ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'environnement et du développement durable
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 22 novembre 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Il semble que tous nos témoins ne sont pas arrivés. Il nous en manque un, mais il est peut-être encore au contrôle de sûreté. Il y a toute une file, à ce qu'il paraît. J'espère qu'il arrivera bientôt. Nous accueillons quatre témoins aujourd'hui. Je crois que nous pouvons commencer.
Bienvenue à tous, et bienvenue à nos invités. Dans le cadre de notre examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, nous accueillons des témoins du milieu universitaire. Nous vous sommes très reconnaissants d'être venus aujourd'hui. Je tiens aussi à remercier chaleureusement ceux qui sont avec nous par vidéoconférence.
Laissez-moi présenter tout le monde. Nous accueillons Mark Winfield, professeur, Faculté des études de l'environnement, Université York. Bienvenue. Nous accueillons aussi Lynda Collins, professeure agrégée, Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale, Faculté de droit, Section de common law, Université d'Ottawa. C'est tout un titre. Nous avons aussi avec nous, par vidéoconférence, Meinhard Doelle, professeur, Schulich School of Law, Université Dalhousie. Nous allons commencer avec vous d'une minute à l'autre. Il y a aussi Daniel Krewski, professeur et directeur, Faculté de médecine, Université d'Ottawa. Il devrait arriver bientôt.
Il y a deux ou trois règles de procédure qu'il faut respecter. Tous les témoins ont 10 minutes pour présenter leur exposé. Une fois que tous les exposés seront terminés, nous allons passer aux périodes de questions. Chaque membre dispose de six minutes pour poser sa question et écouter la réponse. Je vais être très stricte là-dessus. J'utilise ces petites cartes, même si les gens ont beaucoup de difficulté à les respecter. En résumé, la carte jaune veut dire qu'il vous reste une minute, et la carte rouge, que votre temps est écoulé. Je ne vais pas vous couper immédiatement: vous pouvez finir ce que vous avez à dire, puis, s'il n'y a pas d'objection, nous passerons à la prochaine personne. Cela s'applique également aux invités et aux membres du Comité. Nous sommes tous égaux.
Tous les membres du Comité sont présents, alors nous allons commencer.
Nous allons commencer par Meinhard Doelle, si vous êtes prêt. Merci.
J'aimerais remercier chaleureusement le Comité, d'abord, de m'avoir demandé de venir témoigner et, ensuite, d'avoir décidé de s'attaquer à cette tâche importante. Je crains toutefois qu'elle ne soit un peu éclipsée par d'autres examens fédéraux, comme les examens de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, de la Loi sur les pêches, de la Loi sur l'Office national de l'énergie et de la Loi sur la protection de la navigation.
Je mentionne ces examens non seulement pour exprimer ma préoccupation de voir le présent examen éclipsé, mais aussi parce que je crois que nous devons saisir l'occasion non négligeable d'établir des liens entre les examens. Il va certainement y avoir des liens, et je vais en parler un peu pendant les 10 minutes dont je dispose. Par exemple, je crois qu'il existe potentiellement des liens entre la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Je crois que des possibilités s'offrent également à nous de renforcer nos connaissances générales et d'améliorer l'ensemble des approches en matière de réglementation. Un grand nombre d'examens — celui sur la LCEE étant l'exception — ont comme véritable objectif l'amélioration des démarches et des approches du gouvernement fédéral en matière de réglementation. Je crois donc que nous pourrons tirer des leçons importantes qui pourront s'appliquer universellement.
J'ai deux ou trois autres commentaires préliminaires à faire.
Avant tout, je crois que l'une des difficultés de la LCPE — et les nombreuses personnes qui s'y sont heurtées seront d'accord — tient au fait que ce n'est pas une loi qui s'applique couramment. Lorsque nous devons la prendre en considération, il s'agit souvent de détails relatifs à des dispositions législatives précises. J'espère que les autres témoins ont dû composer avec les dispositions législatives que vous examinez en détail, parce que pour bon nombre d'entre nous, cette loi est abstraite et ne s'applique pas souvent dans le cadre de notre travail.
Pour ce qui est de ma formation, comme cela a déjà été mentionné, je suis professeur à la Schulich School of Law de l'Université Dalhousie. Mes sujets de recherche comprennent l'évaluation environnementale, les changements climatiques et la gouvernance en matière d'environnement, y compris les approches en matière de réglementation.
La LCPE n'était pas une de mes priorités de recherche, c'est pourquoi je vais m'en tenir à des commentaires d'ordre général sur l'amélioration des approches en matière de réglementation liées à la LCPE.
Dans mon exposé, j'aborderai surtout la réglementation des substances toxiques. Je sais qu'il y a d'autres volets plus précis dans la LCPE, mais les substances toxiques seront le sujet principal de mon exposé.
Je vais commencer par le fait que nous devons, selon moi, adopter une approche fondée sur des données scientifiques probantes relativement à la liste de substances toxiques. Nous avons accompli un travail incroyable de catégorisation des substances, entre autres, au cours des 20 dernières années, mais j'ai l'impression que nous ne nous appuyons pas suffisamment sur des données probantes afin de déterminer, au bout du compte, quelles substances sont inscrites à la liste, puis réglementées. Les facteurs socioéconomiques, parmi d'autres, devraient avoir une incidence sur la façon dont une substance est réglementée, mais pas sur la décision de l'inscrire à la liste ou de la réglementer.
Selon moi, l'objectif global qui est visé quand on inscrit une substance à la liste des substances toxiques est de réduire au minimum les risques à court terme, de stimuler la recherche sur des substances de rechange non toxiques et, somme toute, d'abandonner l'utilisation de la substance toxique.
L'un des thèmes principaux de mon exposé est le fait que les approches en matière de réglementation sont trop souvent figées. Elles ne sont pas assorties d'occasions ni d'incitatifs pour favoriser une évolution continue. C'est pourquoi on perd souvent de vue l'objectif à long terme. Les approches en matière de réglementation sont souvent élaborées à la lumière de ce qui est pratique et réaliste à ce moment-là, et lorsque les solutions semblent pratiques et réalisables à un moment donné, elles finissent par être adoptées à long terme.
Je crois que nous devons nous défaire de cela. Nous devons élaborer une réglementation assortie d'objectifs précis à long terme, d'incitatifs précis pour l'amélioration continue ainsi que des mécanismes précis pour y arriver.
Je crois que la loi devrait prévoir des délais précis et des obligations réelles par rapport à la liste des substances toxiques régies par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Je crois que nous pouvons nous inspirer de la Loi sur les espèces en péril à ce chapitre, au moins.
Ceux d’entre vous qui connaissent la Loi sur les espèces en péril savent que le processus de classification est surtout axé sur les données scientifiques probantes, même s’il comprend un aspect politique. Il y a de véritables exigences prévues par la loi relativement à l’inscription d’espèces. Des interdictions sont appliquées automatiquement, et il y a des délais pour la proposition et la mise en œuvre de plans d’action et de programmes de rétablissement.
Si on adapte cette approche aux substances toxiques qui tombent sous le coup de la LCPE, nous devrions être en mesure d’établir une liste fondée sur des données scientifiques probantes et des délais précis pour la prise de mesures réglementaires obligatoires. Des mesures devraient être prises immédiatement pour atténuer les menaces les plus importantes liées aux substances toxiques inscrites à la liste, assorties d’un engagement clair quant à l’amélioration continue, l’objectif étant la suppression de la menace. Il faut comprendre que le travail de réglementation et d’élaboration de la réglementation ne se termine que lorsque la menace est éliminée. Je crois que c’est particulièrement important si l’on veut prendre graduellement conscience des effets cumulatifs; présentement, nous étudions les effets d’une activité donnée en vase clos. Il ne faut pas non plus négliger que la réglementation des substances toxiques se fonde de plus en plus sur l'approche préventive. À la lumière de ces deux points, je crois qu’il faut reconnaître que la réglementation des substances toxiques ne s’arrête que lorsqu'on abandonne leur utilisation ou, à tout le moins, que la menace d’un déversement a été éliminée.
