:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invitée à parler du travail réalisé par l'Agence canadienne de développement international dans le domaine de la santé des mères et des enfants.
L'efficacité de l'aide est une priorité du gouvernement du Canada, et le travail accompli par l'agence dans le domaine de la santé des mères et des enfants donne suite à l'engagement pris par le gouvernement de fournir une aide au développement ciblée et efficace et de rendre des comptes à cet égard.
[Traduction]
L'amélioration de la vie des mères et des enfants est souvent considérée comme un problème majeur dans les pays en développement. La présence d'enfants en bonne santé, prêts à apprendre 1orsqu'ils atteignent I'âge scolaire, est nécessaire à la croissance et à la prospérité à long terme de tous les pays et sociétés. Et, pour veiller à ce que les enfants soient en santé, il faut d'abord s'occuper de leurs mères. C'est pourquoi améliorer la santé des mères et réduire la mortalité juvénile sont des éléments fondamentaux du cadre international que constituent les Objectifs de développement du Millénaire.
[Français]
C'est aussi pourquoi le gouvernement a choisi de se faire le champion de cette cause au sommet du G8.
[Traduction]
La revue médicale The Lancet signalait récemment que, selon une nouvelle étude menée par des chercheurs de l'Université de Washington et de l'Université du Queensland, en Australie, le taux de mortalité maternelle a reculé de 35 p. 100 entre 1980 et 2008.
Bien que je doive préciser qu'il s'agit d'une seule étude, les premiers rapports sur les nouvelles données de l'Organisation mondiale de la santé semblent aller dans le même sens. Si les données sont confirmées, elles prouveront qu'investir dans la santé des mères peut sauver la vie de millions de femmes.
[Français]
Malgré ces résultats encourageants, les progrès sont plus lents qu'ils ne le devraient.
Permettez-moi de parler d'abord du cinquième objectif du millénaire pour le développement, soit d'améliorer la santé maternelle.
[Traduction]
De tous les Objectifs de développement du Millénaire fixés il y a 10 ans, l'objectif portant sur la santé maternelle est celui dont la réalisation accuse le plus grand retard. Les complications liées à la grossesse et à l'accouchement sont la principale cause de décès chez les mères âgées de 15 à 19 ans. Chaque année, plus de 500 000 mères meurent dans le monde à la suite d'une grossesse ou d'un accouchement, particulièrement en Afrique subsaharienne et en Asie. Vingt millions de mères souffrent de maladies liées à une grossesse qui persistent tout au long de leur vie ou gardent des séquelles d'une grossesse.
[Français]
La situation est tout aussi inquiétante en ce qui concerne le quatrième objectif du millénaire pour le développement, qui est de réduire la mortalité juvénile.
[Traduction]
Même si le nombre de décès d'enfants de moins de cinq ans a reculé de façon constante à l'échelle mondiale, nous n'avons pas encore obtenu les résultats nécessaires pour atteindre les Objectifs de développement du Millénaire d'ici 2015.
Chaque année, trois millions de nourrissons meurent dans les sept jours suivant leur naissance et dans les pays en développement, près de neuf millions d'enfants de moins de 5 ans vont mourir de causes facilement évitables, comme la pneumonie, la diarrhée, le paludisme, la malnutrition aiguë sévère, la rougeole et le VIH.
Avec la tenue prochaine du Sommet du G8, en juin, et du Sommet des objectifs du Millénaire pour le développement des Nations Unies, en septembre, nous réalisons l'énorme travail qu'il reste à accomplir.
Une planification adéquate et la mobilisation des ressources permettraient à de nombreux pays en développement de prévenir le décès de mères et d'enfants, et ce, grâce au renforcement des systèmes de santé, à la formation de travailleurs de la santé et à des solutions simples comme la vaccination, les moustiquaires de lit imprégnées d'insecticide et une meilleure nutrition
Le G8 peut changer le cours des choses en ce qui concerne la santé des mères et des enfants. Les membres du G8 ont de nombreuses réalisations à leur actif dans le domaine de la santé. À l'occasion de récents sommets, ils se sont engagés à éradiquer la poliomyélite et à intensifier leur appui à la lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme. Ces efforts ont donné des résultats.
Ils ont aussi maintes fois insisté sur l'importance de renforcer les systèmes de santé, particulièrement en Afrique, afin que la population, y compris les femmes et les enfants, ait accès à des services de santé de qualité.
