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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 051 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 21 mars 2011

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous faisons notre étude sur les interventions canadiennes et internationales en cas de catastrophes et la situation en Haïti; c'est le sujet d'aujourd'hui.
    Je vois que nous accueillons des représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et de l'ACDI. Je crois que Mme Golberg prendra la parole en premier pour une durée d'environ 10 minutes. Pourquoi ne pas présenter les membres de votre équipe, qui sont venus ici pour vous aider?
    Ensuite, je crois que Mme Norton prendra la parole pendant 10 minutes. Je vous demande également de nous présenter votre équipe avant de commencer.
    Madame Golberg, pourriez-vous commencer? La parole est à vous.
    D'entrée de jeu, je vous présente Mme Patricia Fortier, qui représente notre direction générale des opérations consulaires, et Neil Reeder, qui est directeur général d'Amérique latine et Antilles. Je suis directrice générale de notre groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction, et Leslie présentera ses collègues de l'ACDI.

[Français]

    Je suis vraiment heureuse d'être ici aujourd'hui pour discuter des mesures prises par le gouvernement du Canada à la suite du séisme qui a secoué Haïti le 11 janvier 2010, de même que pour discuter de notre stratégie d'intervention en cas de catastrophe naturelle dans cette région d'une manière plus générale.
    En cas de catastrophe naturelle à l'étranger, le gouvernement du Canada s'efforce d'intervenir en s'appuyant sur un ensemble éprouvé et efficace de mécanismes et de procédures qui ont pour but de faire en sorte que notre action soit coordonnée et cohérente. Ces mécanismes comprennent vraiment trois choses: tout d'abord, des procédures opérationnelles normalisées qui régissent la coordination interministérielle; deuxièmement, la communication de renseignements et la prise de décision; et troisièmement, la définition des possibilités d'intervention qui s'offrent au gouvernement. Cela comprend aussi un groupe de travail interministériel permanent, des mesures de suivi continu tous les jours, 24 heures sur 24, et des exercices sur les leçons retenues en vue d'améliorer sans cesse notre capacité de répondre à ces crises.
    Nos processus sont mis à l'épreuve régulièrement et nous veillons à ce que le personnel soit formé partout au sein de l'appareil pangouvernemental, pour que les rôles et les responsabilités de chacun soient clairs et que les gens n'aient pas à en faire connaissance quand survient une catastrophe.

[Traduction]

    Essentiellement, ce qui compte pour nous, c'est qu'au cours de la dernière décennie, nous avons élaboré un ensemble de procédures opérationnelles normalisées partout au Canada qui nous servent extraordinairement bien. Pour rire, je dis parfois à mes collègues que ce n'est pas comme si l'on secouait une boule magique numéro 8, qu'on examinait ensuite les procédures opérationnelles normalisées et qu'on obtenait la solution à la crise. Ce n'est pas nécessairement ce à quoi elles servent, mais à maintes reprises, elles nous ont permis d'établir un cadre dans lequel le gouvernement du Canada peut intervenir, de sorte que nos collègues de l'ensemble du gouvernement sachent ce qu'on attend d'eux, que nos rôles et nos responsabilités soient clairement établis et que nous n'échangions pas de cartes professionnelles après l'avènement d'une crise.
    Comment cela fonctionne-t-il concrètement? Pour mettre les choses en contexte, chaque année, le Canada suit de près des centaines de catastrophes naturelles à l'étranger. Le ministère des Affaires étrangères a mis des procédures et des modèles en place pour consulter les membres de nos missions au sujet des répercussions que les catastrophes ont sur les pays touchés. Mentionnons que la plupart des catastrophes n'exigent pas une intervention pangouvernementale.
    À ce sujet, c'est en général par l'entremise de nos collègues de l'ACDI que nous intervenons dans les dizaines de désastres de faible ou de moyenne importance qui ne retiennent pas beaucoup l'attention sur la scène internationale. Cependant, dans le cas de catastrophes naturelles graves à l'étranger, mon organisme, le Groupe de travail du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international pour la stabilisation et la reconstruction, a la responsabilité de convoquer le Groupe de travail interministériel permanent sur les catastrophes naturelles à l'étranger.
    Le groupe de travail est composé des principaux ministères et organismes fédéraux qui participent aux interventions du gouvernement du Canada, c'est-à-dire le ministère des Affaires étrangères, l'ACDI, le MDN, le Bureau du Conseil privé et quelques autres, selon les circonstances. Jusqu'à 16 ministères et organismes peuvent former le groupe de travail, selon la nature de la crise. Dans le cas d'Haïti, 14 ministères et organismes en ont fait partie. Dans le cas du Japon, il y en a 16 à l'heure actuelle en raison de la complexité de la crise. Le groupe de travail est essentiel pour évaluer les renseignements reçus et aider à formuler des recommandations sur la meilleure façon dont le gouvernement du Canada peut intervenir.
    Pour l'essentiel, trois conditions doivent être réunies pour que le gouvernement du Canada intervienne lorsque des catastrophes naturelles surviennent à l'étranger. Premièrement, le gouvernement du pays touché doit demander de l'aide. Deuxièmement, des partenaires humanitaires de confiance doivent faire une évaluation des besoins sur le terrain. Troisièmement, des partenaires humanitaires d'expérience doivent lancer des appels. Le groupe de travail prend un certain nombre d'autres éléments en considération, dont l'ampleur de la catastrophe, le nombre de personnes qui ont été déplacées ou qui ont des besoins urgents et les capacités du pays touché. C'est extrêmement important. Si l'on est en présence d'un gouvernement qui a un excellent système d'intervention, on n'a pas à recourir autant à l'aide internationale que si l'on a affaire à un pays qui est déjà vulnérable et qui n'a pas de capacités de coordination.
    Si la catastrophe naturelle et ses répercussions sont majeures, le ministre des Affaires étrangères, avec l'accord du gouvernement du pays touché, peut demander le déploiement de ce qu'on appelle l'équipe de soutien stratégique interministérielle, l'ESSI, qui se rendra dans la région touchée. Cette équipe est menée par le MAECI, mais elle compte des collègues de l'ACDI et des Forces canadiennes. Parfois, elle compte des représentants de l'Agence de la santé publique, comme dans le cas du tsunami qui est survenu dans l'océan Indien. L'ESSI fournit des analyses de spécialistes sur la situation et contribue à donner une idée des options pour aider les efforts internationaux de secours.
    En ce qui concerne le type d'options dont le gouvernement du Canada dispose, au cours de la dernière décennie, nous avons créé un ensemble d'outils solides qui nous permettent d'intervenir de façon efficace et rapide sur la scène internationale. Dans quelques minutes, ma collègue Leslie Norton de l'ACDI vous en dira davantage au sujet de certains de ces outils, mais pour vous donner une idée, je peux vous dire que nous pouvons offrir de l'aide financière. Nous pouvons fournir cette aide à des partenaires humanitaires d'expérience — l'ONU, la Croix-Rouge et des ONG. Nous pouvons financer le déploiement d'experts techniques civils canadiens et fournir du matériel de secours d'urgence.
    Si l'ampleur de la catastrophe est telle que les organisations civiles internationales ou locales ne peuvent pas la gérer, le groupe de travail peut aussi faire appel à des ressources modulables des Forces canadiennes. Elles comprennent un transport aérien stratégique, des ressources maritimes et des ressources d'ingénierie. Dans le cas d'une catastrophe comme celle qui s'est produite en Haïti, nous pouvons aussi recourir aux ressources médicales et à l'approvisionnement en eau de l'Équipe d'intervention en cas de catastrophe, l'EICC. L'EICC est déployée seulement si l'ESSI détermine que c'est nécessaire, et en fonction des discussions avec les partenaires humanitaires sur le terrain et le gouvernement touché.
(1535)
    Je crois comprendre que mes collègues des Forces canadiennes ont été invités à comparaître devant vous, et ils vont donc vous en parler en profondeur. Si vous avez des questions précises au sujet d'Haïti, Leslie et moi serons certainement heureuses d'y répondre.
    Le gouvernement du Canada dispose également de deux ou trois autres outils. De façon ponctuelle, selon la nature de la crise, nous pouvons prendre des mesures spéciales en matière d'immigration. Nous pouvons alléger la dette. Dans le passé, pour faire participer le public, on a utilisé un programme de fonds d'équivalence qui consistait à ce que le gouvernement du Canada verse l'équivalent des dons que les Canadiens faisaient à des organisations caritatives canadiennes. Ce n'est pas une mesure à laquelle on a souvent recours. Elle est utilisée dans des cas exceptionnels où l'on croit qu'une participation extraordinaire des Canadiens est nécessaire. À part pour Haïti, on y a eu recours plus récemment lors des inondations au Pakistan.
    Donc, l'approche pangouvernementale dont je vous donne un aperçu — les procédures opérationnelles normalisées, les modèles, la formation, les groupes de travail — a vraiment été reconnue comme une pratique exemplaire internationale. En fait, d'après la dernière évaluation par les pairs que le CAD de l'OCDE a faite sur le Canada, notre approche est considérée comme un modèle d'engagement pangouvernemental que d'autres donateurs devraient examiner. L'approche se révèle être un cadre d'action efficace durant les saisons de tremblements de terre, d'ouragans, de typhons et de cyclones qui se succèdent. Nos autres partenaires dans le monde nous posent beaucoup de questions sur cette approche, qui nous a bien servis lors du tremblement de terre de janvier 2010.
    C'est le tremblement de terre le plus fort jamais enregistré en Haïti depuis 200 ans. Comme vous le savez, il a fait plus de 220 000 morts et 300 000 blessés. Nous estimons qu'environ trois millions de personnes ont été touchées et ont besoin de l'aide internationale. Environ 800 000 personnes vivent encore dans des camps pour les personnes déplacées à l'intérieur du territoire.
    Pendant les heures qui ont suivi la catastrophe, le gouvernement du Canada a rapidement lancé une vaste opération de secours humanitaire et de mesures consulaires. Bien qu'elle ait été coordonnée par le MAECI, comme je l'ai dit, le Groupe de travail sur les catastrophes naturelles à l'étranger du gouvernement du Canada a fait intervenir un grand nombre de ministères et organismes gouvernementaux, et notre objectif était simple; il avait deux volets. Nous voulions tout d'abord répondre aux besoins des Canadiens en détresse et ensuite nous assurer que nous aidions les Nations Unies et le gouvernement d'Haïti en répondant aux besoins des Haïtiens qui tentaient de se sortir de la crise.
    Sur l'ordre du ministre des Affaires étrangères, l'équipe de soutien stratégique interministérielle a été dépêchée immédiatement avec l'équipe de reconnaissance de l'EICC. Elles sont arrivées dans les 20 heures qui ont suivi le tremblement de terre. Leurs membres ont évalué rapidement les besoins humanitaires en faisant participer le gouvernement haïtien, d'autres donateurs, des organisations internationales et des ONG qui se trouvaient déjà sur le terrain. Lorsque toute l'équipe est arrivée sur place, il était clair pour elle que les besoins étaient criants et qu'une vaste intervention à volets multiples faisant participer l'ensemble du gouvernement s'avérait nécessaire. Leur recommandation a ensuite servi de base pour la contribution du Canada à l'effort international et, à cet égard, nous avons utilisé tous les outils que je vous ai décrits. Nous avons eu recours à tout ce nous pouvions: tout notre matériel de secours, nos experts, des effectifs des Forces canadiennes, les mesures spéciales en matière d'immigration et l'allègement de la dette. Nous avons aidé 4 620 Canadiens à quitter le pays. Mme Fortier sera ravie de poursuivre sur le sujet. Nous pouvons parler des autres interventions plus en profondeur également, et Leslie vous parlera du volet humanitaire.
    L'un des éléments les plus manifestes de l'intervention a été le déploiement de 2 000 membres des Forces canadiennes dans le cadre de l'opération Hestia pour soutenir les efforts humanitaires et consulaires du Canada. Le recours aux effectifs des Forces canadiennes a été recommandé par l'ESSI et a été approuvé par le gouvernement haïtien. Leur présence à Port-au-Prince, à Jacmel et à Léogâne, dans le cadre de cette participation pangouvernementale a eu des effets importants.
    Les spécialistes en matière de stabilisation et d'aide humanitaire de l’ACDI et du ministère des Affaires étrangères ont été déployés avec les 2 000 membres des forces pour travailler avec les autorités locales, l’ONU et les ONG. Je dirais que collectivement, nous avons tiré une leçon importante de notre expérience en Afghanistan — l'importance de regrouper des responsables politiques et des agents de développement lorsque des membres des Forces canadiennes sont déployés, de sorte qu'on ait une stratégie globale et intégrée dès le début d’une opération. Cet effort visant à regrouper les trois parties nous a permis de déterminer clairement les besoins et les lacunes de l’intervention internationale et de collaborer de façon efficace avec les acteurs locaux et les organisations internationales pour nous assurer d'avoir les bons mécanismes en place et également, dès le départ, de faire la transition entre les Forces canadiennes et d’autres partenaires internationaux.
(1540)
    Le Canada a également joué un rôle politique important dans les efforts de soutien au gouvernement haïtien, qui étaient axés sur le redressement et la reconstruction. Mon collègue Neil Reeder peut parler plus en profondeur du soutien politique et diplomatique que le Canada a offert durant toute la crise, y compris des difficultés auxquelles nous avons fait face à ce moment-là. Il peut parler du leadership dont a fait preuve le Canada dans sa décision de convoquer une conférence à Montréal dès les premières semaines de la crise, et c'était vraiment un moment clé, non seulement pour montrer la solidarité du Canada envers le peuple haïtien, mais aussi pour nous assurer qu’il y aurait une coordination internationale efficace en collaboration avec les représentants du gouvernement haïtien.
(1545)

[Français]

