:
Monsieur le président, je vous remercie, vous et les membres du Comité, de me donner l'occasion de me présenter devant vous aujourd'hui, d'autant plus que vous entamez ici un travail extrêmement important pour les Canadiens.
[Traduction]
Je dois vous féliciter de siéger durant l'été. Je sais à quel point votre travail de député est exigeant. C'est une chose pour laquelle j'ai toujours eu le plus grand respect. Je sais quels sacrifices vous faites.
Je suis également ravi d'avoir rencontré un certain nombre d'entre vous, mais je veux mentionner M. Christopherson et M. Reid. Nous avons fait beaucoup de travail ensemble à l'autre comité, celui de la procédure et des affaires de la Chambre, alors voilà la réponse à la question: « quand allons-nous nous revoir, tous les trois? »
Hier, j'ai entendu M. Kenney parler de la force du Canada, des valeurs fondamentales des Canadiens et de la force de nos institutions. Cela comprend un Parlement qui fonctionne et une opposition loyale bien financée; un système judiciaire indépendant, qu'incarnent notre cour suprême et les autres systèmes judiciaires; le vérificateur général; le directeur général des élections, pour être franc; la liberté de presse; et les partis politiques. J'y attribue de l'importance; cela fait partie de la liberté de réunion et de la liberté d'expression.
La société civile — le droit de nous organiser comme nous le souhaitons devant les tribunaux, avec des objectifs juridiques — est aussi un complément nécessaire de nos valeurs canadiennes.
J'ai également entendu le président Obama dire que le monde a besoin de plus de Canada. Grâce à la qualité de notre démocratie, nous nous classons au plus haut niveau, aux côtés d'une très petite poignée d'autres pays.
Je suis d'accord avec M. Kenney et le président Obama.
En raison de notre réputation internationale et de la qualité de nos processus électoraux, à Élections Canada, comme nous avons été invités à le faire, nous avons visité ou accueilli une myriade de délégations de partout dans le monde. Je n'arrive pas à me rappeler si c'était 80 ou 100. Nous avons rencontré les représentants de divers pays, qui sont venus à nous ou nous ont invités en raison de la qualité de notre démocratie et de nos processus électoraux.
Il reste qu'un certain nombre de questions sont soulevées aujourd'hui dans notre société au sujet du rôle et de la nomination des sénateurs, du fonctionnement des comités parlementaires, de l'autorité du premier ministre et de notre système électoral. La force même de notre démocratie tient à notre capacité de remettre en question son fonctionnement et de chercher des façons de toujours l'améliorer. Cette capacité est au cœur de la qualité de notre démocratie.
Cela m'amène à la raison pour laquelle nous sommes là. Nous nous sommes donné — nous le prétendons — un système de démocratie représentative parce que nous n'avons pas encore trouvé de moyen de nous gouverner en obtenant la participation de l'électorat sur toutes les questions sociétales, toutes les décisions sociétales. Nous n'avons pas encore trouvé le moyen d'établir la démocratie directe, plutôt que la démocratie représentative.
Depuis la confédération, les deux principaux partis nous ont bien servi et ont été bien servis par notre système de représentation uninominal majoritaire à un tour. Les troisièmes parties, comme je les appelle, ne sont pas troisièmes au sens de la Loi électorale; les autres partis existent ou sont permis depuis le tout début. Ils n'ont jamais été interdits, et nous pouvions accepter les résultats des élections parce que ces partis n'obtenaient pas beaucoup de soutien électoral. Nous pouvions nous dire: « eh bien, ce parti a obtenu 52 % des votes, 60 % des circonscriptions; cela ne pose pas de problème, puisqu'il a obtenu 52 % du vote. »
Toutefois, depuis un certain temps, maintenant, les troisièmes partis connaissent un bien plus grand succès et sont effectivement devenus victimes de leur propre succès en permettant diverses façons de s'exprimer, au-delà de ce que j'ai appelé les deux principaux partis historiques.
