Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui. Je vais faire quelques remarques, mais mon collègue Richard Clair en fera aussi.
La Croix-Rouge canadienne est toujours heureuse de pouvoir s'adresser aux parlementaires, tant sur les questions nationales qu'internationales.
[Français]
Je vais faire mes remarques en anglais. Cependant, si les membres du comité posent des questions en français, je pourrai y répondre en français. Ma présentation comportera quelques mots en français, mais je parlerai surtout en anglais.
[Traduction]
Nous témoignons au nom de notre secrétaire général Conrad Sauvé qui, au nom de la Fédération internationale de la Croix-Rouge, assiste aujourd'hui en Haïti à une réunion de la commission provisoire pour la reconstruction.
Notre exposé préliminaire sera bref, car nous avons hâte de répondre à vos questions et de participer à cet important débat. Je voudrais tout d'abord me présenter ainsi que présenter mes collègues ici présents.
Je m'appelle Susan Johnson et suis la directrice générale des opérations internationales de la Croix-Rouge canadienne. Je fais partie de la Croix-Rouge depuis environ 12 ans et j'y ai été en poste au Canada, à Genève et à New York.
Richard Clair était jusqu'à tout récemment notre directeur de pays en Haïti. Il y a passé la dernière année. Il a dû évidemment s'occuper des opérations quotidiennes et connaît très bien les défis auxquels nous y faisons — et y ferons — face.
Pam Aung Thin est notre directrice nationale des Affaires publiques et relations gouvernementales. C'est elle qui a présenté au Canada, dans la perspective de la Croix-Rouge, l'histoire du tremblement de terre. Elle sera également à votre disposition au cours de la période de discussion.
La Croix-Rouge canadienne est bien connue du public, mais rares sont ceux qui comprennent l'étendue de ses services. Tous les jours, l'organisation influe sur les Canadiens chez eux et sur les gens les plus vulnérables du monde entier. Nous réagissons aux situations d'urgence, qu'elles surviennent à Port-au-Prince ou à Petawawa. Nous soutenons l'action sanitaire menée au Mali ou à Mississauga. Notre présence est déterminée, non par des frontières, mais tout simplement par l'endroit où se trouvent les personnes les plus vulnérables qui sont dans le besoin. Nous sommes la plus grande organisation humanitaire au Canada et nous faisons partie du plus vaste réseau humanitaire du monde.
[Français]
Notre force provient de notre vaste réseau de bénévoles qui ont la capacité de répondre à des crises internationales, comme celle survenue en Haïti, mais également comme toutes celles qui se passent au Canada, comme ce fut le cas l'année dernière lors du passage de l'ouragan Igor dans l'Est du pays. Nous sommes l'organisation que les Canadiens privilégient lorsqu'ils désirent faire des dons lors de désastres et de crises internationales.
[Traduction]
Notre financement de base ne vient pas des gouvernements, mais nous travaillons en étroite collaboration avec eux en fonction des projets à mener. Au niveau international, nous sommes l'une des 186 sociétés nationales membres de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Notre préparation, notre formation, nos investissements et nos infrastructures nous permettent de répondre rapidement et efficacement aux situations de crise. Nos contacts au sein des communautés nous donnent un accès privilégié aux gens dans le besoin. Au pays, les contacts que nous avons avec les diasporas nous permettent de nouer des liens uniques avec les populations les plus touchées par des catastrophes. À l'étranger, notre réseau nous permet d'atteindre des particuliers et des familles auxquels les autres n'ont pas accès.
Je crois savoir que le comité souhaite comprendre et améliorer les mesures d'urgences que le Canada déploie à l'étranger, surtout dans les Antilles. Cet intérêt est on ne peut plus opportun.
[Français]
Les Caraïbes sont touchées par des désastres naturels tous les ans. Chaque année, des ouragans déferlent sur ces îles. Il en résulte de nombreuses pertes de vie, et les coûts associés aux pertes matérielles ont des effets à long terme sur les économies des îles.
En plus des ouragans, les éruptions volcaniques et les tremblements de terre sont fréquents dans la région.
[Traduction]
Dans le cadre du réseau international de la Croix-Rouge, et souvent grâce aux généreux soutien de la population et du gouvernement canadiens, la Croix-Rouge canadienne réagit chaque année aux catastrophes qui s'abattent sur les Antilles. Nous travaillons de concert avec nos sociétés soeurs de la région pour les aider à se préparer et à réagir plus efficacement aux catastrophes. Je parlerai brièvement de ce travail et de ce que le Canada pourrait faire pour améliorer notre assistance, mais je voudrais tout d'abord dire quelques mots sur ce que nous entendons par « catastrophe ».
