:
Merci, monsieur le président, membres du comité.
[Traduction]
J'aimerais remercier tous les membres du comité de m'avoir invitée aujourd'hui et de me donner l'occasion de témoigner sur les événements qui se sont produits dans les mois précédant et suivant le décès soudain de mon mari.
Permettez-moi de dire tout d'abord que ce n'est pas facile pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui. Je ne suis pas une personne qui recherche la publicité, mais les torts commis envers mon mari sont si graves que je n'avais d'autre choix que de partager ce que je sais.
J'espère que vous comprendrez que le français étant ma première langue, je vais témoigner en français aujourd'hui.
[Français]
Mon nom est Suzanne Trépanier. J'étais l'épouse de Rémy Beauregard qui, jusqu'à son décès le 8 janvier dernier, occupait le poste de président de Droits et Démocratie. Si j'ai demandé à comparaître devant vous, c'est pour rétablir les faits car des allégations faites à l'endroit de Rémy par certains membres du conseil d'administration, dont entre autres les membres du comité d'évaluation, sont fausses. Je désire que la réputation de mon mari cesse d'être ternie par des gens qui, à mon avis, par leur acharnement irrationnel, par leur mauvaise foi évidente et par le harcèlement prolongé qu'ils lui ont fait subir pendant plusieurs mois ont fini par avoir un effet très néfaste sur sa santé.
Aujourd'hui, mon but ultime est de rétablir la réputation de Rémy et qu'il y ait des conséquences pour les membres du conseil d'administration qui sont responsables des dérapages dont je vais témoigner. Je suis la personne qui connaissait le mieux Rémy. Au fil de notre union de 29 ans, je suis devenue sa meilleure amie et confidente. Nous vivions toujours un très grand amour. Tout cela s'est terminé dramatiquement dans la nuit du 8 janvier dernier.
Je crois qu'il est important que vous sachiez qui était Rémy Beauregard. Rémy était un ardent défenseur des droits humains. De façon plus personnelle, il s'intéressait spécialement aux droits des enfants, des femmes et des personnes âgées. Détenteur d'une maîtrise en administration publique de l'ENAP, Rémy a, au cours de sa carrière, toujours fait valoir les droits linguistiques et a défendu les droits des plus démunis en tant que directeur général de la Commission des droits de la personne de l'Ontario et comme défenseur des droits de la personne pour les enfants soldats et les femmes en Ouganda, d'abord à la Commission ougandaise des droits de la personne puis pour War Child Canada.
Rémy était un fonctionnaire public de carrière. En Ontario, il a travaillé pour les gouvernements de David Peterson, Bob Rae, Mike Harris et Dalton McGuinty. Rémy était un homme non partisan, ce qui lui tenait beaucoup à cœur. Rémy avait un esprit franc et ouvert. Je l'ai toujours vu respecter les lignes d'autorité et il demandait qu'il en soit de même pour lui. Le respect était très important, que ce soit à la maison ou au bureau. Rémy était un médiateur, probablement l'un des meilleurs au Canada. Il n'aimait pas les conflits et cherchait toujours un compromis pour en venir à une solution acceptable. Rémy était un homme simple et foncièrement bon. Son plus cher désir était de pouvoir dire avant de mourir qu'il avait fait tout son possible pour faire une différence dans le monde. Malheureusement, dans les dernières heures de sa vie, c'est sa réputation qu'il tentait de sauver.
Permettez-moi maintenant de refaire le fil de certains événements. Je crois que c'est important, car des administrateurs ne se sont pas gênés pour continuer à porter des accusations contre Rémy alors qu'il n'était plus là pour se défendre. Sur le plan chronologique, une des premières plaintes du vice-président du conseil, Jacques Gauthier, paraît dans un mémorandum strictement confidentiel annexé à l'évaluation de Rémy. Il accuse Rémy d'avoir organisé un souper après la présentation du film Burma VJ sans l'avoir invité ainsi que le président du conseil. Ce souper avait été organisé à la dernière minute, amicalement et de façon informelle, après le visionnement du film. J'étais en compagnie de Micheline Lévesque et je lui ai suggéré d'aller souper. L'organisateur de l'événement, le producteur du film et les deux invités birmans se sont joints à nous. À ma connaissance, le président et le vice-président étaient déjà partis. Vous me direz que cet incident n'a aucune importance, mais ces derniers considèrent cela comme la preuve d'un manque de loyauté de la part de Rémy et se montrèrent de plus en plus vindicatifs à son égard par la suite.
Dans ce même mémorandum et dans son évaluation de rendement, on accusait Rémy de poser des gestes illégaux, tel que rencontrer et financer des terroristes. Ces accusations sont inventées de toutes pièces. Rémy considéra cela comme une atteinte à sa réputation. À mon avis, cette mention dans ces documents est de mauvaise foi. L'acharnement avec lequel le président et le vice-président du conseil veulent faire valoir leur point est insensé. Qualifier le discours de Rémy, prononcé devant plus de 150 personnes dont des délégations gouvernementales, comme étant une réunion avec des terroristes est absurde.
Quant au vote de Rémy sur la répudiation des trois subventions de 10 000 $ chacune à de présumées organisations terroristes et de son commentaire « We should have done our homework better », j'aimerais préciser que Rémy m'a confié qu'il ne remettait pas en question le bien-fondé de ces subventions, mais que, dans son esprit de conciliateur, il a voulu éviter des débats inutiles. Son commentaire n'était pas un aveu, mais un constat qu'il était un médiateur qui cherchait toujours à trouver un compromis. J'ai d'ailleurs été très choquée de lire le 24 janvier dernier l'article de David Matas, qui interprète les sentiments de Rémy la veille de son décès. Je le cite:
[Traduction]
Beauregard s'est couché le soir de sa mort sachant que ces trois subventions, qu'il avait mis tant de temps et d'effort à défendre, mettant en jeu sa réputation personnelle devant la gestion et le conseil d'administration, avaient été une erreur.
[Français]
Qui est M. Matas pour interpréter les pensées d'une personne aujourd'hui décédée qu'il n'avait rencontrée que brièvement à deux reprises avant le 7 janvier? Était-il au lit avec Rémy ce soir-là? À mon avis, ce genre de propos, dans le contexte actuel, est dément.
Rémy est accusé de ne jamais avoir été disponible pour une rencontre avec les membres du comité d'évaluation...
:
Rémy est accusé de ne jamais avoir été disponible pour une rencontre avec les membres du comité d'évaluation dans le but d'en réviser le rapport. Voici le nombre de jours où les membres impliqués étaient disponibles pour les 50 dates proposées par la secrétaire du comité entre les 20 juillet et 10 octobre 2009: Rémy 44, Aurel Braun 17, Jacques Gauthier 12, Jean Guilbeault 50, Donica Pottie 9,5 et Elliott Tepper 0,5. Vous conviendrez qu'il est faux de dire que Rémy a tout fait pour éviter cette rencontre.
J'aimerais soulever ici certains faits survenus lors de la réunion du 6 janvier. J'accompagnais Rémy et j'ai tout entendu de l'autre côté de la porte. Je peux vous assurer que Rémy y a fait un vibrant plaidoyer pour défendre ses droits et sa réputation professionnelle. Ni M. Guilbeault, qui avait été mandaté par le CA à se joindre au comité d'évaluation, ni Rémy n'ont vu ou reçu une copie du rapport révisé avant la rencontre.
Le vice-président refusait d'en remettre une copie à Rémy en prétextant qu'il avait les mains liées et qu'on allait partager verbalement avec lui les changements apportés. Sur l'insistance de Rémy, on lui a finalement remis une copie à la condition expresse qu'il la rende à la fin de la réunion, ce qu'il n'a eu d'autre choix que d'accepter. Fait à noter, le rapport était rédigé en anglais seulement.
