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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 009 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 avril 2010

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la situation à Droits et Démocratie, le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique.
    J'aimerais tout d'abord remercier nos témoins d'être venus aujourd'hui.
    Madame Trépanier vous allez commencer et je crois que M. Akhavan vous suivra.
    Pourriez-vous essayer de ne pas dépasser 10 minutes, environ? Je ne vais pas vous interrompre après 10 minutes, mais je vous demanderais de faire de votre mieux, et nous demanderons la même chose à M. Akhavan. Puis, il y aura une première série de questions de sept minutes et une autre de cinq minutes.
    Nous ferons de notre mieux. Nous avons commencé avec un peu de retard, alors nous allons essayer d'aller jusqu'à midi, peut-être 12 h 5, puis nous entendrons le deuxième groupe de témoins.
    Encore une fois, je vous souhaite la bienvenue. Merci d'être venus. La parole est à vous, et je vous donne 10 minutes pour votre déclaration préliminaire.

[Français]

    Merci, monsieur le président, membres du comité.

[Traduction]

    J'aimerais remercier tous les membres du comité de m'avoir invitée aujourd'hui et de me donner l'occasion de témoigner sur les événements qui se sont produits dans les mois précédant et suivant le décès soudain de mon mari.
    Permettez-moi de dire tout d'abord que ce n'est pas facile pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui. Je ne suis pas une personne qui recherche la publicité, mais les torts commis envers mon mari sont si graves que je n'avais d'autre choix que de partager ce que je sais.
    J'espère que vous comprendrez que le français étant ma première langue, je vais témoigner en français aujourd'hui.

[Français]

    Mon nom est Suzanne Trépanier. J'étais l'épouse de Rémy Beauregard qui, jusqu'à son décès le 8 janvier dernier, occupait le poste de président de Droits et Démocratie. Si j'ai demandé à comparaître devant vous, c'est pour rétablir les faits car des allégations faites à l'endroit de Rémy par certains membres du conseil d'administration, dont entre autres les membres du comité d'évaluation, sont fausses. Je désire que la réputation de mon mari cesse d'être ternie par des gens qui, à mon avis, par leur acharnement irrationnel, par leur mauvaise foi évidente et par le harcèlement prolongé qu'ils lui ont fait subir pendant plusieurs mois ont fini par avoir un effet très néfaste sur sa santé.
    Aujourd'hui, mon but ultime est de rétablir la réputation de Rémy et qu'il y ait des conséquences pour les membres du conseil d'administration qui sont responsables des dérapages dont je vais témoigner. Je suis la personne qui connaissait le mieux Rémy. Au fil de notre union de 29 ans, je suis devenue sa meilleure amie et confidente. Nous vivions toujours un très grand amour. Tout cela s'est terminé dramatiquement dans la nuit du 8 janvier dernier.
    Je crois qu'il est important que vous sachiez qui était Rémy Beauregard. Rémy était un ardent défenseur des droits humains. De façon plus personnelle, il s'intéressait spécialement aux droits des enfants, des femmes et des personnes âgées. Détenteur d'une maîtrise en administration publique de l'ENAP, Rémy a, au cours de sa carrière, toujours fait valoir les droits linguistiques et a défendu les droits des plus démunis en tant que directeur général de la Commission des droits de la personne de l'Ontario et comme défenseur des droits de la personne pour les enfants soldats et les femmes en Ouganda, d'abord à la Commission ougandaise des droits de la personne puis pour War Child Canada.
    Rémy était un fonctionnaire public de carrière. En Ontario, il a travaillé pour les gouvernements de David Peterson, Bob Rae, Mike Harris et Dalton McGuinty. Rémy était un homme non partisan, ce qui lui tenait beaucoup à cœur. Rémy avait un esprit franc et ouvert. Je l'ai toujours vu respecter les lignes d'autorité et il demandait qu'il en soit de même pour lui. Le respect était très important, que ce soit à la maison ou au bureau. Rémy était un médiateur, probablement l'un des meilleurs au Canada. Il n'aimait pas les conflits et cherchait toujours un compromis pour en venir à une solution acceptable. Rémy était un homme simple et foncièrement bon. Son plus cher désir était de pouvoir dire avant de mourir qu'il avait fait tout son possible pour faire une différence dans le monde. Malheureusement, dans les dernières heures de sa vie, c'est sa réputation qu'il tentait de sauver.
    Permettez-moi maintenant de refaire le fil de certains événements. Je crois que c'est important, car des administrateurs ne se sont pas gênés pour continuer à porter des accusations contre Rémy alors qu'il n'était plus là pour se défendre. Sur le plan chronologique, une des premières plaintes du vice-président du conseil, Jacques Gauthier, paraît dans un mémorandum strictement confidentiel annexé à l'évaluation de Rémy. Il accuse Rémy d'avoir organisé un souper après la présentation du film Burma VJ sans l'avoir invité ainsi que le président du conseil. Ce souper avait été organisé à la dernière minute, amicalement et de façon informelle, après le visionnement du film. J'étais en compagnie de Micheline Lévesque et je lui ai suggéré d'aller souper. L'organisateur de l'événement, le producteur du film et les deux invités birmans se sont joints à nous. À ma connaissance, le président et le vice-président étaient déjà partis. Vous me direz que cet incident n'a aucune importance, mais ces derniers considèrent cela comme la preuve d'un manque de loyauté de la part de Rémy et se montrèrent de plus en plus vindicatifs à son égard par la suite.
    Dans ce même mémorandum et dans son évaluation de rendement, on accusait Rémy de poser des gestes illégaux, tel que rencontrer et financer des terroristes. Ces accusations sont inventées de toutes pièces. Rémy considéra cela comme une atteinte à sa réputation. À mon avis, cette mention dans ces documents est de mauvaise foi. L'acharnement avec lequel le président et le vice-président du conseil veulent faire valoir leur point est insensé. Qualifier le discours de Rémy, prononcé devant plus de 150 personnes dont des délégations gouvernementales, comme étant une réunion avec des terroristes est absurde.
    Quant au vote de Rémy sur la répudiation des trois subventions de 10 000 $ chacune à de présumées organisations terroristes et de son commentaire « We should have done our homework better », j'aimerais préciser que Rémy m'a confié qu'il ne remettait pas en question le bien-fondé de ces subventions, mais que, dans son esprit de conciliateur, il a voulu éviter des débats inutiles. Son commentaire n'était pas un aveu, mais un constat qu'il était un médiateur qui cherchait toujours à trouver un compromis. J'ai d'ailleurs été très choquée de lire le 24 janvier dernier l'article de David Matas, qui interprète les sentiments de Rémy la veille de son décès. Je le cite:
(1115)

[Traduction]

Beauregard s'est couché le soir de sa mort sachant que ces trois subventions, qu'il avait mis tant de temps et d'effort à défendre, mettant en jeu sa réputation personnelle devant la gestion et le conseil d'administration, avaient été une erreur.

[Français]

    Qui est M. Matas pour interpréter les pensées d'une personne aujourd'hui décédée qu'il n'avait rencontrée que brièvement à deux reprises avant le 7 janvier? Était-il au lit avec Rémy ce soir-là? À mon avis, ce genre de propos, dans le contexte actuel, est dément.
     Rémy est accusé de ne jamais avoir été disponible pour une rencontre avec les membres du comité d'évaluation...

[Traduction]

    Madame Trépanier, je sais que nous vous demandons de nous dire beaucoup de choses en peu de temps. Les interprètes essaient de vous suivre, mais ils ont de la difficulté. Si vous pouviez ralentir juste un peu, ce serait formidable.

[Français]

    Rémy est accusé de ne jamais avoir été disponible pour une rencontre avec les membres du comité d'évaluation dans le but d'en réviser le rapport. Voici le nombre de jours où les membres impliqués étaient disponibles pour les 50 dates proposées par la secrétaire du comité entre les 20 juillet et 10 octobre 2009: Rémy 44, Aurel Braun 17, Jacques Gauthier 12, Jean Guilbeault 50, Donica Pottie 9,5 et Elliott Tepper 0,5. Vous conviendrez qu'il est faux de dire que Rémy a tout fait pour éviter cette rencontre.
    J'aimerais soulever ici certains faits survenus lors de la réunion du 6 janvier. J'accompagnais Rémy et j'ai tout entendu de l'autre côté de la porte. Je peux vous assurer que Rémy y a fait un vibrant plaidoyer pour défendre ses droits et sa réputation professionnelle. Ni M. Guilbeault, qui avait été mandaté par le CA à se joindre au comité d'évaluation, ni Rémy n'ont vu ou reçu une copie du rapport révisé avant la rencontre.
    Le vice-président refusait d'en remettre une copie à Rémy en prétextant qu'il avait les mains liées et qu'on allait partager verbalement avec lui les changements apportés. Sur l'insistance de Rémy, on lui a finalement remis une copie à la condition expresse qu'il la rende à la fin de la réunion, ce qu'il n'a eu d'autre choix que d'accepter. Fait à noter, le rapport était rédigé en anglais seulement.
    Le vice-président était furieux de constater que Rémy avait en main la note de service strictement confidentielle dans laquelle il faisait allusion à l'origine ethnique des employés. Devant l'acharnement du vice-président à savoir comment Rémy se l'était procurée, ce dernier a répété à maintes reprises qu'elle faisait partie intégrante de son évaluation de rendement déposée au Bureau du Conseil privé. Rémy a questionné le président du conseil sur le caractère erroné et négatif du rapport écrit alors qu'un rapport verbal élogieux avait été fait par les membres du CA lors de la réunion de mars 2009.
    Le président du CA a fait remarquer à Rémy qu'en tant que haut fonctionnaire d'expérience extrêmement bien rémunéré — ce sont ses mots —, ce dernier pouvait se défendre seul sans l'aide de membres du comité. Rémy a proposé des changements au rapport, mais le vice-président a précisé qu'il n'était pas prêt à faire des changements à la rédaction de son rapport. Une motion a été votée à cet effet à trois contre un. Rémy a insisté pour qu'il soit indiqué au procès-verbal que cette décision lui était imposée.
    Lors de cette réunion qui a duré plus de deux heures, j'ai pu ressentir le désarroi de Rémy, son niveau de stress élevé, surtout que le président du conseil d'administration l'empêchait constamment de s'exprimer. À la sortie de cette réunion, il m'a fait part de sa ferme intention de contester cette évaluation et de porter plainte contre les trois administrateurs en question pour leur manque d'éthique professionnelle et entrave à la bonne gouvernance. Ce soir-là, j'ai dit à M. Guilbeault et aux trois directeurs que j'étais très inquiète pour Rémy car il vivait un stress plus intense que jamais. Cette nuit-là, Rémy n'a pas dormi. Il m'a confié qu'il était très difficile pour lui de faire face à toute cette situation. Après s'être battu pendant presque toute sa vie et sa carrière pour faire valoir les droits des autres, il ne réussissait pas à faire valoir ses propres droits.
    Les insinuations de Jacques Gauthier dans son mémo attaché à l'évaluation de Rémy le perturbait particulièrement. Rémy disait aussi qu'il lui était très difficile de composer avec l'attitude agressive d'Aurel Braun envers lui ainsi qu'à l'égard de certains membres du conseil d'administration et de son personnel. Le 1er avril dernier, comment M. Matas a-t-il pu parler de l'évaluation de rendement de Rémy pour la période de juillet 2008 à mars 2009 alors qu'il a été nommé membre du conseil en novembre 2009? Le 6 janvier, Rémy a posé une question du même ordre au président du conseil sur la pertinence de sa note jointe à l'évaluation de rendement alors qu'il n'avait été en poste que trois semaines pendant la période visée par l'évaluation.
    J'aimerais dire que ce genre d'agissements, dans le ton utilisé comme dans le propos, est tout à fait indigne, choquant, inconvenant pour ne pas dire incompétent de la part de membres d'un conseil d'administration dont, notamment, le président et le vice-président d'une organisation paragouvernementale des droits de la personne et de la démocratie.
    J'aimerais parler d'autres évènements que je crois important de souligner. Le 7 janvier 2010, Rémy a été très bouleversé d'apprendre, à l'ouverture de la réunion du conseil, que le président avait décidé de remanier l'ordre du jour de telle sorte que le rapport du président, que Rémy devait présenter, et le point sur son évaluation de rendement avaient été reportés d'une journée, soit au 8 janvier. Je vous ferais remarquer que Rémy a travaillé d'arrache-pied à la rédaction de son rapport pendant les Fêtes puisque ce dernier portait sur la période de juin à décembre 2009. Pour Rémy, il était important que ce rapport d'activités se fasse en début de réunion puisqu'il apportait un éclairage sur les sujets à être abordés par la suite et sur lesquels des décisions étaient requises.
(1120)
    Le 8 janvier 2010, le décès subit de Rémy a été le début d'une grande période de stress pour moi qui est toujours aussi intense à ce jour. J'ai reçu un appel de condoléances de la part du Bureau du Conseil privé, ce qui était un peu choquant compte tenu qu'à la recherche de la justice relative à son évaluation, Rémy a multiplié les rencontres et échanges à l'automne 2009, en l'occurrence avec Eileen Boyd, secrétaire adjointe du Cabinet au BCP, au moins cinq fois, avec Keith Christie, sous-ministre adjoint du Secteur des Enjeux mondiaux aux Affaires étrangères, au moins trois fois, avec Jean-Maurice Duplessis, directeur des opérations au bureau du ministre des Affaires étrangères, deux fois, et avec Claude Carrière, conseiller de la politique étrangère et de la défense au Bureau du Conseil privé, afin de trouver une solution acceptable à une situation qui se détériorait. Or, il n'a jamais obtenu de réponse à ses demandes.
    J'ai aussi reçu une lettre de condoléances du ministre Cannon, très élogieuse à l'égard de Rémy, ce qui a été un peu un affront pour moi, sachant que le ministre n'a jamais répondu à la demande de rencontre de Rémy du 3 novembre dernier, demande qui avait aussi été envoyée à Jean-Maurice Duplessis, du bureau du ministre. À ma connaissance, l'évaluation très positive du travail de Rémy pour la même période, effectuée par le ministre et les Affaires étrangères, n'a pas été reflétée dans ce rapport d'évaluation de rendement. À mon avis, le gouvernement a manqué à son devoir d'agir en bon père de famille ave le résultat que la gouvernance a continué.
    En plus du stress causé par le décès de Rémy, j'ai dû subir un double affront dans les jours qui ont suivi. D'abord, il y a eu la parution du communiqué de presse de condoléances de la part du président du conseil, que je qualifie d'hypocrite, puis le coulage dans les médias du courriel que je lui avais envoyé à ce sujet. La suspension du personnel responsable a entre autres fait en sorte de retarder et de compliquer les démarches administratives liées au décès de Rémy, et c'est moi qui en ai souffert.
    Contrairement à ce qui a été mentionné le 1er avril dernier par Jacques Gauthier, le personnel ne m'a pas remis l'ordinateur de Rémy puisque ce dernier avait quitté Montréal avec son équipement pour se rendre à la réunion du conseil, qui avait lieu à Toronto. Après son décès, j'ai rapporté tout le matériel de Rémy à notre résidence de Montréal. Le 1er mars, M. Gauthier exigeait que je remette les biens avant le 3 mars à 17 heures. J'ai assuré avoir l'intention de remettre les biens, précisé que j'étais à Toronto pour des soins médicaux et que l'échéance qu'il m'imposait était impossible. Le 3 mars, je recevais un deuxième avis me donnant comme date butoir le 5 mars à midi, faute de quoi, M. Gauthier menaçait d'entreprendre des mesures légales.
    Contrairement à ce qu'a laissé entendre M. Matas le 1er avril, des échanges entre Rémy et Eileen Boyd au Bureau du Conseil privé peuvent confirmer que le bureau était largement informé de la situation au sein du conseil, et ce, depuis plusieurs mois. Rémy n'était pas en poste au moment des allégations publiées à deux ou trois occasions dans le National Post, en 2002, et non pendant plusieurs semaines, comme l'a laissé entendre M. Gauthier le 1er avril. Il est triste de constater que Rémy était entouré d'une bonne équipe et qu'il avait la confiance de son personnel, mais qu'il n'a pas eu la chance d'avoir la même courtoisie de la part de certains membres de son conseil.
     Vous conviendrez que jamais on aura autant parlé de Droits et Démocratie. Il est ironique de constater que toute cette visibilité que connaît actuellement le centre dans l'ensemble du Canada répond ainsi à une des attentes du Bureau du Conseil privé définies dans le cadre de son mandat. De plus, la crise a été rendu publique ailleurs dans le monde, comme en font foi certains articles de journaux dont notamment celui de la FIDH, de Gerald Steinberg, de William Schabas, etc.
     Je tiens à vous dire que je regretterai toute ma vie d'avoir appuyé Rémy, comme je l'ai toujours fait d'ailleurs, dans sa décision d'accepter ce mandat à Droits et Démocratie. Non pas à cause de l'organisme en question ou du personnel qui y travaille, mais bien à cause du harcèlement qu'il y a vécu pendant plusieurs mois et qui a contribué grandement à augmenter son stress jusqu'à atteindre un niveau insoutenable. Je ne me pardonnerai jamais de ne pas avoir réussi, malgré tous mes efforts au cours des derniers mois de sa vie, à le convaincre de tout laisser tomber. Il me répétait qu'il n'acceptait pas qu'on attaque sa réputation, qu'il se défendrait jusqu'au bout et qu'il ne démissionnerait pas car il le devait à ses employés et à Droits et Démocratie. Voici qui était le grand Rémy Beauregard.
     Pour toutes les raisons évoquées aujourd'hui, je demande que le Bureau du Conseil privé procède au retrait du rapport d'évaluation de rendement ainsi que ses notes et annexes du dossier de mon mari. Je demande des excuses publiques de la part des sept membres du conseil qui ont dénigré les compétences de gestionnaire de Rémy, entre autres dans les médias.
(1125)
    Je demande le remplacement immédiat des quatre membres du CA qui ont tenu publiquement des propos diffamatoires à l'égard de Rémi, soit MM. Aurel Braun, Jacques Gauthier, Elliot Tepper et David Matas. À mon avis, ces administrateurs ne comprennent pas leur rôle et agissent contre les intérêts de Droits et Démocratie en voulant y imposer leurs idéologies personnelles.
    Je demande à ce qu'une copie de mon témoignage soit déposé dans les dossiers personnels des quatre administrateurs ci-haut cités au Bureau du conseil privé. Je demande également que le gouvernement commande une enquête publique indépendante afin que la lumière soit faite sur tous les agissements et événements survenus au sein du conseil d'administration de Droits et Démocratie au cours de la dernière année.
    Je vous remercie, membres du comité, du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui. J'espère que mon témoignage vous aura éclairé sur la situation et qu'il n'aura pas été trop émotif, comme certains d'entre vous le craignaient. Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Trépanier.
    Nous passons maintenant à M. Akhavan, pour 10 minutes.