Lors de la réunion des ministres du développement à Halifax, la semaine dernière, les ministres du G8 ont reconnu que le meilleur moyen d'améliorer la santé de la mère et des enfants de moins de cinq ans et de réduire la mortalité était de concentrer les efforts sur le renforcement des systèmes de santé des pays en développement afin de mettre en œuvre plusieurs mesures à fort impact, y compris la prestation de services de sages-femmes qualifiées et l'immunisation.
Au cœur de ces interventions proposées, se trouvait l'avis des ministres du G8 présents à la réunion, dont faisait partie le ministre de la Santé du Mali qui, comme je l'ai mentionné plus tôt, ont convenu que les systèmes de santé doivent être renforcés afin de permettre la prestation intégrée de services complets au niveau local. Cela comprend l'accès aux soins primaires, des installations bien équipées et dotées des ressources voulues, des professionnels de la santé de première ligne bien formés ainsi que de solides systèmes d'information sur la santé. Les ministres se sont engagés à appuyer les efforts des pays partenaires afin d'améliorer l'accès à l'échelle locale grâce à des systèmes de santé bien équipés et dotés des ressources voulues, y compris de travailleurs de la santé qualifiés.
Les ministres du G8 reconnaissent également qu'il est extrêmement important d'améliorer la nutrition. La nutrition joue un rôle fondamental dans le développement des jeunes enfants. Elle est essentielle si l'on veut que la population soit et demeure en santé. Pour les personnes les plus vulnérables, la malnutrition conduit à de graves maladies, notamment la cécité, des troubles mentaux ou des affections qui sont fatales. L'Organisation mondiale de la santé estime d'ailleurs que plus du tiers des décès chez les enfants sont attribuables à la malnutrition et, comme vous le savez, la nutrition des mères est déterminante pour la santé des nouveaux-nés et le développement futur de leurs enfants. Par conséquent, je pense qu'en insistant sur la nutrition et son importance pour la santé maternelle et infantile, le G8 peut améliorer la situation de façon fondamentale.
Je crois que nous vous avons remis la déclaration de la présidence émise à l'issue de la réunion des ministres du G8 qui a eu lieu la semaine dernière, à Halifax, si vous désirez la faire circuler.
La contribution proposée par le Canada pour améliorer la santé des mères et des enfants pourrait contenir diverses mesures, y compris en reconnaissant la nécessité de renforcer les systèmes de santé, en particulier sur le plan des ressources humaines, au niveau des pays; par la formation, le déploiement et le maintien en poste de travailleurs qualifiés dans le domaine de la santé; et par la planification familiale, ce qui comprends l'utilisation de méthodes contraceptives modernes.
Il est également important de mentionner que les consultations que le gouvernement canadien a menées auprès des Nations Unies et d'autres partenaires lui permettront d'assurer la complémentarité de l'initiative du G8 et de faire en sorte que celle-ci constitue une contribution importante au Sommet des objectifs du Millénaire pour le développement des Nations Unies qui aura lieu en septembre.
Comme vous le savez, l'ACDI est le principal organisme par l'intermédiaire duquel le gouvernement du Canada donne suite aux engagements pris, et j'aimerais donc prendre quelques minutes pour expliquer certaines des choses que nous faisons déjà.
Comme vous le savez peut-être, les enfants et les adolescents constituent l'une de nos priorités. Nous travaillons déjà, dans de nombreux pays, à renforcer les systèmes de santé, à améliorer l'accès des femmes aux soins de santé maternelle, à prévenir la maladie et le décès chez les nouveaux-nés, à accroître l'immunisation et à promouvoir la nutrition. De fait, la santé de la mère et de l'enfant est un des trois grands axes autour duquel s'articule la priorité de l'ACDI ayant trait à l'édification d'un avenir meilleur pour les enfants et les jeunes en prenant d'abord soin de leurs mères.
Nous sommes conscients qu'une planification familiale efficace joue un rôle dans l'amélioration de la santé des mères et des enfants et qu'elle est un élément important de systèmes de santé efficaces. Nous savons que la planification familiale a notamment pour effet de réduire le nombre de grossesses non désirées.
La planification familiale permet notamment à la femme d'espacer les grossesses et de limiter leur nombre, ce qui influe directement sur sa santé et son bien-être ainsi que sur l'issue de chaque grossesse. Par conséquent, afin de répondre aux besoins des partenaires des pays en développement, la planification familiale est intégrée aux activités réalisées dans le cadre d'un certain nombre des projets de l'ACDI sur la santé génésique et sexuelle, qui sont dans le droit fil de nos engagement internationaux.