    Quant à la gestion de la transition entre la phase de secours d'urgence et la phase de reconstruction et de développement, nous avons eu à relever de nombreux défis au cours de la phase de secours d'urgence qui a suivi immédiatement le séisme.
    L'aéroport avait subi des dommages substantiels et les vols en provenance et à destination de Port-au-Prince représentaient un grand problème.
    Nos partenaires sur le terrain, dont le gouvernement haïtien, l'ONU et les organisations non gouvernementales, ont tous subi des pertes humaines et matérielles importantes.
    Malgré ces problèmes, entre autres, la communauté internationale, avec l'appui des donateurs comme le Canada, a réussi à fournir une aide essentielle qui a contribué à sauver d'innombrables personnes et vies.
    Le séisme a causé le quasi-effondrement du système de sécurité déjà fragile en Haïti. Dans ce contexte, le ministère des Affaires étrangères a modifié l'orientation de sa stratégie pluriannuelle et des programmes pour Haïti pour tenir compte du fait qu'une grande partie des infrastructures de sécurité du pays avaient été perturbées.
    La plupart de nos projets d'investissement antérieurs ont subi des dommages mineurs, grâce à l'attention scrupuleuse qui avait été portée aux normes de construction.
    Le ministère des Affaires étrangères a aussi investi 10 millions de dollars supplémentaires au titre du Fonds pour la paix et la sécurité mondiales, qui comptait déjà 15 millions de dollars pour des projets de reconstruction.
    Nous avons rapidement mis en oeuvre des initiatives pour répondre au besoin urgent de stabilisation, notamment en fournissant 100 véhicules de patrouille à la police nationale haïtienne pour l'aider à s'acquitter de son mandat, en ajoutant des salles de classe à l'école de la police à Port-au-Prince, en donnant de la formation en premiers soins aux agents de la police nationale et en lançant les initiatives de justice de proximité pour les victimes du séisme.
    De plus, à l'appui de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti, la MINUSTAH, nous avons déployé 50 policiers additionnels en Haïti pour un total de 150, dans le cadre de l'Arrangement sur la police civile au Canada, ainsi que d'autres agents du Service correctionnel du Canada. Ces deux déploiements répondaient à des besoins définis par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
    Ma collègue Isabelle Bérard pourra vous parler des investissements opportuns que l'ACDI avait aussi apportés afin de renforcer les efforts faits en matière de développement.

[Traduction]

    Pour conclure, monsieur le président, je tiens à dire que plus d’un an après le tremblement de terre, l’aide internationale est toujours nécessaire, tant à court terme, pour répondre aux besoins humanitaires — y compris les besoins qui sont apparus des mois plus tard à cause de l’épidémie de choléra —, qu’à long terme, pour aider le pays à reconstruire non seulement son infrastructure, mais aussi ses institutions et ses systèmes.
    C’est quelque chose qu’on oublie souvent: les gens oublient les circonstances catastrophiques qui en ont résulté. C’est comme si un tremblement de terre de très forte intensité frappait une ville comme Ottawa, que tous les ministères s’effondraient et que les édifices de la Colline du Parlement subissaient d’importants dommages. Les attentes que l’on a envers un pays, un gouvernement, pour qu’il remédie rapidement à la situation et contribue à la reconstruction… c’est très difficile.
    À cet égard, la détermination du gouvernement du Canada à répondre aux besoins humanitaires et aux besoins de reconstruction est claire et inébranlable. Malgré les difficultés sur les plans de la politique et du développement auxquelles la communauté internationale fait face aujourd’hui en Haïti, le Canada continue de poursuivre ses efforts pour atteindre les objectifs qu’il s’est fixés en collaboration avec le gouvernement haïtien et d’autres entités internationales. Dans ce contexte, nous avons toujours à notre disposition une capacité d’intervention et de coordination vigoureuse et efficace pour réagir aux catastrophes naturelles majeures à l’étranger, dans l’hémisphère et ailleurs.
    Je serai ravie de répondre à toutes vos questions. Merci.
    Merci.
    Je vous souhaite la bienvenue, madame Norton.

[Français]

    Je suis accompagnée aujourd'hui de mes collègues Lise Filiatrault, directrice générale régionale pour les Amériques, et Isabelle Bérard, directrice générale du Programme Haïti.
    M'inspirant de l'exposé de ma collègue, je parlerai des interventions de l'ACDI à la suite de catastrophes naturelles, plus particulièrement de notre expérience après le séisme qui a frappé Haïti et, de façon plus générale, des catastrophes dans la région.
    L'ACDI est l'organisme du gouvernement du Canada qui est chargé d'acheminer l'aide humanitaire dans les pays en développement. À ce titre, ses interventions visent à sauver des vies, à alléger la souffrance et à préserver la dignité des populations touchées par des crises humanitaires. En 2010 seulement, l'ACDI est intervenue à la suite de 49 catastrophes naturelles de toute ampleur dans les pays en développement.
    Comme l'a dit Mme Golberg, à la suite d'une catastrophe naturelle, la première intervention doit venir du gouvernement du pays touché. Lorsque le gouvernement n'a pas la capacité nécessaire pour intervenir et qu'il demande l'aide de la communauté internationale, l'ACDI et d'autres donateurs peuvent alors envisager de fournir une aide dans le cadre d'un système d'intervention internationale bien établi et coordonné.
    L'intervention de l'ACDI repose sur les besoins ciblés par les partenaires humanitaires d'expérience dans un contexte spécifique et donné. Ces besoins varient, entre autres, selon l'ampleur et la nature de la crise et selon la vulnérabilité de la population touchée.
    L'ACDI peut tirer profit d'une diversité d'outils précis pour appuyer l'intervention du gouvernement du Canada. Le choix des outils se fait selon que nous constituons la seule intervention du gouvernement du Canada ou que nous participons à une intervention pangouvernementale, plus vaste.
    L'outil principal de l'ACDI prend la forme d'un soutien financier accordé à des partenaires humanitaires d'expérience qui ont démontré la capacité, lors d'une crise, d'acheminer l'aide voulue dans une partie du monde. Entre autres partenaires, mentionnons les organisations des Nations Unies, le Mouvement de la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales à la fois canadiennes et étrangères. Le financement consenti par l'ACDI permet l'intervention rapide de ces organisations afin qu'elles puissent répondre aux besoins pressants et vitaux des populations sinistrées, y compris de l'aide alimentaire, des abris, de l'eau potable et des soins médicaux et des services de santé.
    Au fil des ans, l'ACDI a conçu d'autres outils pour se préparer à des catastrophes soudaines et y répondre. Entre autres, elle conserve une réserve de fournitures d'urgence, comme des couvertures, des bâches, des trousses d'hygiène et des trousses familiales, des moustiquaires et des seaux d'eau, pour répondre aux besoins d'un maximum de 25 000 personnes. Elle appuie le déploiement de spécialistes humanitaires canadiens vers les zones sinistrées et elle travaille avec la Croix-Rouge canadienne pour mettre sur pied un hôpital de campagne rapidement déployable à partir du Canada. Par cette mesure, le Canada contribue à instaurer un système d'intervention d'urgence plus rapide et plus efficace.
    L'ACDI a également amélioré ses outils de programmation pour accélérer ses interventions. Avec la Croix-Rouge, nous avons mis en place un mécanisme qui permet de démarrer rapidement les opérations de secours lors de catastrophes naturelles de faible ampleur, ce qui nous permet d'acheminer aux Sociétés nationales de la Croix-Rouge, c'est-à-dire les intervenants locaux, généralement dans les 24 heures suivant une demande, des fonds pouvant totaliser aussi peu que de 10 000 $ à 50 000 $ par situation d'urgence.
    Chaque année, nous contribuons également à des mécanismes souples de mise en commun des fonds, comme le Fonds central d'intervention d'urgence des Nations Unies, qu'on appelle en anglais le CERF, pour permettre à nos partenaires d'évaluer rapidement les besoins et de fournir une aide immédiate aux collectivités touchées par une catastrophe.
(1550)
    Chacun de ces mécanismes repose sur les partenariats que nous avons établis avec des agents d'exécution. Nous privilégions ceux qui ont manifestement obtenu des résultats dans le passé, qui ont un grand savoir-faire et qui travaillent en fonction des principes, des directives et des codes de conduite internationaux. L'ACDI coordonne également notre intervention officielle avec la communauté internationale pour qu'il n'y ait pas de chevauchement ou de lacune dans l'intervention mondiale et pour que cette dernière soit proportionnée par rapport aux crises qui surviennent ailleurs dans le monde.

[Traduction]