[Français]

    Monsieur le président et honorables membres du comité, je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de partager avec vous ma perspective sur les événements qui ont mené à la crise au sein de l'organisation Droits et Démocratie.

[Traduction]

    Je comparais devant vous aujourd'hui parce que je crois que la justice doit l'emporter sur l'opportunisme politique. Mon intérêt aurait été plutôt de me taire, mais face à l'abus de pouvoir dans un organisme voué aux droits de la personne, je ne pouvais pas, en toute bonne conscience, rester silencieux.
    J'ai eu l'honneur d'être nommé au conseil d'administration par l'actuel gouvernement le 29 février 2008. Je savais qu'en décembre 2002 l'inspecteur général avait recommandé d'améliorer la surveillance et la gestion financière et les relations de travail. Le conseil d'administration a immédiatement commencé à apporter ces améliorations sous la direction de la présidente du CA, Janice Stein, puis sous la présidence de Jean-Paul Hubert. Rémy Beauregard a continué avec succès ce processus après sa nomination au poste de président par le gouvernement le 26 juin 2008.
    En août 2008, après son examen quinquennal de Droits et Démocratie, le ministère des Affaires étrangères a conclu que « Les résultats généraux issus du présent examen... sont positifs » et « Ont confirmé l'efficacité et la pertinence des activités (de l'organisme) sur le terrain ». Le rapport du 9 juin 2009 de la vérificatrice générale était également positif. Bref, contrairement à ce qu'affirmait l'actuel président du CA, Aurèle Braun, devant ce comité le 1er avril, Droits et Démocratie n'était pas un organisme dysfonctionnel au moment de sa nomination le 11 mars, mais au cours des mois qui ont suivi l'organisation s'est désintégrée lorsqu'une minorité d'administrateurs ont lancé une offensive de prise de contrôle hostile.
    Le conflit au sein du CA a commencé après la première réunion présidée par M. Braun, le 26 mars. La majorité des administrateurs étaient hautement satisfaits du rendement de M. Beauregard, mais le président du CA a donné l'ordre au secrétaire de ne pas mentionner ce fait dans le procès-verbal. MM. Braun et Gauthier s'inquiétaient de petites subventions accordées à trois organismes. En guise de compromis, le président a accepté de ne pas leur fournir d'autres fonds. M. Braun a également insisté pour avoir un droit de veto sur toute future subvention. Encore une fois, nous avons accepté une procédure d'examen comme compromis. MM. Braun et Gauthier s'opposaient à la participation à la conférence d'examen de Durban organisée par l'ONU, mais M. Beauregard avait déjà décidé de boycotter cette rencontre, avec l'appui unanime du CA.
    Plutôt que de féliciter le président, ces administrateurs ont envoyé une évaluation secrète au Conseil privé, remplie d'accusations sans fondement, de demi-vérités et de distorsion qui jetait le discrédit sur son leadership, pourtant positif. Ils ont essayé de le présenter comme étant anti-Israël dans des dossiers qui avaient déjà été réglés à la satisfaction de tous. La note très sévère du président du CA qui accompagnait le rapport qualifiait celui-ci de « critiques constructives »; pour nous, il s'agissait plutôt de diffamations.
    Le président et la majorité des conseils d'administration avaient en vain demandé à voir le rapport d'évaluation et les services d'un cabinet d'avocats avaient été retenus au coût de 17 298 $ pour justifier la décision. Lorsqu'il a été divulgué à la réunion du conseil d'administration le 18 juin suite à une demande en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, la majorité voulait le désavouer. Encore une fois, en guise de compromis, nous leur avons donné la chance de le modifier, ce qu'ils ont accepté.
    Notre confiance a été trahie. Ils n'avaient aucunement l'intention de respecter cette entente. Ils avaient plutôt un plan pour modifier la composition du CA au goût du président du CA et de ses alliés. Le 4 septembre, Mme Donica Pottie, représentante du gouvernement au CA, a soudainement démissionné sept mois seulement après le début de son mandat de trois ans. Elle avait auparavant présenté un rapport positif sur M. Beauregard au nom du gouvernement. Mme Pottie partie, le président du CA n'avait plus besoin que de deux nouveaux membres pour avoir une majorité de sept à six.
    Le 19 octobre, M. Braun et ses alliés ont soudainement reporté une réunion du CA avec seulement deux jours de préavis. La majorité des membres avaient été exclus de cette décision, qui a entraîné des coûts d'annulation de 15 000 $. Comme ils n'avaient pas encore la majorité, ils voulaient éviter une discussion du rapport qu'ils avaient négligé de modifier quatre mois auparavant. Ils voulaient également bloquer le renouvellement du mandat de Guidos Riveras Franck, un Bolivien respecté, expert en matière de démocratie que le ministre Fletcher et le ministre Kent avaient régulièrement consulté.
    Le 8 novembre, j'ai écrit à M. Gauthier pour lui demander s'ils avaient l'intention d'obtenir, et je cite, « une majorité décisive au conseil d'administration qui aura pour effet de museler une fois pour toutes les membres dissidents et qui préparera probablement aussi la voie au congédiement du président et de ses cadres supérieurs ». C'est ce que j'écrivais à M. Gauthier le 8 novembre.
(1130)
    Immédiatement après la nomination des deux nouveaux membres, le 13 novembre, M. Braun a convoqué une réunion pour le 7 janvier. Fort d'une majorité d'une voix, le comité du rendement a rencontré M. Beauregard le 6 janvier lors d'une réunion très acrimonieuse où ils ont manqué à leur promesse de corriger le rapport.
    À la réunion du CA, il est apparu clairement que cette majorité d'une voix visait à exclure totalement l'autre moitié, ayant déjà tout décidé d'avance. Pour des administrateurs comme Sima Samar, qui s'était donné la peine de venir de Kaboul, c'était extrêmement insultant. Quelques jours plus tôt, dans un échange de courriels au sujet de nos préoccupations, M. Navarro-Genie, l'un des administrateurs, nous a traités de « tiers mondialistes », nous comparant à Robert Mugabe et nous comparant aux « Sujets de Sa Majesté britannique en Amérique du Nord ».
    Comme nous l'avions prévu, le CA était devenu un conseil à partie unique hostile et tout était en place pour écarter M. Beauregard et l'équipe de gestion. Lorsque M. Riveras Franck a été évincé du conseil, la coupe a débordé. Mme Samar et moi avons décidé de démissionner en guise de protestation. Cela a été un moment de pure honte, celui de la démission d'une championne afghane des droits de la personne d'un organisme des droits de la personne canadien. Ce jour-là, M. Beauregard était visiblement profondément bouleversé, sachant qu'il serait probablement forcé de démissionner et que sa réputation serait ternie. Nous étions loin de nous douter que ce grand ami et collègue allait nous quitter pour de bon peu après.
    Après son décès tragique, avant même que ses funérailles aient eu lieu, nous avons été scandalisés lorsque des documents internes ont été fournis à Ezra Levant et Gerald Steinberg pour qu'ils continuent à salir sa réputation. Les éditoriaux des sept membres du conseil qui étaient contre lui étaient tout simplement honteux. La demande de démission de président et des deux vice-présidents du CA par 45 employés courageux était le témoignage du respect qu'ils avaient pour un chef admiré, et de loyauté envers l'intégrité de l'institution. Pour se venger, ce même conseil a maintenant retenu des avocats et des enquêteurs privés chers pour persécuter le personnel. On estime que cela a déjà coûté près d'un demi-million de dollars aux contribuables.
    Dans cette nouvelle aire de responsabilité que proclame le conseil, il a modifié un règlement administratif pour justifier rétroactivement l'octroi de ces contrats lucratifs sans appel d'offres. Cela ne fait qu'ajouter aux autres irrégularités financières dans le budget du conseil. Nous ne pouvons que nous réjouir de l'examen de Droits et Démocratie par votre comité.
    En terminant, j'aimerais dire que les honorables membres de ce comité ont peut-être des programmes politiques concurrents, mais que je suis convaincu que vous serez tous d'accord pour reconnaître que cette conduite contraire à l'éthique ne peut pas rester sans conséquence. Le salissage de la réputation de M. Beauregard est un abus de pouvoir manifeste et peut-être aussi une infraction à la loi provinciale en matière de santé et de sécurité au travail. Le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail reconnaît que le fait de porter de fausses accusations contre un employé est un parfait exemple d'intimidation en milieu de travail et qu'un tel harcèlement psychologique peut avoir de graves conséquences sur la santé.
    Examinons l'allégation contenue dans la fameuse note de M. Gauthier selon laquelle M. Beauregard aurait rencontré des représentants du Hamas et du Hezbollah alors qu'il participait à une conférence au Caire à l'automne de 2008. M. Gauthier ajoutait que la légalité de ces rencontres était évidemment douteuse. Il a précisé pendant la réunion du conseil en juin qu'il voulait parler du Code criminel du Canada. L'article 83.18 prévoit que quiconque contribue, directement ou non, à une activité d'un groupe terroriste est coupable d'un acte criminel passible d'un emprisonnement de 10 ans. En réponse au CA, M. Beauregard a dit que l'accusation était manifestement fausse et qu'il y voyait une attaque contre sa réputation.
    Ainsi, sans la moindre preuve — sans la moindre preuve — un bureaucrate distingué au dossier impeccable était accusé d'être criminel. Quel membre de ce comité tolérerait un tel comportement si il ou elle en était la victime?
    Dans sa grande sagesse, le gouvernement actuel a nommé M. Beauregard au poste de président. Le comité doit maintenant agir unanimement pour que justice soit faite et que cet important organisme canadien soit sauvé. À cette fin, je prie le comité d'examiner les recommandations qui suivent.
    Premièrement, que le rapport d'évaluation, y compris la note du président du CA et tout autre document pertinent, soient retirés du dossier de M. Beauregard afin que sa réputation et son honneur soient réhabilités une fois pour toute.
    Deuxièmement, que le conseil d'administration de Droits et Démocratie soit sommé de présenter des excuses à la famille de M. Beauregard.
(1135)
    Troisièmement, demandez la démission du président, M. Braun, et des vice-présidents, M. Gauthier et M. Tepper, en raison de leur mauvaise conduite.
    Quatrièmement, envisagez de reconstituer entièrement le conseil d'administration en raison des dommages considérables qui ont été faits à la réputation internationale de Droits et Démocratie et de la perte de confiance de la population canadienne à son égard.
    Cela conclut mon exposé. Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Akhavan.
    Nous allons commencer par M. Rae, pour sept minutes.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Je vais faire une très brève intervention. Je n'ai jamais clairement dit au comité que, comme ancien chef de l'opposition officielle en Ontario et comme premier ministre de la province, j'ai très bien connu Rémy Beauregard et que j'ai travaillé de près avec lui. J'ai toujours trouvé que c'était un homme d'une grande intelligence et d'une grande intégrité. Le connaissant comme je l'ai connu depuis des années, j'ai été, comme beaucoup d'autres, franchement étonné par les commentaires que j'ai lus et que j'ai entendus.
    J'aimerais d'abord remercier Mme Trépanier de son courage pour être venue témoigner aujourd'hui et de nous avoir livré un point de vue important sur l'expérience du conflit qui a clairement existé au sein du conseil. Je pense que l'on ne peut pas ignorer ces remarques. On doit rendre compte des nombreux problèmes qui existaient au sein du conseil et qui ont été créés conséquemment.
     Ma première question s'adresse surtout à M. Akhavan.
(1140)