Par exemple, dans l'Ouest du Mali, grâce à l'aide fournie par l'ACDI, près de la moitié des accouchements se déroulent sous la supervision de travailleurs de la santé qualifiés. Au Guatemala, grâce au soutien de l'ACDI, la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada et les associations partenaires locales ont pu former 730 professionnels de la santé afin qu'ils fournissent de meilleurs soins aux mères et aux nouveaux-nés au moment de l'accouchement.
Le deuxième axe de l'action de l'ACDI dans le domaine de la santé des mères et des enfants est la promotion d'un meilleur départ pour les nourrissons et les jeunes enfants afin que, plus tard, ils fréquentent l'école et deviennent des membres actifs de leurs collectivités.
L'ACDI a été un chef de file de la promotion d'une nutrition adéquate et de services médicaux comme l'immunisation. Nous savons que la sous-alimentation accroît la prédisposition des enfants aux maladies infectieuses, à la déficience mentale, à la cécité, et à l'arrêt de croissance permanent. C'est pourquoi l'ACDI contribue à fournir de la vitamine A, de l'iode et d'autres micronutriments, qui jouent un rôle crucial dans la santé des jeunes enfants et des mères. En qualité de partenaire fondateur et de principal donateur de l'Initiative pour les micronutriments, le Canada est reconnu comme le chef de file en ce qui concerne la vitamine A et l'iode. De fait, l'UNICEF a déclaré que l'aide fournie par le Canada aux programmes de sel iodé avait prévenu la déficience mentale chez six millions d'enfants.
[Français]
Le Canada vient aussi en aide aux enfants dans le cadre de l'Initiative catalytique pour sauver un million de vies. L'ACDI a été le premier organisme a appuyer l'initiative de UNICEF qui vise à former et à outiller les travailleurs de la santé de première ligne, de telle façon qu'ils puissent administrer les plus récents traitements et des vaccins, distribuer des moustiquaires de lit et des antibiotiques, et offrir d'autres services essentiels aux enfants et aux groupes vulnérables.
Il est essentiel d'améliorer la santé des mères et des enfants pour respecter le mandat de l'ACDI, qui est de réduire la pauvreté dans les pays les plus défavorisés de la planète.
À une récente table ronde des Nations Unies, à New York, la ministre Oda a affirmé que le gouvernement était prêt à accorder un financement additionnel important à cette initiative, et nous comptons bien amener ainsi d'autres pays donateurs à en faire autant.
[Traduction]
Merci beaucoup, mesdames et messieurs. Je suis prête à répondre à vos questions.
Madame Biggs, merci beaucoup d'être venue.
Si vous le permettez, je vais consacrer seulement 30 secondes à la politique et nous nous intéresserons davantage ensuite à votre domaine.
J'avoue avoir été sidéré et déçu que M. Ignatieff et les libéraux aient décidé d'insérer dans ce sujet une question qui est sans rapport et qui va nuire énormément aux femmes et aux enfants des pays en développement en détournant l'attention sur un faux problème au cours de ce débat.
Cela dit, j'avoue être très impressionné par votre déclaration que je vais lire, si vous le permettez:
Une planification adéquate et la mobilisation des ressources permettraient à de nombreux pays en développement de prévenir le décès de mères et d'enfants, et ce, grâce au renforcement des systèmes de santé, à la formation de travailleurs de la santé et à des solutions simples comme la vaccination, les moustiquaires de lit imprégnées d'insecticide et une meilleure nutrition.
Telle était, au départ, l'idée du premier ministre et de notre gouvernement.
J'ai été particulièrement impressionné, car ce matin, nous avons tous reçu la déclaration de la présidence concernant la réunion des ministres du développement du G8 qui contribuera largement, je crois, à répondre aux préoccupations de M. Rae à propos des pays étrangers sur le sujet qu'il a jugé bon de soulever.
Prenons le paragraphe 11 du rapport de la présidence:
En termes de portée, les ministres ont convenu que l'amélioration de la santé des mères et des enfants de moins de cinq ans nécessite dans les pays, au niveau communautaire, des interventions intégrées et complémentaires à fortes répercussions offertes tout au long du continuum de soins, de la prégrossesse à l'accouchement et jusqu'à l'âge de cinq ans, comprenant des éléments tels que les soins prénatals, les soins postnatals; la planification familiale, qui inclut la contraception; la santé génésique; le traitement et la prévention des maladies; la prévention de la transmission du VIH de la mère à l'enfant; les immunisations; la nutrition.