La conscience des Canadiens — et je parle d'un grand nombre d'organisations civiles, comme le Mouvement pour la représentation équitable au Canada et d'autres que j'ai eu le plaisir de rencontrer — concernant les « distorsions » des résultats comparativement à la volonté exprimée par les Canadiens s'accroît au fil du temps. Le ministre, le monde universitaire et les médias ont tous donné des exemples. Je n'ai pas l'intention de les répéter et de faire perdre du temps au Comité, puisqu'ils ont comparu hier. Fondamentalement, le problème des 40 % des votes obtenant 60 % des circonscriptions a commencé à soulever des questions chez les Canadiens.
L'autre distorsion tient au fait que, selon notre système, il peut falloir 700 000 votes pour obtenir une circonscription ou, dans un autre cas, il peut en falloir 30 000, si on est dans le parti au pouvoir, pour obtenir une circonscription. Un député, 30 000 votes; un député, 700 000 votes. Voilà le type de disproportions qui commencent à soulever des questions. Nous devons une explication à de plus en plus de gens, et nous leur devons de leur donner la possibilité de se pencher sur ce que nous pourrions faire autrement ou mieux.
Les autres systèmes de représentation ont été mis à l'essai, et chacun présente ses forces et ses faiblesses, selon la vision de chacun. En passant, il n'y a même pas de consensus quant à la force d'un système, mais on s'entendra généralement sur les forces en général. Je recommanderais au Comité de pondérer les divers systèmes qui lui seront présentés et de déterminer les trois ou quatre principaux avantages et désavantages sur lesquels il faudra se concentrer. Si vous tentez de vous concentrer sur le 15e facteur, vous allez vous retrouver à consacrer beaucoup de temps à ce qui sera un travail démesurément inutile.
Un certain nombre de critères ou de facteurs ont été mis de l'avant afin d'éclairer les Canadiens. Comme l'a dit le ministre, on ne peut pas les élargir. Je voudrais vous en soumettre plusieurs afin que vous les étudiiez.
Le premier est ce que j'appellerais la simplicité relative du système ou du bulletin de vote que nous remplacerions, si nous remplaçons le système actuel. En passant, rien ne sera considéré comme étant aussi simple que le système actuel, car nous l'utilisons depuis 149 ans. Peu m'importe ce que vous proposez. Ce système fait partie intégrante de notre culture. Il fait partie de l'ADN du fait d'être Canadien et d'être né au Canada.
La vraie question tient au fait que l'électeur doit comprendre le choix qu'il fait. Par quoi mon vote se traduit-il dans notre système de représentation? Les Canadiens doivent comprendre cela. En même temps, ils doivent comprendre comment ce vote se traduit par l'établissement d'un gouvernement et d'un Parlement qui fonctionne. C'est au cœur de la question.
La deuxième, c'est le rapport, le lien, entre l'électeur et la personne élue, en ce qui concerne la représentation des électeurs, collectivement et individuellement, et la responsabilisation des représentants élus. Voilà les deux facteurs qui, à mon avis, coexistent et se rattachent à ce lien entre l'électeur et la personne élue. Les Canadiens sont très habitués à ce rapport, à ce lien. Il doit être pondéré très attentivement s'il doit y avoir un changement.
Le troisième facteur que je voulais soulever, c'est la tendance à renforcer ou à favoriser la représentation à l'échelle du pays tout entier au sein des partis politiques, ou le besoin de le faire. Je parle des partis nationaux dont l'orientation est large et qui ont des représentants partout au pays. Autrement dit, leur caucus comprend des représentants de l'ensemble du territoire, et aucun bloc du pays n'est manquant ou sous-représenté de façon importante. Je pense que c'est essentiel pour un caucus. Je ne suis pas certain que nous ayons toujours obtenu cela. Nous n'avons peut-être même pas cette représentation aujourd'hui. Bien entendu, le même principe s'applique au Cabinet, mais je mettrais davantage l'accent sur le caucus, car je sais ce qui arrive au sein d'un caucus, et c'est essentiel à notre système de gouvernement représentatif.
