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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 047 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons commencer notre étude sur les interventions canadiennes et internationales en cas de catastrophe et la situation en Haïti.
    Je tiens à remercier la Croix-Rouge canadienne d'être ici aujourd'hui. Une réunion informelle très instructive a été tenue avec certains de ses membres et nous sommes heureux que vous ayez pu revenir pour témoigner officiellement. Nous pouvons donc procéder.
    Est-ce vous qui allez témoigner, Susan? Vous avez dix minutes pour faire votre déclaration, après quoi les membres du comité pourront vous poser quelques questions sur l'action que nous menons.
    Merci d'être venue, madame Johnson. La parole est à vous.
    Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui. Je vais faire quelques remarques, mais mon collègue Richard Clair en fera aussi.
    La Croix-Rouge canadienne est toujours heureuse de pouvoir s'adresser aux parlementaires, tant sur les questions nationales qu'internationales.

[Français]

    Je vais faire mes remarques en anglais. Cependant, si les membres du comité posent des questions en français, je pourrai y répondre en français. Ma présentation comportera quelques mots en français, mais je parlerai surtout en anglais.

[Traduction]

    Nous témoignons au nom de notre secrétaire général Conrad Sauvé qui, au nom de la Fédération internationale de la Croix-Rouge, assiste aujourd'hui en Haïti à une réunion de la commission provisoire pour la reconstruction.
    Notre exposé préliminaire sera bref, car nous avons hâte de répondre à vos questions et de participer à cet important débat. Je voudrais tout d'abord me présenter ainsi que présenter mes collègues ici présents.
    Je m'appelle Susan Johnson et suis la directrice générale des opérations internationales de la Croix-Rouge canadienne. Je fais partie de la Croix-Rouge depuis environ 12 ans et j'y ai été en poste au Canada, à Genève et à New York.
    Richard Clair était jusqu'à tout récemment notre directeur de pays en Haïti. Il y a passé la dernière année. Il a dû évidemment s'occuper des opérations quotidiennes et connaît très bien les défis auxquels nous y faisons — et y ferons — face.
    Pam Aung Thin est notre directrice nationale des Affaires publiques et relations gouvernementales. C'est elle qui a présenté au Canada, dans la perspective de la Croix-Rouge, l'histoire du tremblement de terre. Elle sera également à votre disposition au cours de la période de discussion.
    La Croix-Rouge canadienne est bien connue du public, mais rares sont ceux qui comprennent l'étendue de ses services. Tous les jours, l'organisation influe sur les Canadiens chez eux et sur les gens les plus vulnérables du monde entier. Nous réagissons aux situations d'urgence, qu'elles surviennent à Port-au-Prince ou à Petawawa. Nous soutenons l'action sanitaire menée au Mali ou à Mississauga. Notre présence est déterminée, non par des frontières, mais tout simplement par l'endroit où se trouvent les personnes les plus vulnérables qui sont dans le besoin. Nous sommes la plus grande organisation humanitaire au Canada et nous faisons partie du plus vaste réseau humanitaire du monde.

[Français]

    Notre force provient de notre vaste réseau de bénévoles qui ont la capacité de répondre à des crises internationales, comme celle survenue en Haïti, mais également comme toutes celles qui se passent au Canada, comme ce fut le cas l'année dernière lors du passage de l'ouragan Igor dans l'Est du pays. Nous sommes l'organisation que les Canadiens privilégient lorsqu'ils désirent faire des dons lors de désastres et de crises internationales.

[Traduction]

    Notre financement de base ne vient pas des gouvernements, mais nous travaillons en étroite collaboration avec eux en fonction des projets à mener. Au niveau international, nous sommes l'une des 186 sociétés nationales membres de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Notre préparation, notre formation, nos investissements et nos infrastructures nous permettent de répondre rapidement et efficacement aux situations de crise. Nos contacts au sein des communautés nous donnent un accès privilégié aux gens dans le besoin. Au pays, les contacts que nous avons avec les diasporas nous permettent de nouer des liens uniques avec les populations les plus touchées par des catastrophes. À l'étranger, notre réseau nous permet d'atteindre des particuliers et des familles auxquels les autres n'ont pas accès.
    Je crois savoir que le comité souhaite comprendre et améliorer les mesures d'urgences que le Canada déploie à l'étranger, surtout dans les Antilles. Cet intérêt est on ne peut plus opportun.

[Français]

    Les Caraïbes sont touchées par des désastres naturels tous les ans. Chaque année, des ouragans déferlent sur ces îles. Il en résulte de nombreuses pertes de vie, et les coûts associés aux pertes matérielles ont des effets à long terme sur les économies des îles.
    En plus des ouragans, les éruptions volcaniques et les tremblements de terre sont fréquents dans la région.

[Traduction]

    Dans le cadre du réseau international de la Croix-Rouge, et souvent grâce aux généreux soutien de la population et du gouvernement canadiens, la Croix-Rouge canadienne réagit chaque année aux catastrophes qui s'abattent sur les Antilles. Nous travaillons de concert avec nos sociétés soeurs de la région pour les aider à se préparer et à réagir plus efficacement aux catastrophes. Je parlerai brièvement de ce travail et de ce que le Canada pourrait faire pour améliorer notre assistance, mais je voudrais tout d'abord dire quelques mots sur ce que nous entendons par « catastrophe ».
    Il faut rappeler que la catastrophe est un événement qui dépasse la capacité de réaction, que ce soit d'une famille, d'un village, d'une ville ou d'une communauté. Un événement n'est pas nécessairement en soi une catastrophe si la communauté peut résister à son impact. Par exemple, les ouragans ont une portée minime sur la sécurité et le bien-être de la communauté lorsque les maisons sont construites à leur épreuve. Si en revanche, les gens vivent dans des structures fragiles et improvisées, il ne faut pas grand-chose pour créer une catastrophe et un besoin d'aide de la part des voisins. Une catastrophe découle donc de la combinaison de l'événement et de la capacité de la communauté à résister à son impact.
    Comment réagir aux catastrophes? Selon notre expérience, le meilleur moyen d'y faire face est tout d'abord de renforcer la résilience des familles et des communautés, de sorte que l'impact de l'événement — tel qu'un ouragan — est réduit au minimum. Investir dans la préparation, c'est être prêt à réagir en cas de besoin, en ayant à disposition les bons matériaux et ressources humaines.
    On ne saurait trop insister sur la nécessité de se préparer avant que ne frappe une catastrophe. On estime en effet que chaque dollar investi dans la préparation permet d'en économiser sept après. Et il ne s'agit pas seulement des infrastructures. La nécessité de logements solides, de murs de soutènement bien entretenus et de défenses naturelles — telles que les mangroves — va de soi. Mais la formation et l'appui offerts aux bénévoles, une bonne planification et la mise en oeuvre appropriée des plans d'urgence, ainsi que la compréhension des grands enjeux aux plans de la santé et de la sécurité, s'avèrent tout aussi nécessaires.
    Par l'entremise de ses réseaux et collectivités, la Croix-Rouge fait appel à toutes les administrations et offre son expertise et les services essentiels avant, pendant et après les catastrophes. Dans le cadre de l'étude que mène le comité, nous pensons que l'une des responsabilités du gouvernement est de poursuivre le travail entrepris collectivement pour répondre aux besoins des gouvernements dans les régions touchées. Nous devons en effet oeuvrer ensemble pour accumuler les connaissances et mieux comprendre les enjeux et se préparer ainsi à la prochaine situation d'urgence.
    Nous pouvons voir les retombées des investissements de ce type dans l'engagement de la Croix-Rouge internationale en Haïti. Après le tremblement de terre survenu en janvier 2010, la Croix-Rouge internationale a amorcé sa plus grande campagne jamais mise sur pied dans un seul pays. En collaboration avec la Croix-Rouge haïtienne, la Croix-Rouge canadienne travaillait déjà sur le terrain bien avant le tremblement de terre de janvier, aidant le pays à renforcer ses capacités pendant la saison des ouragans. Elle offrait entre autres une formation en secourisme aux bénévoles et appuyait d'autres initiatives communautaires de préparation aux catastrophes.
    Dans la première heure qui a suivi le tremblement de terre, les bénévoles de la Croix-Rouge haïtienne — dont beaucoup en étaient eux-mêmes victimes — ont passé au peigne fin des montagnes de débris à la recherche de signes de vie. Ils ont aussi fourni des premiers soins d'urgence à ceux qui en avaient le plus besoin.
    Dans les heures suivantes, d'autres sociétés nationales, dont une équipe d'intervention d'urgence de la Croix-Rouge canadienne, ont commencé à arriver en Haïti. Le réseau régional et international de la Croix-Rouge a été entièrement mobilisé. On a utilisé les stocks de secours qui se trouvaient au Panama et ailleurs dans la région, et on a fait appel à l'aide de gens d'autres îles des Antilles, d'Amérique centrale, d'Amérique du Sud, du Canada et des États-Unis. Tous ces secours en denrées de base et en ressources humaines sont intégrés dans un système bien rôdé, mis sur pied au fil des ans par la Croix-Rouge internationale. Il s'agit d'un système que nous revoyons et améliorons.
    Pour vous donner une meilleure idée de la situation en Haïti et des travaux qui y sont en cours, je cède la parole à mon collègue Richard Clair qui vous fera part de certaines de ses expériences et des observations qui en découlent au cours de la dernière année.
(1540)
    J'étais jusqu'à hier le représentant national de la Croix-Rouge canadienne en Haïti. L'année 2010 dans ce pays me fait penser à la vieille chanson de l'Ouest: « Si ce n'était de la malchance, je n'aurais pas de chance du tout. » Haïti a été frappé en effet par un tremblement de terre, une épidémie de choléra, une crise politique et un ouragan. Le mot de « résilience » est bien loin de décrire la réaction du peuple haïtien.

[Français]

     Les problèmes en Haïti remontent à bien avant le séisme, et cette catastrophe n'a rien fait pour aider les choses. En effet, 80 p. 100 de la population vit avec moins de 2 $ par jour. Il est impossible de circuler dans le pays sans être frappé par cette pauvreté écrasante. Les statistiques sur l'accès à l'eau potable, à l'éducation et aux services de santé sont accablantes. Néanmoins, il ne faut pas baisser les bras et dire que nous ne pouvons rien faire.
(1545)

[Traduction]

    Depuis le 12 janvier, plus d'un million d'articles de secours d'urgence ont été livrés par la Croix-Rouge. Depuis — et oui, le processus se poursuit —, 2,5 millions de litres d'eau potable ont été produits chaque jour. Pour mettre cela en perspective, cela équivaudrait à fournir chaque jour 20 litres d'eau à chacun de vos électeurs dans vos circonscriptions respectives.
    L'accès aux soins médicaux a été un besoin immédiat après le tremblement de terre et il continue d'être une priorité de la Croix-Rouge. À ce jour, plus de 216 000 personnes en ont reçu dans un établissement de la Croix-Rouge.

[Français]

    Le mouvement de la Croix-Rouge a répondu rapidement et de façon efficace dans la phase d'urgence, juste après le tremblement de terre. Nous avons livré des millions de litres d'eau, des dizaines de milliers de trousses d'hygiène, et des centaines de milliers de bâches de plastique et de tentes. Nous avons jusqu'à maintenant conçu près de 6 000 abris temporaires résistants aux ouragans et aux tremblements de terre.
    J'aimerais apporter une précision sur la distribution d'eau. Dès l'éclosion des premiers cas de choléra, nous craignions surtout que les camps de déplacés soient les plus durement touchés, mais grâce, notamment, à une distribution d'eau massive, qui se poursuit encore aujourd'hui, et à un important travail d'information et de prévention effectué par les volontaires de la Croix-Rouge, l'impact du choléra dans les camps de déplacés a été considérablement réduit.

[Traduction]

    La Croix-Rouge canadienne consacre un grand nombre de ses ressources aux refuges, travaillant principalement dans les régions de Jacmel et Léogane. Nous nous sommes engagés à bâtir 7 500 abris et en avons construit plus de 1 200 à ce jour. Ainsi, plus de 6 000 personnes ont pu quitter les tentes grâce aux dons du Canada. Les constructions s'accélèrent et nous devrions les avoir terminées au début de l'automne.
    Les abris que nous construisons sont robustes, résistent aux séismes et aux ouragans et peuvent loger une famille moyenne de cinq personnes. Nous travaillons également avec des partenaires pour fournir de l'eau et des services sanitaires dans les communautés où les abris sont construits. Notre but est de fournir des abris de base pour les familles qui ont perdu leur maison, mais aussi d'aider à reconstruire leur collectivité.
    Le logement est, et restera, l'un des plus grands défis du peuple haïtien. Les intervenants internationaux continueront de consacrer énormément de temps et d'argent pour faire en sorte que les gens puissent quitter les abris temporaires et emménager dans des maisons en dur. Environ 800 000 Haïtiens vivent aujourd'hui dans des abris temporaires. Il devrait y en avoir encore 400 000 d'ici un an.
    Les difficultés de logement ne sont pas seulement associées aux murs et au ciment, mais aussi aux droits de propriété. Le gouvernement canadien a donc aujourd'hui l'occasion de bien faire valoir auprès du gouvernement haïtien la nécessité d'évaluations des terres précises et équitables. Cela est essentiel pour que les secteurs privé et public puissent poursuivre la reconstruction.
    Notre deuxième plus gros investissement touche le système de soins de santé. Nous travaillons donc avec de nombreux partenaires pour faire avancer les choses. Nous nous sommes engagés à participer à la reconstruction de l'hôpital Saint-Michel de Jacmel. Nous reconstruisons également des cliniques et offrons des programmes de santé communautaires dans le sud-est du pays. Nous mettons en oeuvre des programmes durables. Nous nous attendons par ailleurs à travailler encore cinq à dix ans en Haïti.
    Nous travaillons également sur de modestes projets d'atténuation des risques de catastrophes naturelles dans les communautés. Nous faisons aussi de la prévention de la violence fondée sur le sexe.

