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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 101 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 28 mars 2018

[Enregistrement électronique]

(1600)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Commençons. Le ministre doit nous quitter à 16 h 30, après quoi nous recevrons des témoins de l'industrie.
    Je souhaite la bienvenue au ministre.
    Merci beaucoup, monsieur Garneau, de vous joindre à nous aujourd'hui avec votre équipe. Nous avons très hâte d'entendre votre exposé, et nous sommes très contents que vous ouvriez le bal pour notre étude sur votre partie du projet de loi C-69. Nous avons hâte d'entendre ce que avez à dire à ce sujet.
    Nous tiendrons une courte période de questions. Il n'y aura probablement qu'une série de questions. Vous obtiendrez tous vos six minutes, mais vous voudrez peut-être les partager avec d'autres députés pour que tout le monde ait la chance de poser une question. Je sais que tout le monde souhaite en poser.
    Je cède la parole au ministre.
    Merci, madame la présidente.

[Français]

     Madame la présidente et honorables députés, je suis heureux de témoigner aujourd'hui devant le Comité au sujet du projet de loi C-69, Loi édictant la Loi sur l’évaluation d’impact.
    Le Canada a la chance d'être bordé par les océans Pacifique, Arctique et Atlantique, et il compte également d'innombrables lacs et rivières. J'ai eu le plaisir de voyager d'un océan à l'autre afin d'observer moi-même ces étendues d'eau. De plus, j'ai été particulièrement heureux de constater, depuis l'espace, le vaste réseau de lacs, de rivières, de canaux et d'océans qui forment notre grand pays. Je peux affirmer que, même depuis l'espace, il est possible de bien voir que les lacs, les rivières et les autres étendues d'eau constituent des éléments clés de notre réseau de transport.
    J'ai également eu le plaisir d'écouter les Canadiens parler de leur passion pour la navigation, que ce soit en canot, en kayak, en voilier, en bateau à moteur ou sur un plus gros navires.
    Il ne fait aucun doute que le Canada compte sur l'ensemble de ses voies navigables pour des usages récréatifs et pour la circulation des biens et des services. Les peuples autochtones exercent également leurs droits dans ces eaux.

[Traduction]

    Les Canadiens veulent s'assurer que la navigation sur ces voies d'eau peut être protégée maintenant, mais aussi dans le futur, y compris sur les rivières patrimoniales et les rivières sauvages et sans aménagement les plus longues. Ils s'attendent à ce que leur droit public à la navigation soit protégé.
    Lorsque j'ai été nommé ministre des Transports en 2015, le premier ministre m'a confié le mandat d'examiner la Loi sur la protection de la navigation, en vue de restaurer les mesures de protection perdues et d'y intégrer des mécanismes de protection modernes. Après un long processus d'examen et de consultation, nous proposons maintenant de modifier la Loi sur la protection de la navigation et de créer la nouvelle Loi sur les eaux navigables canadiennes afin de respecter cet engagement et de mieux protéger le droit de voyager sur toutes les eaux navigables du Canada.
    La nouvelle Loi sur les eaux navigables canadiennes est le fruit de plus de 14 mois de consultation avec les Canadiens. Cette période de consultation a débuté par une étude des modifications apportées par le gouvernement précédent réalisée par le Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités.
    Madame la présidente, j'aimerais profiter de cette occasion pour remercier le comité permanent du temps qu'il a consacré à cette étude ainsi que de ses recommandations. Le travail du comité permanent a jeté des bases solides pour la nouvelle Loi sur les eaux navigables canadiennes.
    Le projet de loi sur les eaux navigables canadiennes a aussi été éclairé par les opinions des peuples autochtones, des provinces et des territoires, de l'industrie, des groupes récréatifs et environnementaux et du grand public. Les usagers des voies d'eau nous ont bien dit vouloir une surveillance sur toutes les voies navigables au Canada, des décisions et des processus plus clairs et transparents, ainsi que de meilleures possibilités de partenariat pour les peuples autochtones relativement à l'application des mesures de protection de la navigation. Ils ont également manifesté le besoin que les processus demeurent efficaces et prévisibles.
    Le projet de loi sur les eaux navigables canadiennes répond à ces préoccupations. La Loi contiendra une nouvelle exigence pour l'approbation d'ouvrages majeurs qui ont d'importantes incidences sur la navigation sur toutes les eaux navigables, tels que de grands barrages ou d'autres ouvrages, et elle conférera des pouvoirs au ministre des Transports en ce qui concerne la réglementation d'obstacles sur toutes les eaux navigables.

[Français]

     Madame la présidente, le gouvernement tient à ce que le processus soit ouvert, accessible et transparent. Il en va de la confiance du public.
     La Loi sur la protection des eaux navigables du Canada prévoirait de meilleures règles offrant une plus grande transparence au sujet des propositions de projets pouvant avoir une incidence sur la navigation. Il serait alors plus facile pour les Canadiens de se prononcer sur les projets qui les concernent.
    Nous reconnaissons que, pour participer aux décisions, les Canadiens doivent connaître leurs projets avant qu'ils soient créés. La Loi sur la protection des eaux navigables du Canada exige que les promoteurs de projets préviennent et consultent les collectivités et les usagers des voies maritimes navigables susceptibles d'être touchées avant la construction d'un projet situé sur toutes les eaux navigables.
    Si cette mobilisation précoce laissait en suspens des préoccupations liées à la navigation pour les ouvrages, le gouvernement aurait alors la capacité d'examiner ces préoccupations et d'exiger que le promoteur cherche à obtenir une autorisation, le cas échéant. Ce nouveau processus de résolution permettrait aux Canadiens de soulever leurs préoccupations liées à la navigation au sujet d'un projet proposé dans un lac ou une rivière navigable de façon plus efficace, rapide et moderne.
    La loi exigerait aussi que le ministère établisse un nouveau registre public pour consigner les renseignements sur les projets et les décisions. Ce registre aiderait les collectivités à rester informées, à participer au processus de prise de décisions et à accéder aux renseignements à long terme.
(1605)
    La Loi sur les eaux navigables canadiennes prévoit aussi une annexe améliorée et plus inclusive permettant ainsi d'offrir un niveau de surveillance supplémentaire des eaux navigables qui en ont le plus besoin, y compris celles qui sont d'une importance particulière pour les Canadiens et les peuples autochtones.

[Traduction]

    Je dois reconnaître le rôle essentiel que jouent les eaux navigables pour soutenir les peuples autochtones du Canada ainsi que leur capacité à exercer leurs droits. Selon ce qu'on nous a dit, l'eau est fondamentale à leur mode de vie. Le projet de loi sur les eaux navigables canadiennes vise à concrétiser nos objectifs en matière de réconciliation à plusieurs égards, mais surtout à faciliter les partenariats entre le Canada et les peuples autochtones dans l'application de la Loi sur leurs territoires traditionnels.
    La Loi favorise une relation plus étroite avec les peuples autochtones reposant sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération ainsi qu'un partenariat adapté aux peuples autochtones et visant à obtenir leur consentement libre, préalable et éclairé. La Loi exigerait la considération et la protection des connaissances traditionnelles autochtones, ainsi que la considération de tout effet indésirable que les décisions pourraient avoir sur les droits des Autochtones.
    Nous reconnaissons également que des mesures de protection de la navigation plus rigoureuses n'auront de sens pour les Canadiens que si elles sont rigoureusement appliquées. C'est pourquoi la Loi sur les eaux navigables canadiennes inclurait des pouvoirs d'application nouveaux et modernes ainsi que des peines plus sévères.

[Français]

    Madame la présidente, la nouvelle Loi sur les eaux navigables canadiennes est un élément important du nouveau système d'évaluation des répercussions proposé qui protégera notre environnement, nos poissons et nos voies d'eau, tout en rétablissant la confiance du public et en respectant les droits des Autochtones. Ce nouveau système exigera l'évaluation rigoureuse de nombreuses répercussions pour les projets susceptibles de poser un risque important pour l'environnement dans les domaines de compétence fédérale.
    En outre, les modifications qu'on propose d'apporter à la Loi sur les pêches restaureront les mesures de protection pour tous les poissons et leur habitat, en plus de créer de nouveaux outils de gestion des pêches visant à renforcer la protection des espèces et des écosystèmes. Ce nouveau système général tiendra compte d'une variété de répercussions potentielles pour tout projet désigné aux fins d'examen, et ce, non seulement sur l'environnement, mais aussi sur les collectivités, la santé, les peuples autochtones et les emplois. Les décisions prises dans le cadre de la Loi sur les eaux navigables canadiennes seront entièrement intégrées à ce nouveau système d'évaluation des répercussions.

[Traduction]

    En résumé, ce projet de loi contribuera grandement au nouveau système d'évaluation des répercussions en offrant des mesures de protection de la navigation pour toutes les eaux navigables. Il permettra également de créer des processus plus accessibles et transparents. Ainsi, il sera plus facile pour les peuples autochtones et le public de participer aux projets qui touchent leurs collectivités et de régler les problèmes de navigation qui les concernent. Nos voies navigables sont le patrimoine commun de tous les Canadiens, et le droit de voyager sur ces voies doit être protégé. Le nouveau projet de loi sur les eaux navigables canadiennes s'en occupera.
    Merci.
    Merci.
    Avant d'ouvrir la période de questions, je présenterai les membres de votre équipe.
    Voici Martha Green, avocate-conseil aux Services juridiques; Michael Keenan, sous-ministre, et Nancy Harris, directrice exécutive de la Gérance réglementaire et des affaires autochtones.
    Je vous remercie infiniment d'être parmi nous aujourd'hui.
    Nous commencerons par M. Fisher.
    Merci, madame la présidente. Compte tenu du peu de temps dont nous disposons, je partagerai mon temps avec M. Amos.
    Merci, monsieur le ministre, d'être ici avec votre équipe.
    Comme vous le savez — nous en avons déjà parlé — ma ville de résidence, Darmouth, est surnommée la ville des lacs. Je présume que vous avez pu le voir de l'espace. La protection des lacs dans la ville des lacs revêt une importance extrême pour ma communauté et moi.
    La voie navigable historique du canal Shubénacadie se trouve dans ma circonscription et traverse les lacs pour se jeter dans la rivière Shubénacadie. Il s'agit d'une voie navigable historique que les Micmacs ont commencé à emprunter il y a 4 000 ans. Les Premières Nations, les canoteurs, kayakistes, plaisanciers et pêcheurs à la ligne l'utilisent tous.
    J'ai lu beaucoup de commentaires positifs sur ce projet de loi. Voici une excellente citation d'une personne actuellement assise à cette table, le député néo-démocrate Wayne Stetski:
C'est un renversement des mesures prises par l'ancien gouvernement conservateur, qui aidera à protéger nos lacs et nos rivières des aménagements et des déversements qui les menacent.

    J'ai également lu les préoccupations exprimées par le WWF et d'autres organisations environnementales à l'égard de ce projet de loi:
Il faut accorder à tous les lacs et à toutes les rivières le même niveau de surveillance accru qu'on réserve actuellement à quelques rivières désignées ou « inscrites à la liste ».