Un corollaire de cette situation serait de tenter d'éviter la concurrence intrapartite entre candidats au moment des élections. Si des candidats d'un même parti se disputent la même circonscription et qu'ils sont en concurrence les uns avec les autres, je pense que cela affecte l'unité du parti, cet aspect devrait être pondéré très attentivement.
Le quatrième facteur, c'est la capacité d'obtenir la parité entre les hommes et les femmes. J'ai entendu toutes vos conversations, en passant, celles d'hier et d'aujourd'hui. J'étais rivé à mon poste de télévision. Que puis-je dire?
Des voix: Oh, oh!
M. Jean-Pierre Kingsley: Je ne pouvais pas m'en éloigner; vous étiez tellement fascinants. C'est important.
Le cinquième tient au fait que la réalité canadienne doit se refléter dans le système de représentation. Je veux dire par là que nous devons simplement tenir compte du fait que nous sommes 36 millions dans le deuxième pays du monde du point de vue de l'étendue géographique. Nombre de nos régions sont peu peuplées, de fait, il s'agit de la majeure partie des régions du pays —; pourtant, nous sommes très urbanisés, compte tenu de notre population. Il faudra faire preuve d'ingéniosité et de compromis. Autrement dit, nous pourrions devoir emprunter un système pour une partie et un autre pour une autre partie. Rien ne nous empêche d'envisager cette possibilité.
Les Canadiens doivent pouvoir se reconnaître dans leurs représentants et dans le système au moyen duquel ils les choisissent. Voilà ce que je veux dire par « doit refléter la réalité canadienne ». Il s'agit de l'objectif que nous visons. C'est pourquoi je parle de la parité entre les hommes et les femmes. Le corollaire du droit de vote constitutionnel, c'est la représentation effective. C'est bien d'avoir le droit de voter — article 3 de la Charte —, mais cela doit vouloir dire quelque chose. Il doit s'agir d'une représentation effective, et la Cour suprême a utilisé cette expression en mentionnant notre droit à une « représentation effective ».
J'ai quelques mots à dire au sujet du scrutin obligatoire. Tout d'abord, le scrutin obligatoire est une appellation erronée, ou, du moins, on devrait en faire une appellation erronée. Aucun système ne devrait être envisagé, selon lequel les électeurs doivent faire leur choix parmi des candidats seulement. C'est impensable. Il doit y avoir le droit d'avoir le choix au moment de cocher le bulletin de vote. « Je ne souhaite pas voter » devrait faire partie des choix, d'accord? De cette manière, il y aurait non plus de scrutin obligatoire, mais plutôt une présence obligatoire aux bulletins de vote. Vous avez le libre choix. Si vous n'aimez aucun des candidats, vous n'avez même pas besoin de le dire. Si vous n'êtes pas au courant des enjeux, vous n'avez pas besoin de l'être, et vous pouvez simplement dire: « je ne souhaite pas voter », ou quelque chose du genre.
Certaines personnes considéreront cela — et j'entends déjà les arguments, car il s'agit d'une considération chargée de valeurs — comme étant opposées au droit fondamental de la personne de ne pas participer. On ne peut que se demander quel débat aurait lieu eu Australie, si la présence obligatoire aux bureaux de vote faisait l'objet d'un débat dans ce pays et qu'on voulait passer au système que nous avons. Je ne peux que supposer que le débat porterait principalement sur l'obligation civile de s'acquitter de son devoir de citoyen. J'entends d'ici les Australiens en discuter: « pourquoi voulons-nous abandonner notre système? Actuellement, les citoyens de notre système ont l'obligation de nous faire savoir ce qu'ils pensent, et tout cela fait partie de... » Ce n'est pas le cas.