À propos des mesures qu'on pourrait prendre par rapport aux approches en matière de réglementation afin d'encourager l'abandon progressif — s'il s'avère qu'il est impossible de cesser l'utilisation d'un coup —, je crois que nous devrions élaborer, par exemple, des mesures législatives qui prévoient des cibles précises pour les organismes de réglementation. Cela a été essayé en Nouvelle-Écosse avec la Loi sur les objectifs environnementaux et la prospérité durable. Le gouvernement a dû se fixer des cibles précises. Il y avait des exigences et des incitatifs prévus par la loi afin que le gouvernement examine périodiquement sa réglementation et les résultats connexes et puisse ainsi veiller à ce que toutes les cibles soient atteintes. D'autres éléments qui pourraient contribuer à l'élimination progressive des risques et des menaces seraient d'ajouter des incitatifs financiers et non financiers, par exemple des délais précis pour l'abandon de la substance toxique afin de motiver ceux qui l'utilisent à trouver des produits de remplacement. Pour revenir aux incitatifs financiers, on pourrait imposer des coûts à l'utilisation de substances toxiques; cela pourrait inciter les gens à les abandonner graduellement.
Un autre élément clé est la transparence complète, non seulement pour le processus d'inscription, mais également en ce qui concerne les résultats des mesures réglementaires. En ce qui concerne les articles relatifs aux substances nouvelles, j'aimerais attirer votre attention sur une décision récente de la Cour fédérale dans l'affaire AquaBounty. Selon moi, cette décision indique clairement que le processus de déclaration de substance nouvelle ne fonctionne pas correctement. Je crois qu'il serait important de remanier avec soin ces articles de la LCPE.
Je crois que c’est dans cette partie que nous pouvons établir des liens avec les autres lois présentement examinées. Il faudrait que les articles concernant les substances nouvelles soient aussi compris dans la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, en particulier lorsqu’une substance nouvelle est déclarée dans le cadre d’un nouveau projet. La simple déclaration de substance nouvelle devrait déclencher une évaluation environnementale. Selon moi, une évaluation environnementale convient beaucoup plus que le nouveau processus d’examen des substances en vigueur pour ce qui est d'encourager le public à utiliser des produits de rechange et de décider si un produit doit être utilisé au Canada.
D'accord, merci.
Pour les substances nouvelles qui peuvent avoir des répercussions globales, je recommande de procéder à une évaluation environnementale stratégique, une EES. Cependant, je veux qu'il soit clair que je ne sous-entends pas d'émettre une directive du Cabinet. Ce que bon nombre d'entre nous et moi-même proposons, c'est une EES repensée qui s'inscrit dans le processus fédéral d'évaluation environnementale.
Je vais conclure sur deux ou trois éléments clés. Je sais que je n'ai presque plus de temps. Je tiens à mentionner la Convention d'Aarhus, qui peut être, selon moi, une source avantageuse d'information et d'idées relativement à l'amélioration de l'accès à la justice, et pas seulement en ce qui concerne la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, mais en général. Je peux aussi mentionner les droits fondamentaux et procéduraux en matière d'environnement; je crois qu'il faudrait les intégrer à la LCPE.
Je vais arrêter ici. Merci beaucoup.
Madame la présidente, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser au Comité aujourd'hui.
Je m'appelle Mark Winfield. Je suis professeur à la Faculté des études de l'environnement de l'Université York. Je suis également coordinateur du programme pluridisciplinaire en études de l'environnement et en droit offert par l'Osgoode Hall Law School.
Je suis venu témoigner devant le Comité parce que j'ai une assez grande expérience par rapport à la LCPE. J'ai joué un rôle important dans le premier examen de la LCPE, de 1995 à 1999, et j'ai aussi participé dans une moindre mesure à l'examen partiel du début de la dernière décennie et à la discussion sur la Loi canadienne sur la qualité de l'air. J'ai donc repris certains thèmes qui sont ressortis au cours des 20 dernières années, mais mes réflexions sur la question ont également abouti à de nouvelles idées.
Au départ, j'avais prévu de rester très bref dans mes commentaires, mais au fil de mes réflexions, je décidais d'ajouter de plus en plus d'éléments de la loi à mon exposé, qui est devenu une sorte de monstre de Frankenstein. C'est aussi une caractéristique de la LCPE. Cette loi elle-même est le fruit d'un amalgame de différents textes de loi. Elle concerne tout un éventail de sujets divers. Inévitablement, la comparaison se fait d'elle-même.
J'ai cerné six volets précis où, selon moi, il serait possible de renforcer la LCPE de façon substantielle. Je vais aborder ces volets un à la fois. Le Comité devra aussi se pencher avec le plus grand soin sur trois ou quatre autres volets, qui sont pour la plupart tirés du document de travail du gouvernement. Tous ces thèmes ont déjà été abordés dans le passé, aussi loin que 1995. La discussion entourant la LCPE remonte très loin, et c'est pourquoi je crois que nous devons faire preuve, dans une certaine mesure, de retenue.
Parmi les éléments qui pourraient être renforcés, je mettrais surtout l'accent sur les dispositions entourant la participation du public. Au départ, la partie deux visait, d'une certaine façon, à intégrer une espèce de déclaration des droits environnementaux dans la LCPE elle-même. C'est ce qui est arrivé, du moins en partie. J'ai proposé un certain nombre de recommandations selon lesquelles l'article sur l'application administrative devrait prévoir une obligation d'origine législative d'application générale afin d'offrir au public le droit commun de participer aux affaires relevant de la compétence fédérale.
J'ai également recommandé d'étendre le champ d'application du registre de la LCPE. Actuellement, son utilisation est limitée aux politiques et à la réglementation. J'ai proposé en particulier d'ajouter au registre les avis au public concernant certaines approbations précises octroyées en vertu de la LCPE, par exemple les permis d'immersion en mer et les permis d'importation et d'exportation de déchets dangereux. Il y a aussi d'autres exemples dans mon mémoire. Je crois que cela contribuerait à rendre le registre beaucoup plus efficace. En tout cas, cela a amélioré le registre environnemental de l'Ontario. Le registre peut également être utilisé comme un type d'archives. C'est très pratique. En Ontario, du moins, on peut effectuer des recherches dans le registre environnemental. Vous pouvez consulter l'historique des décisions qui ont été prises par rapport à des activités données et même à des organisations particulières. J'ai également proposé d'élargir la portée de la disposition relative aux demandes d'enquête et des dispositions concernant la protection des dénonciateurs relevant de la compétence fédérale.
Le deuxième thème que je tiens à aborder est celui des populations vulnérables et de la justice environnementale. Je crois que l’Association canadienne du droit de l’environnement en a déjà discuté en détail avec le Comité. Ma collègue, Dayna Scott, de l’Osgoode Hall Law School a également abordé cette question qui, selon moi, est de la plus haute importance en ce qui nous concerne. Sommairement, on ne peut pas ignorer le fait que le gouvernement, dans sa proposition, a tout bonnement proposé d’intégrer cela au préambule. Je crois que M. Scott, de l’Association du droit de l’environnement, ainsi que d’autres ont souligné l’importance d’intégrer les éléments de la justice environnementale aux dispositions opérationnelles de la loi. Tous deux ont donné des exemples très précis de cas où ce genre de choses devraient être opérationnalisées.