    Monsieur le ministre, pouvez-vous nous parler un peu plus des raisons pourquoi le WWF fait cette distinction et pourquoi nous n'ajouterions pas tous les lacs et les rivières à la liste?
    Je me demande aussi comment une personne peut demander à ce qu'une voie navigable soit ajoutée à la liste. Je serais curieux de savoir si n'importe qui pourra naviguer dans le processus.
    Merci.
(1610)
    Je vous remercie de cette question, monsieur Fisher. Vous en posez plusieurs, en fait.
    Premièrement, j'ai la chance d'avoir vu la superbe ville des lacs moi-même. J'ai vécu longtemps à Halifax, et je me rendais souvent à Darmouth, si bien que j'ai vu bon nombre de ces lacs et bien sûr, la voie navigable de Shubénacadie. J'en connais l'importance.
    Il ne faut pas oublier que nous nous trouvons là à rétablir des protections retirées par l'ancien gouvernement et qu'elles s'appliquent à toutes les voies navigables du Canada et non seulement à celles inscrites à la liste spéciale, qui soit dit en passant, prévoit une surveillance accrue des cours d'eau revêtant une importance particulière qui y sont inscrits à des fins de transport commercial, de loisirs ou de protection des droits autochtones.
    Dès que quelqu'un voudra construire un ouvrage majeur dans des eaux navigables, il devra en obtenir l'autorisation. Si quelque chose obstrue une voie navigable, j'aurai l'autorisation de le faire démolir. Dès que quelqu'un voudra construire un ouvrage dans des eaux navigables, il y aura tout un processus d'avis préalable qui s'enclenchera pour déterminer ce que nous voulons faire. Le projet sera analysé très attentivement, selon que l'ouvrage constitue un ouvrage majeur, un ouvrage mineur ou quelque chose entre les deux. Ces protections s'appliquent à toutes les eaux navigables.
    Merci, monsieur le ministre.
    Je me réjouis déjà à l'idée d'accueillir au lac Banook les Championnats mondiaux de canoë-kayak de 2022.
    Je cède le reste de mon temps à M. Amos.
    Merci, monsieur le ministre, et merci aux fonctionnaires qui sont là pour l'appuyer.
    Ce projet de loi survient après bien des années de démocratie frustrée. Pour mettre les choses en contexte, en 2008, quand les protections des eaux navigables ont été modifiées en profondeur, il y a eu 10 séances et 21 témoins seulement. En 2012, lors de la vague subséquente de modifications aux lois sur les voies navigables, qu'on trouvait enfouies dans le projet de loi C-45, le projet de loi portant exécution du budget, il n'y a eu que deux séances. J'estime donc que nous émergeons enfin du processus précédent extrêmement peu démocratique pour renouer avec la démocratie. Vous faites partie intégrante de ce processus, et je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    Depuis le retrait de nombreuses protections des voies navigables, les Canadiens qui se soucient de la navigation (ils sont nombreux dans ma circonscription de Pontiac) sont forcés de s'adresser aux tribunaux. Ils sont forcés de s'en remettre aux protections des voies navigables fondées sur la common law.
    J'aimerais beaucoup, si vous le voulez bien, que vous nous expliquiez ce contexte et votre plan, à la lumière de la situation.
    Il est indéniable que la loi modifiée par le gouvernement précédent a vidé de leur substance les protections de nos voies navigables. J'étais là. Je me rappelle avoir consacré beaucoup de temps au projet de loi quand le gouvernement a décidé de modifier la loi. Finalement, il a pour ainsi dire éliminé toute protection de nombreuses voies navigables, une situation que nous jugions totalement inacceptable. Si cela ne plaisait pas à quelqu'un, il pouvait toujours s'adresser aux tribunaux, mais c'est un chemin très long et laborieux, qui peut coûter très cher.
    Nous avons donc modifié la loi afin d'inclure à la nouvelle Loi sur les eaux navigables canadiennes des mesures de sécurité applicables à toutes les eaux navigables. Comme je l'ai dit, si quelqu'un souhaite construire quelque chose, il doit y avoir un avis public. L'information sera consignée dans un registre public administré par Transports Canada. Nous déterminerons ensuite s'il s'agit d'un ouvrage majeur, d'un ouvrage mineur ou de quelque chose entre les deux.
    Certains ouvrages véritablement mineurs seront préapprouvés. En revanche, les ouvrages majeurs comme les barrages devront faire l'objet d'un processus très formel, comme vous le savez. Entre les deux, il y aura tout de même une démarche officielle.
    Pour les voies navigables figurant à l'annexe spéciale, il y aura un processus d'approbation complet en bonne et due forme. Pour les autres, il y aura un processus afin de déterminer si le projet est acceptable ou non. Il ne sera plus nécessaire de recourir aux tribunaux, il y aura un processus simplifié, qui permettra à mon ministère de déterminer si l'ouvrage constitue un obstacle à la navigation.
(1615)
    Merci infiniment.
    Monsieur Sopuck.
    L'ignorance volontaire qu'affiche le gouvernement quant à ce projet de loi est vraiment ahurissante. Comme le gouvernement souhaite confondre protection de la navigation et protection de l'environnement, je souhaite poser au ministre une question environnementale.
    Votre gouvernement veut imposer une taxe sur le carbone de 50 $ la tonne. Vous avez une formation scientifique; j'aimerais avoir un chiffre. De combien les émissions de gaz à effet de serre du Canada diminueront-elles après l'imposition d'une taxe sur le carbone de 50 $ la tonne?
    Monsieur Sopuck, vous ai-je entendu dire que vous souhaitiez poser une question à la ministre de l'Environnement? Elle n'est pas ici aujourd'hui. Je suis le ministre des Transports. Je serai heureux de répondre à toute question...
    Vous faites partie du Cabinet. Je veux un chiffre.
    Je serai très heureux de répondre à toute question concernant le projet de loi sur les eaux navigables du Canada.
    La question de la pertinence se pose...
    C'est très pertinent. Ce gouvernement insiste pour confondre environnement et protection des eaux navigables.
    Il y a rappel au Règlement. Allez-y, monsieur Fraser.
    Merci, madame la présidente.
    D'après le Règlement, la question doit au moins être pertinente; si elle ne porte pas sur le projet de loi à l'étude, elle doit au moins concerner le portefeuille du ministre qui comparaît devant le Comité, à moins que je ne me trompe.
    Est-ce que je me trompe?
    Non, vous ne vous trompez pas. C'est la raison pour laquelle je remets en question la pertinence de la question posée au ministre qui comparaît devant nous aujourd'hui.
    Vous pourriez peut-être reformuler vos questions afin de les rendre pertinentes pour le ministre parmi nous aujourd'hui.
    Je réponds au rappel au Règlement. C'est pertinent.
    Vous êtes tous deux nouveaux ici. Nous avons des privilèges parlementaires. Nous formons le comité de l'environnement, et de toute évidence, le ministre refuse de répondre à une question sur l'environnement.
    Je cède maintenant le reste de mon temps à Mme Block.
    Merci.
    Je tiens à remercier mes collègues de me permettre de me joindre à eux pour interroger le ministre des Transports sur la partie 3 de ce projet de loi, qui propose des modifications à la Loi sur la protection de la navigation.
    Comme vous avez vous-même, monsieur le ministre, instruit le comité des transports d'entreprendre une étude sur la Loi sur la protection de la navigation et compte tenu des questions que j'ai déjà entendues de la part de vos collègues de l'autre côté, je crois qu'il aurait été préférable de scinder ce projet de loi en deux, pour que le comité des transports puisse terminer le travail qu'il avait commencé. Quoi qu'il en soit, les membres de notre comité n'ont d'autre choix que de présumer que tout le travail qu'ils ont fait se reflète d'une manière ou d'une autre dans ce projet de loi.
    Comme les membres du comité des transports n'auront pas l'occasion de vous interroger sur ce projet de loi, je vous demanderais de nous donner un seul exemple où la navigation a été entravée par les règles de la LPN et non par celles de la loi précédente, la Loi sur la protection des eaux navigables. Je ne vous en demande qu'un.
    Dans mon exposé, j'ai remercié le comité des transports, dont vous faites partie, pour son excellent travail qui a jeté des bases solides pour les modifications qui ont été proposées par la suite. J'espère que vous avez remarqué que j'ai remercié le comité des transports.
    Pour ce qui est de l'idée de scinder le projet de loi en deux, je crois...
    J'aimerais que vous répondiez à la question que j'ai posée. J'aimerais que vous me donniez un exemple où la Loi sur la protection de la navigation a nui à la navigation de par sa formulation.
    Je ne vous donnerai pas d'exemple, mais je réagirai à votre commentaire. Vous avez dit que ce projet de loi devrait être scindé en deux. Je pense que la question...
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
(1620)
    Pour quelle raison?
    J'ai posé une question au ministre, qui me dit qu'il n'y répondra pas, qu'il se contentera plutôt de réagir à mes commentaires.
    Je demanderais au ministre de bien vouloir répondre à la question que je lui ai posée.
    Très bien.
    Je demanderai au ministre d'essayer de répondre à la question.
    Très bien, je vais vous en donner un exemple.
    La rivière Nass a été retirée de la liste. Nous l'avons cependant inscrite à l'annexe spéciale dont il est question aujourd'hui. Nous l'avons fait il y a déjà plus d'un an, parce que nous jugions fautif de la part de l'ancien gouvernement de retirer la rivière Nass de cette liste en raison de son importance pour les Nisga'a, dans ce cas-ci.
    Pour terminer, si je peux me le permettre, madame la présidente...
    Combien de temps me reste-t-il?
    Deux minutes.
    Il me reste deux minutes.
    Vous avez décidé de réinscrire un cours d'eau à l'annexe sans aucun exemple concret d'entrave à la navigation sur ce cours d'eau. C'est bien cela?
    Nous avons écouté les peuples autochtones qui vivent sur ces rives depuis 10 000 ans, et nous avons décidé...
    Ce n'est pas ma question.
    Oui, je vous dis que les Nisga'a nous ont demandé de réinscrire à l'annexe la rivière Nass, qui se trouve tout au nord de la Colombie-Britannique. Nous avons convenu de le faire parce qu'elle entre dans la catégorie des rivières importantes pour la protection des droits autochtones.
    Vous n'aimez peut-être pas cette réponse, mais c'est une réponse.
    Il vous reste encore quelques minutes si vous voulez poser une autre question qui ne soit pas totalement répétitive.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais seulement faire une observation. Nous avons étudié la Loi sur la protection de la navigation, sur la consigne du ministre, d'octobre 2016 à février 2017. Nous avons entendu de très, très nombreux témoins. Aucun témoin n'a pu nous donner un exemple d'entrave à la navigation sur un cours d'eau qui serait attribuable aux modifications apportées à la Loi sur la protection de la navigation.
    Vous avez décidé de votre propre chef de la modifier de nouveau à peu près un an après le début de votre mandat, mais quand nous avons posé la question aux témoins, aucun n'a pu nous donner d'exemple d'entrave à la navigation. Ces témoignages sont accessibles au public.
    Je me soucie des générations futures, et c'est la raison pour laquelle j'apporte les modifications nécessaires.
    Pour terminer, si vous me le permettez, vous affirmez qu'il faudrait scinder ce projet de loi en deux. Je pense que c'est la demande que votre parti a faite au Président et que le Président a déterminé qu'il n'était pas nécessaire de le scinder en deux parce qu'il porte sur l'évaluation d'impact. C'est la décision qu'a rendue le Président, et c'est la raison pour laquelle cette partie du projet de loi très important, le projet de loi C-69, porte sur les eaux navigables canadiennes et les évaluations d'impact sur l'environnement.
    Je vous remercie beaucoup.
    Madame Duncan.
    Monsieur le ministre, je sais que vous êtes pleinement conscient du pouvoir que vous détenez. Vous détenez un pouvoir unilatéral sur la navigation. C'est un pouvoir fédéral, donc à moins que vous ne décidiez de protéger une rivière navigable, il n'existe aucun recours.
    Votre gouvernement s'est aussi engagé à renforcer cette loi, comme d'autres lois environnementales.
    Il y a vraiment beaucoup d'inquiétudes qui ont été exprimées à l'égard des modifications apportées par les conservateurs à cette loi, mais ce projet de loi en suscite également beaucoup. Il y a le fait que le projet de loi C-69 contient 800 articles en tout. Il y a aussi que la Loi sur l'évaluation d'impact ne prévoit pas nécessairement d'évaluation de l'impact potentiel sur les eaux navigables.
    Avant que le gouvernement Harper ne modifie la loi, il y avait deux principaux instruments susceptibles de justifier une évaluation environnementale fédérale: la Loi sur les pêches et la Loi sur les eaux navigables. Le troisième facteur, qui causait toujours beaucoup de confusion, était celui des effets sur les droits des peuples autochtones.
    Pourquoi a-t-on décidé de ne pas inclure à l'article 7 de la Loi sur l'évaluation d'impact proposée qu'une évaluation peut être faite pour analyser l'impact potentiel d'un projet sur les eaux navigables? Pourquoi prévoir un processus d'évaluation d'impact distinct pour les eaux navigables?
    Comme vous le savez, la Loi sur la protection de la navigation, et maintenant, la Loi sur les eaux navigables du Canada, et avant, la Loi sur la protection des eaux navigables, est l'une des plus vieilles lois du pays.
    Je veux seulement souligner que, comme vous l'avez dit, j'ai beaucoup de pouvoir. Or, étant donné le droit commun qu'ont les Canadiens de naviguer sur nos cours d'eau, sachez que je prends mon travail très au sérieux.
    Comme je l'ai dit, nous en avons étendu la portée. À l'origine, l'intention de la loi était de couvrir la question de la navigation.
    Maintenant, en ce qui concerne votre question au sujet de la présence de déclencheurs pour les études d'impact environnemental, il faut savoir que le projet de loi C-69 et le processus des études d'impact offrent la possibilité de signaler des préoccupations sur le plan environnemental — et pas seulement sur le plan environnemental, mais concernant d'autres aspects aussi —, qu'il soit question de santé ou de collectivités...
(1625)
    Pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez exclu les voies navigables?
    Elles ne sont pas exclues.
    Elles sont exclues de la liste.
    Je m'excuse, j'ai peut-être mal compris ce que vous cherchiez à souligner.
    L'article 7 qui est proposé...
    Oui. Qu'en est-il?
    ... dans la première partie du projet de loi C-69 porte sur les pêches.
    Vous voulez savoir pourquoi nous avons supprimé le déclencheur d'évaluation environnementale, c'est bien cela?
    Oui, c'est ce que je veux savoir.
    D'accord.
    Nous n'avons pas supprimé la responsabilité attachée à l'évaluation environnementale. Aux termes du projet de loi C-69, cette question est couverte par l'intermédiaire de la Loi sur l'évaluation d'impact.
    Contentons-nous de convenir que nous ne sommes pas d'accord.
    Non, elle est là.
    Ce que je dis est très clair...
    Pourquoi voudrions-nous supprimer cela?
    ... cette disposition ne figure pas à l'article 7. Restons-en là.
     Oui, nous avons changé cela, mais...
    Quelqu'un a pris la décision de ne pas mettre cette disposition dans l'article 7.
    ... vous auriez tort de dire que nous l'avons supprimée. Ce n'est pas le cas. Nous avions modifié la loi précédente, mais les évaluations environnementales seront déclenchées par l'intermédiaire de la Loi sur l'évaluation d'impact.
    Permettez-moi de vous poser une deuxième question.
    Dans votre exposé, vous avez parlé de toute l'importance que vous accordez aux répercussions sur les peuples autochtones. L'un des plus grands torts causés par les modifications apportées par le gouvernement Harper a été le fait d'exclure les voies navigables des déclencheurs d'évaluations environnementales pour toutes les activités entourant l'exploitation des sables bitumineux dans le Nord de l'Alberta, compte tenu de l'effet de ces activités sur les cours d'eau, les terres humides, etc.
    Dans toute sa sagesse, le gouvernement fédéral — tant les conservateurs que les libéraux — s'est abstenu de se pencher sur les répercussions transfrontalières du barrage du site C sur le droit de traverser des peuples autochtones du Nord de l'Alberta.
    Cette affaire a été portée devant les tribunaux. Le juge Hughes de la Cour fédérale du Canada a établi qu'une personne raisonnable s’attendrait à ce qu’une réduction du nombre des eaux navigables surveillées présente un risque potentiel de dommages pour les droits de chasse et de piégeage des Mikisew, ce qui cautionnerait l'obligation de consultation. Or, l'aspect sur lequel les Autochtones demandent qu'il y ait consultation, c'est l'étude d'impact dans son ensemble et pas seulement sur un processus restreint qui se bornerait à évaluer s'il s'agit d'un impact majeur ou d'un impact mineur.
    L'un des principaux problèmes, c'est l'effet cumulatif, et c'est un problème important que beaucoup de gens ont soulevé. Je voudrais savoir si vous pouvez nous expliquer comment cette nouvelle loi inscrite aux termes du projet de loi C-69 tient suffisamment compte de ces effets cumulatifs, même lorsqu'il s'agit d'ouvrages secondaires sur des cours d'eau secondaires.
    Oui, l'intention est aussi de couvrir les effets cumulatifs sur la navigation.
    Comment le projet de loi fait-il cela? À quel endroit est-il question des effets cumulatifs?
    C'est à l'article 7, si vous voulez bien regarder le...
    Est-ce que vous parlez de l'article 7 de la Loi sur les eaux navigables, la loi sur la navigation?
    Permettez-moi d'abord de dire que, oui, en raison de la Loi sur la protection de la navigation du gouvernement précédent, certaines protections ont été supprimées.
    Non...
    Vous avez raison à cet égard. C'est pour cela que nous avons cette nouvelle loi. Nous allons nous attaquer aux questions que vous soulevez par l'intermédiaire du projet de loi C-69, nommément par l'intermédiaire de cette nouvelle Loi sur l'évaluation d'impact. L'importance des droits autochtones, les effets environnementaux, les effets sur la santé, les effets cumulatifs, bref, toutes ces choses seront pris en compte aux termes de la Loi sur l'évaluation d'impact.
    Je recommande que...
    J'ai une dernière question...
    Un instant, Linda. Je suis désolée, mais votre temps de parole est écoulé. Je m'en excuse, mais il n'y a jamais suffisamment de temps pour les questions.
    Monsieur Rogers, nous vous écoutons.
    Pardonnez-moi, madame la présidente. Je crois que je vais y aller d'une question rapide et laisser le reste de mon temps à mon collègue.
    Monsieur le ministre, merci d'être là.
    Je faisais partie du comité sur les transports qui a étudié ceci — pas sous votre supervision, mais peut-être, à votre invitation —, et l'une des choses qui m'ont beaucoup tenu à coeur durant la dernière campagne avait trait à certaines des modifications qui ont été apportées en 2012, et avant cela, en 2008, sans supervision adéquate du Parlement.
    L'une des choses que nous avons constatées quand nous avons commencé à exercer certaines fonctions parlementaires, c'est que le passage à une annexe des cours d'eau avait certains avantages, mais aussi, selon moi, d'importants inconvénients.
    Par exemple, des fossés de drainage qui se remplissaient au gré des saisons pouvaient se retrouver sur la liste alors qu'ils n'avaient pas besoin d'y être, mais d'un autre côté, de nombreux lacs et de nombreuses rivières qui étaient protégés auparavant ont tout simplement cessé de l'être, malgré l'existence d'un droit à la navigation issu de la common law. Les citoyens ne disposaient d'aucun moyen efficace de protéger ce droit.
    En particulier, pour revenir à un exemple qu'évoquait l'un de mes collègues conservateurs, je me souviens distinctement d'un témoin de la Fédération des chasseurs et pêcheurs de l’Ontario qui se plaignait que les sociétés qui essayaient de faire passer des tyroliennes par-dessus les rivières empêchaient les membres de la fédération de profiter des avantages de la nature qu'ils fréquentaient de façon assidue.
    J'aimerais savoir comment ce projet de loi veillera à ce que ces fossés de drainage saisonniers ne mobilisent pas l'attention au détriment de la protection des lacs et des rivières que la Fédération des chasseurs et pêcheurs de l’Ontario souhaitaient voir protéger.
(1630)
    Il serait probablement utile que je lise la définition élargie des voies navigables que nous allons inclure dans cette nouvelle loi. Il s'agit de tout plan d’eau utilisé — ou qui est raisonnablement susceptible d’être utilisé — par les navires comme moyen de déplacement ou de transport à des fins commerciales ou récréatives — ou comme moyen de transport ou de déplacement par les peuples autochtones pour exercer leurs droits — lorsqu’il y a un accès public, deux ou plusieurs propriétaires riverains, ou lorsque l’État est le seul propriétaire riverain.
    J'estime que cette définition encadre bien ce sur quoi une loi sur les eaux navigables devrait porter.
    Je crois que le reste du temps de parole sera utilisé par M. Rogers.
    Merci.
    Pour économiser du temps, je vais m'abstenir de faire un long préambule, mais je crois que l'on peut affirmer sans se tromper que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays ont des réserves lorsqu'il s'agit d'apporter des modifications aux lois de ce type.
    Je n'ai que deux questions très brèves.
    Tout d'abord, j'aimerais savoir si les enjeux de navigation, comme les limites de vitesse, sont abordés.
    De quelles ressources une collectivité, un groupe ou une personne disposerait-il si un ouvrage proposé risquait d'avoir une incidence sur le droit du public à la navigation?
    Les enjeux comme celui de la vitesse sont pris en compte par une autre loi, la Loi sur la marine marchande du Canada. Il n'en est donc pas question aux termes de la Loi sur les eaux navigables canadiennes.
    Si un particulier ou un groupe particulier considère qu'il serait très important d'assurer certaines mesures de protection pour tel ou tel plan d'eau, nous reconnaissons le fait qu'il doit disposer d'un processus adéquat pour demander que cette rivière, ce cours d'eau ou ce lac soit inscrit à cette annexe spéciale, et j'estime que le processus que nous allons mettre en place à cet égard sera simple et direct.
    Nous allons faire en sorte que le processus soit simple et direct. Nous allons rendre les choses très claires afin qu'une personne — par exemple, quelqu'un qui auraient d'importantes priorités sur le plan récréatif, comme le canot ou le kayak, etc. — soit en mesure de présenter une demande pour faire en sorte que tel ou tel cours d'eau soit couvert de façon particulière parce qu'il s'agit d'un cours d'eau particulier. Bien entendu, les droits autochtones sont dans une catégorie bien à eux.
    Certains cours d'eau seront considérés comme ayant une valeur patrimoniale, et feront à ce titre l'objet d'une surveillance particulière. Lorsque ce projet de loi aura force de loi, il sera possible d'y ajouter des cours d'eau. C'est une chose qui a été indiquée très clairement dès le début. Il se pourrait que les citoyens de votre circonscription veuillent que tel ou tel cours d'eau soit traité de cette façon, et nous serons ouverts à cela.
    Merci, monsieur le ministre.
    Madame la présidente, j'ai terminé. Je vais laisser le reste de mon temps de parole à Elizabeth.
    D'accord. Elisabeth, vous avez une minute.
    Je vous en sais gré.
    Tout d'abord, monsieur le ministre, je tiens à vous remercier d'avoir élargi la définition de ce qu'est une voie navigable. Dans une certaine mesure, la voie législative manque de clarté en ce qui concerne les voies navigables qui font partie de l'annexe et de celles qui n'en font pas partie, mais il s'agit là d'une nette amélioration par rapport au document de travail qui nous avait été remis à la fin du mois de juin. Je tiens à vous remercier sincèrement de cette occasion que vous nous donnez de protéger nos voies navigables.
    Compte tenu du temps qu'il reste, comment croyez-vous que le lien va se faire entre la Loi sur l'évaluation d'impact et cette loi?
    À l'instar de ma collègue Linda Duncan, je préférerais que l'on ramène la notion de déclencheur, mais je suis convaincue qu'il ne me reste plus assez de temps.
     Eh bien, comme vous le savez, la Loi sur l'évaluation d'impact aura une liste de projets dans laquelle des projets seront versés. Le fait pour un projet de se retrouver dans cette liste — qu'il s'agisse de navigation, d'un ouvrage important ou d'un pipeline, peu importe — déclenchera une évaluation d'impact.
    Nous avons également une définition de ce qui constitue un ouvrage majeur. Jusqu'ici, j'ai donné l'exemple de barrages qui ont une incidence de taille sur les voies navigables. Nous allons également tenter d'étoffer cela.
    Maintenant, cela ne concerne que l'aspect navigation, mais la liste de projets qui sera dans la Loi sur l'évaluation d'impact — liste sur laquelle figureront un grand nombre de projets, comme la ministre McKenna l'a clairement indiqué — inclura aussi des projets qui risquent d'avoir un impact environnemental sur nos voies navigables.
(1635)
    Monsieur le ministre, merci beaucoup. Je sais qu'il ne nous reste plus beaucoup de temps et que nous allons devoir partir. Je vous remercie d'avoir été là avec votre équipe pour répondre à nos questions.
    Je ne vais pas suspendre la séance, parce que quelqu'un a invoqué le Règlement, mais je vais vous permettre de partir.
    Merci. Tout le plaisir était pour moi.
    Quelqu'un a invoqué le Règlement.
    Nous vous écoutons.
    Merci, madame la présidente, de me permettre d'invoquer le Règlement. Mon intervention concerne les votes qui doivent se tenir ce soir.
    Comme vous le savez, nous avions prévu trois heures pour cette séance et il nous reste un autre groupe d'experts à entendre. Or, le temps qu'il nous faudra pour aller voter va mettre à mal notre capacité de poser des questions à ces témoins.
    Je demande au reste des membres du Comité s'il serait possible de rajouter à la fin de la séance l'équivalent du temps qu'il nous faudra pour aller voter, parce que je serais très mal à l'aise de priver nos témoins du temps qu'ils s'attendent à avoir avec nous.
    Il s'agit d'un rappel au Règlement. Je ne crois pas qu'il soit possible de proposer une motion sur un rappel au Règlement, mais il s'agit en fait d'une proposition...
    Oui, c'est une proposition.
    ... que nous allons prendre en délibéré.
    Je vais suspendre la séance pendant que tout le monde prend place à la table.
    J'ai une motion à proposer...
    D'accord.
    Ma motion serait de faire revenir le ministre à la table si cela est possible, même à la fin, attendu que nous ne l'avons pas eu pour une heure complète?
    Il a une autre obligation...
    Nous pourrions le faire revenir immédiatement. Nous avons eu du retard à cause des votes.
    Nous allons prendre cela en considération et voir ce que nous pouvons faire.
    Pourrions-nous mettre aux voix la possibilité de lui envoyer une invitation à venir comparaître à une date ultérieure?
    Croyez-vous que vous pourriez me laisser lui demander ce qu'il est possible de faire ou si vous tenez à recourir à une mise aux voix?
    Je crois qu'il serait mieux que vous me laissiez tâter le terrain plutôt que de procéder à une mise aux voix. Qu'en pensez-vous? Je suis disposée à aller...
    Si les gens sont ouverts à cela... Nous avons dit que nous aimerions que les gens reviennent à la fin de la séance, mais en ce qui me concerne, j'aimerais au moins revoir le ministre et ses collègues.
    D'accord, je vais prendre cela en délibéré à titre de demande. Je vais m'en occuper.
    Je vais suspendre la séance temporairement, puis nous allons poursuivre la discussion sur la possibilité de prolonger la séance.
(1635)

