus de 20 ans et, jusqu’à tout récemment, nous travaillions encore avec des valeurs en dollars de 1992 ou 1993, et il n’y avait eu aucun examen officiel de la directive.
Même si, selon la politique du gouvernement fédéral et du MAINC, les organismes doivent être autorisés en vertu du droit provincial, il n’y a, bien souvent, aucun lien entre le financement que nous recevons et les normes et les exigences prévues par les dispositions législatives provinciales.
La formule a donné lieu à un certain nombre de problèmes. Par exemple, la formule prévoyait des augmentations au titre du coût de la vie pour les organismes. Cependant, après deux ou trois ans, la fonction publique fédérale a mis en place un gel de tous les salaires, et nous n’étions pas exemptés de ce gel. Nous avons toutefois été exemptés quand le gel a été levé, et nous avons continué à ne pas recevoir d’augmentation au titre du coût de la vie. Ce n’est que tout récemment qu’il y a eu de telles augmentations. Les organismes ont donc perdu, au total, beaucoup de ressources pour cette raison.
Le modèle de financement ne tenait pas compte, non plus, de la réalité des salaires. Nous devons demeurer concurrentiels. Nous déployons de grands efforts pour avoir une main-d’œuvre autochtone. Les travailleurs sociaux autochtones qualifiés sont très en demande dans la province, et nos organismes doivent demeurer concurrentiels, du moins en fonction de l’échelle salariale provinciale. La directive 20-1 ne tenait absolument pas compte de cet aspect.
Une autre de nos préoccupations au sujet de la directive concernait le fait qu’elle ne définissait pas clairement ce qui était inclus et ce qui ne l’était pas. Elle contenait une section sur les activités, et, en général, c’était écrit: « C’est inclus, c’est inclus, c’est inclus ». Ce qui s’est passé, au fil du temps, c'est que des éléments qui étaient considérés comme remboursables par le MAINC dans la catégorie de l’entretien étaient, d’un seul coup, considérés comme faisant partie de notre formule par le ministère, ce qui fait qu’il ne les finançait plus.
Je pense, par exemple, à l’argent destiné aux services aux familles, qui a été entièrement éliminé trois ou quatre ans après l’entrée en vigueur de la directive. C’était de l’argent qui était remis aux organismes pour qu’ils offrent des services aux enfants quand ils sont encore dans leur foyer, pour réduire ou atténuer les risques pour ces enfants. Dans les documents du ministère lui-même, il était écrit que tout cela avait eu comme résultat d’accroître le nombre d’enfants pris en charge. Évidemment, si vous regardez nos statistiques, au Manitoba, à l’époque où ces restrictions ont eu lieu, vous constaterez qu’il y a très clairement eu une augmentation des coûts d’entretien et une augmentation des enfants pris en charge.
Je pense aussi aux frais juridiques pour les enfants pris en charge. Avant l’entrée en vigueur de la directive, les organismes pouvaient se servir de l’argent prévu pour l’entretien des enfants pour couvrir ces coûts. Ce sont des coûts sur lesquels les organismes n’ont aucun contrôle. Ils doivent aller au tribunal, ils doivent être accompagnés d’un avocat, et ces coûts peuvent être très élevés. Un de nos organismes, cette année, a accumulé pour 250 000 $ de frais juridiques, et ce, pour un cas seulement. Le MAINC s’attend maintenant à ce que les organismes paient ces coûts à l’aide du financement prévu pour le fonctionnement, même si ce financement n’a pas été rajusté pour tenir compte de ce facteur. La nouvelle formule améliorée doit préciser clairement ce qui est couvert et ce qui ne l’est pas, pour éviter toutes sortes de surprises.
Le Manitoba commence à peine à adopter le modèle amélioré de prévention. Nous en sommes tout juste à l’étape où nos organismes terminent leur plan opérationnel. Nous en sommes à la première année du modèle, et notre financement est en vigueur depuis octobre. Jusqu'à présent, personne n’a vu l’ombre de ce financement parce qu’il ne sera versé que quand les plans opérationnels seront terminés. Le modèle est mis en vigueur progressivement, et on s’attend à atteindre un plein financement d’ici la troisième année.