    Pour ce qui est d'Haïti, suite au séisme de 2010, les premiers représentants de l'ACDI étaient à bord d'un avion dans les 12 heures à titre de membres de l'ESSI, l'équipe d'évaluations initiales du gouvernement, comme l'a mentionné Elissa. Elle a aussi dit ceci: non seulement le gouvernement du Canada a utilisé toutes ses trousses d'intervention, mais l'ACDI a aussi utilisé tous les outils à sa disposition.
    L'intervention humanitaire de l'ACDI à la suite de ce séisme a été la plus importante de son histoire. Plus de 150 millions de dollars en aide humanitaire ont été versés dans les premiers mois suivant le séisme par l'entremise d'organismes de l'ONU, de la Croix-Rouge et d'ONG canadiennes afin de combler les besoins urgents et constants sur le terrain. Cela comprenait les soins médicaux d'urgence, l'aide alimentaire, l'eau, des installations sanitaires, les abris et le soutien à la logistique et à la coordination de l'intervention internationale. Le financement des services de protection a aussi permis de s'occuper des personnes les plus vulnérables qui, dans les camps précaires, étaient exposées à des risques plus élevés de mauvais traitements, d'exploitation et de violence sexuelle et fondée sur le genre.
    Immédiatement après le séisme, en appui au travail des partenaires de la mise en oeuvre, l'ACDI a puisé dans ses réserves de fournitures d'urgence et a financé le déploiement de 12 spécialistes en aide humanitaire auprès d'organismes de l'ONU et de la Croix-Rouge. L'ACDI a complété cette aide grâce au déploiement sur le terrain, pour les cinq premiers mois de l'intervention, de huit agents humanitaires. Ces agents, dont faisaient partie quatre employés de l'ACDI intégrés à temps plein aux Forces armées canadiennes pendant leur déploiement, ont joué un rôle clé en assurant la liaison avec les Forces canadiennes et en les conseillant sur les questions humanitaires. Ils ont aussi appuyé la coordination, collaboré avec les partenaires internationaux, assuré le suivi des programmes et participé aux recommandations et à la prise de décision concernant le financement.
    Par l'intermédiaire de l'ACDI, le Canada — le deuxième donateur bilatéral en importance après le séisme — a considérablement contribué aux résultats de l'intervention internationale. Voici quelques exemples: 4,3 millions d'Haïtiens ont reçu une aide alimentaire d'urgence; 1,7 million de personnes ont eu accès à de l'eau potable; 300 000 familles ont reçu des matériaux pour des abris d'urgence; l'accès aux services de santé et aux services médicaux a été grandement amélioré; les enfants ont bénéficié d'un soutien en matière de protection et d'éducation.
    Ces derniers mois, l'ACDI a versé 7 millions de dollars en aide humanitaire additionnelle afin de combattre l'épidémie actuelle de choléra qui, à ce jour, a causé la mort de plus de 4 500 personnes.
    L'aide humanitaire canadienne vient compléter notre engagement à long terme en Haïti. Elle a produit des résultats qui se renforcent mutuellement. Il est important de signaler que le Canada fournit une aide au développement d'Haïti depuis plus de 40 ans. Haïti est l'un des pays ciblés par l'ACDI et le premier bénéficiaire en importance de l'aide au développement dans les Amériques.
    Les priorités thématiques de l'ACDI — favoriser la croissance économique durable, assurer l'avenir des enfants et des jeunes et accroître la sécurité alimentaire, notamment — orientent le travail de l'ACDI en Haïti. Le programme d'aide au développement à plus long terme de l'ACDI en Haïti est mis en oeuvre en collaboration avec des partenaires canadiens et internationaux de confiance. Il vise à satisfaire aux besoins de la population, à renforcer le gouvernement haïtien, à favoriser la stabilité et à améliorer la sécurité et l'accès aux services de base.
    En plus d'avoir fourni une aide humanitaire immédiate est considérable à la suite du séisme, le Canada a également démontré son engagement, à moyen et à long terme, à l'égard d'Haïti en promettant de verser 400 millions de dollars sur deux ans en appui au Plan d'action pour la reconstruction et le développement d'Haïti et à la réalisation des priorités du gouvernement haïtien. Le plan d'action prévoyait la création de deux organismes de coordination: la Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti et le Fonds de reconstruction d'Haïti. Le Canada est un membre proactif et stratégique de ces deux organismes.
    Le Mécanisme d'assurance contre les risques liés aux catastrophes dans les Caraïbes, ou CCRIF, un mécanisme régional de partage des risques, fait partie intégrante de l'engagement pluriannuel de 600 millions de dollars de l'ACDI dans les Caraïbes. Le CCRIF a versé plus de 8 millions de dollars américains à Haïti immédiatement après le séisme de 2010.
    Comme je l'ai dit plus tôt, je suis accompagnée de mes collègues Lise Filiatrault et Isabelle Bérard, qui peuvent répondre aux questions que vous pourriez avoir au sujet du programme de développement de l'ACDI dans les Caraïbes et en Haïti.
    Le séisme de 2010 Haïti était un événement catastrophique. Toutefois, ces dernières années, des catastrophes de moindre ampleur ont frappé la région des Caraïbes. Depuis 2007, nous avons versé plus de 12 millions de dollars à la suite de catastrophes naturelles dans les Caraïbes. La réponse de l'ACDI aux crises humanitaires dans cette région témoigne de notre approche fondée sur des principes et démontre notre volonté à améliorer notre temps de réponse et à fournir une aide plus efficace.
    Ces dernières années, l'ACDI a porté secours aux populations touchées par des ouragans et des tempêtes tropicales à Haïti, à Cuba, en Jamaïque, en République dominicaine et dans l'ensemble des petites Antilles, y compris à la Barbade, à Sainte-Lucie, à Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Elle est également intervenue après les inondations au Guatemala, au Costa Rica, au Honduras et au Nicaragua, et après le séisme de 2009 qui a frappé le Honduras.
(1555)
    L'ACDI a aussi fait d'importants investissements pour réduire les risques de catastrophes et la vulnérabilité des pays de la région des Caraïbes.
    Dans les Amériques, l'ACDI appuie le programme des préparatifs d'urgence et de secours aux victimes de catastrophes de l'Organisation panaméricaine de la santé, ou OPS, depuis plus de 20 ans. Le Canada gère actuellement le Programme de gestion des risques liés aux catastrophes pour les Caraïbes afin de renforcer, à l'échelle régionale, nationale et locale, les capacités des autorités de réagir aux catastrophes naturelles, d'en atténuer les répercussions et de coordonner les interventions. Le Canada a également contribué à la capitalisation du Mécanisme d'assurance contre les risques liés aux catastrophes dans les Caraïbes, qui a été mis en place pour réduire, en cas de catastrophe naturelle, la vulnérabilité financière des pays participants en leur donnant accès à des assurances. Depuis 2007, dans le cadre du CCRIF, des paiements d'assurance d'une valeur de plus de 33 millions de dollars ont été versés à des pays des Caraïbes, y compris le montant de près de 8 millions de dollars américains pour Haïti que j'ai mentionné plus tôt.
    Ce sont tous des exemples de notre engagement à intervenir de manière rapide, efficace et appropriée aux besoins urgents et à réduire la vulnérabilité des personnes touchées par des catastrophes naturelles. Ces exemples mettent aussi en relief les efforts constants de l'ACDI visant à améliorer sa trousse d'outils d'intervention en cas de catastrophe et à faire en sorte qu'à l'avenir, l'ACDI soit bien placée et bien préparée pour répondre aux besoins humanitaires dans la région des Caraïbes. Bien que les événements catastrophiques comme le séisme qui a secoué Haïti en 2010 mettent temporairement en lumière l'aide humanitaire fournie par l'ACDI, il n'en demeure pas moins qu'elle répond toujours — dans l'ombre — aux nombreuses crises pour lesquelles, malgré le fait qu'elles sont moins connues, les besoins humanitaires sont tout aussi pressants et l'aide tout aussi vitale. Ce sont ces différentes situations de crise, peu importe leur ampleur et le contexte, qui nous incitent à constamment adapter et améliorer notre trousse d'intervention.
    Merci.
(1600)
    Merci beaucoup.
    Sans tarder, nous allons commencer par le Parti libéral.
    Monsieur Pearson, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Permettez-moi d'abord de vous souhaiter la bienvenue et de vous dire que je ne vous envie pas les tâches auxquelles vous vous êtes attaqués au cours de la dernière année. Je suis conscient que c'est très complexe, et nous savons combien d'efforts vous avez déployés pour régler les problèmes découlant du séisme en Haïti.
    J'aimerais commencer par des questions d'ordre général et je laisserai à certains de mes collègues le soin de parler de choses plus précises.
    Le 28 février, les représentants de la Croix-Rouge sont venus témoigner. Ils nous ont parlé des nombreuses difficultés qu'ils ont connues, mais ils ont dit que chaque dollar consacré à la préparation équivaut à sept dollars en aide humanitaire. Cela me semble logique. J'ai aussi observé la même chose dans d'autres domaines. Je me demandais si vous pourriez me dire ce que fait l'ACDI à cet égard; j'aimerais aussi savoir quelle part de l'APD est consacrée à la préparation, particulièrement dans les Caraïbes. Je me rends compte que nous sommes en Haïti depuis des décennies. Quelles leçons peut-on en tirer?
    N'importe laquelle d'entre vous peut répondre.
    Je peux commencer à donner une réponse et ma collègue pourra la compléter.
    De toute évidence, vous avez entendu parler de l'intervention en cas de catastrophes, mais comme vous l'avez si bien fait remarquer, nous nous employons aussi à assurer la durabilité et à augmenter la capacité des pays d'affronter ces catastrophes, ou de les prévenir, dans la mesure du possible.
    Pour les Caraïbes, un des objectifs du programme de développement est en effet d'aider la région à réagir en cas de catastrophe. Nous avons donc un volet qu'on appelle le Programme de gestion des risques liés aux catastrophes, qui est une des composantes de notre programme d'intervention continue dans les Caraïbes. C'est ce volet qui nous permet de financer des mécanismes comme le CCRIF, dont Mme Norton a parlé, de même que le Programme de gestion des risques liés aux catastrophes pour les Caraïbes et dans le cadre duquel notre aide est offerte sous une autre forme, par un mécanisme différent. Un des aspects consiste à agir localement afin d'aider les collectivités à renforcer leur résilience. Un autre est d'aider la Caribbean Disaster Emergency Management Agency à renforcer sa propre capacité et celle des pays concernant la préparation en cas de catastrophes, les mesures d'atténuation et l'amélioration de l'équipement d'intervention.
    Nous appuyons aussi l'Organisation panaméricaine de la santé; nous étudions ce qui se fait dans le secteur de la santé, nous aidons les pays à évaluer les risques liés à la santé, comme évaluer le niveau de préparation des hôpitaux par rapport aux risques, par exemple.
    Enfin, toujours dans le secteur de la santé, nous travaillons avec la Croix-Rouge. Donc, par l'entremise du programme d'aide humanitaire internationale, nous examinons les deux aspects, la préparation et l'intervention en cas de catastrophe.
(1605)
    J'ajouterais seulement deux ou trois choses. Je suis désolée, je m'attendais à ce que vous me posiez environ trois questions. C'est pourquoi nous avons quelque peu hésité. Je suis habituée à ce qu'on me pose plusieurs questions à la fois, et non une seule.
    Nous ne pouvons pas vous fournir immédiatement le pourcentage de l'APD consacré à la réduction des risques de catastrophe. Nous devrons faire quelques calculs et vous revenir là-dessus.
    Les chiffres fournis par la Croix-Rouge canadienne sont les mêmes que ceux que nous avons entendus précédemment par rapport à l'importance de la réduction du risque. C'est pourquoi le Canada a été très actif à l'occasion de la Conférence mondiale sur la prévention des catastrophes qui s'est tenue à Kobe en 2005. Nous avons été très heureux de constater que le document définitif reflète bien le point de vue canadien. À l'échelle internationale, nous sommes très engagés sur cette question. Un des engagements découlant de la déclaration de Kobe était de lier les mesures de prévention des catastrophes aux programmes d'aide internationale bilatéraux, ce que nous nous employons activement à réaliser, comme tous les pays donateurs, tous les signataires du document de Kobe.
    Pour ce qui est de l'aspect humanitaire, nous ne nous concentrons pas sur tous les aspects de la réduction des risques de catastrophe, mais seulement sur la préparation. Par exemple, la Croix-Rouge canadienne a peut-être mentionné l'initiative des premiers intervenants, c'est-à-dire le personnel médical qui a été déployé en Haïti pour appuyer l'intervention actuelle par rapport au choléra. Dans le cadre de ce programme, nous nous employons à créer, dans les Amériques, la capacité de certaines sociétés nationales de la Croix-Rouge . C'est un des trois aspects du projet. Nous finançons aussi les activités de préparation de l'OPS, l'Organisation panaméricaine de la santé. Donc, nous avons plusieurs projets, mais nous n'avons pas de pourcentage à vous donner.
    Vous avez dit qu'il n'y avait pas de cible de financement pour l'APD. Récemment, je suis allé à Washington pour parler à des responsables de l'aide américaine. Ils étudient le climat et ce qui se dit, et ils se rendent compte qu'au fil du temps, le nombre de catastrophes va augmenter. Je sais que vous êtes plus au courant de cela que moi. Ils envisagent des mesures plus ciblées en cas de catastrophe.