[Traduction]

    Monsieur Akhavan, je lisais un article de M. Cooper qui est paru dans le Calgary Herald le 7 avril. M. Cooper est professeur à l'Université de Calgary. Je suis certain que vous le connaissez. Il prétend avoir reçu de l'information d'un membre du CA, M. Marco Navarro-Genie. M. Cooper dit dans son article que M. Navarro-Genie lui aurait dit que:
... entre mai 2009 et janvier 2010, Beauregard a réussi à retourner plusieurs membres « internationaux » du CA contre le comité d'examen du rendement en leur accordant des faveurs, notamment des avantages sur le plan des voyages, des stagiaires et du financement pour des projets dans leurs pays d'origine...
    Ce sont là de graves allégations, encore une fois. Il semble que les membres du CA aient tendance à faire des allégations très graves à l'égard de M. Beauregard, qui n'est pas en mesure de réagir, ce que je trouve déplorable, je dois dire.
    Puisque vous étiez membre du CA, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez? Pouvez-vous aussi vous prononcer au sujet de toute allégation concernant des conflits dans lesquels vous étiez impliqué ou supposément impliqué, pendant que vous étiez membre du CA?
    Merci, monsieur Rae.
    Droits et Démocratie comptait trois membres internationaux très distingués. M. Riveras Franck de Bolivie, comme je l'ai mentionné, a été consulté par le ministre Kent et le ministre Fletcher sur la promotion de la démocratie dans les Amériques. Mme Sima Samar est récipiendaire de l'Ordre du Canada, la seule autre personne ayant reçu cet honneur à part Nelson Mandela... Mme Soyata Maïga est la commissaire des droits de la personne pour l'Afrique en ce qui concerne la condition féminine. Franchement, je pense que le fait que le conseil d'administration ait porté de telles accusations diffamatoires contre eux est très révélateur de leur attitude et de ce qu'ils ont fait à Rémy Beauregard et à tous ceux qui leur faisaient opposition.
    Ce qui est intéressant, c'est l'idée selon laquelle Rémy aurait acheté le vote de Mme Soyata Maïga en lui envoyant un étudiant stagiaire pour l'aider à Bamako, au Mali. Il est tout à fait stupéfiant de dire que Sima Samar qui a reçu huit millions de dollars de l'ACDI au fil des ans pour la Commission indépendante des droits de la personne en Afghanistan s'est fait acheter par M. Beauregard. On a fait la même accusation de façon stratégique hier à Canwest, où on m'accuse d'avoir demandé une nomination à un poste des Nations Unies, ce qui n'est absolument pas fondé. J'ai le courriel ici dans lequel je demandais conseil à M. Beauregard relativement à une commission d'enquête sur les crimes de guerre au Sri Lanka, qui n'avait pas été mise en place par les Nations Unies, que le gouvernement actuel avait demandée, et à laquelle des membres du gouvernement actuel m'avaient demandé de participer. J'ai demandé son avis au sujet d'une nomination éventuelle. Mais si la pire accusation qu'ils peuvent porter contre moi est d'avoir voulu aider les victimes de meurtres collectifs au Sri Lanka, eh bien je suis coupable de cette accusation.
    Nous ne devons pas oublier qu'ils ont fait appel à un bureau de détectives privés et dépensé des dizaines de milliers de dollars pour passer à travers des milliers de courriels de Rémy Beauregard et c'est là la seule chose dont ils ont réussi à l'accuser. Je pense qu'ils en ont pas obtenu beaucoup pour leur argent.
    Avez-vous une idée de la façon dont Canwest aurait pu recevoir ce courriel? Je présume que ce courriel appartient au CA et à l'organisation et aussi au bureau de détectives qui est passé à travers les courriels, n'est-ce pas?
    Eh bien, naturellement c'est de la même façon qu'Ezra Levant et Gerald Steinberg et d'autres ont reçu des documents internes. Mais si vous me permettez d'ajouter, je dirais tout simplement que je trouve stupéfiant que M. Navarro-Genie fasse de telles accusations. Avant le décès de M. Beauregard, je faisais mon devoir de diligence en tant que membre du CA et j'examinais les livres du CA et j'ai remarqué par exemple que M. Navarro-Genie était allé en Haïti dans le cadre d'une mission de Droits et Démocratie, et qu'il s'agissait de la même mission à laquelle M. Riveras Franck avait participé et c'est à ce voyage de Riveras Franck auquel on a fait précédemment allusion lorsque M. Beauregard a été accusé d'avoir acheté M. Franck en lui offrant des voyages. M. Navarro-Genie est resté là-bas quatre jours de plus à des fins personnelles et il a facturé un montant de 1 300 $ à Droits et Démocratie pour les quatre jours pendant lesquels il est resté au-delà du mandat que lui avait confié cet organisme.
    J'ai été abasourdi d'apprendre également que M. Jacques Gauthier qui a fait un voyage de six jours en Chine pour Droits et Démocratie a reçu des honoraires pour 11 jours, soit un total de 3 575 $, tandis que les autres membres de la délégation ont reçu des honoraires de 500 $.
    J'aimerais par ailleurs ajouter que le budget du CA, qui s'élevait à 130 000 $ pour l'exercice précédent, atteignait presque déjà les 300 000 $ lorsque j'ai quitté le CA. Une bonne partie de ce montant servait à payer les membres du CA qui viennent ici et qui parlent comme si c'étaient des bénévoles. Lorsque j'ai quitté le conseil d'administration, le montant de ces honoraires approchait les 80 000 $, alors que le budget avait prévu 40 000 $. Il est vraiment très malheureux qu'ils soient obligés maintenant de détracter ainsi des membres internationaux.
(1145)
    Quelle est la pratique à l'heure actuelle au CA...? Les membres du CA sont-ils rémunérés selon un décret en conseil? Pouvez-vous m'expliquer de quelle façon cela fonctionne?
    Monsieur Akhavan, je vais vous laisser terminer en répondant à cette question et nous passerons à un autre intervenant, mais allez-y.
    Les membres du CA reçoivent des honoraires pour chaque journée entière de travail qu'ils effectuent mais pas pour celles qu'ils n'effectuent pas.
    Dans quelles conditions est-ce que les membres du CA voyagent? Doivent-ils obtenir la permission du président du CA pour participer à une mission et est-ce qu'ils sont rémunérés pour participer à une mission et est-ce que leurs frais de déplacement sont également payés?
    Oui, les frais de déplacement sont payés.
    Pour revenir à M. Gauthier, s'il a fait un voyage de six jours en Chine, pourquoi a-t-il reçu des honoraires pour 11 jours? Je crains que d'autres révélations devront être faites au sujet de certains paiements effectués.
    Si vous me permettez de conclure, je dirai que l'une des questions que nous devons examiner est le fait que M. Navarro-Genie, qui est responsable de cette fuite dans la presse, a travaillé pendant une semaine au bureau de Droits et Démocratie comme conseiller principal. Je ne sais pas quel était son mandat ni combien il a été payé. Le contrat lui a été accordé par Jacques Gauthier, un autre membre du conseil d'administration qui était président intérimaire. M. Navarro-Genie recevait-il peut-être un salaire très généreux pour passer à travers des milliers de courriels que les détectives privés avaient découverts pour essayer de trouver quelques ragots contre moi et contre les membres internationaux du CA qui pourraient être divulgués aux médias? Est-ce là une bonne utilisation de l'argent des contribuables? Nous avons des projets en Haïti et en Afghanistan, il y a des victimes de violence sexuelle au Congo, et il y a des gens qui tentent de se lancer dans une chasse aux sorcières contre moi et contre Mme Samar. C'est tout à fait stupéfiant.
    Merci beaucoup, monsieur Rae et monsieur Akhavan.
    Nous allons maintenant passer à Mme Lalonde pour sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, je partagerai mon temps avec Mme Deschamps.
    Tout d'abord, madame Trépanier, je vous remercie d'être venue. Je comprends votre émotion. J'ai été en mesure de connaître M. Beauregard, de l'apprécier et de l'estimer. Vos demandes nous guideront dans la poursuite du travail, soyez-en certaine.
    Monsieur Akhavan, vous avez fait un rapport très clair. Vous demandez de restructurer complètement le CA pour que Droits et Démocratie puisse redevenir l'organisation qu'elle a été. Vous parlez de trois petites subventions à deux organismes palestiniens et à un autre, israélien, qui auraient joué un certain rôle dans le développement de la crise. Il y a eu à Radio-Canada, cette fin de semaine, un reportage sur NGO Monitor et l'influence qu'elle exerce au Québec et au Canada. À votre connaissance, est-ce qu'il y a un quelconque lien entre NGO Monitor et les membres du conseil d'administration, ainsi que ces positions qui ont été prises sur les trois petites subventions accordées aux deux organismes palestiniens et au troisième, israélien, favorable aux palestiniens?
(1150)
    Merci, madame Lalonde.

[Traduction]