C'est un programme extrêmement ambitieux pour ce qui est du financement à trouver pour travailler en ce sens.
Je voudrais savoir quels sont les programmes que l'ACDI a en place sur le plan de la vaccination et de la nutrition et de quelle façon ils peuvent être intégrés dans l'initiative dont nous parlons.
Je dois dire que j'ai eu une conversation, hier soir, avec un médecin d'un pays extrêmement pauvre. Les statistiques de ce pays montrent que 93 p. 100 de la population souffrent de gonorrhée et que presque 100 p. 100 souffrent de la syphilis. Le médecin de ce pays est d'autant plus découragé que le problème de la syphilis, en particulier, pourrait être réglé grâce à la vaccination et ce type de mesures. En fait, c'est le genre de travail auquel le Canada participe et dont tous les Canadiens devraient être fiers, je pense.
Je voudrais vous donner l'occasion de nous parler très rapidement de la vaccination et également des micronutriments et de nous dire où nous en sommes sur ce plan pour le moment.
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Merci infiniment pour cette question.
Je vais demander à ma collègue, Diane Jacovella, de vous parler en détail de ce que le Canada et l'ACDI ont fait sur le plan de la vaccination et des micronutriments. C'est un domaine dans lequel le Canada a joué le rôle de chef de file, de même que pour les moustiquaires de lit contre le paludisme. Nous avons été un des premiers pays à intervenir.
En ce qui concerne votre question générale, et pour revenir sur la déclaration de la présidence à l'issue de la réunion des ministres du développement du G8 de la semaine dernière, je voudrais notamment souligner le changement qui s'impose. Ces dernières années, nous avons mis l'accent sur un certain nombre de maladies, que ce soit le paludisme, le VIH, le sida ou la poliomyélite, pour lesquelles chacun sait que nous pouvons obtenir des résultats grâce à la vaccination. Nous savons pouvoir obtenir des résultats au moyen des antibiotiques et en traitant les maladies infectieuses. Chacun sait qu'une nutrition adéquate et des suppléments en micronutriments peuvent donner d'énormes résultats sur le plan de la santé. Néanmoins, il est rare que tout cela soit offert ensemble. Nous savons que si ces divers éléments sont réunis, un travailleur de la santé formé peut les dispenser et que nous pouvons obtenir des améliorations substantielles sur le plan de la santé des mères et des enfants.
Je crois que maintenant la solution est d'adopter une approche intégrée. Nous l'avons fait pour l'initiative catalytique s'adressant aux enfants en donnant aux travailleurs de la santé en première ligne un ensemble de choses que nous savons très efficaces pour traiter les maladies infectieuses, pour traiter la diarrhée, sur le plan de la vaccination, sur le plan des suppléments nutritifs et nous savons que cela peut donner des bons résultats. C'est très rentable, très efficace et pas si compliqué. Néanmoins, il faut que le système de santé vous appuie pour que les choses se passent comme prévu sur le terrain. Je crois que les ministres du développement ont centré leur attention sur l'appui que tout le monde peut apporter à cette approche intégrée et globale.
Pour en revenir aux choses précises que le Canada a faites, comme je l'ai mentionné, l'ACDI a été un chef de file en ce qui concerne l'initiative des micronutriments. Le Canada a également joué un rôle de premier plan pour ce qui est du Fonds mondial pour le sida, la tuberculose et le paludisme qui a sauvé des millions de vies.
Je vais simplement demander à Diane de vous fournir quelques précisions supplémentaires au sujet des principales questions que vous avez posées.
La santé maternelle et infantile sont au centre d'un certain nombre de nos programmes bilatéraux ou géographiques. Vous avez attiré l'attention sur l'un d'entre eux au Mali. Le ministre de la Santé du Mali était avec nous à Halifax. Nous ne pouvons peut-être pas le faire dans tout le pays ou tout l'Ouest, mais nous avons soutenu la formation dans une région, celle de Kayes, où nous avons formé des sages-femmes, ce qui a nettement augmenté le nombre de naissances assistées et par conséquent réduit la mortalité infantile au Mali.
Un autre domaine dans lequel nous travaillons avec le gouvernement du Mali, dans le cadre de son plan d'ensemble pour ses systèmes de santé, est l'élargissement de la planification, des compétences et de la formation des ressources humaines en santé afin qu'il puisse étendre cet effort à l'échelle du pays.