[Français]

    Finalement, nous travaillons de très près avec la Croix-Rouge haïtienne pour renforcer ses capacités afin d'en faire une organisation plus solide pour soutenir les collectivités haïtiennes aujourd'hui et au cours des années à venir. La Croix-Rouge haïtienne, tout comme la Croix-Rouge canadienne, est un partenaire important des autorités publiques et il est de notre responsabilité d'en faire une organisation plus forte pour qu'elle puisse venir en aide à ses concitoyens durant des moments de crise.

[Traduction]

    Je donne maintenant la parole à Susan.
    Merci, Richard.
    Je terminerai par quelques remarques sur les partenariats en général et celui que nous avons avec le gouvernement canadien en particulier.
    Chaque jour, la Croix-Rouge aide les collectivités vulnérables du monde entier, en grande partie grâce au soutien dont nous bénéficions du gouvernement fédéral. En réponse au tremblement de terre en Haïti, l'action du gouvernement du Canada a été immédiate et son soutien, constant. L'exemple parfait en est l'hôpital de campagne créé grâce à un partenariat entre l'ACDI et la Croix-Rouge canadienne. Cet hôpital de campagne a été déployé pour la première fois le 3 décembre à Carrefour, où nous avons traité l'épidémie de choléra. Plus de 1 300 personnes y ont été soignées depuis sa création.
    Grâce à cet hôpital mobile, le premier à être implanté par la Croix-Rouge internationale dans l'hémisphère, nous pouvons maintenant être sur le terrain et nous occuper d'une urgence un jour après avoir été appelé. Il permet une réaction rapide et générale même dans des situations médicales complexes. Ce n'aurait pas été possible sans soutien gouvernemental.
    Comme dans tout partenariat, la Croix-Rouge canadienne travaille en étroite collaboration avec le gouvernement pour renforcer nos liens. Ensemble, nous avons fait des investissements importants dans le renforcement des capacités réelles de réaction aux catastrophes dans cette région et dans le monde entier. En plus de l'hôpital mobile, nous avons des fournitures de secours prêtes à être expédiées en cas d'urgence. Nous avons formé le personnel et les bénévoles de la Croix-Rouge qui sont bien préparés pour faire face aux situations les plus complexes.
    Cette capacité prête au déploiement prend des investissements quotidiens, et nous encourageons le gouvernement du Canada à poursuivre et, en fait, à multiplier les efforts déployés à cet égard. Nos capacités et notre expérience uniques dans le monde entier font de nous un partenaire précieux du gouvernement du Canada dans l'élaboration des politiques aux plans de l'aide humanitaire, des secours, de la reconstruction et du développement des capacités à l'échelle internationale.
    Je tiens également à signaler que la Croix-Rouge ne se consacre pas seulement à la préparation et à la réaction aux catastrophes. Nous faisons d'importantes contributions dans un large éventail de besoins humanitaires. Mais en ce qui concerne notre sujet, je pense que vous aurez compris, après notre intervention d'aujourd'hui, que nous avons une large base de connaissances et d'expertise en la matière.
    Nous serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
(1550)
    Merci, madame Johnson. Pour vous donner un contexte, vous êtes les premiers à témoigner sur l'ensemble de la situation en Haïti et sur la réaction à la catastrophe. Je vous en remercie beaucoup.
    Comme nous avons l'habitude de le faire, nous allons commencer par les partis d'opposition. M. Pearson va commencer et dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue. Je pense que nous apprécions tous beaucoup tout ce que vous avez fait. Nous savons que c'est un véritable défi que de coordonner tout cela et nous apprécions beaucoup ce que la Croix-Rouge a fait.
    Je sais que beaucoup des membres vont chercher à obtenir des précisions, mais j'aimerais commencer par des généralités.
    En ce qui concerne la Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti, j'étais à New York lorsque Bill Clinton a parlé des mesures de coordination. Je sais que cela a suscité certaines difficultés au niveau international. On s'inquiétait parfois du calendrier, d'autres fois des rapports censés être publiés. J'aimerais connaître votre évaluation de la façon dont le dossier a été traité. Je sais qu'il y a eu de par le monde des situations d'urgence et offres de secours difficiles. Dans ce cas-ci, nous avons confié la coordination à un ancien président et avons créé une commission intérimaire pour essayer de coordonner tout cela en tenant compte du rapport que le gouvernement d'Haïti devait lui même publier. J'ai entendu de nombreux messages contradictoires sur l'opportunité d'une telle démarche. Je me demande donc si vous pourriez nous indiquer certaines des leçons que la Croix-Rouge a tirées de l'exercice.
    Permettez-moi simplement de dire quelques mots à ce sujet. Nous serons certainement en meilleure posture après aujourd'hui, puisque notre secrétaire général participe à la séance.
    Bien entendu, nous avons suivi de près les travaux de la commission intérimaire — sa création et ce qu'elle a accompli jusqu'à présent. Je pense qu'il est juste de dire que la commission s'est heurtée à quelques difficultés au début pour mettre ses projets en branle. Je pense que nous pouvons tous comprendre en partie pourquoi, vu à quel point il est difficile d'aller de l'avant sur plusieurs fronts à la fois.
    Dans les derniers mois de ce qui est censée être une commission de 18 mois, je pense qu'il reste encore à voir si nous allons constater une efficacité et une clarté véritables au chapitre de la prise de décision, entre autres, dans l'avenir. De notre côté à la Croix-Rouge, nous pensons certainement que les efforts déployés en vue de créer ce type de mécanisme où le gouvernement haïtien, avec l'aide de la communauté internationale, peu importe comment elle est organisée — et la communauté internationale a décidé de la façon dont elle souhaite être organisée à cet égard —, a l'occasion de voir l'ampleur de ce que l'aide peut apporter au pays et d'avoir voix au chapitre quant à la façon dont cette aide est structurée.
    Certaines des questions d'ordre technique, comme celle qui vise à savoir comment on procède pour saisir efficacement le comité de projets et de ce genre de choses, ne sont que des détails. Je pense que la création et l'intention de mettre cette commission sur pied et d'instaurer ce leadership conjoint ont marqué une étape importante pour Haïti. Comme je l'ai dit au tout début, nous comprenons mieux les travaux du comité au quotidien, maintenant que nous y participons beaucoup plus activement.
    Richard, je ne sais pas si vous avez quelque chose à dire, du point de vue de la situation en Haïti même.
    La grande question était de savoir s'il s'agirait d'une structure parallèle au gouvernement en place. Cela n'a toujours pas été réglé, comme vous pouvez voir. L'instabilité politique qui règne au pays a compliqué davantage la tâche, car ces derniers mois, très peu de décisions semblent avoir été prises par le gouvernement. Vous avez eu l'instabilité politique. Vous avez eu le rôle de la commission. Les intervenants sont les mêmes des deux côtés, dans une certaine mesure. Nous ne savons pas trop comment les choses vont tourner. Ils doivent attendre de voir ce qui va se passer. Mais il y avait des intervenants tiraillés par des intérêts divergents, et en raison de l'absence de leadership politique, je ne pense pas que les choses ont progressé aussi rapidement qu'elles auraient dû.
    Pour vous, c'est plus ou moins l'organisme responsable qui intervient, l'organisation, puisque la commission intérimaire était en quelque sorte au point mort pendant un certain temps et qu'elle s'employait à franchir les étapes du processus? Comment c'était pour vous de travailler dans ce contexte, quand tout le monde demandait aux gens d'attendre, ou M. Clinton demandait aux gens d'attendre, et que vous tentiez de répondre aux situations d'urgence? Est-ce que cela vous a compliqué la tâche? Était-ce un système désordonné?
(1555)
    Oui. Nous passions notre temps à les rencontrer. Nous nous sommes entretenus avec le directeur exécutif, Gabriel Verret, par l'entremise de la fédération.
    Nous les tenions au courant des progrès que nous réalisions. Nous en sommes toujours à l'étape des secours d'urgence, alors nous continuons de leur fournir des renseignements. Les abris constituaient l'un des grands enjeux, et ils allaient être nécessaires d'une manière ou d'une autre, si bien que nous avons continué d'aller de l'avant et de les tenir informés en cours de route. C'est ainsi que nous avons procédé.
    J'aimerais peut-être simplement préciser que la commission intérimaire est à la recherche d'investissements à moyen et à long terme notamment au titre de l'infrastructure pour appuyer le plan de développement à long terme du gouvernement haïtien. En tant qu'organisme d'aide humanitaire qui s'efforce de répondre aux besoins à plus court terme et parfois à moyen terme, nous coordonnons nos efforts d'abord et avant tout avec le secteur humanitaire, qui est administré essentiellement par le système des Nations Unies, le système groupé, dont vous avez sûrement déjà entendu parler.
    Pour ce qui est des besoins urgents à court terme que nous cherchons à satisfaire, qu'il s'agisse d'abris, de soins de santé, d'approvisionnement en eau potable ou de services d'assainissement, il existe un autre mécanisme de coordination, qui s'est révélé en fait très efficace. C'est pour les abris où la coordination a été le plus efficace; nous avons réussi à échanger des renseignements, à obtenir un portrait complet de la situation de la part des intervenants et à faire progresser les travaux que nous voulons réaliser — selon ce qui est possible compte tenu du contexte en Haïti.
    L'efficacité ou l'inefficacité de la commission ne nous a pas empêché d'offrir notre aide humanitaire d'urgence.
    Je me demande si c'est un modèle qu'ils ont mis de l'avant après ce qui s'est passé en Haïti. Vous faites en sorte qu'un ancien président le mette en oeuvre. Pour ma part, j'estime qu'il est trop tôt pour se prononcer sur ce modèle. Est-ce l'avis d'un grand nombre de groupes qui travaillent toujours là-bas, qui attendent de voir s'il sera en fait efficace?
    Il le sera peut-être bien, mais il y a tellement de facteurs contextuels en jeu. Je ne sais pas s'il est pertinent de dire qu'un modèle fonctionne ou non partout. Après le séisme en Haïti l'an dernier, je pense que les gens cherchaient à élaborer un modèle semblable à celui qu'on a utilisé en Indonésie après le tsunami. Mais le contexte politique est si différent et la force du gouvernement national indonésien est si différente de celle du gouvernement haïtien que la comparaison est boiteuse.
    Je crois certainement que la communauté internationale se penchera sur cette expérience au fil du temps et tentera de voir les leçons qu'elle peut en tirer. Mais je ne me hasarderais pas à dire que parce que le modèle a fonctionné ou non à un endroit, ce sera pareil ailleurs. Tout dépend des capacités relatives du gouvernement national et des intérêts des intervenants internationaux qui collaborent avec ce gouvernement.
    C'est de bonne guerre. C'est bien.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Vous en avez assez pour poser une question brève.
    Relativement aux tensions continues qui semblent en avoir résulté, je sais qu'il y avait quelque 10 000 ONG en Haïti peu de temps après le séisme, et un grand nombre de ces organisations étaient autochtones. Certains des responsables sont venus à nos bureaux nous parler. Certains se sentaient en quelque sorte exclus de ce processus de concertation, et d'autres non.
    En ce qui concerne vos opérations et votre travail, avez-vous trouvé qu'il était plutôt facile d'assurer une coordination avec les ONG locaux? Bon nombre d'entre elles sont là depuis longtemps et essaient de se faire entendre auprès du gouvernement et d'autres entités. Avez-vous des observations à faire à ce sujet?
    Nous avons notre organisme d'aide humanitaire local, la Croix-Rouge haïtienne, si bien que nous coordonnons nos efforts par son entremise pour tout. De cette façon, nous ne sommes pas aux prises avec le même dilemme. Nous travaillons aux échelons plus élevés par le truchement de la fédération, et au niveau local, la Croix-Rouge haïtienne a déjà un réseau à l'échelle du pays.
    Il est peut-être plus difficile pour d'autres de se tailler une place dans ce réseau, mais nous avons un système en place. Le réseau des services locaux de la Croix-Rouge haïtienne a des relations au sein du gouvernement d'Haïti, au niveau plus élevé par l'entremise de la fédération du système des Nations Unies, et d'autres interlocuteurs. Je dirais que c'est l'un des avantages de travailler pour la Croix-Rouge.
    Merci.
    Merci, monsieur Pearson.
    Puisque M. Sauvé est absent aujourd'hui, si vous pouviez transmettre au comité toute information importante et pertinente, ce serait formidable, puisqu'il n'est pas présent à ces réunions.
    Nous serons très heureux de faire parvenir au comité des renseignements supplémentaires sur la question. Il pourrait bien y avoir d'autres questions cet après-midi.
    Merci beaucoup. C'est formidable.
    Monsieur Dorion, nous vous écoutons.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Johnson, monsieur Clair, madame Aung Thin, je vous remercie d'être ici.
    J'ai toujours eu beaucoup d'admiration pour la Croix-Rouge. À mon avis, la création de la Croix-Rouge a été une étape très importante dans l'histoire de l'humanité. Henri Dunant a certainement fait quelque chose d'extraordinaire, parce que, pour la première fois, on a vu la création d'organisations caritatives dont le propos dépassait des frontières nationales et religieuses. Je veux d'abord simplement souligner cela.
    J'étais à New York lorsque chaque pays est venu faire état de sa contribution pour Haïti. M. Pearson y était également.
    Dans quelle mesure l'argent qui a alors été promis se rend-il, en particulier dans les domaines qui vous concernent? L'argent annoncé par les différents pays à cette occasion — on parle de milliards de dollars — existe-il réellement et cela s'est-il concrétisé? Les gouvernements ont-ils versé les contributions annoncées?
(1600)
    Une analyse a été faite récemment. Plusieurs des fonds n'ont pas encore été déboursés. Plusieurs des donateurs semblent attendre la création du nouveau gouvernement avant d'avancer ces fonds.
    Selon le rapport de l'ONU que j'ai vu récemment, plusieurs milliards de dollars n'ont pas encore été versés.
    Je suis allé en Haïti en avril dernier pour une mission ministérielle. On nous a alors dit que la question de la sécurité était le problème numéro un. Voyez-vous les choses de cette façon? On nous a fait visiter une prison bâtie par le Canada, on nous a montré comment les policiers canadiens — en l'occurrence des policiers du Québec — formaient une nouvelle police haïtienne, etc. Ce problème vous semble-t-il vraiment décisif, un élément fondamental du dossier? Également, y a-t-il eu des progrès sur le plan de la sécurité?
    Je ne peux parler que de la Croix-Rouge canadienne. Il y a vraiment des problèmes de sécurité en Haïti. Je crois que, en moyenne, deux policiers sont tués chaque semaine à Port-au-Prince. La situation politique aussi nous empêche parfois de faire notre travail. Ainsi, l'année passée, nous avons arrêté notre travail pendant presque une semaine parce qu'il y avait des émeutes.
    La question de la sécurité est donc réelle, même si la MINUSTAH apporte une certaine stabilité. Quand on est en Haïti, la sécurité est une chose qu'on doit toujours considérer quand on veut faire du travail.
    J'aimerais dire que la sécurité est un facteur qu'il faut vraiment considérer. En ce qui a trait à la Croix-Rouge, avec les exemples que Richard vient de donner, je peux dire qu'elle a réussi, grosso modo, à répondre aux besoins des gens. Comme nous travaillons avec la Croix-Rouge haïtienne, nous sommes intégrés à la communauté, les gens nous connaissent. Par exemple, dans le cas de Léogâne, des gens de la communauté ont réagi afin de garantir la sécurité des collègues de la Croix-Rouge canadienne et de la Croix-Rouge haïtienne.
    Je peux dire que jusqu'à aujourd'hui, la Croix-Rouge a toujours trouvé une façon de poursuivre son travail, mais il est vrai qu'il faut considérer tous les jours la question de la sécurité.
    Une des caractéristiques de l'action internationale en Haïti est la présence extrêmement forte — c'était le cas en avril dernier — des médecins cubains. Sont-ils toujours là? Savez-vous s'ils sont efficaces? À cette époque, on en faisait l'éloge partout. Sont-ils toujours présents?
    En vérité, nous n'avons pas de contact avec les médecins cubains. J'ai entendu dire la même chose, mais nous n'avons pas d'informations sur cet aspect.
(1605)
    Ma collègue voudrait peut-être poser d'autres questions.
    On a vu que vous agissiez comme premiers répondants à la suite de cette catastrophe qui a frappé et foudroyé le peuple haïtien. Après une année ou plus, quelle est votre vision, quelle sera votre participation, où vous situez-vous sur le plan de la reconstruction en Haïti?
    Nous travaillons énormément à la question des abris. Nous dépensons environ 60 millions de dollars pour la construction d'abris. Il y a aussi l'eau et l'assainissement des eaux. On travaille de très près avec la Croix-Rouge néerlandaise, qui fait cette partie du travail.
    Sur le plan de la santé, il y a un investissement de 25 millions de dollars, et nous avons différents partenaires, dont l'hôpital Sainte-Justine de Montréal. On travaille à la reconstruction de l'hôpital de Jacmel, on travaille en santé communautaire dans les régions. On travaille aussi au renforcement de la Croix-Rouge haïtienne parce que c'est elle qui est sur place et qui peut répondre aux besoins dans le cas de sinistres.
     On travaille aussi à la réduction des risques en Haïti, en plus de travailler à la protection des enfants. On fait passer des messages antiviolence, parce que la violence est un vrai problème dans cette communauté. Ce sont les grands défis de la Croix-Rouge canadienne.
    Comme je l'ai déjà dit dans mes remarques, on était déjà en Haïti avant janvier 2010. Pour nous, il est clair que nous serons là au cours des années à venir. On ne peut pas imaginer qu'on va faire un peu de travail d'urgence seulement et que ce sera une réponse adéquate aux besoins des Haïtiens.
     On a quand même vu une réponse généreuse de la part de la population canadienne et québécoise, entre autres. Les gens donnaient à un fonds particulier et on invitait la population à donner généreusement. Que reste-t-il de ce fonds? Avez-vous encore suffisamment d'argent?
    Nous pouvons parler des fonds qui sont entre les mains de la Croix-Rouge canadienne. Je demanderais à Pam ou Richard de donner des détails.
    Une bonne partie de nos fonds est déjà dépensée. Comme Susan l'a expliqué, nous nous attardons non seulement au court terme, à la phase d'urgence, mais également aux autres phases. Jusqu'à présent, on a dépensé plus de 100 millions de dollars et 50 millions de dollars sont déjà réservés à d'autres projets. On étudie les projets à long terme également, ce qui correspond aux trois quarts de nos fonds, environ. Notre collecte de fonds nous a permis d'amasser 200 millions de dollars.
    À la suite de la catastrophe, les gens ont donné de l'argent. Continuent-ils à donner? Sent-on qu'il y a un essoufflement à cet égard?
    Oui, nous continuons à recevoir des fonds. Même si nous ne faisons pas une collecte de fonds très proactive, les gens réussissent à nous trouver et à nous donner des fonds. Un fonds spécial a été mis en place spécifiquement pour Haïti. Tous les fonds donnés à la Croix-Rouge pour Haïti sont consacrés aux efforts en Haïti.

