:
Merci, monsieur le président.
J'allais justement dire que ce n'est peut-être pas mon rôle de commenter la motion.
[Traduction]
Mais je pourrai peut-être fournir des renseignements supplémentaires et certaines réponses qui vous aideront à mieux comprendre les conséquences de cette motion.
[Français]
Monsieur le président, au cours des dernières semaines, plusieurs témoins se sont présentés à l'une des cinq réunions de ce comité dédiées au programme Nutrition Nord Canada, afin de faire valoir leur point de vue.
M. Jamie Tibbetts, directeur général du transfert des responsabilités et relations territoriales, et moi-même sommes de retour aujourd'hui afin de répondre aux questions que les membres voudront bien nous poser au sujet du programme.
Nous aimerions aussi saisir l'occasion de clarifier certaines informations qui ont été apportées par les différents témoins au cours des réunions précédentes.
[Traduction]
Un des mythes les plus importants liés à ce nouveau programme veut que les coûts d'expédition, et ultimement le prix des aliments, vont grimper puisque nous perdrons les économies d'échelle et le pouvoir de négociation de Postes Canada.
Compte tenu du volume de marchandises expédiées par les détaillants du Nord et les fournisseurs du Sud, il semble que ce ne serait pas le cas. En réalité, si on excepte sa participation au programme Aliments-poste, la Société canadienne des postes ne donne pas dans l'expédition de marchandises. Son domaine d'expertise est l'expédition du courrier et des petits colis.
En revanche, les gros détaillants, qui comptent environ 90 p. 100 des magasins du Nord où les gens font leur épicerie, expédient déjà de grosses quantités de marchandise. Ceci se traduit par un pouvoir de négociation pour ce type de fret qui est supérieur à celui de Postes Canada.
Dans ce contexte, nous avons comparé les tarifs d'expédition négociés par Postes Canada avec les compagnies aériennes à ceux payés par les gros détaillants pour l'expédition des marchandises. Les résultats de cette analyse sont présentés dans le tableau qui vous a été distribué.
[Français]
Je crois que c'est disponible dans les deux langues.
[Traduction]
Il y a 69 collectivités admissibles où au moins un gros détaillant opère un magasin. Dans 54 de ces 69 collectivités, le tarif d'expédition négocié par le détaillant est plus bas que celui obtenu par Postes Canada.
Ces 54 collectivités reçoivent 91 p. 100 du poids des aliments périssables expédiés dans les 69 collectivités mentionnées précédemment. Le tarif négocié par Postes Canada est plus bas dans seulement 14 collectivités qui reçoivent 8 p. 100 du poids expédié. Il y a une seule collectivité (Norman Wells, dans les Territoires du Nord-Ouest) où le tarif est le même pour les détaillants et Postes Canada, ce qui représente 1 p. 100 du poids.
En moyenne, Postes Canada paie environ 36 ¢ de plus par kilogramme que les détaillants pour expédier la nourriture aux collectivités admissibles. Si on extrapole pour l'ensemble du programme, cela représente un coût additionnel de 7 millions de dollars par année. Ces fonds ne sont donc pas disponibles pour aider à faire diminuer le prix des aliments sains pour les consommateurs du Nord ou pour investir dans la promotion de la santé et dans les activités éducationnelles sur la nutrition.
En plus des volumes plus importants et des mesures incitatives plus intéressantes, le nouveau modèle offre aux détaillants et aux fournisseurs la flexibilité nécessaire afin de chercher des solutions novatrices et économiques qui faciliteront l'accès aux aliments sains.
[Français]
Le nouveau modèle offre également une plus grande flexibilité au ministère, afin de pouvoir répondre en temps opportun aux inquiétudes soulevées par les consommateurs du Nord et les parties prenantes. Ainsi, il existe une plus grande marge de manoeuvre pour faire des ajustements nécessaires pour améliorer le programme de façon continue.
Un exemple concret de cette flexibilité est reflété dans une situation qui a été portée à notre attention récemment, au sujet des collectivités de la Côte-Nord du Québec qui utilisent seulement le programme environ trois mois par année, lorsqu'il n'y a pas de service maritime. Dans le cas présent, il avait été déterminé que les collectivités seraient admissibles à un taux de contribution partiel, puisque le poids expédié vers ces collectivités, dans le cadre du programme, n'atteignait pas le seuil minimum établi.
Cependant, étant donné que le programme Aliments-poste n'est utilisé que de manière saisonnière dans ces collectivités, le poids des expéditions aurait dû être annualisé. Selon ces informations, il a été déterminé que les collectivités de Harrington Harbour, La Tabatière et Tête-à-la-Baleine seront admissibles à une contribution complète, à compter du 1er avril 2011.