Nous avons aussi d'importants programmes de santé maternelle et infantile dans des pays comme la Tanzanie où nous travaillons avec le gouvernement tanzanien et Marie Stopes International, surtout en ce qui concerne la santé maternelle et génésique. Nous avons également enregistré des résultats positifs importants de ce côté-là.
Nous travaillons aussi au Mozambique pour appuyer la mise en œuvre globale du système de santé du gouvernement du Mozambique. Une composante très importante de cette collaboration porte sur la santé maternelle, là encore, sur le plan de la formation du personnel sanitaire, d'un personnel local pour la santé maternelle et les naissances assistées, de même que pour la santé infantile.
Nous travaillons également au Bangladesh, surtout à la mise en place de services de santé pour les pauvres des régions rurales. Comme vous le savez, nous avons fait aussi un travail assez important sur le plan de la santé maternelle et infantile en Afghanistan. Il s'agissait en partie de l'initiative d'éradication de la poliomyélite, mais nous avons également aidé à construire des installations d'obstétrique à l'Hôpital Mirwais, de Kandahar, qui fournit des soins gynécologiques et obstétriques, non seulement dans la ville, mais dans toute la région. C'est donc très important.
C'est un domaine dans lequel l'ACDI possède beaucoup de compétence et d'expérience sur le terrain en ce qui concerne tant la santé maternelle et infantile que la nutrition. Le domaine de la nutrition va sans doute prendre toute son importance maintenant que tout le monde reconnaît que non seulement la sous-alimentation contribue à la mortalité, mais qu'elle retarde le développement et réduit les chances de survie des enfants.
Nous savons au Canada qu'en ce qui concerne le développement des enfants et leur développement cognitif, nous pouvons vraiment changer l'avenir de ces pays si nous mettons vraiment l'accent sur la nutrition. Des programmes de nutrition très simples pour les mères et les enfants livrés en temps opportun sur le terrain peuvent avoir des effets extraordinaires.
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Merci beaucoup, monsieur le président. C'est toujours un grand plaisir pour moi de revenir au Canada.
Quelqu'un m'a demandé l'autre jour, en tant qu'ancien représentant spécial du Secrétaire général pour les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays et maintenant conseiller spécial pour la prévention du génocide, pourquoi on me confie toujours des missions aussi difficiles. Bien entendu, cette mission est jugée très difficile et certains diront même impossible. Je dirais que c'est une mission impossible, mais qu'il faut la rendre possible.
Nous reconnaissons tous, je pense, que l'humanité doit s'unir pour prévenir et punir le génocide, mais en réalité, nous savons qu'en général un génocide n'est reconnu qu'après coup. Pendant qu'il se produit ou se déroule, non seulement ses auteurs, mais ceux qui pourraient être appelés à intervenir ont tendance à nier son existence. Étant donné que c'est une situation si délicate et si difficile à gérer une fois qu'elle existe, je crois absolument essentiel de prendre des mesures de prévention, avant le durcissement des positions.
À mon avis, la prévention consiste aussi à définir le problème de façon à ce que nous puissions facilement le comprendre et le gérer. Voilà pourquoi je considère le génocide comme une forme extrême de conflit relié à l'identité, que cette identité soit définie, conformément à la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, en fonction de l'appartenance à un groupe national, ethnique, racial ou religieux et peut-être même d'autres facteurs d'identification.
Ce ne sont pas seulement nos différences qui causent des conflits; c'est aussi ce que ces différences représentent sur le plan de l'accès au partage du pouvoir, de la richesse, des ressources, des services, de l'emploi et des droits que confère la citoyenneté. En tant que représentant spécial du Secrétaire général pour les personnes déplacées, je suis allé dans de nombreuses régions du monde. J'ai toujours été frappé de voir à quel point ces sociétés étaient divisées et que certaines jouissaient d'une grande considération et bénéficiaient des droits et de la dignité associés à la citoyenneté tandis que d'autres étaient marginalisées, victimes de discrimination, exclues et privées de leurs droits. Dans ce genre de situations, les conflits sont inévitables. Lorsqu'ils se produisent, les personnes désavantagées sont victimes de celles qui tiennent le haut du pavé.
Si c'est ainsi que nous comprenons la situation, la difficulté est de trouver un moyen de gérer les diversités de façon constructive de façon à promouvoir un sentiment d'égalité, un sentiment d'appartenance à la nation, un sentiment de satisfaction, un sentiment de dignité en tant que citoyen, en tant qu'être humain. Je crois qu'aucun pays qui se respecte et qui est digne du respect des autres et de légitimité ne peut priver ses citoyens de leurs droits.