    Je veux commencer en disant qu'il y a des préoccupations légitimes au sujet de la diabolisation d'Israël aux Nations Unies. J'ai travaillé aux Nations Unies pendant 10 ans et 80 p. 100 des résolutions sont contre Israël. Le Soudan, l'Iran, le Myanmar, le Zimbabwe — tous ces pays échappent à un examen détaillé. Cependant, je pense que des organismes comme NGO Monitor sont allés trop loin. Ils sont allés trop loin parce qu'ils suppriment toute dissidence. Le président, M. Braun, avait tenté sans succès, face à l'opposition des membres du CA, d'inviter M. Steinberg à venir prendre la parole devant le conseil d'administration. Nous savons que l'un des premiers articles publiés après le décès de M. Beauregard est celui de M. Steinberg, qui est paru dans The Jerusalem Post et dans le National Post. Il avait accès à des documents internes du CA. La répudiation de ces subventions par M. Matas, dans son mémoire de 15 pages, se fonde entièrement sur les rapports de l'organisme NGO Monitor, donc le lien ici est très évident.
    Je voudrais vous faire part de ce que Yossi Alpher, un ancien conseiller auprès du ministre de la Défense d'Israël, Ehud Barak, et ancien directeur du Jaffee Center for Strategic Studies à l'Université de Tel Aviv a dit. Voici ce qu'il a dit au sujet de NGO Monitor. Il a dit que NGO Monitor « semble être déterminé à éliminer entièrement la surveillance des droits de l'homme en Israël et à détracter quiconque appuie cette activité vitale » C'est un ancien conseiller auprès d'Ehud Barak qui dit cela.
    En Israël, où j'ai de nombreux amis et collègues, NGO Monitor est considéré comme un organisme politique d'extrême droite. Je suis déconcerté de voir comment cet organisme peut avoir autant d'influence sur une institution comme Droits et Démocratie.
    Je voudrais par ailleurs ajouter que certaines des observations qui ont été faites... Oublions l'exemple de B'Tselem qui est un organisme israélien, mais le président dit qu'il n'est Israélien que de nom. C'est le langage de l'extrême droite en Israël qui dit essentiellement qu'à moins que l'on soit aveuglément obéissant, on est un traître envers Israël.
    Même si on regarde Al Mezan, l'organisme de Gaza qui a au fait publié des rapports dans lesquels il condamne l'autorité palestinienne, Hamas, dans lequel il demande qu'on fasse enquête au sujet des attaques à la roquette de Hamas contre le sud d'Israël également, ce qui n'est pas mentionné du tout, il est intéressant de souligner que le 13 février 2007, en raison de la poursuite judiciaire lancée contre NGO Monitor devant les tribunaux israéliens par l'Institut de recherche appliquée à Jérusalem, une action pour diffamation et libelle, M. Steinberg a publié la rétractation suivante: « Je regrette d'avoir dit qu'Al Mezan était un organisme qui « justifiait la violence. » Voilà donc M. Steinberg qui, lors d'un procès devant un tribunal israélien, admet que Al Mezan ne justifiait pas la violence.
    Or, Al-Haq est également récent. Les tribunaux israéliens n'ont jamais trouvé M. Shawan Jabarin coupable d'un acte de terrorisme. Ce qu'ils ont dit, c'est qu'une interdiction de voyager avait été émise contre lui, et c'est ce que le rapport national du Département d'État des États-Unis a dit récemment au sujet de cet arrêt du tribunal israélien. Voici ce que dit le rapport sur les droits de l'homme du Département d'État américain pour 2009:
Le 11 mars, la Haute cour israélienne a interdit au défenseur des droits de l'homme Shawan Jabarin, directeur d'Al-Haq, ONG palestinienne de défense des droits de la personne, de voyager à l'extérieur de la Cisjordanie sans tenir une audience.
    Il y a eu une audience ex parte. Il n'a pas eu l'occasion de contester la preuve.
    Le rapport stipule par ailleurs:
En se fondant sur des éléments de preuve dont Jabarin et son avocat n'ont pu prendre connaissance, le tribunal a refusé de lever l'interdiction de voyager qui lui avait été imposée par décret militaire en 2006.
    Je voudrais terminer en disant que dans une zone de conflit on trouvera toujours des gens qui ont eu toutes sortes de passés. M. Ariel Sharon avait été accusé par la Commission Kahan en Israël de crimes de guerre contre le Liban et il est devenu premier ministre.
    L'accusation de Shawan Jabarin qui, jusqu'en 1987 était membre du FPLP, est intéressante, car notre propre ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, a rencontré Riyad al-Maliki, le ministre des Affaires étrangères de l'autorité palestinienne en décembre 2008, je crois. M. al-Maliki a été membre haut placé du FPLP pendant de nombreuses années, et pourtant le gouvernement en place s'est engagé à donner 300 millions de dollars à l'autorité palestinienne.
    Donc le problème ici c'est qu'il y a une préoccupation légitime quant à la diabolisation d'Israël, des attaques à sens unique, mais je pense que NGO Monitor et d'autres organismes sont allés trop loin. Nous sommes plus extrémistes au Canada que les gens ne le sont en Israël.
    J'ai un étudiant, pilote des forces aériennes d'Israël, et qui a effectué des missions de bombardement au-dessus du Liban. Il semblait être plus raisonnable au sujet de ces questions.
(1155)
    Merci. C'est tout le temps que nous avons.
    Nous allons maintenant revenir de ce côté-ci, à M. Abbott qui a sept minutes.
    Madame Trépanier, il est très très difficile pour vous d'être venue ici. Je tiens à vous faire part de mes condoléances les plus sincères pour la perte que vous avez subie. Au niveau humain, ça va bien au-delà de toute chose dont on peut parler à cette table-ci. Je vous remercie d'être venue.
    Merci.
    Monsieur Akhavan, je veux me mettre au diapason avec vous, alors peut-être que nous pourrions commencer par la Loi sur le Centre international des droits de la personne et du développement démocratique. Vous connaissez le paragraphe 31.(1). Qui se lit comme suit:
31.(1) Dans les quatre premiers mois de chaque exercice, le président du conseil présente au ministre le rapport d'activités du centre pour l'exercice précédent, y compris ses états financiers et le rapport du vérificateur général y afférant.
    Je suis certain que vous connaissez cet article.
    Je voudrais aussi attirer votre attention sur le paragraphe 3 du règlement administratif no 1 qui se lit comme suit:
Le conseil d'administration nommé conformément à la loi devra établir les politiques qui détermineront les activités du centre et il approuvera le budget annuel du centre.
    De façon que nous soyons sur la même longueur d'onde.
    Oui, bien sûr.
    Il y a aussi l'article 20 de la loi qui stipule que le président est le présent directeur général du centre et qu'il doit surveiller et diriger le travail du centre  — et ce qui suit est important — conformément aux politiques établies par le conseil d'administration.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le conseil d'administration est ou devrait être responsable des politiques du centre?
    Absolument, oui, monsieur. Tout le conseil d'administration, oui.
    Oui, je comprends cela.
    Si le conseil d'administration est responsable d'établir les politiques et l'orientation de Droits et Démocratie, il me semble qu'une bonne partie de votre témoignage et du témoignage d'autres personnes stipule qu'en fait le président, ancien et présent, et le personnel devraient dire au conseil d'administration quelle orientation il devrait prendre, qu'il devrait établir les politiques. Ai-je mal compris?
    Non, monsieur, vous n'avez pas mal compris. Les membres du personnel ne nous disent jamais comment administrer l'organisme. Nous avons eu des débats très vigoureux au sein du conseil d'administration. Je n'ai certainement jamais eu l'impression que les membres du personnel me dictaient quoi que ce soit. Nous avions de très bonnes relations. Lorsque nous étions en majorité nous avions des débats très critiques. J'ai eu beaucoup de désaccords avec M. Beauregard, mais cela se faisait toujours dans le respect. Je ne crois pas que qui que ce soit remette cela en question.
    J'ai commencé par dire que le problème a commencé au sein du conseil d'administration. Ce n'était pas un problème entre les membres du personnel et le conseil d'administration. Le problème c'était qu'une minorité des membres du conseil d'administration tentait de dominer et d'éliminer la majorité. C'était ça le vrai problème, et le problème s'est ensuite étendu à nos relations avec les membres du personnel.
    Je dois aussi ajouter quelque chose au sujet de cette allégation de rébellion de la part des membres du personnel. Lorsque je suis allé aux funérailles de Rémy Beauregard, l'un des membres du personnel est venu me voir, après que 45 ou 47 membres du personnel avaient signé cette lettre demandant la démission. Elle m'a dit, « Vous savez, nous traitons avec des gens en Afghanistan et au Congo qui risquent leur vie pour défendre leur conviction. Nous sommes prêts à risquer notre gagne-pain pour défendre les nôtres. » Ils savaient parfaitement quelles seraient les conséquences de leurs actes. Cela signifie que ce n'est pas tout simplement des gens de la rue, comme M. Matas le disait, qui pensent contrôler l'organisation. Ces gens risquent leur gagne-pain. Il faut dire qu'il devait s'agir là de circonstances assez extrêmes pour qu'ils fassent cela.
    J'aimerais ajouter également que la théorie selon laquelle il y aurait eu une conspiration pour obtenir une sorte de convention collective en échange de la signature de la lettre par 45 des 47 membres du personnel est à mon avis remarquablement fantaisiste. Cela est troublant, car la source de cette accusation est un membre du personnel, celui-là même qui s'est plaint au syndicat en disant qu'il avait subi des pressions. Ce qui est troublant c'est que le jour où le directeur des communications, Charles Vallerand — l'un des trois gestionnaires qui a déjà comparu — a été remercié de ses services, M. Gauthier a tenté de promouvoir ce membre du personnel au poste de directeur des communications. Si vous le voulez, nous pouvons parler des preuves à l'appui. Nous avons ici des gens à qui on promet une promotion s'ils confirment les théories de complot pour détracter les membres du personnel, les membres internationaux du conseil d'administration et M. Beauregard. Il semblerait donc que tout le monde ici est dans le tort, sauf ces quelques membres du conseil d'administration, et je pense que cela n'est tout simplement pas possible.
(1200)
    Je suis désolé, je ne veux pas être impoli, mais notre temps est très limité.
    Vous êtes au courant du dépôt du rapport annuel. Les règlements administratifs stipulent clairement que le rapport annuel doit être déposé par le président. En fait le président, si j'ai bien compris ce que j'ai lu dans la correspondance, ne l'avait pas reçu, ou il n'avait certainement pas reçu un exemplaire du rapport annuel avant qu'il ne soit déposé. Pourtant, vous nous dites, dans votre témoignage, qu'il n'y avait aucun conflit, aucun problème à ce que les membres du personnel aillent de l'avant et fassent ce qu'ils avaient à faire sans même faire référence au président du conseil d'administration.
    Vous étiez membre du conseil à l'époque. Vous devez avoir un avis à ce sujet.
    Eh bien, oui, je pense que le président avait un point de vue plutôt extravagant au sujet de ses pouvoirs. Il croyait par exemple qu'il aurait un droit de veto. La majorité des membres du conseil a approuvé une subvention pour un projet sur les droits autochtones en Colombie, et il prétendait avoir un droit de veto.
    Le fait est que le conseil d'administration a discuté de ce rapport. Je pense que nous devons être prudents face à l'affirmation de M. Braun à l'effet qu'il n'aurait jamais vu un exemplaire du rapport. Peut-être qu'il n'a pas vu l'ébauche finale, mais nous en avons discuté, et il a participé à cette décision.
    Mais, monsieur Akhavan, au risque de me lancer dans un débat avec vous, ce que j'essaie de dire, c'est que les membres du personnel allaient de l'avant et faisaient des choses et faisaient constamment des choses.
    Vous parlez de débat. Je suis d'accord qu'il devrait y avoir un débat entre les membres du conseil d'administration. Ce qui me frappe, c'est que vous confirmez qu'en fait il y ait eu un débat entre les membres du personnel et le conseil d'administration. Et le conseil d'administration est en charge.
    Il n'y a pas eu de débat, il y a eu une discussion. Par exemple, nous avions un plan stratégique quinquennal que le conseil d'administration a maintenant adopté. Nous avons invité les membres du personnel à présenter un exposé et nous en avons discuté avec eux.
    Personnellement, à titre de membre du conseil d'administration, je n'ai jamais pensé que M. Beauregard ou les membres du personnel croyaient qu'ils pouvaient nous dicter quoi que ce soit. Je crois cependant que la majorité des membres du conseil pensait qu'une minorité tentait d'obtenir le pouvoir absolu aux dépens de la majorité, aux dépens des pouvoirs légitimes du président directeur général, M. Beauregard.
    Je peux vous donner de nombreux exemples de mauvais traitement des membres du personnel. Mme Cynthia Gervais qui travaillait dans notre bureau de Genève a été interrogée lors de deux conversations avec M. Gauthier et M. Braun et elle a démissionné peu après. Tout le monde savait qu'ils voulaient fermer le bureau de Genève peu importe ce que pensait la majorité.
    Deux membres du personnel ont été interrogés en raison de leur origine moyen-orientale.
    Nous pourrions parler ici de beaucoup de raisons à cause desquelles les membres du personnel étaient tellement perturbés.
    Je respecte le fait qu'il s'agit là de votre témoignage, mais vous confirmez fondamentalement qu'il y avait un conflit direct entre les membres du personnel et le conseil d'administration. Je dis que conformément à la loi et à son règlement administratif, le conseil d'administration a la responsabilité de donner des directives aux membres du personnel en ce qui a trait aux politiques, pour ce qui est de l'organisme.
    Je ne confirme pas cela. Je confirme qu'une minorité chez les membres du conseil d'administration était en conflit avec une majorité des membres du conseil d'administration et des membres du personnel.
    J'ajouterais qu'aux termes de la loi, les membres du conseil d'administration doivent agir de bonne foi dans l'intérêt supérieur de l'organisme, et c'est pourquoi la majorité à un moment donné a demandé la démission du président, M. Braun.
    Merci beaucoup, monsieur Abbott.
    Nous allons maintenant passer à M. Dewar, qui sera le dernier intervenant. Vous avez sept minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins. En particulier, je tiens à remercier Mme Trépanier d'être ici aujourd'hui.
    Pour être franc, je dirais que vous êtes très brave d'être venue témoigner. Vous êtes ici pour nous parler non seulement de l'expérience de votre mari mais aussi de certains faits que nous devons connaître au sujet de ce qui s'est passé. Alors merci beaucoup d'être ici.
    Je vais vous poser une question pour faire suite à ce que vous avez dit concernant sa lutte pour garder sa réputation intacte. Plus spécifiquement, vous avez mentionné qu'une évaluation avait été effectuée sans qu'il ne soit consulté, et pourtant on l'a consulté verbalement au sujet de sa conduite et de son rendement, consultation qui a été positive.
    Qu'a-t-il dit? Est-ce qu'il vous en a parlé...? Est-ce qu'il vous a parlé de cet aperçu verbal positif que lui avait donné le conseil d'administration?
(1205)
    Pas vraiment. Lorsqu'il est rentré de cette réunion ce jour-là, il a dit qu'apparemment le conseil d'administration était...

[Français]

    Puis-je parler en français?
     Le conseil s'était réuni à huis clos et avait demandé au personnel de sortir. On a fait une évaluation positive, que M. Gauthier avait d'ailleurs présentée lui-même au mois de mars. Cette évaluation était très positive. Par la suite, Rémy a appris qu'une autre évaluation avait été déposée dans son dossier. Elle était complètement à l'opposé de ce qui lui avait été dit au mois de mars dernier. Il ne comprenait pas. Le 6 janvier, M. Gauthier a donné des explications, que j'ai entendues lorsque j'étais derrière la porte. Ce thème était à l'ordre du jour. Il a dit que, par la suite, il avait refait l'évaluation parce que celle du mois du mars ne semblait pas être plus complète qu'il le fallait. Il l'avait donc complétée par la suite. C'est ce qu'il a dit. C'est après, lorsque le président est arrivé au mois de mars, que tout a changé.
    Merci bien.