Un troisième volet de la LCPE qui pourrait être renforcé concerne la gestion des substances toxiques. M. Doelle a déjà mentionné qu’il fallait accélérer et dépolitiser le processus d’inscription à la liste des substances toxiques. Il a également mis en relief l’importance du déclenchement des mesures relatives à la gestion des risques lorsqu’une substance nouvelle est inscrite à la liste des substances toxiques. On ne doit pas se restreindre à un processus purement documentaire. Il faut que des mesures soient prises lorsqu’on détermine qu’une substance est toxique; il faut que la loi oblige la prise de mesures. Cela se fait déjà, mais d’après ce que nous avons vu, les résultats laissent à désirer. Certaines choses peuvent déclencher une planification de prévention de la pollution, par exemple une nouvelle inscription à la liste de substances de l’INRP ou alors une inscription en vertu des règlements d’urgence qui figurent à l’article 200. Vu la façon dont les choses sont structurées actuellement, toutes ces choses ont, en gros, provoqué une réaction automatique dès que la toxicité d'une substance a été établie.
J’ai aussi fait un certain nombre de propositions sur les obligations internationales en vue d'intégrer à l’article sur l’application administrative une exigence selon laquelle le gouvernement du Canada doit veiller à remplir ses obligations internationales en matière d’environnement. J’ai même proposé la création d’une annexe ciblée comprenant les ententes conclues par le Canada qui seraient comprises dans sa mission. Ce serait probablement un mécanisme plus efficace pour s’assurer, d'une part, que le gouvernement est conscient de ses obligations envers la communauté internationale et, d'autre part, qu’il les respecte.
J’ai également fait quelques recommandations sur certaines dispositions de la partie 7, celles relatives à la pollution atmosphérique internationale ainsi qu’à la pollution internationale des eaux. En résumé, je proposais de rationaliser le processus utilisé par le gouvernement fédéral relativement aux mesures prises contre les sources canadiennes de pollution atmosphérique internationale et de pollution internationale des eaux. Actuellement, ces dispositions sont soumises à une exigence de consultation très étendue avec la province touchée. Nous proposons de rationaliser le processus de façon à établir un critère très clair sur ce qui déclenche la prise de mesures par le gouvernement fédéral afin d’intervenir sur ce genre de sources de pollution au Canada. Nous proposons aussi d’établir une série parallèle de dispositions concernant la pollution atmosphérique interprovinciale et la pollution interprovinciale des eaux.
En dernier, je veux parler de la gestion environnementale au sein de l'appareil fédéral. Je crois qu'il s'agit d'un échec cuisant dans la LCPE et dans la façon dont elle est structurée, puisqu'il n'y a pratiquement rien ici... À dire vrai, dans le cadre de mes recherches, j'ai découvert que deux des trois règlements adoptés à ce sujet ont plus tard été retirés.
À ce chapitre, un certain nombre d'options s'offrent à vous. Le gouvernement a proposé l'incorporation par renvoi des normes provinciales, ou, autrement, l'application simple des normes provinciales pertinentes au territoire administratif touché. Il devrait aussi y avoir une disposition relative aux infractions générales liées aux activités sous responsabilité fédérale qui causent du tort à l'environnement; cela existe déjà dans la plupart des provinces. Il faut toutefois savoir quoi faire lorsque quelque chose arrive en territoire domanial, etc. La solution serait de se munir d'une disposition sur les infractions générales selon laquelle il est interdit de déverser un polluant nocif dans l'environnement. Je crois que quelque chose de ce genre serait utile.
Le Livre blanc préparé par le gouvernement semble avoir soulevé des préoccupations. Je suis moi-même quelque peu préoccupé par l'idée de faire une différence entre les substances vouées à la quasi-élimination et les autres substances sur la liste des substances toxiques. Depuis l'affaire d'Hydro-Québec en 1997, je me suis intéressé à établir un fondement constitutionnel pour la mise en place d'un organisme de réglementation fédéral des substances toxiques. Personnellement, j'étudierais toute question relative à cela avec soin.
Il y a un thème qui se dégage très clairement du Livre blanc du gouvernement: il semble qu’on dépend d'autres ministères et d'autres lois pour l'évaluation et la gestion du risque. Je me répète, il s'agit de quelque chose qu'il faut approcher avec le plus grand soin. Dans le premier examen de la LCPE, l'un des gros problèmes concernait les dispositions qui feraient de la LCPE une loi résiduelle; c'est-à-dire qu'on l'utilise pour tout ce qui échappe aux autres lois. Notre position est que la LCPE devrait être une référence. Si quelque chose doit tomber sous le coup d'une autre loi, il doit y avoir des critères pour faire en sorte que ce quelque chose est désormais bien régi par une autre loi et non par la LCPE, par exemple de la Loi sur les aliments et drogues, de la Loi sur les semences ou de la Loi relative aux aliments du bétail. On ne peut pas y aller à l'improviste; il faut qu'il y ait des critères.
D'une certaine façon, le même principe s'applique à la discussion du gouvernement sur l'utilisation étendue d'accords relatifs à l'exécution et aux dispositions équivalentes. Encore une fois, il s'agit de quelque chose qu'il faut aborder avec le plus grand soin. Pendant mes recherches, j'ai été très préoccupé par le fait que, dans une très grande mesure, nous n'avons pas vraiment d'évaluations, du moins d'après ce que j'ai vu, concernant l'efficacité des accords relatifs à l'exécution et aux dispositions équivalentes.
Il me semble que le gouvernement a l'intention d'assouplir les contraintes, c'est-à-dire éliminer les exigences relatives aux accords en vigueur ainsi que les exigences selon lesquelles ces accords doivent comprendre des mesures de temporarisation. Dans le premier examen de la LCPE, nous avons soutenu une position carrément opposée, et c'est cette position que je soutiens ici aujourd'hui. Il faut que les critères pour les accords d'équivalence soient détaillés de façon plus exhaustive dans la loi. Il en va de même pour les accords relatifs à l'exécution. Les exigences en matière de rapports doivent être décrites de façon détaillée dans la loi. Sinon, nous courons le risque que les accords d'équivalence soient utilisés comme échappatoire facile par les provinces, c'est-à-dire que la réglementation fédérale en vigueur ne s'appliquera pas vraiment à eux. C'est quelque chose que j'étudierais avec grand soin.
Je vais m'arrêter ici.
Merci, madame la présidente.
Je suis vraiment désolée, puisque vous semblez être bien parti et que vous avez beaucoup de choses à nous dire. Toutefois, je suis certaine que vous pourrez nous donner plus d'information pendant la période de questions.
Je veux souhaiter la bienvenue à Daniel Krewski. Merci beaucoup d'être ici parmi nous. Je ne sais pas lequel d'entre vous aimerait commencer. Lynda.
Avant tout, j'aimerais vous remercier de m'avoir invitée aujourd'hui. Je tiens surtout à vous remercier du travail que vous faites dans le cadre de cet examen de la LCPE.
Ceux d'entre nous qui ne sont pas médecins savent que nous pouvons rarement dire que notre travail peut sauver des vies. Mais le travail que nous effectuons peut, chaque année, sauver des milliers de vies au Canada et, en plus nous améliorons la qualité de vie de tous les Canadiens, y compris les enfants, les aînés, les personnes handicapées, les collectivités à faible revenu, les collectivités autochtones et les autres populations vulnérables. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que la LCPE de 1999 a grandement besoin d'être améliorée. Vous avez entrepris un gros projet, mais le bien qui pourrait en découler est également très important. Je suis très heureuse de prendre part à vos travaux.