[Traduction]

    C'est tout le temps dont nous disposons. Nous reviendrons à vous plus tard.
    Nous allons maintenant entendre Mme Brown, pour 10 minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins d'être des nôtres. Nous avons entendu de nombreuses histoires positives au sujet de la Croix-Rouge canadienne, et je veux vous remercier du travail que vous faites.
    Après le séisme en Haïti, nous avons été témoins de la générosité des Canadiens, qui ont apporté leur aide en faisant des dons et en s'assurant que ces personnes vulnérables ont accès à de l'eau potable et à des abris, alors nous remercions également la population canadienne.
    J'ai quelques questions pour vous.
    Monsieur Clair, vous avez fait une remarque, et c'était la question que je voulais poser quand j'ai entendu ce que vous disiez au départ. À quel genre d'obstacles vous heurtez-vous pour construire ces abris? Vous avez parlé des droits fonciers. De toute évidence, les intervenants dans le domaine du développement international veulent que les gens aient accès à des abris car c'est fondamental pour la santé et l'éducation des enfants, et nous apportons notre contribution à tous ces égards. Combien de temps faut-il en moyenne pour régler des litiges en matière de droits fonciers, et y a-t-il une façon dont nous pouvons aider à cet égard?
    Pourriez-vous commenter là-dessus?
(1610)
    De 70 à 80 p. 100 des Haïtiens louent leur logement, alors nous devons trouver un juste équilibre entre le propriétaire et le locataire, car l'abri que nous bâtissons est offert au locataire, mais se trouve sur le terrain du propriétaire. Nos abris peuvent en fait être démantelés et déménagés, mais nous voulons créer un sentiment d'appartenance à la collectivité. Nous rebâtissons les communautés où les gens habitaient auparavant. Nous établissons une entente entre le propriétaire et le locataire; nous avons des équipes d'avocats et de notaires qui rédigent un accord en vertu duquel nous avons le droit de construire un refuge sur un terrain pour une période donnée, parfois pour trois ans, parfois pour une durée indéterminée. Les propriétaires peuvent continuer de louer le terrain, mais l'abri appartient au locataire.
    Le domaine des droits fonciers est extrêmement difficile et complexe. Je vais simplement vous en citer un exemple. Les gens d'une fédération internationale ont essayé de louer une parcelle de terrain, et comme ils s'apprêtaient à signer le chèque, trois autres propriétaires sont arrivés.
    Il n'y a aucun système de registre foncier efficace, et une grande partie des terres appartiennent à une poignée de personnes en Haïti. Pour créer des entreprises et des droits de propriété, ce que les gouvernements pourraient faire — et pas seulement le gouvernement canadien —, c'est d'inciter le gouvernement haïtien à créer un cadastre, à mettre en place un système de registre foncier, car c'est l'un des principaux problèmes pour les entreprises et ce registre permettrait de régler les litiges entre les propriétaires et les locataires. C'est un obstacle de taille.
    Cela m'amène à ma deuxième question. Quand vous avez parlé tout à l'heure de la Croix-Rouge haïtienne, madame Johnson, vous avez dit que nous devons discuter du renforcement des capacités en Haïti. Vous avez signalé que nous serons là-bas pendant plusieurs années.
    Par quoi devons-nous commencer? Nous savons que le Canada investit en Haïti depuis très longtemps. En fait, je connais des infirmières qui ont travaillé là-bas il y a 40 ans de cela et qui ont participé au travail humanitaire. Avons-nous constaté un changement? Par quoi devons-nous commencer? Qu'allons-nous faire maintenant? Quel est l'avenir de la Croix-Rouge haïtienne, et comment le Canada peut-il aider à renforcer les capacités du pays?
    Merci beaucoup de la question.
    Je pense que de notre point de vue, nous travaillons certainement très étroitement avec la Croix-Rouge haïtienne au niveau national, ainsi qu'à l'échelle locale dans les collectivités où nous oeuvrons, à Jacmel, par exemple, où se trouve la direction locale de la Croix-Rouge haïtienne. Le travail que nous réalisons avec elle est très diversifiée, que ce soit des choses pratiques très simples comme mettre en place un endroit où son personnel peut travailler, l'aider à recruter et à former des bénévoles, offrir de la formation en secourisme, tout ce qui doit être fait pour assurer la viabilité et la pertinence des efforts de la Croix-Rouge locale, et l'aider à mener ses opérations.
    Notre travail consiste également à trouver un moyen de l'aider à s'acquitter de son travail de sorte que nous ne le faisons pas à sa place, que les Haïtiens eux-mêmes occupent les postes de direction, que nous les accompagnons dans ce processus mais que nous ne faisons pas le travail à leur place, pour ainsi dire. Cette approche rallonge le processus, mais nous croyons que nos efforts seront plus viables à plus long terme. Nous participons donc à la formation des gens et nous travaillons avec la Croix-Rouge haïtienne notamment à l'établissement de bons systèmes financiers et de ressources humaines, des éléments de base nécessaires pour être un organisme viable.
    Il est toutefois très difficile de voir comment nous pouvons y parvenir à long terme, car nous ne sommes qu'un seul intervenant à Haïti. Nous parlons de la Croix-Rouge haïtienne. C'est un élément parmi tant d'autres qui constituent Haïti aujourd'hui. Il est clair que nous demeurerons un partenaire de la Croix-Rouge haïtienne et que nous ferons du mieux que nous pouvons, mais nous oeuvrons bien entendu dans un contexte plus large. Ce qui arrivera à Haïti de façon plus générale est entre les mains de nombreuses personnes, et certainement pas juste entre les mains de la Croix-Rouge ni de la Croix-Rouge haïtienne. Mais nous sommes résolus à continuer de travailler le plus étroitement possible avec la Croix-Rouge haïtienne pour l'aider, comme je l'ai dit, à être l'intervenant du secteur humanitaire le plus efficace dans son pays.
    Comme Richard l'a dit tout à l'heure, je pense certainement qu'au fur et à mesure que la situation politique se stabilise et qu'il devient de plus en plus possible pour les gens de s'en sortir, les organismes comme la Croix-Rouge haïtienne pourront... Cela permettra de mener le travail de façon plus efficace.
    Il y a d'autres ONG avec lesquelles vous travaillez. Pouvez-vous nous parler de certaines d'entre elles? Comment cherchez-vous une ONG qui a la stabilité et les capacités nécessaires pour travailler efficacement?
(1615)
    Voulez-vous intervenir à ce sujet?
    Nous travaillons avec un organisme allemand du nom de Diakonie. Il s'agit d'une organisation confessionnelle luthérienne d'Allemagne. Elle bâtit des abris permanents dans un secteur de l'un des districts dont nous nous occupons. Il a y une entité qui décide si la Croix-Rouge canadienne peut travailler à tel ou tel autre endroit, donc dans la région où nous oeuvrons, qui s'appelle La Vallée, juste à l'ouest de Jacmel, nous travaillons étroitement avec les gens de cette organisation. Avant de collaborer de près avec des organismes, nous nous assurons que nous avons le même type d'approche qu'eux, qu'ils mènent leurs travaux de manière indépendante et qu'ils suivent un système de sélection rigoureux pour veiller à ce qu'ils traitent les problèmes de la même façon que nous et qu'ils répondent aux besoins des plus vulnérables.
    Ce n'est qu'une des organisations avec laquelle nous collaborons. La Croix-Rouge américaine travaille avec de nombreux autres organisme pour bâtir des abris un peu partout en Haïti également. Nous essayons de travailler d'abord avec les autres sociétés de la Croix-Rouge, telles que celles des Pays-Bas et du Danemark. Nous nous sommes associés à la Croix-Rouge de l'Allemagne et de la Finlande pour l'hôpital et celle du Japon pour le centre de traitement du choléra. Nous avons donc créé ces partenariats privilégiés, mais nous ne collaborons pas uniquement avec les sociétés au sein du mouvement de la Croix-Rouge.
    Très intéressant, merci.
    Merci, monsieur le président.
    Nous allons maintenant passer à M. Dewar.
    Monsieur.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins de nous avoir relayés les dernières informations.
    Pendant que vous parliez, je songeais à l'énorme charge de travail qui doit être faite et au travail qui a été fait. Je pense que votre rapport mentionne le travail qui a été fait, mais j'estime que la majorité des gens étaient préoccupés par les attentes et franchement l'espoir qu'ils nourrissaient au départ en raison de l'incroyable réponse, pas seulement de la part des Canadiens, mais au niveau mondial.
    Je crois que la majorité des gens étaient satisfaits de la première intervention, puis, beaucoup se sont inquiétés. Ceux à qui j'ai parlé avaient été sur le terrain là où les efforts étaient entravés et où un regroupement de ressources était bloqué à cause de problèmes de logistique et transport des fournitures de secours qui arrivaient à l'aéroport. Mais, un an s'est écoulé et les gens commencent à dire qu'il est vraiment difficile d'améliorer la situation. Je sais que c'est en partie dû à des raisons politiques que nous n'allons pas discuter avec vous. Vous avez mentionné le nombre d'abris d'urgence que vous avez construits et vous prévoyez en construire 7 000, n'est-ce pas, d'ici l'automne?
    C'est 7 500.
    Bon, 7 500, et vous en avez combien maintenant?
    Nous en avons 1 200.
    D'accord. Vous pensiez sans doute que vous en auriez construits plus?
    Un peu plus. Le problème se situe au niveau de la chaîne logistique, du développement organisationnel, il faut régler ce problème pour pouvoir faire plus.
    Je le pensais bien. J'allais vous poser une question à ce sujet. Vous avez dit que l'accès aux terrains et la création d'un modèle efficace font partie des problèmes.
    Croyez-vous pouvoir atteindre cet objectif d'ici l'automne?
    Oui.
    Nous parlons donc de septembre ou d'octobre?
    Oui.
    L'une des choses importantes, à mon avis, que nous avons constatée dans d'autres régions — et vous en avez dit un mot —, c'est que lorsqu'on fournit de l'aide on travaille avec les gens du coin. Savez-vous combien d'Haïtiens travaillent dans vos projets?
    La Croix-Rouge canadienne emploie 700 Haïtiens dans la construction et les services techniques et de soutien à Léogâne, Jacmel et Port-au-Prince.
    Pouvez-vous nous donner plus de détails? Je crois que c'est l'un des sujets qui intéressent le plus les gens. Comment vous y prenez-vous? Comment recrutez-vous les gens?
    Nous les recrutons principalement par le biais de la Croix-Rouge haïtienne. Tous les membres des équipes de construction de nos projets sont haïtiens; tous les contremaîtres sont haïtiens. Nous faisons participer également les collectivités aux projets de construction. Dans les collectivités, nous choisissons les personnes qui creuseront les tranchées de leur propre maison.
    Les collectivités participent très activement. Nous les mobilisons en envoyant des bénévoles faire l'inventaire des maisons devant être détruites. Nous envoyons des équipes techniques pour faire les évaluations. Dès que ces équipes signalent que la maison de M. Dewar a été détruite, nous étudions le cas de M. Dewar pour déterminer s'il est l'une des personnes les plus vulnérable. Est-ce que la famille est monoparentale?
    Nous suivons tout un processus. Il faut d'abord visiter la collectivité, identifier les personnes les plus vulnérables et vérifier si leur maison a été détruite. Ce sont des volontaires qui font ce travail et qui reçoivent un peu d'argent. Puis, les ingénieurs entrent en lice, et ils sont tous haïtiens. Ils se rendent dans les collectivités pour évaluer les terrains et localiser les endroits qui doivent être déblayés.
    Arrivent ensuite, les équipes qui délimitent les terrains, le groupe chargé des excavations, composé essentiellement de personnes de la collectivité; puis, nos charpentiers qui montent la maison. Après, c'est le tour de la Croix-Rouge néerlandaise qui installe la conduite d'eau et l'équipement sanitaire dans pratiquement toutes les maisons. Dans certaines collectivités, ils partagent...
(1620)
    Travaillent-ils avec les gens du coin, ça se passe comment?
    Absolument. Tout le monde travaille avec des gens du coin. Des délégués s'occupent de la planification et lorsque nous passons à autre chose, nous essayons de nous faire remplacer. Nous essayons d'utiliser le plus possible les experts locaux. Par exemple, l'ingénieur recruté par la Croix-Rouge néerlandaise est un Haïtien qui vit dans le coin.
    Et beaucoup d'avocats sont également haïtiens.
    Les avocats, les notaires, les contremaîtres. Nous embauchons beaucoup de monde... Nous ne faisons pas venir des ressortissants du Canada ou d'ailleurs pour faire le travail.
    Ça contribue aux efforts d'aide. En parlant du nombre de maisons construites, il est aussi important de considérer l'effet d'entraînement. Tout le monde parle du renforcement des capacités ces jours-ci, au niveau des compétences et aussi de l'argent versé pour les travaux et qui stimule l'économie locale. A mon avis, la plupart des gens voudraient que l'on s'en tienne à ce principe.
    Il y a un sujet que nous n'avons pas soulevé, mais je sais que vous travaillez avec des femmes. L'exploitation des femmes est une question très préoccupante. Cette exploitation n'est pas quelque chose de nouveau, mais elle est plus aggravée par la situation précaire qui prévaut dans cette société.
    Nous parlons souvent de la sécurité, mais les préoccupations suscitées par la violence de genre et la situation précaire des femmes... Pouvez-vous nous dire quelques mots à ce sujet et à propos de la façon dont vous abordez ce problème?
    Nous avons un programme qui vise particulièrement la prévention de la violence.
    La violence contre les femmes est l'un des principaux problèmes sociaux en Haïti. Quand nous offrons des abris, nous veillons à ce que, s'il s'agit d'un couple marié, par exemple, que le droit de propriété soit accordé aux deux conjoints, à l'homme et à la femme. Dans le cas des couples non mariés, le titre de propriété est au nom de la femme car les femmes sont dans une situation plus vulnérable.
    Dans les collectivités où nous travaillons, nous choisissions délibérément des femmes pour faire partie de nos équipes de travail. À notre entrepôt — j'espère que vous viendrez en Haïti pour visiter notre énorme entrepôt —, nous recrutons des femmes pour faire des travaux qu'elles ne font traditionnellement pas. Nous essayons de combler cette lacune.
    Au plan de la prévention de la violence, nous apprenons à notre personnel — les employés locaux, les employés réguliers — à reconnaître la violence et aussi à recourir aux ressources qui existent en Haïti pour régler ce problème, des ressources telles que les services sociaux, la police ou tout autre organisme. Nous devons trouver les organismes chargés d'aider les victimes de la violence.