    Compte tenu des sommes que nous avons investies en Haïti en 40 ans — cette situation était si catastrophique, et il est difficile de se préparer pour quelque chose d'aussi dévastateur, qui détruit autant d'infrastructures —, j'aimerais savoir si vous songez à utiliser les fonds de l'APD consacrés à la préparation et au développement de façon plus ciblée, plus précisément parce qu'au fil du temps, une portion de plus en plus grande du budget de l'ACDI ira à l'intervention en raison de l'augmentation de la fréquence des catastrophes naturelles, d'autant plus que les Canadiens participent à ces interventions.
    Je me demande simplement si vous pensez que la nécessité de cibler davantage les fonds de l'APD est une des leçons que l'on peut tirer d'Haïti. Ce n'est qu'une question, une seule question.
    Ce que je dirais, c'est qu'il y a beaucoup d'aspects à considérer, que ce soit pour se préparer en vue de catastrophes naturelles ou pour les prévenir. Par exemple, certains sont liés à une meilleure gestion des bassins hydrologiques ou à la gestion des ressources naturelles, tandis que d'autres sont liés à l'augmentation de la capacité des institutions qui sont directement concernés par la préparation en cas de catastrophe naturelle. Je pense que la question de l'amélioration de la préparation en vue de catastrophes naturelles ou de la prévention des catastrophes naturelles comporte de nombreux aspects. Nos interventions continues auprès de plusieurs pays — dans le cadre de notre programme bilatéral — sont faites en fonction des besoins que les pays eux-mêmes auront évalués. Les aspects dont nous nous occupons varient en fonction du but de notre intervention.
    Par exemple, étant donné que les Caraïbes sont 12 fois plus susceptibles d'être touchées par une catastrophe que d'autres régions, on a conclu que c'était une région très encline à demander l'aide du Canada, et nous leur donnons. Dans d'autres régions, il est possible qu'on demande une aide semblable d'autres pays, ou il se peut qu'on nous demande de nous concentrer sur certains aspects. Je pense à l'Amérique centrale, où nous offrons aussi une aide, mais elle est davantage liée à la gestion des bassins hydrologiques, par exemple. Donc, notre approche varie en fonction des particularités de chaque région.
    Pour ce qui est d'avoir un fonds réservé à des fins précises, nous savons que cela a été suggéré, mais comme je l'ai mentionné, notre aide peut prendre de nombreuses formes.
    Je voudrais seulement ajouter que ce n'est pas toujours une question d'argent. Souvent, c'est une question de programmation. Il y a 15 ou 20 ans, quand nous avons commencé à parler de sexospécificité, nous devions nous assurer que cet aspect était intégré à notre travail de développement. Dans le cas présent, c'est sensiblement la même chose; nous devons nous assurer d'examiner tous les aspects d'un point de vue de la réduction du risque. Donc, encore une fois, ce n'est pas toujours une question d'argent.
    Pour ce qui est de l'engagement à atteindre certaines cibles, je pense qu'il s'agit d'une décision stratégique qui relève du ministre. Je voulais simplement préciser que ce n'est pas toujours une question d'argent, mais de programmation. C'est une question de programmation intelligente.
(1610)
    Merci.
    Merci, monsieur Pearson.
    Nous allons revenir pour un deuxième tour; nous arriverons donc au bon docteur pendant la prochaine série de questions.
    Nous poursuivons avec Mme Deschamps.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup nos témoins de leur présence ici aujourd'hui. Évidemment, on a beaucoup de questions à poser sur ce qui s'est passé depuis le séisme jusqu'à aujourd'hui.
    J'aimerais reprendre un petite partie de votre allocution, madame Norton. Vous avez dit que lorsque le séisme a frappé en 2010, l'ACDI avait utilisé tous les outils dont elle disposait dans sa trousse d'intervention. Vous avez aussi dit, et je cite: « La prestation de services de protection a répondu par ailleurs aux risques plus élevés de mauvais traitements, d'exploitation et de violence sexuelle et sexiste auxquels s'exposaient les plus vulnérables dans les camps précaires. »
    Le Sous-comité des droits internationaux de la personne étudie présentement la question des violences sexuelles à l'égard des femmes dans les pays en conflit ou touchés par ce genre de catastrophes.
    Je ne sais pas si vous connaissez Concertation pour Haïti. Il s'agit d'un regroupement comprenant des ONG, des membres de la société civile et des membres individuels du Québec oeuvrant tant sur le plan de la coopération internationale que sur celui de la promotion des droits humains. Des représentants de ce regroupement disaient qu'au lendemain du séisme, l'ACDI avait convoqué l'ensemble de ses partenaires et avait également avisé certains d'entre eux que des projets touchant les droits humains et les droits des femmes ne seraient plus financés parce que ces enjeux n'étaient plus prioritaires dans le contexte de l'après-séisme.
    Pourriez-vous m'éclairer sur ce point? C'est un peu en contradiction avec ce que Mme Norton nous disait dans le rapport de Concertation pour Haïti.
    Madame Deschamps, je vais d'abord répondre à une partie de votre question. Ensuite, je vais laisser ma collègue, Mme Norton, parler des questions relatives à la violence faite aux femmes.
    Nous connaissons vaguement le regroupement Concertation pour Haïti. On sait qu'il s'agit de quelques ONG qui se réunissent et se concertent pour discuter d'un certain nombre de questions.
    Il est vrai que nous avons eu une réunion à la suite du séisme et que nous avons rencontré nos partenaires. On a tenu à le faire à la suite du séisme. On a rencontré l'ensemble de nos partenaires, on a mentionné qu'on faisait face à une catastrophe majeure et on s'est demandé ce qu'on allait faire.
    Tout d'abord, on a recueilli leurs suggestions et commentaires sur la façon de procéder pour savoir comment on pouvait collaborer avec eux. Ensuite, lors de cette rencontre, nous avons indiqué à nos partenaires que nous allions faire une petite pause dans notre programmation. Il était question, bien sûr, de la programmation à long terme et non celle d'urgence. Nous avons aussi dit que nous allions voir comment nous pourrions ou souhaiterions réaligner un certain nombre d'initiatives.
    Je n'ai pas de souvenirs clairs à savoir si nous avons parlé des droits de la personne ou de quoi que ce soit de cette nature. Cependant, nous avions effectivement déjà annoncé à nos partenaires que nous souhaitions revoir comment notre programmation allait pouvoir se poursuivre et comment nous allions répondre aux besoins immédiats de la population, compte tenu des circonstances. C'est ce que nous avons fait. Nous avons repris nos activités à long terme très rapidement et la vaste majorité de ces initiatives se sont poursuivies. Il n'y a donc pas eu de problème particulier sur ce plan.
    Pour s'occuper du manque de protection dans les camps, l'ACDI a fourni un financement au Fonds des Nations Unies pour la population et à l'UNICEF, car ces deux organisations de l'ONU traitent de ces enjeux de violence.
    De plus, le ministère des Affaires étrangères a un projet avec le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme, en partenariat avec la police nationale haïtienne, afin que celle-ci assure un suivi dans les camps de personnes déplacées. C'était un projet d'environ 1 million de dollars.
    Une autre question qui a fait les manchettes concerne cette fameuse académie de police, qui avait d'ailleurs été annoncée auparavant. Je crois que cela faisait partie du plan quinquennal 2006-2011 de 550 millions de dollars. La construction de l'académie de police avait été annoncée trois mois après le séisme et le Canada devait s'engager à débourser 18 millions de dollars.
    En mars dernier, on a appris que le projet ne fonctionnait pas, qu'il y a eu plusieurs soumissionnaires, mais que ces derniers ne respectaient pas les exigences. D'autres soumissionnaires ont-ils déposé une offre? On avait quand même pensé à ce projet avant le séisme. C'était une priorité de la ministre quelques mois après le séisme.
(1615)
    En effet, le premier appel d'offres pour l'académie de police a été lancé en décembre 2009. Le 13 ou 14 janvier devait avoir lieu, à Port-au-Prince, une assemblée des soumissionnaires pour répondre aux questions.
    Évidemment, compte tenu des événements, on a dû suspendre cet exercice. Il a été relancé en avril dernier. Comme vous l'avez souligné, l'initiative a elle-même été identifiée dans le plan quinquennal du gouvernement haïtien pour la reconstruction d'Haïti.
    Nous avons donc relancé cet appel d'offres aussi rapidement que nous avons pu le faire, en fonction de la situation. Il y a eu deux soumissionnaires. Pour des raisons techniques, on a dû annuler le processus.
    Nous souhaitons le relancer le plus rapidement possible puisque c'est considéré comme une priorité. Notre désir est d'aller de l'avant avec ce projet. Nous allons le faire le plus rapidement possible.
    J'aimerais comprendre un peu mieux comment cela fonctionne sur le plan du cadre financier. Vu de l'extérieur, quand on n'a pas le nez dans la soupe, j'ai l'impression qu'une chatte y perdrait ses petits.
    Une enveloppe de 400 millions de dollars a été annoncée par le gouvernement. On dit que, de ce montant, 110 millions de dollars sont allés au fonds de jumelage, 33 millions de dollars à l'annulation de la dette, 30 millions de dollars au fonds de la reconstruction, 10 millions de dollars aux Affaires étrangères, 5 millions de dollars au ministère de l'Environnement, 20 millions de dollars au Programme alimentaire mondial, 30 millions aux organisations canadiennes, 7,2 millions de dollars à cinq municipalités choisies par le Canada et 5 millions de dollars pour lutter contre l'épidémie.
    Comment fait-on pour se retrouver dans tout cela? Ce n'est pas très clair non plus sur le site Web. Je comprends même ce qu'ont vécu les journalistes quand ils ont essayé de décortiquer tout cela.
    N'ayant peu ou pas d'information, on a l'impression que vous avez donné à peine le tiers de cet argent. En fait, on l'a senti de la part des organisations qui s'y perdent dans tout cela. On vous reproche peut-être un manque de transparence et de reddition de comptes.
    Je vais vous répondre sur les montants, mais pas sur les reproches liés à la transparence.
    C'est bel et bien une question à considérer. On a eu à discuter de ces questions avec les journalistes et avec les gens qui posent beaucoup de questions. On essaie de trouver la façon la plus simple de fournir l'information.
    Il est vrai que, sur notre site Internet, il y a un sommaire des données financières. Tout ce que nous avons réalisé jusqu'à ce jour se trouve sur ce site. En somme, le site essaie de toucher à deux choses bien spécifiques. Il s'agit du financement, ou les crédits que nous recevons du gouvernement pour financer les activités, et cet engagement à égaler les sommes qui ont été recueillies par les organisations canadiennes.
    En ce qui a trait au financement que l'on trouve sur le site Internet, que vous pouvez tous consulter — ce que vous avez visiblement fait, madame Deschamps —, on parle d'abord de cette enveloppe de 555 millions de dollars qui avait été promise en 2006 pour une période de cinq ans. Les détails de tout cela se trouvent sur le site. Il y a les détails sur l'assistance humanitaire, telle qu'elle a été livrée, et c'est ce dont mes collègues Leslie et Elissa vous ont parlé un peu plus tôt. Tout cela aussi est détaillé. Le 31 mars dernier, nous avons annoncé un montant supplémentaire de 400 millions de dollars pour la reconstruction, ce qui, en somme, prolongeait l'intervention du Canada d'une année — puisque notre engagement original allait jusqu'en 2011 et que nous nous sommes engagés jusqu'en 2012 — et qui s'additionnait aux sommes qui avaient déjà été annoncées précédemment.
    Lors de la conférence à New York, la ministre a finalement annoncé que la somme versée par les Canadiens aux organisations canadiennes serait de 220 millions de dollars. À ce moment-là, la ministre Oda s'est engagée à égaler ces fonds.
    Maintenant, lorsqu'on parle du montant de 555 millions de dollars, de l'assistance humanitaire et du montant de 400 millions de dollars, on touche aux crédits qu'ils nous ont octroyés. En ce qui a trait au fonds de jumelage, nous ne recevons pas de financement pour cela. Il faut donc qu'on le finance. Il est financé à partir de l'assistance humanitaire et du montant de 400 millions de dollars. C'est durant la réunion à New York que Mme Oda a dit qu'au moins 110 millions de dollars, ou la moitié du fonds, seraient jumelés au cours des prochaines années.
    Il faut donc faire la distinction entre le montant de 555 millions de dollars, l'assistance humanitaire et le montant de 400 millions de dollars. Ce sont toutes des sources d'argent, et cette mécanique nous permet d'égaler les dons des Canadiens.
    Si vous visitez le site Internet, vous trouverez la liste des activités qui ont été financées à même le montant de 400 millions de dollars. Vous en avez mentionné quelques-unes et la liste est actuellement complète. Il s'agit de l'ensemble des initiatives qui ont été annoncées, soit 202 millions de dollars sur les 400 millions de dollars, et le fonds de jumelage, qui est financé à partir de l'assistance humanitaire et du montant de 400 millions de dollars. Là aussi, les initiatives sont inscrites.
    En somme, c'est comme si le fonds était financé par l'assistance humanitaire et les fonds de reconstruction. Nous identifions des initiatives à l'intérieur de ce fonds de jumelage. Les initiatives comme telles sont aussi inscrites. Il y a donc une juxtaposition entre les initiatives financées à partir du montant de 400 millions de dollars et celles qui font partie du montant de 110 millions de dollars.
(1620)