Le vice-président était furieux de constater que Rémy avait en main la note de service strictement confidentielle dans laquelle il faisait allusion à l'origine ethnique des employés. Devant l'acharnement du vice-président à savoir comment Rémy se l'était procurée, ce dernier a répété à maintes reprises qu'elle faisait partie intégrante de son évaluation de rendement déposée au Bureau du Conseil privé. Rémy a questionné le président du conseil sur le caractère erroné et négatif du rapport écrit alors qu'un rapport verbal élogieux avait été fait par les membres du CA lors de la réunion de mars 2009.
Le président du CA a fait remarquer à Rémy qu'en tant que haut fonctionnaire d'expérience extrêmement bien rémunéré — ce sont ses mots —, ce dernier pouvait se défendre seul sans l'aide de membres du comité. Rémy a proposé des changements au rapport, mais le vice-président a précisé qu'il n'était pas prêt à faire des changements à la rédaction de son rapport. Une motion a été votée à cet effet à trois contre un. Rémy a insisté pour qu'il soit indiqué au procès-verbal que cette décision lui était imposée.
Lors de cette réunion qui a duré plus de deux heures, j'ai pu ressentir le désarroi de Rémy, son niveau de stress élevé, surtout que le président du conseil d'administration l'empêchait constamment de s'exprimer. À la sortie de cette réunion, il m'a fait part de sa ferme intention de contester cette évaluation et de porter plainte contre les trois administrateurs en question pour leur manque d'éthique professionnelle et entrave à la bonne gouvernance. Ce soir-là, j'ai dit à M. Guilbeault et aux trois directeurs que j'étais très inquiète pour Rémy car il vivait un stress plus intense que jamais. Cette nuit-là, Rémy n'a pas dormi. Il m'a confié qu'il était très difficile pour lui de faire face à toute cette situation. Après s'être battu pendant presque toute sa vie et sa carrière pour faire valoir les droits des autres, il ne réussissait pas à faire valoir ses propres droits.
Les insinuations de Jacques Gauthier dans son mémo attaché à l'évaluation de Rémy le perturbait particulièrement. Rémy disait aussi qu'il lui était très difficile de composer avec l'attitude agressive d'Aurel Braun envers lui ainsi qu'à l'égard de certains membres du conseil d'administration et de son personnel. Le 1er avril dernier, comment M. Matas a-t-il pu parler de l'évaluation de rendement de Rémy pour la période de juillet 2008 à mars 2009 alors qu'il a été nommé membre du conseil en novembre 2009? Le 6 janvier, Rémy a posé une question du même ordre au président du conseil sur la pertinence de sa note jointe à l'évaluation de rendement alors qu'il n'avait été en poste que trois semaines pendant la période visée par l'évaluation.
J'aimerais dire que ce genre d'agissements, dans le ton utilisé comme dans le propos, est tout à fait indigne, choquant, inconvenant pour ne pas dire incompétent de la part de membres d'un conseil d'administration dont, notamment, le président et le vice-président d'une organisation paragouvernementale des droits de la personne et de la démocratie.
J'aimerais parler d'autres évènements que je crois important de souligner. Le 7 janvier 2010, Rémy a été très bouleversé d'apprendre, à l'ouverture de la réunion du conseil, que le président avait décidé de remanier l'ordre du jour de telle sorte que le rapport du président, que Rémy devait présenter, et le point sur son évaluation de rendement avaient été reportés d'une journée, soit au 8 janvier. Je vous ferais remarquer que Rémy a travaillé d'arrache-pied à la rédaction de son rapport pendant les Fêtes puisque ce dernier portait sur la période de juin à décembre 2009. Pour Rémy, il était important que ce rapport d'activités se fasse en début de réunion puisqu'il apportait un éclairage sur les sujets à être abordés par la suite et sur lesquels des décisions étaient requises.
Le 8 janvier 2010, le décès subit de Rémy a été le début d'une grande période de stress pour moi qui est toujours aussi intense à ce jour. J'ai reçu un appel de condoléances de la part du Bureau du Conseil privé, ce qui était un peu choquant compte tenu qu'à la recherche de la justice relative à son évaluation, Rémy a multiplié les rencontres et échanges à l'automne 2009, en l'occurrence avec Eileen Boyd, secrétaire adjointe du Cabinet au BCP, au moins cinq fois, avec Keith Christie, sous-ministre adjoint du Secteur des Enjeux mondiaux aux Affaires étrangères, au moins trois fois, avec Jean-Maurice Duplessis, directeur des opérations au bureau du ministre des Affaires étrangères, deux fois, et avec Claude Carrière, conseiller de la politique étrangère et de la défense au Bureau du Conseil privé, afin de trouver une solution acceptable à une situation qui se détériorait. Or, il n'a jamais obtenu de réponse à ses demandes.
J'ai aussi reçu une lettre de condoléances du ministre Cannon, très élogieuse à l'égard de Rémy, ce qui a été un peu un affront pour moi, sachant que le ministre n'a jamais répondu à la demande de rencontre de Rémy du 3 novembre dernier, demande qui avait aussi été envoyée à Jean-Maurice Duplessis, du bureau du ministre. À ma connaissance, l'évaluation très positive du travail de Rémy pour la même période, effectuée par le ministre et les Affaires étrangères, n'a pas été reflétée dans ce rapport d'évaluation de rendement. À mon avis, le gouvernement a manqué à son devoir d'agir en bon père de famille ave le résultat que la gouvernance a continué.
En plus du stress causé par le décès de Rémy, j'ai dû subir un double affront dans les jours qui ont suivi. D'abord, il y a eu la parution du communiqué de presse de condoléances de la part du président du conseil, que je qualifie d'hypocrite, puis le coulage dans les médias du courriel que je lui avais envoyé à ce sujet. La suspension du personnel responsable a entre autres fait en sorte de retarder et de compliquer les démarches administratives liées au décès de Rémy, et c'est moi qui en ai souffert.
Contrairement à ce qui a été mentionné le 1er avril dernier par Jacques Gauthier, le personnel ne m'a pas remis l'ordinateur de Rémy puisque ce dernier avait quitté Montréal avec son équipement pour se rendre à la réunion du conseil, qui avait lieu à Toronto. Après son décès, j'ai rapporté tout le matériel de Rémy à notre résidence de Montréal. Le 1er mars, M. Gauthier exigeait que je remette les biens avant le 3 mars à 17 heures. J'ai assuré avoir l'intention de remettre les biens, précisé que j'étais à Toronto pour des soins médicaux et que l'échéance qu'il m'imposait était impossible. Le 3 mars, je recevais un deuxième avis me donnant comme date butoir le 5 mars à midi, faute de quoi, M. Gauthier menaçait d'entreprendre des mesures légales.
Contrairement à ce qu'a laissé entendre M. Matas le 1er avril, des échanges entre Rémy et Eileen Boyd au Bureau du Conseil privé peuvent confirmer que le bureau était largement informé de la situation au sein du conseil, et ce, depuis plusieurs mois. Rémy n'était pas en poste au moment des allégations publiées à deux ou trois occasions dans le National Post, en 2002, et non pendant plusieurs semaines, comme l'a laissé entendre M. Gauthier le 1er avril. Il est triste de constater que Rémy était entouré d'une bonne équipe et qu'il avait la confiance de son personnel, mais qu'il n'a pas eu la chance d'avoir la même courtoisie de la part de certains membres de son conseil.
Vous conviendrez que jamais on aura autant parlé de Droits et Démocratie. Il est ironique de constater que toute cette visibilité que connaît actuellement le centre dans l'ensemble du Canada répond ainsi à une des attentes du Bureau du Conseil privé définies dans le cadre de son mandat. De plus, la crise a été rendu publique ailleurs dans le monde, comme en font foi certains articles de journaux dont notamment celui de la FIDH, de Gerald Steinberg, de William Schabas, etc.