Je suis professeure au Centre du droit de l'environnement et de la durabilité mondiale de l'Université d'Ottawa. Mon expertise touche le domaine des droits de la personne en matière d'environnement et celui de la responsabilité à l'égard des substances toxiques. À ce titre, j'ai témoigné dans le cadre d'audiences publiques au Parlement européen, j'ai pris part à des processus consultatifs auprès du Conseil des droits de l'homme des Nations unies et j'ai témoigné devant notre Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles et devant le présent Comité lors du dernier examen de la LCPE il y a 10 ans. J'ai déjà présidé le Comité scientifique de réduction des substances toxiques de l'Ontario qui a aidé la province à élaborer sa Loi sur la réduction des toxiques. J'ai coécrit le livre The Canadian Law of Toxic Torts avec Mme Heather McLeod-Kilmurray.
J'ai examiné les mémoires présentés au Comité, et, selon moi, vous pouvez établir une feuille de route claire, exhaustive et réalisable pour actualiser la LCPE à partir des mémoires de Dayna Scott, de David Boyd, de mes collègues qui sont témoins aujourd'hui bien, évidemment, de même que d'Écojustice et de l'Association canadienne du droit de l'environnement.
Mes observations porteront surtout sur mes domaines d'expertise. La LCPE a grandement besoin d'être révisée pour que ses objectifs soient respectés. Je vous conseille d'adopter toutes les recommandations qui figurent dans les mémoires dont j'ai parlé.
Selon moi, la LCPE devrait reconnaître le droit de chaque Canadien à un environnement sain et écologiquement équilibré, et surtout le respecter. Pour ce faire, la LCPE devra tenir compte de trois dimensions distinctes des droits de l'homme en matière d'environnement qui ont été reconnues à l'échelon international, notamment par le rapporteur spécial de l'ONU au sujet des droits de l'homme et de l'environnement. Ces dimensions sont les suivantes: premièrement, le droit substantiel à la qualité de l'environnement; deuxièmement, l'absence de discrimination en matière de protection de l'environnement; et troisièmement, les droits procéduraux en matière d'environnement.
Je vais les aborder un à un en commençant par le droit substantiel à la qualité de l’environnement. D'abord, j’estime que le gouvernement du Canada devrait modifier le paragraphe 2(1) de la LCPE afin d’imposer au gouvernement l’obligation de respecter, de protéger et de garantir le droit de chaque Canadien à un environnement sain et écologiquement équilibré. Cette modification permettrait au Canada de prendre part au large consensus mondial, selon lequel la protection de l’environnement est un droit de l’homme. Certains d’entre vous savent peut-être que la Cour suprême du Canada entendra sa première demande au titre de la Charte des droits et obligations environnementaux la semaine prochaine. La révolution des droits environnementaux arrive au Canada. Il est tout à fait logique d’intégrer ce concept important à notre loi environnementale fédérale la plus importante.
À mon avis, ce qui est encore plus important que de reconnaître le concept, c'est de le mettre en oeuvre, de l'appliquer. À ce titre, la LCPE doit permettre de mieux cibler, restreindre et même interdire les produits chimiques nuisibles. Plus particulièrement, elle devrait éliminer l'exposition aux cancérogènes inconnus, aux neurotoxines nuisant au développement et aux perturbateurs endocriniens.
Pour y arriver, vous devez mettre en oeuvre le principe de précaution à chaque étape du processus relatif à la LCPE. Si vous ne le faites pas, non seulement vous vous retrouvez avec des résultats qui n'assurent pas une protection suffisante, mais vous violez également des droits dans le cadre du processus. Je pense que c'est M. Joe Thornton qui l'explique le mieux: « Ce sont les gens, et non les produits chimiques, qui ont droit à la présomption d'innocence jusqu'à preuve du contraire. Les gens ont également le droit de ne pas faire l'objet d'expérience sans leur consentement ». En d'autres mots, s'il n'a pas été prouvé que la substance est sans danger, j'estime qu'elle ne devrait pas être libérée dans l'environnement canadien.
Toujours au sujet du droit substantiel à la qualité de l'environnement, nous devrions apporter quelques modifications particulières. Nous devrions modifier la LCPE de manière à exiger des ministres qu'ils établissent des normes contraignantes et exécutoires relativement à la qualité de l'air ambiant et de l'eau potable.
Comme vous le savez, par le passé, nous avons réglementé la pollution ponctuelle sans limiter le nombre total de permis de source ponctuelle pouvant être délivrés, ce qui a donné lieu à des zones fortement polluées. Cela n'a pas de sens du point de vue écologique ni physiologique. Ces valeurs sont trop importantes pour être intégrées dans des lignes directrices non contraignantes. La loi doit comporter des normes exécutoires. Nous savons, grâce à d'autres administrations, que de telles normes contraignantes à l'échelle nationale peuvent être efficaces au chapitre de l'amélioration de la qualité de l'environnement et de la santé publique.
Nous devons également éliminer la nécessité d'obtenir des données d'exposition pour déterminer la toxicité en vertu de l'article 64 et adopter une approche fondée sur le danger à l'égard des substances qui sont hautement préoccupantes, en exigeant de l'industrie qu'elle prouve l'innocuité au lieu que ce soit le gouvernement qui ait à prouver la toxicité.
J’ai dit dans mon mémoire qu’au XXIe siècle, nous savons que toute substance qui pénètre l’environnement finira par se retrouver dans le corps humain, et vice versa. Nous constatons que les médicaments et les produits pharmaceutiques que nous consommons se retrouvent dans les lacs et les rivières; par ailleurs, les produits chimiques industriels comme les BPC sont quantifiables dans le corps humain. Pour être en mesure de présumer qu'il est possible de libérer une substance sans connaître son incidence en matière d’exposition, il vous faudrait compter sur la logique fallacieuse selon laquelle l'humain est séparé de la nature, ce qu’on ne peut plus soutenir.
Comme l'a souligné Mme Scott, l'exigence d'inclure les données relatives à l'exposition au moment d'évaluer la toxicité d'une substance a donné lieu à de très longs délais. Je souscris à la proposition de Mme Scott selon laquelle nous devrions en fait supprimer le passage suivant de l'article 64: « pénètre ou peut pénétrer dans l'environnement en une quantité ou une concentration ou dans des conditions de nature à ».
Je suggère de modifier la LCPE de manière à exiger l'évaluation des solutions de rechange et des options plus saines. Encore une fois, et vous avez entendu les experts sur le terrain le dire encore et encore, l'évaluation des solutions de rechange empêche l'adoption de substances encore plus toxiques, chose qui peut parfois se produire en l'absence d'une évaluation, et le principe de substitution permet d'assurer l'amélioration continue de la santé et de la sécurité en remplaçant continuellement des substances dangereuses par d'autres plus sécuritaires.
Encore une fois, pour reprendre le témoignage de nombreux experts qui ont comparu devant vous, je suggère d'éliminer l'option d'inaction une fois qu'une substance a été désignée comme étant toxique. Je pense qu'il est nécessaire de le faire, ne serait-ce que pour nous conformer à l'article 7 actuel de la Charte. Une fois qu'une substance a été désignée comme étant toxique, ne rien faire constituerait probablement une violation de la sécurité de la personne, même en vertu de notre loi constitutionnelle actuelle.
Nous devrions mettre en place des délais contraignants raisonnables pour l'évaluation et la prise de mesures réglementaires — nous avons déjà entendu parler de certains exemples très connus de délais indûment longs, comme dans le cas des PBDE — et nous devrions imposer une interdiction provisoire sur les substances dont l'utilisation a été bannie ou limitée de façon importante par un autre pays membre de l'OCDE.