[Traduction]

    Alors ma prochaine série de questions s'adresse à vous, monsieur Akhavan.
    Vous avez mentionné — ai-je bien compris? — que Marco Navarro-Genie avait, selon vous, en fait été embauché par le conseil d'administration afin de travailler pour l'institut.
    Alors que M. Gauthier était président intérimaire, il semblerait que M. Navarro-Genie ait été embauché pour travailler pendant une semaine à titre de conseiller principal pour un montant et un mandat qui n'étaient pas spécifiés.
    Donc alors qu'il était membre du conseil d'administration, il aurait été embauché par M. Gauthier pour faire du travail, d'après vous.
    Oui, monsieur.
    Monsieur le président, je pense qu'il est important que le comité demande ce document. Nous avons déjà demandé... Je sais que M. Obhrai ne veut pas de transparence, mais nous avons demandé les contrats qui ont été passés par le conseil d'administration lorsque M. Gauthier en était le président, et jusqu'à présent nous n'avons pas reçu ces documents.
    À votre connaissance, est-il vrai que nous avons demandé les contrats passés pour le cabinet d'avocats, l'agence d'enquêtes privées, l'entreprise de média qui, nous savons, travaillait très fort lorsqu'ils sont venus devant notre comité la dernière fois, et que nous n'avons pas reçu ces documents?
    Je voudrais par ailleurs que nous demandions officiellement au conseil d'administration de nous remettre le contrat qui a été passé avec Marco Navarro-Genie, car je n'étais pas au courant.
    Monsieur Akhavan, êtes-vous au courant de cas où les membres du conseil d'administration auraient été embauchés pour travailler à contrat alors qu'ils étaient membres du conseil d'administration?
    Non, il est évident que ce serait un conflit d'intérêts si un membre du conseil d'administration donnait un contrat à un autre membre du conseil d'administration, surtout dans des circonstances aussi suspectes.
    Comme je l'ai dit, je me demande, étant donné le fait que M. Navarro-Genie a décidé de se lancer dans une campagne d'agression contre moi et contre les membres internationaux du conseil d'administration, si c'est ce qu'il faisait à Montréal cette semaine: s'il passait à travers les milliers de courriels que les agences d'enquêtes privées sont allées chercher dans l'ordinateur de M. Beauregard pour voir si elle pourraient trouver des accusations contre nous. Si tout ce qu'elles peuvent trouver c'est que je souhaite aider les victimes d'assassinats collectifs au Sri Lanka, j'ai bien peur qu'ils n'en ont pas pour leur argent.
    J'ajouterais, monsieur le président, que c'était M. Navarro-Genie qui, je crois, a dit que notre comité et ce processus étaient une farce. Il s'agit là de quelqu'un qui a été embauché aux frais des contribuables, d'après ce que nous pouvons constater — et nous ne le saurons pas tant que nous n'aurons pas de preuves, bientôt j'espère — de ce groupe à l'effet qu'il a été embauché aux frais des contribuables — pour travailler pour le président. Cela est tout à fait troublant, non professionnel et contraire à l'éthique.
    Je voudrais également que vous me parliez de M. Gauthier. Vous avez dit qu'il était allé en Chine accompagné d'autres membres du conseil, qu'il avait voyagé pendant cinq jours, et que les autres membres ont reçu des honoraires ou un per diem pendant cinq jours, et que c'était la quantité de travail qui avait été effectuée — une facture pour cinq jours — mais qu'en fait il était resté là-bas pendant cinq ou six jours de plus et, corrigez-moi si je fais erreur, qu'il avait facturé davantage pour...
(1210)
    Non, c'était M. Navarro-Genie. M. Navarro-Genie était allé en Haïti, et il y est resté quatre jours de plus pour ce qui semblerait être des affaires personnelles, d'après les renseignements dont je dispose — je n'étais pas là — et il a réclamé des honoraires de 1 300 $ au total pour ces jours-là. Je vérifiais les livres en décembre, en partie parce que le budget du conseil était deux fois plus élevé que ce qu'il avait été auparavant. Le budget du conseil n'a jamais été deux fois plus élevé.
    En ce qui concerne M. Gauthier, il est allé en Chine en décembre pendant six jours, il était accompagné de M. Beauregard et d'autres personnes. Les autres ont reçu des honoraires de 500 $, mais d'après les dossiers que j'ai vus, M. Gauthier a facturé 3 575 $, incluant cinq jours additionnels de préparation. Or, M. Gauthier a un cabinet d'avocats dans lequel il travaille à temps plein et je ne sais pas exactement comment il aurait pu passer cinq journées entières à se préparer pour une rencontre en Chine au cours de laquelle des plaisanteries étaient échangées. Je pense qu'il faut examiner de très près tous les contrats qui ont été offerts, y compris le contrat qu'il s'était octroyé lui-même; pendant combien de jours a-t-il été payé au cours de cette période de 66 jours pendant laquelle il était président?
    Nous avons des contrats avec Borden Ladner Gervais; Deloitte et Touche, Ogilvy Renault; Woods, qui est un gros cabinet d'avocats à Montréal; Serco Security Systems; Prima Communication; M. Auger, qui a démissionné après une semaine comme directeur général, un poste qui n'a jamais existé; et M. Navarro-Genie.
    J'ai fait le calcul estimatif. J'ai déjà travaillé dans un cabinet d'avocats. Le cabinet d'avocats partenaire Deloitte et Touche demande entre 500 et 600 $ de l'heure. Si on fait le calcul, on a une moyenne de 1 000 à 1 500 heures, ce qui représente un million de dollars qui aurait été dépensé au cours d'une période d'un ou deux mois. En période d'austérité, alors que tout le monde dit qu'il faut dépenser judicieusement l'argent des contribuables, il est impensable qu'un organisme de défense des droits de la personne puisse faire une telle chose.
    Merci, monsieur Dewar. C'est tout le temps que nous avons.
    Encore une fois je veux remercier les témoins d'être ici aujourd'hui. Nous allons maintenant passer à d'autres témoins, car il y en a quelques autres qui attendent. Encore une fois, merci beaucoup.
    Nous allons prendre une minute pour faire cela et nous allons reprendre tout de suite après. Merci.