(1640)
    La séance est ouverte.
    Bienvenue à tous nos invités.
    Pendant que tout le monde finit de se préparer, permettez-moi de vous informer que nous accueillons des représentants de quatre secteurs. Nous vous remercions de vous être déplacés. Malheureusement, les votes à la Chambre nous ont fait prendre du retard, et nous allons devoir participer à une autre série de votes tout à l'heure.
    Nous avons amorcé une discussion afin de décider si nous allons prolonger la séance. Je ne sais pas si c'est quelque chose que vous seriez disposés à faire. Je sais que nous sommes censés finir à 18 h 30, mais s'il nous faut un peu plus de temps, cela vous pose-t-il problème?
    Je vois des gens qui opinent du chef, alors j'espère que... De notre côté, nous allons tenter de voir si les membres sont en mesure de faire tout ce qu'il faut pour que cela fonctionne.
    Je vais présenter tout le monde. De l'Association canadienne des producteurs pétroliers, nous accueillons Terry Abel, vice-président exécutif, Paul Barnes, directeur, Canada atlantique et arctique, et Patrick McDonald, directeur, Climat et innovation.
    De l'Association canadienne de pipelines d'énergie, nous avons Chris Bloomer, président et chef de la direction.
    De l'Association canadienne de l'hydroélectricité, nous avons Eduard Wojczynski, président, Geneviève Martin, présidente de la réglementation et Pierre Lundahl, consultant principal.
    Enfin, de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, nous recevons Lisa McDonald, directrice exécutive intérimaire et Lesley Williams, qui est la directrice des politiques et des programmes.
    Merci à tous.
    Chaque groupe dispose de 7 à 10 minutes pour livrer sa déclaration préliminaire, puis nous allons passer à la période des questions.
    Terry, voulez-vous commencer?
    Bonjour, madame la présidente, distingués membres du Comité. Je m'appelle Terry Abel, et je suis le vice-président exécutif de l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Paul Barnes, directeur de la division du Canada atlantique et arctique, ainsi que de Patrick McDonald, directeur de la division du climat et de l'innovation.
    Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de comparaître devant le Comité aujourd'hui pour vous faire part de certaines de nos expériences et réflexions qui pourraient aider à éclairer votre examen du projet de loi C-69.
    Comme beaucoup d'entre vous le savent, espérons-le, l'Association canadienne des producteurs pétroliers et ses membres sont à l'origine d'environ 80 % de toute la production de gaz naturel, de liquides extraits du gaz naturel, de pétrole brut et de sables bitumineux partout au Canada, y compris en zone extracôtière. Notre industrie est le plus grand investisseur du secteur privé au Canada. En 2014, elle a investi un montant record de 81 milliards de dollars et, en 2017, tout au plus 45 milliards de dollars. Ensemble, nous employons bien plus de 500 000 Canadiens d'un océan à l'autre.
    Nos projets extracôtiers d'exploitation du pétrole et du gaz, ainsi que du gaz naturel, qui se situent généralement assez loin des côtes — à une distance de 200 à 500 kilomètres au large de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse — ont procuré d'énormes avantages aux deux provinces au fil des ans et continueront de le faire pour un bon bout de temps.
    Comme vous le savez, l'Agence internationale de l'énergie prévoit toujours que la demande mondiale d'énergie augmentera de plus de 30 % d'ici 2040, et ce, dans les secteurs du pétrole et du gaz naturel; les ressources en hydrocarbures continueront de représenter la part du lion de la demande d'énergie dans l'ensemble du pays, même si les ressources renouvelables connaissent une forte croissance.
    L'Association canadienne des producteurs pétroliers croit que le Canada est bien placé pour devenir le fournisseur de choix des ressources en pétrole et en gaz naturel, compte tenu de ses pratiques de développement durable de calibre mondial et étant donné qu'il compte certaines des réserves les plus abondantes et de la plus haute qualité en pétrole et en gaz dans le monde entier. Il est donc impératif que le Canada demeure concurrentiel par rapport aux autres pays producteurs de pétrole et de gaz; à défaut de quoi, le Canada perdra l'occasion non seulement de générer une valeur économique à partir de cette industrie, mais aussi de contribuer aux réductions mondiales consécutives des émissions de gaz à effet de serre grâce à sa position de producteur responsable de ces ressources.
    Dans mon exposé d'aujourd'hui, je vais m'attarder sur la compétitivité de notre industrie et sur certains aspects du projet de loi qui risquent de créer de l'incertitude et de saper davantage la compétitivité mondiale de l'industrie. J'aborderai des questions comme les dispositions transitoires, les délais, la planification en amont, les commissions et les évaluations stratégiques régionales.
    Nous savons que le gouvernement se donne comme objectif de rétablir la confiance du public dans ses processus d'examen environnemental et réglementaire, un objectif que nous partageons entièrement. Toutefois, nous voulons nous assurer que tout changement rétablira aussi la confiance des investisseurs.
    Notre industrie éprouve beaucoup de difficultés par les temps qui courent. Les ressources en capital sont très convoitées à l'échelle mondiale, et le Canada doit demeurer concurrentiel si nous tenons à attirer des capitaux au pays. Malheureusement, aujourd'hui, le climat d'incertitude au Canada ne permet pas d'attirer des capitaux, et nous continuerons de perdre des investissements et des emplois si nous n'instaurons pas un système de règles claires et de décisions qui sont définitives et fiables.
    J'aimerais signaler qu'une étude menée en 2016 par WorleyParsons sur les pratiques d'évaluation environnementale à l'échelle mondiale révèle que, même si le Canada dispose de l'un des processus les plus rigoureux et les plus complets en la matière, il a aussi actuellement l'un des processus d'évaluation environnementale les plus coûteux en temps et en ressources au monde.
    Malheureusement, l'Association canadienne des producteurs pétroliers et les investisseurs estiment aujourd'hui que le projet de loi C-69 ne prévoit pas grand-chose pour améliorer cette situation. On trouve un exemple simple de cette incertitude croissante dans les dispositions transitoires du projet de loi sur l'évaluation d'impact. Selon les dispositions actuelles, les évaluations qui ont commencé sous le régime de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012, mais qui ne sont pas encore terminées, devraient généralement se poursuivre et être complétées en vertu des nouvelles mesures législatives et réglementaires. Plus précisément, en ce qui concerne la possibilité de mener à bien une évaluation aux termes de la loi actuelle, soit la LCEE de 2012, le projet de loi emploie un libellé très subjectif qui ne donne pas d'indication claire ni de certitude quant au processus applicable. Si ces dispositions avaient pour objet d'assurer la continuité des évaluations commencées en 2012, nous vous demanderions d'indiquer cela de façon beaucoup plus claire et plus certaine dans le libellé actuel.
(1645)
    En obligeant les nouveaux promoteurs, si telle est l'intention, à suivre le nouveau processus réglementaire à mi-parcours, on risque essentiellement de ramener les projets à la case de départ. Prenons l'exemple des programmes de forage de puits exploratoires en haute mer. On en compte quatre actuellement à Terre-Neuve. Selon nous, il y a un risque notable que tout le travail entrepris jusqu'ici soit jugé incomplet. Par conséquent, les promoteurs pourraient devoir reprendre leurs démarches et suivre un processus tout à fait différent, ce qui prolongerait les délais et augmenterait l'incertitude pour nos investisseurs.
    Nous proposons simplement que le gouvernement confirme que tous les projets en cours dans le cadre de processus fédéraux, provinciaux ou territoriaux ne seront pas réévalués aux termes de la nouvelle loi.
    Madame la présidente, l'Association canadienne des producteurs pétroliers appuie le maintien des délais prescrits par la LCEE de 2012 et le projet de loi C-69. Cependant, rien ne garantit que, dans l'ensemble, les délais d'exécution des examens réglementaires seront plus courts que ceux en vigueur sous le régime actuel. Avec l'ajout de la planification en amont et étant donné l'absence de clarté quant aux échéances relatives aux demandes de révision et de renseignements, sans oublier les diverses dispositions, ici et là dans le projet de loi, qui permettent de proroger ces délais, l'Association canadienne des producteurs pétroliers et les investisseurs concluent généralement que les délais ne feront que s'allonger, tout compte fait.
    Nous appuyons sans réserve le concept de la planification en amont. Je vous ferai d'ailleurs remarquer qu'il est pratique courante pour les membres de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, et notre industrie en général, de mobiliser dès le début les intervenants qui pourraient être touchés par les projets proposés. Nous sommes favorables à l'intervention du gouvernement dans un processus plus officiel de mobilisation en amont, car cela donne l'occasion de comprendre les problèmes tôt dans le processus et de clarifier les choses pour tout le monde. Cela permet également aux intervenants de régler les problèmes qui, d'après notre expérience, surgissent souvent à l'étape de l'examen et qui ont très peu à voir avec le projet. Ce sont des questions de nature beaucoup plus générale.
    Cependant, pour que la mobilisation en amont soit efficace, toutes les parties doivent s'investir dans le processus et rendre des comptes, c'est-à-dire participer pleinement, respecter les délais et remplir leurs rôles respectifs. À notre avis, en l'absence d'attentes claires pour les intervenants, l'industrie et le gouvernement, le processus de mobilisation ou de planification en amont risque de se poursuivre indéfiniment, sans contribuer à l'amélioration des délais.
    Par ailleurs, l'Association canadienne des producteurs pétroliers estime que, si jamais le promoteur et l'Agence ne peuvent pas s'entendre sur la portée d'une évaluation environnementale à la fin du processus, il faut un mécanisme permettant de rétablir la discipline et de clore le processus, voire de poursuivre l'étude d'impact environnemental.
    Pour terminer, permettez-moi d'attirer votre attention sur une question qui concerne très précisément nos activités extracôtières. Selon le libellé actuel, tous les projets extracôtiers désignés auraient besoin d'être soumis à un examen par une commission. Autrement dit, les délais seraient au moins deux fois plus longs que ceux applicables à l'examen mené par l'Agence. Nous ne croyons pas qu'il soit justifié d'instaurer un processus qui prendrait le double du temps — au moins quatre ans, d'après nous —, surtout lorsque les effets éventuels des projets pétroliers et gaziers extracôtiers sont bien compris.
    De nombreuses évaluations environnementales ont déjà été réalisées et examinées au Canada, aussi bien par l'Agence canadienne d'évaluation environnementale que par les offices des hydrocarbures extracôtiers. À cela s'ajoute la surveillance des répercussions environnementales depuis des décennies, au Canada et à l'étranger. Voilà autant de pratiques qui constituent aujourd'hui pratiquement la norme et qui sont adoptées partout dans le monde.
    À notre avis, l'établissement d'une commission qui allie l'expérience et l'expertise de l'Agence d'évaluation d'impact et d'un organisme de réglementation spécialisé, comme les offices des hydrocarbures extracôtiers, devrait pouvoir réduire le temps requis pour effectuer l'examen réglementaire, au lieu de le doubler, comme semble le prévoir le projet de loi, dans sa forme actuelle. L'Association canadienne des producteurs pétroliers vous recommande donc de supprimer l'exigence selon laquelle les activités extracôtières doivent faire l'objet d'un examen mené par des commissions.
    Notre industrie voit également d'un très bon oeil les évaluations d'impact régionales prévues dans le projet de loi, et en reconnaît les avantages. Elles permettraient notamment d'améliorer l'évaluation des effets environnementaux et des effets cumulatifs. Elles aideraient beaucoup à réduire l'épuisement des intervenants, qui n'auraient plus à refaire sans cesse les mêmes choses, en plus d'assurer l'uniformité et l'efficacité de la réglementation.
    Il s'agit d'une approche qui est utilisée à l'échelle internationale. Sachez que des pays comme la Norvège y ont déjà eu recours.
(1650)
    Nous continuons d'appuyer l'idée des évaluations d'impact régionales. Si nous allons emprunter cette voie, nous recommandons qu'une liste des évaluations terminées et acceptées soit dressée et, au bout du compte, qu'elle fasse partie des critères d'exclusion applicables à la liste de projets qui sera également élaborée.
    Nous estimons que cela peut être un outil puissant, à condition que le Canada, les provinces et les territoires travaillent ensemble pour mener à bien les évaluations. Toutefois, dans le libellé actuel du projet de loi C-69, nous ne voyons vraiment aucune mention de délais prescrits, aucune confirmation de l'inclusion des provinces ou des organismes de réglementation du cycle de vie, ni même aucune garantie que le processus donnera de bons résultats ou qu'il sera effectivement utilisé dans le cadre du régime d'évaluation prévu aux termes du projet de loi C-69.
    Je vais conclure rapidement, madame la présidente.
    L'Association canadienne des producteurs pétroliers vous remercie encore une fois de lui avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui. Nous vous prions d'examiner attentivement certaines des observations que nous avons formulées aujourd'hui, et nous recommandons des changements qui permettront de rétablir la confiance des investisseurs, d'aider le Canada à profiter pleinement de la valeur économique importante de notre industrie et de reconnaître les avantages environnementaux qui se concrétisent à l'échelle mondiale lorsque le Canada est le fournisseur de choix.
    Merci encore.
(1655)
    Merci beaucoup.
    Nous tenons absolument à entendre le point de vue de tout le monde, mais nous voulons avoir le temps de passer aux questions. Je sais que tous les députés ont hâte d'intervenir, alors je serai un peu stricte quant au respect du temps alloué.
    Monsieur Bloomer, vous avez la parole.
    Merci.
     Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner devant le Comité.
    L'instant présent est l'aboutissement d'un long processus de consultations, d'échanges, etc., et d'un processus que la CEPA, soit l'Association canadienne des pipelines d'énergie... Ses membres représentent également 97 % du volume transporté de la production canadienne jusqu'aux États-Unis. Nous avons hâte d'entendre ce que vous avez à dire.
    Je serai assez direct dans mes propos, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Nous demeurons pleinement engagés. Nous vous avons déjà remis un mémoire, et nous continuerons de faire un suivi dans le cadre d'autres consultations. J'aimerais commencer par vous présenter un bref état des lieux en ce qui concerne le secteur de l'énergie. Les nouvelles ne sont pas bonnes.
    Voici ce qui s'est passé au cours des deux années ayant précédé le projet de loi, et à vous de choisir votre poison: l'imposition de politiques, notamment un moratoire relatif aux pétroliers sur la côte nord de la Colombie-Britannique; la proposition de règlements pour la réduction des émissions de méthane; l'adoption de normes sur les carburants propres; la réglementation provinciale sur les émissions de gaz à effet de serre; les restrictions imposées par la Colombie-Britannique quant au transport du bitume; un manque de clarté concernant la position du gouvernement sur la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et le principe du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause; la concurrence féroce livrée par les États-Unis grâce à leurs politiques favorables au secteur de l'énergie, et j'en passe. L'effet cumulatif de ces politiques a ébranlé la confiance des investisseurs au Canada. Voilà qui nuit gravement à la compétitivité du secteur de l'énergie.
    Nous traversons déjà une période de profonde incertitude. De nouveaux projets sont pratiquement interrompus, et nous éprouvons de graves problèmes, à l'échelle de notre secteur et de notre pays, pour ce qui est d'ouvrir de nouveaux marchés pour nos produits énergétiques dans le monde entier. La réalité, c'est que les entreprises membres de la CEPA, qui possèdent des actifs matériels dans d'autres pays, cherchent activement à saisir des occasions dans ces États. Résultat: les capitaux d'investissement dans l'industrie pétrolière et gazière du Canada vont à l'étranger. Cette situation est attribuable, en grande partie, à l'incertitude créée par la politique de réglementation actuelle et aux répercussions possibles d'autres changements réglementaires radicaux qui touchent directement le secteur des pipelines au Canada. Les conséquences sont bien réelles, et le secteur est en train de suffoquer à cause de cela.
    Nous croyons qu'une majorité de Canadiens reconnaissent encore la contribution importante du secteur pétrolier et gazier à l'économie canadienne, et nous sommes fermement convaincus que la croissance continue du secteur pétrolier et gazier est tout à fait conforme aux cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada pour 2030. Au cours des consultations qui ont mené au dépôt du projet de loi, la CEPA s'est sentie rassurée d'entendre le gouvernement donner l'assurance que toute nouvelle loi tiendra compte des valeurs communes axées sur un régime de réglementation solide, l'établissement de relations, la sécurité, la gérance de l'environnement, la confiance du public, la compétitivité ainsi que la certitude et la clarté nécessaires pour qu'il y ait une possibilité réelle de faire construire un nouveau pipeline majeur au Canada. Or, dans sa forme actuelle, le projet de loi ne peut pas offrir plus de certitude, de clarté et de prévisibilité dans le cas des projets qui s'étendent sur des centaines, voire des milliers de kilomètres et qui traversent plusieurs provinces, collectivités et communautés autochtones. En fait, il est difficile d'imaginer qu'on puisse construire un nouveau pipeline majeur au Canada en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact, et encore moins attirer des investissements dans le secteur canadien de l'énergie.
    Tout ce que fait ce projet de loi, nous le craignons bien, c'est contrecarrer la réforme de la réglementation dans le but de faire avancer le programme du gouvernement actuel en matière de lutte contre les changements climatiques, tout en insérant une foule de politiques trop générales dans un processus décisionnel qui est, au demeurant, très technique.
    En ce qui a trait aux détails du projet de loi, cette démarche a commencé par la lettre de mandat du premier ministre à l'intention de la ministre de l'Environnement et du Changement climatique. Ainsi, la ministre a reçu le mandat d'examiner les processus d'évaluation environnementale pour atteindre trois objectifs: rétablir la confiance du public; instaurer de nouveaux processus équitables; et acheminer les ressources vers les marchés. En tout respect, la CEPA ne croit pas que le projet de loi sur l'évaluation d'impact permettra d'atteindre l'un ou l'autre de ces objectifs. Au terme d'un an et demi de consultations, la CEPA a présenté plus de 200 pages de mémoires qui visaient à fournir des recommandations judicieuses et pratiques pour réussir à atteindre les trois objectifs du gouvernement. Nos recommandations étaient fondées sur la nécessité sous-jacente d'empêcher l'érosion de la compétitivité du Canada dans le secteur des ressources naturelles. Elles étaient guidées par de grands principes qui, selon nous, auraient établi le cadre nécessaire pour remplir tous ces objectifs.
    D'abord, il s'agit d'instaurer un processus qui veille à ce que les grandes questions de politique publique soient abordées dans des cadres plus appropriés, en dehors des examens de projets; il faut aussi un processus qui repose sur les preuves scientifiques et les faits, qui est coordonné et efficace et qui apporte clarté et certitude. L'Office national de l'énergie est l'organisme de réglementation le mieux placé, puisqu'il possède une expertise technique et assume une responsabilité à l'égard du cycle complet des projets, c'est-à-dire l'examen, l'exploitation et l'entretien. Malheureusement, l'évaluation d'impact ne répond pas à ces préoccupations. La CEPA est déçue de constater que le processus proposé semble renforcer les facteurs mêmes qui ont créé le cadre réglementaire toxique relatif aux grands projets, ce que le processus d'examen réglementaire était justement censé régler. L'évaluation d'impact n'apaise pas non plus la préoccupation la plus fondamentale du secteur des pipelines: un processus qui est coûteux, qui exige beaucoup de temps, qui polarise l'opinion et qui se termine par une décision politique discrétionnaire.