Je dois dire, pour avoir travaillé dans votre merveilleux pays pendant des années, que j'ai toujours été frappé par la façon dont vous gérez les différences et les diversités, par votre politique de multiculturalisme. J'ai visité de nombreuses régions du Canada et j'y ai vu cette politique à l'œuvre.
Je vois là un défi à relever pour les gouvernements. Cela veut dire aussi que la première couche de protection, soit la prévention, est une responsabilité qui incombe à l'État. Je suis convaincu qu'à moins de travailler avec les gouvernements, de les mettre au défi de gérer de façon constructive leurs différences, nous ne pourrons pas réussir. Nous ne pouvons pas venir de l'extérieur pour dicter des solutions que les gens de l'intérieur ne considèrent pas comme la vision nationale.
Voilà pourquoi, quand j'ai travaillé à la Brookings Institution à l'élaboration du projet Afrique, l'évaluation après-guerre froide des conflits en Afrique, j'ai insisté pour qu'au lieu de considérer ces conflits comme des guerres par procuration menées par les superpuissances pendant la guerre froide, on considère les problèmes dans leur véritable contexte, qu'il soit régional ou national, et que la responsabilité de résoudre le conflit soit d'abord attribuée à l'État, si nécessaire avec l'appui de la communauté internationale. C'est seulement dans les cas extrêmes où le gouvernement n'est pas à la hauteur de la tâche et où la population souffre et meurt en grand nombre que la communauté internationale sera appelée à intervenir.
Néanmoins, ce n'est pas facile, car si les forces en présence ont la capacité, même limitée, de résister l'intervention peut être très coûteuse. Par conséquent, comme Boutros-Ghali me le disait souvent, le fait que le tiers monde redoute l'intervention est un problème qui ne se pose pas, car dans la plupart des cas, quand la situation se gâte et que des menaces sont associées à l'intervention, c'est souvent l'absence d'intervention plutôt que la menace d'intervention que l'on redoute le plus.
La solution la plus constructive est de travailler avec les gouvernements pour soutenir les trois piliers de leur responsabilité vis-à-vis de leur population en les aidant à protéger eux-mêmes leurs citoyens et en amenant, par divers moyens, la communauté internationale à faire plus pour combler les lacunes existantes, sans aller jusqu'à une intervention militaire. Cela représente un défi pour les pays qui ont la capacité de soutenir les pays qui n'arrivent pas à assumer leurs responsabilités, que ce soit en proposant des stratégies et des modèles qui peuvent servir d'exemples ou des pratiques qui risquent de diviser et de mener à des conflits d'identité génocidaires que nous devrions éviter.
Telle est la façon dont j'aborde mon mandat. Je considère que je dois jouer le rôle de catalyseur auprès de ceux qui ont la capacité de faire ce qui doit être fait.
Je dois préciser que j'ai un personnel très limité. J'ai le plaisir de dire qu'un des membres très dévoués de mon personnel est une citoyenne canadienne assise à côté de moi, Kelly Whitty.
C'est un plaisir pour moi que de pouvoir discuter de ce sujet avec vous. Merci.
Dans un certain sens, on peut dire que la responsabilité de protéger résulte de l'évolution de la notion de souveraineté en notion de responsabilité. Certaines études ont démontré le lien entre ce que nous essayons de faire à Brookings et la responsabilité de protéger.
Il y a près de trois ans, quand je suis venu à New York pour la première fois, mon collègue Edward Luck, le conseiller pour les questions relatives à la responsabilité de protéger et moi-même avons parlé aux représentants permanents et membres de la mission à New York. La majorité de ces représentants, particulièrement ceux des pays du tiers monde, ont pratiquement rejeté l'idée que le concept de la responsabilité de protéger avait été accepté. Disons plutôt que nous nous étions mis d'accord sur un cadre pour poursuivre les discussions et que cette notion n'avait pas été acceptée.
La raison en était que lorsque nous parlions de ces trois piliers, le dernier pilier prévoyant une intervention militaire, et cela après avoir essayé de prendre d'autres mesures, était considéré comme l'élément essentiel de la responsabilité de protéger. Notre tâche consistait donc à dissiper cette fausse interprétation en insistant sur le fait que la responsabilité incombe à l'État, que l'État doit recevoir un appui pour renforcer sa capacité et que c'est seulement si l'État échoue manifestement, ce qui entraîne des conséquences désastreuses pour la population civile que la communauté internationale envisagera plusieurs phases d'intervention, y compris, en dernier ressort, une intervention militaire.