    Nous n'avons de programmes spécifiques ou des maisons de transition, mais nous sommes présents dans la collectivité. Quand nous apprenons que des actes de violence ont été commis, nous orientons les victimes vers les organismes qui pourront les aider.
    Pour finir, j'ai une question que je pose à tous les organismes d'aide. Quels frais administratifs sont associés au travail que vous faites en Haïti?
    Vous voulez dire les coûts d'opération réels de notre équipe en Haïti?
    Le montant global de vos frais d'administration en Haïti. Est-il de 5 p. 100, 10 .p. 100...?
    Il s'élève à 12 p. 100.
    La parole est de nouveau à M. Lunney qui commence la deuxième série de questions. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus. Nous apprécions beaucoup le travail remarquable de la Croix-Rouge et nous en sommes fiers. J'apprécie également la façon dont vous avez commencé cette discussion par une définition très concrète d'un désastre comme étant un événement bien au-dessus de la capacité de réaction d'un pays. J'y reviendrai dans un instant.
    Je voulais juste souligner quelques points. Mes collègues ont posé certaines questions que je voulais vous poser, vous avez donné de très bonnes réponses, je poursuivrai donc. La question portant sur la réforme agraire et le manque d'accès aux terrains était une bonne question, à mon avis. Mais vous savez, un vrai problème existe encore, un an après le désastre, au niveau du déblaiement. Il serait peut-être bon de commencer par cela.
    Dans quelle mesure les gravats sont-ils encore un obstacle aux efforts de construction des maisons que vous voulez construire et y loger ceux qui en auront désespérément besoin à l'approche d'une saison difficile sur le plan climatique?
(1625)
     Le problème n'est pas aussi grave dans les régions périrurales et périurbaines. Mais à Port-au-Prince, il est considérable. Les gravats occupent tellement d'espace qu'il est très difficile de construire un abri dans un endroit qu'il faut déblayer. Le déblaiement peut être aussi très dangereux, donc beaucoup d'organisations hésitent à faire des travaux de déblaiement.
    Il y aussi la notion de reconstruire les maisons mieux qu'elle n'étaient. Je regrette de ne pas avoir les photos de ce qu'ils appellent les bidonvilles sur les collines où les gens habitent. En reconstruisant, nous veillons à ce que les maisons soient sûres et un peu spacieuses. Ce qui signifie que, dans la même région, certains personnes n'auront pas de toit. On ne peut pas reconstruire mieux si on reconstruit la maison de la même façon qu'elle avait été construite initialement.
    Le déblaiement pose un énorme problème et c'est toujours l'un des obstacles principaux de la construction dans la région métropolitaine de Port-au-Prince.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné le nombre de maisons que vous construisez. Je crois que vous avez dit avoir fini 1 200 abris et que vous en aurez 7 500 d'ici l'automne. Les documents que vous nous avez remis contiennent des photos. Nous comparions les abris temporaires aux abris permanents. Je veux des précisions concernant ces photos — vous avez peut être dit qu'ils sont construits sur des terrains loués —, s'agit-il des abris temporaires que vous avez mentionnés ou d'abris permanents? Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est?
    Il s'agit de structures très solides. Disons que les abris deviendront probablement permanents. Nous les appelons des abris temporaires. mais ils sont bien mieux construits que ce qui était là auparavant. Ils sont beaucoup plus solides et beaucoup plus résistants que ce qu'ils avaient avant. Ils ont une superficie de 18 mètres carrés. Pas très grands, mais aussi grands sinon plus grands que beaucoup d'habitations qu'ils avaient. Ces abris sont très solides. Les gens en sont très satisfaits. Les personnes qui les occupent nous ont envoyé des lettres dans lesquelles elle mentionnent la solidité des abris et leur bonne construction.
    C'est quelque chose que j'apprécie. Je regarde les photos et je pense aux ouragans. Vous avez mentionné plus tôt combien les Haïtiens sont malchanceux. Leur île se trouve dans l'oeil de beaucoup de tempêtes très violentes. Et vous estimez que ces abris — qui sont certainement une nette amélioration par rapport à ce que vous avez trouvé — pourront résister aux ouragans qui sévissent en Haïti?
    Nous les avons mis à l'épreuve. Nous avons retenu les services de SNC-Lavalin qui a fait une étude sur la vitesse du vent à Jacmel et à Léogâne, où les abris sont les plus exposés. Nous les avons construits pour qu'ils résistent à des vents qui sont plus violents à Jacmel qu'à Léogâne. Les abris ont été entièrement conçus et construits avec la collaboration d'ingénieurs québécois. Nous sommes convaincus qu'ils résisteront.
    On note encore beaucoup de frustration sur le terrain au niveau des problèmes d'organisation d'un gouvernement qui, tout d'abord, comme l'a dit mon collègue M. Dewar plus tôt... Peut-être que nous pourrons parler de problèmes politiques dans un autre forum. Mais le manque de capacité du gouvernement à fournir des services opérationnels essentiels suscite beaucoup de frustration. Les institutions n'ont pas la confiance de la population. Dans quelle mesure le manque d'organisation du gouvernement nuit à la capacité de la Croix-Rouge de fournir les services qu'elle veut fournir sur le terrain?
    Heureusement, la relation privilégiée que nous entretenons avec la Croix-Rouge haïtienne nous ouvre des portes. Par exemple, nous avons rencontré l'an dernier le ministre de la Santé pour avoir l'autorisation de reconstruire l'hôpital de Jacmel. C'était au beau milieu de l'épidémie de choléra et il se cachait quelque part. Donc, si nous avons un accès privilégié, c'est grâce à la Croix-Rouge.
    Il faut se rappeler aussi qu'environ 20 p. 100 des fonctionnaires ont perdu la vie durant le séisme, ce qui a une incidence énorme sur la prestation des services. Et c'était déjà un problème avant le séisme. En plus, la Commission intérimaire, un autre organisme, fait la concurrence au gouvernement au niveau du recrutement de personnes qualifiées.
    Mais, je le répète, la relation privilégiée que nous entretenons avec la Croix-Rouge haïtienne nous ouvre des portes. Nous avons pu faire sortir du matériel du port. Nous avons pu établir une chaîne logistique. Les relations que nous entretenons et la dimension de notre organisation font que nous rencontrons moins de difficultés que d'autres organisations.
    Je pense que l'une des raisons pour lesquelles les Canadiens ont beaucoup confiance en la Croix-Rouge — et le gouvernement apprécie certainement votre bon travail — est votre excellent exemple au plan de la capacité et des ressources humaines dans la région ainsi qu'au plan de l'intégration avec les autorités locales et tout cela semble vous réussir. C'est un exemple que nous respectons.
    J'ai entendu quelques observations au sujet de la construction de l'hôpital. Nous parlons bien de l'hôpital de Jacmel?
    M. Richard Clair: Oui.
    M. James Lunney: Il m'a semblé entendre qu'il y avait un certain rapport avec un hôpital de Montréal. Pouvez-vous nous parler un peu de cette expérience? Où en sommes-nous dans la reconstruction de cet établissement et comment ces travaux cadrent avec la relation avec l'hôpital? Utilisez-vous des matériaux locaux et des travailleurs locaux? Combien de temps faut-il pour reconstruire un tel établissement?
(1630)
    Beaucoup de temps.
    Vous pouvez répondre, mais je veux signaler à M. Lunney qu'il a utilisé tout son temps.
    Je pourrais commencer en faisant un petit rappel historique. Je demanderai ensuite à Richard s'il veut ajouter les renseignements les plus récents?
    Nous avons travaillé pendant plusieurs mois avec le ministre de la Santé dans la région de Jacmel et avec quatre organisations du Québec qui sont l'hôpital Sainte-Justine...
    Donc, que sont les... ?
    J'ai oublié. Serait-ce les USI?
     L'USI de l'Université de Montréal et les agences de santé publique de Québec et de Montréal. Alors, nous avons établi un partenariat avec quatre organismes de santé du Québec, chacun ayant un rôle différent à jouer dans cette initiative dans le cadre de laquelle nous allons rebâtir et remettre en service l'Hôpital Saint-Michel de Jacmel. L'Hôpital Saint-Michel existe à Jacmel, mais il s'agit d'un bâtiment en piteux état qui nécessite beaucoup de travail.
    Alors, nous étudions cette question et nous envisageons d'élaborer le plan directeur pour la reconstruction de l'hôpital. Notre initiative à cet égard a été autorisée par le ministère de la Santé d'Haïti. Comme Pam l'a dit plus tôt, je pense, nous avons en quelque sorte affecté une partie des fonds que nous avons à cette initiative de santé intégrée, qui comprendra la reconstruction de l'hôpital, la construction de probablement trois ou quatre cliniques communautaires dans des régions plus rurales autour de Jacmel et la formation de spécialistes de la santé pour travailler dans l'hôpital et dans les cliniques, ainsi qu'une programmation de base en santé publique que nous allons élaborer en collaboration avec la Croix-Rouge haïtienne. Il s'agit d'un programme intégré qui traitera des problèmes de santé de base tout en assurant des soins tertiaires.
    Nous sommes en train de bâtir le partenariat, essentiellement, et nous travaillons avec le ministère de la Santé, comme l'a expliqué Richard. Nous avons en ce moment des discussions avec le gouvernement japonais, qui a signalé son intention de se joindre à notre partenariat pour la reconstruction proprement dite de l'hôpital. Nous n'avons pas encore le plan complet de l'hôpital. Nous en sommes encore au tout début de la conception et de tout le reste. En fait, nous avons une mission qui partira du Québec en mars, de sorte que tous les partenaires et la Croix-Rouge canadienne se rendront à Jacmel pour examiner le site, examiner la situation et pousser plus loin l'élaboration des plans détaillés sur la façon dont les différents partenaires vont travailler ensemble sur ce projet.
    Une des raisons pour lesquelles nous avons bâti le partenariat avec des organismes du Québec, c'est qu'au nom de la durabilité, nous voulions garder la relation avec Sainte-Justine et avec les autres organismes du Québec, pour ce qui est de la formation des spécialistes de la santé. À la Croix-Rouge, nous nous considérons comme ceux qui ont réuni ces partenaires ensemble, ceux qui, en quelque sorte, ont donné une impulsion ou joué le rôle de catalyseur pour que tout cela voit le jour; nous avons fourni une certaine quantité de ressources à cette fin pendant une période de temps, mais avec le temps, nous allons nous retirer du projet. Nous pensons que les organismes du Québec et le ministère de la Santé à Jacmel maintiendront ce partenariat à long terme, une fois que nous aurons fait ce que nous avons pu avec les ressources que nous avons.
    Merci, monsieur Lunney.
    Monsieur Rae, à vous la parole.
    Je suis très intéressé par la question du développement économique en Haïti. Au cours de la visite que j'ai effectuée là-bas après le tremblement de terre, j'ai eu nettement l'impression qu'il n'y avait pas vraiment d'économie, qu'il n'y avait presque aucune façon pour les gens de gagner leur vie, à part le travail lié à la reconstruction. Quels efforts faites-vous, ainsi que d'autres, pour utiliser la reconstruction comme une occasion de donner du travail aux gens?
    Il s'agit d'une observation intéressante et tout à fait vraie jusqu'à un certain point.
    Cependant, je dirais qu'Haïti est un exemple d'endroit où vous avez ce que nous appellerions une économie parallèle très prospère. Les gens font du commerce et des affaires de manière très active. Vous pouvez certainement acheter et vendre à peu près n'importe quoi dans ce pays. Ce que cela ne veut pas dire, toutefois, c'est qu'il y a une économie officielle en place où vous avez un régime fiscal efficace et des choses du genre.
    Qu'est-ce que nous faisons? La Croix-Rouge canadienne ne se considère pas comme spécialiste de ce que nous appelons le travail de subsistance, à savoir ce genre de développement économique à petite échelle au niveau familial ou même au niveau communautaire. D'autres sociétés nationales — de la Croix-Rouge —, comme la Croix-Rouge britannique et quelques autres, ont une plus grande expertise dans ce domaine. Par exemple, dans le travail que nous faisons sur les abris, nous travaillons en partenariat avec certaines autres sociétés nationales pour amener ce genre d'activités économiques à petite échelle dans la programmation, mais ce n'est certainement pas au niveau de la construction d'une usine ou d'un apport économique majeur qui donnera de l'emploi à des centaines de personnes à long terme. Ce n'est pas le genre de travail que nous estimons être le nôtre.
    Nous ne sommes probablement pas les meilleures personnes pour discuter de cette question.
(1635)
    Lorsque vous faites votre travail de reconstruction, lorsque vous regardez le travail que vous faites du côté du logement, on peut supposer que tout ce travail est effectué par les gens au niveau local.
    Absolument. Pendant la période où nous faisons participer la population locale, ce qui est, comme nous l'avons décrit plus tôt, une stratégie bien réfléchie, nous embauchons de la main-d'oeuvre locale, nous faisons participer la population locale et nous leur offrons une formation de manière qu'ils sortent de cette expérience avec des compétences améliorées. Nous prenons ce genre d'initiatives. Le temps qu'ils travailleront pour nous, ils recevront un salaire très décent. Ils seront traités avec respect et dignité. Et à la fin du projet, ils repartiront avec des compétences améliorées.
    Nous apportons cette contribution, mais ce que j'essayais de dire, c'est que ce genre de développement macroéconomique n'est pas le genre de travail que nous faisons.
    Compris.
    J'ai une question complètement différente.
    Le système de la Croix-Rouge doit planifier un certain nombre de catastrophes d'une certaine ampleur chaque année, partout dans le monde. Pouvez-vous nous donner une idée à cet égard, pour savoir quelle est votre impression globale sur la situation mondiale...? Il faut cesser d'être étonné par ces événements. Ils arrivent. Ils surviennent. Ils ont des répercussions énormes. Selon le degré de pauvreté du pays, les répercussions peuvent être plus ou moins grandes. Nous pouvons voir les taux de rétablissement des pays les plus pauvres et ceux des pays les plus riches.
    Quelle est l'ampleur de la situation que nous envisageons dans le monde? Avez-vous une certaine idée de cela?
    Nous avons une idée de cela. C'est à partir de cette idée, les hypothèses de travail que nous avons, que nous avons décidé de procéder à certains investissements, qui sont, essentiellement, des investissements touchant l'état de préparation. Une de nos hypothèses de travail, c'est que ces événements catastrophiques à grande échelle iront en augmentant, que nous ne verrons pas une diminution de ces derniers. Nous allons assister à une augmentation de ces événements pour deux ou trois raisons. L'une d'elles, c'est qu'un grand nombre de catastrophes sont liées à l'eau, c'est-à-dire les ouragans ou les cyclones, ou à son contraire, c'est-à-dire la sécheresse. Ce sont des catastrophes qui sont liées au climat.