[Traduction]

    Merci.
    Je suis toujours inquiet lorsqu'un député me dit qu'il a une courte question. C'est toujours une longue question qui demande une longue réponse.
    Passons à M. Lunney.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui pour participer à cette discussion importante. J'aimerais débuter par un commentaire que j'ai entendu aujourd'hui. Premièrement, je crois avoir entendu que l'ACDI avait participé à 49 interventions au cours de l'année du séisme en Haïti. Ce pays a profité de la plus importante intervention pangouvernementale probablement jusqu'à maintenant — je crois que vous avez parlé d'environ 14 ministères.
    J'ai entendu un commentaire au sujet de la stratégie intégrée et globale de collaboration entre l'ACDI et les Forces canadiennes, par exemple, et j'en ai été témoin. Madame Golberg, vous êtes actuellement directrice générale du Groupe de travail pour la stabilisation et la reconstruction. J'ai eu la chance de voyager en Afghanistan avec le Comité de la défense et je crois que je vous ai entendue parler des leçons tirées de l'Afghanistan.
    Lorsque le Comité de la défense était là-bas, j'ai été très impressionné par notre équipe provinciale de reconstruction, et Mme Golberg en était la responsable: la représentante du Canada à Kandahar. À la table, il y avait des représentants de la province, des élus et le général en poste à l'époque, qui était, je crois, le général Thompson, mais c'était Mme Golberg qui dirigeait.
    Je crois que c'était vraiment significatif pour les Afghans de voir la manière dont notre gouvernement était intervenu. Je dois dire aux fins du compte rendu qu'en tant que membre du Comité de la défense, j'ai été très impressionné de voir de quelle manière cela influait sur nos efforts pour reconstruire la province.
    Je reviens au sujet. J'ai entendu dire que l'OCDE avait félicité le Canada pour sa stratégie d'intervention rapide. Je crois que c'est un bon début. Nous avons d'autres questions, mais c'est important pour nous de comprendre le processus qui a mené à la création de l'ESSI. Vous avez dépêché très rapidement votre personnel en Haïti pour évaluer la situation. Pourriez-vous nous décrire de quelle manière cela s'est déroulé, nous dire qui vous avez envoyé et nous expliquer de quelle manière cela a en fait fonctionné?
(1625)
    Avec joie. L'idée derrière l'ESSI remonte en fait à plusieurs années; c'est en lien avec les procédures normalisées de fonctionnement dont je parlais plus tôt. Il s'agit d'un dossier en progression depuis plus de 15 ans.
    Je suis certain que M. Goldring se rappellera qu'à une certaine époque nous ne les avions pas. À la suite des leçons tirées de l'ouragan Mitch, le gouvernement a décidé qu'il fallait adopter des procédures normalisées de fonctionnement. L'époque où nous devions recommencer à zéro chaque fois qu'un évènement survenait était révolue; il nous fallait des procédures en place pour que les gens comprennent ce que nous attendions d'eux et des divers ministères. Par exemple, nous devons nous assurer d'être formés ensemble à l'avance, de participer à des exercices sur table et de procéder à des évaluations après chaque crise majeure pour en tirer des leçons.
    L'ESSI a évolué au fil des années. Étant donné que nous déployons l'EICC et d'autres ressources canadiennes en plein coeur de l'action, nous avons conclu qu'il nous fallait une équipe pangouvernementale qui irait analyser la situation sur le terrain dans le cas d'évènements catastrophiques.
    L'équipe est menée par le ministère des Affaires étrangères, mais elle inclut aussi des collègues du MDN — c'est généralement le commandant de l'EICC, mais pas nécessairement seulement lui. Les Forces canadiennes possèdent beaucoup de ressources auxquelles nous pouvons faire appel. Parfois, l'EICC n'est peut-être pas l'outil approprié pour la tâche. Nous pourrions plutôt avoir besoin d'ingénieurs des Forces canadiennes ou de leur capacité de transport aérien.
    Donc, c'est le MAECI, le MDN, un collègue de l'ACDI, provenant normalement de la Direction de Leslie — la direction de l'assistance humanitaire — et parfois des... Tout dépend des circonstances. Comme je l'ai dit, selon le type de crise, nous incluons parfois d'autres collègues du gouvernement du Canada. Par exemple, après le tsunami, un collègue de l'Agence de la santé publique du Canada, l'ASPC, s'est greffé à l'équipe, parce que nous croyions que nous aurions besoin de son expertise pour gérer cette crise en raison des nombreux morts et blessés.
    Les membres de l'ESSI sont déterminés à l'avance. Les gens connaissent les membres. L'ESSI est normalement dirigé par moi ou par le directeur des affaires humanitaires et des interventions lors de catastrophes. Les membres de cette équipe sont formés ensemble à l'avance. Un exercice se tient annuellement. Nous essayons de nous assurer qu'il y a beaucoup d'interactions et de communication entre les gens. Nous avons une liste de points à vérifier et d'éléments à préparer. Nous nous sommes servis des pratiques exemplaires internationales comme modèle.
    Lorsque l'équipe est déployée, le but du Canada n'est pas de répéter... Il s'agit de l'un des autres risques auxquels il faut faire attention avec une ESSI. Nous choisissons avec soin le moment où nous la dépêchons sur place. Comme Leslie l'a dit, le Canada a déjà investi des millions de dollars dans un système multilatéral international. Tous nos partenaires membres de l'ONU, la Croix-Rouge internationale et les autres ont des équipes pour évaluer la situation.
    Lorsque le gouvernement décide de dépêcher son ESSI, c'est qu'il croit que les organismes civils auront peut-être besoin de l'aide de partenaires bilatéraux comme le Canada. Lorsque notre équipe arrive sur le terrain, nous nous assurons qu'elle accomplit son travail; elle doit coopérer avec le gouvernement touché, comprendre ses besoins et se coordonner avec toutes les autres équipes d'évaluation déployées sur place. Nous ne devenons pas un fardeau additionnel; nous essayons de comprendre ce dont ce gouvernement a besoin dans cette situation précise et ce que le gouvernement canadien peut lui offrir.
    Je vous remercie de votre commentaire. Les gens à Kandahar ont dit qu'ils aimaient l'approche canadienne qui consiste à arriver sur le terrain et à leur demander ce que nous pouvons faire pour les aider, au lieu de leur dire ce dont ils ont besoin.
    Nous avons aidé quelque 4,3 millions d'Haïtiens, selon ce qui a été dit aujourd'hui. Nous avons fourni de l'eau potable et des matériaux pour construire des abris, et nous avons donné accès à des services de santé à 1,7 million de personnes. Les enfants ont été protégés, éduqués et soutenus dans les premiers temps.
    Nous étions dans un pays dont la capacité institutionnelle avait pratiquement été neutralisée: les structures du gouvernement s'étaient effondrées, les édifices étaient détruits, la confusion régnait dans les bureaux et des gens manquaient à l'appel. Certains, dont Oxfam, ont critiqué la lenteur des efforts internationaux de reconstruction, étant donné que beaucoup d'argent était disponible. La CIRH a été créée en avril 2010, et je crois qu'elle a donné son aval à quelque 74 projets.
    J'aimerais que vous nous parliez des défis — les épidémies de choléra, la capacité institutionnelle réduite, le chaos social — que cet environnement pose aux agences internationales qui essayent d'y offrir des services.
(1630)
    Je vais commencer à répondre, puis je vais passer la parole à Lise.
    Un certain nombre d'organismes expriment parfois leur frustration au sujet de la lenteur de la reconstruction, mais je crois que le Canada a clairement affirmé dès le début que ce serait un marathon et non un sprint. Devant l'ampleur de la dévastation, le premier ministre a dit qu'il faudrait environ 10 ans. C'est important, parce que nous nous fondons sur les leçons tirées des autres crises internationales. La communauté internationale a tendance à verser toute son aide au début, puis à se lasser. Elle souffre d'un trouble déficitaire de l'attention et elle en oublie que ce qui a été détruit prendra beaucoup d'années à reconstruire.
    J'aimerais mentionner l'impact du séisme sur le gouvernement haïtien. Il a perdu la majorité de ses hauts fonctionnaires travaillant dans les ministères; il a perdu tout son ministère s'occupant de la planification. Des édifices se sont écroulés. Des gens qui étaient nos partenaires clés sont morts à leur bureau. Pour être capables de surmonter ce manque d'effectif, nous devons savoir qui seront les nouvelles personnes avec lesquelles nous travaillerons.
    C'est la même situation du côté de l'ONU. Nous levons notre chapeau à l'ONU, qui a perdu 101 personnes, dont le représentant spécial du Secrétaire général, lors du séisme. C'est la plus lourde perte humaine subie par l'ONU en un seul évènement.
    Nous avons perdu les Canadiens Doug Coates et Mark Gallagher ainsi que six autres Canadiens qui travaillaient pour la mission de l'ONU. Ces pertes nous ont aussi causé un problème de personnel, parce que nous devions trouver de nouveaux contacts. Nous avons donc essayé au cours des derniers mois de rétablir des relations avec nos collègues au sein de ces institutions sous la supervision du premier ministre Bellerive, qui dirige les efforts haïtiens. Il est un excellent partenaire pour le Canada. Je voulais vous donner un aperçu de l'ampleur de la crise.
    Comme vous l'avez bien souligné, Elissa, le gouvernement haïtien a perdu 17 p. 100 de ses fonctionnaires; ces gens se trouvaient dans les édifices à 16 h 53 en cette journée fatidique. Il s'agissait principalement de gestionnaires et de membres de la direction, les gens avec qui nous communiquons normalement. De plus, 40 p. 100 de l'infrastructure gouvernementale a été détruite. Nous devons faire face à une destruction massive, comme nous l'avons mentionné à de nombreuses reprises.
    La CIRH a été créée en avril dernier, comme vous l'avez mentionné, tout juste après la conférence de New York. Nous nous sommes réunis cinq fois depuis. J'utilise le « nous », parce que David Moloney, le premier vice-président de l'ACDI, est le représentant canadien à la CIRH.
    Nous avons été très chanceux d'une certaine façon. Au tout début de la CIRH, nous avons eu l'occasion de rencontrer l'ancien directeur général de la commission indonésienne de reconstruction: cette commission était chargée de la reconstruction du pays après le tsunami. N'oubliez pas que cette commission ne devait reconstruire qu'une très petite partie de l'Indonésie, et le pays disposait d'un gouvernement tout à fait opérationnel à Jakarta. Le contexte de la CIRH est complètement différent; de ce point de vue, nous sommes dans une situation très spéciale. C'est unique. Nous n'avons jamais dû travailler dans de telles circonstances.
    Le directeur général de la commission indonésienne de reconstruction était très clair à ce sujet. Leur commission est devenue pleinement opérationnelle après 18 mois — les Indonésiens ont pris 18 mois à rendre leur commission pleinement opérationnelle; un an plus tard, la CIRH... Elle n'est pas parfaite. Toutefois, n'oubliez pas que la commission compte 14 représentants haïtiens, les gouvernements de divers pays, des organismes multilatéraux et des donneurs que je qualifierais de donneurs non traditionnels: des pays qui n'ont jamais participé au développement international, mais qui veulent aider et participer à cette expérience. C'est excellent, mais cela rend la situation un peu complexe.
    Cela étant dit — comme je l'ai dit, nous avons tenu cinq réunions — la CIRH a un plan stratégique. Nous avons établi des objectifs très précis et nous avons approuvé des projets. En vous rendant sur le site Web, vous pourrez trouver beaucoup plus de renseignements sur la CIRH.
    Nous commençons à voir les résultats des préparatifs qui ont débuté en avril dernier. Par exemple, en ce qui concerne l'enlèvement des décombres, l'objectif pour octobre prochain était d'avoir enlevé au moins 40 p. 100 des décombres. Nous progressons bien; nous avons fait la moitié du chemin. Lors de la dernière réunion, la CIRH a fait passer l'objectif de 40 p. 100 à 60 p. 100. Nous sommes convaincus de pouvoir l'atteindre avec plus de financement, si d'autres donneurs souhaitent nous aider, par exemple.
    Au sujet de l'eau et de l'hygiène publique, nous atteignons les objectifs qui avaient été fixés en août dernier et...
(1635)
    Je dois vous interrompre là. Le temps est écoulé.
    Passons maintenant à M. Rafferty. Bienvenue au comité.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Bienvenue à tous. Merci d'être venus ici aujourd'hui. J'ai déjà rencontré certains d'entre vous, et j'aurais des questions à vous poser.
    Dans le court laps de temps qui m'est accordé, je vais essayer de poser une question à chacun d'entre vous, parce que je ne veux pas que vous vous soyez déplacés pour rien.
    Madame Fortier, je n'ai pas encore trouvé la question que je vous poserai, mais je trouverai bien.
    J'ai une ou deux questions sur le Honduras. Voici la première: très brièvement, que pensez-vous de la situation économique et politique actuelle de ce pays? Je ne veux pas un long traité sur le sujet, mais seulement un bref aperçu.
    En ce qui concerne les points positifs, nous pouvons examiner les élections d'hier. Je crois que la communauté internationale a poussé un grand soupir de soulagement. Les élections se sont bien déroulées. Il y a eu certains problèmes de sécurité. M. Aristide est revenu, mais il n'a pas fait de déclaration sur les élections et n'a pas demandé à ses partisans de descendre dans les rues. En général, les Haïtiens ont voté. Il y a eu certaines irrégularités. Les systèmes électoraux haïtiens ne sont pas parfaits. Par contre, nous croyons qu'il s'agissait d'élections transparentes et somme toute bien organisées. Donc, sur ce point, nous sommes optimistes au sujet d'Haïti.
    Si vous m'aviez posé la question samedi, personne ne pouvait dire avec certitude ce qui se passerait. Évidemment, à cet égard, nous attendons maintenant avec impatience le dépouillement des votes et l'installation de la nouvelle présidence.
    Je vous remercie d'avoir si bien répondu, mais en fait, ma question portait sur la situation politique au Honduras.
    John, nous allons passer une demi-heure sur le Honduras, c'est-à-dire de 17 h à 17 h 30. Vous pourrez poser toutes vos questions à ce moment-là.
    D'accord. Oubliez mes questions sur le Honduras dans ce cas.
    Oui. Je parle d'Haïti en ce moment.
    D'accord. Nous nous concentrons sur Haïti maintenant.
    C'était quand même une excellente réponse.
    En effet, c'était une excellente réponse, et j'en suis reconnaissant.
    Des voix: Oh, oh!
    Nous n'avons pas parlé de l'économie, qui est un autre sujet, mais je vais laisser tomber.
    D'accord, je vais maintenant poser mes questions sur Haïti.
    Le Canada et les Canadiens ont pris des engagements financiers énormes envers Haïti — le Canada a l'une des populations les plus généreuses dans le monde —, mais un grand nombre de personnes trouvent encore les montants totaux associés à ces engagements et les contributions équivalentes et tout le reste difficiles à définir. Je me demande, premièrement, si vous êtes en mesure de garantir aux Canadiens que leurs dons pécuniaires ont été égalés par le gouvernement, et que l'argent a été dépensé de façon appropriée.
    Mme Norton ou Mme Bérard pourraient peut-être répondre à cette question.
    Comme vous l'avez dit, les Canadiens ont été extrêmement généreux; ils ont en effet donné 220 millions de dollars aux organisations caritatives. Nous ne sommes pas responsables de l'argent qui a été donné à ces organisations; chacune d'elles est chargée de présenter un rapport à ses donateurs. Nous nous sommes engagés à verser une contribution équivalente, ce qui signifie 400 millions de dollars pour la reconstruction et l'aide humanitaire. Pour le moment, 88 p. 100 des fonds de contrepartie ont été affectés à différentes initiatives. Nous devons attendre le 31 mars pour vous donner d'autres renseignements précis sur les sommes dépensées, et nous pourrons vous faire parvenir l'information. Mais à mon avis, la moitié de cette somme sera certainement dépensée d'ici le 31 mars.
    Madame Norton, j'ai une question pour vous. En ce qui a trait à Haïti, est-ce que quelqu'un, dans le gouvernement Harper, a déjà répondu « non » à une demande de l'ACDI? Je pose cette question simplement pour la forme.
    En fait, c'est comme une question qu'on pose pendant une entrevue. Vous savez, quand on vous demande, au cours d'une entrevue, de parler de vos points faibles — cela arrive, enfin je crois que c'est toujours le cas —, et il s'agit de la question que les gens craignent le plus. En ce qui a trait à la reconstruction, quels ont été les défis les plus importants auxquels vous avez fait face? Je ne vous demande pas nécessairement de me parler de vos faiblesses, mais de l'aspect qui vous a causé le plus de difficultés.
(1640)
    À mon avis, il s'agit certainement de la capacité de nos interlocuteurs, surtout ceux du gouvernement, mais aussi ceux des organismes locaux avec lesquels nous avons collaboré. Il s'agit sans aucun doute de notre défi le plus important.
    Évidemment, en ce qui a trait à la reconstruction comme telle, on a déjà mentionné la délivrance de titres de propriété et l'enlèvement des débris. Je suis sûre que vous avez entendu dire que ces aspects faisaient toujours partie des défis que nous devons surmonter.
    Une nouvelle saison de tempêtes s'annonce en 2011. Selon vous, le travail de préparation que vous avez accompli suffira-t-il à faire en sorte que Haïti soit prêt à temps pour affronter la saison des ouragans? Je pense notamment à la reconstruction qui est en cours et...
    Me demandez-vous s'il va y avoir une tempête ou non?
    Tout ce que nous pouvons dire, c'est que nous sommes conscients que Haïti est sujet aux catastrophes naturelles. C'est une réalité avec laquelle nous devons souvent composer. Par exemple, les Nations Unies ont déjà commencé leurs activités préparatoires depuis plusieurs mois déjà, en prévision de la prochaine saison des ouragans. Elles ont planifié leurs mesures d'urgence et la façon dont elles allaient réagir à la situation. C'est d'ailleurs l'un de nos partenaires principaux. L'ambassade collabore étroitement avec l'équipe chargée de la préparation et de la planification des mesures d'urgence.
    Les choses iront-elles mieux cette fois-ci? Je m'attends à ce que des défis importants surgissent, et nous devrions tous nous y attendre. On compte encore des centaines de milliers de personnes sans abri permanent. Des gens vivent toujours dans des régions sujettes aux catastrophes naturelles, c'est-à-dire les terres basses et déboisées. Les défis auxquels nous étions confrontés avant le tremblement de terre existent donc toujours.
    Nous essayons donc de renforcer la capacité de nos partenaires internationaux sur le terrain, mais aussi celle de nos partenaires haïtiens également sur le terrain, afin qu'ils soient en mesure de mieux réagir lorsque les évènements se produisent. Ainsi, les procédures d'évacuation sont plus efficaces et les municipalités savent ce qu'on attend d'elles.
    Mon équipe collabore activement avec l'Ambulance Saint-Jean à un projet qui consiste à former les agents de la police nationale d'Haïti, afin qu'ils soient mieux préparés à gérer ces crises, étant donné qu'ils sont les premiers intervenants.
    Nous travaillons tous dans le but de fortifier les institutions qui devront gérer une crise, car une crise se profile.
    À ce sujet, et à propos de la gouvernance en particulier, vous avez parlé des centaines de milliers de gens déplacés, et c'est malheureux. Ce dont j'aimerais que vous parliez, ce sont des progrès relatifs à la tenure et aux droits fonciers dans le pays. La dernière élection permet-elle d'espérer des progrès de ce côté?
    Comme je l'ai mentionné, les droits fonciers représentent un défi redoutable. En raison de la situation électorale, il a bien sûr été un peu difficile, depuis novembre dernier, de sensibiliser le gouvernement à la question. Cela dit, la Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti a déjà approuvé — je devrai vérifier mes données — environ cinq ou sept projets différents liés au logement. Ces projets comprennent évidemment des initiatives relatives à la délivrance de titres de propriété.
    Oui, nous attendons que le nouveau gouvernement s'installe et entame une discussion plus méthodique sur la façon de régler cette situation. Mais on travaille actuellement à élaborer des objectifs afin que nous puissions progresser une fois que nous aurons...
    Pensez-vous qu'il s'agit probablement du plus grand obstacle à la relocalisation des gens déplacés?
    C'est en effet un obstacle majeur, comme l'enlèvement des débris, qui représente un autre défi important.
(1645)
    Merci, John.
    Nous allons terminer là-dessus. La parole est maintenant à M. Van Kesteren, pour cinq minutes...
    Nous allons passer à M. Goldring.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci de comparaître ici aujourd'hui.
    Je tiens d'abord à féliciter chaleureusement le ministre et toutes les personnes qui ont participé à la gestion de cette catastrophe. Il doit leur avoir été extrêmement difficile de s'aventurer sur la scène des évènements qui ont fait autant de disparus, parmi lesquels se trouvaient probablement des collègues.
    J'étais sur place en 2006, et j'ai vraisemblablement été aussi en contact avec certaines des personnes à l'époque. Il s'agissait d'un effort colossal, qui témoigne de ce que le gouvernement du Canada peut faire lorsque de graves évènements se produisent.
    J'aimerais discuter un peu plus en détail de la question des logements. Lorsque les gens de la Croix-Rouge sont venus, ils ont évalué qu'environ un million de personnes avaient besoin d'un logement. Ils ont calculé environ cinq personnes par logement, ce qui signifie qu'on a besoin de 200 000 logements. Ces logements sont vraiment provisoires, car il s'agit tout bonnement de boîtes de contreplaqué. La construction des logements permanents n'a pas encore débuté.
    D'après ce que je comprends, environ 30 000 logements ont été procurés à ce jour. Si on fait le calcul, cela signifie que nous serons encore en train de construire des logements provisoires dans cinq ans. Ces centaines de milliers de gens vivent sous des bâches, en raison des conditions météorologiques, j'imagine. J'aimerais faire remarquer que l'arrivée d'un autre ouragan pourrait provoquer une énorme catastrophe, ce qui fait de cette région une zone à risque élevé.
    Le problème semble provenir du régime foncier et de l'enlèvement des débris. Un coup d'oeil au logement en question suffit pour présumer qu'il est portatif. Je ne vois donc pas pourquoi le régime foncier représenterait un obstacle à la construction de ces maisons. Un calcul rapide au sujet des 30 000 logements qui ont déjà été construits nous donne une moyenne d'environ 100 par jour. Une équipe composée de 10 personnes peut assembler des feuilles de contreplaqué et des logements à ce rythme.
    Si le problème tourne autour du régime foncier, je suis vraiment inquiet; ne pourrait-on pas contourner ce problème et construire les logements de toute façon? Peu importe où on les construit ou qui possède le terrain; on peut régler ces questions plus tard. N'est-ce pas envisageable?
    Il y a deux volets à cela: la politique et l'exécution.
    Pour ce qui est de la politique, je me contenterai de dire que les titres fonciers constituent un problème, car les principaux propriétaires en Haïti possèdent la majeure partie du territoire. On doit, entre autres, essayer de voir si les gens qui sont déplacés possèdent les documents prouvant que le terrain leur appartient, car dans bien des cas, ils veulent y retourner. Ils ne veulent pas s'établir ailleurs. C'est un problème que nous devons régler.
    Une fois ce problème résolu, il reste aussi à déterminer si le gouvernement peut tout simplement exproprier de vastes parcelles de terrain, les nationaliser et annoncer qu'ils vont y établir toutes sortes de personnes. En l'absence d'un gouvernement, cette conversation s'est révélée plus difficile au cours des derniers mois. Nous verrons comment les élections présidentielles se dérouleront et ce qui se passera ensuite. Il est à espérer que le dialogue puisse maintenant reprendre et que nous puissions régler les deux questions parallèlement: les propriétaires fonciers et la capacité du gouvernement d'exproprier des terres et de s'emparer de vastes parcelles de terrain pour y établir des gens.
    Tout d'abord, il s'agit d'abris temporaires, si bien qu'on peut les déplacer.
    La Croix-Rouge canadienne s'est engagée à en construire 30 000, mais elle n'y est pas encore parvenue. Elle en est à 1 400 jusqu'à présent.
    Combien en a-t-elle construit jusqu'à maintenant?
    Je ne sais pas, mais je peux vous dire que 3 130 abris ont été bâtis jusqu'ici avec l'aide de l'ACDI. Nous avons trois principaux partenaires: la Croix-Rouge canadienne, la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et Vision mondiale.
    Au sein de la communauté humanitaire, au chapitre du redressement et de la reconstruction, nous sommes confrontés à des défis relativement aux titres fonciers. On explore d'autres options de logement, ce qui peut vouloir dire qu'on réparera des maisons. On tente de revoir l'approche. Si on ne peut pas construire autant de maisons parce qu'on ne dispose pas des terres nécessaires, peut-être devrait-on examiner d'autres options, à savoir la réparation et la reconstruction de certaines habitations existantes.
    Est-ce la gouvernance d'Haïti qui pose problème? Je ne peux pas imaginer qu'un propriétaire puisse manquer de compassion au point de ne pas au moins déplacer des gens et des bâtiments sur des terrains pour une courte période.
    Il n'y a pas de réponse facile à cette question. Le régime des titres fonciers n'est pas du tout clair ni transparent. Il n'est pas adéquatement codifié. Personne ne sait vraiment qui est au courant de quoi, alors c'est le premier problème pour ce qui est d'extraire les décombres.
    Deuxièmement, malgré ce que l'on peut penser, il n'est pas garanti que les propriétaires seront disposés à renoncer à leur terrain ou à permettre qu'il soit nationalisé ou simplement acheté par le gouvernement. C'est une toute autre discussion qu'il faudra poursuivre.
    Comme Elissa l'a dit, un certain nombre de ces dossiers sont en suspens à cause des élections. Une fois qu'elles seront terminées et que nous aurons un nouveau président et un nouveau cabinet, la priorité du Canada sera certainement de faire avancer le dossier des titres fonciers car cela retarde la relocalisation des gens et le nettoyage des décombres.
(1650)
    Merci, Peter. Il ne nous reste plus de temps.
    Nous recevrons des représentants de Vision mondiale lundi prochain, Peter, si vous voulez leur parler de la question du logement.
    Monsieur Patry.