(1700)
    Le projet de loi C-69 n'aborde pas la nécessité de trouver une façon appropriée de débattre et de résoudre les grands enjeux de politique publique. Tout au long du projet de loi, on retrouve l'engagement du gouvernement à atteindre ses objectifs en matière de changement climatique, d'analyses comparatives entre les sexes et de réconciliation avec les Autochtones, ainsi que des analyses de durabilité subjectives et intrinsèquement imprévisibles.
    Même si la CEPA a fermement recommandé de retirer les grandes politiques publiques des examens propres à certains projets, ces enjeux sont maintenant expressément inclus dans le processus d'examen à titre de facteurs dont il faut tenir compte.
    La Loi sur l'évaluation d'impact ne permettra pas d'accroître la certitude, la précision et la prévisibilité. Elle introduit plutôt un nouvel organisme de réglementation, de nouveaux processus uniques et des exigences en matière de renseignements qui n'ont jamais été mis à l'essai.
    Le critère lié à la participation du public a été éliminé. Les évaluations fondées sur la science et les faits seront maintenant masqués par une abondance d'autres évaluations fondées sur les politiques qui sont mal définies, fluides et ouvertes aux stratégies dilatoires et obstructionnistes qui pourraient être utilisées par des groupes qui s'opposent à tous les projets. En résumé, nous ne pensons pas que les délais s'amélioreront, mais qu'ils seront plus longs.
    L'Office national de l'énergie, maintenant l'Organisme canadien de réglementation de l'énergie, a été mis de côté dans les principaux examens de projets de pipeline. La CEPA a toujours soutenu que l'ONE est l'organisme de réglementation le mieux placé pour superviser le cycle complet d'un pipeline. Mais le projet de loi C-69 confie plutôt l'examen des principaux projets de pipeline à la nouvelle Agence canadienne d’évaluation d’impact. Ce nouvel organisme n'a pas le riche historique en matière de prise de décisions administratives et l'expertise technique de l'ONE, maintenant l’Organisme canadien de réglementation de l’énergie.
    La nouvelle Agence a plutôt le mandat de jouer un rôle élargi et d'intervenir dans un plus large éventail d'enjeux, et on s'attend à ce qu'elle mette en oeuvre le programme politique du gouvernement en matière de changement climatique et de réconciliation et les objectifs en matière d'analyse comparative entre les sexes. Ce n'est pas un organisme de réglementation expert et indépendant. La CEPA n'est pas convaincue qu'il aura la capacité de mener ces vastes examens politiques, même avec le milliard de dollars en nouveau financement annoncé pour appuyer la mise en oeuvre de l'évaluation d'impact.
    Étant donné ces préoccupations, il est difficile d'imaginer qu'un promoteur de projet de pipeline soit prêt à mettre ce nouveau processus à l'essai ou qu'il s'attende à des résultats raisonnablement positifs. En raison des essais liés au changement climatique intégrés qui visent les émissions en amont et en aval, il est ridicule de s'attendre à ce qu'un promoteur de pipeline dépense plus d'un milliard de dollars pour que son projet soit simplement refusé au bout du compte, car ce projet doit tenir compte des émissions liées au produit, de sa production à sa consommation dans une autre région du monde.
    Si l'objectif est de suspendre la production pétrolière et gazière et d'arrêter la construction de pipelines, ce projet de loi pourrait bien avoir atteint son objectif.
    En terminant, aujourd'hui, la CEPA a communiqué les points de vue d'entreprises membres qui se fondent sur leur expérience directe en matière d'investissement, de construction et d'exploitation sécuritaire d'infrastructures énergétiques qui appuient l'économie canadienne et la vie quotidienne des Canadiens. Les promoteurs de projets et leurs investisseurs continueront de comparer la faisabilité de projets de mise en valeur des ressources au Canada à d'autres options d'investissement.
    Le document de travail publié par le gouvernement en juin 2017 suggérait une approche plus équilibrée entre les points de vue des éléments environnementaux les plus radicaux et ceux de l'industrie. Ce projet de loi fait pencher la balance complètement du côté de la perspective environnementale, et l'objectif de certains de ces intervenants est de laisser les carburants fossiles dans le sol et empêcher la construction de nouveaux pipelines.
    Ce projet de loi accroîtra le risque et l'incertitude. L'effet net de l'évaluation d'impact est un processus inefficace et irréalisable qui créera une incertitude ingérable et un cadre de prise de décisions qui intégrera des enjeux de politiques plus vastes dans un processus qui n'est pas équipé pour les résoudre.
    Enfin, ce projet de loi n'offre pas de vision sur la façon dont il aidera le Canada à atteindre ses objectifs à long terme en matière d'énergie. Il ne reflète pas l'importance que l'industrie gazière et pétrolière continuera de jouer dans le panier énergétique mondial au cours des prochaines décennies. Ainsi, il n'aide pas le Canada à obtenir la pleine valeur de ses ressources sur les marchés mondiaux.
    Je vous remercie d'avoir écouté nos commentaires. J'ai hâte de répondre à vos questions.
(1705)
    Merci.
    Madame McDonald.
    Je suis Lisa McDonald, et je suis directrice exécutive par intérim de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada. Aujourd'hui, je suis accompagnée de ma collègue, Lesley Williams, notre directrice, Politique et programmes.
    J'aimerais vous remercier de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui pour offrir la contribution de l'industrie des minéraux sur le projet de loi C-69. Notre exposé se concentrera sur les éléments liés aux évaluations d'impact.
    L'ACPE est la voix nationale de l’exploration et de la mise en valeur des minéraux au Canada. Nous représentons plus de 7 500 membres au Canada et à l'échelle mondiale. À titre de représentante du secteur, l'ACPE encourage les pratiques de pointe qui optimisent le rendement technique, opérationnel, environnemental et social ainsi qu'en matière de sécurité.
    Pour vous donner un aperçu de l'industrie de l'exploration minière, il s'agit d'un processus par étapes de collecte de renseignements en vue de découvrir un gisement minéral économiquement viable, ce qui revient un peu à chercher une aiguille dans une botte de foin, bien honnêtement. Au Canada, ce sont les petites sociétés d'exploration qui font la plus grosse partie de ce travail. Comme ce sont de petites sociétés, leurs budgets et leurs délais sont limités. La plupart d'entre elles ne génèrent pas de revenus et financent leurs activités en émettant des actions. Même si certaines sociétés d'exploration peuvent vendre des projets prometteurs à des moyennes ou grandes sociétés minières afin de les faire passer par le processus d'évaluation et d'ouvrir une mine, plusieurs petites sociétés lancent elles-mêmes le processus d'évaluation.
    Aujourd'hui, notre exposé vous offrira un aperçu de l'industrie des minéraux, deux propositions d'amendements au projet de loi C-69, et des commentaires sur certaines dispositions importantes du projet de loi.
    On ne saurait surévaluer la valeur de l'industrie des minéraux au Canada. En effet, l'exploration minérale et l'industrie minière fournissent de vastes contributions au Canada. Des collectivités autochtones et éloignées aux régions rurales, en passant par des grandes villes de partout au Canada, cette industrie génère d'importantes retombées économiques et sociales pour les Canadiens.
    Notre industrie représente plus de 3 % du PIB. Les exportations de minéraux, évaluées à 89 milliards de dollars en 2016, ont représenté 19 % des exportations nationales totales du Canada. L'industrie emploie près de 600 000 travailleurs partout au Canada, et c'est également le plus grand employeur d'Autochtones du secteur privé au Canada, ainsi qu'un partenaire important des entreprises autochtones.
    Cela dit, l'industrie canadienne des minéraux fait face à une concurrence féroce, à l'échelle mondiale, pour attirer des investissements. En fait, le Canada commence à prendre du retard sur ses concurrents dans plusieurs domaines, ce qui diminue son attrait à titre de destination pour les investissements dans les minéraux. De 2012 à 2016, un ralentissement prolongé a grandement diminué les investissements dans le secteur à l'échelle mondiale. Les investissements ont commencé à reprendre et à se renforcer à l'échelle mondiale, mais au Canada, les investissements dans les minéraux sont demeurés stagnants et n'ont pas repris à un rythme aussi rapide que dans d'autres pays.
    Plusieurs facteurs influencent les décisions des investisseurs au sujet des endroits où ils investiront et les décisions des sociétés au sujet des endroits où elles exploreront et mèneront des activités minières. Les investissements, qu'ils soient étrangers ou nationaux, sont particulièrement sensibles aux changements législatifs et stratégiques. En effet, ces changements produisent de l'incertitude et de l'imprévisibilité. Un régime de réglementation imprévisible, complexe et inefficace qui n'est pas bien mis en oeuvre accroîtra le risque et découragera les investissements et, par conséquent, diminuera la compétitivité de l'industrie canadienne des minéraux.
    Afin de renforcer le secteur canadien des minéraux, nous proposons deux amendements au projet de loi; ces amendements sont extrêmement importants pour notre industrie.
    Tout d'abord, nous proposons que le Comité envisage d'apporter des amendements à la transition. En effet, selon le projet de loi C-69, lorsque la Loi sur l'évaluation d'impact entrera en vigueur, l'évaluation des projets qui sont actuellement évalués en vertu de la LCEE 2012 se poursuivrait en vertu de la nouvelle Loi, à moins que ces projets aient atteint la dernière étape du processus. L'industrie recommande que les dispositions liées à cette transition soient modifiées, afin que les projets qui sont évalués en vertu de la LCEE 2012, ou ceux qui entameront le processus d'évaluation avant l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi, soient autorisés à poursuivre leur évaluation en vertu de la LCEE 2012, à moins que les promoteurs demandent expressément la transition. Cet amendement à la transition est essentiel. Autrement, cette situation sera extrêmement perturbante pour l'industrie et causera de l'incertitude, ce qui entraînera des répercussions négatives sur les investissements.
    Le deuxième amendement que nous proposons concerne l'évaluation des mines et des usines de concentration d'uranium en vertu de la nouvelle Loi. Nous recommandons que, tout comme les autres projets miniers désignés, les projets désignés liés aux mines et aux usines de concentration d'uranium soient assujettis aux évaluations de l'Agence tout en ayant plein accès aux dispositions sur la coopération avec les provinces et les groupes autochtones.
(1710)
    Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-69 empêcherait la coopération et l'évaluation par l'Agence de tous les projets désignés réglementés par la CCSN.
    En ce qui concerne les dispositions, nous comprenons qu'il reste à prendre des décisions fondamentales en matière de politiques réglementaires à l'égard de la mise en oeuvre de la nouvelle Loi, et ces décisions pourraient avoir une influence concrète sur le processus d'évaluation s'appliquant aux promoteurs de projets.
     Nous aimerions formuler de brefs commentaires sur certains autres éléments clés proposés dans le projet de loi C-69. En général, nous appuyons l'élargissement de la portée des facteurs et des effets qui seront évalués, mais il faut également tenir compte de certaines répercussions potentielles. Cet élargissement de la portée augmentera de façon importante la quantité et les types de renseignements exigés et étudiés dans les évaluations de projets. Cela pourrait accroître le temps nécessaire, ainsi que les coûts. Les répercussions qu'auront ces dispositions sur la capacité des sociétés d'exploration de faire progresser de bons projets sont particulièrement préoccupantes.
    De plus, la collecte, l'analyse et l'évaluation des impacts sur ces divers domaines peuvent également poser des défis. En effet, il pourrait être difficile de déterminer si un impact économique ou social est positif ou négatif, car c'est un processus suggestif et difficile à quantifier. De plus, l'évaluation des divers impacts n'est pas simple, surtout en l'absence de plan ou de lignes directrices sur la façon de tenir compte de ces divers facteurs. Le nouveau processus exigera l'élaboration de lignes directrices très précises et transparentes pour indiquer les impacts qui seront évalués, les méthodes par lesquelles ces éléments seront étudiés et les comparaisons qui seront établies.
    L'ACPE exhorte à la prudence dans la mise en oeuvre des mesures de recouvrement des coûts. En effet, les frais exigés devraient être transparents et prévisibles, et les promoteurs ne devraient pas devoir assumer le fardeau indu des coûts liés au processus d'évaluation. Certains pays ont déjà des mécanismes de recouvrement des coûts pour les permis et les évaluations. L'imposition de frais supplémentaires pour le processus fédéral entraînerait une multiplication des coûts pour ce qui devrait idéalement être un processus, une évaluation. C'est extrêmement important pour les petites sociétés d'exploration et de développement, car comme on l'a mentionné plus tôt, leurs fonds sont très limités et elles ne génèrent aucun revenu.
    Au minimum, le recouvrement des coûts devrait entraîner des frais fixes raisonnables, précis et prévisibles pour chaque évaluation, il devrait offrir diverses garanties, y compris des délais liés au processus, et il devrait exclure des coûts non connexes tels l'élaboration de politiques et les évaluations régionales.
    En ce qui concerne les délais, le projet de loi C-69 propose des délais fixés par la loi pour les évaluations de projets, une disposition que l'ACPE appuie fortement. En effet, des délais clairement établis sont essentiels pour créer la certitude exigée par les promoteurs et les investisseurs, ce qui permet d'avoir un processus prévisible et rapide. L'ACPE recommande que les échéances permettent l'uniformisation avec le processus d'évaluation d'autres pays, ainsi que la coopération, tout en fixant l'objectif d'une évaluation par projet. Nous recommandons également que les facteurs de suspension des délais soient clairement définis, et qu'ils se limitent à des circonstances précises pour éviter des retards interminables et pour éviter de nuire à la prévisibilité.
    L'étape obligatoire de la planification et de l'engagement précoce, si elle est bien conçue et bien mise en oeuvre, pourrait éclaircir plusieurs choses pour les promoteurs et rendre le processus plus prévisible. Cela dit, il est important que les représentants du gouvernement aient les ressources humaines et financières nécessaires pour fournir aux promoteurs un plan à long terme en matière d'autorisations. En effet, la planification précoce pourrait avoir des répercussions négatives sur les promoteurs, et surtout sur les sociétés d'exploration minière, car ces processus pourraient exiger qu'on mène plusieurs études plus tôt dans le processus que ce qui est prévu dans la LCEE 2012.
    Les promoteurs doivent avoir la capacité de modifier un projet pendant la phase de planification en réponse aux commentaires des Autochtones et des collectivités sans devoir recommencer le processus au complet.
    Le projet de loi C-69 prévoit un rôle plus important et officiel pour les peuples autochtones et le savoir traditionnel dans le processus d'évaluation. L'ACPE appuie la participation effective des collectivités autochtones dans les projets de développement et dans tout le cycle de vie d'un projet. L'industrie des minéraux a l'habitude d'établir de solides partenariats et de chercher à obtenir des commentaires sur des éléments liés à ses projets, tout en garantissant des occasions économiques aux collectivités autochtones. Ainsi, la plus grande partie du contenu du projet de loi C-69 reflète la réalité des pratiques actuelles de l'industrie de l'exploration minière.
    De plus, le projet de loi C-69 propose que la nouvelle Agence coordonne les consultations menées par la Couronne et qu'elle exige, en vertu de la loi, de tenir compte des impacts potentiels sur les droits autochtones. L'ACPE appuie le fait que la Couronne ou son autorité déléguée soit responsable de s'acquitter de ses obligations.
(1715)
    Nous recommandons vivement au gouvernement d'évaluer et de préciser ses exigences en matière de consultations et d'accommodement des peuples autochtones, d'élaborer un plan de consultation transparent et conforme aux principes de consultation énoncés par les tribunaux, et d'assumer la responsabilité du processus, y compris les coûts connexes.
    Pourriez-vous conclure?
    Un secteur de l'exploration et de l'exploitation minière solide et concurrentiel à l'échelle mondiale sera mieux placé pour engendrer des retombées positives à l'échelle locale, régionale et nationale.
    Nous entendons la cloche, ce qui signifie que je dois obtenir l'accord des membres du Comité. J'aimerais entendre le dernier témoin avant d'aller voter, si vous êtes d'accord.
    Nous entendrons donc M. Wojczynski.
    Je m'appelle Ed Wojczynski, et je suis président de l'Association canadienne de l'hydroélectricité. Je suis accompagné de Geneviève Martin, de B.C. Hydro; elle est présidente de notre groupe de travail sur les processus réglementaires. Je suis également accompagné de Pierre Lundahl, consultant principal de l'Association canadienne de l'hydroélectricité.
    L'ACH est la voix nationale de l'industrie de l'énergie hydroélectrique. Notre organisme représente les générateurs, les fabricants et les sociétés d'ingénierie, ainsi que les entreprises de construction. L'énergie hydroélectrique, comme vous le savez probablement déjà, représente plus de 60 % de l'électricité du Canada. C'est notre principale source de production d'énergie, et c'est grâce à l'énergie hydroélectrique que le système électrique du Canada est l'un des plus propres, des plus renouvelables et des plus fiables dans le monde.
    L'énergie hydroélectrique ne produit virtuellement pas d'émissions de gaz à effet de serre, et elle joue un rôle essentiel dans l'atteinte des objectifs du Canada en matière de changement climatique. Des études indiquent qu'en vue de remplir ses engagements d'ici 2030 et 2050, le Canada doit notamment électrifier l'économie et réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre du secteur de l'électricité. Cela signifie qu'il faut doubler ou même tripler la production d'électricité d'ici 2050 par l'entremise d'une augmentation importante de l'énergie hydroélectrique, ainsi que de l'énergie éolienne, solaire, maritime et géothermique.
    Notre industrie est prête à relever le défi. Le Canada a toujours de grandes quantités de ressources hydroélectriques qui peuvent être mises en valeur. Toutefois, pour y arriver, le Canada doit se doter d'un processus d'évaluation des projets prévisible et rapide qui obtient la participation de toutes les parties intéressées et des peuples autochtones et qui réussit à gagner la confiance de la population. Selon l'ACH, le projet de loi C-69 nous permettra de nous rapprocher de cet objectif.
    L'ACH appuie le projet de loi en général, mais ses membres sont d'avis qu'on peut y apporter des améliorations importantes. Nous sommes heureux de constater que plusieurs suggestions que nous avons formulées en réponse au document de travail publié par le gouvernement en 2017 se retrouvent dans le projet de loi.
    Le projet de loi contient un grand nombre de bons éléments, mais aujourd'hui, nous nous concentrerons sur d'autres suggestions visant à améliorer le processus. Plus tard, nous ferons parvenir au Comité un mémoire écrit renfermant des commentaires sur plusieurs éléments du projet de loi, et nous suggérerons des amendements précis. Nous formulerons aussi des commentaires sur les révisions à la Loi sur la protection de la navigation, car elles nous préoccupent également. Cet après-midi, nous aimerions formuler cinq recommandations liées à la Loi sur l'évaluation d'impact.