Le Secrétaire général a présenté, cette année, un rapport dont l'Assemblée générale a débattu. Nous avons assisté, je crois, à un revirement total des mentalités depuis l'hésitation initiale à accepter la responsabilité de protéger que l'on accepte maintenant avec certaines réserves. La question est de savoir comment répondre aux réserves des pays qui craignent que les États plus puissants du nord pourraient s'en servir pour intervenir dans le sud. Notre insistance sur les deux premiers piliers a largement dissipé ce genre d'objections. Mais il reste du travail à faire.
Je pense que c'est relié à votre deuxième question concernant la volonté d'intervenir. Il est vrai que dans une situation comme celle du Rwanda ou d'autres cas de génocide que l'histoire nous révèle après coup, peu de gens s'opposeront sans doute à ce que nous développions la volonté d'intervenir. Nous ne pouvons pas laisser de côté ce dernier recours, quand tout le reste a échoué. Néanmoins, j'insiste sur la prévention et la coopération précoces avec les gouvernements concernés qui doivent d'abord en faire une responsabilité nationale.
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Absolument, et je me réjouis que vous posiez cette question. Dans mes propres travaux, j'ai insisté sur le rôle des organisations subrégionales et régionales et je dois dire que l'approche que j'ai adoptée pour mon mandat est bien accueillie en Afrique.
J'ai pris la parole devant le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine. J'ai pris la parole devant le Groupe des sages de l'Union africaine. Nous avons élaboré un cadre d'analyse qui nous donne des outils pour évaluer les risques de conflits génocidaires. L'Union africaine adopte ces outils pour les intégrer dans son système d'alerte initiale.
Néanmoins, en ce qui concerne le Congo, quand je suis allé là-bas, on m'avait d'abord averti de ne pas parler d'ethnicité ou de génocide. Quand je suis arrivé, tout le monde parlait d'ethnicité. Tout le monde se disait victime d'un génocide.
Les forces des Nations Unies sur le terrain, peu importe à quel point elles sont renforcées, ont une tâche difficile qui consiste non seulement à soutenir le gouvernement et à protéger les civils, compte tenu de la prolifération des factions armées. Comme me l'a dit un commandant, pour désarmer ces factions, il faudrait envoyer une force expéditionnaire.
J'ai constaté toutefois que si nous nous attaquions à certaines des causes sous-jacentes de ce genre de problèmes et cela dans un cadre régional où les intérêts de tous les pays en cause, pas seulement le Rwanda et l'Ouganda, mais toutes les régions… Nyerere avait l'habitude de dire que le problème du Rwanda et du Burundi est qu'il s'agit de minuscules pays surpeuplés entourés de grands pays ayant un vaste territoire.
Par conséquent, dans mon rapport sur le Congo, j'ai insisté sur le fait qu'il fallait travailler avec les acteurs régionaux pour s'attaquer à ces causes sous-jacentes. Je dirais que si nous commençons par une prévention précoce, suivie d'une intervention qui ne va pas jusqu'à l'action militaire, la communauté mondiale peut faire beaucoup de choses.
Certains des pays les plus puissants… Je reviens tout juste de Washington où j'ai eu d'excellentes réunions au Département d'État et à la Maison-Blanche, avec les groupes de réflexion, etc. Les grandes puissances peuvent faire beaucoup.
La question que soulève la question précédente, selon moi, est aussi que les pays puissants du monde — et je veux parler de la puissance à la fois économique et militaire — ne peuvent pas rester les bras croisés devant le chaos, la destruction et les tueries massives qui se produisent dans certaines régions du monde. La sécurité mondiale présente un intérêt national, surtout dans les pays dont les intérêts ont de profondes ramifications et sont reliés à la paix et à la sécurité mondiale.
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Je pense que les trois piliers sont déjà en place au Congo. Nous avons un gouvernement qui n'a pas la capacité voulue, mais qui doit assumer, bien entendu, sa responsabilité nationale. Nous avons une communauté internationale qui aide le gouvernement. Nous avons une force qui, conformément aux normes des Nations Unies, dispose d'un mandat très énergique pour protéger les civils. Et nous savons que les femmes et les enfants sont parmi les principales victimes civiles.
Jusqu'ici, ces trois piliers pris ensemble n'améliorent pas la situation. C'est parce que je crois qu'au lieu de traiter avec les groupes armés, d'essayer de les désarmer… La protection des civils revêt une importance cruciale, mais nous devons nous diriger vers un processus de paix qui réunira tous les pays de la région qui ont des intérêts en jeu.