Tout cela s'inscrit dans la catégorie du droit substantiel à la qualité de l'environnement. En ce qui concerne l'absence de discrimination, c'est ce qu'on appelle habituellement la justice environnementale en Amérique du Nord. Cela touche à la répartition équitable des avantages et des fardeaux environnementaux. À mon avis, encore une fois, il s'agit probablement déjà d'une exigence en vertu de la disposition sur l'égalité à l'article 15 actuel de la Charte.
En vue d'améliorer le rendement de la LCPE au chapitre de la justice environnementale, le gouvernement du Canada devrait modifier le paragraphe 2(1) de la LCPE pour exiger du gouvernement qu'il protège les populations vulnérables à toutes les étapes du processus réglementaire relatif à la LCPE.
Nous devrions nous assurer que l'évaluation de la toxicité prévue à l'article 64 tient compte de la vulnérabilité unique de certaines populations. Nous devrions modifier la LCPE de manière à assurer la réglementation équitable de la pollution de l'air ambiant à l'échelle du pays, soit éliminer les zones très polluées dans les collectivités marginalisées. Nous devrions également procéder à une évaluation nationale des inégalités en matière de santé environnementale comme l'a recommandé l'Organisation mondiale de la Santé.
J’aimerais insister sur le fait que, dans de nombreux cas, nous avons mal fait notre travail de collecte de données sur l’exposition des populations vulnérables. L’absence de ces données ne devrait jamais servir d’excuse pour retarder l’inscription sur la liste ou la prise d’une mesure réglementaire. Selon moi, dans tous les cas où nous n'avons pas de données au sujet de la vulnérabilité unique à l’exposition, nous devrions tirer une conclusion défavorable; autrement dit, nous devrions présumer que les populations vulnérables sont plus susceptibles d’être exposées et plus vulnérables aux effets néfastes de l’exposition, s’il n’y a pas de données à ce sujet. Cela s'inscrit de la deuxième catégorie de droits de l’homme en matière d’environnement, soit l’absence de discrimination.
Enfin, il y a les droits procéduraux en matière d'environnement. Encore une fois, ces droits sont très bien établis à l'échelle internationale et ont été reconnus par le rapporteur spécial. Ils englobent le droit à l'accès à l'information, la participation du public dans le processus décisionnel environnemental et l'accès à la justice pour les questions environnementales.
La LCPE doit être modifiée pour permettre aux ministres de demander des renseignements à tout moment et pour toute raison liée à la loi, et les producteurs devraient être tenus de répondre promptement. Actuellement, nous disposons d’un système qui encourage en fait l’ignorance artificielle, et cela a été bien établi dans la littérature. En toute logique, pour quelle raison une corporation ayant l’obligation légale de maximiser les profits étudierait-elle de manière approfondie ses substances si elle n'a pas l’obligation légale de le faire? Nous devons renverser la situation et créer des mesures incitatives pour produire des renseignements au sujet de l'innocuité ou de la toxicité des substances.
Nous devons revoir l'Inventaire national des rejets de polluants en nous inspirant de ce qui a très clairement été énoncé dans le mémoire d'Écojustice, et nous devons respecter le droit de savoir des Canadiens en créant des programmes d'étiquetage des substances toxiques pour permettre aux Canadiens de faire des choix éclairés au sujet de leur consommation.
Enfin, nous devons mettre en place un ensemble efficace de mesures d'application pour les citoyens qui permettraient à tous les Canadiens de déclencher un examen particulier d'une substance qui a été interdite ou dont l'utilisation a été limitée de façon importante dans un autre pays membre de l'OCDE et d'appliquer la loi chaque fois qu'elle est transgressée sans avoir à montrer les dangers existants pour l'environnement.
Je viens de voir qu'on a brandi le carton jaune, je vais donc m'en tenir là.
[Français]
Merci, madame la présidente.
Combien de temps m'allouez-vous pour faire mes commentaires?
Est-ce 10 minutes?
[Traduction]
Vous disposez de 10 minutes. Lorsqu'il restera une minute, je vous ferai signe avec le carton jaune. Je vais montrer le carton rouge à la 10e minute, et vous pourrez conclure. Ne vous arrêtez pas subitement; finissez votre réflexion, puis nous nous arrêterons. Merci.
Merci.
C'est un plaisir d'avoir la possibilité de formuler quelques commentaires alors que vous envisagez de renouveler une loi fédérale très importante, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
J'aimerais aborder brièvement cinq sujets. Il y en a un que vous trouverez peut-être accessoire, mais je crois qu'il est assez important, et c'est l'utilisation de nouvelles données scientifiques dans le cadre des évaluations des risques sur la santé environnementale. Environ le tiers de mon exposé portera sur ce sujet.
Parmi les autres sujets, comme l'a mentionné Lynda, il y a la pollution de l'air ambiant, et je vais aller plus loin et aborder également le défi mondial que représente la santé environnementale, qu'il importe d'examiner. Il y a la question de la possibilité de renforcer les dispositions législatives au sujet de la salubrité de l'eau potable en vertu de la LCPE, et je parlerai brièvement des principes sur lesquels nous devrions fonder la prise de décisions importantes en matière de risque. Enfin, je formulerai quelques commentaires au sujet de liens avec d'autres programmes internationaux d'évaluation de risques environnementaux.
Les données scientifiques liées aux tests de toxicité et aux évaluations des agents environnementaux connaissent des changements. J'ai présidé un comité du National Research Council des États-Unis qui a produit un rapport en 2007. Le titre de ce rapport est Toxicity Testing in the 21st Century. On nous a demandé de représenter la manière dont nous devrions utiliser les nouveaux outils scientifiques et les nouvelles technologies afin de mieux évaluer les risques associés aux agents dans notre environnement.
Nous avons rédigé un rapport détaillé qui a été révolutionnaire. Il abordait l'utilisation de nouvelles technologies: les analyses in vitro à haut rendement et l'évaluation de la toxicologie par ordinateur étaient deux d'une dizaine de nouvelles approches mentionnées. Ces outils donnent la possibilité d'accélérer grandement la vitesse à laquelle nous pouvons tester des dizaines de milliers d'agents qui sont présents dans l'environnement, et ce, à coût réduit. Il existe maintenant des laboratoires robotiques qui peuvent traiter 100 000 produits chimiques en six semaines concernant 50, 100 ou 200 effets biologiques différents. Le monde est réellement en train de changer dans le domaine de l'évaluation des risques toxicologiques.
J'ai été surpris et satisfait de voir que le rapport a été très bien accueilli dans le monde. Il a été adopté par quatre organismes réglementaires majeurs des États-Unis. Le Conseil des académies canadiennes a rédigé un rapport en 2012 dans lequel nous pouvions lire que nous étions sur la bonne voie. Un consortium populaire a été tenu en vue d'établir les données scientifiques nécessaires pour mettre en oeuvre ces pratiques. La Société de toxicologie de la Chine a traduit la totalité de notre rapport en mandarin, et il est maintenant très populaire en Asie également. Ces idées sont donc très bien reçues à l'échelle internationale.