(1215)
    J'espère que nous pouvons commencer. Nous commençons à manquer de temps. Je ne veux pas réduire le temps des questions et des témoignages, alors je vais donner une seconde au caméraman pour sortir et nous pourrons ensuite commencer.
    Je voudrais souhaiter la bienvenue à M. Broadbent et à M. Allmand qui connaissent bien notre comité.
    Monsieur Broadbent, nous allons commencer par vous. Vous avez 10 minutes, ensuite nous donnerons la parole à M. Allmand. Nous aurons ensuite une ou deux séries de questions et réponses.
    Bienvenue, monsieur Broadbent. Vous avez la parole, monsieur.
    Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui et particulièrement de revoir certains anciens collègues de tous les partis avec qui je me plaisais à travailler quand j'étais député.
    Malheureusement, ma comparution aujourd'hui se fait dans un contexte extrêmement préoccupant. Une institution canadienne unique en son genre, Droits et Démocratie, est maintenant dysfonctionnelle. D'après ce que j'ai entendu de la part de personnes que je respecte au Canada et à l'étranger — et j'ai passé les trois derniers mois à Londres et j'en ai beaucoup entendu parler — cette institution perd rapidement la réputation d'intégrité et d'indépendance qu'elle avait.
    Dans ma brève allocution, j'aimerais parler de la nature et du mandat de Droits et Démocratie, du rôle du président du centre et du président du conseil et enfin, des conséquences désastreuses pour le président défunt, le personnel et la réputation internationale de l'institution qu'ont eu les gestes d'une poignée de personnes incompétentes, intolérantes et mesquines. Ce faisant, je donnerai plus de détails sur la lettre que moi-même et trois anciens présidents de Droits et Démocratie avons fait parvenir au premier ministre le 13 janvier. Bien que les quatre anciens présidents aient été nommés par le Conseil privé, le premier ministre n'a pas encore répondu à cette lettre.
    Comme le savent les députés, Droits et Démocratie, institution créée par une loi du Parlement, fonctionne en vertu de la loi en toute indépendance par rapport au gouvernement. Le centre a pour mandat de faire la promotion des droits de la personne et du développement démocratique à l'étranger et j'aimerais insister sur deux aspects de cette mission aujourd'hui.
    Mon premier commentaire porte sur l'accent mis au paragraphe 4(1) de la loi d'abord, sur les droits de la personne et ensuite, sur la Charte internationale des droits de l'homme. Cet article précise clairement que le centre n'a pas pour mission de faire la promotion de notre forme particulière de démocratie parlementaire ou de notre Charte des droits et libertés. Ce mandat ne prône pas une forme « d'impérialisme canadien modéré ».
    J'aimerais aussi attirer votre attention sur le paragraphe 4(2), qui est extrêmement important et qui traite de ce que l'on qualifie d'« objet principal » de l'organisation qui n'est pas axé sur le processus politique de la démocratie comme telle mais plutôt sur un objectif crucial du centre, à savoir d'aider à réduire l'écart considérable qui existe parfois entre les engagements officiels pris par les États en matière de droits de la personne ou en vertu de leurs propres constitutions, d'une part, et les pratiques des États en ce qui concerne ces droits, d'autre part.
    Ce libellé a été brillamment élaboré et est devenu le fondement d'une part importante de l'activité du centre dans des pays tels que le Guatemala, le Mexique, le Salvador, le Pérou, le Kenya, le Rwanda, la Tanzanie, la Thaïlande et le Pakistan qui s'étaient tous engagés à divers degrés à respecter une gamme de droits de la personne internationaux alors qu'ils ne respectaient pas, au moment de l'adoption de la loi créant le centre, les normes internationales.
     J'aimerais faire valoir deux arguments ici. D'abord, la sagesse qui sous-tend la loi c'est qu'en règle générale les droits de la personne doivent primer. De nombreux États, par exemple, en Amérique latine — ont eu pendant une bonne part du XXe siècle des élections dites compétitives mais où il n'y avait pas de liberté de parole, de liberté d'association, de liberté de la presse ou de primauté du droit. Ainsi, comme l'histoire de l'Europe de l'Ouest et de l'Amérique du Nord a révélé dans son ampleur, je crois, que le fondement d'une véritable démocratie est une société qui respecte les droits universels, lesquels incluent maintenant les droits sociaux et économiques. Sans les droits de la personne, ces prétendues élections ne sont que de la poudre aux yeux. Ainsi, le centre, dans la plupart sinon la totalité de ses activités, a soutenu les défenseurs et les programmes liés aux droits de la personne dans les pays en développement.
    Afin de réaffirmer partiellement cette réalité — et je soupçonne que la plupart des députés ne le sauront pas, et il n'y a pas de raison qu'ils le sachent — les mots « développement démocratique » ont été ajoutés par amendement au titre du centre au Sénat, non pas pour mettre en opposition les droits de la personne et la démocratie mais plutôt pour bien préciser que la priorité accordée aux droits est l'essence même du développement démocratique.
    Je tiens à redire à quel point la réputation qu'avait Droits et Démocratie d'être totalement indépendante du gouvernement du jour est importante et, je crois, que cette indépendance a vécu.
(1220)
    M. Mulroney et M. Chrétien, et leurs ministres des Affaires étrangères, le comprenaient très bien. Ils l'ont démontré en faisant des nominations au conseil qui n'étaient pas empreintes de partisanerie. Comme nous le savons tous, un gouvernement peut imposer ses idées partisanes en choisissant soigneusement les candidats qu'il nomme et cela sans qu'il ait à leur donner d'instructions partisanes. Les précédents premiers ministres ont évité d'agir de la sorte avec Droits et Démocratie.
    Ensuite, ils attendaient de Droits et Démocratie qu'il soit à l'occasion en désaccord avec eux sur des questions liées aux droits de la personne internationaux. Et troisièmement, si je puis me permettre de le dire, ils ont nommé aux postes de présidents des gens dont ils croyaient qu'ils auraient cette indépendance d'esprit.
    Quand j'ai occupé le poste de président à Droits et Démocratie, j'ai ouvertement préconisé l'inclusion de tous les accords commerciaux internationaux de dispositions sur les droits des travailleurs, tels qu'ils sont énoncés dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que l'adoption rapide d'un pacte international relatif aux droits des peuples autochtones. Ces positions, et celles que j'ai prises dans quelques autres dossiers — étaient, sur le fond ou sur le degré d'insistance, en opposition à celles du gouvernement de l'époque. Le premier ministre ou le ministre des Affaires étrangères ne m'en ont jamais fait le reproche. D'ailleurs, pendant les années 1990 où nous menions notre œuvre militante sur le terrain dans de nombreux pays en développement, mon personnel et moi-même avons pu fréquemment compter sur le soutien des excellents fonctionnaires qui travaillent sur les dossiers liés aux droits de la personne dans nos ambassades outre-mer.
    À mon avis, c'est parce que Droits et Démocratie avait la réputation de posséder de solides compétences et d'être indépendant du gouvernement de l'époque qu'on a accédé à mes requêtes quand j'ai demandé à rencontrer le président Clinton à la Maison-Blanche, le roi de Thaïlande ou les présidents du Guatemala, du Mexique, du Rwanda, de l'Érythrée et du Kenya, pour ne nommer que ceux-là. Si jamais Droits et Démocratie n'est plus reconnu pour son indépendance en matière de droits par rapport au gouvernement en place mais qu'il acquiert la réputation de se conformer docilement aux priorités de la politique de parti, les gouvernements étrangers comme les ONG cesseront de s'intéresser aux avis émis par Droits et Démocratie. S'ils veulent connaître le point de vue du gouvernement du Canada, ils communiqueront tout simplement avec l'ambassadeur du Canada.
    En ce qui a trait aux rôles du président du conseil et du président du centre, selon la loi, le principal rôle du président du conseil est de diriger les réunions du conseil et de remplir les fonctions qui lui sont attribuées. Le président du centre, en sa qualité de premier dirigeant, « en assure la direction et contrôle la gestion de son personnel ».
    En clair, le président du conseil n'est pas le PDG de l'organisation. C'est le président du centre qui possède et exerce les attributions d'un PDG. Quand le conseil d'administration du centre prend une décision sur les grandes orientations stratégiques et les subventions importantes, c'est au président du centre qu'il incombe alors, puisqu'il est responsable des activités quotidiennes, d'embaucher et de surveiller le personnel et de prendre toute autre décision nécessaire pour atteindre les objectifs fixés. Le personnel, notamment l'équipe de direction, relève de lui et de personne d'autre. Ni le président du conseil ni tout autre administrateur, n'a le droit de s'arroger en tout ou en partie les pouvoirs du président du centre en ce qui a trait à la gestion du personnel.
    Au début de 2009, quand M. Braun est devenu président du conseil, il entrait dans une organisation où le moral était très bon. La précédente année, le centre avait non seulement reçu de la vérificatrice générale un excellent rapport annuel sur l'efficience et l'efficacité mais avait en plus reçu une très bonne note à la suite de l'examen quinquennal réalisé par le ministère des Affaires étrangères. Ses programmes récents pour la promotion des droits des femmes en Afghanistan avaient été jugés dignes de mention par l'ACDI. Bref, et ce sont des faits avérés et non pas des opinions, sous la présidence de M. Beauregard, la direction et le personnel fonctionnaient de façon efficiente, transparente et responsable.
    Par contraste, après l'arrivée de M. Braun au poste de président du conseil, il faut reprendre l'étiquette qu'il a accolée à tort au personnel et dire que le conseil lui-même est devenu dysfonctionnel, qu'il a instauré une culture de dogmatisme et qui manque de transparence.
(1225)
    Je me permets d'ajouter que c'est aussi depuis l'arrivée de M. Braun que le conseil d'administration de Droits et Démocratie a perdu deux de ses distingués membres étrangers, l'un ayant démissionné et l'autre n'ayant pas obtenu de nouveau mandat, qu'il a été critiqué par la Fédération internationale des droits de l'homme; qu'il a été critiqué par William Schabas, distingué directeur canadien du Irish Centre for Human Rights; et, pour couronner cette liste ignominieuse, que ses positions ont été contredites pour la toute première fois par Human Rights Watch et Amnistie Internationale.
    Je me ferais un plaisir de vous donner de plus amples détails lorsque je répondrais aux questions.
    Étant donné toutes ces péripéties et depuis la mort tragique du président, M. Braun est probablement le premier président du conseil d'une institution publique dans l'histoire du Canada à avoir hérité d'une équipe de direction très louangée, et d'un personnel exceptionnellement instruit et dévoué, puis son extraordinaire mauvaise gestion les a unis dans un vote quasi unanime en faveur de sa démission. Jamais n'a-t-on eu une aussi bonne raison de congédier le titulaire d'une charge publique pour cause d'incompétence flagrante et j'espère que c'est ce que recommandera le comité. Je n'ai jamais, à ma connaissance, réclamé le congédiement d'un fonctionnaire. C'est ce que je fais aujourd'hui.
    Si vous me le permettez, j'aimerais conclure sur une note personnelle en disant quelques mots d'un membre clé de l'équipe de direction qui a été critiqué particulièrement par certains membres du conseil. Marie-France Cloutier travaille au centre depuis plus de 19 ans, les six premières avec moi, dans un poste de haut niveau pendant que j'étais président. Tout au long de ma carrière publique, je n'ai jamais connu d'employée subordonnée plus compétente ou plus loyale. C'était une employée loyale mais elle n'a jamais hésité à dire la vérité à ses supérieurs. Qu'une personne et une fonctionnaire de si grand calibre ait pu être congédiée de façon si arbitraire en dit davantage sur ceux qui dirigent maintenant le centre qu'ils n'en disent sur elle.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Broadbent.
    La parole est à M. Allmand pour 10 minutes.
     Monsieur le président, membres du comité, j'aimerais d'abord vous remercier de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui pour parler de cette importante question.
    Comme vous le savez, j'ai été président de Droits et Démocratie de 1997 à 2002. Qui plus est, j'étais député en 1988 quand le centre a été créé par une loi du Parlement. Aujourd'hui, j'aimerais parler du mandat du centre, de son indépendance et de la façon dont elle s'exerçait pendant mon mandat, de ses mécanismes de reddition de comptes et de sa transparence, de la relation entre le président du centre et le conseil d'administration et de la relation entre le centre et le gouvernement. Je vais aussi expliquer dans quelle mesure tout cela a changé depuis la nomination en mars 2009 de plusieurs administrateurs dont Aurel Braun au poste de président du conseil.
    Le mandat du centre est énoncé à l'article 4 de la loi. En bref, sa mission est de défendre et de promouvoir la démocratie et les droits de la personne, particulièrement ceux énoncés dans la Charte internationale des droits de l'homme. Autrement dit, le centre a pour mission première de faire respecter la Charte internationale des droits de l'homme. Sa mission première ce n'est pas de mettre en œuvre la politique étrangère du Canada ni celle des États-Unis et certainement pas celle d'Israël. Le centre doit, en vertu de la loi, agir en toute indépendance dans l'exécution de son mandat et de sa mission première.
    Droits et Démocratie porte donc le drapeau des droits de la personne. Il ne porte pas le drapeau du Canada, des États-Unis ou d'Israël. Il a pour mandat de surveiller et de condamner les violations des droits de la personne lorsqu'il les décèle où que ce soit dans le monde, y compris au Canada. À cet égard, le centre doit agir en toute indépendance par rapport à tous les gouvernements et à tous les partis politiques. Cette règle est énoncée de diverses façons dans la loi et les règlements administratifs de Droits et Démocratie.
    Selon l'article 22, le centre n'est pas mandataire de Sa Majesté. Il s'agit là du gouvernement. L'article 23 stipule que le président du conseil, le président du centre, les autres administrateurs ne font pas partie de la fonction publique du Canada. L'article 19 précise que le siège du centre est fixé à Montréal, pas à Ottawa, où se trouve le chef du gouvernement. L'article 28 stipule que le centre doit recevoir un financement assuré pendant cinq ans pour garantir son indépendance. Par ailleurs, lorsqu'il nomme les administrateurs canadiens, le ministre doit consulter le chef de l'opposition et le chef de tous les autres partis reconnus à la Chambre des communes. En outre, lorsqu'il nomme le président du conseil et le président du centre, le ministre doit aussi consulter les membres du conseil d'administration existants, là aussi pour garantir l'indépendance du centre et la réalisation de sa mission première.
    Quand Joe Clark, ministre conservateur, a nommé Ed Broadbent, un néo-démocrate, comme premier président en 1990, il a donné l'exemple du respect de ce principe de l'indépendance du centre. Il a nommé une personne qui n'appartenait pas à son parti dont il savait qu'il était un défenseur des droits de la personne. Une fois nommé, la mission première d'Ed a été de faire respecter la Charte internationale des droits de l'homme et non pas les politiques du gouvernement du Canada, ni celles du NPD.
    Bien entendu, cette indépendance doit servir à accroître la crédibilité du centre, sa crédibilité lorsqu'il traite avec d'autres gouvernements, sa crédibilité lorsqu'il traite avec des organismes internationaux et sa crédibilité lorsqu'il traite avec des organisations oeuvrant dans le domaine des droits de la personne. Ce principe d'indépendance est à son tour renforcé par les Principes de Paris de l'ONU, la Déclaration des défenseurs des droits de l'homme de l'ONU et la Déclaration de Vienne sur les droits de l'homme de 1993, laquelle prescrit: « La communauté internationale doit traiter des droits de l'homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur accordant la même importance ». Autrement dit, on ne choisit pas à son gré d'appuyer certains droits ici et là ni de faire respecter les droits de la personne dans certains pays et pas dans d'autres.
    Comment cette indépendance s'est-elle exercée pendant mon mandat de président? Bien sûr, nous avions au conseil des gens qui avaient les mêmes antécédents professionnels, sociaux, ethniques, religieux et politiques. Or, quand ils étaient nommés au conseil, ils s'engageaient à réaliser le mandat du centre et agissaient en conséquence lorsqu'ils étaient appelés à prendre des décisions. Nous n'avons pas toujours été d'accord avec le gouvernement de l'époque et nous avons critiqué ses politiques, comme nous l'avons fait pour l'OMC, la zone de libre-échange interaméricaine, la ratification de la Convention américaine sur les droits de la personne et la mise en œuvre du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont le droit à l'eau et le droit à l'alimentation.
(1230)
    Cependant, malgré ces différences et ces critiques publiques, on n'a pas essayé de nous museler, de faire entrer au conseil des personnes à l'opinion opposée ou de nous menacer de coupures budgétaires. Nous nous consultions sur différents sujets, et lorsqu'il y avait un désaccord, le gouvernement acceptait que cela se produise parce que nous étions une organisation indépendante des droits de la personne.
    D'un autre côté, il y a eu des moments où des gouvernements, y compris celui du Canada, ont appuyé les mêmes politiques que nous. Nous travaillions alors ensemble pour mettre en œuvre ces politiques. Ça a été le cas avec la Cour pénale internationale, le Protocole facultatif concernant la participation d'enfants aux conflits armés, la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, la Charte démocratique interaméricaine et d'autres.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, il est très clair que ce qui se passe depuis mars 2009 ne correspond pas aux traditions dont j'ai parlé, ne correspond pas du tout à la loi et aux règlements de Droits et Démocratie, avec son mandat et son indépendance nécessaire. Il est évident que depuis une certaine date en 2009, le gouvernement a noyauté le conseil en y ajoutant des gens dont le but principal est de protéger Israël de toute critique, méritée ou pas, ce qui est également la politique du gouvernement Harper et du gouvernement Netanyahu.
    Ces gens — qui sont maintenant sept, y compris le président — ont un parti pris contre l'ONU, contre le Conseil des droits de l'homme de l'ONU et contre les ONG de défense des droits de la personne, et un parti pris au sujet du conflit au Moyen-Orient. La preuve de ces partis pris se trouve dans leurs propres articles et déclarations, dans leurs associations et partenariats, et dans leurs actions et leurs pensées. La longue déclaration de David Matas dans le blogue d'Ezra Levant du 24 janvier confirme exactement ce que je viens de dire.
    Par partenariat, je n'entends pas seulement le fait d'être membre du Parti conservateur. Je parle de partis pris politiques semblables à ceux du gouvernement Harper et qui sont contraires au mandat du centre, contraires à la Charte internationale des droits de l'homme et contraires à la Déclaration de Vienne. Il est normal dans une société libre que les partis politiques aient de tels partis pris, mais ce n'est pas acceptable pour Droits et Démocratie, qui a le mandat législatif de surveiller et faire la promotion des droits de la personne partout où cela est nécessaire.
    Dans le cas qui nous préoccupe, les trois subventions aux ONG du Moyen-Orient ont été autorisées en vertu du fonds d'action urgente. M. Braun et ses collègues ont dit, contrairement aux preuves substantielles, que le problème à Droits et Démocratie n'est pas politique, ne concernait pas le Moyen-Orient, mais que c'était un problème de reddition de comptes et de transparence.
    Toutefois, le fonds d'action urgente et son budget, et tous les programmes et budgets de Droits et Démocratie, sont approuvés chaque année par le conseil d'administration. Ils sont vérifiés chaque année par le Bureau du vérificateur général. Les rapports vérifiés sont inclus dans les rapports annuels, qui sont déposés au Parlement, affichés sur le site Web, et diffusés largement. De plus, le président et les administrateurs de Droits et Démocratie sont sujets au contrôle de ce comité parlementaire au niveau des rapports annuels et des états financiers vérifiés, ce qui a été appliqué à de nombreuses occasions.
    La Loi sur Droits et Démocratie exige également qu'il y ait une évaluation indépendante et approfondie de Droits et Démocratie tous les cinq ans. Il y a en a eu en 1993, 1998 et 2003. Aucune de ces évaluations quinquennales et aucune des vérifications annuelles du Bureau du vérificateur général n'ont indiqué que le centre allait à l'encontre de son mandat, ou l'outrepassait, ou que le fonds d'action urgente, le bureau de Genève ou même la participation à la Conférence de Durban en 2000 étaient inappropriés.
    Selon la Loi sur Droits et Démocratie et ses règlements, le rôle du conseil est d'offrir une orientation générale sur les politiques, d'approuver le budget annuel et le plan de travail et superviser leurs mises en œuvre. Ce n'est pas le rôle du conseil de faire la microgestion du centre. Selon la loi et les règlements, le président est responsable d'administrer et de gérer le centre, y compris l'embauche et la gestion du personnel. Le président occupe un poste à plein temps, ceux qui siègent au conseil sont à temps partiel.
(1235)
    Les gestes posés récemment par le président et le conseil d'administration d'annuler des subventions, de fermer le bureau de Genève, de geler le Programme d'action urgente, de congédier des employés, de bâillonner et de gérer le personnel et de remettre en question les affiliations religieuses sont dues à leurs partis pris politiques, et non pas à leurs obligations en vertu de la loi de gouverner en respectant la Charte internationale des droits de l'homme. C'est également vrai pour la tentative en 2009 de MM. Gauthier, Tepper et Braun de réécrire et changer l'évaluation de M. Beauregard.
    En conclusion, pour renforcer l'indépendance du centre, je vous présente les recommandations suivantes.
    Premièrement, il faudrait une enquête externe et indépendante sur la situation à Droits et Démocratie. Je vous remercie des audiences faites par votre comité; elles en valent la peine, mais elles sont trop courtes et incomplètes pour être en mesure d'aller au fond des choses.
    Deuxièmement, je crois que vous devriez songer à modifier la loi pour renforcer le processus de nomination.
    Troisièmement, vous devriez remettre en place la politique de financement pluriannuel, qui existait au départ mais qui a ensuite été oubliée. Le financement pluriannuel permettait au centre d'être plus indépendant.
    Monsieur le président, Droits et Démocratie joue un rôle important pour le Canada et le monde. Ce qui lui est arrivé récemment est totalement inacceptable. Puisque Droits et Démocratie est une création du Parlement, le Parlement est responsable de réparer les dommages aussi rapidement que possible.
    Merci.
(1240)
    Merci, monsieur Allmand.
    Nous allons maintenant passer à la première série de questions.
    Docteur Patry et monsieur Pearson, vous disposez chacun de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec mon collègue, M. Pearson.
    Monsieur Broadbent et monsieur Allmand, je vous remercie d'être venus ici ce matin. J'ai simplement une petite question très simple.
    En tant qu'anciens présidents de Droits et Démocratie, vous avez sans doute suivi l'évolution de la situation actuelle de très près. Ce qui se passe depuis plusieurs mois constitue-t-il, selon vous, de l'ingérence politique?