De plus, ainsi que nous l'avions mentionné lors de la réunion du comité du 15 novembre dernier, la liste des taux de contribution par collectivité a été communiquée le 1er décembre. Ces taux ont été établis en fonction de chaque collectivité et permettent d'allouer le budget du programme de manière juste et équitable.
Ils ont été établis au moyen d'une analyse comparative des coûts d'expédition réels du marché, par collectivité, et des estimations du poids des aliments admissibles que l'on prévoit expédier dans chaque collectivité, dans le cadre du programme Nutrition Nord Canada.
Afin de s'assurer que les collectivités admissibles sont traitées de façon juste et équitable, ces taux de contribution pourraient être réévalués et mis à jour avant le 1er avril 2011, et régulièrement par la suite, au fur et à mesure que les informations plus à jour concernant les coûts d'expédition et le prix des aliments deviennent disponibles.
[Traduction]
Ces deux exemples ne sont qu'un aperçu de la flexibilité accrue qui permettra de réagir plus rapidement aux informations portées à notre attention en apportant des ajustements au programme. Tout en demeurant dans les limites de la portée nationale et des autorités du programme, nous prévoyons que ce modèle permettra une amélioration continue du programme. Le conseil consultatif externe, maintenant composé de sept résidents du Nord à la suite de l'annonce du 25 novembre, aidera également à assurer que le programme demeure réceptif aux besoins des gens des collectivités isolées du Nord.
En revanche, le programme Aliments-poste, qui est en opération depuis les années 1960, offre très peu de flexibilité et n'encourage pas l'innovation, ce qui donne lieu à une flambée perpétuelle des coûts. Nutrition Nord Canada présente un modèle plus économique et flexible qui rehaussera les niveaux de responsabilisation et de transparence, ce qui ne peut être accompli dans le cadre du modèle du programme Aliments-poste.
Il a été suggéré que la mise en oeuvre de Nutrition Nord Canada soit retardée d'une année. En plus de repousser dans le temps les avantages escomptés du nouveau programme, un tel délai pourrait avoir des impacts négatifs importants pour les résidents du Nord, les parties prenantes et les coûts pour les contribuables canadiens.
Le plus important impact pourrait être ressenti par les gens du Nord si on se trouvait dans une situation où on serait dans l'impossibilité d'offrir quelque programme de contribution que ce soit à compter du 1er avril 2011. À la suite de l'annonce du 21 mai dernier, Postes Canada a déjà commencé à se préparer pour la fin du programme Aliments-poste.
Selon ce qui nous a été rapporté, Postes Canada met fin graduellement à ses contrats avec les transporteurs aériens qui expédient la marchandise du programme Aliments-poste et ne prévoit pas que de tels contrats seront en vigueur à partir du 1er avril prochain. L'organisation procède également à la réaffectation des employés qui travaillaient aux opérations du programme Aliments-poste.
Je ne peux évidemment pas parler au nom de la société de la Couronne, mais nous croyons qu'il pourrait s'avérer très dispendieux, voire impossible, de repousser la mise en oeuvre du programme Nutrition Nord. De plus, les parties impliquées dans la chaîne d'approvisionnement, des fournisseurs alimentaires jusqu'aux détaillants, en passant par les transporteurs aériens, ont commencé à prendre les arrangements nécessaires pour s'ajuster au nouveau programme. Si l'on décidait de reporter la mise en oeuvre du programme, il pourrait en résulter des pertes financières pour plusieurs de ces parties prenantes et peut-être même des poursuites judiciaires contre la Couronne.
[Français]
En terminant, monsieur le président, ce que le comité a entendu des témoins, lors de son étude du programme, n'est pas différent de ce que les fonctionnaires ont entendu pendant l'examen du programme Aliments-poste. Les opinions et les points de vue sur la meilleure façon d'appuyer l'accès aux aliments périssables sains pour les habitants du Nord divergent beaucoup et sont aussi souvent contradictoires. Comme les travaux du comité aident à le démontrer, ces points de vue sont souvent teintés par les intérêts financiers que les compagnies aériennes, les détaillants, les grossistes et les autres joueurs engagés dans la chaîne d'approvisionnement possèdent dans ce programme. Ces compagnies ont évidemment le droit de défendre leurs intérêts et de tenter d'influencer la politique publique à leur avantage.
Cependant, dans le cadre de cette discussion, les fonctionnaires cherchent à présenter les informations de façon objective et en ciblant l'objectif principal du programme, c'est-à-dire de contribuer à rendre les aliments sains plus accessibles aux résidants des collectivités isolées du Nord.