Par la suite, j’ai travaillé durant trois ans sur un projet mis en place par l’Agence des États-Unis pour la protection de l’environnement, la EPA des États-Unis, pour discuter de la manière dont nous devrions mettre en pratique ces nouvelles idées. À quoi devrait ressembler la nouvelle génération d'évaluation des risques? Nous avons publié un rapport majeur sous les auspices de la EPA des États-Unis. J’aborde la plupart des points que je soulève ici dans le document que j’ai laissé au Comité. Nous avons conçu un modèle, un paradigme et un cadre pour la nouvelle génération de données scientifiques liées aux risques, qui montrent de quelle manière nous pourrions mieux évaluer les risques toxicologiques à coût moindre et plus rapidement. Les piliers essentiels sont les nouvelles approches toxicologiques, les méthodes avancées d’évaluation des risques et de nouvelles perceptions provenant du domaine de la santé de la population selon lesquelles il faut tenir compte de multiples facteurs déterminants de la santé en même temps, y compris les interactions gènes-environnement et les interactions entre la société et l’environnement.
Un autre sujet — et mes commentaires scientifiques touchent à leur fin — concerne le fait que nous avons mis en place des cadres d'intégration des données probantes mûrement réfléchis, qui rassemblent des données probantes venant de multiples sources dans le but de produire le meilleur énoncé scientifique sur les niveaux de risque. Le système intégré de renseignement sur les risques de la EPA des États-Unis a été examiné en 2014, et un modèle qui lui permettra d'intégrer les données probantes de manière réfléchie et équilibrée est en voie d'être adopté par cet organisme.
Tout cela nous a appris, entre autres, que nous pouvons utiliser les nouvelles données scientifiques pour étudier les composés mal documentés. Il y a 23 000 substances sur la Liste intérieure des substances qu'ont préparée Santé Canada et Environnement Canada. Ces nouvelles techniques à haut rendement permettent de traiter ces substances efficacement et nous donnent des réponses quant aux dangers et aux risques potentiels d'une manière efficiente. À l'autre bout du spectre, en ce qui concerne la Liste des substances d'intérêt prioritaire, la LSIP, ces substances sont habituellement bien documentées et justifient des évaluations en profondeur, alors certaines des nouvelles techniques d'intégration des données probantes s'avéreraient précieuses à cet égard.
Le message à retenir pour le premier de mes cinq points tient au fait que les données scientifiques qui nous permettent d'effectuer des évaluations des risques sur la santé environnementale connaissent une révolution et qu'il y a beaucoup de possibilités d'exploiter ces nouvelles techniques.
Je ne sais pas si la LCPE doit être normative en soi quant à la façon dont cela doit être mis en pratique, mais je pense que la LCPE devrait tenir compte du fait que certains outils à notre disposition aujourd'hui ne l'étaient pas par le passé.
En passant, l'une des questions qui ont été posées au tout début de la transformation provenait de la communauté juridique aux États-Unis. On a demandé de quelle manière ces nouvelles idées scientifiques pourraient se concrétiser dans le respect des lois fédérales actuelles. Nous avons pris part à une séance organisée par la Environmental Law Institute à Washington. Nous avons conclu que les lois prévoient habituellement qu'il faut effectuer la meilleure évaluation possible à l'aide des meilleures données scientifiques disponibles. Toutes ces nouvelles idées ont été perçues comme étant compatibles avec la législation actuelle aux États-Unis, et c'est sans doute le cas au Canada également.
En ce qui concerne mes autres points, j'aimerais souligner l'importance de la pollution atmosphérique à l'échelle mondiale. J'ai sous les yeux une très belle carte du monde produite par imagerie satellite. Elle permet de prévoir les concentrations de pollution au niveau du sol n'importe où sur la planète. Je vois des zones très polluées en Asie et en Afrique en raison de la poussière qui vient du Sahara. J'ai en ma possession une autre carte qui tient compte de la poussière naturelle.
Le fait est qu'il y a un problème de santé publique à l'échelle mondiale lié à la pollution atmosphérique. Nous avons un document portant sur la recherche environnementale, que j'ai cité dans mon mémoire, qui laisse entendre que, mondialement, environ 10 % des décès peuvent être attribuables à la pollution atmosphérique. C'est donc un élément auquel nous devons prêter une attention particulière du point de vue de la santé publique, et c'est un problème que nous ne pouvons résoudre exclusivement au Canada puisqu'une bonne partie de notre pollution traverse les frontières nationales.
Passons maintenant à l'eau potable, qui est un autre domaine de préoccupation environnementale important. Il existait un projet de loi sur la sûreté des produits liés à l'eau potable qui a fait l'objet d'une première lecture à la Chambre des communes en 1997. La Chambre des communes a été prorogée, et le projet de loi n'a jamais été présenté de nouveau.
J'ai sous les yeux une caricature qui montre les trois principaux volets du projet de loi, c'est-à-dire le traitement de l'eau potable dans les usines de filtration, la distribution de l'eau par le réseau hydrographique à l'aide de tuyaux de cuivre et d'autres matériaux, et l'installation au point d'utilisation de dispositifs comme les filtres à eau au charbon sur le robinet de la cuisine. Tout cela pourrait être utilisé pour améliorer la sûreté de l'eau potable.
Je propose, si vous le voulez bien, qu'on jette un coup d'oeil à certains des éléments du projet de loi sur la sûreté des produits liés à l'eau potable présenté antérieurement pour voir s'il serait utile d'envisager leur inclusion à la LCPE, puisque le projet de loi n'est pas entré en vigueur.
Mon avant-dernier point concerne notre façon de prendre des décisions au sujet des problèmes liés aux risques environnementaux. Je viens tout juste de terminer mon cours en début d'après-midi. La séance portait sur les principes de prise de décisions. Nous avons discuté d'environ 10 principes majeurs. Différents principes s'appliquent dans différents contextes.
L'un des principes sur lequel j'ai insisté auprès de mes étudiants est le principe de précaution, qui a été défini d'une vingtaine de manières différentes. Ces définitions sont enchâssées dans bon nombre de lois et de lignes directrices à l'échelle mondiale. C'est un principe très utile. Selon ce principe, si vous êtes incertain, si les données scientifiques ne sont pas claires à l'heure actuelle et que les enjeux sont élevés, vous auriez peut-être avantage à prendre des mesures plutôt que d'attendre jusqu'à ce qu'il soit trop tard.
Supposons que vous recevez un message à Fukushima vous disant qu'il vaudrait mieux évacuer parce qu'il y a un risque de tsunami, il s'agit là d'un bon exemple du principe de précaution.
Un autre principe sur lequel nous mettons l'accent est le processus décisionnel fondé sur les risques. Selon ce principe, lorsque vos ressources en gestion des risques sont limitées, puisque vous essayez d'être le plus utile possible pour un plus grand nombre de gens possible, vous devriez essayer d'affecter vos ressources aux risques pour lesquels vous savez qu'il y a quelque chose à faire et aux risques que vous savez bien réels, et les atténuer de manière efficiente.
Nous définissons les bons principes qui s'appliquent au processus décisionnel sous-jacent relatif à l'environnement. Encore une fois, je ne suis pas certain que la LCPE vise à promouvoir des principes, mais il vaudrait la peine d'examiner le processus décisionnel au moment de rédiger les nouvelles mesures législatives.
Mon dernier point concerne la collaboration internationale et la gestion des risques. Le Canada n’est pas le seul pays à posséder une législation environnementale. Dans l’Union européenne, le programme REACH de l’Agence européenne des produits chimiques a exigé qu’un dossier toxicologique détaillé soit créé pour chaque produit chimique existant et qu’il soit soumis à des fins d’évaluation. La EPA des États-Unis a généré une immense base de données sur les agents environnementaux et les risques potentiels. On m'a fourni pas moins de trois millions d’ensembles de données à examiner dans le cadre de nos recherches à l’Université d’Ottawa; il se passe donc beaucoup de choses à l’échelle internationale.