Il faut rappeler que la catastrophe est un événement qui dépasse la capacité de réaction, que ce soit d'une famille, d'un village, d'une ville ou d'une communauté. Un événement n'est pas nécessairement en soi une catastrophe si la communauté peut résister à son impact. Par exemple, les ouragans ont une portée minime sur la sécurité et le bien-être de la communauté lorsque les maisons sont construites à leur épreuve. Si en revanche, les gens vivent dans des structures fragiles et improvisées, il ne faut pas grand-chose pour créer une catastrophe et un besoin d'aide de la part des voisins. Une catastrophe découle donc de la combinaison de l'événement et de la capacité de la communauté à résister à son impact.
Comment réagir aux catastrophes? Selon notre expérience, le meilleur moyen d'y faire face est tout d'abord de renforcer la résilience des familles et des communautés, de sorte que l'impact de l'événement — tel qu'un ouragan — est réduit au minimum. Investir dans la préparation, c'est être prêt à réagir en cas de besoin, en ayant à disposition les bons matériaux et ressources humaines.
On ne saurait trop insister sur la nécessité de se préparer avant que ne frappe une catastrophe. On estime en effet que chaque dollar investi dans la préparation permet d'en économiser sept après. Et il ne s'agit pas seulement des infrastructures. La nécessité de logements solides, de murs de soutènement bien entretenus et de défenses naturelles — telles que les mangroves — va de soi. Mais la formation et l'appui offerts aux bénévoles, une bonne planification et la mise en oeuvre appropriée des plans d'urgence, ainsi que la compréhension des grands enjeux aux plans de la santé et de la sécurité, s'avèrent tout aussi nécessaires.
Par l'entremise de ses réseaux et collectivités, la Croix-Rouge fait appel à toutes les administrations et offre son expertise et les services essentiels avant, pendant et après les catastrophes. Dans le cadre de l'étude que mène le comité, nous pensons que l'une des responsabilités du gouvernement est de poursuivre le travail entrepris collectivement pour répondre aux besoins des gouvernements dans les régions touchées. Nous devons en effet oeuvrer ensemble pour accumuler les connaissances et mieux comprendre les enjeux et se préparer ainsi à la prochaine situation d'urgence.
Nous pouvons voir les retombées des investissements de ce type dans l'engagement de la Croix-Rouge internationale en Haïti. Après le tremblement de terre survenu en janvier 2010, la Croix-Rouge internationale a amorcé sa plus grande campagne jamais mise sur pied dans un seul pays. En collaboration avec la Croix-Rouge haïtienne, la Croix-Rouge canadienne travaillait déjà sur le terrain bien avant le tremblement de terre de janvier, aidant le pays à renforcer ses capacités pendant la saison des ouragans. Elle offrait entre autres une formation en secourisme aux bénévoles et appuyait d'autres initiatives communautaires de préparation aux catastrophes.
Dans la première heure qui a suivi le tremblement de terre, les bénévoles de la Croix-Rouge haïtienne — dont beaucoup en étaient eux-mêmes victimes — ont passé au peigne fin des montagnes de débris à la recherche de signes de vie. Ils ont aussi fourni des premiers soins d'urgence à ceux qui en avaient le plus besoin.
Dans les heures suivantes, d'autres sociétés nationales, dont une équipe d'intervention d'urgence de la Croix-Rouge canadienne, ont commencé à arriver en Haïti. Le réseau régional et international de la Croix-Rouge a été entièrement mobilisé. On a utilisé les stocks de secours qui se trouvaient au Panama et ailleurs dans la région, et on a fait appel à l'aide de gens d'autres îles des Antilles, d'Amérique centrale, d'Amérique du Sud, du Canada et des États-Unis. Tous ces secours en denrées de base et en ressources humaines sont intégrés dans un système bien rôdé, mis sur pied au fil des ans par la Croix-Rouge internationale. Il s'agit d'un système que nous revoyons et améliorons.
Pour vous donner une meilleure idée de la situation en Haïti et des travaux qui y sont en cours, je cède la parole à mon collègue Richard Clair qui vous fera part de certaines de ses expériences et des observations qui en découlent au cours de la dernière année.
J'étais jusqu'à hier le représentant national de la Croix-Rouge canadienne en Haïti. L'année 2010 dans ce pays me fait penser à la vieille chanson de l'Ouest: « Si ce n'était de la malchance, je n'aurais pas de chance du tout. » Haïti a été frappé en effet par un tremblement de terre, une épidémie de choléra, une crise politique et un ouragan. Le mot de « résilience » est bien loin de décrire la réaction du peuple haïtien.