    Avec le changement climatique, il y a des répercussions sur la nature des ouragans et des cyclones et le reste, et cela se combine au fait que de plus en plus de gens vivent dans des régions urbaines densément peuplées. De rurale qu'elle était, la population mondiale est maintenant urbaine, alors, nous voyons de plus en plus de personnes à risque dans des endroits densément peuplés et à risque, dans les quartiers très défavorisés des villes. Lorsque vous avez cette combinaison d'un événement et de gens qui vivent dans une pauvreté extrême, c'est là que vous avez des catastrophes à une échelle gigantesque. Nous nous attendons entièrement à voir cela. Nous avons eu Haïti cette année. Nous avons eu les grandes inondations au Pakistan et elles sont à une échelle gigantesque. En dessous de cela, il y a quelques événements.
    Pour la fédération internationale, dans une année donnée, entre 40 et 60 situations d'urgence nécessitent une intervention internationale. Cela peut comprendre n'importe quoi, comme l'expédition de certains articles de première nécessité ou l'envoi de personnes pour organiser l'intervention. C'est certainement là le niveau de notre organisation. Cela nous amène ensuite à conclure des accords avec des sociétés nationales pour le prépositionnement de matériels de secours et à avoir ce que nous appelons des plans de mesures d'urgence sur la question de savoir, selon l'ampleur de l'événement, qui sera chargé d'intervenir, avec quel matériel et avec quel personnel. Nous avons des gens qui sont formés pour être des premiers intervenants, si vous voulez, dans le cadre du système de la Croix-Rouge. Nous investissons justement parce que nous avons cette idée de ce que seront les besoins. Comme je l'ai dit dans mes observations précédentes, nous investissons tous les jours dans l'état de préparation, dans le prépositionnement du matériel, dans la formation du personnel, dans la mise à l'essai des systèmes, de sorte que nous sachions lorsque nous aurons besoin d'intervenir à la suite d'une catastrophe que le système fonctionne.
    Il existe un très bon rapport appelé Rapport sur les catastrophes dans le monde qui est publié chaque année par la fédération et qui vous donne une idée globale des situations d'urgence et des catastrophes survenant partout dans le monde pour cette année particulière. Il vaut la peine que le comité...
(1640)
    Malheureusement, vous n'avez pas encore mis au point de pouvoir prédictif.
    Vous pouvez regarder la situation des 30 dernières années, et les 20 pays les plus à risque et les principales villes à risque sont là. Il y a un certain degré de prévisibilité dans ce que nous avons géré et dans ce que nous nous attendons de voir au cours des années à venir.
    Est-ce que cette information est disponible également dans ce rapport, ou où peut-on la trouver?
    L'information est disponible dans d'autres rapports, que nous pourrions mettre à la disposition du comité. Certainement, à partir de cela, la fédération internationale a créé des plates-formes au Panama, à Kuala Lumpur et à Doubaï en raison de leur proximité géographique avec les endroits où les événements surviennent et avec les systèmes logistiques dont vous avez besoin pour déplacer les gens et le matériel rapidement aux endroits où on en aura besoin.
    Ai-je terminé? Est-ce ce que veut dire ce hochement de tête? Est-ce que cela veut dire que je peux poser une autre question?
    Si vous avez une autre question, allez-y.
    Je suis très intéressé par la question de savoir quelle est l'infrastructure mondiale pour répondre à ces situations, et quelle est la place du Canada dans cette infrastructure. Pouvez-vous nous dire franchement si vous pensez que le gouvernement possède une infrastructure d'intervention en cas d'urgence au niveau international aussi efficace qu'elle pourrait l'être?
    Je pense que le gouvernement canadien a fait un travail remarquable en temps qu'intervenant efficace en cas de catastrophe comme membre de la communauté internationale. Une des choses auxquelles j'ai fait allusion dans mes observations, c'est l'initiative prise l'année dernière de financer conjointement avec la Croix-Rouge canadienne un hôpital à déploiement rapide. Il s'agit d'un ajout extraordinaire à la boîte à outils dont dispose le gouvernement canadien lorsqu'il veut intervenir après un événement. Il a servi en décembre.
    Cela s'ajoute à la DART?
    Oui, et c'est distinct.
    En quoi est-ce différent?
    C'est assez différent. C'est beaucoup plus petit, mobile et modulaire; ainsi, nous sommes en mesure d'adapter l'hôpital à la taille et à la nature de l'événement dans lequel nous sommes appelés à intervenir. Par exemple, lorsque notre intervention a été sollicitée dans le cas de l'épidémie de choléra en Haïti, nous avons apporté des parties de l'hôpital — si je peux l'exprimer de cette façon — et nous avons déterminé la composition de l'équipe initiale en fonction de la connaissance que nous avions de nos besoins dans l'arrière-pays. Nous avons la capacité de pouvoir être très souples et très rapides.
    De plus, cette initiative particulière visant à renforcer cette capacité dans cette hémisphère reflète notre intention d'avoir une plus grande capacité d'intervention dans le cas des événements survenant dans les Amériques. C'est un élément important; compte tenu des tendances que nous observons dans cette région, il est important de pouvoir intervenir. Comme nous l'avons dit souvent au sein de la Croix-Rouge canadienne et au sein de la famille de la Croix-Rouge, si un événement survient dans les Caraïbes, nous, au Canada, devrions être parmi les premiers à intervenir. Ce sont nos voisins. C'est bien si la Norvège ou le Japon peuvent également se joindre à nous, mais, en fait, c'est notre responsabilité, dans notre propre voisinage, de faire partie des arrangements que nous avons entre les pays de notre région. Et je parle au nom de la Croix-Rouge. Nous avons cette entente en ce qui concerne cette graduation de l'intervention: vous savez, votre voisin intervient en premier, c'est la même chose dans un village; si vous avez besoin de plus d'aide, alors, les gens vivant plus loin sur la rue viendront vous aider. Nous nous voyons de cette façon, en termes de proximité par rapport aux Caraïbes, à l'Amérique centrale et à l'Amérique du Sud. Cela nous impose une certaine responsabilité et nous donne certaines occasions d'avoir une participation très active.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Obhrai.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup à nos témoins et merci à mon collègue de m'avoir cédé son temps de parole.
    La raison pour laquelle j'interviens, c'est pour vous poser des questions au sujet de la coopération communautaire mondiale.
    Mercredi dernier, je suis allé à Bruxelles représenter le Canada. Il s'agissait d'une conférence internationale sur Haïti. Elle a été organisée par le Canada, l'Union européenne, le gouvernement belge et les autorités haïtiennes. J'ai donné l'allocution principale. Michaëlle Jean était présente également, de même que le ministre des Affaires étrangères de la Belgique et les commissaires de l'Union européenne.
    Cette conférence avait pour but de faire le point, un an plus tard, sur ce qui se passe vraiment en Haïti et sur les défis. La conférence était divisée en deux parties. Une partie portait sur les pratiques exemplaires découlant des défis, après un an, pour toutes les ONG et pour l'aide au développement. La deuxième partie portait sur les questions où le Canada a joué un rôle de premier plan.
    J'ai déjà fait parvenir mon discours aux membres du comité et la greffière confirmera à quel moment ils le recevront. Le discours que j'ai donné a été envoyé à la traduction et il vous sera envoyé pour que vous puissiez connaître la position du Canada. S'il vous plaît, faites-en une lecture de chevet.
    Nous avons adopté une position très ferme. Nous avons adopté une position internationale très ferme sur la question de la gouvernance. En fait, mon discours a choqué tous les gens présents. Nous étions en compagnie du représentant de l'ONU ainsi que des représentants américains. Nous allons vous faire parvenir cela. Je pense que vous, individuellement, et toutes les ONG qui travaillent en Haïti devriez lire cette allocution et voir ce qui est ressorti de cette conférence, parce que nous parlons des pratiques exemplaires et de tout le reste.
    Michaëlle Jean m'a fait part d'une question clé. En passant, j'ai demandé à Michaëlle Jean de se présenter devant le comité, et elle a accepté de le faire. Elle est la représentante de l'UNESCO. Vous allez lui faire parvenir une invitation.
    Une question dont M. Lunney a parlé et que je voulais vérifier avec vous, est la question du régime foncier en Haïti. Il n'y a pas de régime foncier dans ce pays. Par conséquent, il n'y a pas de titres fonciers. Aujourd'hui, vous pouvez construire quelque chose. Un des problèmes clés expliquant pourquoi les débris ne sont pas enlevés, c'est que ces gens veulent indiquer que c'est à cet endroit qu'ils vivaient, parce qu'il n'y a pas de titres fonciers. Je voulais que vous me disiez quels sont les défis pour les organismes comme le vôtre.
    Je parle d'un hôpital qui a été construit et tout à coup, le titre foncier est devenu un sujet de débat. Le gouvernement haïtien peut vous donner un terrain. Le problème, c'est que le gouvernement haïtien n'est pas propriétaire de ce terrain. On ignore qui en est le propriétaire. Alors, vous entendez des déclarations contradictoires. Vous avez des gens qui arrivent et qui disent: « C'est mon terrain. Vous avez déjà construit cela, mais je suis désolé, ce n'est pas votre terrain. C'est le mien. »
    C'est devenu un obstacle majeur, d'après ce que j'ai entendu à cette conférence. Peut-être que vous, qui construisez des structures en Haïti, voulez nous faire part de votre expérience par rapport aux titres fonciers et aux bâtiments que vous construisez et nous dire si vous devez faire face à des défis semblables. Nous avons posé la question. Nous allons fournir de l'argent, et la communauté internationale, y compris l'Union européenne, va travailler avec le gouvernement haïtien pour essayer de mettre en place un régime foncier. Mais comme vous allez le remarquer dans l'allocution que j'ai prononcée, la gouvernance est devenue le plus gros obstacle à l'application de solutions à long terme, comme l'a dit Bob, pour le travail, pour les emplois et pour la construction de l'économie. Au stade actuel, c'est de la mauvaise gouvernance et l'absence d'institutions, y compris l'absence de régime foncier.
    Parlez-moi de la question du régime foncier. Qu'essayez-vous de faire? Vous bâtissez des structures, mais avez-vous des problèmes?
(1645)
    Oui. Je vous remercie.
    Nous avons constaté la même chose que vous et Richard a donné deux ou trois exemples, cet après-midi. J'entends par là que nous avons rencontré un problème... Je me souviens qu'à Léogâne, où nous cherchions à reloger des gens dans des abris de transition, nous étions très près de la fin — ou de ce que nous pensions être la fin — de nos discussions avec le maire de la municipalité, lorsque le maire de la municipalité voisine nous a dit que le terrain était situé sur son territoire.
    Nous avons trouvé une façon de procéder et je vais laisser Richard en parler davantage. Nous avons validé les choses avec toutes les parties, et les autorités locales ont en quelque sorte approuvé nos conclusions et dit qu'elles seraient respectées. Je répète que des avocats et des notaires haïtiens travaillent pour nous et qu'ils nous aident à valider les choses et à faire comprendre à toutes les parties et aux autorités locales que nous nous fondons sur des bases solides, pour ainsi dire.
    Concernant l'hôpital, nous le reconstruisons là où il se trouve présentement. Nous avons examiné d'autres terrains, mais au ministère, on a décidé que l'hôpital serait reconstruit là où il est situé à l'heure actuelle. Concernant le terrain, je pense qu'il n'y a pas de problème. L'autre terrain est immense et c'est ce qui a refroidi nos ardeurs dès le départ. Nous nous demandions comment installer des abris là où nous ne savions pas qui étaient les propriétaires et où ils se trouvaient. Ils étaient peut-être à Miami, à Saint-Domingue ou ailleurs dans le monde.
    Nous avons élaboré ensemble un système qui permet de reconnaître, grâce aux voisins et aux autorités locales, que telle personne résidait sur tel terrain. Tous reconnaissent, dont le CASEC, l'employé local de la municipalité, que le propriétaire est celui à qui la personne payait le loyer. Le système correspond aux méthodes de toutes les autres sections de la Croix-Rouge, car nous ne voulions pas nous retrouver avec des systèmes de différentes organisations. Nous avons mis nos ressources en commun et nous nous sommes demandé ce qu'il fallait faire pour dire qu'un terrain appartenait à telle personne. Nous avons élaboré un processus. Le document que nous avons remis est, pour certains, la première preuve de propriété qu'ils possèdent.
    Dans une certaine mesure, nous avons créé un système en Haïti.
(1650)
    Le document délivré par ce système aurait-il une valeur juridique si on le contestait en cour? Peut-on se présenter devant les tribunaux en Haïti, qui bien sûr ne sont pas...? Vous savez comment cela fonctionne. Faut-il passer par le système de justice pour contester la légitimité du propriétaire?
    Le problème existe pour les terres dont nous ne nous occupons pas. Le régime foncier est un problème très important, en Haïti. Quatre ou cinq personnes se disputent la même terre. Nous ne pouvons pas résoudre tous les cas. Nous essayons de régler le problème principal: l'installation sans délai d'abris pour la population. Nous essayons d'élaborer un système pour y parvenir.
    Par ailleurs, nous pouvons démonter et déplacer les abris. On ne chasse pas le locataire pour garder ensuite l'abri; le locataire peut partir avec l'abri. Nous encourageons les propriétaires à permettre aux gens de ne payer un loyer que pour l'occupation du terrain. Nous devions élaborer un système; nous ne pouvions pas attendre que le gouvernement s'en charge. Nous devions créer un système qui fonctionnait et qui était acceptable pour la collectivité et les autorités locales. Tout à l'heure, nous avons parlé du temps que la reconstruction et ce genre de choses prennent. La tâche était énorme. On ne peut pas commencer la reconstruction si on ne sait pas... Cela a pris un certain temps.
    Vous ne connaissez pas les propriétaires.
    Merci beaucoup.
    Bob, lisez le discours que je vous ai remis.
    L'hon. Bob Rae: Je le lirai si vous lisez mon livre.
    Des voix: Ah, ah!
    D'accord. Merci.
    La parole va à Mme Deschamps ou à M. Dorion.