    Tout d'abord, il faut axer la Loi sur des projets d'importance nationale. Deuxièmement, il faut fournir au ministre des lignes directrices sur la façon d'appliquer la Loi à un projet non désigné. Troisièmement, il faut guider la capacité de prolonger les échéances. Quatrièmement, il faut fixer une limite de temps pour la création de groupes de travail. Enfin, il faut fournir au ministre ou à l'organisme responsable un pouvoir plus explicite de délivrer un avis de lancement lorsqu'une partie prend un temps déraisonnable pour répondre, ou qu'elle refuse de répondre ou de participer à l'étape de planification.
    J'aimerais maintenant aborder la première de ces cinq recommandations. Le processus d'évaluation d'impact proposé, avec sa portée élargie, son approche à deux volets et un grand nombre de points de décision, sera plus difficile à gérer et plus complexe que celui que nous avons aujourd'hui. Il fera aussi intervenir des spécialistes de nombreux domaines différents. Il devra coordonner les travaux d'un grand nombre de ministères et d'organismes. Il devra accommoder un grand nombre d'intervenants différents.
    La complexité et l'effort global requis par les gouvernements, les peuples autochtones, les parties intéressées et les promoteurs représentent un argument de poids pour faire en sorte que la Loi soit axée seulement sur les grands projets d'importance nationale. Nous suggérons d'ajouter cela à l’énoncé de l’objet de la Loi, afin de faciliter l'interprétation du projet de loi. Cela aiderait également à guider l'élaboration d'une liste de projets désignés.
    Les grands projets d'importance nationale ont tendance à avoir un impact plus important que les petits projets. Ils préoccupent davantage les citoyens, qui s'attendent donc davantage à ce qu'ils fassent l'objet d'un examen majeur. Leurs promoteurs sont plus susceptibles d'être en mesure de gérer la complexité et les exigences rigoureuses engendrées par le processus. La conception de projets de cette taille prend déjà beaucoup de temps et ces projets sont gérés par des équipes qui ont beaucoup d'expérience et qui ont accès à une vaste expertise.
    Des règlements désignant les activités physiques qui ont une portée trop large posent deux risques. Tout d'abord, les petits et moyens projets qui engendrent des retombées importantes et de faibles répercussions pourraient ne pas être mis en oeuvre. En effet, si les coûts liés à la réglementation sont imprévisibles et potentiellement trop élevés, et que le résultat de l'évaluation est incertain, la viabilité financière de certaines catégories de projets pourrait être comprise.
    L'autre risque, c'est que le projet de loi pourrait mener le gouvernement à utiliser ses ressources réglementaires de façon inefficace. Ces petits projets aux faibles répercussions sont probablement déjà assujettis à des mécanismes d'évaluation environnementale provinciaux. Il existe également des lois fédérales qui protègent divers éléments de l'environnement, par exemple la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, la Loi sur les espèces en péril, la Loi sur la protection de la navigation et la Loi sur les pêches, qu'on s'emploie actuellement à rendre plus rigoureuse.
    En ce qui concerne la deuxième recommandation, la Loi sur l'évaluation d'impact donnerait également au ministre le pouvoir discrétionnaire d'évaluer un projet qui n'est pas sur la liste des projets désignés et qui ne se qualifie donc pas autrement pour une évaluation. Il est nécessaire de prévoir une disposition à cet égard, et l'ACH appuie cela, mais à l'exception de l'impact sur les droits autochtones, le projet de loi n'énonce aucun critère pour guider le pouvoir discrétionnaire du ministre.
(1720)
    Conformément au libellé actuel, la ministre peut ordonner une évaluation sur la base de son opinion relativement aux effets néfastes ou sur la base des préoccupations du public concernant ces effets — ce qui est logique — mais on n'explique aucunement la procédure ou les considérations qui contribuent à une telle opinion. Cela va à l'encontre de l'objectif visant à accroître la transparence du processus.
    L'Association recommande d'établir dans la loi des critères pour guider la ministre dans sa décision. Dans notre mémoire, nous proposons des critères précis, similaires à ceux que le gouvernement utilise déjà pour élaborer la liste des projets désignés. Si ces critères sont satisfaisants pour établir cette liste, ils sont assez bons pour être inclus dans la loi.
    Genevière Martin, ma collègue de B.C. Hydro, va continuer l'exposé.
    Les prochaines recommandations que je vais formuler font écho à ce qu'a expliqué de façon très éloquente ma collègue de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, Lisa McDonald. Je vous remercie.
    Je vais passer à notre troisième recommandation. La loi comporte des délais pour les différentes étapes du processus d'évaluation. La ministre pourrait stopper le processus si le promoteur ne fournit pas l'information nécessaire dans le délai prescrit par le règlement ou si des activités prescrites ne sont pas effectuées. C'est raisonnable, mais nous estimons que la Loi sur l'évaluation d'impact devrait fournir une meilleure orientation à la ministre quant aux circonstances qui pourraient justifier de suspendre les délais prévus dans la loi.
    La ministre peut également donner avis du prolongement d'un délai pouvant aller jusqu'à 90 jours, et le gouverneur en conseil peut prolonger ce report autant de fois qu'il le souhaite. Il est bien sûr possible que des circonstances imprévues surviennent et justifient de prolonger le délai, cependant, nous recommandons qu'à l'instar de la ministre, le gouverneur en conseil fournisse lui aussi des raisons pour expliquer le report du délai, afin de s'assurer que cela s'effectue d'une manière rigoureuse et transparente.
    Je vais maintenant vous faire part de notre quatrième recommandation. La loi prévoit que la ministre dispose de 45 jours au plus pour décider de soumettre un projet à un comité d'examen, mais aucun délai n'est fixé pour l'étape suivante, à savoir celle où la ministre doit constituer le comité et établir son mandat. Nous recommandons d'inclure un tel délai dans la loi.
    Je vais maintenant passer à notre cinquième et dernière recommandation. La loi prévoit 180 jours pour l'étape de la planification, et il est possible de prolonger cette période. Il y a de nombreux intervenants à cette étape: d'autres organismes de réglementation, ministères et organismes fédéraux, des gouvernements provinciaux, des gouvernements et des entités autochtones, des parties prenantes et le public. Le promoteur doit fournir l'information avant l'expiration du délai de 180 jours, mais si les autres intervenants ne respectent pas ce délai, il est possible que la ministre décide de prolonger le délai.
    L'Association convient que la ministre doit avoir l'autorisation de suspendre des délais, lorsque c'est nécessaire, pour faciliter la contribution des divers groupes ou pour d'autres raisons appropriées, toutefois, nous sommes d'avis que, si un intervenant tarde de façon déraisonnable à agir, ou même qu'il refuse de participer, la ministre devrait être explicitement autorisée à publier un avis relatif au début de l'évaluation environnementale. Cette mesure fera en sorte que tous les intervenants participent de bonne foi.
    Pour conclure, j'aimerais réitérer le soutien de l'industrie de l'hydroélectricité à l'égard des objectifs du gouvernement concernant la Loi sur l'évaluation d'impact. Nous sommes en faveur d'un processus d'évaluation rigoureux, transparent et respectueux des droits des peuples autochtones qui s'appuie sur une analyse approfondie et fondée sur des données probantes en vue d'assurer le développement durable au Canada.
    Un processus rigoureux qui inspire la confiance du public est essentiel pour obtenir l'approbation sociale.
    Encore une fois, nous vous remercions de nous donner l'occasion de nous adresser à vous cet après-midi.
(1725)
    Je vous remercie tous pour vos exposés. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Je crois que j'ai le temps de permettre à une personne de poser des questions avant que nous partions. Allez-y, M. Rogers, pour six minutes.
    Premièrement, madame la présidente, j'aimerais remercier les témoins de leur présence aujourd'hui et de nous donner leur point de vue sur le projet de loi.
    Je vais poser des questions en particulier sur l'exploitation pétrolière et gazière au large de Terre-Neuve-et-Labrador. Moi-même et les autres députés de la province avons entendu parler de certains enjeux.
    Je vais poser ces questions, et ensuite, peut-être que les représentants de l'Association canadienne des producteurs pétroliers pourraient répondre à certaines d'entre elles.
    Les autres députés de Terre-Neuve-et-Labrador et moi-même avons entendu dire à maintes reprises, au sujet de la loi de 2012, que le rôle de l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers dans l'évaluation environnementale n'a pas été reconnu adéquatement.
    Premièrement, est-ce que le projet de loi répond aux besoins de votre organisme en veillant à ce que l'expertise de l'Office soit reconnue?
    Deuxièmement, dans d'autres régions, comme en Norvège et dans la mer du Nord, les permis conjoints d'exploration sont délivrés beaucoup plus rapidement, d'après ce qu'on nous a dit. Croyez-vous que ce projet de loi permettra d'accélérer le processus dans le cadre duquel l'Office, à titre d'organisme de réglementation du cycle de vie, pourra exercer son autorité relativement aux petits projets, comme le forage de puits exploratoires, une fois que la CEPA aura effectué l'évaluation environnementale stratégique?
    Je vous remercie. Je vais essayer de répondre aux questions.
    Quant à savoir si le projet de loi reconnaît le rôle des offices des hydrocarbures extracôtiers, je dirais qu'on reconnaît le rôle des deux offices en ce qui a trait au comité d'examen, mais pour d'autres aspects, ce n'est pas le cas. Par exemple, la loi porte notamment sur les évaluations environnementales régionales, mais on ne fait aucunement mention du rôle de l'Office dans ce processus.
    Même en ce qui concerne le comité d'examen, au sein duquel les offices peuvent jouer un rôle, car ils peuvent potentiellement occuper deux sièges, il s'agit seulement de deux sièges sur cinq. Leur rôle potentiel est reconnu, mais ce n'est pas un rôle à part entière, de toute évidence. Les offices doivent travailler en collaboration avec l'agence et d'autres intervenants qui font partie du comité d'examen.
    En ce qui a trait à votre deuxième question, qui concerne le forage de puits exploratoires, je vous répondrai que le processus ne sera pas plus rapide.
    Les forages de puits exploratoires et les projets d'exploration, s'ils figurent sur la liste des projets désignés, doivent être étudiés par un comité d'examen, comme c'est prévu dans le libellé actuel. Cette étude pourrait s'étirer sur une période pouvant aller jusqu'à quatre ans, ce qui est extrêmement long pour une activité telle que le forage de puits exploratoires. Ailleurs dans le monde et dans d'autres régions extracôtières, le processus d'évaluation environnementale prend en moyenne entre six et neuf mois environ. C'est le temps qu'il aurait fallu à l'Office pour effectuer ce processus s'il s'en était occupé dans le passé.
    En ce qui concerne le projet de loi, je peux vous répondre que le processus sera relativement plus long que si l'Office s'en occupait.
    Madame la présidente, je vais partager mon temps...
    Allez-y, Will.
    Je vous remercie pour votre témoignage. Je vois que vous avez beaucoup travaillé sur cette mesure législative, car vous y avez consacré beaucoup de temps et d'effort.
    Je crois qu'il est juste de dire que notre gouvernement estime qu'il faut rétablir la confiance du public. M. Abel a d'ailleurs mentionné qu'il s'agissait d'une priorité pour l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Toutefois, je ne sais pas vraiment dans quelle mesure l'Association prend cette question au sérieux.
    Pour commencer, j'aimerais savoir si vous croyez qu'en effet le public n'a plus confiance dans le système de réglementation tel qu'il existe actuellement?
(1730)
    Je ne crois pas que, en général, les Canadiens aient autant perdu confiance qu'on le laisse parfois entendre. Cela dit, la confiance des collectivités dans lesquelles nous travaillons est absolument indispensable pour nous. Vous devez comprendre que non seulement nous développons des ressources dans ces collectivités et à proximité d'elles, mais que nous vivons et travaillons aussi à ces endroits. Ces collectivités font partie de notre industrie et c'est, en fait, là que se trouvent les ressources et que se développent ces projets; notre industrie est le moteur de la plupart de ces collectivités, alors nous prenons la chose très au sérieux. Nous avons participé honnêtement à tous les processus qui mènent à des approbations de projets ou à la décision de les mettre en branle et nous y sommes engagés. Nous avons travaillé à ces processus et nous continuerons de le faire.
    Pour ce qui est de savoir si nous prenons la question au sérieux, absolument. Est-ce que je crois qu'aucun intervenant ne fait confiance au processus? Je ne crois pas que ce soit le cas.
    C'est bien. Je ne pense pas que quelqu'un ait laissé entendre qu'on ne faisait pas confiance au processus. Je pense que ce qu'on a laissé entendre, c'est qu'on a grandement perdu...
    Votre temps est écoulé.
    Il ne l'était pas encore, mais maintenant, oui.
    Will, votre temps est écoulé. Désolé.
    Il nous reste presque 14 minutes. Faisons une série de plus.
    Monsieur Sopuck.
    Monsieur Bloomer, j'ai été frappé par quelque chose que vous avez mentionné dans vos remarques liminaires. Vous avez dit qu'il est difficile d'imaginer qu'un nouveau pipeline majeur puisse être construit au Canada dans le contexte de la Loi sur l'évaluation d'impact. J'écrivais frénétiquement lorsque vous avez dressé la liste de certains obstacles à la construction de pipelines. Vous avez parlé de l'exclusion des pétroliers, de nouvelles règles sur le méthane, de nouvelles normes en matière de carburant, d'une nouvelle réglementation du transport du bitume au large des côtes de la Colombie-Britannique, de la réglementation des gaz à effet de serre, de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de la concurrence internationale féroce à laquelle nous sommes confrontés.
    Bien sûr, j'ajouterais à votre liste exhaustive la nouvelle loi sur les pêches qui s'en vient et le projet de loi sur les eaux navigables auxquels s'ajoutent les processus provinciaux. J'ai été frappé par les mots très directs que vous avez employés, soit « le cadre réglementaire toxique ». Selon moi, c'est une déclaration étonnante.
    Monsieur Bloomer, j'aimerais vous demander directement si vous croyez qu'on nouveau projet de pipeline majeur sera un jour approuvé et construit au Canada.
    Comme nous l'avons dit dans notre déclaration, nous ne voyons pas comment le projet de loi C-69 débouchera sur la proposition et le développement de nouveaux projets majeurs au Canada.
    Alors il est probable qu'aucun autre projet de pipeline ne soit jamais construit, approuvé, au Canada dans le cadre de ce processus et avec tous les obstacles qui existent actuellement?
    Ma mère dit toujours « il ne faut jamais dire jamais », mais dans le contexte actuel, nous ne voyons pas comment on pourrait en proposer un.
    C'est une remarque juste.
    Dans les premières années de ma carrière de biologiste, un des projets auxquels j'ai travaillé a été celui de l'évaluation du pipeline de la vallée du Mackenzie. Le processus a duré 25 ans sans aboutir à quoi que ce soit.
    Monsieur Bloomer et monsieur Abel, vous avez parlé des membres de la collectivité. Monsieur Bloomer, pourriez-vous parler des répercussions positives des pipelines sur diverses industries, par exemple celle de l'acier? Qu'arrivera-t-il aux personnes qui veulent se lancer en soudure et qui dépendent des emplois créés par des projets de pipeline? Quels seront les effets sur les métiers, les bons postes syndiqués et les collectivités?
    Que signifie votre déclaration voulant qu'il est très peu probable que d'autres pipelines soient jamais construits pour les gens et les collectivités?
    Considérons les choses sous cet angle. Il y a deux aspects à examiner. Premièrement, le potentiel d’investissement de capitaux dans l’industrie des pipelines s’élève à environ 170 milliards de dollars, lorsque l’on prend en considération les divers projets proposés et leur potentiel. Si l’on tient compte des retombées qu’elles auraient pour, entre autres, les collectivités locales et les métiers, cela représente une incidence économique assez importante.
    Deuxièmement, en l’absence de nouveaux marchés pour accroître au maximum la valeur de nos ressources et leur potentiel en matière de développement, le Canada pourrait se priver de centaines de milliards de dollars de recettes. Nous ne pouvons pas surestimer les répercussions possibles de nos décisions.
    Il y a des stations de compression dans ma propre circonscription. Dans certaines municipalités, ces stations versent la moitié des impôts fonciers perçus. Par conséquent, le projet de loi qui nous occupe et l’approche du gouvernement actuel aura des conséquences humaines réelles et coûteuses. Pour confirmer ce que vous venez de dire, je me souviens que Geoffrey Morgan a écrit un article le 20 février dont le gros titre était « Pipeline shortage to cost the economy $15.6 billion this year » (La pénurie de pipelines privera l’économie de 15,6 milliards de dollars cette année). On se demande combien de services publics ces 15,6 milliards de dollars pourraient financer. Toutefois, il est clair que cela importe peu au gouvernement.
    Madame McDonald, j’étais incrédule quant à l’argument que vous avez fait valoir selon lequel les prix des produits de base augmentent partout dans le monde — vous l’avez dit; je sais que vous l’avez fait —, mais, en même temps, les investissements dans l’industrie minière canadienne diminuent. Comment est-ce possible?
(1735)
    Pour éliminer toute ambiguïté, je précise que les prix ne diminuent pas; ils stagnent. Ils n’augmentent pas. Le rétablissement ne s’effectue pas au même rythme que dans le reste du monde. Un certain nombre de facteurs contribuent à cela, et l’un d’eux est l’incertitude réglementaire qui est problématique. De plus, notre industrie fait face à plusieurs autres défis, en particulier en ce qui concerne les activités dans le Nord — dont le manque d’investissements dans les infrastructures du Nord qui donnent accès aux endroits où les gisements se trouvent. Tous les gisements faciles à exploiter ont été trouvés, et leur extraction a déjà eu lieu.
    Ici, au Canada, nous sommes aux prises avec des difficultés sur plusieurs fronts, mais le régime réglementaire joue certainement un rôle.
    Je connais la mine d’or d’Agnico Eagle à Baker Lake, par exemple, et les effets extrêmement positifs qu’elle a eu sur cette collectivité. J’ai lu des rapports à ce sujet. Je pense que le taux d’emploi là-bas s’élève à 100 %, alors je félicite l’industrie minière de l’aide qu’elle apporte aux collectivités autochtones — une aide dont le gouvernement parle, mais qu’il n’apporte simplement pas.
    Monsieur Abel, à quel point l’industrie énergétique importe-t-elle en ce qui a trait aux régimes de retraite de notre pays?
    L’industrie contribue davantage à notre pays et à ses gouvernements que la combinaison des deux ou trois prochaines industries en importance. Vous ne trouverez pas une autre industrie qui contribue davantage à l’économie du point de vue des impôts et des redevances.
    En ce qui concerne les régimes de retraite — le Régime de pensions du Canada et la plupart des régimes de retraite des entreprises, par exemple —, ils sont truffés d’investissements dans l’énergie, n’est-ce pas?
    Oui, c'est en grande partie le cas au Canada. À son niveau le plus élevé, le TSX était probablement composé d’un pourcentage pondéré de pétrole et de gaz de 25 %.
    Cela me dérange toujours lorsque les gens emploient le terme « industrie » comme s’il s’agissait de quelque chose d’abstrait. J’estime donc qu’il est important de personnaliser l’industrie en parlant de l’effet qu’elle a sur les gens mêmes.
    J’ai un dernier argument à faire valoir, madame la présidente.
    Je pense que votre temps de parole est écoulé.
    La firme Osler, Hoskin et Harcourt a procédé à une analyse complète du projet de loi et l’a entièrement dénigré.
    Je suis désolée, mais nous devons nous rendre à la Chambre.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Nous disposons de sept minutes pour nous rendre à la Chambre. Nous reviendrons immédiatement après les votes.
    Merci.
(1735)