Si nous pouvions travailler d’une quelconque manière sur la scène internationale, nous pourrions peut-être régler plus efficacement les problèmes internationaux liés aux risques, comme la pollution atmosphérique transfrontalière. Nous pourrions être en mesure d’harmoniser les pratiques d’évaluation des risques, ce qui nous permettrait d’éviter les obstacles non tarifaires au commerce, ce qui est très important à l’ère de la mondialisation. Nous pourrions même réaliser des économies de coûts grâce à des accords d’échange de données et à des accords de reconnaissance mutuelle. Une certaine perspective internationale serait tout à fait utile.
Mon document comporte quelques références qui soutiennent la plupart des commentaires que j'ai formulés devant le Comité aujourd'hui.
Merci.
Merci beaucoup à tous nos témoins. Il y a matière à réflexion.
Nous allons maintenant passer aux questions ouvertes.
Mike Bossio peut commencer.
Wow. Quatre exposés remarquables qui étaient de la musique à mes oreilles, mais également un peu décourageants. J'ai l'impression que le cerveau va m'éclater. Il y avait tellement de renseignements.
Nous avons tenu de nombreuses discussions avec les témoins au sujet d'une approche fondée sur les risques par rapport à une approche fondée sur les dangers, soit ce que nous faisons aujourd'hui par rapport à ce que fait le programme REACH. Ce programme est trop loin de nous, et une approche fondée sur les risques n'est pas suffisante.
Je m'adresse aux trois témoins qui sont ici avec nous, Mark, Lynda et Daniel. L'un de vous pourrait-il me présenter son argument éclair au sujet d'une approche fondée sur les risques par rapport à une approche fondée sur les dangers, en 10 secondes?
J'ai posé cette question au responsable du programme REACH, Derek Knight, alors qu'il présentait un exposé lors d'un symposium de la EPA en Caroline du Nord. Je me suis levé durant la période de discussion et j'ai dit: « Derek, j'ai le sentiment que le programme REACH est davantage axé sur les dangers, sur le principe de précaution que l'approche qui est utilisée par la EPA des États-Unis », et il a répondu: « Oui. »
L'idée, je pense, se rapporte au fait qu'un agent est coupable jusqu'à preuve du contraire; montrez-moi qu'un agent est sûr avant de l'utiliser. Je crois que nous devons trouver un juste équilibre entre les deux. Je n'ai pas de solution simple à votre question, mais je pense que c'est une question très importante au sujet de laquelle vous devez fournir quelques indications dans la nouvelle loi.
Je suis résolument pour une approche fondée sur les dangers, comme celle que l'Europe a adoptée. Encore une fois, je vais m'inspirer de Joe Thornton pour illustrer le problème.
L'un des plus grands obstacles à la réglementation des substances toxiques, c'est l'incertitude scientifique. Le problème concerne en partie la simple détermination des dangers. S'agit-il d'une substance cancérigène? Le travail incroyable réalisé dans le cadre du programme Tox21 a facilité ce processus.
Lorsqu'ils font une évaluation des risques, les spécialistes doivent mener à bien le difficile projet consistant à déterminer si la substance a des effets particuliers, puis ils y ajoutent des estimations de l'exposition. De manière générale, ce qu'ils cherchent à faire, c'est d'estimer, disons, si nous parlons du cancer, combien de cas supplémentaires sur un millier auront été causés par la substance en question. L'incertitude est accentuée. Historiquement, nous avons sous-estimé l'exposition au risque.
Pour illustrer l'importance de l'incertitude à ce sujet, je vais vous donner l'exemple très connu de l'évaluation du risque du trichloroéthylène dans l'eau potable, qui avait été réalisée par l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis. Les spécialistes s'étaient servis de quatre modèles informatiques utilisant un système axé sur le risque plutôt que sur les dangers pour estimer combien de cancers cette substance pouvait causer. Les résultats variaient grandement. Dans le préambule de ce rapport, l'EPA a dit que l'incertitude était aussi grande que dans le cas d'une personne qui se demande si elle a assez d'argent pour s'acheter un café ou rembourser la dette nationale. L'approche fondée sur les dangers est beaucoup plus prudente, à mon avis, que l'approche fondée sur le risque.
Je suis ambivalent à ce sujet. Quand j'envisage les choses sous l'angle de l'évaluation des risques, je suis résolument en faveur de l'approche fondée sur les dangers. Je suis l'un des auteurs de la notion de toxicité intrinsèque qui a été intégrée à la loi en vigueur. Si j'envisage les choses sous un autre angle, je le fais à titre d'intervenant dans le procès contre Hydro-Québec, dans lequel nous avons eu gain de cause, finalement, et qui nous avait obligés à nous creuser les méninges pour déterminer quel était le seuil à retenir dans une définition de la toxicité et ce qui relèverait légitimement du pouvoir législatif en matière criminelle du gouvernement fédéral.
Je n'ai pas encore résolu ce dilemme. D'un côté, je préférerais une approche bien plus prudente et fondée sur le danger plutôt que l'incertitude liée aux sphères de compétences en matière de réglementation des substances toxiques si vous changiez le seuil pour remplacer une combinaison de dangers et d'expositions par le seul danger. Mais je ne connais pas la réponse, et je vais donc laisser tout cela sur la table.
M. Krewski voulait ajouter quelque chose pour répondre à la question, mais il vous reste maintenant une minute et demie.
Je m'excuse, monsieur Krewski, je suis désolé, mais j'aimerais poser une autre question; elle a trait à ce que vous venez tout juste de dire sur la toxicité.
Nous suivons un processus de détermination des dangers. Nous avons mis en place, c'est à espérer, un régime d'analyse qui nous renseigne tant sur les risques que sur les dangers et qui le fait de façon beaucoup plus rapide et rentable. Mais que faisons-nous quand on détermine qu'une substance est toxique? Aujourd'hui, comme vous l'avez dit, l'approche qui consiste à ne rien faire, celle que nous avions adoptée, ne fonctionne pas, car nous n'avons pas de bâton, nous n'avons aucune carotte qui les inciterait à faire quoi que ce soit. Comment pouvons-nous les inciter? Comment pouvons-nous les menacer d'un bâton? Comment allons-nous faire pour que la substance soit éliminée?
Je crois que le bâton, en réalité, se résumerait à... Quand on détermine qu'une substance est toxique, il faudrait immédiatement que le gouvernement s'acquitte de toute une série d'obligations réglementaires. Il faut que cela déclenche une prise de mesures. C'est ainsi que fonctionnent les lois américaines en matière d'environnement, la loi sur la qualité de l'air ou la loi sur le contrôle des substances toxiques. Dès qu'on détermine qu'une substance est toxique ou représente un danger, en se fondant sur la loi sur la qualité de l'air, l'agence de protection de l'environnement doit immédiatement s'acquitter d'une série d'obligations et faire concrètement quelque chose. Voilà ce qui manque à notre Loi sur la protection de l'environnement.
Nous avons fini par établir une liste des substances toxiques, l'Annexe 1, mais nous avons fait preuve d'une pénible lenteur au moment de traduire cela en mesures de gestion du risque intégrées au règlement en vigueur et aux mesures de contrôle. Je crois que, dans tous les exposés que vous avez entendus, du moins ceux des intervenants qui ne représentent pas l'industrie, le thème est revenu constamment, c'est-à-dire que cette composante de la loi doit être beaucoup plus sévère, de manière qu'une détermination de la toxicité — la substance étant ajoutée à la liste des substances toxiques — entraîne des conséquences beaucoup plus importantes et exige que le gouvernement du Canada prenne des mesures.
C'est exactement ce que je vais faire. Je vais poursuivre cette discussion.
Monsieur Krewski, vous avez entendu Mme Collins dire qu'elle était résolument en faveur d'une approche fondée sur les dangers pour l'évaluation des substances. J'ai deux ou trois questions à ce sujet.