[Français]
Les problèmes en Haïti remontent à bien avant le séisme, et cette catastrophe n'a rien fait pour aider les choses. En effet, 80 p. 100 de la population vit avec moins de 2 $ par jour. Il est impossible de circuler dans le pays sans être frappé par cette pauvreté écrasante. Les statistiques sur l'accès à l'eau potable, à l'éducation et aux services de santé sont accablantes. Néanmoins, il ne faut pas baisser les bras et dire que nous ne pouvons rien faire.
[Traduction]
Depuis le 12 janvier, plus d'un million d'articles de secours d'urgence ont été livrés par la Croix-Rouge. Depuis — et oui, le processus se poursuit —, 2,5 millions de litres d'eau potable ont été produits chaque jour. Pour mettre cela en perspective, cela équivaudrait à fournir chaque jour 20 litres d'eau à chacun de vos électeurs dans vos circonscriptions respectives.
L'accès aux soins médicaux a été un besoin immédiat après le tremblement de terre et il continue d'être une priorité de la Croix-Rouge. À ce jour, plus de 216 000 personnes en ont reçu dans un établissement de la Croix-Rouge.
[Français]
Le mouvement de la Croix-Rouge a répondu rapidement et de façon efficace dans la phase d'urgence, juste après le tremblement de terre. Nous avons livré des millions de litres d'eau, des dizaines de milliers de trousses d'hygiène, et des centaines de milliers de bâches de plastique et de tentes. Nous avons jusqu'à maintenant conçu près de 6 000 abris temporaires résistants aux ouragans et aux tremblements de terre.
J'aimerais apporter une précision sur la distribution d'eau. Dès l'éclosion des premiers cas de choléra, nous craignions surtout que les camps de déplacés soient les plus durement touchés, mais grâce, notamment, à une distribution d'eau massive, qui se poursuit encore aujourd'hui, et à un important travail d'information et de prévention effectué par les volontaires de la Croix-Rouge, l'impact du choléra dans les camps de déplacés a été considérablement réduit.
[Traduction]
La Croix-Rouge canadienne consacre un grand nombre de ses ressources aux refuges, travaillant principalement dans les régions de Jacmel et Léogane. Nous nous sommes engagés à bâtir 7 500 abris et en avons construit plus de 1 200 à ce jour. Ainsi, plus de 6 000 personnes ont pu quitter les tentes grâce aux dons du Canada. Les constructions s'accélèrent et nous devrions les avoir terminées au début de l'automne.
Les abris que nous construisons sont robustes, résistent aux séismes et aux ouragans et peuvent loger une famille moyenne de cinq personnes. Nous travaillons également avec des partenaires pour fournir de l'eau et des services sanitaires dans les communautés où les abris sont construits. Notre but est de fournir des abris de base pour les familles qui ont perdu leur maison, mais aussi d'aider à reconstruire leur collectivité.
Le logement est, et restera, l'un des plus grands défis du peuple haïtien. Les intervenants internationaux continueront de consacrer énormément de temps et d'argent pour faire en sorte que les gens puissent quitter les abris temporaires et emménager dans des maisons en dur. Environ 800 000 Haïtiens vivent aujourd'hui dans des abris temporaires. Il devrait y en avoir encore 400 000 d'ici un an.
Les difficultés de logement ne sont pas seulement associées aux murs et au ciment, mais aussi aux droits de propriété. Le gouvernement canadien a donc aujourd'hui l'occasion de bien faire valoir auprès du gouvernement haïtien la nécessité d'évaluations des terres précises et équitables. Cela est essentiel pour que les secteurs privé et public puissent poursuivre la reconstruction.
Notre deuxième plus gros investissement touche le système de soins de santé. Nous travaillons donc avec de nombreux partenaires pour faire avancer les choses. Nous nous sommes engagés à participer à la reconstruction de l'hôpital Saint-Michel de Jacmel. Nous reconstruisons également des cliniques et offrons des programmes de santé communautaires dans le sud-est du pays. Nous mettons en oeuvre des programmes durables. Nous nous attendons par ailleurs à travailler encore cinq à dix ans en Haïti.
Nous travaillons également sur de modestes projets d'atténuation des risques de catastrophes naturelles dans les communautés. Nous faisons aussi de la prévention de la violence fondée sur le sexe.
[Français]
Finalement, nous travaillons de très près avec la Croix-Rouge haïtienne pour renforcer ses capacités afin d'en faire une organisation plus solide pour soutenir les collectivités haïtiennes aujourd'hui et au cours des années à venir. La Croix-Rouge haïtienne, tout comme la Croix-Rouge canadienne, est un partenaire important des autorités publiques et il est de notre responsabilité d'en faire une organisation plus forte pour qu'elle puisse venir en aide à ses concitoyens durant des moments de crise.