Au Manitoba, nous nous attendons à une augmentation de 144 millions de dollars sur trois ans, soit 36,9 millions de dollars pour le fonctionnement, 91,5 millions de dollars pour la prévention, 46 millions de dollars pour la croissance de l'entretien et 2,5 millions de dollars pour le renforcement des capacités. Comme l'a déjà mentionné Carolyn Loeppky, le nouveau modèle de financement contient les éléments suivants: il prévoit un financement de base, partagé avec la province — la province fournit 60 p. 100 du financement et le gouvernement fédéral, 40 p. 100. Il prévoit les principaux postes, comme le directeur général, le directeur des finances, le coordonnateur des services de lutte contre la violence faite aux enfants, le gestionnaire des ressources humaines et le coordonnateur de l'assurance de la qualité. Enfin, il tient compte des écarts entre les grands, les moyens et les petits organismes.
La catégorie de la prestation des services compte deux volets: la protection et la prévention. Ce financement dépend de chaque cas. Le gouvernement provincial rajustera le montant chaque année en fonction des cas. Tout comme la directive, le modèle fédéral dépend grandement, encore une fois, de la population d'enfants, et on suppose que 7 p. 100 de la population d'enfants seront pris en charge — je souligne que ce pourcentage reflète le nombre de cas — et que 20 p. 100 des familles auront besoin des services. C'est comme ça que l'on prévoit les cas.
Nous avons, à l'heure actuelle, des organismes qui dépassent déjà de tels pourcentages, tant en ce qui concerne les familles que les enfants pris en charge, et ils auront très bientôt de la difficulté à obtenir les ressources adéquates.
À mesure que le modèle entrera en vigueur, tous les organismes feront face à des augmentations. Au Manitoba, au cours de la première année de financement dans le cadre du modèle, l'augmentation sera d'environ 6 millions de dollars pour les organismes du Sud — les huit organismes.
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D'accord, peut-être que d'autres sujets seront abordés quand vous poserez les questions.
Je peux donc peut-être passer aux recommandations.
Nous recommandons que le MAINC mette sur pied un processus bien compris d'examen du modèle de financement. À l'heure actuelle, le ministère n'est pas prêt à examiner le modèle avant cinq ans. Ses représentants nous ont dit très clairement qu'ils ne s'adresseraient pas au Conseil du Trésor avant cinq ans. Nous prévoyons que certaines des difficultés auxquelles nous avons fait face avec la directive feront surface au cours de ces cinq années. Nous pensons tout particulièrement que, comme il s'agit d'un nouveau modèle, il est très important que nous restions maîtres de ce qui se passe avec ce modèle et que nous apportions les corrections requises.
Nous pensons aussi que le MAINC devrait, en collaboration avec les organismes des Premières nations et les spécialistes des services d'aide à l'enfance, retravailler la méthode proposée de financement de l'entretien et qu'il devrait proposer une méthode qui prévoit une stratégie de réinvestissement. Comme on peut espérer que les organismes réussiront à réduire le nombre d'enfants pris en charge, il faut éviter de perdre cet argent et plutôt le réinvestir dans des programmes de prévention.
Nous pensons aussi que le MAINC et le gouvernement provincial devraient jouer le rôle de chef de file dans la mise en oeuvre du principe de Jordan, principe qui entre en jeu dans le cas des services d'aide aux enfants ayant des besoins élevés, services qui, sur le plan du financement, entraînent des pressions importantes pour les organismes.
Nous demandons aussi aux représentants du MAINC de déterminer, en collaboration avec les organismes et les spécialistes des services d'aide à l'enfance, les résultats appropriés pour les SEF des Premières nations, de même que les façons de mesurer ces résultats, ce qui ne peut pas être fait unilatéralement par le MAINC. Le ministère devrait aussi tenter, à l'interne, de recruter du personnel qualifié qui comprend les services d'aide à l'enfance afin qu'il y ait des spécialistes de la question pour défendre notre cause devant le Conseil du Trésor, et les organismes dirigeants.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour à chacun d'entre vous. Merci d'être parmi nous.
Madame Johnson et madame Flette, vos exposés ont été particulièrement instructifs en ce qui concerne la situation générale des services à l'enfance et à la famille.
Quand des représentants du MAINC témoignent devant notre comité, ils ne reconnaissent jamais publiquement que les services ne sont pas comparables, ou qu'ils ne sont pas suffisamment financés. Même quand la directive 20-1 était en vigueur, l'existence de ces problèmes n'a jamais été reconnue publiquement. Ils nous disent maintenant, dans leurs témoignages, que la nouvelle voie à suivre, et la seule voie à suivre, est celle du modèle amélioré de prévention. Pour évaluer le modèle, ils se servent de l'exemple de l'Alberta puisque c'est dans cette province qu'il a été mis en vigueur pour la première fois. Ils continuent d'affirmer que le modèle fonctionne en Alberta, même si, selon les résultats préliminaires, le modèle entraîne des problèmes.