[Traduction]

    Je n'hésite pas à dire oui, mais je veux expliquer clairement comment cela peut se faire. Il peut y avoir de l'ingérence politique dans un organisme chargé de promouvoir les droits de la personne qui se veut indépendant, tel que le centre, de deux façons. Dans l'une, un ministre ou un premier ministre vous dit, avant que vous soyez nommé, que vous devrez privilégier les politiques x, y et z. C'est direct. L'autre façon, plus subtile mais aussi efficace, consiste à nommer des gens qui, vous le savez à l'avance, mettront en œuvre un tel programme. Vous le savez en examinant leurs dossiers. Vous regardez ce qu'ils ont dit publiquement par le passé à propos de certains sujets. Ensuite, vous les nommez au conseil.
    Selon moi, c'est ce dernier cas qui s'applique ici. Le premier ministre du Canada est directement responsable de nommer les membres du conseil. Ces nominations viennent du Conseil privé. Je ne peux pas croire que le premier ministre ne connaissait pas la réputation de M. Braun et de M. Gauthier avant de les nommer. J'ai peine à croire qu'il pensait qu'ils mettraient en œuvre un programme politique différent de celui de son gouvernement.
    Merci.
    Merci d'être ici.
    Nous sommes devant un gâchis. J'y vois quatre aspects.
    Premièrement, il y a l'organisation. Elle se trouve manifestement en crise. Je crois que c'est notre travail d'essayer de la sortir du pétrin.
    Deuxièmement, si ce que nous avons entendu aujourd'hui est vrai, la réputation de M. Beauregard a été salie, peut-être à tout jamais, à moins que notre comité ne s'en occupe sérieusement.
    Troisièmement, je m'inquiète beaucoup de ce qui se passe sur le terrain. Je ne pose pas la question aujourd'hui. Mais comment nos partenaires à l'étranger perçoivent-ils la crise que nous traversons et notre façon de la gérer?
    Pour terminer, notre comité se trouve devant un gâchis, quel que soit notre point de vue politique. Nous devons donc régler la situation.
    Vous avez tous les deux déjà comparu devant des comités en raison des postes que vous avez occupés à Droits et Démocratie. Notre comité se doit de trouver une solution et de dépolitiser la question autant que faire se peut.
    Que pourriez-vous suggérer au comité? Je ne vous demande pas de nous dire quoi faire. Mais comme vous avez déjà travaillé avec notre comité par le passé, comment devrions-nous aborder le problème? Quelles mesures devrions-nous prendre pour corriger la situation et pour remettre cette organisation sur pieds?
    Selon la loi actuelle, le ministre est censé consulter les partis de l'opposition avant de nommer des gens au conseil. Cela s'est fait par le passé. Mais je dirais respectueusement que les partis d'opposition n'y ont probablement pas prêté aussi attention qu'ils le font maintenant.
    Je vous recommanderais entre autres de revoir la façon dont les nominations au conseil sont faites. J'irais même jusqu'à dire qu'elles ne devraient pas seulement être sujettes à consultation, mais nécessiter l'appui d'au moins un des partis de l'opposition, afin que ce ne soit pas seulement le gouvernement qui prenne la décision.
    J'ai souligné le bon exemple qu'a donné Joe Clark au début. Lorsqu'il a créé le centre, bien qu'il était conservateur, il a nommé un néo-démocrate pour donner l'exemple.
    J'ai examiné également l'énoncé de politiques étrangères du gouvernement en 1995, alors que les libéraux étaient au pouvoir. Dans cet énoncé, on faisait l'éloge du Centre international pour les droits de la personne qu'on considérait comme un acteur de premier plan dans ce domaine sur la scène internationale. Un gouvernement libéral faisait donc l'éloge d'un organisme mis en place par un conservateur et dirigé par l'ancien chef des néo-démocrates. À mon avis, voilà l'approche non partisane à privilégier pour les droits de la personne et l'organisme Droits et Démocratie.
    Monsieur Pearson, je vous recommande donc de trouver une nouvelle façon, une meilleure façon, de faire ces nominations. Je crois savoir que le gouvernement Harper avait l'intention de mettre en place un processus amélioré pour les nominations par décret, mais cela n'a pas abouti. Ce processus devait s'appliquer à toutes les nominations, pas seulement à celles-ci.
(1245)
    Puis-je ajouter quelque chose?
    Je pense qu'il faut agir immédiatement. Je le crois fermement. Je crois que le président n'est pas à sa place, et encore moins le président du conseil. L'organisme possède un personnel fantastique qui a fait ce qu'il pouvait, à mon avis, en se rebellant. Ils ont fait cela pour protéger l'âme du centre, en fait. Je crois que M. Braun doit partir.
    Voici ma suggestion. Si le comité examine certaines suggestions — je ne parlerai que d'une ici — M. Braun devrait partir et le premier ministre devrait discuter avec les chefs de chacun des partis d'opposition pour placer à la tête de l'organisation, d'une façon intérimaire, un Canadien ou une Canadienne de renom. Il devrait ensuite, comme d'autres l'ont suggéré, mettre en place un processus de nomination différent. Mais je tiens à souligner qu'il faut agir sans tarder pour protéger cet organisme.
    Merci.
    Madame Lalonde, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Je partagerai mon temps avec ma collègue.
     Je vous remercie et je vous dis, extrêmement sincèrement, que Rémy Beauregard aurait aimé être ici pour vous entendre dire avec force ce pourquoi il a vécu une si horrible fin de vie. Vous avez mentionné la nécessité d'assurer l'indépendance par les moyens que vous avez proposés et qu'il a voulu maintenir.
     Sans des transformations, pour lesquelles il y a plusieurs pistes et dont le comité, dans sa majorité, doit s'occuper, Droits et Démocratie ne sera plus jamais la même organisation. Cela peut rester une institution, mais ce ne serait pas Droits et Démocratie. Il faut des changements immédiats dans le sens que vous avez indiqué, n'est-ce pas?
    Oui, je suis d'accord, mais...

[Traduction]

    J'ajouterais une chose à propos du processus de nomination que votre comité pourrait examiner. Je crois que M. Harper avait promis, lorsqu'il est devenu premier ministre, de mettre en place un processus de nomination très différent, comme l'avait proposé d'autres partis. Il y aurait entre autres des audiences, etc., mais il ne l'a pas fait.
    Voici une idée. Le premier conseil d'administration du centre a été mis en place à la suite de recommandations faites à M. Clark et M. Mulroney par M. Gordon Fairweather, qui avait été commissaire en chef des droits de la personne au Canada. M. Mulroney et M. Clark, et c'est tout à leur honneur, ont consulté M. Fairweather — qui avait été nommé par Pierre Trudeau, soit dit en passant, à titre de commissaire des droits de la personne — et lui ont demandé de préparer, après consultation, une liste de candidats pour le premier conseil d'administration.
    Vous pouvez être certain qu'avant d'accepter l'offre de M. Mulroney, l'une des premières choses que j'ai faites, c'est de regarder la liste de candidatures. Et il y avait là des Canadiens qui représentaient, par leurs antécédents, tous les partis politiques. La plupart des gens au conseil n'avaient pas de liens politiques, mais certains en avaient. Ils provenaient d'horizons très différents, mais s'intéressaient tous aux droits de la personne.
    Le processus a été impeccable: le commissaire aux droits de la personne a proposé une liste au gouvernement, et le gouvernement était prêt à l'accepter. On pourrait peut-être réessayer cela en attendant, pour en revenir à l'idée qu'il faut prendre des mesures immédiates pour régler la crise que traverse le centre.

[Français]

    Monsieur Allmand, avez-vous quelque chose à ajouter à cela?
    J'ai déjà fait des recommandations à cet égard.
    Merci.
    J'aimerais peut-être ajouter quelques commentaires à tout ce qui a été dit dans le témoignage de la veuve de M. Beauregard et ce que vous nous avez déclaré aujourd'hui. Avec un peu de recul et depuis les quatre dernières années, je suis un peu inquiète de voir comment s'inscrivent les politiques du gouvernement dans tous les programmes et à tous les niveaux. J'ai siégé au Comité de la condition féminine avant de siéger ici et les femmes ont été les premières à être les victimes des changements d'orientation du gouvernement. À mon avis, tous les groupes qui s'occupent de la défense des droits ou qui en font la promotion sont les premiers à se retrouver la tête sur la bûche — si vous me pardonnez cette expression.
    Personnellement, je suis vraiment choquée par ce qui se passe actuellement parce que cela ne fait pas partie de ma culture et de mes valeurs. On est en train de m'enlever ces valeurs auxquelles notre Canada nous a habitués, soit des valeurs de justice, d'équité et d'égalité. Je constate qu'on est en train de prendre un virage auquel nous, comme citoyens, on n'est pas habitués. Je ne me reconnais pas dans ce qui se passe actuellement.
    Dans la crise qui frappe fortement Droits et Démocratie, cet organisme, au fil du temps, s'est forgé une forte réputation et une très grande crédibilité au plan international. Comment les gens au niveau international perçoivent-ils ce qui se passe ici actuellement par le biais de cette crise?
(1250)

[Traduction]

    Je pense avoir mentionné que j'ai passé les trois derniers mois à Londres, que je suis revenu expressément pour cette audience, et que j'y retournerai ensuite. Arrivant de Londres, je peux vous dire, grâce à mes contacts, y compris au sein de diverses ONG internationales, qu'il y a des gens au gouvernement et dans les médias — et je n'en exagérerai pas le nombre — pour qui la réputation du Canada et de Droits et Démocratie est en chute libre. Voilà ce qui me dérange. Les gens qui s'inquiètent connaissent, pour la plupart, la réputation internationale du centre. Je ne veux pas déformer la réalité. Cependant, ceux qui s'occupent des droits de la personne à l'étranger connaissent bien l'histoire et le rôle du centre. Ce qui lui arrive est connu sur toute la planète, par les ONG et les gouvernements, y compris les gouvernements scandinaves et les autres qui sont sensibles aux questions de droits de la personne, et ils s'inquiètent sérieusement.

[Français]

    Concernant la première partie de votre question, il me semble qu'il y a un pattern semblable dans plusieurs organisations et non pas seulement à Droits et Démocratie. Je suis moi-même associé avec Kairos au sujet des questions autochtones. Cette organisation a plus ou moins le même problème associé avec le Moyen-Orient et avec Alternatives de Montréal.