[Traduction]
Je donne maintenant la parole à Susan.
Je terminerai par quelques remarques sur les partenariats en général et celui que nous avons avec le gouvernement canadien en particulier.
Chaque jour, la Croix-Rouge aide les collectivités vulnérables du monde entier, en grande partie grâce au soutien dont nous bénéficions du gouvernement fédéral. En réponse au tremblement de terre en Haïti, l'action du gouvernement du Canada a été immédiate et son soutien, constant. L'exemple parfait en est l'hôpital de campagne créé grâce à un partenariat entre l'ACDI et la Croix-Rouge canadienne. Cet hôpital de campagne a été déployé pour la première fois le 3 décembre à Carrefour, où nous avons traité l'épidémie de choléra. Plus de 1 300 personnes y ont été soignées depuis sa création.
Grâce à cet hôpital mobile, le premier à être implanté par la Croix-Rouge internationale dans l'hémisphère, nous pouvons maintenant être sur le terrain et nous occuper d'une urgence un jour après avoir été appelé. Il permet une réaction rapide et générale même dans des situations médicales complexes. Ce n'aurait pas été possible sans soutien gouvernemental.
Comme dans tout partenariat, la Croix-Rouge canadienne travaille en étroite collaboration avec le gouvernement pour renforcer nos liens. Ensemble, nous avons fait des investissements importants dans le renforcement des capacités réelles de réaction aux catastrophes dans cette région et dans le monde entier. En plus de l'hôpital mobile, nous avons des fournitures de secours prêtes à être expédiées en cas d'urgence. Nous avons formé le personnel et les bénévoles de la Croix-Rouge qui sont bien préparés pour faire face aux situations les plus complexes.
Cette capacité prête au déploiement prend des investissements quotidiens, et nous encourageons le gouvernement du Canada à poursuivre et, en fait, à multiplier les efforts déployés à cet égard. Nos capacités et notre expérience uniques dans le monde entier font de nous un partenaire précieux du gouvernement du Canada dans l'élaboration des politiques aux plans de l'aide humanitaire, des secours, de la reconstruction et du développement des capacités à l'échelle internationale.
Je tiens également à signaler que la Croix-Rouge ne se consacre pas seulement à la préparation et à la réaction aux catastrophes. Nous faisons d'importantes contributions dans un large éventail de besoins humanitaires. Mais en ce qui concerne notre sujet, je pense que vous aurez compris, après notre intervention d'aujourd'hui, que nous avons une large base de connaissances et d'expertise en la matière.
Nous serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
:
Permettez-moi simplement de dire quelques mots à ce sujet. Nous serons certainement en meilleure posture après aujourd'hui, puisque notre secrétaire général participe à la séance.
Bien entendu, nous avons suivi de près les travaux de la commission intérimaire — sa création et ce qu'elle a accompli jusqu'à présent. Je pense qu'il est juste de dire que la commission s'est heurtée à quelques difficultés au début pour mettre ses projets en branle. Je pense que nous pouvons tous comprendre en partie pourquoi, vu à quel point il est difficile d'aller de l'avant sur plusieurs fronts à la fois.
Dans les derniers mois de ce qui est censée être une commission de 18 mois, je pense qu'il reste encore à voir si nous allons constater une efficacité et une clarté véritables au chapitre de la prise de décision, entre autres, dans l'avenir. De notre côté à la Croix-Rouge, nous pensons certainement que les efforts déployés en vue de créer ce type de mécanisme où le gouvernement haïtien, avec l'aide de la communauté internationale, peu importe comment elle est organisée — et la communauté internationale a décidé de la façon dont elle souhaite être organisée à cet égard —, a l'occasion de voir l'ampleur de ce que l'aide peut apporter au pays et d'avoir voix au chapitre quant à la façon dont cette aide est structurée.
Certaines des questions d'ordre technique, comme celle qui vise à savoir comment on procède pour saisir efficacement le comité de projets et de ce genre de choses, ne sont que des détails. Je pense que la création et l'intention de mettre cette commission sur pied et d'instaurer ce leadership conjoint ont marqué une étape importante pour Haïti. Comme je l'ai dit au tout début, nous comprenons mieux les travaux du comité au quotidien, maintenant que nous y participons beaucoup plus activement.
Richard, je ne sais pas si vous avez quelque chose à dire, du point de vue de la situation en Haïti même.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins d'être des nôtres. Nous avons entendu de nombreuses histoires positives au sujet de la Croix-Rouge canadienne, et je veux vous remercier du travail que vous faites.
Après le séisme en Haïti, nous avons été témoins de la générosité des Canadiens, qui ont apporté leur aide en faisant des dons et en s'assurant que ces personnes vulnérables ont accès à de l'eau potable et à des abris, alors nous remercions également la population canadienne.