J'aimerais revenir à l'analogie employée par Mme Johnson au sujet d'un pont qui franchit une rivière. Si le pont se rendait jusqu'aux deux tiers de la rivière à l'époque de la directive 20-1 et qu'il va maintenant un peu plus loin grâce au modèle amélioré de prévention, il ne franchit toujours pas la rivière, il ne permet toujours pas d'offrir des services comparables, d'offrir ce dont les enfants et les familles des Premières nations ont besoin, dans les réserves ou à l'extérieur de celles-ci.
Je connais vos recommandations. J'aimerais beaucoup, aussi, connaître le point de vue de la province du Manitoba, madame Loeppky. Est-ce que nous faisons fausse route? Est-ce que nous ne trompons pas les enfants des Premières nations et leur famille quand nous mettons tous nos oeufs dans le panier du modèle amélioré de prévention? Est-ce que chacune d'entre vous peut me dire s'il y aura des services comparables à ceux offerts par les organismes provinciaux? Serez-vous en mesure de respecter les normes établies dans les dispositions législatives de chacune de vos provinces?
Deuxièmement, je n'arrive pas à comprendre clairement où se situe le principe de Jordan dans ce modèle amélioré de prévention. Est-ce qu'il a été mis en oeuvre en entier, ou si on cherche des excuses? Y a-t-il encore des disputes à l'interne pour déterminer qui doit payer dans des circonstances particulières?
Chacune d'entre vous peut répondre.
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Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]
Je m’appelle Howard Cameron, père, et je suis de la Première nation Beardy's et Okemasis, en Saskatchewan. Je suis le chef de cérémonie de ma collectivité. Je porte ce titre, ce qui sous-entend que je suis un Aîné. Je suis père, grand-père et arrière-grand-père.
Je suis honoré d'avoir l'occasion de m'adresser à vous, et je le dis en toute humilité. Je parle au nom de toutes les Premières nations de la Saskatchewan.
J'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion d'être ici aujourd'hui. Je crois que la décision du comité d'examiner cette question est une étape positive dans la réconciliation, puisqu'il vise à répondre aux besoins véritables des enfants des Premières nations.
Même si j'apprécie les témoignages de tous ceux qui ont parlé, le Canada n'est pas un pays uniforme. Les Premières nations varient beaucoup d'une région à l'autre. À mon avis, je dois parler des défis et des besoins uniques des Premières nations de la Saskatchewan.
Même s’il y a de nombreuses études sur la santé et le bien-être des enfants et des jeunes des Premières nations, dont La santé des enfants autochtones: Pour tous les enfants, sans exception et L’intérêt supérieur de l’enfant de l’UNICEF , il n’y a pas eu beaucoup de recherches sur les enfants et les jeunes des Premières nations de la Saskatchewan, en particulier. En février 2009, le bureau du protecteur des enfants de la Saskatchewan a publié A Breach of Trust: An Investigation into Foster Home Overcrowding in the Saskatoon Service Centre . Le bureau du protecteur des enfants de la Saskatchewan a dressé le portrait alarmant et souvent choquant de la réalité des enfants et des jeunes de la Saskatchewan.
J'ai récemment participé à l’examen des services d’aide à l’enfance de la Saskatchewan, en tant que membre d'un groupe d'experts. Au cours d’une période de huit mois, nous avons entendu plus de 1 200 participants — dont de nombreux chefs de Premières nations, de nombreux organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations, et de nombreux membres des Premières nations. Ce que nous avons entendu, c’est que l’on doit apporter des changements profonds au système d’aide à l’enfance provincial et que le gouvernement de la Saskatchewan doit en faire davantage pour remédier à la surreprésentation des enfants des Premières nations qui intègrent le système de services d’aide à l’enfance et qui n’en ressortent pas.
Les enfants et les jeunes des Premières nations de la Saskatchewan font face à des problèmes complexes qui ont des répercussions négatives sur leurs conditions de santé, leur nutrition et leur santé mentale. Ces problèmes s’ajoutent aux conflits sur le financement entre le gouvernement fédéral et la province de la Saskatchewan pour rendre l’accès aux services extrêmement problématique. Dans certains cas, la complexité des différends entre le fédéral et la province empêche l’élaboration et la mise en œuvre de programmes et de services nécessaires.