(1820)
    Nous allons reprendre nos travaux, si vous le voulez bien.
    Je remercie infiniment nos invités de la patience dont ils ont fait preuve pendant nos allées et venues pour voter, ainsi que d’avoir accepté le fait que nous prolongerons la séance de 15 minutes et de nous accommoder à cet égard en vue de tenter de rattraper le temps perdu.
    Madame Duncan.
    Merci.
    M. Bloomer et peut-être aussi indirectement l’Association canadienne des producteurs pétroliers ont exprimé des inquiétudes à propos de la période d’incertitude économique. Toutefois, ne conviendriez-vous pas que quelques-uns des facteurs importants qui contribuent à cette incertitude sont les préoccupations et l’engagement à l’échelle internationale à l’égard de la lutte contre le changement climatique, le désinvestissement dans les combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables, y compris par bon nombre de vos propres membres, l’inquiétude du public relativement au processus d’examen des projets, comme M. Amos l’a signalé, et l’engagement croissant à l’égard du règlement des revendications territoriales et de l’observation de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones?
    La question que je vous pose est la suivante. Duquel de ces facteurs le gouvernement devrait-il se désintéresser?
    Je conviens avec vous que plusieurs facteurs nuisent à la compétitivité de notre industrie et à sa capacité d’attirer des investissements. Je dirais cependant qu’il est incorrect d’affirmer qu’aucun investissement n’est effectué dans d’autres États. En fait, des investissements sont effectués, et je soutiendrais que, dans bon nombre de ces États — et les États-Unis en sont un bon exemple, en ce qui concerne le bassin Permien au Texas où il n’y a pas de politique climatique —, les investissements se multiplient. Regardez ce qui se passe au large des côtes du Brésil; les Brésiliens n’ont pas pris d’engagements fermes non plus. Ce n’est pas le seul facteur, et je ne suis pas ici pour soutenir que le projet de loi C-69 est le seul facteur qui a une incidence. Nous approuvons la réconciliation avec les Autochtones, et nous avons adopté des positions fermes à cet égard. Nous appuyons une politique climatique qui fixe des objectifs pratiques et les mets en oeuvre d’une manière pratique.
    Ces enjeux sont tous importants, et je partage votre avis à ce sujet.
    Je dois faire écho à ces observations. Nous ne prétendons pas que la lutte contre le changement climatique, la réconciliation avec les Autochtones, la participation, tous les facteurs qui sont à l’étude… et l’industrie s’est toujours employée à participer et à veiller à respecter les normes les plus élevées dans tous ces domaines, mais les investissements quittent le pays, et les gens prennent des décisions qui auront des répercussions à long terme sur l’économie.
    Jusqu’à ce que M. Trump accède au pouvoir, les entreprises semblaient penser qu’il était approprié qu’elles continuent d’exercer leurs activités au Canada. La question évidente est donc la suivante. Il incombe à l’industrie de décider si elle souhaite encore exercer ses activités dans un pays qui établit, en fait, un solide régime de réglementation.
    J’ai quelques questions à poser à l’Association canadienne de l’hydroélectricité. Ses représentants espéraient que je leur poserais quelques questions.
    Je me demande si vous appuyez la nécessité d’examiner les répercussions transfrontalières des projets hydroélectriques. Nous avons récemment examiné le projet majeur du Site C, où les répercussions transfrontalières en Alberta et dans les Territoires-du-Nord-Ouest n’avaient pas été dûment prises en considération et n’avaient pas fait l’objet d’un suivi, ce qui a incité l’UNESCO à demander qu’une enquête soit menée à cet égard. Je crois que cet aspect ne figure pas nécessairement dans la loi d’une façon explicite. Pensez-vous qu’il devrait être précisé et vous protéger en fait, de sorte qu’une fois qu’une décision a été prise, toutes les répercussions sont prises en considération, et vous avez ensuite le sentiment que la décision est bien fondée?
    C’est une bonne question. Je ne peux pas formuler d'observations à propos des détails précis du Site C.
    Il s’agit là d’un exemple. Vous n’êtes pas forcé de parler du Site C.
    S’il y a un examen fédéral qui aborde l’éventail des enjeux, il serait logique que le processus s’occupe d’une question pancanadienne, ce que sont les répercussions transfrontalières.
    Madame Martin, souhaitez-vous répondre à cela?
    Oui, je fais écho aux paroles d’Eduard. Il est logique que ce processus soit inclus. Ainsi, lorsque votre projet a été approuvé, vous avez le sentiment qu’absolument tous les aspects ont été abordés.
    D’accord, merci.
    J’entends l’Association canadienne de l’hydroélectricité dire qu’il pourrait y avoir de petits projets et que nous ne devrions pas nécessairement prévoir un examen en bonne et due forme. Toutefois, un grand nombre de personnes expriment des inquiétudes à propos des effets cumulatifs, et le problème, c’est que jusqu’à maintenant — et certes, cela s’est également produit dans le cas de demandes liées à des projets d’exploitation des sables bitumineux —, nous avons toujours du mal à déterminer qui doit procéder à l’examen. Faut-il simplement faire la synthèse des études cumulatives menées sur tous les projets, et qui doit payer pour cette synthèse? C’est aussi le problème qui se pose dans le cas du soi-disant petit projet hydroélectrique. À quel moment quelqu’un doit-il prendre du recul et demander quel sera l’effet cumulatif de l’ajout d’un barrage supplémentaire ou important au réseau hydrographique d’une rivière? Comment répondriez-vous à cette question?
(1825)
    Je pense que la réponse à cette question comporte plusieurs volets.
    Premièrement, les effets cumulatifs doivent effectivement être évalués, qu’il s’agisse d’un petit projet hydroélectrique ou de quoi que ce soit d’autre. À notre avis, le meilleur moyen d’évaluer ces projets serait le recours à des évaluations régionales, un recours prévu par la présente loi.
    Il y a plusieurs sortes de différents projets. Si vous ajoutez, disons, un petit projet, qu’il y a déjà eu une foule d’autres projets et que d’autres projets sont encore à venir, le fait d’imposer le fardeau d’une évaluation cumulative à l’un…
    C’est là le dilemme, j’en conviens.
    La présente loi prévoit des évaluations régionales et, selon nous, ce serait la meilleure façon de procéder à une évaluation cumulative pour une région.
    Les petits projets sont le deuxième volet de cette réponse. Si un petit projet risque d’avoir des répercussions inhabituelles ou plus importantes que d’ordinaire, comparativement aux autres petits projets, la ministre a le pouvoir d’intégrer les petits projets dans l’évaluation cumulative.
    Le problème, c’est la question de savoir comment elle peut le savoir tant qu’elle n’a pas mené l’évaluation…
    Linda, vous savez que votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Bossio
    Je vais partager mon temps avec James, et je vais le laisser intervenir en premier.
    Merci, madame la présidente. Merci, monsieur Bossio.
    Mesdames et messieurs, je vous remercie de vos exposés.
    Je ne suis pas un membre régulier du Comité, bien que j’aie rencontré bon nombre d’entre vous auparavant. Je suis président du Comité des ressources naturelles, et c’est à ce titre que je suis ici pour m’entretenir avec vous.
    Notre comité tente collectivement — en fait, tous nos membres s’emploient en quelque sorte à pousser dans la même direction — de trouver des moyens d’aider le secteur des ressources. Ma conversation, malgré certains des commentaires que j’ai entendus de la part des gens assis à cette table… Nous n’entendons pas ces genres de commentaires au cours des séances de notre comité. Pour être franc, je trouve cette approche tout à fait rafraîchissante.
    Monsieur Bloomer, ma question vous est destinée.
    J’ai été très étonné d’entendre votre degré de pessimisme, en particulier lorsque vous avez dit que vous ne voyiez pas comment un autre pipeline pourrait être construit un jour. Je pense que vous vous êtes rétracté un peu lorsque vous pensiez à votre mère, et j’ai été heureux d’apprendre que votre mère était plus optimiste.
    Ma question est la suivante. Vous dites que le projet de loi C-69 est la raison pour laquelle vous avez fait cette déclaration, mais le gouvernement a approuvé trois pipelines depuis que nous sommes arrivés au pouvoir il y a deux ans. Le gouvernement l’a fait en vertu des dispositions provisoires qui ont été mises en oeuvre en janvier 2016 et qui forment la base du projet de loi C-69.
    Je me demande comment vous arrivez à concilier votre position avec ces approbations, étant donné que c’est le gouvernement actuel qui a approuvé ces projets et qui a, en fait, préconisé l’approbation de ces trois pipelines.
    Merci. C’est une bonne question.
    Mon point de vue est qu’en ce qui concerne, entre autres, le pipeline de Kinder Morgan et de la ligne 3, ces projets de pipelines étaient déjà en cours depuis un certain nombre d’années et qu’ils reposaient sur le processus d’examen réglementaire précédent. Des dispositions provisoires ont été prises, des consultations supplémentaires ont été menées et des décisions ont été prises relativement au projet Northern Gateway et à ceux de Kinder Morgan et de la ligne 3 — deux décisions positives et une négative. Cependant, ils étaient, disons, le fruit du système en place, qui n’était pas nécessairement parfait non plus.
    Maintenant, cela fait presque deux ans que nous menons des consultations sur la réforme de la réglementation, la réforme de l’ONE, afin d’adopter des politiques qui, nous l’espérons, établiront à l’avenir une clarté et une certitude en matière de pipelines.
    Je parle de projets de pipelines majeurs, de dizaines de milliards de dollars de pipelines. Lorsque nous examinons la nouvelle législature proposée sans connaître tous les détails concernant la façon dont toutes ces pièces s’emboîteront et influeront sur le processus de consultation précoce, et sans savoir comment ces autres politiques seront appliquées et modifieront le processus, nous déclarons que c’est très problématique, car la façon dont les projets iront de l’avant à l’avenir est très incertaine. Nous avons besoin de clarté, une clarté qui n’existe pas en ce moment.
(1830)
    En toute justice, j’ai entendu maintes et maintes fois votre groupe et d’autres groupes — en fait, presque tous les groupes assis à la table en ce moment et de nombreux autres — parler d’incertitude, compte tenu de la façon dont les choses se passaient avant l’arrivée du gouvernement actuel au pouvoir. Et pourtant, nous voilà dotés de principes provisoires qui ont abouti à ce processus d’approbation.
    Serait-il juste de dire que vous pourriez ou devriez être plus optimiste que vous l’êtes, car vous ignorez comment les choses évolueront pour les raisons que vous venez d’énoncer?
    Vous savez, le passé est, en un sens, un prélude de l’avenir. Si vous examinez les projets — celui de Kinder Morgan, par exemple —, vous constaterez que, si quelqu’un envisageait de les entreprendre aujourd’hui, d’investir ce genre de sommes compte tenu, entre autres, de l’incertitude qui entoure la façon dont le processus se déroulera et de la définition de la façon dont le processus de consultation sera mené, il hésiterait énormément à le faire, je pense.
    Nous parlons de deux époques différentes. Nous sommes à un stade où les pipelines qui existent sont en service depuis de nombreuses années. Nous regardons vers l’avenir, et nous demandons comment ce nouveau processus incitera à l’avenir des entreprises à investir dans des projets de ce genre.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Bossio.
    Pendant la minute qui me reste — vous avez parlé des imperfections du système —, vous pourriez peut-être nous donner une idée de vos préoccupations par rapport à l’incertitude et l’imprévisibilité liées à la LCEE de 2012.
    Je n’ai pas entendu la question au complet.
    Vous avez mentionné que l’incertitude et l’imprévisibilité existaient depuis un certain temps. Par conséquent, vous pourriez peut-être nous donner une idée de ce qui vous préoccupe dans la LCEE de 2012.
    Je le répète, la LCEE de 2012 était censée améliorer un processus qui datait de 2008, je crois, afin de faire avancer les choses. Cependant, la loi n’a pas vraiment résolu les problèmes existentiels liés à la clarté et à la difficulté de faire approuver des projets. Nous avons travaillé dans les limites de ce processus. De nombreux événements… Soyons clairs. Pendant cette période, les pipelines sont devenus le point de mire d’une foule de différents enjeux, et cela a eu une incidence sur le processus d’examen et sur la capacité de conclure ces processus.
    Merci beaucoup.
    Allez-y, madame Kusie.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.