[Français]

     Merci beaucoup. J'ai une très brève question pour M. Reeder. Elle est probablement hypothétique.
    Vous nous avez parlé du deuxième tour de scrutin, qui s'est relativement bien passé. Avez-vous étudié la possibilité d'une contestation judiciaire à la suite de ce résultat du deuxième tour? Cette contestation ne serait pas l'oeuvre d'un des deux prétendants actuels mais plutôt de l'ancien président Aristide, qui est de retour, et dont le parti politique, le Fanmi Lavalas, a été exclu des élections. Avez-vous étudié cette possibilité?
    Je n'ai aucune nouvelle en ce sens. Je dois dire que depuis son arrivée, et encore hier, les commentaires de M. Aristide ont été assez prudents. Il n'a pas demandé à ses gens de descendre dans les rues même s'il se plaignait que Lavalas n'ait pas fait partie de la campagne. Je n'ai aucune nouvelle en ce sens.
    Si cela avait dû être le cas, je pense qu'il aurait pensé à le faire avant le vote ou à intervenir lors du vote d'une façon ou d'une autre, mais il ne l'a pas fait. Je crois donc que l'on peut travailler correctement avec lui. Attendons maintenant les résultats du deuxième tour. Il se peut qu'il soumette un appel mais, pour le moment, je n'ai aucune information en ce sens. Avec tout ce qui s'est passé avec M. Duvalier et M. Aristide sur le terrain, nous étions bien heureux du processus hier. Il faut maintenant attendre les résultats, le vote final, etc. Dans les circonstances, Haïti a quand même fait du progrès hier.
    Merci. C'est tout ce que je voulais savoir.

[Traduction]

    Bien. Merci.
    Quelqu'un veut-il poser une dernière question? Si non, nous allons poursuivre avec notre séance de 17 heures. Nous allons donner aux témoins la chance de quitter la salle. M. Reeder restera des nôtres, et nous commencerons pour pouvoir terminer à temps.

[Français]

    Un deuxième tour dans le hot seat, c'est bien cela?
    Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

    Nous allons suspendre la séance quelques minutes.
(1650)

(1655)
    Si tous les députés veulent bien prendre place, nous allons commencer.
    Nous entendrons une déclaration liminaire de M. Reeder. Il m'indique qu'elle durera sept ou huit minutes. Je pense que chaque député pourra intervenir une fois. Selon la durée de l'exposé, nous essaierons probablement d'accorder à chacun six ou sept minutes. Je serai beaucoup plus strict cette fois-ci car nous n'avons pas beaucoup de temps. Je tiens simplement à vous prévenir que je vais vous interrompre après six minutes, car nous disposons de peu de temps avec notre témoin.
    Je vais maintenant vous céder la parole, monsieur Reeder, pour faire votre exposé liminaire.
    Monsieur le président, encore une fois, je suis ravi d'être ici en compagnie de mon collègue, Jean-Benoit Leblanc, directeur des négociations commerciales régionales au ministère des Affaires étrangères.

[Français]

    Je vais faire quelques commentaires en anglais et en français et je serai prêt à répondre à vos questions dans la langue officielle de votre choix.

[Traduction]

    Comme vous le savez, le 28 juin 2009, le président démocratiquement élu du Honduras, José Manuel Zelaya, a été évincé du pouvoir. Même si les tensions politiques au Honduras s'étaient intensifiées dans les mois qui ont précédé l'événement, peu de gens avaient anticipé une issue aussi radicale.
    À l'époque, j'étais l'ambassadeur du Canada au Costa Rica, au Honduras et au Nicaragua, et j'étais à Tegucigalpa ce jour-là car le Canada s'apprêtait à assurer la présidence du groupe des donateurs du G16 au Honduras, l'un des pays les plus pauvres de l'hémisphère.
    La communauté internationale, y compris le Canada, a rapidement dénoncé le coup d'État et a réclamé le retour en poste immédiat du président Zelaya. Le ministre d'État responsable des Amériques de l'époque, Peter Kent, a fait une déclaration non équivoque dans laquelle il condamnait le coup d'État et exhortait toutes les parties concernées à faire preuve de retenue et à trouver une solution pacifique qui respecte les normes démocratiques et la primauté du droit, y compris la constitution du Honduras. Plusieurs jours plus tard, le 4 juillet, une séance spéciale de l'Organisation des États américains s'est tenue à Washington, à laquelle a assisté le ministre Kent, et où les membres de l'OEA, y compris le Canada, ont proposé à l'unanimité de suspendre le Honduras de l'organisation. Il était prévu que le Canada participe activement au débat de l'OEA, ce qui nous attribuait un rôle important dans les mois à venir.
    J'ai cru qu'il était aussi important de comparaître aujourd'hui, monsieur le président, après avoir entendu les commentaires formulés par les organisations non gouvernementales du Honduras et du Canada, afin de permettre d'expliquer un peu le rôle du Canada.

[Français]

    Durant l'impasse politique, la communauté internationale, y compris le Canada, oeuvrait avec diligence afin de résoudre la crise et d'aider le Honduras à revenir à la normalité démocratique et constitutionnelle. À cette fin, deux missions de haut niveau de l'OEA ont été dépêchées à Tegucigalpa, au mois d'août et au mois d'octobre 2009, auxquelles le Canada a pris part.
    Le Canada a en outre plaidé en faveur d'une solution négociée à la crise politique dans le respect des droits des Honduriens et a demandé la paix, l'ordre et la bonne gouvernance.

[Traduction]

    Le Canada s'est également joint à la communauté internationale en mettant en place des sanctions contre le gouvernement de facto — qui s'est emparé du pouvoir après que le président a quitté le pays —, entre autres en interrompant notre coopération militaire avec le Honduras et l'aide publique au développement officielle intergouvernementale.
    Malgré cet effort concerté de la part du Canada et d'autres intervenants clés, l'intransigeance extrême du gouvernement de facto, ainsi que les gestes et les paroles du président Zelaya, je crois, ont empêché d'en arriver à un compromis.
    Le 29 novembre 2009, cinq mois après le début de la crise, le Honduras a tenu des élections générales à la date régulièrement prévue. Malgré des conditions loin d'être idéales, les élections se sont déroulées de manière relativement pacifique et ordonnée et, dans l'ensemble, la communauté internationale a considéré ces élections comme étant justes et équitables. Porfirio Lobo, du Parti national de l'opposition, a remporté les élections. Près de 50 p. 100 des électeurs admissibles ont exercé leur droit de vote. La participation électorale, au chapitre du nombre de votes qu'a reçus le président Lobo, a été la plus élevée de l'histoire du Honduras depuis les années 1980, lorsque le pays est revenu à un régime démocratique.
    Depuis son investiture le 20 janvier 2010, le président Lobo a pris un certain nombre de mesures importantes en vue de rétablir l'ordre démocratique et sceller la réconciliation nationale. Au nombre de ces mesures, citons la formation d'un gouvernement uni multipartite qui inclut des candidats présidentiels des partis de l'opposition. Mentionnons également la mise sur pied d'une commission de vérité et de réconciliation, qui déterminera ce qui a mené au coup d'État et quelles violations des droits de la personne ont été commises durant la crise politique.
    Le Canada continue d'avoir des préoccupations concernant la situation des droits de la personne au Honduras et le niveau d'impunité. Bien que les tensions se soient poursuivies en quelque sorte sous l'administration Lobo, comme nous en avons entendu parler il y a quelques semaines, on a continué d'enregistrer des violations des droits de la personne et le nombre de plaintes officielles déposées a augmenté. Nos fonctionnaires continuent de recevoir des rapports où l'on signale des cas de harcèlement dont sont victimes des organisations de la société civile et des attaques contre des dirigeants sociaux qui sont souvent associés à l'opposition de l'ancien gouvernement de facto.
    En outre, au moins sept journalistes ont été assassinés en 2010. Ces cas préoccupent beaucoup le Canada, et nous l'avons fait savoir publiquement, non pas seulement pour les répercussions humaines mais pour l'effet négatif que ces meurtres ont sur la liberté de presse et d'expression.
    Nous maintenons des relations ouvertes pour exprimer nos préoccupations au gouvernement du Honduras, publiquement et en privé, concernant la situation des droits de la personne. Nous avons fait officiellement connaître nos préoccupations durant l'examen périodique universel du bilan du Honduras en matière des droits de la personne. Nous tenons régulièrement des consultations avec divers intervenants au Honduras qui travaillent à améliorer la situation, et nous leur communiquons nos inquiétudes. Notre nouvel ambassadeur au Honduras a rencontré des fonctionnaires honduriens, dont le nouveau ministre de la Justice et des Droits de la personne, un nouveau poste au cabinet créé par le président Lobo, de même que le procureur général du Honduras, pour discuter de la situation en matière des droits de la personne et du point de vue du Canada.
    Pour conclure, en tant que membre du groupe des donateurs du G16, le Canada travaille étroitement avec d'autres partenaires qui partagent notre point de vue, tels que l'Union européenne, les Nations Unies et les États-Unis, pour surveiller et améliorer la situation des droits de la personne au Honduras.
    Après l'investiture du président Lobo au début des années 2010, le Canada a pris la décision de normaliser les relations avec le Honduras. Nous croyons que l'isolement prolongé ne fait que porter préjudice aux gens les plus vulnérables au pays et que l'engagement plutôt que l'isolement est la meilleure façon de promouvoir le changement au pays.
(1700)