J'ai quelques questions pour vous.
Monsieur Clair, vous avez fait une remarque, et c'était la question que je voulais poser quand j'ai entendu ce que vous disiez au départ. À quel genre d'obstacles vous heurtez-vous pour construire ces abris? Vous avez parlé des droits fonciers. De toute évidence, les intervenants dans le domaine du développement international veulent que les gens aient accès à des abris car c'est fondamental pour la santé et l'éducation des enfants, et nous apportons notre contribution à tous ces égards. Combien de temps faut-il en moyenne pour régler des litiges en matière de droits fonciers, et y a-t-il une façon dont nous pouvons aider à cet égard?
Pourriez-vous commenter là-dessus?
:
Merci beaucoup de la question.
Je pense que de notre point de vue, nous travaillons certainement très étroitement avec la Croix-Rouge haïtienne au niveau national, ainsi qu'à l'échelle locale dans les collectivités où nous oeuvrons, à Jacmel, par exemple, où se trouve la direction locale de la Croix-Rouge haïtienne. Le travail que nous réalisons avec elle est très diversifiée, que ce soit des choses pratiques très simples comme mettre en place un endroit où son personnel peut travailler, l'aider à recruter et à former des bénévoles, offrir de la formation en secourisme, tout ce qui doit être fait pour assurer la viabilité et la pertinence des efforts de la Croix-Rouge locale, et l'aider à mener ses opérations.
Notre travail consiste également à trouver un moyen de l'aider à s'acquitter de son travail de sorte que nous ne le faisons pas à sa place, que les Haïtiens eux-mêmes occupent les postes de direction, que nous les accompagnons dans ce processus mais que nous ne faisons pas le travail à leur place, pour ainsi dire. Cette approche rallonge le processus, mais nous croyons que nos efforts seront plus viables à plus long terme. Nous participons donc à la formation des gens et nous travaillons avec la Croix-Rouge haïtienne notamment à l'établissement de bons systèmes financiers et de ressources humaines, des éléments de base nécessaires pour être un organisme viable.
Il est toutefois très difficile de voir comment nous pouvons y parvenir à long terme, car nous ne sommes qu'un seul intervenant à Haïti. Nous parlons de la Croix-Rouge haïtienne. C'est un élément parmi tant d'autres qui constituent Haïti aujourd'hui. Il est clair que nous demeurerons un partenaire de la Croix-Rouge haïtienne et que nous ferons du mieux que nous pouvons, mais nous oeuvrons bien entendu dans un contexte plus large. Ce qui arrivera à Haïti de façon plus générale est entre les mains de nombreuses personnes, et certainement pas juste entre les mains de la Croix-Rouge ni de la Croix-Rouge haïtienne. Mais nous sommes résolus à continuer de travailler le plus étroitement possible avec la Croix-Rouge haïtienne pour l'aider, comme je l'ai dit, à être l'intervenant du secteur humanitaire le plus efficace dans son pays.
Comme Richard l'a dit tout à l'heure, je pense certainement qu'au fur et à mesure que la situation politique se stabilise et qu'il devient de plus en plus possible pour les gens de s'en sortir, les organismes comme la Croix-Rouge haïtienne pourront... Cela permettra de mener le travail de façon plus efficace.
:
Nous avons un programme qui vise particulièrement la prévention de la violence.
La violence contre les femmes est l'un des principaux problèmes sociaux en Haïti. Quand nous offrons des abris, nous veillons à ce que, s'il s'agit d'un couple marié, par exemple, que le droit de propriété soit accordé aux deux conjoints, à l'homme et à la femme. Dans le cas des couples non mariés, le titre de propriété est au nom de la femme car les femmes sont dans une situation plus vulnérable.
Dans les collectivités où nous travaillons, nous choisissions délibérément des femmes pour faire partie de nos équipes de travail. À notre entrepôt — j'espère que vous viendrez en Haïti pour visiter notre énorme entrepôt —, nous recrutons des femmes pour faire des travaux qu'elles ne font traditionnellement pas. Nous essayons de combler cette lacune.
Au plan de la prévention de la violence, nous apprenons à notre personnel — les employés locaux, les employés réguliers — à reconnaître la violence et aussi à recourir aux ressources qui existent en Haïti pour régler ce problème, des ressources telles que les services sociaux, la police ou tout autre organisme. Nous devons trouver les organismes chargés d'aider les victimes de la violence.
Nous n'avons de programmes spécifiques ou des maisons de transition, mais nous sommes présents dans la collectivité. Quand nous apprenons que des actes de violence ont été commis, nous orientons les victimes vers les organismes qui pourront les aider.