Je tiens à vous dire que je regretterai toute ma vie d'avoir appuyé Rémy, comme je l'ai toujours fait d'ailleurs, dans sa décision d'accepter ce mandat à Droits et Démocratie. Non pas à cause de l'organisme en question ou du personnel qui y travaille, mais bien à cause du harcèlement qu'il y a vécu pendant plusieurs mois et qui a contribué grandement à augmenter son stress jusqu'à atteindre un niveau insoutenable. Je ne me pardonnerai jamais de ne pas avoir réussi, malgré tous mes efforts au cours des derniers mois de sa vie, à le convaincre de tout laisser tomber. Il me répétait qu'il n'acceptait pas qu'on attaque sa réputation, qu'il se défendrait jusqu'au bout et qu'il ne démissionnerait pas car il le devait à ses employés et à Droits et Démocratie. Voici qui était le grand Rémy Beauregard.
Pour toutes les raisons évoquées aujourd'hui, je demande que le Bureau du Conseil privé procède au retrait du rapport d'évaluation de rendement ainsi que ses notes et annexes du dossier de mon mari. Je demande des excuses publiques de la part des sept membres du conseil qui ont dénigré les compétences de gestionnaire de Rémy, entre autres dans les médias.
Je demande le remplacement immédiat des quatre membres du CA qui ont tenu publiquement des propos diffamatoires à l'égard de Rémi, soit MM. Aurel Braun, Jacques Gauthier, Elliot Tepper et David Matas. À mon avis, ces administrateurs ne comprennent pas leur rôle et agissent contre les intérêts de Droits et Démocratie en voulant y imposer leurs idéologies personnelles.
Je demande à ce qu'une copie de mon témoignage soit déposé dans les dossiers personnels des quatre administrateurs ci-haut cités au Bureau du conseil privé. Je demande également que le gouvernement commande une enquête publique indépendante afin que la lumière soit faite sur tous les agissements et événements survenus au sein du conseil d'administration de Droits et Démocratie au cours de la dernière année.
Je vous remercie, membres du comité, du temps que vous m'avez accordé aujourd'hui. J'espère que mon témoignage vous aura éclairé sur la situation et qu'il n'aura pas été trop émotif, comme certains d'entre vous le craignaient. Merci.
:
Monsieur le président et honorables membres du comité, je vous remercie de m'avoir offert l'occasion de partager avec vous ma perspective sur les événements qui ont mené à la crise au sein de l'organisation Droits et Démocratie.
[Traduction]
Je comparais devant vous aujourd'hui parce que je crois que la justice doit l'emporter sur l'opportunisme politique. Mon intérêt aurait été plutôt de me taire, mais face à l'abus de pouvoir dans un organisme voué aux droits de la personne, je ne pouvais pas, en toute bonne conscience, rester silencieux.
J'ai eu l'honneur d'être nommé au conseil d'administration par l'actuel gouvernement le 29 février 2008. Je savais qu'en décembre 2002 l'inspecteur général avait recommandé d'améliorer la surveillance et la gestion financière et les relations de travail. Le conseil d'administration a immédiatement commencé à apporter ces améliorations sous la direction de la présidente du CA, Janice Stein, puis sous la présidence de Jean-Paul Hubert. Rémy Beauregard a continué avec succès ce processus après sa nomination au poste de président par le gouvernement le 26 juin 2008.
En août 2008, après son examen quinquennal de Droits et Démocratie, le ministère des Affaires étrangères a conclu que « Les résultats généraux issus du présent examen... sont positifs » et « Ont confirmé l'efficacité et la pertinence des activités (de l'organisme) sur le terrain ». Le rapport du 9 juin 2009 de la vérificatrice générale était également positif. Bref, contrairement à ce qu'affirmait l'actuel président du CA, Aurèle Braun, devant ce comité le 1er avril, Droits et Démocratie n'était pas un organisme dysfonctionnel au moment de sa nomination le 11 mars, mais au cours des mois qui ont suivi l'organisation s'est désintégrée lorsqu'une minorité d'administrateurs ont lancé une offensive de prise de contrôle hostile.
Le conflit au sein du CA a commencé après la première réunion présidée par M. Braun, le 26 mars. La majorité des administrateurs étaient hautement satisfaits du rendement de M. Beauregard, mais le président du CA a donné l'ordre au secrétaire de ne pas mentionner ce fait dans le procès-verbal. MM. Braun et Gauthier s'inquiétaient de petites subventions accordées à trois organismes. En guise de compromis, le président a accepté de ne pas leur fournir d'autres fonds. M. Braun a également insisté pour avoir un droit de veto sur toute future subvention. Encore une fois, nous avons accepté une procédure d'examen comme compromis. MM. Braun et Gauthier s'opposaient à la participation à la conférence d'examen de Durban organisée par l'ONU, mais M. Beauregard avait déjà décidé de boycotter cette rencontre, avec l'appui unanime du CA.
Plutôt que de féliciter le président, ces administrateurs ont envoyé une évaluation secrète au Conseil privé, remplie d'accusations sans fondement, de demi-vérités et de distorsion qui jetait le discrédit sur son leadership, pourtant positif. Ils ont essayé de le présenter comme étant anti-Israël dans des dossiers qui avaient déjà été réglés à la satisfaction de tous. La note très sévère du président du CA qui accompagnait le rapport qualifiait celui-ci de « critiques constructives »; pour nous, il s'agissait plutôt de diffamations.
Le président et la majorité des conseils d'administration avaient en vain demandé à voir le rapport d'évaluation et les services d'un cabinet d'avocats avaient été retenus au coût de 17 298 $ pour justifier la décision. Lorsqu'il a été divulgué à la réunion du conseil d'administration le 18 juin suite à une demande en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, la majorité voulait le désavouer. Encore une fois, en guise de compromis, nous leur avons donné la chance de le modifier, ce qu'ils ont accepté.
Notre confiance a été trahie. Ils n'avaient aucunement l'intention de respecter cette entente. Ils avaient plutôt un plan pour modifier la composition du CA au goût du président du CA et de ses alliés. Le 4 septembre, Mme Donica Pottie, représentante du gouvernement au CA, a soudainement démissionné sept mois seulement après le début de son mandat de trois ans. Elle avait auparavant présenté un rapport positif sur M. Beauregard au nom du gouvernement. Mme Pottie partie, le président du CA n'avait plus besoin que de deux nouveaux membres pour avoir une majorité de sept à six.
Le 19 octobre, M. Braun et ses alliés ont soudainement reporté une réunion du CA avec seulement deux jours de préavis. La majorité des membres avaient été exclus de cette décision, qui a entraîné des coûts d'annulation de 15 000 $. Comme ils n'avaient pas encore la majorité, ils voulaient éviter une discussion du rapport qu'ils avaient négligé de modifier quatre mois auparavant. Ils voulaient également bloquer le renouvellement du mandat de Guidos Riveras Franck, un Bolivien respecté, expert en matière de démocratie que le et le avaient régulièrement consulté.
Le 8 novembre, j'ai écrit à M. Gauthier pour lui demander s'ils avaient l'intention d'obtenir, et je cite, « une majorité décisive au conseil d'administration qui aura pour effet de museler une fois pour toutes les membres dissidents et qui préparera probablement aussi la voie au congédiement du président et de ses cadres supérieurs ». C'est ce que j'écrivais à M. Gauthier le 8 novembre.
Immédiatement après la nomination des deux nouveaux membres, le 13 novembre, M. Braun a convoqué une réunion pour le 7 janvier. Fort d'une majorité d'une voix, le comité du rendement a rencontré M. Beauregard le 6 janvier lors d'une réunion très acrimonieuse où ils ont manqué à leur promesse de corriger le rapport.
À la réunion du CA, il est apparu clairement que cette majorité d'une voix visait à exclure totalement l'autre moitié, ayant déjà tout décidé d'avance. Pour des administrateurs comme Sima Samar, qui s'était donné la peine de venir de Kaboul, c'était extrêmement insultant. Quelques jours plus tôt, dans un échange de courriels au sujet de nos préoccupations, M. Navarro-Genie, l'un des administrateurs, nous a traités de « tiers mondialistes », nous comparant à Robert Mugabe et nous comparant aux « Sujets de Sa Majesté britannique en Amérique du Nord ».