Le rapport de 2005 Wen:de: Nous voyons poindre la lumière du jour nous a appris que, aujourd’hui, trois fois plus d’enfants autochtones sont pris en charge par le gouvernement qu’à l’apogée du système de pensionnats, dans les années 1940.
En juin 2009, en Saskatchewan, le ministère des Services sociaux de la province de la Saskatchewan avait la charge de 3 519 enfants. Selon le Rapport statistique sur les services à l’enfance et à la famille de 2009, 1 209 enfants des Premières nations étaient sous la garde d’organismes de services d’aide à l’enfance des Premières nations, en mars 2009. Le protecteur des enfants de la Saskatchewan a indiqué que, uniquement au sein du Saskatoon Service Centre, 63 p. 100 des enfants sous la garde de la province de la Saskatchewan sont des enfants des Premières nations. Cela est tiré du document de 2009 A Breach of Trust: An Investigation into Foster Home Overcrowding in the Saskatoon Service Centre . En décembre 2010, dans son rapport final intitulé For the Good of Our Children and Youth, le protecteur des enfants déclare: « Même si les Autochtones représentent environ 15 p. 100 de la population de la province, près de 80 p. 100 des enfants et des jeunes de la province qui avaient été placés hors de leur foyer à la fin de l’exercice financier 2008-2009 étaient Autochtones ».
Les 18 organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations de la Saskatchewan qui sont situés sur des réserves réalisent leurs activités dans le cadre d’un modèle de services d’aide à l’enfance qui leur a été délégué dans le cadre d’ententes avec les gouvernements provincial et fédéral. Les organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations de la Saskatchewan sont financés par le gouvernement fédéral dans le cadre de la Directive 20-1, et ils reçoivent une petite portion du financement accordé par la province de la Saskatchewan. Toutefois, non seulement les organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations doivent appliquer les mécanismes de reddition de comptes provinciaux et fédéraux, mais ils doivent également respecter les normes de leur conseil, des Premières nations individuelles et de leur région, qui ont été établies dans la 1994 Federation of Saskatchewan Indian Nations Indian Child Welfare and Family Support Act.
Un examen national conjoint de la Directive 20-9 qui a été réalisé en 2000 a révélé que les fonds fournis aux organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations étaient inadéquats et ne tenaient pas compte de la réalité actuelle. Le mode de financement des services à l’enfance et à la famille n’a pas été révisé depuis 1988. La dernière modification liée à l’inflation remonte à 1995. L’augmentation annuelle des fonds fournis aux organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations par Affaires indiennes et du Nord Canada a plafonné à 2 p. 100, tandis que les coûts réels des activités de ces organismes ont augmenté de 11 p. 100 annuellement. On n’a toujours pas donné suite à un grand nombre des recommandations formulées dans le cadre de l’examen de la politique nationale.
En 2008, les organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations de la Saskatchewan ont reçu 104,8 millions de dollars pour mettre en œuvre le cadre de prévention de la Saskatchewan. Depuis cet investissement initial, le MAINC n’a versé aucune autre somme à la province. Un grand nombre des 18 organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations de la Saskatchewan, mais pas tous, ont intégré la prévention dans leur travail de première ligne. L’un des objectifs du cadre de prévention est de réduire le nombre d’enfants des Premières nations qui sont placés sous garde dans les réserves. Les services de base des organismes des Premières nations sont financés. Un bon nombre de ces organismes en sont à la troisième année de cette entente, et le nombre de plus en plus élevé de cas, et plus particulièrement de cas ayant des besoins très importants, crée un fardeau financier qui a des répercussions sur la capacité de ces organismes de gérer leurs budgets de fonctionnement et d’entretien.
Le nombre de cas transférés de l’extérieur des réserves aux réserves augmente, ce qui fait croître le volume de travail dans les réserves, et il faut renvoyer au MAINC les cas dont le placement a échoué. Le MAINC considère actuellement le nombre important de cas dans les réserves comme étant en contradiction avec le cadre de prévention de la Saskatchewan. Le nombre élevé de cas qui ont des besoins importants grève les budgets déjà insuffisants des organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations et a des répercussions graves sur leurs budgets d’entretien et de fonctionnement.