[Français]

    En outre, le Canada croit que le temps est venu de réintégrer le Honduras au sein de l'OEA de manière à renforcer les institutions démocratiques honduriennes, à promouvoir un dialogue politique, à faire face aux violations des droits de la personne et à aider le Honduras à réaliser son programme de sécurité et de développement. La destitution par la force de l'ancien président Zelaya a provoqué l'une des pires crises politiques que l'Amérique centrale a connues depuis des années. Nous regrettons profondément qu'il n'ait pas été possible de désamorcer le coup d'État et que le président Zelaya n'ait pas pu reprendre ses fonctions avant la fin de son mandat.
    Toutefois, sur bien des plans, notre pays a joué un rôle extrêmement important au Honduras eu égard à une situation très difficile et tendue. Nul doute que la situation au Honduras aurait pu dégénérer au point de ne plus pouvoir être maîtrisée, ce qui aurait provoqué de graves troubles et un nombre plus élevé de morts.
    Les pays voisins craignaient également que le conflit ne déstabilise le reste de la sous-région de l'Amérique centrale, mais les efforts soutenus de la communauté régionale et internationale et l'appel constant au calme par des pays comme le Canada ont favorisé la tenue de manifestations pacifiques. Ils ont aussi contribué à ce que les deux camps poursuivent leur dialogue au lieu de passer à des méthodes plus violentes.
(1705)

[Traduction]

    Il convient de souligner que de nos jours, les Honduriens de tous les milieux font l'éloge du rôle qu'a joué le Canada durant la crise. Ils ont déclaré que le Canada avait une approche équilibrée et positive qui se voulait en tout temps constructive. Le Canada a travaillé très étroitement avec les membres du groupe des donateurs du G16 à titre de président pendant les six premiers mois du gouvernement de facto pour influencer le processus de réconciliation, établir un dialogue et collaborer avec la société civile et les membres du Congrès du Honduras. Je le mentionne car le groupe des donateurs est très important. Le Honduras, l'un des pays les plus pauvres des Amériques, reçoit 18 p. 100 de son budget national de l'aide publique au développement, qui totalise environ 600 millions de dollars annuellement. Après Haïti, dont nous venons tout juste de parler, le Honduras est le pays le plus pauvre des Amériques. Le rôle des donateurs est donc très important, et le Canada a joué un rôle de premier plan, entre autres en essayant de faire avancer le processus de réconciliation entre le gouvernement de facto et les partisans de Zelaya, processus principalement dirigé par l'OEA, mais avec l'appui du Canada et d'autres pays.
    Le rôle du Canada n'est pas passé inaperçu auprès des Honduriens, ni auprès de nos partenaires dans la région, dont le gouvernement Lobo. La nomination à la Commission de vérité et de réconciliation de Michael Kergin, un ancien diplomate canadien, le confirme; il a été notre ambassadeur à Washington et a été affecté à d'autres postes importants. Cette commission a bénéficié d'un appui financier de la part du Canada, et nous voyons cette nomination comme une étape importante puisqu'elle se prépare à publier son rapport sur ce qui s'est passé au cours des mois suivants. La commission doit jouer un rôle important pour aider le Honduras à sceller une réconciliation nationale et faire en sorte que les Honduriens aient de nouveau confiance aux institutions de leur pays. Nous attendons avec impatience le rapport de la commission, qui devrait être rendu public en mai prochain.
    Enfin, si vous le permettez, monsieur le président, avec notre nouvelle ministre d'État responsable des Amériques, Diane Ablonczy, la participation continue du Canada contribuera à ce que le Honduras réintègre la communauté interaméricaine et se dirige vers la réconciliation nationale. Grâce aux efforts que nous avons déployés au Honduras, nous avons fait progresser la stratégie du gouvernement des Amériques. En rehaussant notre engagement à l'égard des Amériques, nous renforçons nos relations bilatérales avec nos partenaires dans la région, et de concert avec l'OEA, nous avons affermi notre réputation en tant qu'intervenant multilatéral qui fait du travail constructif dans l'hémisphère.

[Français]

    Monsieur le président, je répondrai maintenant avec plaisir aux questions des membres du comité. M. Leblanc est avec moi si jamais il y a des questions d'ordre commercial.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Il nous reste environ 20 minutes. Passons à une série d'interventions de cinq minutes pour chaque parti.
    Nous commencerons avec M. Patry.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président. J'ai une question très courte pour M. Leblanc et une autre pour M. Reeder.
    Monsieur Leblanc, l'accord définitif de libre-échange va-t-il comporter, entre autres, des mesures de protection de l'environnement et des mesures touchant les droits de la personne ainsi que les droits dans le domaine du travail?
    Comme nous le faisons dans le cadre de tous nos accords de libre-échange, nous avons l'intention de négocier des accords parallèles sur le travail et sur l'environnement qui seront sensiblement similaires à ceux inclus dans nos récents accords de libre-échange, notamment avec le Panama, par exemple.
    Merci.
    Monsieur Reeder, le 9 mars dernier, vous étiez présent lors de la comparution de la Commission de la vérité et de la réconciliation, une commission non gouvernementale créée par une coalition de la société civile. Vous nous avez parlé de l'autre commission, celle-là gouvernementale.
    Monsieur Scott, qui est Canadien et membre de cette commission non gouvernementale, est très inquiet en ce qui concerne le respect des droits de la personne au Honduras. Il vous l'a dit. Je suis aussi très inquiet et j'ai même écrit au ministre des Affaires étrangères à ce propos pour lui demander de s'assurer de la sécurité des témoins qui se sont présentés devant ce comité. C'est vous dire à quel point je suis inquiet.
    Le Canada négocie actuellement un traité de libre-échange avec le Honduras. Ne croyez-vous pas que la signature d'un tel traité enverrait un message non équivoque dans certains pays de la région, à savoir que non seulement le Canada accepte par défaut un coup d'État, mais qu'on récompense le Honduras par un traité de libre-échange et une réintégration future au sein de l'OEA ?
    N'y a-t-il pas un danger de contagion dans les pays de la région à cause de cette façon de faire?
(1710)
    Je vous remercie de la question.
     En ce qui concerne le Honduras, nous croyons qu'il faut reconnaître les nombreux défis d'aujourd'hui. Il faut travailler avec le gouvernement pour améliorer la situation vis-à-vis des droits humains, par exemple, mais il ne faut pas non plus ne pas donner l'occasion aux gens du Honduras de bénéficier d'un accord de libre-échange avec nous. Il y a beaucoup d'intérêt dans ce projet au Honduras. Il y a beaucoup de potentiel face au marché canadien dans la mesure où le Honduras peut en profiter pour envoyer ses produits alimentaires au Canada.
    On a vu le même résultat dans des pays comme le Costa Rica, par exemple, ou dans des petits pays d'Amérique centrale qui ont un gros potentiel d'exportation, ce qui aide l'économie nationale, crée des emplois et attire aussi les investissements canadiens. Cela se passe déjà au Honduras, mais je crois qu'avec un accord de libre-échange, cela va donner plus de confiance.
    Non, la situation n'est pas idéale. Oui, il y a encore beaucoup de défis à relever, mais je crois qu'on doit s'engager auprès de ce pays. C'est l'engagement et non l'isolement qui va faire avancer le Honduras, soit au sein de l'OEA ou par l'entremise de divers accords commerciaux. Le Honduras a aussi signé le CAFTA avec les États-Unis. Il a des accords régionaux avec les Européens et des accords en Amérique latine. Ce n'est donc pas quelque chose de nouveau pour le Honduras mais, dans l'ensemble, ce sont des accords qui apportent un bon bénéfice pour ces pays, surtout les tout petits qui ont maintenant accès à un marché de 33 millions de personnes ouvert à leurs exportations.
    D'accord, monsieur Reeder, mais les accords de libre-échange avec les États-Unis, le CAFTA et avec l'Union européenne ont été conclus avant le coup d'État, sous l'ancien président Zelaya.
    Vous avez parlé de futurs intérêts pour le Honduras et il s'agit beaucoup d'intérêts miniers. Je suis très inquiet à cet égard, parce que les intérêts miniers impliquent des déplacements de la population locale et des natifs de la région et beaucoup de problèmes en ce qui a trait aux droits de la personne. Ne pensez-vous pas qu'il faudrait faire vraiment attention, non pas surtout à la question alimentaire mais aux nouvelles compagnies canadiennes dans le secteur minier?
    Monsieur le député, je dois vous dire que je ne partage pas toutes les opinions exprimées il y a deux semaines devant ce comité par nos amis de la Commission de la vérité et de la réconciliation. J'ai visité les mines canadiennes et je respecte cette industrie. Elles procurent de bons emplois et de bonnes possibilités aux Honduriens. Plusieurs députés ont visité ces mines. Nous exigeons de nos compagnies canadiennes qu'elles respectent les lois du pays et la communauté. La stratégie de responsabilité sociale des entreprises du Canada est en vigueur dans les Amériques. Comme ministère, nous demandons à nos ambassadeurs de surveiller de très près les activités minières. S'il y a des problèmes dans des communautés, nous sommes accountable. Nos ambassadeurs peuvent venir en parler avec nous et nous obligerons les compagnies à respecter les lois locales.
    Dans le cas du Honduras, qui a une longue tradition minière, comme le Canada, il y a beaucoup d'intérêts dans ces communautés à profiter de la présence minière du Canada pour créer des emplois, pour offrir de la formation, de l'éducation, etc.
    Dans un sens, monsieur le député, c'est comme si on remplaçait un peu le gouvernement local par la présence canadienne. Par exemple, la mine El Mochito, au Honduras, dispose d'hôpitaux, d'écoles et s'occupe des infrastructures, de l'irrigation, des routes, etc. Tout cela est payé par la compagnie canadienne dans la région. L'hôpital d'El Mochito a reçu 20 000 visites du public hondurien l'année dernière. C'est là parce que l'État n'est pas là. On a vraiment un rôle et des obligations vis-à-vis de la communauté qui sont très importants. Pour ma part, j'ai dit aux gens de la commission non gouvernementale, quand je les ai rencontrés, que j'avais un autre point de vue et qu'il fallait aller voir les gens sur place. Beaucoup sont très heureux des investissements canadiens et nous demandent d'augmenter encore plus les investissements dans le secteur minier.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre la députée du Bloc, Mme Deschamps, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président. De combien de temps est-ce que je dispose? De cinq minutes? C'est très peu.
     J'aimerais beaucoup réagir à ce que vous venez de dire. Je me suis penchée sur toute la question de la responsabilité sociale des entreprises. Il y a eu un grand débat à ce sujet lors de la présente session, et même auparavant. Or ma perspective n'est pas aussi jovialiste que la vôtre. Des gens sont venus témoigner devant nous la semaine dernière. Il faut quand même accorder une certaine crédibilité à des organismes comme Amnistie Internationale et Human Rights Watch. Dans le dernier examen périodique universel, qui date du 4 janvier 2011, on dit ceci: « Le Canada a pris note des allégations faisant état de manoeuvres d’intimidation, de harcèlement et de menaces de mort contre des membres de la société civile. Il s’est inquiété de la forte augmentation du nombre de meurtres de femmes et de journalistes et de ses incidences négatives sur la liberté d’expression au Honduras. »
    Monsieur, je peux bien croire à vos grandes théories selon lesquelles les compagnies là-bas respectent un cadre de responsabilité sociale. Comme je suis croyante, je peux moi aussi appliquer de belles théories, mais de temps à autre, je commets un petit acte de gourmandise ou un petit péché. Même si ces compagnies respectent la loi du pays où elles se trouvent, on s'entend pour dire qu'il y a un problème au sein du gouvernement hondurien et que l'État est corrompu. Je n'ai pas inventé cela. Des témoins sont venus nous le dire à maintes reprises et des organisations de la société civile qui sont sur place nous le racontent. On le mentionne aussi dans l'évaluation périodique.
    Je ne sais pas à quelle étape en sont les négociations de libre-échange entre le Canada et le Honduras. Je ne sais pas non plus si on tient compte des répercussions de ces négociations sur les droits de la personne. Le cas échéant, j'aimerais savoir quelles mesures vont être prises pour que ces droits soient respectés et pour que l'impunité cesse. Il n'y a rien de réglé depuis le coup d'État. Le gouvernement hondurien s'est engagé à juger et condamner les gens qui ont commis des exactions, mais rien n'a été fait.
(1715)
    Nous exerçons encore des pressions sur le gouvernement du Honduras. Dans le cadre de l'examen périodique universel, le Canada a été très clair à ce sujet. Nous le sommes également. Je parlais plus tôt de la dynamique entourant les mines canadiennes. C'est l'un des enjeux. L'autre est la situation des droits de la personne, qui est encore très compliquée dans ce pays. Pour ce qui est des mines canadiennes, vous avez pleinement le droit d'inviter des représentants de la compagnie Goldcorp ou d'autres société canadiennes à comparaître devant vous
    J'ai notamment visité les mines de la compagnie Gildan. M. Rafferty y était avec la délégation du sommet de l'OEA. C'était en juin 2009, trois semaines avant le coup d'État. Il y avait M. Rafferty, une sénatrice et Hedy Fry. Ce qu'on a vu de la présence de Gildan était très impressionnant. Je ne suis pas ici pour défendre la compagnie Gildan ou les autres compagnies, mais il faut avoir une perspective équilibrée sur ces opérations. La société Gildan emploie 15 000 personnes au Honduras. C'est la plus grande compagnie privée. On y offre de très bonnes conditions en matière de santé et il y a un programme de maternité pour les femmes. Chaque jour, à l'extérieur de l'usine de Gildan, entre 100 et 200 personnes cherchent à obtenir un bon emploi. Les salaires offerts par Gildan sont de 20 à 25 p. 100 plus élevés que la norme du Honduras. Ce n'est pas noir ou blanc. Je trouve que les Canadiens ont fait de bons investissements et que c'était aussi à l'avantage du Honduras.
    Merci, madame