Je vous remercie.
[Traduction]
Merci.
Nous sommes bien évidemment à votre disposition pour répondre à vos questions.
:
On parle de taux préliminaires, car ils devraient être mis à jour périodiquement au fur et à mesure que l'information deviendra disponible. Quant au cadre du nouveau programme, nous recevrons des données sur les prix ainsi que sur les coûts et nous pourrons nous adapter en cours de route. Au départ, nous avons utilisé les données du programme Aliments-poste pour 2009-2010 pour chaque collectivité ainsi que les prévisions pour la prochaine année.
Si les conditions changent et certaines de ces prévisions se révèlent erronées, nous pourrons donc ajuster nos taux en conséquence, dans les limites de l'enveloppe prévue. Les données que nous recevrons dans le cadre du programme nous permettront d'assurer le suivi des niveaux de consommation ainsi que des marchandises expédiées.
Je crois que ces taux sont assez rapprochés de ceux actuellement payés par Postes Canada. Dans quelques cas, des entreprises ont indiqué qu'elles croyaient que le taux pourrait être plus élevé dans une collectivité ou une autre. Cela est dû au fait que nous avons utilisé, toutes les fois où c'était possible, deux ou trois taux différents sur le marché. Cela peut essentiellement indiquer que l'entreprise paie davantage que ce que d'autres ont à débourser. Avec ces structures de tarification, nous ciblons la limite la plus basse, plutôt que l'inverse.
Enfin, les taux ne visent pas à subventionner à 100 p. 100 les coûts du transport aérien. Il s'agit de rendre ces coûts plus abordables afin d'égaliser les chances pour tous. Si nous obtenions des fonds additionnels, nous pourrions offrir des taux encore plus avantageux. Mais pour l'instant, nous répartissons les sommes disponibles de manière à ce que tous contribuent. Dans certaines collectivités, comme au Manitoba — je crois que vous avez posé une question à ce sujet lors de ma dernière comparution — on paie beaucoup moins que les tarifs de Postes Canada, ce qui fait qu'on se situe encore sous le plancher établi. Comme les nouveaux taux n'entraînent aucune perte, tout cela s'inscrit dans une certaine continuité.
Mme Jean Crowder: Je voudrais seulement...
M. Jamie Tibbetts: Pourrais-je...
J'ai une autre question.
Le président: Une dernière.
Mme Shelly Glover: Elle est liée à la dernière que je vous ai posée. Elle va aussi dans le même sens que les remarques de M. Lemay selon lesquelles certaines personnes se présentent devant le comité pour dire qu'elles ont besoin de points d'entrée, sinon des emplois risquent d'être perdus ou on enverra dans le Nord des bananes pourries, et qu'il faut trouver une façon de demander des comptes aux responsables.
Mais quand l'ancien programme était en vigueur, personne n'était tenu responsable lorsque des produits étaient avariés, parce qu'il n'y avait pas d'assurance, n'est-ce pas?
M. Patrick Borbey: C'est exact.
Mme Shelly Glover: Pourtant, avec Nutrition Nord Canada, quand nous demandons des comptes à un détaillant, celui-ci a une assurance, ce qui permet aux consommateurs d'être dédommagés en cas de problème -- si j'ai bien compris ce que j'ai appris ici --, parce qu'il y a certains protections.
Est-il envisageable de reprendre la motion de M. Lévesque? Quelle sera l'incidence sur les points d'entrée? Si nous adoptons cette motion et que nous remettons les points d'entrée, etc., ne risquons-nous pas tout simplement de réduire à néant tous les progrès accomplis dans le cadre du nouveau programme? Nous perdrions l'assurance et tous ce que nous avons réussi à obtenir en faveur des consommateurs, n'est-ce pas?
:
On se comprend, quand vous dites « les grands détaillants ». En bon français, ce sont ceux qui ont les reins solides. Est-on d'accord?
M. Patrick Borbey: Bien, ce sont ceux...
M. Jean-Claude D'Amours: En règle générale. Peut-être que vous ne voulez pas être d'accord. En règle générale, ce sont ceux qui ont les reins solides. Les 25 p. 100 restants, les plus petits, ont peut-être les reins un peu moins solides. Si la tendance est actuellement d'équilibrer le fonctionnement des ententes de contribution du gouvernement fédéral et que ça prenne de deux à six mois avant qu'un paiement puisse être fait... Je ne parle pas du premier, je parle des autres, par la suite. Les petits détaillants, les 25 p. 100 qui restent, n'ont pas les reins suffisamment solides pour fonctionner de cette manière. Malgré cela, le ministère a décidé que c'est le processus normal de dealer avec 200 entreprises qui vont faire des demandes régulièrement. Cela veut dire qu'une personne, vous l'avez dit, sera désignée pour s'occuper de cela. Elle devra vérifier toutes les demandes une par une.