:
L'USI de l'Université de Montréal et les agences de santé publique de Québec et de Montréal. Alors, nous avons établi un partenariat avec quatre organismes de santé du Québec, chacun ayant un rôle différent à jouer dans cette initiative dans le cadre de laquelle nous allons rebâtir et remettre en service l'Hôpital Saint-Michel de Jacmel. L'Hôpital Saint-Michel existe à Jacmel, mais il s'agit d'un bâtiment en piteux état qui nécessite beaucoup de travail.
Alors, nous étudions cette question et nous envisageons d'élaborer le plan directeur pour la reconstruction de l'hôpital. Notre initiative à cet égard a été autorisée par le ministère de la Santé d'Haïti. Comme Pam l'a dit plus tôt, je pense, nous avons en quelque sorte affecté une partie des fonds que nous avons à cette initiative de santé intégrée, qui comprendra la reconstruction de l'hôpital, la construction de probablement trois ou quatre cliniques communautaires dans des régions plus rurales autour de Jacmel et la formation de spécialistes de la santé pour travailler dans l'hôpital et dans les cliniques, ainsi qu'une programmation de base en santé publique que nous allons élaborer en collaboration avec la Croix-Rouge haïtienne. Il s'agit d'un programme intégré qui traitera des problèmes de santé de base tout en assurant des soins tertiaires.
Nous sommes en train de bâtir le partenariat, essentiellement, et nous travaillons avec le ministère de la Santé, comme l'a expliqué Richard. Nous avons en ce moment des discussions avec le gouvernement japonais, qui a signalé son intention de se joindre à notre partenariat pour la reconstruction proprement dite de l'hôpital. Nous n'avons pas encore le plan complet de l'hôpital. Nous en sommes encore au tout début de la conception et de tout le reste. En fait, nous avons une mission qui partira du Québec en mars, de sorte que tous les partenaires et la Croix-Rouge canadienne se rendront à Jacmel pour examiner le site, examiner la situation et pousser plus loin l'élaboration des plans détaillés sur la façon dont les différents partenaires vont travailler ensemble sur ce projet.
Une des raisons pour lesquelles nous avons bâti le partenariat avec des organismes du Québec, c'est qu'au nom de la durabilité, nous voulions garder la relation avec Sainte-Justine et avec les autres organismes du Québec, pour ce qui est de la formation des spécialistes de la santé. À la Croix-Rouge, nous nous considérons comme ceux qui ont réuni ces partenaires ensemble, ceux qui, en quelque sorte, ont donné une impulsion ou joué le rôle de catalyseur pour que tout cela voit le jour; nous avons fourni une certaine quantité de ressources à cette fin pendant une période de temps, mais avec le temps, nous allons nous retirer du projet. Nous pensons que les organismes du Québec et le ministère de la Santé à Jacmel maintiendront ce partenariat à long terme, une fois que nous aurons fait ce que nous avons pu avec les ressources que nous avons.
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Nous avons une idée de cela. C'est à partir de cette idée, les hypothèses de travail que nous avons, que nous avons décidé de procéder à certains investissements, qui sont, essentiellement, des investissements touchant l'état de préparation. Une de nos hypothèses de travail, c'est que ces événements catastrophiques à grande échelle iront en augmentant, que nous ne verrons pas une diminution de ces derniers. Nous allons assister à une augmentation de ces événements pour deux ou trois raisons. L'une d'elles, c'est qu'un grand nombre de catastrophes sont liées à l'eau, c'est-à-dire les ouragans ou les cyclones, ou à son contraire, c'est-à-dire la sécheresse. Ce sont des catastrophes qui sont liées au climat.
Avec le changement climatique, il y a des répercussions sur la nature des ouragans et des cyclones et le reste, et cela se combine au fait que de plus en plus de gens vivent dans des régions urbaines densément peuplées. De rurale qu'elle était, la population mondiale est maintenant urbaine, alors, nous voyons de plus en plus de personnes à risque dans des endroits densément peuplés et à risque, dans les quartiers très défavorisés des villes. Lorsque vous avez cette combinaison d'un événement et de gens qui vivent dans une pauvreté extrême, c'est là que vous avez des catastrophes à une échelle gigantesque. Nous nous attendons entièrement à voir cela. Nous avons eu Haïti cette année. Nous avons eu les grandes inondations au Pakistan et elles sont à une échelle gigantesque. En dessous de cela, il y a quelques événements.