Là où je veux en venir, c'est qu'au Canada et en Australie, il ne s'agit pas de la valeur fondamentale de notre système. Nous devons répondre à la question de ce qui correspond le mieux au tempérament des Canadiens et du degré de participation électoral minimal qui confère une certaine légitimité à nos représentants élus et à notre gouvernement.
La légitimité est liée à la participation; elle n'est pas liée à la légalité. Bien entendu, la légalité est subsumée. Elle est présumée. Sans légalité, il n'y a pas de légitimité. Toutefois, même si on a la légalité et qu'on dispose des meilleurs processus, à quel stade disons-nous: « Pfft, nous avons basculé. Il y a un doute au sujet de la légitimité de ce gouvernement en ce qui a trait à la participation. »
Que pouvons-nous faire d'autre à propos de la participation?
Le vote en ligne arrive rapidement. Cette lumière au bout du tunnel est un train. La manière et la vitesse de sa mise en œuvre sont cruciales. L'analogie avec les achats et les services bancaires en ligne — et j'ai entendu les arguments formulés ce matin — est boiteuse. L'argument est boiteux, et Marc Mayrand a répondu à cette question. Les banques et les autres institutions couvrent le risque et elles font en sorte qu'il échappe, du moins la plupart du temps, à la responsabilité de la personne. Une marge d'erreur est acceptable, par rapport à laquelle elles réussissent à se protéger du risque, mais quelle marge d'erreur est acceptable pour nous, en ce qui concerne le système électoral?
Le vote en ligne devrait être envisagé dès le départ — et je répète ce que Marc a déclaré ce matin — pour les électeurs à mobilité réduite. J'ajouterai un groupe: les Canadiens qui ne sont pas dans leur circonscription. Peut-être qu'un jour, nous aurons le vote dans la circonscription, au lieu d'être lié à un bureau de vote — cela devrait venir, et attendons de voir ce que Marc aura à dire à ce sujet —, mais, d'un bout à l'autre du pays, si vous n'êtes pas dans votre circonscription, vous devriez tout de même pouvoir voter, et ça serait une façon de le faire.
Pour les Canadiens à l'étranger, une affaire juridique est encore devant les tribunaux afin de déterminer si cela s'applique de façon universelle aux Canadiens ou à ceux qui sont partis depuis moins de cinq ans.
La question que nous devons nous poser est la suivante: au moment où nous allons commencer à l'instaurer, quelles seront les exigences en matière d'identification? Quand je voudrai m'inscrire, qu'est-ce que je vais devoir présenter? Est-ce mon permis de conduire, mes empreintes digitales — le Mexique exige les empreintes digitales, les dix —, une photographie de mon iris gauche? Ensuite, comment vérifions-nous cette preuve d'identité au moment où les gens votent? Qu'aurons-nous établi au centre?
Alors, ce qui est requis au début, c'est une question au sujet de la sécurité du vote. L'autre, c'est la sécurité liée à la transmission du vote, puis à la transmission des résultats. À ce sujet, je vais suggérer que nous envisagions de doubler les systèmes et d'établir des systèmes distincts qui nous permettront de contrôler ces preuves d'identité.
J'ai peut-être complètement tort. Peut-être qu'une nouvelle technologie sera inventée, mais, pour l'instant, je pense qu'il s'agirait d'une façon d'instaurer le vote électronique. Nous allons finir par le voir instaurer. Les gens d'un certain âge ont moins tendance à vivre leur vie suspendus à leurs gadgets, mais il y a maintenant plusieurs générations qui le font. Un de ces jours, ces personnes vont être âgées, et elles vont dire: « comment se fait-il que je ne puisse pas voter au moyen de cet appareil? Il s'agit du seul moyen que j'utilise pour interagir. »
Voilà les commentaires que je voulais formuler. Encore une fois, je suis reconnaissant d'en avoir eu la possibilité.
Monsieur Kingsley, je vous remercie de votre présence. Vous avez raison de dire que nous nous connaissons depuis longtemps. Je ne veux pas que les autres membres du Comité se fassent des idées, mais je vous connais en fait depuis plus longtemps que je connais mon épouse.