[Traduction]

    Monsieur Abel, je vais commencer par vous. Le 2 janvier de l’année en cours, j’ai lu un article dans le Calgary Herald qui était incroyablement perturbant pour moi et les électeurs de Calgary Midnapore. Cet article indiquait que, comme on pouvait s’y attendre, 2017 n’avait pas été une bonne année financière pour la ville de Calgary et la province de l’Alberta.
    L’un des principaux facteurs que l’auteur, M. Chris Varcoe, a signalés était l’absence — je devrais dire la fuite — des investissements étrangers dans la ville, dans la province et dans le pays.
    Nous ne parlons pas d’une ou deux sociétés seulement. Marathon Oil, la société norvégienne Statoil, ConecoPhillips, Apache et Royal Dutch Shell sont des sociétés qui ont joué un rôle majeur à Calgary, en Alberta et au Canada pendant de nombreuses années et qui vendent maintenant leurs investissements, une constatation qui est très préoccupante pour moi et les électeurs de ma circonscription.
    Pouvez-vous, s’il vous plaît, parler de l’incidence que ce projet de loi aura sur l’industrie énergétique si des organisations, et des sociétés transfèrent leurs investissements à l’extérieur du Canada, à la suite de la mise en œuvre du projet de loi, ainsi que de ce que cela signifiera pour la compétitivité du Canada à l’échelle internationale?
    Pour donner suite aux commentaires que j’ai adressés à Mme Duncan, je précise encore une fois que nous ne sommes pas ici pour soutenir que le projet de loi C-69 est à l’origine de tous les problèmes. Nous reconnaissons cela. Ce que je dirais, c’est que, dans l’ensemble, le Canada a des antécédents, comparativement à d’autres États. Je pense que mon collègue, Chris, a souligné le fait qu’il y a un certain nombre de politiques qui pourraient avoir un effet négatif sur la compétitivité de notre industrie. Elles ajoutent toutes des coûts. Vous pouvez prendre n’importe laquelle d’entre elles et dire: « Eh bien, cela ajoute 20 ¢ par baril ». Toutefois, si vous additionnez cinq ou six de ces coûts, ils totalisent 1 $ ou 1,50 $ par baril. Comparez cela aux marges bénéficiaires qui sont très serrées, compte tenu des prix actuels des produits de base. Vous pouvez constater l’effet que vous avez: les entreprises qui ont des actifs dans d’autres pays étudient les endroits où elles peuvent obtenir un rendement équitable pour leurs investisseurs. Il est vrai que nous n’avons pas encore terminé l’examen du projet de loi C-69 mais, à l’heure actuelle, nous n’avons pas obtenu d’éclaircissements sur un grand nombre des politiques. Nous faisons face à une incertitude et aucun message indiquant clairement que le Canada prend des mesures pour éliminer certains de ces coûts supplémentaires.
    Je pense que l’un des aspects dont j’ai toujours été fier — et j’ai passé la majeure partie de ma carrière à travailler à titre de responsable de la réglementation —, c’est que le Canada avait effectivement des exigences environnementales et sociales très rigoureuses, et que notre industrie réussissait très bien à innover afin de trouver des moyens d’être toujours productive et rentable en dépit de ces politiques. Lorsque vous innovez, vous êtes en mesure de transférer cette technologie dans d’autres pays, de relever la barre à d’autres endroits. Toutefois, ce que nous observons en ce moment rend plus difficile la possibilité d’assumer tous ces coûts et de continuer à innover.
    Le Canada, par lui-même, ne peut pas engendrer suffisamment de capitaux pour financer une industrie comme la nôtre. Vous avez entendu les chiffres, soit 80 millions de dollars en 2014. Je suis désolée, mais le Canada ne peut pas financer cela. Ces capitaux doivent provenir d’investissements étrangers. Lorsque vous livrez concurrence dans un monde qui offre maintenant de nombreuses options, il y a de nombreux endroits où vous pouvez investir. La situation n’est pas comme elle était il y a 10 ans, alors que les quantités de pétrole et de gaz disponibles à l’échelle mondiale étaient limitées. Je soutiens que bon nombre des fonds sont investis dans des pays qui n’ont pas les mêmes normes environnementales et sociales que nous. Nous ne préconisons pas un assouplissement des normes canadiennes. En fait, nous souhaitons célébrer ces normes. Ma déclaration préliminaire témoignait clairement de ce fait... Nous pensons que cela représente un avantage pour le Canada, mais vous devez prendre des mesures supplémentaires pour veiller à mettre en oeuvre ces politiques de manière à réduire au minimum leurs coûts. Lorsque les coûts sont inévitables, vous devez examiner ce qui se fait dans le reste du monde pour rendre notre industrie concurrentielle, et vous devez prendre des mesures pour composer avec cela.
    C’est dommage, mais vous décrivez des entreprises qui peuvent faire des choix et, comme toute bonne entreprise ayant des actionnaires — dont certains d’entre vous font peut-être même partie —, elles vont là où elles peuvent offrir un rendement approprié aux investisseurs.
(1835)
    Monsieur Bloomer, en tant qu’ancienne consule générale adjointe à Dallas, au Texas, de 2010 à 2013, j’ai travaillé sans relâche pour faire avancer le projet Keystone XL, parrainé par le gouvernement précédent. Bien entendu, ce projet a été ressuscité en mars 2017 par l’actuel gouvernement américain. Le 18 janvier, la société TransCanada a confirmé qu’elle apportait toujours un soutien commercial à ce projet, qui permettrait bien sûr d’exporter plus de 830 000 barils par jour vers les raffineries américaines.
    Le projet de loi qui nous occupe accroît-il l’incertitude de l’industrie et des entreprises qui présentent ces projets de pipelines?
    Comme nous l’avons indiqué, entre autres, dans nos déclarations, le projet de loi nuit à la certitude de pouvoir présenter et mettre en oeuvre de nouveaux projets.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Enfin, en ce qui concerne la taxe sur le carbone, je ne pouvais pas croire le week-end dernier le fait d'avoir payé 122 $ pour faire le plein, sans compter les 12 ¢ supplémentaires qui sont proposés. À votre avis, monsieur Bloomer, une taxe sur le carbone réduira-t-elle en fin de compte les émissions de gaz à effet de serre?
    Je déteste faire cela, mais il ne reste plus aucun temps pour répondre à la question. J’espère qu’au cours de la prochaine série de questions, vous serez en mesure d’obtenir la réponse que vous cherchez.
    Monsieur Bossio.
    Merci, madame la présidente.
    Je souhaitais poser également ma question aux deux autres groupes. Quelles sont vos préoccupations au sujet de la LCEE de 2012, compte tenu de l’incertitude, de l’imprévisibilité et du manque de clarté qui existaient aussi dans le cadre de ce régime-là?
    Comme Chris l’a indiqué, la LCEE de 2012 n’était pas parfaite non plus. Nous n’avons pas fait progresser un grand nombre de projets en amont. Le régime comportait certains des mêmes éléments qui créent une incertitude dans le processus. Cependant, il comprenait des échéances, et nous avons effectivement constaté que les gouvernements et les organismes travaillaient étroitement pour tenter de les respecter. Le régime avait des points faibles liés à l’interaction avec l’organisme de réglementation du cycle de vie et au manque de cohérence dans le fonctionnement de ces processus.
    Comme quoi que ce soit, tout dépend de la façon dont c’est mis en oeuvre. Je ne suis pas sûr que toutes les dispositions de la LCEE de 2012 étaient observées, du moins de la façon dont nous interprétions son objectif. Nous participons au processus actuel parce que nous avions l’impression que des améliorations pouvaient être apportées et que le projet de loi C-69 et les mesures législatives connexes représenteraient une occasion de remédier à certains de ces problèmes, dont la plupart, selon moi, sont axées sur l’obtention d’un régime de réglementation concurrentiel qui exécute efficacement ces processus et ces examens. Ceux-ci ajoutent une valeur aux décisions qui doivent être prises, et tous franchissent les étapes du processus avec l’impression qu’une certitude existe.
(1840)
    Merci, monsieur Abel.
    Je suis désolé, mais je dispose de peu de temps.
    Je suppose encore une fois que cela dépend en quelque sorte d’un certain nombre de facteurs. Au Canada, le coût de production du pétrole est plus élevé. Nous pouvons analyser le faible prix actuel du pétrole et le comparer à ce coût de production, puis étudier l’incertitude que cela crée, en conséquence, au sein du marché. Cela réduit donc la quantité d’argent qui sera investi dans notre marché en raison de ces facteurs.
    Nous pouvons également considérer le fait qu’un grand nombre de pipelines ont été approuvés et seront construits. Avons-nous la capacité de construire d’autres pipelines dans un avenir proche, compte tenu de la quantité de pétrole que nous produisons?
    Je pose également ces questions parce qu’en fin de compte, nous avons besoin que le processus de construction apporte une certaine certitude, et pas seulement une certitude pour votre entreprise. Une certitude est requise pour conserver la confiance du public. Plus tôt, vous avez mentionné que vous souhaitiez que le public et les communautés autochtones participent au processus d’une manière significative; je vous ai entendu dire cela pendant votre discours. Toutefois, trop souvent, les organisations prétendent qu’il est bon de mener des consultations, mais elles les considèrent simplement comme un genre de processus visant à cocher une case.
    Vous pourriez peut-être contribuer à nous renseigner sur ces questions particulières, à savoir le coût de production, le prix faible du pétrole et le fait qu’un nombre substantiel de pipelines sont en voie de construction. Je le répète, nous tentons de regagner la confiance du public.
    Le prix des produits de base a une incidence sur tous les intervenants du monde entier, et le marché nord-américain a certes son propre système de prix, qui est légèrement inférieur à celui du marché mondial. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons tellement avoir accès à d’autres marchés.
    Les investissements mondiaux dans le secteur pétrolier et gazier sont à la hausse. De même, les investissements aux États-Unis ont substantiellement augmenté, soit une hausse de 18 %, je crois. Les investissements ont augmenté de 4 ou 5 % dans la mer du Nord. La production est…
    Le coût d’extraction dans ces marchés est beaucoup moins élevé qu’au Canada, en particulier dans la région des sables bitumineux.
    Les coûts en 2014 étaient très différents de ceux d’aujourd’hui. Les coûts ont baissé de 30 à 40 % dans l’ensemble de notre industrie. Nos coûts sont très concurrentiels. Oui, ils sont plus élevés dans les régions plus au nord, mais je crois qu’en fin de compte, ils peuvent tout de même être concurrentiels.
    Ce que je fais valoir, c’est que nous observons une hausse des investissements dans les autres pays, alors qu'au Canada, ils ont diminué de 3 ou 4 % cette année, et peut-être davantage. Nous verrons quels sont les derniers chiffres.
    Monsieur Bloomer, pourriez-vous formuler des observations sur le nombre de pipelines qui existent en ce moment et sur notre capacité de les remplir?
    En ce moment, il y a une sous-capacité en matière de pipelines au Canada, et elle existera tant que nous n’aurons pas construit et mis en service les nouveaux pipelines. Nous avons augmenté la production prévue des sables bitumineux, et nous avons augmenté…
    Toutefois, il y a eu une diminution des investissements.
    Non, il s’agit de projets déjà inscrits au programme qui entrent en service maintenant.
    Oh, d’accord, merci.
    L’autre aspect de cet enjeu, c’est qu’il y aura encore un déséquilibre en matière de capacité des pipelines dans les années à venir. Nous aurons besoin de nouveaux pipelines, et ce n’est pas tout. Nous avons besoin de nouveaux marchés, car nous devons être en mesure de tirer la meilleure valeur de nos ressources.
    Comme je l’ai dit au cours de mes observations, il faut aussi que nous ayons une vision de l’avenir. Dans le Deep Basin, il y a d’incroyables quantités de gaz naturel et de condensat de pétrole léger, entre autres choses, et, compte tenu des technologies utilisées, ces ressources sont aussi concurrentielles aujourd’hui que celles du bassin Permian des États-Unis. La différence, c’est que nous ne pouvons pas acheminer ces produits dans les marchés. Si nous avions accès aux marchés, cette industrie serait très importante à l’avenir. Nous avons donc besoin de politiques et d’une vision de...
(1845)
    Mais l’approbation du projet de Kinder Morgan est assurément une bénédiction pour…
    Mike, je suis désolée, mais votre temps de parole est écoulé.
    Merci.
    Madame Kusie, souhaitez-vous reprendre ce sujet?
    Merci.
    Monsieur Abel, la mise en oeuvre d’une taxe sur le carbone réduira-t-elle ou non les émissions de gaz à effet de serre?
    Je n’essaie pas d’être vague. Il n’est pas si facile de répondre à cette question. Nous sommes encore en train de comprendre la mise en œuvre de cette taxe. En ce qui concerne l’état actuel de la mise en œuvre et le manque de clarté quant à la façon dont certaines des politiques sur le carbone des quatre coins du pays seront mises en oeuvre, je dirais que nous risquons énormément d’observer des fuites liées au carbone vers l’extérieur du Canada. La ressource ne sera donc pas produite au Canada, mais probablement dans un pays qui n’a pas de politique sur le carbone.