Pour la fédération internationale, dans une année donnée, entre 40 et 60 situations d'urgence nécessitent une intervention internationale. Cela peut comprendre n'importe quoi, comme l'expédition de certains articles de première nécessité ou l'envoi de personnes pour organiser l'intervention. C'est certainement là le niveau de notre organisation. Cela nous amène ensuite à conclure des accords avec des sociétés nationales pour le prépositionnement de matériels de secours et à avoir ce que nous appelons des plans de mesures d'urgence sur la question de savoir, selon l'ampleur de l'événement, qui sera chargé d'intervenir, avec quel matériel et avec quel personnel. Nous avons des gens qui sont formés pour être des premiers intervenants, si vous voulez, dans le cadre du système de la Croix-Rouge. Nous investissons justement parce que nous avons cette idée de ce que seront les besoins. Comme je l'ai dit dans mes observations précédentes, nous investissons tous les jours dans l'état de préparation, dans le prépositionnement du matériel, dans la formation du personnel, dans la mise à l'essai des systèmes, de sorte que nous sachions lorsque nous aurons besoin d'intervenir à la suite d'une catastrophe que le système fonctionne.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup à nos témoins et merci à mon collègue de m'avoir cédé son temps de parole.
La raison pour laquelle j'interviens, c'est pour vous poser des questions au sujet de la coopération communautaire mondiale.
Mercredi dernier, je suis allé à Bruxelles représenter le Canada. Il s'agissait d'une conférence internationale sur Haïti. Elle a été organisée par le Canada, l'Union européenne, le gouvernement belge et les autorités haïtiennes. J'ai donné l'allocution principale. Michaëlle Jean était présente également, de même que le ministre des Affaires étrangères de la Belgique et les commissaires de l'Union européenne.
Cette conférence avait pour but de faire le point, un an plus tard, sur ce qui se passe vraiment en Haïti et sur les défis. La conférence était divisée en deux parties. Une partie portait sur les pratiques exemplaires découlant des défis, après un an, pour toutes les ONG et pour l'aide au développement. La deuxième partie portait sur les questions où le Canada a joué un rôle de premier plan.
J'ai déjà fait parvenir mon discours aux membres du comité et la greffière confirmera à quel moment ils le recevront. Le discours que j'ai donné a été envoyé à la traduction et il vous sera envoyé pour que vous puissiez connaître la position du Canada. S'il vous plaît, faites-en une lecture de chevet.
Nous avons adopté une position très ferme. Nous avons adopté une position internationale très ferme sur la question de la gouvernance. En fait, mon discours a choqué tous les gens présents. Nous étions en compagnie du représentant de l'ONU ainsi que des représentants américains. Nous allons vous faire parvenir cela. Je pense que vous, individuellement, et toutes les ONG qui travaillent en Haïti devriez lire cette allocution et voir ce qui est ressorti de cette conférence, parce que nous parlons des pratiques exemplaires et de tout le reste.
Michaëlle Jean m'a fait part d'une question clé. En passant, j'ai demandé à Michaëlle Jean de se présenter devant le comité, et elle a accepté de le faire. Elle est la représentante de l'UNESCO. Vous allez lui faire parvenir une invitation.
Une question dont M. Lunney a parlé et que je voulais vérifier avec vous, est la question du régime foncier en Haïti. Il n'y a pas de régime foncier dans ce pays. Par conséquent, il n'y a pas de titres fonciers. Aujourd'hui, vous pouvez construire quelque chose. Un des problèmes clés expliquant pourquoi les débris ne sont pas enlevés, c'est que ces gens veulent indiquer que c'est à cet endroit qu'ils vivaient, parce qu'il n'y a pas de titres fonciers. Je voulais que vous me disiez quels sont les défis pour les organismes comme le vôtre.
Je parle d'un hôpital qui a été construit et tout à coup, le titre foncier est devenu un sujet de débat. Le gouvernement haïtien peut vous donner un terrain. Le problème, c'est que le gouvernement haïtien n'est pas propriétaire de ce terrain. On ignore qui en est le propriétaire. Alors, vous entendez des déclarations contradictoires. Vous avez des gens qui arrivent et qui disent: « C'est mon terrain. Vous avez déjà construit cela, mais je suis désolé, ce n'est pas votre terrain. C'est le mien. »
C'est devenu un obstacle majeur, d'après ce que j'ai entendu à cette conférence. Peut-être que vous, qui construisez des structures en Haïti, voulez nous faire part de votre expérience par rapport aux titres fonciers et aux bâtiments que vous construisez et nous dire si vous devez faire face à des défis semblables. Nous avons posé la question. Nous allons fournir de l'argent, et la communauté internationale, y compris l'Union européenne, va travailler avec le gouvernement haïtien pour essayer de mettre en place un régime foncier. Mais comme vous allez le remarquer dans l'allocution que j'ai prononcée, la gouvernance est devenue le plus gros obstacle à l'application de solutions à long terme, comme l'a dit Bob, pour le travail, pour les emplois et pour la construction de l'économie. Au stade actuel, c'est de la mauvaise gouvernance et l'absence d'institutions, y compris l'absence de régime foncier.