[Français]

    Je vais tenter de laisser un petit moment à M. Dorion.
    Madame Johnson, en ce qui a trait à la question du financement, vous avez souligné qu'il était important que l'ACDI demeure un partenaire. En effet, l'ACDI a annoncé, à la suite du séisme, qu'elle donnerait plusieurs millions de dollars.
    Quel genre d'entente en intervention d'urgence ou de projet avez-vous eu avec l'ACDI? Parmi les projets de reconstruction que vous avez soumis, y en a-t-il en attente actuellement?
    Merci de la question.
    La Croix-Rouge canadienne a une relation très efficace avec l'ACDI. Pour les interventions d'urgence en Haïti, on a reçu une subvention de l'ACDI dans les premiers jours, mais j'en oublie le montant. Cette subvention était pour appuyer les interventions de la Croix-Rouge en Haïti. C'était super efficace.
    C'est un système qu'on utilise presque tous les jours, car il y a des urgences et des désastres un peu partout dans le monde, comme M. Ray l'a souligné. En tant que Croix-Rouge, on répond à ces urgences toutes les semaines. L'ACDI nous appuie dans ce type d'interventions.
    Lorsque l'ACDI a annoncé le fonds de contrepartie, on a fait deux demandes pour Haïti, pour les maisons. Les deux demandes totalisaient à peu près 42 millions de dollars. Les dossiers ont été traités très efficacement par l'ACDI. On a signé les ententes en mars de l'an passé et on roule avec ça. On n'a eu aucune difficulté à présenter les projets à l'ACDI. On a eu un bon dialogue avec les collègues de l'agence. La gestion du dossier a été très efficace.
(1655)
    Dans vos projets actuels ou futurs, tels que l'hôpital et les abris, vous avez fait référence à différents partenaires: des universités, des experts, des ingénieurs du Québec. Avez-vous aussi une approche qui inclut la diaspora ici?
    Oui, oui.
    De quelle façon cela se fait-t-il?
    C'est une question intéressante. Même avant le tremblement de terre, on avait une relation avec la diaspora, surtout celle de Montréal. Depuis le tremblement de terre, on a investi beaucoup dans la relation avec la diaspora. On a même engagé des gens de la diaspora pour la délégation en Haïti. On a une sorte d'agent de liaison, quelqu'un qui travaille pour la Croix-Rouge canadienne à Montréal et qui fait la liaison avec la diaspora de Montréal. Son travail est de faire comprendre à la diaspora haïtienne le travail de la Croix-Rouge canadienne, le contexte et les défis qu'elle a.
    Veux-tu ajouter quelque chose?
    Nous travaillons non seulement avec la diaspora haïtienne de Montréal et du Canada, mais aussi avec nos collègues de la Croix-Rouge américaine qui travaillent également sur les relations avec leur diaspora haïtienne à des endroits où il y a de grandes populations haïtiennes, comme Miami ou New York. Eux aussi font beaucoup de liens avec la communauté. Il y a un partage d'information non seulement ici, au Canada, mais aussi entre les communautés dans les autres villes.
    Je tâcherai d'être brève, comme je veux laisser un petit moment à M. Dorion.
    De l'extérieur, on voit beaucoup de gens avec de bonnes intentions, des gens qui se sont regroupés, des gens qui ont fait de petites collectes. On a évoqué la difficulté qu'on a encore à enlever les gravats qui restent en place. Est-ce par manque de main-d'oeuvre ou de machinerie spécialisée?
    Je sais qu'une équipe a formé une trentaine d'Haïtiens qui vivent à Montréal pour qu'ils puissent conduire ce type de machinerie. Toutefois, ils sont encore bloqués ici, parce qu'ils n'ont pas pu trouver la filière qui les amènerait en Haïti pour aider à enlever ces gravats.
    Pour ce qui est d'enlever les gravats, un des grands problèmes consiste à savoir qui est le propriétaire de l'endroit. Qui a la responsabilité d'enlever ces gravats? Est-ce l'État, est-ce l'individu? Cette question n'a pas encore été complètement réglée et on attend la réponse du gouvernement. On ne peut pas simplement aller sur une propriété et commencer à enlever les gravats. C'est donc une grande question que de déterminer à qui revient cette responsabilité.
    Mme Susan Johnson: Et ce qu'on fait de ces gravats, aussi.
    M. Richard Clair: Ça, c'est une autre paire de manches.
    C'est une question de coût, absolument. Qui a la responsabilité de payer pour ça? Alors, ces personnes sont probablement bloquées ici par manque de ressources. Ça coûte cher. Ce n'est pas la main-d'oeuvre qui manque en Haïti, je vous le dis tout de suite. On peut former des gens assez rapidement pour faire du travail assez spécialisé.
    Il y a des questions fondamentales. Vous avez souligné tout à l'heure que ce n'était peut-être pas votre rôle de les traiter. Je trouve que ce serait terrible qu'on ait un exercice comme celui d'aujourd'hui sans les évoquer au moins brièvement. Je parle ici de questions qui sont le fondement même de la misère haïtienne.
    Un des grands problèmes, c'est la déforestation. Quand on survole en avion les pays voisins, on voit qu'ils sont verdoyants. Puis quand on arrive en Haïti, on constate que l'île est chauve. Toutes les forêts ont été brûlées parce que les paysans se servent du bois pour faire la cuisine, entre autres choses. Là-bas, on nous disait que tant que le bois serait meilleur marché que les autres combustibles, comme le gaz propane, ça allait continuer. Quand on plante des arbres, ils sont immédiatement abattus et brûlés par les paysans. Ça veut dire que lorsqu'il pleut, toute la terre s'en va dans la mer, ce qui ruine les possibilités de développement agricole.
    L'autre grand problème est le libre marché. La production des terres haïtiennes par hectare est très faible, par exemple pour la production du riz. On produit beaucoup moins de riz par hectare que dans les fermes américaines. En plus, le riz américain est subventionné, de sorte que les haïtiens ne mangent que du riz américain, lorsqu'ils sont capables d'en acheter, bien sûr.
    Constatant cela, n'avez-vous pas parfois l'impression qu'en Haïti, vous ne faites que mettre des pansements, sans doute nécessaires, sur des plaies purulentes et profondes qu'on ne parvient pas à nettoyer et qui vont toujours continuer à se manifester?
(1700)
    Oui, il faut être franc: parfois ça peut être décourageant. Cependant, à la Croix-Rouge, on est bien habitués aux situations très difficiles. C'est en quoi consiste le travail de la Croix-Rouge.
    Je comprends votre point de vue et je le respecte. Bien sûr, je respecte ce que vous faites, comme je l'ai dit au début. Cela dit, je tenais à souligner ces problèmes parce que ce sont peut-être les vrais problèmes d'Haïti et qu'on n'en parle pas beaucoup.
    Non, je comprends très bien. Ce que je veux dire, c'est qu'en tant qu'organisation humanitaire, nous ne faisons que ce que nous sommes capables de faire. Nous remplissons le mandat de la Croix-Rouge. Nous essayons de faire ce travail de la façon la plus efficace possible dans un contexte que nous ne pouvons pas maîtriser. Nous faisons ce que nous pouvons dans un contexte très difficile. Nous aimerions bien que d'autres acteurs se réunissent pour résoudre des problèmes plus profonds. Toutefois, ce n'est pas le travail de la Croix-Rouge.
    Je comprends ça. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Goldring.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de témoigner aujourd'hui.
    Votre document indique qu'il y a un million de sans-abri. Si les familles comptent cinq personnes, il faut bien sûr construire quelque 200 000 logements. Jusqu'à présent, combien de logements ont été construits par toutes les organisations et combien de logements reste-t-il à construire?
    Je peux vous donner les chiffres concernant la Croix-Rouge. La Croix-Rouge a construit 5 000 des 30 000 logements prévus. Ce qui est difficile, c'est d'estimer les logements selon le genre. Étant donné que certains abris ne sont pas très solides, nous avons du mal à connaître les chiffres réels. Certains logements sont permanents tandis que d'autres ne résisteront pas aux premiers coups de vent.
    Donc, il manque 150 000 ou 170 000 logements.
    Selon le système d'aide humanitaire, il faudrait construire 135 000 logements pour les familles.
    Dans votre document, vous parlez d'un million de sans-abri, que je divise par famille de cinq personnes. Combien d'abris reste-t-il à construire? Il est question de logements solides, pas d'abris faits de plastique et de bois.
    Il y a maintenant 800 000 personnes qui vivent dans des camps à Port-au-Prince. La nouvelle approche, c'est que les gens retournent dans leurs collectivités et leurs quartiers pour voir si leurs logements peuvent être réparés. Je pense que les abris sont plus pratiques dans les régions rurales. À Port-au-Prince, on se rend compte qu'il faut réparer les abris existants au lieu de construire de nouveaux abris.
    À un tel rythme, cela pourrait prendre jusqu'à cinq ans avant que les gens aient un toit sur la tête.
    M. Richard Clair: Tout à fait.
    M. Peter Goldring: Je veux reparler de la gouvernance — qui fait problème selon vos dires —, car j'irais jusqu'à dire que, lorsque je suis allé en Haïti en 2006, avant le tremblement de terre, la situation était catastrophique et qu'on avait accompli très peu de progrès. À l'époque, la gouvernance était un problème grave et il semble que ce l'est toujours.
    Même pour ce qui est des difficultés liées à l'acquisition des terres, la plupart des pays, dont le Canada, vont confisquer, s'approprier ou annexer les terres en temps de crise. J'ai l'impression que la gouvernance est le problème principal qui empêche de régler la question. Compte tenu des besoins, si on libère ou on enregistre les terres une à la fois, le processus n'aura pas de fin. Pour être franc, je dirais que cela peut compliquer le système encore plus. La meilleure méthode, ce serait que le gouvernement s'approprie 1 000 acres et se mette à construire quelque chose. Comme le document l'indique, cela revient à parler de la gouvernance, qui est si faible que le gouvernement ne peut pas employer une telle façon de faire, n'est-ce pas?
    L'ONU intervient dans d'autres circonstances. Le gouvernement peut-il réagir et faire avancer les choses?
(1705)
    Le gouvernement du Canada pourrait en discuter et je suis sûre qu'il en a parlé avec le gouvernement d'Haïti. Je comprends tout à fait ce qui vous amène à penser cela, mais il faut se garder de croire que la solution simple, c'est de trouver de nouvelles terres pour accueillir la population. En effet, les gens sont très déterminés à rester où ils sont, car c'est là qu'ils exercent une activité économique improvisée...
    On pourrait tout de même adopter des mesures législatives pour construire des installations sur les terres occupées.
    ... et c'est là que se trouvent leurs écoles et leurs familles.
    Nous avons connu beaucoup de mauvaises expériences dans nos interventions d'aide internationale et de réinstallation de populations. C'est pourquoi, à la Croix-Rouge, nous sommes favorables à la demande de la population, qui veut que, dans la mesure du possible, les infrastructures soient reconstruites où elles étaient situées. À long terme, les gens et les familles vivront mieux s'ils gardent le même environnement économique, les mêmes moyens de subsistance, etc.
    La réinstallation sur d'autres terres ne répond pas aux besoins des millions d'Haïtiens. À la Croix-Rouge internationale, nous nous sommes engagés à répondre aux besoins de 30 000 familles et nous travaillons très fort pour y arriver. Cependant, 130 000 ou 150 000  familles sont dans le besoin.
    C'est juste, et j'ai beaucoup de mal à me faire à l'idée que, dans cinq ans, des gens habiteront toujours sous des bâches dans des camps de réfugiés, dans l'attente d'un logement permanent. En fait, je ne dirais pas forcément qu'il s'agit d'un logement permanent, je parlerais plutôt d'un logement de transition.
    Ce sont des taudis; nous ne les appelons pas des logements permanents non plus. Nous ne construisons pas de logements permanents, en Haïti.
    Il faut cinq ans pour cela? Cela me dépasse.
    Merci.
    Passons à M. Patry.