Les organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations de la Saskatchewan reçoivent des fonds pour la prévention, mais le financement fourni par le MAINC a surtout permis d’assurer le fonctionnement de ces organismes et de verser les salaires. Les organismes de services à l’enfance et à la famille des Premières nations ont très peu de fonds restants pour faire l’acquisition de services. Selon le mode de financement, les ressources pour l’acquisition de services de prévention équivalent à 6 p. 100 du nombre d’enfants des Premières nations dans les réserves de la zone de recrutement où œuvre l’organisme de services à l’enfance et à la famille des Premières nations. Le volet de prévention comprend également des fonds pour les travailleurs des programmes de valorisation de la famille, et il s’agit, pour l’organisme, non pas d’un financement souple, mais d’un financement fixe.
Le fait que le MAINC évalue le budget et le modifie pour réaffecter des fonds est une répercussion additionnelle; toutefois, ces fonds réaffectés ne reviennent pas à l’organisme de services à l’enfance et à la famille des Premières nations. Les fonds réaffectés ont plutôt comme effet de faire baisser le montant versé à l’organisme et ils sont comptabilisés en tant que modifications budgétaires par le MAINC. Ni le mode de financement annoncé durant l’élaboration du modèle de prévention pour les Premières nations de la Saskatchewan et de l’accord-cadre sur la responsabilisation ni le modèle de prévision des coûts ne faisait état du processus de réaffectation des fonds. Les organismes ne savaient pas, non plus, qu’ils perdraient l’accès à cette partie des fonds. À l’heure actuelle, on ne sait toujours pas ce qu'il est advenu des fonds réaffectés, et, à la lumière de la réaffectation des fonds par le MAINC, les Premières nations de la Saskatchewan ont demandé une évaluation à mi-mandat des fonds de prévention. Les membres des Premières nations ont tous besoin de demeurer dans leur collectivité, où leurs attaches à leur culture, leur langue et leurs systèmes de valeurs sont les plus fortes, et où ils ont plus de chances de réussir. Le fait de demeurer dans leur collectivité permet à ces enfants de devenir des adultes sains et, au bout du compte, des parents sains, et de briser le cycle du désespoir créé par les effets intergénérationnels du système de pensionnats.
Si on ne reconnaît pas l’importance du problème du sous-financement, nous continuerons de voir les enfants des Premières nations retirés de leur foyer, et éloignés de leur famille et de leur collectivité en raison du manque de fonds. Les services coûtent de l’argent. Beaucoup de collectivités des Premières nations sont incapables de fournir des programmes ou des services, non pas en raison d’un manque de volonté ou d’expertise, mais en raison d’un manque de fonds.
Nous avons vu les répercussions du système de pensionnats. Nous devons apprendre de nos erreurs et faire mieux.
Merci beaucoup.
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Je vais essayer d'être délicat.
Quand on a mis sur la table ce dossier du principe de Jordan et le reste, je vous avoue que, d'emblée, je me demandais si ça en valait la peine.
Selon moi, mes collègues qui ont amené ce dossier se doutaient peut-être du problème qu'on vivait, mais ils ne se doutaient pas qu'on allait ouvrir une telle boîte de Pandore. Je suis impressionné tout en étant outré et je me sens impuissant face à ce que vous venez de nous dire.
Je vais dire les choses comme je les pense. J'ai pris des notes, et on va faire un rapport. Je vous laisserai répondre. Il m'apparaît qu'il y a beaucoup trop de fonctionnaires qui fonctionnent en faisant fonctionner ce fonctionnariat qui ne fonctionne plus, et on ne se préoccupe pas... La priorité n'est pas l'enfant. On dirait qu'on l'a perdu de vue.
Il s'agit de savoir qui va payer la paire de béquilles. Je sais de quoi je parle, car j'ai une canne et des béquilles depuis quelques mois. Et ce ne sont pas des reproches que je vous adresse; on dirait qu'on vous a dit de vous occuper et qu'on vous enverrait peut-être le chèque.
À mon avis, on devrait recommander que soit éliminée cette fameuse directive 20.1. Il va falloir qu'il se passe quelque chose. Je suis d'accord avec M. Cameron. Ça n'a pas de bon sens. Ça va être grave au cours des prochains mois. On n'a pas eu de témoins du Québec, mais je suis très sensible à cela parce qu'au Québec, c'est pareil.
Le gouvernement fédéral doit-il se retirer? Doit-il réduire ses attentes quant au fait d'être partie prenante des bailleurs de fonds? Quand on me dit qu'il y a des ententes étalées sur cinq ans, je trouve que cela pose un problème: il faut aller au Conseil du Trésor chaque année, et c'est année après année.