Qu'est-ce qui se passe quand ça prend deux, trois, quatre...? Il s'agit de denrées périssables. Quand il est question d'alimentation, la marchandise doit être payée la semaine suivante. Si ce n'est pas payé la semaine suivante, il y a un problème parce que les détaillants n'ont plus d'argent. S'ils n'ont pas d'argent, il ne peuvent rien acheter d'autres denrées. Si cela prend deux mois avant de pouvoir payer les petits détaillants et que ces derniers ne soient pas en mesure de payer leurs fournisseurs, que devient la population du Nord?
Je comprends, vous dites que ce sera le problème, la faute du détaillant. Les gens se plaindront auprès de lui. Oui, mais, comment allez-vous garantir que le paiement ne se fera pas comme il se fait dans le moment, c'est-à-dire au bout de deux à six mois?
:
Merci, monsieur le président.
D'abord, vous me dites que le coût du nouveau programme Nutrition Nord Canada est approximativement le même que celui d'Aliments-poste.
Vous reconnaissez donc que, pour rendre le programme Nutrition Nord Canada concurrentiel, il faut réduire la quantité d'aliments que les peuples des Premières nations, les Inuits, reçoivent présentement. Il y en aura moins et le programme coûtera moins cher. Dans les faits, son coût demeure le même.
À ce sujet, vous n'avez pas considéré que les aliments retirés du programme devront être entreposés et qu'il reviendra aux communautés ou aux détaillants de s'occuper de cela.
Vous nous dites aussi que le calcul des subventions est important pour vous. Ce qui vous importe, c'est de vous assurer que la subvention que donne le ministère sera appliquée à l'aliment en question lorsqu'il est payé à la caisse.
Vous ne considérez pas que le transport puisse coûter plus cher. Prenez, par exemple, une livre de beurre coûtant 8,49 $ et qui revient à 9,60 $ ou à 9,65 $ en vertu du nouveau programme parce que le détaillant n'a pas la même force de négociation. Ce n'est pas vrai qu'il aura la même force de négociation et First Air nous l'a dit, ça pourrait coûter plus cher. Si la livre de beurre coûte 9,67 $ au lieu de 8,49 $, ça vous importe peu, pourvu que le montant de la subvention soit appliqué à cette livre de beurre. Est-ce exact?
:
Je choisirai de ne pas répondre à la dernière question, mais je répondrai aux autres avec plaisir.
Pour ce qui est de l'élimination du subside pour les aliments non périssables et les non-aliments, je veux simplement rappeler qu'on avait déjà démontré devant ce comité que, du point de vue économique, que ce soit pour le consommateur ou le contribuable, ce n'était pas une aubaine que d'envoyer par avion des produits tels que des couches. Ça peut coûter beaucoup moins cher de les envoyer par bateau.
La question de l'entreposage a aussi été soulevée. C'est certain que des dépenses d'entreposage supplémentaires seront engagées par les détaillants dans le Nord.
Cependant, je pense avoir déjà dit au comité que pour moins de 1 000 $, la compagnie maritime laissera un conteneur dans la communauté pour ajouter à la capacité d'entreposage de l'entreprise.
Par ailleurs, j'inviterais les gens à aller visiter les détaillants dans le Nord pour voir combien d'espace dans les entrepôts est réservé aux boissons gazeuses et autres aliments qui ne sont pas nutritifs. On a transmis l'avis de changement au mois de mai. Ces détaillants auraient dû changer les priorités liées à l'allocation d'espace d'entreposage. Ils ne sont pas la majorité, je crois qu'il n'y en a que deux qui ne l'ont pas fait. Tous les autres détaillants du Nord ont fait les changements nécessaires afin de faire de la place pour les produits qui ne seront plus couverts et faire leur commande annuelle par l'entremise du Sealift, comme on l'appelle.
Vous avez ensuite parlé de vérifications. Postes Canada ne vérifie pas tout à 100 p. 100. Ce n'est qu'une petite partie des aliments qui sont vérifiés afin de s'assurer qu'au moment où ils parviennent à la communauté, ils sont encore de bonne qualité. Postes Canada ne fait pas de vérification à 100 p. 100. Ça ne fait pas partie du contrat, du service offert.