Des voix: Oh, oh!
M. Scott Reid: J'ai toujours respecté la profondeur que vous apportiez au rôle lorsque vous étiez directeur général des élections ainsi que la façon dont vous avez contribué au débat national sur divers aspects de la démocratie depuis cette époque.
Je voulais commencer par vous poser une question au sujet d'une citation que vous avez faite dans le cadre d'une entrevue, le 5 juin. Elle concernait la Loi référendaire. Je vais commencer par citer cette loi, puis je vais revenir à votre citation.
Le paragraphe 3(1) de la Loi référendaire est ainsi libellé: « Le gouverneur en conseil, s’il estime que l’intérêt public justifie la consultation du corps électoral canadien par voie référendaire sur une question relative à la Constitution du Canada, peut, par proclamation, la lui soumettre lors d’un référendum tenu dans l’ensemble du pays ». C'est la fin de la citation.
Le 5 juin, à l'émission The West Block de CTV, vous avez formulé des commentaires qui, selon moi, ont été mal interprétés dans certains des médias. Vous avez dit, et je vous cite, encore une fois: « il faudrait apporter des changements importants à la loi » pour qu'il puisse y avoir un référendum sur la réforme électorale, « et la considération primordiale est la suivante: au Canada, on ne peut tenir un référendum que sur une question constitutionnelle, mais la modification du système électoral n'est pas une question constitutionnelle. »
Ensuite, enfin, simplement en guise d'exemple représentatif, je vois une couverture médiatique comme celle-ci — je cite encore d'un reportage — selon laquelle de nombreuses personnes « se demandaient si les conservateurs dans l'opposition n'avaient pas omis de lire le règlement avant de réclamer à grands cris un vote national sur la réforme électorale. »
Cette couverture médiatique était fondée sur leur compréhension de vos commentaires, mais je pense que l'auteur et d'autres personnes ont mal interprété ce que vous disiez. Corrigez-moi si je me trompe, mais je pense que ce que vous disiez, c'était simplement qu'afin que l'on puisse tenir un référendum sur une question non constitutionnelle comme la réforme électorale, il faudrait modifier la Loi référendaire et permettre à d'autres questions non constitutionnelles d'être posées. Mon interprétation est-elle exacte?
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Eh bien, vous avez raison à ce chapitre. En fait, quand vous vous dites que cela n'a pas... J'ai toujours été en faveur d'un référendum, et votre commentaire me donne l'occasion de dire quelque chose qu'il est important de dire, je crois.
En Colombie-Britannique, vous avez raison, 57 % des gens ont voté en faveur, et c'est une majorité. Ils n'ont pas pu l'emporter parce qu'un seuil artificiel de 60 % avait été établi, et cela leur a nui. Je suis contre les seuils artificiellement élevés, mais en outre, le taux de participation à ce référendum a été de plus de 60 %. Il est absurde de dire que les gens ne participent pas à un référendum qui concerne la réforme électorale, puisque c'est faux, tout simplement. En Nouvelle-Zélande, plus de 80 % des électeurs se sont exprimés à l'occasion d'un référendum visant à remplacer par le système uninominal majoritaire à un tour le système mixte avec compensation proportionnelle.
J'ai remarqué et j'aimerais le faire remarquer à tous les membres du comité que, lorsqu'un modèle n'est soutenu que par un très faible pourcentage, par exemple le modèle de l'Ontario, en 2007, qui avait obtenu un appui d'environ 35 %, le taux de participation, normalement, est lui aussi très faible. Je crois pouvoir affirmer sans me tromper que les gens qui n'ont pas voté avaient adopté le raisonnement suivant: « Je ne vais même pas prendre la peine d'aller voter, ce modèle ne m'intéresse absolument pas. » Si les gens trouvent un modèle intéressant, ils vont non seulement aller voter pour ce modèle, ils vont aussi être très nombreux à aller voter. Je crois qu'il est très important de faire cette distinction, que j'aurais aimé signaler à la ministre, hier.