Parlez-moi de la question du régime foncier. Qu'essayez-vous de faire? Vous bâtissez des structures, mais avez-vous des problèmes?
:
Il y a des questions fondamentales. Vous avez souligné tout à l'heure que ce n'était peut-être pas votre rôle de les traiter. Je trouve que ce serait terrible qu'on ait un exercice comme celui d'aujourd'hui sans les évoquer au moins brièvement. Je parle ici de questions qui sont le fondement même de la misère haïtienne.
Un des grands problèmes, c'est la déforestation. Quand on survole en avion les pays voisins, on voit qu'ils sont verdoyants. Puis quand on arrive en Haïti, on constate que l'île est chauve. Toutes les forêts ont été brûlées parce que les paysans se servent du bois pour faire la cuisine, entre autres choses. Là-bas, on nous disait que tant que le bois serait meilleur marché que les autres combustibles, comme le gaz propane, ça allait continuer. Quand on plante des arbres, ils sont immédiatement abattus et brûlés par les paysans. Ça veut dire que lorsqu'il pleut, toute la terre s'en va dans la mer, ce qui ruine les possibilités de développement agricole.
L'autre grand problème est le libre marché. La production des terres haïtiennes par hectare est très faible, par exemple pour la production du riz. On produit beaucoup moins de riz par hectare que dans les fermes américaines. En plus, le riz américain est subventionné, de sorte que les haïtiens ne mangent que du riz américain, lorsqu'ils sont capables d'en acheter, bien sûr.
Constatant cela, n'avez-vous pas parfois l'impression qu'en Haïti, vous ne faites que mettre des pansements, sans doute nécessaires, sur des plaies purulentes et profondes qu'on ne parvient pas à nettoyer et qui vont toujours continuer à se manifester?
:
À un tel rythme, cela pourrait prendre jusqu'à cinq ans avant que les gens aient un toit sur la tête.
M. Richard Clair: Tout à fait.
M. Peter Goldring: Je veux reparler de la gouvernance — qui fait problème selon vos dires —, car j'irais jusqu'à dire que, lorsque je suis allé en Haïti en 2006, avant le tremblement de terre, la situation était catastrophique et qu'on avait accompli très peu de progrès. À l'époque, la gouvernance était un problème grave et il semble que ce l'est toujours.
Même pour ce qui est des difficultés liées à l'acquisition des terres, la plupart des pays, dont le Canada, vont confisquer, s'approprier ou annexer les terres en temps de crise. J'ai l'impression que la gouvernance est le problème principal qui empêche de régler la question. Compte tenu des besoins, si on libère ou on enregistre les terres une à la fois, le processus n'aura pas de fin. Pour être franc, je dirais que cela peut compliquer le système encore plus. La meilleure méthode, ce serait que le gouvernement s'approprie 1 000 acres et se mette à construire quelque chose. Comme le document l'indique, cela revient à parler de la gouvernance, qui est si faible que le gouvernement ne peut pas employer une telle façon de faire, n'est-ce pas?
L'ONU intervient dans d'autres circonstances. Le gouvernement peut-il réagir et faire avancer les choses?
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D'accord. Merci beaucoup.
J'aimerais remercier nos témoins. Je crois que nous avons très bien fait de vous recevoir en premier afin de jeter les bases de notre étude sur Haïti.
Chers membres du comité, j'aimerais vous mettre au courant de quelques éléments. Tout d'abord, nous avons demandé aux ministres et de venir comparaître. Le ministre Cannon n'est pas disponible avant le 22 mars, et il est possible que la ministre Oda puisse venir le lundi 21 mars.
Ensuite, Scott Reid voulait comparaître devant le Sous-comité des droits internationaux de la personne à propos de deux ou trois mesures prises par son ministère. Il comparaîtra mercredi.
En troisième lieu, je voulais vous mentionner que M. Dewar a demandé que nous recevions René Magloire. Nous voulons nous assurer de lui trouver une place; il sera ici le lundi 7 mars. Nous lui réserverons la dernière demi-heure de la séance, car nous recevons des fonctionnaires en première partie.
Enfin, je voulais vous informer que M. Elsadig Almagly, l'ambassadeur actuel du Soudan au Canada, a demandé de rencontrer le comité afin de discuter de la période post-référendaire. Je crois que ce n'est probablement pas une mauvaise idée d'essayer de lui réserver du temps aussi.
Nous allons essayer de planifier tout cela; je voulais simplement vous en aviser. C'est bien?