Comme nous l'avions prévu, le CA était devenu un conseil à partie unique hostile et tout était en place pour écarter M. Beauregard et l'équipe de gestion. Lorsque M. Riveras Franck a été évincé du conseil, la coupe a débordé. Mme Samar et moi avons décidé de démissionner en guise de protestation. Cela a été un moment de pure honte, celui de la démission d'une championne afghane des droits de la personne d'un organisme des droits de la personne canadien. Ce jour-là, M. Beauregard était visiblement profondément bouleversé, sachant qu'il serait probablement forcé de démissionner et que sa réputation serait ternie. Nous étions loin de nous douter que ce grand ami et collègue allait nous quitter pour de bon peu après.
Après son décès tragique, avant même que ses funérailles aient eu lieu, nous avons été scandalisés lorsque des documents internes ont été fournis à Ezra Levant et Gerald Steinberg pour qu'ils continuent à salir sa réputation. Les éditoriaux des sept membres du conseil qui étaient contre lui étaient tout simplement honteux. La demande de démission de président et des deux vice-présidents du CA par 45 employés courageux était le témoignage du respect qu'ils avaient pour un chef admiré, et de loyauté envers l'intégrité de l'institution. Pour se venger, ce même conseil a maintenant retenu des avocats et des enquêteurs privés chers pour persécuter le personnel. On estime que cela a déjà coûté près d'un demi-million de dollars aux contribuables.
Dans cette nouvelle aire de responsabilité que proclame le conseil, il a modifié un règlement administratif pour justifier rétroactivement l'octroi de ces contrats lucratifs sans appel d'offres. Cela ne fait qu'ajouter aux autres irrégularités financières dans le budget du conseil. Nous ne pouvons que nous réjouir de l'examen de Droits et Démocratie par votre comité.
En terminant, j'aimerais dire que les honorables membres de ce comité ont peut-être des programmes politiques concurrents, mais que je suis convaincu que vous serez tous d'accord pour reconnaître que cette conduite contraire à l'éthique ne peut pas rester sans conséquence. Le salissage de la réputation de M. Beauregard est un abus de pouvoir manifeste et peut-être aussi une infraction à la loi provinciale en matière de santé et de sécurité au travail. Le Centre canadien d'hygiène et de sécurité au travail reconnaît que le fait de porter de fausses accusations contre un employé est un parfait exemple d'intimidation en milieu de travail et qu'un tel harcèlement psychologique peut avoir de graves conséquences sur la santé.
Examinons l'allégation contenue dans la fameuse note de M. Gauthier selon laquelle M. Beauregard aurait rencontré des représentants du Hamas et du Hezbollah alors qu'il participait à une conférence au Caire à l'automne de 2008. M. Gauthier ajoutait que la légalité de ces rencontres était évidemment douteuse. Il a précisé pendant la réunion du conseil en juin qu'il voulait parler du Code criminel du Canada. L'article 83.18 prévoit que quiconque contribue, directement ou non, à une activité d'un groupe terroriste est coupable d'un acte criminel passible d'un emprisonnement de 10 ans. En réponse au CA, M. Beauregard a dit que l'accusation était manifestement fausse et qu'il y voyait une attaque contre sa réputation.
Ainsi, sans la moindre preuve — sans la moindre preuve — un bureaucrate distingué au dossier impeccable était accusé d'être criminel. Quel membre de ce comité tolérerait un tel comportement si il ou elle en était la victime?
Dans sa grande sagesse, le gouvernement actuel a nommé M. Beauregard au poste de président. Le comité doit maintenant agir unanimement pour que justice soit faite et que cet important organisme canadien soit sauvé. À cette fin, je prie le comité d'examiner les recommandations qui suivent.
Premièrement, que le rapport d'évaluation, y compris la note du président du CA et tout autre document pertinent, soient retirés du dossier de M. Beauregard afin que sa réputation et son honneur soient réhabilités une fois pour toute.
Deuxièmement, que le conseil d'administration de Droits et Démocratie soit sommé de présenter des excuses à la famille de M. Beauregard.
Troisièmement, demandez la démission du président, M. Braun, et des vice-présidents, M. Gauthier et M. Tepper, en raison de leur mauvaise conduite.
Quatrièmement, envisagez de reconstituer entièrement le conseil d'administration en raison des dommages considérables qui ont été faits à la réputation internationale de Droits et Démocratie et de la perte de confiance de la population canadienne à son égard.
Cela conclut mon exposé. Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de votre attention.
[Français]
Je vais faire une très brève intervention. Je n'ai jamais clairement dit au comité que, comme ancien chef de l'opposition officielle en Ontario et comme premier ministre de la province, j'ai très bien connu Rémy Beauregard et que j'ai travaillé de près avec lui. J'ai toujours trouvé que c'était un homme d'une grande intelligence et d'une grande intégrité. Le connaissant comme je l'ai connu depuis des années, j'ai été, comme beaucoup d'autres, franchement étonné par les commentaires que j'ai lus et que j'ai entendus.
J'aimerais d'abord remercier Mme Trépanier de son courage pour être venue témoigner aujourd'hui et de nous avoir livré un point de vue important sur l'expérience du conflit qui a clairement existé au sein du conseil. Je pense que l'on ne peut pas ignorer ces remarques. On doit rendre compte des nombreux problèmes qui existaient au sein du conseil et qui ont été créés conséquemment.
Ma première question s'adresse surtout à M. Akhavan.
[Traduction]
Monsieur Akhavan, je lisais un article de M. Cooper qui est paru dans le Calgary Herald le 7 avril. M. Cooper est professeur à l'Université de Calgary. Je suis certain que vous le connaissez. Il prétend avoir reçu de l'information d'un membre du CA, M. Marco Navarro-Genie. M. Cooper dit dans son article que M. Navarro-Genie lui aurait dit que:
... entre mai 2009 et janvier 2010, Beauregard a réussi à retourner plusieurs membres « internationaux » du CA contre le comité d'examen du rendement en leur accordant des faveurs, notamment des avantages sur le plan des voyages, des stagiaires et du financement pour des projets dans leurs pays d'origine...
Ce sont là de graves allégations, encore une fois. Il semble que les membres du CA aient tendance à faire des allégations très graves à l'égard de M. Beauregard, qui n'est pas en mesure de réagir, ce que je trouve déplorable, je dois dire.
Puisque vous étiez membre du CA, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez? Pouvez-vous aussi vous prononcer au sujet de toute allégation concernant des conflits dans lesquels vous étiez impliqué ou supposément impliqué, pendant que vous étiez membre du CA?
[Traduction]
Je veux commencer en disant qu'il y a des préoccupations légitimes au sujet de la diabolisation d'Israël aux Nations Unies. J'ai travaillé aux Nations Unies pendant 10 ans et 80 p. 100 des résolutions sont contre Israël. Le Soudan, l'Iran, le Myanmar, le Zimbabwe — tous ces pays échappent à un examen détaillé. Cependant, je pense que des organismes comme NGO Monitor sont allés trop loin. Ils sont allés trop loin parce qu'ils suppriment toute dissidence. Le président, M. Braun, avait tenté sans succès, face à l'opposition des membres du CA, d'inviter M. Steinberg à venir prendre la parole devant le conseil d'administration. Nous savons que l'un des premiers articles publiés après le décès de M. Beauregard est celui de M. Steinberg, qui est paru dans The Jerusalem Post et dans le National Post. Il avait accès à des documents internes du CA. La répudiation de ces subventions par M. Matas, dans son mémoire de 15 pages, se fonde entièrement sur les rapports de l'organisme NGO Monitor, donc le lien ici est très évident.