Je veux vous entendre sur cette question. Je vais vous laisser le reste de mon temps pour répondre —, trois ou quatre minutes. Que pouvons-nous faire ici, nous, les députés, pour vous aider, pour éviter ce qu'a dit le chef Cameron? Je sens que ça s'en vient comme un raz-de-marée et que ça va nous faire mal. Une commission d'enquête serait-elle nécessaire? Il y en a déjà eu.
Que peut-on faire concrètement pour vous aider, et qu'on va insérer dans le rapport qu'on va rédiger au cours de la prochaine semaine? C'est vite.
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Nous travaillons avec des ministères aussi bien provinciaux que fédéraux.
À l'échelle provinciale, nous travaillons principalement en collaboration avec les ministères de la Santé, de la Justice et de l'Éducation, ainsi qu'avec le ministère de la Vie saine. Dans tous ces secteurs, il y a divers programmes qui touchent les services d'aide à l'enfance et les enfants au sein des familles.
À l'échelle fédérale, nous travaillons en collaboration avec le ministère de la Santé, la DGSPNI et le MAINC. Ce sont les trois organismes avec lesquels nous travaillons le plus. Parfois, nous travaillons aussi avec les organisations qui ont un lien avec les services d'aide à l'enfance parce que notre portefeuille comprend également l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Il y a donc probablement environ huit ministères distincts avec lesquels nous travaillons régulièrement.
Au Manitoba, nous avons des structures officialisées au sein de notre propre gouvernement provincial pour cerner les organisations qui se chevauchent et/ou s'appuient et se complètent. Il y a Enfants en santé Manitoba. Cette organisation a une structure et une législation très officialisées en place pour examiner la collaboration avec notre propre gouvernement et au sein de ce dernier.
Nous travaillons à un certain nombre de choses avec le gouvernement fédéral. Un plan d'action manitobain pour les enfants a été mis en place il y a probablement environ sept ou huit ans. Nous travaillons en collaboration avec le gouvernement fédéral pour cerner les enjeux qui touchent les enfants et qui relèvent de divers ministères. Puis, à l'échelle du travail lui-même, nous avons, comme je l'ai indiqué plus tôt, un groupe de travail conjoint avec le MAINC qui examine les diverses questions liées aux services d'aide à l'enfance. De plus, nous travaillons avec le Secteur de la vérification et de l'évaluation du MAINC dans un effort commun pour étudier les examens de l'assurance de la qualité liés aux finances de tous nos organismes des Premières nations.
Il y a donc une panoplie de gens qui ont la responsabilité ou le mandat de fournir des services aux enfants et aux familles, et qui se croisent et se recoupent. Il faut beaucoup de collaboration et parfois des négociations pour essayer d'atteindre des résultats finaux qui, selon nous, aideront les enfants et les familles.
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux d’avoir l’occasion de poser quelques questions. L’impression que me donne le gouvernement du Manitoba n’est pas pareille à celle que me donne l’organisme en ce qui concerne la collaboration, le caractère adéquat du financement, la flexibilité et ce genre de choses.
D'aucuns disent que le modèle amélioré a été imposé, qu'il ne répond pas aux besoins et qu'il n'est fondé que sur des formules, des ratios et des pourcentages.
Cela dit, je vais demander à nos analystes de faire quelque chose. Nous avons besoin de savoir ce qui s’est passé dans le cadre des négociations entre le Manitoba et le MAINC et ce qui s’est passé en Alberta. La différence est-elle si grande que cela? Y a-t-il vraiment beaucoup plus de souplesse au Manitoba? Et nous pourrions probablement même inclure la Nouvelle-Écosse dans cette comparaison pour voir ce que cela donnerait. C'est l’impression qu’on nous donne.
Mais il y a des problèmes. Je crois que tous les membres du comité reconnaissent que l’approche améliorée axée sur la prévention pose certains problèmes. Quelles conséquences les enfants et les familles subiront-ils si nous ne réglons pas ces problèmes? Je crois que, au bout du compte, c’est ce que nous essayons de faire. Qu’adviendra-t-il des enfants et des familles si nous ne rectifions pas l’approche améliorée axée sur la prévention, laquelle reflète l’orientation que le gouvernement fédéral veut adopter?
Au sujet du gouvernement du Manitoba — tous les autres intervenants ont fait une recommandation ou deux — je me demandais tout simplement, madame Loeppky, si vous pouviez faire une recommandation au comité. Que voulez-vous que nous recommandions, en tant que comité, au gouvernement fédéral?
C'est une question pour chacun de vous.