[Français]

    Ma première question concerne les camps, surtout dans la région de Port-au-Prince. Je voudrais vous entendre discourir un peu sur la vulnérabilité des femmes et sur les questions de violence.
    Ma deuxième question concerne le gouvernement, comme suite à ce que M. Dorion a dit. Vous avez dit que ça coûtait beaucoup d'argent de retirer les gravats. Cependant, le président n'est-il pas autorisé à aller de l'avant, dans les cas d'urgence comme celui qui nous occupe actuellement? Ne pourrait-t-il pas le faire, ou est-ce qu'il ne veut tout simplement pas le faire?
    Malheureusement, comme je ne connais pas la loi haïtienne, je ne connais pas les responsabilités du président à cet égard. Je ne peux malheureusement pas répondre à cette question.
    Je peux cependant vous dire que plusieurs organisations de la Croix-Rouge travaillent dans les camps en Haïti, que ce soit pour fournir de l'eau, pour veiller à l'assainissement ou pour essayer de trouver des emplois pour les gens. C'est un problème flagrant dans tous les camps en Haïti.
    On essaie de mettre sur pied, avec les bénévoles de la Croix-Rouge haïtienne, des programmes pour déterminer vers quelles autorités les gens peuvent se tourner pour aller chercher de l'aide. La Croix-Rouge n'a pas la capacité de répondre à tous les besoins, mais on peut les orienter vers les gens qui ont les ressources nécessaires et la capacité de le faire, que ce soit pour des questions de santé, par exemple soigner les blessures, ou encore pour des questions sociales.
    C'est un type d'aide qui est sous-financé. De toute évidence, les organisations sont sous-financées en Haïti pour faire ce type de travail.
    J'aimerais connaître votre opinion sur la vulnérabilité des femmes dans les camps. Que faites-vous à cet égard? De quelle façon les gens agissent-ils? La police nationale haïtienne intervient-elle? De quelle façon pouvez-vous essayer de diminuer cette violence faite aux femmes et aux enfants?
    Nous faisons des programmes d'éducation et de protection. Nous pouvons aussi former nos bénévoles qui se rendent dans les camps pour cibler les problèmes de violence. Ils parlent aux autorités locales et aux organisations non gouvernementales pour offrir aide et assistance. Pour l'instant, c'est ce que peuvent faire la Croix-Rouge canadienne et le Mouvement international de la Croix-Rouge.
(1710)
    Tous les ans, il y a des ouragans. Il va en venir d'autres cette année aussi. Êtes-vous préparés pour affronter ces ouragans, compte tenu de la situation actuelle?
    Bien sûr. Nous avons mis en place un plan. Nous avons déjà des stocks répartis à deux ou trois endroits en Haïti. Quand je dis « nous », je parle du Mouvement international de la Croix-Rouge. Avec d'autres sociétés nationales et la fédération, nous avons réparti des stocks en Haïti. Nous faisons aussi la formation des bénévoles de la Croix-Rouge haïtienne. De plus, nous avons renforcé l'équipe régionale, en collaboration avec les collègues des autres sociétés nationales des pays des Caraïbes et de l'Amérique centrale.
    On peut certainement imaginer qu'il y aura encore un ouragan cette année, et le Mouvement international de la Croix-Rouge devra répondre aux besoins de façon rapide et efficace.
    On a aussi formé des équipes dans différentes régions du pays pour s'assurer de faire des évaluations rapides, pour connaître rapidement l'ampleur des dégâts et pouvoir y répondre. On a différents niveaux de réponse, selon l'ampleur du sinistre: cela peut être à l'échelle locale, régionale, nationale ou internationale.
    J'aimerais ajouter que nous travaillons avec la Croix-Rouge haïtienne, qui fait partie du comité de disaster management du pays — je ne sais pas comment dire cela en français.
    C'est la gestion des sinistres du pays.
    C'est souvent le rôle de la Croix-Rouge que d'apporter une partie de la réponse dans un pays. Il faut donc que ce soit organisé avec le gouvernement. En Haïti, il y a une table réunissant toutes les organisations censées être capables de répondre en cas de catastrophe. La Croix-Rouge haïtienne fait partie de cette table en Haïti.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Passons à M. Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre témoignage.
    Monsieur Clair, avez-vous bien dit que deux policiers par semaine étaient la cible de coups de feu?
    Oui.
    Je n'en reviens pas.
    C'est bien sûr un problème important. Ce doit être une grande source de frustration pour vous et les membres de votre organisation qui venez en aide à des pays comme Haïti... Malheureusement, il y a tellement de pays dont vous vous occupez qui ont de graves problèmes d'application de la loi et de maintien de l'ordre.
    Vous avez dit que l'aide humanitaire semblait tendre vers une responsabilisation accrue. Je présume que la Croix-Rouge canadienne et sa contrepartie américaine doivent avant tout s'occuper de l'hémisphère occidental. Je sais que de telles organisations travaillent partout dans le monde, mais les responsables des sociétés de la Croix-Rouge envisagent-ils de désigner celles qui doivent diriger les opérations au Chili, en Haïti ou ailleurs? A-t-on commencé à discuter d'une telle possibilité?
    Nous ne tendons pas vers l'approche que vous décrivez, mais la Croix-Rouge internationale a un système de degré d'intervention fondé sur la proximité et les capacités. Ce serait donc tout à fait naturel.
    Parlons un instant de l'Amérique centrale au lieu d'Haïti. S'il se produit une catastrophe au Nicaragua, il est tout à fait naturel que, si nécessaire, la Croix-Rouge du Costa Rica vienne en aide à la Croix-Rouge du Nicaragua. Nous avons une entente semblable avec la Croix-Rouge américaine...
    Travaillez-vous avec l'ONU pour porter secours aux sinistrés? L'ONU dirige-t-elle...
    Nous nous communiquons l'information et nous coordonnons les opérations avec l'ONU et les principaux organismes d'aide humanitaire. La Fédération internationale, comprise dans la hiérarchie de l'ONU, dirige l'installation des camps de réfugiés en cas de catastrophes naturelles. La coordination est très importante et la collaboration, très étroite.
    J'en parle parce que vous avez dit que ce genre de catastrophes commençait à augmenter. La situation est attribuable à diverses choses, comme la densification rapide des milieux urbains, dont les infrastructures ne peuvent pas résister aux tremblements de terre ou aux ouragans. Avez-vous songé à la possibilité que l'ONU... ?
    Je ne blâme personne, mais il semble simplement y avoir un manque de coordination. Je comprends que les besoins sont énormes et que cela doit être frustrant pour vous, mais coordonnez-vous les efforts pour encourager les gouvernements à dresser les cartes des grandes villes, par exemple? Vous dites qu'un des principaux problèmes, c'est le régime foncier. Vous pourriez donc présenter une demande en ce sens et y joindre le type de mesures d'aide que vous pourriez offrir immédiatement — les soins de santé, etc. — et laisser certaines régions de côté, tant que les autorités n'auraient pas établi les cartes requises. Autrement dit, si le gouvernement ne sait pas qui possède les terres, vous n'allez pas intervenir sur les lieux.
    L'approche peut paraître un peu dure, mais elle vous permettrait d'obtenir plus de résultats si les gens savaient qu'ils ne recevront pas d'aide de ce genre dans les régions où les titres de propriété n'auront pas été établis clairement. Avez-vous tenu des discussions à cet égard?
(1715)
    Pour répondre à une partie de vos commentaires et de votre question, je dirais qu'un très grand nombre de pays accomplissent beaucoup de travail pour analyser le risque et planifier les ressources nécessaires afin d'intervenir efficacement en cas de catastrophe. Par exemple, la plupart des pays disposent d'un mécanisme national pour coordonner la gestion des opérations en cas de catastrophe.
    Qu'en est-il de la propriété des terres, par exemple? Cela semble être...
    J'imagine que nous allons nous améliorer. C'est affreux de dire une chose pareille, mais plus il y a de catastrophes — vous avez dit que les ouragans étaient plus nombreux qu'auparavant —, plus nous devons intervenir. Lorsque vous aurez terminé votre travail en Haïti — ce n'est pas demain la veille, mais vous avez aussi été assez présents au Chili, par exemple —, vous pourriez vous demander ce qui a fonctionné et ce qui a vraiment posé problème, puis essayer de trouver des solutions afin d'être prêts si la situation se répète. Vous pourriez ensuite prévenir les pays qu'ils doivent mettre en place ces solutions, sans quoi ils n'auront pas droit au secours en cas de catastrophe.
    Je ne serais pas prête à dire que la Croix-Rouge internationale défendrait une telle position.
    Si la fréquence des catastrophes augmente et que vous vous retrouviez avec une catastrophe semblable à celle qui est survenue en Haïti, vous seriez plutôt à court de ressources étant donné tous les efforts déployés dans ce pays. Si c'est ce qui arrive, vous devrez peut-être le faire. Je me demande juste si vous en avez discuté.
    Nous devons bel et bien nous soucier d'avoir les ressources nécessaires pour intervenir. Le séisme au Chili est survenu six ou sept semaines après celui en Haïti. Même si la destruction et les pertes de vie n'étaient pas aussi importantes qu'en Haïti, la Croix-Rouge internationale a dû intervenir. Nous avons réussi à réunir une équipe d'intervention ainsi que les ressources nécessaires. Par contre, je crois que l'intensification de catastrophes signifie simplement que nous devons redoubler d'efforts pour augmenter notre capacité afin d'avoir en réserve les outils nécessaires pour intervenir en pareille situation.
    Plus tôt, j'essayais de dire qu'en cas de grande catastrophe où des familles ou une collectivité ont besoin d'aide, la Croix-Rouge sera là si elle a les ressources, même financières, pour intervenir auprès de ces gens. Quand des gens ont besoin de l'aide de la Croix-Rouge, peu nous importe si le système devrait fonctionner différemment ou non.
    Je vous suggère simplement d'y penser.