Je voudrais vous faire part de ce que Yossi Alpher, un ancien conseiller auprès du ministre de la Défense d'Israël, Ehud Barak, et ancien directeur du Jaffee Center for Strategic Studies à l'Université de Tel Aviv a dit. Voici ce qu'il a dit au sujet de NGO Monitor. Il a dit que NGO Monitor « semble être déterminé à éliminer entièrement la surveillance des droits de l'homme en Israël et à détracter quiconque appuie cette activité vitale » C'est un ancien conseiller auprès d'Ehud Barak qui dit cela.
En Israël, où j'ai de nombreux amis et collègues, NGO Monitor est considéré comme un organisme politique d'extrême droite. Je suis déconcerté de voir comment cet organisme peut avoir autant d'influence sur une institution comme Droits et Démocratie.
Je voudrais par ailleurs ajouter que certaines des observations qui ont été faites... Oublions l'exemple de B'Tselem qui est un organisme israélien, mais le président dit qu'il n'est Israélien que de nom. C'est le langage de l'extrême droite en Israël qui dit essentiellement qu'à moins que l'on soit aveuglément obéissant, on est un traître envers Israël.
Même si on regarde Al Mezan, l'organisme de Gaza qui a au fait publié des rapports dans lesquels il condamne l'autorité palestinienne, Hamas, dans lequel il demande qu'on fasse enquête au sujet des attaques à la roquette de Hamas contre le sud d'Israël également, ce qui n'est pas mentionné du tout, il est intéressant de souligner que le 13 février 2007, en raison de la poursuite judiciaire lancée contre NGO Monitor devant les tribunaux israéliens par l'Institut de recherche appliquée à Jérusalem, une action pour diffamation et libelle, M. Steinberg a publié la rétractation suivante: « Je regrette d'avoir dit qu'Al Mezan était un organisme qui « justifiait la violence. » Voilà donc M. Steinberg qui, lors d'un procès devant un tribunal israélien, admet que Al Mezan ne justifiait pas la violence.
Or, Al-Haq est également récent. Les tribunaux israéliens n'ont jamais trouvé M. Shawan Jabarin coupable d'un acte de terrorisme. Ce qu'ils ont dit, c'est qu'une interdiction de voyager avait été émise contre lui, et c'est ce que le rapport national du Département d'État des États-Unis a dit récemment au sujet de cet arrêt du tribunal israélien. Voici ce que dit le rapport sur les droits de l'homme du Département d'État américain pour 2009:
Le 11 mars, la Haute cour israélienne a interdit au défenseur des droits de l'homme Shawan Jabarin, directeur d'Al-Haq, ONG palestinienne de défense des droits de la personne, de voyager à l'extérieur de la Cisjordanie sans tenir une audience.
Il y a eu une audience ex parte. Il n'a pas eu l'occasion de contester la preuve.
Le rapport stipule par ailleurs:
En se fondant sur des éléments de preuve dont Jabarin et son avocat n'ont pu prendre connaissance, le tribunal a refusé de lever l'interdiction de voyager qui lui avait été imposée par décret militaire en 2006.
Je voudrais terminer en disant que dans une zone de conflit on trouvera toujours des gens qui ont eu toutes sortes de passés. M. Ariel Sharon avait été accusé par la Commission Kahan en Israël de crimes de guerre contre le Liban et il est devenu premier ministre.
L'accusation de Shawan Jabarin qui, jusqu'en 1987 était membre du FPLP, est intéressante, car notre propre ministre des Affaires étrangères, Maxime Bernier, a rencontré Riyad al-Maliki, le ministre des Affaires étrangères de l'autorité palestinienne en décembre 2008, je crois. M. al-Maliki a été membre haut placé du FPLP pendant de nombreuses années, et pourtant le gouvernement en place s'est engagé à donner 300 millions de dollars à l'autorité palestinienne.
Donc le problème ici c'est qu'il y a une préoccupation légitime quant à la diabolisation d'Israël, des attaques à sens unique, mais je pense que NGO Monitor et d'autres organismes sont allés trop loin. Nous sommes plus extrémistes au Canada que les gens ne le sont en Israël.
J'ai un étudiant, pilote des forces aériennes d'Israël, et qui a effectué des missions de bombardement au-dessus du Liban. Il semblait être plus raisonnable au sujet de ces questions.
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Merci. Je suis ravi d'être de retour.
Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui et particulièrement de revoir certains anciens collègues de tous les partis avec qui je me plaisais à travailler quand j'étais député.
Malheureusement, ma comparution aujourd'hui se fait dans un contexte extrêmement préoccupant. Une institution canadienne unique en son genre, Droits et Démocratie, est maintenant dysfonctionnelle. D'après ce que j'ai entendu de la part de personnes que je respecte au Canada et à l'étranger — et j'ai passé les trois derniers mois à Londres et j'en ai beaucoup entendu parler — cette institution perd rapidement la réputation d'intégrité et d'indépendance qu'elle avait.
Dans ma brève allocution, j'aimerais parler de la nature et du mandat de Droits et Démocratie, du rôle du président du centre et du président du conseil et enfin, des conséquences désastreuses pour le président défunt, le personnel et la réputation internationale de l'institution qu'ont eu les gestes d'une poignée de personnes incompétentes, intolérantes et mesquines. Ce faisant, je donnerai plus de détails sur la lettre que moi-même et trois anciens présidents de Droits et Démocratie avons fait parvenir au premier ministre le 13 janvier. Bien que les quatre anciens présidents aient été nommés par le Conseil privé, le premier ministre n'a pas encore répondu à cette lettre.
Comme le savent les députés, Droits et Démocratie, institution créée par une loi du Parlement, fonctionne en vertu de la loi en toute indépendance par rapport au gouvernement. Le centre a pour mandat de faire la promotion des droits de la personne et du développement démocratique à l'étranger et j'aimerais insister sur deux aspects de cette mission aujourd'hui.
Mon premier commentaire porte sur l'accent mis au paragraphe 4(1) de la loi d'abord, sur les droits de la personne et ensuite, sur la Charte internationale des droits de l'homme. Cet article précise clairement que le centre n'a pas pour mission de faire la promotion de notre forme particulière de démocratie parlementaire ou de notre Charte des droits et libertés. Ce mandat ne prône pas une forme « d'impérialisme canadien modéré ».
J'aimerais aussi attirer votre attention sur le paragraphe 4(2), qui est extrêmement important et qui traite de ce que l'on qualifie d'« objet principal » de l'organisation qui n'est pas axé sur le processus politique de la démocratie comme telle mais plutôt sur un objectif crucial du centre, à savoir d'aider à réduire l'écart considérable qui existe parfois entre les engagements officiels pris par les États en matière de droits de la personne ou en vertu de leurs propres constitutions, d'une part, et les pratiques des États en ce qui concerne ces droits, d'autre part.
Ce libellé a été brillamment élaboré et est devenu le fondement d'une part importante de l'activité du centre dans des pays tels que le Guatemala, le Mexique, le Salvador, le Pérou, le Kenya, le Rwanda, la Tanzanie, la Thaïlande et le Pakistan qui s'étaient tous engagés à divers degrés à respecter une gamme de droits de la personne internationaux alors qu'ils ne respectaient pas, au moment de l'adoption de la loi créant le centre, les normes internationales.
J'aimerais faire valoir deux arguments ici. D'abord, la sagesse qui sous-tend la loi c'est qu'en règle générale les droits de la personne doivent primer. De nombreux États, par exemple, en Amérique latine — ont eu pendant une bonne part du XXe siècle des élections dites compétitives mais où il n'y avait pas de liberté de parole, de liberté d'association, de liberté de la presse ou de primauté du droit. Ainsi, comme l'histoire de l'Europe de l'Ouest et de l'Amérique du Nord a révélé dans son ampleur, je crois, que le fondement d'une véritable démocratie est une société qui respecte les droits universels, lesquels incluent maintenant les droits sociaux et économiques. Sans les droits de la personne, ces prétendues élections ne sont que de la poudre aux yeux. Ainsi, le centre, dans la plupart sinon la totalité de ses activités, a soutenu les défenseurs et les programmes liés aux droits de la personne dans les pays en développement.