[Traduction]

    Je connais d'autres organisations également. Il y a une cause concernant les peuples autochtones, les enfants autochtones, devant la Commission canadienne des droits de la personne, et elle est constamment remise à plus tard. Vous avez raison, ce qui se produit à Droits et Démocratie se produit ailleurs également, comme chez les organisations de femmes.
    En ce qui concerne les commentaires internationaux, la situation est intéressante. David Matas, dans sa déclaration célèbre sur le blogue d'Ezra Levant, a accusé ceux qui ont subventionné ces trois groupes au Moyen-Orient de ne pas comprendre — et son expression était très condescendante — ce qui se passe au Moyen-Orient. En d'autres mots, ces gens ne savaient pas ce qu'ils faisaient. Récemment, environ trois ou quatre semaines plus tard, le dirigeant de B'Tselem a déclaré que les gens à Droits et Démocratie qui ont annulé les subventions sont ceux qui ne comprennent pas ce qui se passe réellement en Israël et au Moyen-Orient.
    Il y a également eu une autre déclaration signée par six ou sept organisations des droits de la personne en Israël et dans les territoires palestiniens dans laquelle on critiquait cette décision. Il y a eu une lettre signée par plus de 100 avocats et professeurs au Canada dans laquelle on condamnait la situation. Il y a eu M. Schabas, qui est Canadien mais qui dirige maintenant l'Organisation des droits de la personne en Irlande. Il y a déjà eu beaucoup de commentaires à l'étranger à ce sujet, et cela n'aide certainement pas la réputation de notre organisation des droits de la personne.
(1255)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant retourner à M. Abbott pour sept minutes.
    Monsieur Allmand, j'aime toujours essayer de trouver un terrain d'entente avec les gens, et je pense que vous et moi sommes d'accord à propos du paragraphe 7(2), sur la nécessité de consulter. Je vais le relire:
        Les nominations au conseil sont effectuées après consultation, par le ministre, avec le chef de l'opposition et le chef de chacun des autres partis reconnus à la Chambre des communes.
    Alors il faut dire pour le compte rendu que M. Ignatieff, M. Duceppe et M. Layton ont approuvé tous les membres du conseil d'administration. Il est assez étonnant de les voir maintenant s'en laver les mains et dire qu'ils n'avaient rien à voir avec cela.
    Cependant, j'ai une question pour vous. Vous semblez être un peu obsédé par M. Matas. Pourquoi? Je ne comprends pas. Vous insinuez que M. Matas est le chien de poche du premier ministre, et qu'il répète la propagande du diabolique gouvernement conservateur. Est-ce que c'est ce que vous essayez de dire?
    Au sujet de votre premier point, le fait que les chefs des partis de l'opposition aient été consultés ne signifie pas qu'ils aient donné leur approbation. Je ne sais pas quelle a été leur réponse lorsqu'ils ont été consultés. Je ne sais pas ce qu'ils ont dit au premier ministre lorsqu'il leur a parlé. Il est vrai qu'il doit les consulter, mais je ne sais pas quelle a été la réponse, s'ils ont approuvé ou pas. C'est quand même le premier ministre qui a le pouvoir de faire les nominations par décret. Je ne sais pas s'ils les ont approuvées ou pas. Vous pourriez peut-être leur demander. Nous pourrions savoir quelle a été leur réponse lors de la consultation.
    En ce qui concerne M. Matas, M. Matas a siégé au conseil par le passé, alors que j'étais président, et il y jouait un rôle constructif, bien que même à cette époque, il semblait à l'occasion plus intéressé à faire l'apologie de l'État d'Israël que des droits de la personne dans le monde. Mais il n'était pas aussi extrême qu'aujourd'hui.
    Monsieur Abbott, lorsque j'ai lu — et il m'en a envoyé une copie — la longue déclaration qu'il a faite sur le blogue d'Ezra Levant sur Internet, qui est remplie d'attaques contre le Conseil des droits de l'homme de l'ONU et contre des ONG, j'ai été surpris de ses attaques virulentes, entre autres, contre des ONG qui défendent les droits de la personne. Cela me prendrait toute une séance ou peut-être une heure pour répondre à tous les points dans cette déclaration. Voilà la différence. Je n'ai pas de problème personnel avec M. Matas, mais la déclaration qu'il a faite montre que sa plus grande préoccupation est de protéger l'État d'Israël contre toute critique, méritée ou pas, et je ne suis pas d'accord avec cela. De plus, il appuie plus ou moins l'idée que si vous critiquez Israël, vous êtes antisémite, ce que je trouve ridicule.
    Si vous me permettez un bref commentaire de politicien à politicien, je n'en reviens pas que vous attaquiez une personne qui nous a dit ici qu'il était un libéral des Prairies, et nous savons également qu'il a été candidat au Prix Nobel de la paix. Je n'en reviens vraiment pas.
    Vous savez, il a été candidat libéral, mais cela ne dit rien au sujet de son parti pris pour l'État d'Israël. Il a un parti pris extrême.
    Par exemple, à la première conférence de Durban, il est parti avant que la conférence gouvernementale débute, alors qu'Irwin Cotler est demeuré et s'est battu pour s'assurer que la conférence gouvernementale ait une déclaration correcte. Qu'il soit libéral ou pas n'a rien à voir avec cela. Le problème, c'est son parti pris sur ce sujet précis. Et il semble que ce soit la même chose pour les sept autres personnes.
    Je vous dirais, messieurs, que vous faites entrer la partisanerie dans ce dossier...
    Non.
    ... et que cela ne convient pas, car, après tout, cette organisation devrait être non partisane.
    Permettez-moi de répondre.
    Vous avez demandé aux témoins précédents si le conseil devait décider de la politique de l'organisation? C'est un fait, mais la politique qu'ils adoptent doit respecter les exigences de gouvernance dont j'ai parlé, c'est-à-dire le respect intégral de la Charte internationale des droits de l'homme. On ne peut pas décider d'une politique ou faire des choses qui dépassent le mandat, qui se trouve à l'article 4 et aux suivants. Alors oui, vous pouvez décider des politiques, mais elles doivent respecter le mandat. D'après moi, nous avons ici des politiques décidées par le conseil qui dépassent le mandat parlementaire.
(1300)
    Vous avez utilisé le pluriel pour faire référence à nous deux.
    Je prends position, mais j'essaie réellement de ne pas être partisan. J'avais un conservateur éminent qui siégeait à mon conseil, un ancien député provincial de l'Alberta. Il était reconnu pour son travail dans le domaine des droits de la personne. Il siégeait à mon conseil. Il n'a jamais démontré de partisanerie, même s'il y avait un gouvernement conservateur au pouvoir, pour que nous suivions le programme conservateur. Il s'en est tenu au mandat sur les droits de la personne.
    Pour en revenir à David Matas, à titre de néo-démocrate... Nous n'avons pas encore vraiment formé le gouvernement fédéral, mais si j'étais premier ministre, j'aimerais bien nommer un libéral pour faire mon sale boulot, plutôt que quelqu'un de mon propre parti.
    De mémoire, jamais M. Matas n'a défendu les Palestiniens. Il a défendu, très souvent, les actions très offensives du gouvernement d'Israël. Pourquoi le gouvernement ne nommerait pas M. Matas pour ensuite dire, « eh bien, voyez, c'est un libéral »? Comme je l'ai dit plutôt, vous nommez des gens — quelle que soit leur étiquette politique — qui, vous le savez, mettront en œuvre votre programme.
    Ce que vous dites tous les deux, c'est que toute personne qui n'est pas d'accord avec vous fait de la partisanerie et vous pas.
    Non.
    Voilà une position étonnante.
    C'est faux. Nous disons que si vous allez à l'encontre du mandat... Il y a eu des conservateurs, il y a eu des néo-démocrates au conseil. Ils ont respecté le mandat de l'organisation, c'est-à-dire agir en respectant la Charte internationale des droits de l'homme. Voilà le principe directeur. Il ne faut pas agir pour protéger certains États contre la critique ou critiquer d'autres États qui ne le méritent pas. La Charte internationale des droits de l'homme est la norme.
    En passant, une fois que vous nommez un président à la Chambre des communes, une fois qu'il est président, il doit mettre la partisanerie de côté. Il devrait en être ainsi des gens qui siègent au conseil de Droits et Démocratie...
    Il ne reste plus de temps.
    Êtes-vous tous les deux en train de dire que tout cela concerne en réalité Israël? Est-ce que c'est ce que vous dites?
    Je dirais que oui, en grande partie.
    Merci à MM. Abbott et Allmand.
    Nous allons passer à M. Dewar. Je ne sais pas si ce sera pour le mot de la fin, mais certainement le dernier tour.
    Oui. Merci. Nous pourrions prendre plus de temps.
    Monsieur le président, je pense qu'une des choses dont nous devons discuter — on l'a mentionné en passant mais cela ne suffit pas — c'est que M. Beauregard a travaillé pour des premiers ministres provinciaux représentant les partis néo-démocrate, libéral et conservateur. Vous savez bien qu'on ne m'accusera jamais d'appuyer M. Harris de quelque façon que ce soit, mais j'aimerais signaler que M. Beauregard a pu travailler avec M. Harris dans le domaine des droits de la personne.
    Ce qui est plutôt révélateur, dans ce dossier, c'est que cette personne a pu travailler avec tous ses collègues, mais pas avec ce conseil d'administration. Ce n'est qu'un commentaire que je fais, parce que certains voudraient que l'on présente la situation de la façon suivante: « le conseil d'administration est venu s'occuper de la crise, du problème ». J'aimerais simplement signaler que cette crise a été créée par le conseil d'administration. C'est très clair.
    Après tout, si on se reporte aux témoignages des membres du conseil d'administration et des autres témoins, il est clair qu'ils ne se contentaient pas de faire de la microgestion, car ils changeaient même les procès-verbaux. Il suffit de mentionner l'exemple Durban, où M. Braun n'a jamais nié qu'il avait, en fait, fait modifier les procès-verbaux pour indiquer que ce n'était pas le président et le personnel qui avaient formulé la recommandation de ne pas aller à la conférence Durban II, mais que c'était lui. Nous avons entendu d'autres exemples ce matin de la bouche des témoins au sujet de contrats qui ont été accordés à des membres du conseil d'administration.
    M. Beauregard, d'après notre comité, d'après le procureur général et le ministère des Affaires étrangères, faisait tout conformément à son rôle et à son mandat.
    Je dois dire que je suis d'accord avec les recommandations qui ont été formulées, soit qu'il faut absolument agir immédiatement. Nous pouvons discuter en comité de ce qui pourrait être fait. Comme on le dit dans le monde médical, il faut d'abord faire le tri pour sauver la vie du patient, puis nous devons nous assurer qu'il est remis sur pied. Il nous faut certainement agir. Nous n'avons pas le choix.
    Monsieur Allmand, pouvez-vous nous dire si, par le passé, lorsqu'une évaluation était effectuée par le conseil d'administration, j'entends une évaluation de votre travail, vous étiez informé de celle-ci avant qu'elle soit terminée et signée? Étiez-vous invité à participer au processus?
(1305)
    Bien, ils préparaient les évaluations, mais ils me les montraient. Je n'ai jamais essayé de les changer. J'acceptais simplement ce qu'elles disaient.
    Je vois. Mais vous saviez ce qu'on disait dans l'évaluation.
    Les évaluations étaient discutées par le conseil d'administration dans son ensemble. Ce n'était pas fait par un comité restreint du conseil d'administration. Il se peut toutefois qu'un comité restreint ait préparé les documents initiaux.
    Je me souviens très bien qu'on m'avait demandé de quitter la salle pendant qu'on discutait de mon évaluation. J'ai quitté la salle, puis plus tard on m'a montré l'évaluation. J'acceptais ce qu'on y disait. Ils pouvaient dire ce qu'ils voulaient dans l'évaluation.
    J'aimerais également ajouter que mon évaluation était toujours positive, et que je n'avais donc, bien sûr, rien à redire.
    Mais il n'y avait pas de processus distinct.
    L'hon. Warren Allmand: Non, non.
    M. Paul Dewar: Et vous étiez mis au courant du contenu de l'évaluation.
    Comme je l'ai signalé, le président n'a jamais essayé... En fait, j'ai travaillé pour trois présidentes. Il y a eu Maureen O'Neil, puis Lois Wilson et enfin Kathleen Mahoney. Elles avaient des personnalités fortes, et chacune a présenté au conseil d'administration l'évaluation en temps opportun. Le conseil d'administration en discutait et l'approuvait, puis la faisait parvenir à la personne concernée.
    Est-ce que les choses étaient faites de la même façon à votre époque, monsieur Broadbent?
    Oui.
    Monsieur le président, j'ai posé cette question parce que, de toute évidence, on a changé la façon de faire les évaluations.
    Je pense que le processus de nomination... et je dois dire que je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon ami, M. Abbott, sur ce point. Nous avons été consultés, par exemple, pour la nomination de M. Latulippe et nous allons entendre son témoignage jeudi. À ma connaissance, personne n'était d'accord avec sa nomination, mais il a quand même été nommé.
    De plus, et j'aimerais connaître l'opinion de nos témoins... Vous savez, je suis en situation de conflit d'intérêts quand on parle de la Commission des nominations publiques, parce que je faisais partie du comité qui a étudié le projet de loi C-2, la Loi fédérale sur la responsabilité, qui avait proposé des amendements concernant la Commission des nominations publiques. Cette commission reçoit un million de dollars par année, mais n'a pas de procédure différente du CPM. Ainsi, rien n'a changé, sauf qu'un million de dollars est utilisé par le gouvernement pour nommer qui il veut.
    On a appris hier, par exemple, qu'une des nominations faites au CRDI est devenue un problème, parce que la candidate est membre d'une commission qui, selon la Fondation Gates, se trouve dans une situation de conflit d'intérêts.
    Je crois, dans les circonstances tout au moins, que notre comité devrait pouvoir interroger les candidats, avant qu'ils soient nommés au conseil d'administration ou même à la présidence. Monsieur Broadbent, vous avez signalé que nous pourrions tout au moins consulter les chefs de parti, et je crois que M. Allmand a dit la même chose. Nous pourrions faire cela, ou le comité pourrait également interroger les candidats, puisque nous n'avons pas de commission des nominations publiques. Est-ce que ce serait une autre façon de procéder?
    Il faut être bien clair. Comme je l'ai dit, je m'inquiète du personnel et de la crédibilité de Droits et Démocratie quand l'organisation a à sa tête des gens comme M. Latulippe et M. Braun. Je crois qu'il faut immédiatement prendre des mesures pour remplacer le président du conseil. Je ne suis pas certain que vous pourriez parvenir à un consensus rapide au sein d'un comité plénier de la Chambre sur la personne à choisir, mais par la suite, pour ce qui est des futurs candidats, il serait bon d'avoir l'approbation des partis.
    C'est pourquoi je crois que la façon la plus efficace de procéder serait que le comité recommande tout d'abord que le président du conseil qui est responsable de tout ce qui se passe — et qui doit rendre des comptes à votre comité — soit remplacé. J'espère que le premier ministre accepterait ensuite de rencontrer MM. Ignatieff, Duceppe et Layton pour choisir un Canadien ou une Canadienne qui puisse occuper ce poste par intérim, quelqu'un dont personne ne pourrait douter de l'intégrité. Procédons de cette façon pour redonner confiance au personnel et pour mettre de l'ordre dans l'organisation. Le conseil d'administration actuel aura de la difficulté, à mon avis, tant que des décisions à plus long terme ne seront pas prises pour modifier sa composition.
(1310)
    Merci, monsieur Dewar.
    Il ne nous reste plus de temps. Je tiens à remercier encore une fois nos témoins. Je m'excuse, mais aujourd'hui nous avons beaucoup de contraintes de temps. Je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer.
    La séance est levée.
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