Au lieu de ces deux… pour ce qui est des pays surpeuplés, il faut favoriser des ententes régionales qui rassembleront tous les pays de la région de façon à créer la paix, la sécurité et la stabilité dans l'ensemble de ce secteur. L'approche régionale est efficace, car les différents pays ont le sentiment d'être solidaires. Ils sont confrontés aux mêmes problèmes; ils doivent travailler ensemble pour s'entraider. Par exemple, la CEDEAO a réussi relativement bien à le faire pour les pays de l'Afrique de l'Ouest.
Je reviens tout juste de Guinée et j'ai eu des discussions au Ghana et en Guinée. J'étais censé aller au Nigeria. Là-bas, les gens sont prêts à travailler avec la communauté internationale et dans le cadre de mon mandat de prévention. Il y a déjà, dans la région des Grands-Lacs, un processus en cours qu'il faut aussi soutenir. En ce qui concerne ces initiatives régionales, le problème est que, comme nous l'avons vu au Darfour avec les forces de l'Union africaine, la volonté est peut-être présente, mais la capacité voulue n'est pas là. Il est essentiel de soutenir la capacité de ces pays pour qu'ils puissent agir dans l'intérêt de la région.
Cet appui peut revêtir diverses formes. Nous devons bien comprendre la situation. Si je vais dans un pays et si, après avoir utilisé mon cadre d'analyse, j'en reviens en disant que le noeud du problème est la pauvreté, le partage des ressources, les violations des droits de la personne, l'exclusion politique…
Nous avons vu ce qui s'est passé au Kenya où finalement, même si les élections ont déclaré un vainqueur et un perdant, il a fallu mettre en place un gouvernement d'unité nationale. La situation est la même au Zimbabwe. Nous devons transcender l'idée selon laquelle la démocratie signifie simplement des élections avec un gagnant et un perdant. Dans le contexte occidental, une minorité peut manifester une opposition respectueuse. Le fait de gagner ou de perdre les élections ne signifie pas que vous gagnez ou vous perdez tout. Nous avons tendance à penser que les élections représentent la démocratie alors que ce n'est qu'un petit élément de ce que la démocratie devrait être.
Encore une fois, j'ai l'impression, que nous parlions des deux premiers piliers ou de la prévention au sens large, qu'il est possible de faire beaucoup de choses pour soutenir les pays ou les régions afin de renforcer leur capacité pour les processus de paix dont je parle. La région des Grands Lacs est déjà en train de s'organiser. Il y a des besoins très précis auxquels je crois qu'il faut répondre pour accroître sa capacité d'agir efficacement.
À mon avis, si nous diagnostiquons des problèmes dans un pays, qu'ils soient politiques, économiques, sociaux ou autres, il y a des ressources que les pays comme le vôtre peuvent apporter pour remédier à la situation. Ce ne sont pas toujours des ressources matérielles. Cela pourrait être des conseils. Cela pourrait être d'ordre politique. J'ai déjà parlé d'un partage de l'expérience, d'un partage des modèles qui fonctionnent, et cela de façon détaillée et complète. À mon avis, la région des Grands Lacs est déchirée par des problèmes qu'il est possible de résoudre et les ressources qui ont été une grande source de dissensions pourraient devenir une source d'entente.
Vous avez mentionné l'Iraq. Je dis à mes collègues africains du système des Nations Unies que nous insistons trop sur l'intervention extérieure. À moins que vos intérêts nationaux ne soient très forts comme les États-Unis l'ont certainement conclu dans le cas de l'Iraq… ou peut-être suite à ce qui s'est passé en Somalie, les États-Unis hésitaient à intervenir au Rwanda. Ce qui s'est passé au Rwanda a amené les États-Unis à jouer un plus grand rôle au Kosovo et cela peut être aussi à cause de leurs autres intérêts dans la région. À moins que ce ne soit le cas, l'intervention n'est pas un concept qui plaît beaucoup.
Nous avons tort, je crois, d'en faire une question très préoccupante alors qu'en réalité, pour un grand nombre de ces pays, c'est le manque d'intérêt plutôt que la menace d'intervention qui est important. Cela ne veut pas dire toutefois qu'il faut se désengager, car je ne pense pas que l'isolationnisme soit possible dans le monde d'aujourd'hui. Ce qu'il faut, selon moi, c'est un engagement plus réfléchi, constructif et productif dans les régions et avec les pays de la région pour atteindre les objectifs souhaités.
M. Paul Dewar: Merci.