Afin de réaffirmer partiellement cette réalité — et je soupçonne que la plupart des députés ne le sauront pas, et il n'y a pas de raison qu'ils le sachent — les mots « développement démocratique » ont été ajoutés par amendement au titre du centre au Sénat, non pas pour mettre en opposition les droits de la personne et la démocratie mais plutôt pour bien préciser que la priorité accordée aux droits est l'essence même du développement démocratique.
Je tiens à redire à quel point la réputation qu'avait Droits et Démocratie d'être totalement indépendante du gouvernement du jour est importante et, je crois, que cette indépendance a vécu.
M. Mulroney et M. Chrétien, et leurs ministres des Affaires étrangères, le comprenaient très bien. Ils l'ont démontré en faisant des nominations au conseil qui n'étaient pas empreintes de partisanerie. Comme nous le savons tous, un gouvernement peut imposer ses idées partisanes en choisissant soigneusement les candidats qu'il nomme et cela sans qu'il ait à leur donner d'instructions partisanes. Les précédents premiers ministres ont évité d'agir de la sorte avec Droits et Démocratie.
Ensuite, ils attendaient de Droits et Démocratie qu'il soit à l'occasion en désaccord avec eux sur des questions liées aux droits de la personne internationaux. Et troisièmement, si je puis me permettre de le dire, ils ont nommé aux postes de présidents des gens dont ils croyaient qu'ils auraient cette indépendance d'esprit.
Quand j'ai occupé le poste de président à Droits et Démocratie, j'ai ouvertement préconisé l'inclusion de tous les accords commerciaux internationaux de dispositions sur les droits des travailleurs, tels qu'ils sont énoncés dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que l'adoption rapide d'un pacte international relatif aux droits des peuples autochtones. Ces positions, et celles que j'ai prises dans quelques autres dossiers — étaient, sur le fond ou sur le degré d'insistance, en opposition à celles du gouvernement de l'époque. Le premier ministre ou le ministre des Affaires étrangères ne m'en ont jamais fait le reproche. D'ailleurs, pendant les années 1990 où nous menions notre œuvre militante sur le terrain dans de nombreux pays en développement, mon personnel et moi-même avons pu fréquemment compter sur le soutien des excellents fonctionnaires qui travaillent sur les dossiers liés aux droits de la personne dans nos ambassades outre-mer.
À mon avis, c'est parce que Droits et Démocratie avait la réputation de posséder de solides compétences et d'être indépendant du gouvernement de l'époque qu'on a accédé à mes requêtes quand j'ai demandé à rencontrer le président Clinton à la Maison-Blanche, le roi de Thaïlande ou les présidents du Guatemala, du Mexique, du Rwanda, de l'Érythrée et du Kenya, pour ne nommer que ceux-là. Si jamais Droits et Démocratie n'est plus reconnu pour son indépendance en matière de droits par rapport au gouvernement en place mais qu'il acquiert la réputation de se conformer docilement aux priorités de la politique de parti, les gouvernements étrangers comme les ONG cesseront de s'intéresser aux avis émis par Droits et Démocratie. S'ils veulent connaître le point de vue du gouvernement du Canada, ils communiqueront tout simplement avec l'ambassadeur du Canada.
En ce qui a trait aux rôles du président du conseil et du président du centre, selon la loi, le principal rôle du président du conseil est de diriger les réunions du conseil et de remplir les fonctions qui lui sont attribuées. Le président du centre, en sa qualité de premier dirigeant, « en assure la direction et contrôle la gestion de son personnel ».
En clair, le président du conseil n'est pas le PDG de l'organisation. C'est le président du centre qui possède et exerce les attributions d'un PDG. Quand le conseil d'administration du centre prend une décision sur les grandes orientations stratégiques et les subventions importantes, c'est au président du centre qu'il incombe alors, puisqu'il est responsable des activités quotidiennes, d'embaucher et de surveiller le personnel et de prendre toute autre décision nécessaire pour atteindre les objectifs fixés. Le personnel, notamment l'équipe de direction, relève de lui et de personne d'autre. Ni le président du conseil ni tout autre administrateur, n'a le droit de s'arroger en tout ou en partie les pouvoirs du président du centre en ce qui a trait à la gestion du personnel.
Au début de 2009, quand M. Braun est devenu président du conseil, il entrait dans une organisation où le moral était très bon. La précédente année, le centre avait non seulement reçu de la vérificatrice générale un excellent rapport annuel sur l'efficience et l'efficacité mais avait en plus reçu une très bonne note à la suite de l'examen quinquennal réalisé par le ministère des Affaires étrangères. Ses programmes récents pour la promotion des droits des femmes en Afghanistan avaient été jugés dignes de mention par l'ACDI. Bref, et ce sont des faits avérés et non pas des opinions, sous la présidence de M. Beauregard, la direction et le personnel fonctionnaient de façon efficiente, transparente et responsable.
Par contraste, après l'arrivée de M. Braun au poste de président du conseil, il faut reprendre l'étiquette qu'il a accolée à tort au personnel et dire que le conseil lui-même est devenu dysfonctionnel, qu'il a instauré une culture de dogmatisme et qui manque de transparence.
Je me permets d'ajouter que c'est aussi depuis l'arrivée de M. Braun que le conseil d'administration de Droits et Démocratie a perdu deux de ses distingués membres étrangers, l'un ayant démissionné et l'autre n'ayant pas obtenu de nouveau mandat, qu'il a été critiqué par la Fédération internationale des droits de l'homme; qu'il a été critiqué par William Schabas, distingué directeur canadien du Irish Centre for Human Rights; et, pour couronner cette liste ignominieuse, que ses positions ont été contredites pour la toute première fois par Human Rights Watch et Amnistie Internationale.
Je me ferais un plaisir de vous donner de plus amples détails lorsque je répondrais aux questions.
Étant donné toutes ces péripéties et depuis la mort tragique du président, M. Braun est probablement le premier président du conseil d'une institution publique dans l'histoire du Canada à avoir hérité d'une équipe de direction très louangée, et d'un personnel exceptionnellement instruit et dévoué, puis son extraordinaire mauvaise gestion les a unis dans un vote quasi unanime en faveur de sa démission. Jamais n'a-t-on eu une aussi bonne raison de congédier le titulaire d'une charge publique pour cause d'incompétence flagrante et j'espère que c'est ce que recommandera le comité. Je n'ai jamais, à ma connaissance, réclamé le congédiement d'un fonctionnaire. C'est ce que je fais aujourd'hui.
Si vous me le permettez, j'aimerais conclure sur une note personnelle en disant quelques mots d'un membre clé de l'équipe de direction qui a été critiqué particulièrement par certains membres du conseil. Marie-France Cloutier travaille au centre depuis plus de 19 ans, les six premières avec moi, dans un poste de haut niveau pendant que j'étais président. Tout au long de ma carrière publique, je n'ai jamais connu d'employée subordonnée plus compétente ou plus loyale. C'était une employée loyale mais elle n'a jamais hésité à dire la vérité à ses supérieurs. Qu'une personne et une fonctionnaire de si grand calibre ait pu être congédiée de façon si arbitraire en dit davantage sur ceux qui dirigent maintenant le centre qu'ils n'en disent sur elle.
Merci, monsieur le président.
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Monsieur le président, membres du comité, j'aimerais d'abord vous remercier de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui pour parler de cette importante question.
Comme vous le savez, j'ai été président de Droits et Démocratie de 1997 à 2002. Qui plus est, j'étais député en 1988 quand le centre a été créé par une loi du Parlement. Aujourd'hui, j'aimerais parler du mandat du centre, de son indépendance et de la façon dont elle s'exerçait pendant mon mandat, de ses mécanismes de reddition de comptes et de sa transparence, de la relation entre le président du centre et le conseil d'administration et de la relation entre le centre et le gouvernement. Je vais aussi expliquer dans quelle mesure tout cela a changé depuis la nomination en mars 2009 de plusieurs administrateurs dont Aurel Braun au poste de président du conseil.