Il me reste une minute, et j'aimerais vous poser une question. Vous avez dit qu'il serait possible d'éviter le redécoupage en regroupant un certain nombre de circonscriptions existantes. Cela est plein de bon sens, évidemment, si l'on cherche à accélérer les choses. J'aimerais vous poser la question que mon collègue a posée à M. Mayrand, plus tôt. Il y a une communauté d'intérêts particulière, qui semble pouvoir légitimement conserver les limites de ses circonscriptions, mais cela pourrait donner lieu à des litiges, et je parle des minorités de langue officielle en situation minoritaire.
Quand le cas s'est présenté, à Acadie—Bathurst, un certain nombre de gens, y compris le député en place, ont dit qu'ils trouvaient que le changement des limites était inacceptable. J'imagine que ce qui me préoccupe, c'est ceci: si nous essayions de fusionner des circonscriptions, risquerions-nous de soulever ce type de litiges, ce qui ralentirait le processus?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais revenir aux commentaires que Mme Romanado a faits en réponse à mes commentaires, en disant que nous représentons tous nos électeurs.
Oui, nous le tenons en quelque sorte pour acquis. Il ne fait absolument aucun doute dans mon esprit que, si un néodémocrate reconnu téléphonait à M. Reid — je le prends en exemple car il est le plus ancien député siégeant à notre Comité —, il recevra un service extraordinaire. Il sera traité de la même façon que son voisin le serait. Je n'ai aucun doute à ce propos. Si un conservateur reconnu téléphonait à mon bureau et qu'il estimait ne pas avoir reçu un service aussi extraordinaire, j'en mourrais de honte.
Mais ce dont je parle, c'est de quelque chose de beaucoup plus important, c'est-à-dire la division réelle du pouvoir. Vous ne pourrez jamais être réélu si vous ne représentez pas tout le monde. Ce dont nous parlons, c'est de ceci: c'est ici que le pouvoir s'exerce, au Canada, mais comment est-il réparti?
Je me suis levé, pendant la 38e, la 39e et la 40e législature, je crois, avant l'arrivée de Mme May — elle sait où je veux en venir —, je me suis levé pour dire que des centaines, voire des milliers de gens ont voté pour les verts, dans ma circonscription et dans toutes les régions du pays. À ce moment-là, cela représentait environ 500 000 personnes, et pourtant aucun député de la Chambre ne représentait le Parti vert.
Cela a son importance. M. Reid fait certes un excellent travail pour représenter des électeurs qui ont un problème à titre d'anciens combattants, un problème avec Revenu Canada ou avec l'assurance-emploi, mais il ne sera plus là pour ses électeurs lorsqu'il sera temps de se lever et de déclarer: « Je veux une représentation proportionnelle. » À l'inverse, dans ma circonscription, le même électeur conservateur aura droit au même service de ma part, dans tous ces dossiers, mais lorsque je me lèverai, ce ne sera pas pour défendre le système uninominal majoritaire à un tour.
Nous venons de voter sur l'aide médicale à mourir. Ce dossier a véritablement été une source de division. Il est impossible de voter dans les deux sens. Au bout du compte, c'est la personne qui a remporté ses élections qui vote, et elle peut être pour ou contre. Elle ne peut pas défendre les deux choix.
Voilà pourquoi j'ai dit que 43 % de la population de ma circonscription... Ils ont droit, j'aime à le croire, à un bon service. J'en suis à mon cinquième mandat, ils sont donc assez nombreux à le penser, sinon je ne serais pas ici, mais, quant à refléter les politiques des partis auxquels appartiennent les électeurs qui n'ont pas voté pour moi, leur voix ne compte pas. Je vais réclamer jusqu'à la fin des temps que l'on double le montant des prestations du RPC, jusqu'à ce que j'aie gain de cause. M. Reid ne ferait pas cela. Il n'a pas la même opinion à ce sujet.