[Français]

    Je vous remercie
    Je vais maintenant céder la parole à mon collègue M. Godin.
    Merci, chère collègue.
    Mesdames et messieurs les témoins, je vous remercie de votre patience.
    En vous écoutant, aujourd'hui, il me semble que vous êtes sur la défensive.
    Ma question s'adresse surtout aux gens de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, de l'Association canadienne de pipelines d'énergie et aux prospecteurs et entrepreneurs.
    Par le passé, avez-vous posé des gestes qui ont démontré votre intérêt à protéger l'environnement? Des mesures concrètes, des processus et des méthodes ont-ils été mis en place pour améliorer votre industrie?
    Ma question s'adresse à M. Abel, M. Bloomer et Mme McDonald.

[Traduction]

    Bien sûr. C’est avec plaisir que je vous fournirai quelques exemples. En ma qualité d’ancien responsable de la réglementation, j’ai travaillé avec pratiquement tous les pays du monde qui produisent du pétrole ou du gaz naturel, et je peux vous dire avec une assez grande confiance que le Canada a quelques-unes des exigences environnementales les plus rigoureuses de la planète.
    En tant qu’ancien responsable de la réglementation, quoiqu’en Alberta, je peux également vous dire que là où la grande partie de la production a lieu, le niveau de conformité avec ces règlements très stricts est plus élevé que partout ailleurs dans le monde.
    Je vais vous citer quelques exemples d’améliorations environnementales. Lorsque j’ai commencé à travailler dans l’industrie, au début des années 1980, à titre de responsable de la réglementation, les sables bitumineux n’étaient encore qu’un rêve, et non une véritable vision, et la principale source d’eau pour le drainage par gravité au moyen de vapeur (DGMV) ou pour la technologie de stimulation cyclique par la vapeur était l’eau de surface des lacs et des rivières. Je suis fier de dire qu’aujourd’hui, l’industrie n’utilise pratiquement plus d’eau fraîche, sauf en tant qu’eau potable dans leurs installations. Tous les nouveaux projets de DGMV satisfont à leurs besoins en eau en recyclant l’eau qui est produite et en utilisant à cet effet des sources profondes d’eau salée.
    Je dirais également que le Canada est un chef de file mondial en ce qui concerne la réduction du torchage. Voilà deux simples exemples.

[Français]

    Vous êtes en train de démontrer que vous avez pris un nombre important de mesures par le passé.
     J'aimerais vous permettre, monsieur Bloomer de répondre à la question. Qu'avez fait par le passé, au sein de votre industrie, pour protéger l'environnement?
    Je pense que vous êtes des gens qui développez l'économie, mais qui protégez aussi l'environnement. Il y a eu une évolution. Monsieur Abel, vous avez dit que le Canada avait des normes très strictes et très élevées comparativement à d'autres pays.
    Alors, monsieur Bloomer, par le passé, y a-t-il eu aussi des mesures de votre part pour améliorer l'impact environnemental de votre industrie?
    Je vous remercie beaucoup de votre question.

[Traduction]

    Vous savez, dans l’industrie des pipelines, le rendement dans le domaine de la sûreté est notre première préoccupation. En ce qui concerne les technologies utilisées pour construire les pipelines et les surveiller, la planification et la gestion des mesures d’urgence jouent un rôle de premier plan. Beaucoup d’efforts sont déployés pour évaluer l’inspection interne continue des pipelines et de nouvelles technologies très complexes qui améliorent la sûreté.
    En ce qui concerne l’utilisation des terres et le franchissement des cours d’eau, par exemple, nous utilisons une technologie de forage horizontal pour creuser sous les rivières, au lieu de les traverser. De plus, un certain nombre de mesures sont prises pour détecter les fuites.
    Pour ce qui est de tous les aspects du rendement dans le domaine de la sûreté, c’est la première responsabilité de l’industrie des pipelines et un moteur technologique.
(1850)

[Français]

    Merci beaucoup.
    Madame McDonald, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Traduction]

    Je peux parler du point de vue des activités d’exploration de l’industrie minière. L’ACPE est une organisation qui s’est employée au cours des 10 dernières années à élaborer l’un de nos produits phares, qui s’appelle e3 Plus. C’est une série exhaustive de directives que nous fournissons à nos membres afin de les aider à améliorer leurs pratiques environnementales et sociales, ainsi que leurs pratiques dans le domaine de la santé et de la sécurité.
    Nous reconnaissons que, souvent, nos membres sont les premiers sur le terrain dans les endroits où ils travaillent avec les communautés, et c’est…

[Français]

     Je vais être obligé de vous interrompre, car il ne nous reste qu'une minute.
    Ce que je retiens de vos interventions d'aujourd'hui, c'est que le projet de loi C-69 vous inquiète grandement. Par le passé, vous avez démontré votre bonne disposition à adopter des normes environnementales tout en respectant le développement durable. Évidemment, on se doit aussi de faire du développement économique.
    Peut-on dire que la loi actuelle n'offre pas les outils nécessaires pour nous mener plus loin, être encore plus concurrentiels et créer un équilibre entre le développement durable et le développement économique?

[Traduction]

     Je mentionne de nouveau qu’il y a plusieurs composantes à cet égard. J’aime les observations que Chris a formulées, à savoir que même un message clair de la part du Canada visant à reconnaître l’apport de notre industrie — visant à reconnaître que notre industrie est très responsable sur le plan environnemental et social et qu’elle continuera de l’être — contribuerait grandement à rétablir la confiance.
    Certaines des constatations dont nous avons parlé, en ce qui concerne les améliorations à apporter au projet de loi, seraient très utiles pour envoyer ces messages, mais, en général, juste le fait de savoir que le Canada appuie l’industrie pétrolière et gazière, et qu'il croit qu’elle peut exercer ses activités d’une façon durable au profit de tous les Canadiens et du monde entier enverrait un message clair aux investisseurs.
    Je vous remercie tous infiniment du temps que vous nous avez consacré aujourd’hui et des réponses que vous avez apportées à nos questions. Nous avons disposé de moins de temps que nous l’espérions, mais nous avons accepté de prolonger la séance de 15 minutes, et je l’ai étirée au-delà de cela. Maintenant, certains de nos membres doivent se rendre à leur prochaine réunion. Je vous remercie donc encore une fois.
    Demain, la séance débutera ici à 8 h 30, et se poursuivra jusqu’à 10 h 30.
    Je vous remercie, et je remercie également nos invités.
    La séance est levée.
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