Le mandat du centre est énoncé à l'article 4 de la loi. En bref, sa mission est de défendre et de promouvoir la démocratie et les droits de la personne, particulièrement ceux énoncés dans la Charte internationale des droits de l'homme. Autrement dit, le centre a pour mission première de faire respecter la Charte internationale des droits de l'homme. Sa mission première ce n'est pas de mettre en œuvre la politique étrangère du Canada ni celle des États-Unis et certainement pas celle d'Israël. Le centre doit, en vertu de la loi, agir en toute indépendance dans l'exécution de son mandat et de sa mission première.
Droits et Démocratie porte donc le drapeau des droits de la personne. Il ne porte pas le drapeau du Canada, des États-Unis ou d'Israël. Il a pour mandat de surveiller et de condamner les violations des droits de la personne lorsqu'il les décèle où que ce soit dans le monde, y compris au Canada. À cet égard, le centre doit agir en toute indépendance par rapport à tous les gouvernements et à tous les partis politiques. Cette règle est énoncée de diverses façons dans la loi et les règlements administratifs de Droits et Démocratie.
Selon l'article 22, le centre n'est pas mandataire de Sa Majesté. Il s'agit là du gouvernement. L'article 23 stipule que le président du conseil, le président du centre, les autres administrateurs ne font pas partie de la fonction publique du Canada. L'article 19 précise que le siège du centre est fixé à Montréal, pas à Ottawa, où se trouve le chef du gouvernement. L'article 28 stipule que le centre doit recevoir un financement assuré pendant cinq ans pour garantir son indépendance. Par ailleurs, lorsqu'il nomme les administrateurs canadiens, le ministre doit consulter le chef de l'opposition et le chef de tous les autres partis reconnus à la Chambre des communes. En outre, lorsqu'il nomme le président du conseil et le président du centre, le ministre doit aussi consulter les membres du conseil d'administration existants, là aussi pour garantir l'indépendance du centre et la réalisation de sa mission première.
Quand Joe Clark, ministre conservateur, a nommé Ed Broadbent, un néo-démocrate, comme premier président en 1990, il a donné l'exemple du respect de ce principe de l'indépendance du centre. Il a nommé une personne qui n'appartenait pas à son parti dont il savait qu'il était un défenseur des droits de la personne. Une fois nommé, la mission première d'Ed a été de faire respecter la Charte internationale des droits de l'homme et non pas les politiques du gouvernement du Canada, ni celles du NPD.
Bien entendu, cette indépendance doit servir à accroître la crédibilité du centre, sa crédibilité lorsqu'il traite avec d'autres gouvernements, sa crédibilité lorsqu'il traite avec des organismes internationaux et sa crédibilité lorsqu'il traite avec des organisations oeuvrant dans le domaine des droits de la personne. Ce principe d'indépendance est à son tour renforcé par les Principes de Paris de l'ONU, la Déclaration des défenseurs des droits de l'homme de l'ONU et la Déclaration de Vienne sur les droits de l'homme de 1993, laquelle prescrit: « La communauté internationale doit traiter des droits de l'homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur accordant la même importance ». Autrement dit, on ne choisit pas à son gré d'appuyer certains droits ici et là ni de faire respecter les droits de la personne dans certains pays et pas dans d'autres.
Comment cette indépendance s'est-elle exercée pendant mon mandat de président? Bien sûr, nous avions au conseil des gens qui avaient les mêmes antécédents professionnels, sociaux, ethniques, religieux et politiques. Or, quand ils étaient nommés au conseil, ils s'engageaient à réaliser le mandat du centre et agissaient en conséquence lorsqu'ils étaient appelés à prendre des décisions. Nous n'avons pas toujours été d'accord avec le gouvernement de l'époque et nous avons critiqué ses politiques, comme nous l'avons fait pour l'OMC, la zone de libre-échange interaméricaine, la ratification de la Convention américaine sur les droits de la personne et la mise en œuvre du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont le droit à l'eau et le droit à l'alimentation.
Cependant, malgré ces différences et ces critiques publiques, on n'a pas essayé de nous museler, de faire entrer au conseil des personnes à l'opinion opposée ou de nous menacer de coupures budgétaires. Nous nous consultions sur différents sujets, et lorsqu'il y avait un désaccord, le gouvernement acceptait que cela se produise parce que nous étions une organisation indépendante des droits de la personne.
D'un autre côté, il y a eu des moments où des gouvernements, y compris celui du Canada, ont appuyé les mêmes politiques que nous. Nous travaillions alors ensemble pour mettre en œuvre ces politiques. Ça a été le cas avec la Cour pénale internationale, le Protocole facultatif concernant la participation d'enfants aux conflits armés, la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, la Charte démocratique interaméricaine et d'autres.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, il est très clair que ce qui se passe depuis mars 2009 ne correspond pas aux traditions dont j'ai parlé, ne correspond pas du tout à la loi et aux règlements de Droits et Démocratie, avec son mandat et son indépendance nécessaire. Il est évident que depuis une certaine date en 2009, le gouvernement a noyauté le conseil en y ajoutant des gens dont le but principal est de protéger Israël de toute critique, méritée ou pas, ce qui est également la politique du gouvernement Harper et du gouvernement Netanyahu.
Ces gens — qui sont maintenant sept, y compris le président — ont un parti pris contre l'ONU, contre le Conseil des droits de l'homme de l'ONU et contre les ONG de défense des droits de la personne, et un parti pris au sujet du conflit au Moyen-Orient. La preuve de ces partis pris se trouve dans leurs propres articles et déclarations, dans leurs associations et partenariats, et dans leurs actions et leurs pensées. La longue déclaration de David Matas dans le blogue d'Ezra Levant du 24 janvier confirme exactement ce que je viens de dire.
Par partenariat, je n'entends pas seulement le fait d'être membre du Parti conservateur. Je parle de partis pris politiques semblables à ceux du gouvernement Harper et qui sont contraires au mandat du centre, contraires à la Charte internationale des droits de l'homme et contraires à la Déclaration de Vienne. Il est normal dans une société libre que les partis politiques aient de tels partis pris, mais ce n'est pas acceptable pour Droits et Démocratie, qui a le mandat législatif de surveiller et faire la promotion des droits de la personne partout où cela est nécessaire.
Dans le cas qui nous préoccupe, les trois subventions aux ONG du Moyen-Orient ont été autorisées en vertu du fonds d'action urgente. M. Braun et ses collègues ont dit, contrairement aux preuves substantielles, que le problème à Droits et Démocratie n'est pas politique, ne concernait pas le Moyen-Orient, mais que c'était un problème de reddition de comptes et de transparence.
Toutefois, le fonds d'action urgente et son budget, et tous les programmes et budgets de Droits et Démocratie, sont approuvés chaque année par le conseil d'administration. Ils sont vérifiés chaque année par le Bureau du vérificateur général. Les rapports vérifiés sont inclus dans les rapports annuels, qui sont déposés au Parlement, affichés sur le site Web, et diffusés largement. De plus, le président et les administrateurs de Droits et Démocratie sont sujets au contrôle de ce comité parlementaire au niveau des rapports annuels et des états financiers vérifiés, ce qui a été appliqué à de nombreuses occasions.
La Loi sur Droits et Démocratie exige également qu'il y ait une évaluation indépendante et approfondie de Droits et Démocratie tous les cinq ans. Il y a en a eu en 1993, 1998 et 2003. Aucune de ces évaluations quinquennales et aucune des vérifications annuelles du Bureau du vérificateur général n'ont indiqué que le centre allait à l'encontre de son mandat, ou l'outrepassait, ou que le fonds d'action urgente, le bureau de Genève ou même la participation à la Conférence de Durban en 2000 étaient inappropriés.