    J'aimerais vous poser une autre question. J'ai examiné la liste des pays donateurs et je constate que les États-Unis sont évidemment toujours arrivés premiers, et que nous y figurons également. Je sais que les particuliers aimeraient savoir d'où... Je dirais que la plupart des fonds proviennent de l'Amérique du Nord, surtout des États-Unis, de l'Union européenne, de la Chine, du Japon, puis du Canada. Encouragez-vous les pays — j'aimerais utiliser un verbe un peu plus fort qu'encourager, mais je vais m'en tenir là — comme l'Arabie saoudite, un pays incroyablement riche qui a réussi à associer son symbole à celui de la Croix-Rouge...? Je ne veux pas seulement m'en prendre aux Saoudiens. D'ici 2020, l'économie de la Chine sera probablement plus importante que celle des États-Unis, paraît-il. Encouragez-vous les pays du genre à emboîter le pas aux autres pays et à faire un effort?
    Tout à fait. La Croix Rouge et le Croissant-Rouge réalisent une série de projets très intéressants partout sur la planète. Les Sociétés du Croissant-Rouge — les États du golfe Persique, le Moyen-Orient — sont de plus en plus présentes en matière d'aide internationale, et nous essayons véritablement de développer une coordination efficace avec eux.
    Par exemple, la Croix-Rouge du Canada s'est depuis longtemps associée à celle de la Chine; nous aidons actuellement le pays à devenir un donateur de plus en plus efficace en cas de catastrophes survenant ailleurs que sur son territoire, comme en Afrique...
(1720)
    La Chine prend-elle des mesures en ce sens?
    Oui, tout à fait.
    M. Rae a posé des questions sur les avantages économiques dont bénéficient les autres pays. Qu'en est-il du Canada? Vous avez évidemment beaucoup de structures à construire. Lorsque vous aurez pris de l'expérience, pourriez-vous demander à des entreprises canadiennes de créer ce dont vous avez besoin, plutôt que de procéder par appel d'offres? Vous pourriez faire appel à des entreprises canadiennes en cas de problèmes. Avez-vous des exemples de réussite? Le faites-vous actuellement? Pourriez-vous nous en parler?
    Nous travaillons non seulement avec les entreprises canadiennes, mais aussi avec les chercheurs canadiens et les centres d'études et de recherches. Après une expérience comme celle d'Haïti, nous ne manquons pas de faire le point sur les leçons apprises. Nous examinons la situation et... Dans le cas des abris, nous collaborons avec les centres d'études et de recherches et les organismes de recherches, comme je l'ai dit, afin de déterminer les modèles et les infrastructures qui pourraient servir dans des circonstances différentes, les matériaux qui devront être disponibles de même que les éléments culturels qui conviennent à différents environnements. Il serait peut-être souhaitable de préparer le terrain aux investissements en prenant contact avec des organismes du secteur privé du Canada et d'ailleurs.
    Mais c'est encore tôt. Pour l'instant, la norme de la Croix-Rouge est de procéder à un appel d'offres concurrentiel pour tout contrat de taille.
    Dans le cas des abris, la soumission retenue provenait du Québec. L'appel d'offres était ouvert à tout le Canada, et c'est Laprise, une entreprise située à Montmagny, qui l'a remporté. C'est elle qui construit...
    Les gens de l'industrie forestière sont plutôt contents.
    Oui. Elle fabrique des maisons préfabriquées.
    Très bien.
    Nous allons maintenant devoir mettre fin à la séance.
    Monsieur Lunney, avez-vous une courte question avant que je lève la séance?
    Merci beaucoup.
    Cette discussion est fascinante: 1 200 abris temporaires ont déjà été construits, ce qui est bien mieux qu'avant, et il y en aura 7 500 de plus. Étant donné les difficultés entourant la propriété des terres, je pense que ce travail est très louable.
    Lorsque vous mettez au point ces abris temporaires, comment envisagez-vous le lien avec les services essentiels, comme le système sanitaire, l'eau potable, les soins médicaux de base, les services d'éducation pour la collectivité, et ainsi de suite — ou bien, en tenez-vous compte? Comment évaluez-vous ces éléments lorsque vous planifiez les installations d'hébergement temporaire?
    Tout à fait, ces éléments sont fondamentaux; c'est un peu pour cela que je disais tout à l'heure que nous aidons essentiellement les gens à reconstruire là où ils vivaient auparavant, dans la mesure où des services comme une clinique de soins de santé ou une école pour les enfants sont à proximité. Toutefois, si l'on prend l'exemple de la région de Jacmel, où sera implanté le programme de santé intégré dont je parlais, nous allons construire des cliniques là où il n'y en avait pas auparavant. Nous faisons donc de notre mieux pour que l'infrastructure soit un peu plus solide.
    Toutefois, nous ne nous occupons pas de l'eau, du système sanitaire et des moyens de subsistance. Comme Richard l'a expliqué plus tôt, nous prenons soin de l'hébergement, mais c'est notre partenaire, la Croix-Rouge néerlandaise, qui fournit les fosses d'aisance et qui veille à ce que tous ceux qui bénéficient du programme d'hébergement aient accès à de l'eau potable. Nous avons décidé d'instaurer ce partenariat lorsque nous nous sommes rendu compte que ces éléments sont essentiels. De plus, les Croix-Rouges espagnole et britannique soutiennent des projets ayant trait aux moyens de subsistance pour que les gens puissent s'adonner à des activités économiques à petite échelle et ainsi se remettre sur pied.
    Nous sommes conscients qu'il faut un ensemble de mesures intégrées pour véritablement aider les gens à reprendre leur vie en main là où ils se trouvent et là où ils veulent s'établir à long terme.
    Merci beaucoup.
    Madame Brown.
    Merci, monsieur le président. Je suis consciente que j'empiète sur le temps des autres. J'ai noté quelque chose.
    Monsieur Clair, vous avez dit plus tôt que lorsqu'un abri est cédé à des habitants, les droits d'occupation appartiennent autant à l'homme qu'à la femme, même s'ils ne sont pas mariés, et l'un des...
    Non, les droits d'occupation appartiennent à la femme si le couple n'est pas marié.
    D'accord. Nous parlions à ce moment de la violence envers les femmes en particulier. Quels sont les résultats du projet? Constatez-vous une diminution de la violence envers les femmes? Dans l'affirmative, qui surveille la situation pour que nous puissions obtenir l'information?
    Ma deuxième question est la suivante: les occupants peuvent-ils utiliser les abris comme garantie pour obtenir du capital ou du crédit en vue de démarrer une entreprise?
    En réponse à la première question, nous ne surveillons pas la violence dans les collectivités. Des personnes sont actives au sein de la collectivité, et nous sommes sur place avec toute une liste de questions. Il s'agit d'un des autres programmes que nous voulons mettre en place pour pallier les problèmes de protection et de violence des collectivités, mais il est encore tôt pour parler de résultats.
    Ensuite, il n'existe pas vraiment de système pour ceux qui gagnent moins de 2 $ par jour et qui veulent que leur abri soit affecté en garantie. Je n'ai encore rien vu de tel. Les gens ne sont pas propriétaires, et je ne crois pas que le système bancaire repose sur des bases bien solides. Deux ou trois caisses populaires sont en train de voir le jour, mais les prêts aux entreprises s'appuient bien souvent sur un titre de propriété. Tant que la situation perdurera, il sera très difficile d'affecter un abri en garantie.
(1725)
    Sera-t-il possible de le faire plus tard?
    Ce n'est pas la Croix-Rouge qui décide, mais bien les gens sur place.
    En fait, il existe à Haïti une panoplie d'organismes de développement économique pour les petites entreprises, et sans tenir compte du séisme, il y a aussi une économie parallèle assez dynamique et une petite économie fondée sur les échanges commerciaux, comme je l'ai dit plus tôt. Il y a des organismes dont le travail ressemble un peu à celui de la Grameen Bank. Je ne crois pas que cette banque soit en Haïti, mais des organismes similaires accordent du microcrédit. Je vous rappelle que notre travail n'est pas lié à ces organismes, mais je connais leur existence.
    D'accord. Merci beaucoup.
    J'aimerais remercier nos témoins. Je crois que nous avons très bien fait de vous recevoir en premier afin de jeter les bases de notre étude sur Haïti.
    Chers membres du comité, j'aimerais vous mettre au courant de quelques éléments. Tout d'abord, nous avons demandé aux ministres Oda et Cannon de venir comparaître. Le ministre Cannon n'est pas disponible avant le 22 mars, et il est possible que la ministre Oda puisse venir le lundi 21 mars.
    Ensuite, Scott Reid voulait comparaître devant le Sous-comité des droits internationaux de la personne à propos de deux ou trois mesures prises par son ministère. Il comparaîtra mercredi.
    En troisième lieu, je voulais vous mentionner que M. Dewar a demandé que nous recevions René Magloire. Nous voulons nous assurer de lui trouver une place; il sera ici le lundi 7 mars. Nous lui réserverons la dernière demi-heure de la séance, car nous recevons des fonctionnaires en première partie.
    Enfin, je voulais vous informer que M. Elsadig Almagly, l'ambassadeur actuel du Soudan au Canada, a demandé de rencontrer le comité afin de discuter de la période post-référendaire. Je crois que ce n'est probablement pas une mauvaise idée d'essayer de lui réserver du temps aussi.
    Nous allons essayer de planifier tout cela; je voulais simplement vous en aviser. C'est bien?
    Monsieur le président, j'aimerais répéter que nous n'avons pas eu la chance de recevoir les ministres lors du dernier budget des dépenses. Bien sûr, le rôle premier du comité est d'entendre les ministres au moment du budget des dépenses. J'espère qu'au moins l'un d'entre eux viendra comparaître. Vous dites que Mme Oda pourrait venir le 21...
    C'est la possibilité dont je vous fais rapport. Je vous informe seulement que nous leur avons demandé...
    Veuillez leur rappeler, au nom de mes collègues, qu'ils ne se sont pas présentés devant le comité pour le budget des dépenses, alors que cela fait partie de leurs obligations, tout comme nous avons l'obligation de...
    Très bien; je voulais juste vous aviser...
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, merci beaucoup d'être venus aujourd'hui.
    La séance est levée.
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