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole aux conservateurs, à M. Van Kesteren, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus comparaître. Je veux poursuivre. J'aimerais parler des accords de libre-échange de l'hémisphère occidental. Je crois que l'accord conclu avec le Costa Rica est en vigueur. Il est aussi question d'accords avec la Colombie, le Chili, le Pérou, le Mexique, ainsi que d'autres pays, je crois.
    C'est la classe moyenne qui profite de ces accords. Il y a quelques mois à peine, M. Goldring et moi avons visité un pays d'Afrique. Nous avons pu constater les retombées et ce qui arrive lorsqu'on donne le droit et l'occasion aux entreprises de s'établir au-delà de leurs frontières et d'y vendre leurs produits. Ces entreprises connaissent une croissance, ce qui encourage les gens à participer à l'économie; c'est une source de richesse et de création d'emplois.
    Il va de soi que les petites et moyennes entreprises sont les premières à profiter de ces accords et en sont probablement les plus avantagées. Je sais que ce côté-ci de la Chambre... Je pense que même nos amis libéraux sont d'accord pour dire que la plupart de ces méthodes permettraient d'augmenter le PIB.
    Vous avez parlé de Gildan. Sans vouloir vous reprendre, la société n'emploie pas 15 000 employés, mais plutôt 16 000, je crois. C'est une entreprise québécoise et, naturellement, elle n'était pas là pour se défendre. Les sociétés minières n'étaient pas là non plus lorsqu'on nous a dit — et j'étais franchement furieux — que le Canada s'empare des ressources naturelles des pays sans aucun égard pour la société. Nous n'avons pas pu nous défendre.
    Il faut vraiment rétablir les faits. Je ne sais pas dans quelle mesure nous voulons parler de politique, mais je crois que nous devons admettre, entre autres, que ce coup d'État a eu lieu parce que le Honduras glissait vers le genre de régime d'Hugo Chavez, qui a une influence, dans le Sud, sur beaucoup de... Soyez assurés qu'une véritable lutte de pouvoir se livre, et c'est ce en quoi nous croyons en tant que société libre: c'est-à-dire la libre jouissance des biens, la liberté plutôt que la soumission au contrôle total du gouvernement et le totalitarisme, et la prospérité plutôt que la pauvreté. J'y crois fermement.
    Je suis convaincu du bien-fondé des accords de libre-échange. Comme je l'ai dit, ils n'ont pas nécessairement d'influence sur moi personnellement, mais ils en ont sur notre pays, de même que sur d'autres pays. Je pense qu'une guerre fait véritablement rage partout dans le monde. On ne s'entend pas sur les effets du libre-échange.
    Je me demandais si vous pourriez nous expliquer comment ficeler un accord de libre-échange. Vous pourriez aussi nous décrire l'accord de libre-échange avec le Honduras et nous dire où en sont rendues les négociations.
(1720)
    Monsieur, je vais d'abord répondre brièvement, puis je laisserai la parole à Jean-Benoît.
    Je pense que ces accords sont importants. Nous désirons qu'ils prennent forme dans les Amériques. J'aimerais faire observer que le commerce avec les pays de l'Asie-Pacifique est florissant; or, les accords de libre-échange se concentrent davantage dans les Amériques. Nos investissements directs étrangers sont trois fois plus importants dans les Amériques que dans les pays de l'Asie-Pacifique. Le commerce encourage les pays à exporter vers le Canada, ce qui stimule les économies, mais il permet aussi d'attirer les investissements.
    Après la signature d'accords de libre-échange dans les Amériques, je constate que les investissements suivent habituellement le commerce. Dans les cas du Chili et du Costa Rica, des pays avec lesquels nous avons depuis longtemps un accord de libre-échange, on remarque que des investissements canadiens majeurs ont été réalisés notamment par la Banque Scotia et le secteur minier. D'ailleurs, ce secteur canadien a investi directement 75 milliards de dollars dans les Amériques. C'est une somme importante. Essentiellement, nous sommes les mineurs du monde. Mon objectif n'est pas de défendre les mineurs, mais plutôt de vous démontrer les avantages importants du libre-échange, comme je l'ai dit à votre collègue. Je crois que nous surveillons de très près les entreprises canadiennes. Elles doivent avoir un code de conduite adéquat, sans quoi nous prenons des mesures pour qu'elles en adoptent un. Nous avons noué le dialogue avec la collectivité et voulons que ces investissements importants restent en place. Si les entreprises canadiennes ne se conforment pas à nos exigences en matière de responsabilité sociale, cela aura des conséquences sur l'image et les intérêts du Canada. C'est pourquoi nous surveillons de très près leurs activités à l'étranger.
    Allez-y avec une dernière réponse. Le temps est écoulé.
    Je vais laisser la parole à M. Rafferty, mais répondez d'abord, monsieur Leblanc.
    Merci.
    Si vous me le permettez, j'aimerais simplement vous dire où en sont rendues les négociations. Comme vous le savez probablement, nous avons entamé en 2001 des négociations sur le libre-échange avec quatre pays d'Amérique centrale: le Honduras, le Guatemala, le Nicaragua et le Salvador.
    Après neuf ans de discussions, nous avons décidé de poursuivre seulement avec le Honduras. Pourquoi? Parmi les quatre pays, c'est avec le Honduras que nous avions les meilleures chances de conclure un accord à court terme. C'est pour cette raison que nous avons donné la priorité à ce pays.
    Une première séance de négociations avec le Honduras a eu lieu en décembre, à Ottawa, et une deuxième en février, à Tegucigalpa. Nos fonctionnaires travaillent maintenant étroitement avec le Honduras pour essayer de résoudre les dernières questions.
    Merci.
    Je vais laisser la parole à M. Rafferty pour les cinq dernières minutes.
(1725)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai une question pour chacun d'entre vous, et j'en aurai peut-être d'autres si j'ai le temps.
    Pour l'instant, je vais continuer à parler du commerce.
     Monsieur Leblanc, je me demandais si vous pourriez répondre à la question suivante. Contrairement à ce que bon nombre de mes collègues à la table pourraient penser, les néo-démocrates croient dans le commerce et pensent vraiment que c'est important. Toutefois, cet accord de libre-échange, comme d'autres, pose problème. Monsieur Leblanc, et peut-être Monsieur Reeder très rapidement, je me demandais si vous pourriez me donner votre avis professionnel à ce sujet. Tous les accords de libre-échange conclus sous le gouvernement actuel sont accompagnés de deux accords auxiliaires, l'un sur la main-d'oeuvre et l'autre sur l'environnement. Nous avons demandé une chose en laquelle je crois fermement... Pourquoi ces domaines font-ils l'objet d'accords auxiliaires? Pourquoi ne font-ils pas plutôt partie de l'accord principal, qui est doté d'un mécanisme efficace de mise en application? Obtenir une réponse à cette question serait merveilleux, car je vous assure que les autres partis se montreraient peut-être plus coopératifs si ces domaines ne se retrouvaient pas constamment dans des accords auxiliaires, qui peuvent difficilement être mis en application, selon nous.
    Merci.
    Ce qui compte à mon avis, c'est le fond des accords sur la main-d'oeuvre, sur l'environnement ou sur le libre-échange. L'essence de nos actions d'hier et d'aujourd'hui demeure la même, peu importe si ces sujets figurent dans un chapitre ou une partie de l'accord.
    Remarquez que les accords auxiliaires sur la main-d'oeuvre et sur l'environnement ont leur propre mécanisme de mise en application. Ils sont différents. Ce n'est pas mon domaine, car ce sont Environnement Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada qui négocient ces accords, mais je dirais qu'ils sont accompagnés de mécanismes de mise en application. Il va sans dire que vous pouvez vous demander si vous voulez, à l'avenir, intégrer ces dispositions aux accords de libre-échange; c'est une question légitime. Mais je crois qu'il faut s'attarder au fond plutôt que de chercher à savoir où ces dispositions devraient se trouver.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Dans nos accords de libre-échange, un chapitre est souvent consacré aux investissements. De plus, nous avons négocié des accords indépendants sur la protection des investissements étrangers avec bien des pays. Essentiellement, le fond est le même, peu importe si le sujet fait l'objet d'un chapitre de l'accord de libre-échange ou d'un accord indépendant. À mon avis, c'est plutôt là-dessus qu'il faut se concentrer.
    Il me semble simplement que ce serait assez facile à modifier. Je comprends aussi que ce sont deux sujets litigieux pour bon nombre de ces pays. Mais il me semble que l'accord, dont les mécanismes de mise en application sont efficaces, aurait bien plus de poids si ces dispositions y étaient intégrées. C'est ce que je voulais dire.
    J'ai une petite question pour M. Reeder. Vous avez parlé de la Commission de vérité et de réconciliation, qui présentera bientôt son rapport. Comment progresse-t-elle, et que pouvons-nous attendre de ce rapport?
    Je ne suis pas certain de pouvoir vous dire à quoi vous attendre au sujet du rapport. Mais essentiellement, la commission fera de son mieux pour nous donner une idée de ce qui s'est passé avant et pendant le coup d'État; de qui a dit quoi et à qui pour que le président Zelaya soit expulsé du pays; et enfin, de la situation du gouvernement de fait présidé par Roberto Micheletti, qui a gouverné temporairement jusqu'à l'élection du président Lobo.
    Au fond, c'est ce que la commission tentera d'éclaircir, y compris le respect des droits de la personne en particulier sous le gouvernement de fait. C'est ce qu'elle a l'intention d'examiner.
    Avant le coup d'État, ce n'était pas tellement la sécurité qui posait problème, mais plutôt le financement des commissions et tout cela. On se demandait notamment comment elles pourraient fonctionner. Je sais que vous ne pouvez pas deviner l'avenir, mais croyez-vous que nous pourrons nous fier à ce que nous verrons lorsque nous...
    Je pense que oui.
    Pour ce qui est du financement, je devrais mentionner que le Canada a versé une aide d'environ 400 000 $ à la commission officielle, ce qui couvre notamment les frais liés à la participation de M. Kergin. Nous croyons que le document sera très fiable et transparent. Michael Kergin est bien connu au sein de mon ministère. Puisqu'il fait partie de la commission, je m'attends à ce que le document présenté soit excellent.
    Y a-t-il aussi une représentation indépendante du gouvernement?
    Le problème, c'est que d'autres ont mis sur pied une commission indépendante qui, comme vous le savez, refuse toujours toute une série de principes que nous avons acceptés. Cette commission n'est pas reconnue par le gouvernement du Honduras ni, je dirais, par bon nombre de ses citoyens.
    Au Honduras, la société comporte de nombreuses couches. Elle est déchirée entre les différentes interprétations des événements entourant le coup d'État. Elle est divisée entre les classes, ainsi qu'entre les régions rurales et urbaines. Il y a beaucoup de tension dans le pays, et je dirais que la commission indépendante ne bénéficie pas du plein appui dans tout le pays. C'est peut-être aussi le cas de la commission officielle. Les deux commissions jouent un certain rôle. Malheureusement, elles ne communiquent pas entre elles. J'ai demandé aux ONG pourquoi elles n'entamaient pas le dialogue avec la commission officielle, puisqu'elles veulent créer leur propre commission. Elles refusent de le faire parce que cette commission a été formée par un gouvernement qu'elles ne reconnaissent pas. De fait, elles ne considèrent pas l'élection de Lobo comme légitime. Elles se sont par conséquent complètement dissociées du gouvernement. Nous leur avons dit que ce n'était pas la meilleure façon de faire.
(1730)
    Je vous remercie beaucoup d'avoir mieux respecté le temps alloué au deuxième tour que vous l'aviez fait au premier tour.
    Monsieur Reeder, merci de vous être déplacé à nouveau. Je sais que vous avez dû modifier votre horaire pour être ici aujourd'hui, ce qui vous a permis de comparaître avec le premier groupe d'experts aussi.
    Monsieur Leblanc, merci d'être venu. Je pense que bon nombre de ces enjeux touchent le commerce. Je suis certain que nous nous reverrons à ce sujet lors d'une séance du Comité du commerce international. Merci.
    La séance est levée.
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