Selon la Loi sur Droits et Démocratie et ses règlements, le rôle du conseil est d'offrir une orientation générale sur les politiques, d'approuver le budget annuel et le plan de travail et superviser leurs mises en œuvre. Ce n'est pas le rôle du conseil de faire la microgestion du centre. Selon la loi et les règlements, le président est responsable d'administrer et de gérer le centre, y compris l'embauche et la gestion du personnel. Le président occupe un poste à plein temps, ceux qui siègent au conseil sont à temps partiel.
Les gestes posés récemment par le président et le conseil d'administration d'annuler des subventions, de fermer le bureau de Genève, de geler le Programme d'action urgente, de congédier des employés, de bâillonner et de gérer le personnel et de remettre en question les affiliations religieuses sont dues à leurs partis pris politiques, et non pas à leurs obligations en vertu de la loi de gouverner en respectant la Charte internationale des droits de l'homme. C'est également vrai pour la tentative en 2009 de MM. Gauthier, Tepper et Braun de réécrire et changer l'évaluation de M. Beauregard.
En conclusion, pour renforcer l'indépendance du centre, je vous présente les recommandations suivantes.
Premièrement, il faudrait une enquête externe et indépendante sur la situation à Droits et Démocratie. Je vous remercie des audiences faites par votre comité; elles en valent la peine, mais elles sont trop courtes et incomplètes pour être en mesure d'aller au fond des choses.
Deuxièmement, je crois que vous devriez songer à modifier la loi pour renforcer le processus de nomination.
Troisièmement, vous devriez remettre en place la politique de financement pluriannuel, qui existait au départ mais qui a ensuite été oubliée. Le financement pluriannuel permettait au centre d'être plus indépendant.
Monsieur le président, Droits et Démocratie joue un rôle important pour le Canada et le monde. Ce qui lui est arrivé récemment est totalement inacceptable. Puisque Droits et Démocratie est une création du Parlement, le Parlement est responsable de réparer les dommages aussi rapidement que possible.
Merci.
:
Oui, je suis d'accord, mais...
[Traduction]
J'ajouterais une chose à propos du processus de nomination que votre comité pourrait examiner. Je crois que avait promis, lorsqu'il est devenu premier ministre, de mettre en place un processus de nomination très différent, comme l'avait proposé d'autres partis. Il y aurait entre autres des audiences, etc., mais il ne l'a pas fait.
Voici une idée. Le premier conseil d'administration du centre a été mis en place à la suite de recommandations faites à M. Clark et M. Mulroney par M. Gordon Fairweather, qui avait été commissaire en chef des droits de la personne au Canada. M. Mulroney et M. Clark, et c'est tout à leur honneur, ont consulté M. Fairweather — qui avait été nommé par Pierre Trudeau, soit dit en passant, à titre de commissaire des droits de la personne — et lui ont demandé de préparer, après consultation, une liste de candidats pour le premier conseil d'administration.
Vous pouvez être certain qu'avant d'accepter l'offre de M. Mulroney, l'une des premières choses que j'ai faites, c'est de regarder la liste de candidatures. Et il y avait là des Canadiens qui représentaient, par leurs antécédents, tous les partis politiques. La plupart des gens au conseil n'avaient pas de liens politiques, mais certains en avaient. Ils provenaient d'horizons très différents, mais s'intéressaient tous aux droits de la personne.
Le processus a été impeccable: le commissaire aux droits de la personne a proposé une liste au gouvernement, et le gouvernement était prêt à l'accepter. On pourrait peut-être réessayer cela en attendant, pour en revenir à l'idée qu'il faut prendre des mesures immédiates pour régler la crise que traverse le centre.
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Oui. Merci. Nous pourrions prendre plus de temps.
Monsieur le président, je pense qu'une des choses dont nous devons discuter — on l'a mentionné en passant mais cela ne suffit pas — c'est que M. Beauregard a travaillé pour des premiers ministres provinciaux représentant les partis néo-démocrate, libéral et conservateur. Vous savez bien qu'on ne m'accusera jamais d'appuyer M. Harris de quelque façon que ce soit, mais j'aimerais signaler que M. Beauregard a pu travailler avec M. Harris dans le domaine des droits de la personne.
Ce qui est plutôt révélateur, dans ce dossier, c'est que cette personne a pu travailler avec tous ses collègues, mais pas avec ce conseil d'administration. Ce n'est qu'un commentaire que je fais, parce que certains voudraient que l'on présente la situation de la façon suivante: « le conseil d'administration est venu s'occuper de la crise, du problème ». J'aimerais simplement signaler que cette crise a été créée par le conseil d'administration. C'est très clair.
Après tout, si on se reporte aux témoignages des membres du conseil d'administration et des autres témoins, il est clair qu'ils ne se contentaient pas de faire de la microgestion, car ils changeaient même les procès-verbaux. Il suffit de mentionner l'exemple Durban, où M. Braun n'a jamais nié qu'il avait, en fait, fait modifier les procès-verbaux pour indiquer que ce n'était pas le président et le personnel qui avaient formulé la recommandation de ne pas aller à la conférence Durban II, mais que c'était lui. Nous avons entendu d'autres exemples ce matin de la bouche des témoins au sujet de contrats qui ont été accordés à des membres du conseil d'administration.
M. Beauregard, d'après notre comité, d'après le procureur général et le ministère des Affaires étrangères, faisait tout conformément à son rôle et à son mandat.
Je dois dire que je suis d'accord avec les recommandations qui ont été formulées, soit qu'il faut absolument agir immédiatement. Nous pouvons discuter en comité de ce qui pourrait être fait. Comme on le dit dans le monde médical, il faut d'abord faire le tri pour sauver la vie du patient, puis nous devons nous assurer qu'il est remis sur pied. Il nous faut certainement agir. Nous n'avons pas le choix.
Monsieur Allmand, pouvez-vous nous dire si, par le passé, lorsqu'une évaluation était effectuée par le conseil d'administration, j'entends une évaluation de votre travail, vous étiez informé de celle-ci avant qu'elle soit terminée et signée? Étiez-vous invité à participer au processus?
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Monsieur le président, j'ai posé cette question parce que, de toute évidence, on a changé la façon de faire les évaluations.
Je pense que le processus de nomination... et je dois dire que je ne suis pas tout à fait d'accord avec mon ami, M. Abbott, sur ce point. Nous avons été consultés, par exemple, pour la nomination de M. Latulippe et nous allons entendre son témoignage jeudi. À ma connaissance, personne n'était d'accord avec sa nomination, mais il a quand même été nommé.
De plus, et j'aimerais connaître l'opinion de nos témoins... Vous savez, je suis en situation de conflit d'intérêts quand on parle de la Commission des nominations publiques, parce que je faisais partie du comité qui a étudié le projet de loi C-2, la Loi fédérale sur la responsabilité, qui avait proposé des amendements concernant la Commission des nominations publiques. Cette commission reçoit un million de dollars par année, mais n'a pas de procédure différente du CPM. Ainsi, rien n'a changé, sauf qu'un million de dollars est utilisé par le gouvernement pour nommer qui il veut.
On a appris hier, par exemple, qu'une des nominations faites au CRDI est devenue un problème, parce que la candidate est membre d'une commission qui, selon la Fondation Gates, se trouve dans une situation de conflit d'intérêts.
Je crois, dans les circonstances tout au moins, que notre comité devrait pouvoir interroger les candidats, avant qu'ils soient nommés au conseil d'administration ou même à la présidence. Monsieur Broadbent, vous avez signalé que nous pourrions tout au moins consulter les chefs de parti, et je crois que M. Allmand a dit la même chose. Nous pourrions faire cela, ou le comité pourrait également interroger les candidats, puisque nous n'avons pas de commission des nominations publiques. Est-ce que ce serait une autre façon de procéder?