Premièrement, est-il possible d'appliquer le principe de précaution dans un processus d'évaluation fondé sur le risque?
Ma deuxième question viserait à savoir en quoi le programme Tox21, c'est-à-dire la méthode informatique qui nous permet de progresser en complétant nos processus conventionnels d'analyse et d'évaluation, comment ce programme améliorera-t-il notre capacité d'utiliser un système d'évaluation fondé sur le risque? En quoi le processus sera-t-il amélioré?
Voilà deux formidables questions. Je voulais justement aborder un de ces sujets dans mes commentaires précédents; merci de m'avoir préparé le terrain.
Permettez-moi de répondre à votre question sur l'aide que nous apporteront les nouvelles méthodes toxicologiques. Si nous disposions de ces techniques très peu coûteuses, très efficientes et à haut rendement, nous pourrions en effet obtenir des données très rapidement. Nous pourrions soumettre un agent donné à une série de 50, 100 ou 200 essais, avec différentes concentrations, pour voir une activité biologique.
Nous avons aussi fait des progrès du côté de l'évaluation de l'exposition grâce à des techniques à haut rendement. La surveillance biologique et la caractérisation de l'exposition se font grâce à des techniques à haut rendement. Je pourrais vous communiquer certains très bons travaux de scientifiques américains qui montrent l'activité biologique de toute une série d'agents soumis à toute une série d'essais qui atteint ce niveau-ci, et des niveaux d'exposition, établis par [Inaudible] à haut rendement, qui n'atteignent que ce niveau-ci. Tant qu'il y aura une marge de sécurité confortable entre l'activité biologique observée dans le cadre de ces essais à rendement élevé et les niveaux d'exposition humaine anticipés — j'entre dans l'univers du risque —, je serai satisfait, puisque les niveaux auxquels une réaction biologique se produit sont peut-être 100 fois, voire 1 000 fois plus élevés que toute exposition. Nous serions peut-être en mesure de recueillir des données qui nous aideront à faire un petit pas hors de la sphère du principe de précaution, lequel ne nous offre pas suffisamment d'information, et arriver à prendre des décisions davantage axées sur le risque à moins de frais et de façon plus efficace que par le passé.
C'était ma réponse à la deuxième de vos deux questions.
La première visait à savoir s'il existe des moyens d'appliquer le principe de précaution dans le contexte du risque. Dans une certaine mesure, oui, il en existe. La Déclaration de Rio est plutôt conservatrice. La formulation du principe de précaution énoncée à l'issue de la conférence de Wingspread met un peu moins l'accent sur la responsabilité de prouver la sécurité et le fait porter un peu plus sur la nécessité d'assurer une mise en oeuvre économique. Les interprétations sont variées, mais je crois que les différences sont subtiles. L'aspect le plus important que je tiens à souligner, c'est que les nouvelles techniques scientifiques nous permettront peut-être de recueillir les données dont nous avons besoin et de combler les lacunes à ce chapitre que nous avions auparavant de la difficulté à combler.
De quelle façon les intervenants du milieu canadien des analyses et de l'évaluation environnementale ont-il réagi aux propositions du programme Tox21, lequel utilise des méthodes informatiques pour traiter de gros ensembles de données et en tirer ainsi plus d'information que les processus traditionnels ne le pouvaient?
Nous avons longuement discuté des différents points de vue des scientifiques et des autorités de réglementation du gouvernement fédéral. J'ai même présenté un exposé à des intervenants de Santé Canada, le mois dernier, au sujet des nouvelles approches. Je crois que la communauté scientifique du Canada, ce qui comprend aussi les intervenants des programmes de réglementation fédéraux, est tout à fait au courant de ces nouvelles techniques scientifiques et qu'elle les accepte très bien.
L'appui que nous avons reçu du monde entier est extraordinaire, et il ne concerne pas seulement les méthodes informatiques; il concerne aussi les essais in vitro à haut rendement, la pharmacocinétique à haut rendement et l'exposome à haut rendement. C'est une vraie révolution, et je crois que l'avenir nous donne l'extraordinaire possibilité de faire des choses que nous ne pouvions pas faire auparavant et qu'il donnera peut-être à Lynda des données qu'elle pourra utiliser pour réaliser des évaluations du risque sans avoir à se fier au principe de précaution.
Si je vous ai bien compris, cette nouvelle méthode informatique améliore de façon spectaculaire notre capacité de protéger les Canadiens, d'assurer leur santé et leur sécurité.
J'aimerais mieux avoir en main des données à partir desquelles prendre des décisions fondées sur des données probantes que devoir formuler des hypothèses ou prendre trop de précautions. Le principe de précaution a ses mauvais côtés. Tout le monde le sait, vaut mieux prévenir que guérir. Mais si nous péchons par excès de prudence, nous ne pourrons pas utiliser de manière optimale les ressources affectées à la gestion des risques, qui sont limitées.
Ma contribution consisterait à vous donner des données grâce auxquelles vous pourrez éviter ce problème.
Merci.
Sur un autre sujet, à savoir la pollution de l'air dans le monde, vous avez laissé entendre que 10 % des décès, à l'échelle mondiale, étaient causés par la pollution de l'air ou reliés à la pollution de l'air. Quelle pourrait être à votre avis l'incidence des modifications de la LCPE sur cette situation? Nous menons ici une étude sur la LCPE. La pollution de l'air, au Canada, est une réalité, mais les risques sont plus importants ailleurs dans le monde qu'ici. Comment est-ce que l'examen de la LCPE et les éventuelles modifications de cette loi pourraient contribuer à la lutte contre ce problème mondial?
Excellente question. Les questions que vous nous posez révèlent votre intelligence et votre perspicacité.
Supposons que le Canada établisse des objectifs solides et fondés sur des données probantes touchant la qualité de l'air et supposons que ces objectifs puissent être atteints. Nous arrivons très bien à contrôler les sources ponctuelles, les véhicules sont plus écologiques, mais nous importons beaucoup de pollution de l'étranger. Je ne sais pas si la LCPE peut s'appliquer à cela. Je ne parle pas seulement de nos voisins du sud de la frontière, je parle d'autres pays: la poussière du Sahara peut voyager jusqu'au Canada. Il est peut-être possible de prendre la LCPE comme point de départ et de conclure des ententes internationales touchant le bassin des Grands Lacs ou le Lower Mainland de la Colombie-Britannique, et nous pourrions ainsi en arriver à travailler en collaboration avec la communauté internationale.
Comme je m'y attendais, nos témoins sont brillants. J'aurais aimé vous accorder à chacun deux heures.
Je constate que, à bien des égards, tous les témoins que nous avons accueillis s'entendent tout à fait pour dire qu'il faut à coup sûr renforcer la LCPE en ce qui a trait aux droits environnementaux et qu'il faudrait aussi élargir les obligations. J'ai toutefois remarqué que le préambule, il est intéressant de le souligner, ne fait absolument jamais mention des droits du public, ce qui est étrange. Nous devrions peut-être nous pencher sur cette question si nous cherchons à nous appuyer sur... Fait intéressant, une fois de plus, la deuxième partie n'en fait elle non plus jamais mention.
Deux ou trois témoins ont recommandé que nous envisagions d'appuyer la Convention d'Aarhus. Le Canada avait fait valoir à l'époque que ces droits étaient déjà inscrits dans la LCPE.
Comme M. Winfield l'a souligné, et M. Doelle aussi, je crois, ces droits ne sont assurés par aucune autre loi. J'aimerais beaucoup entendre d'autres exposés. Vous savez tous très bien que j'ai présenté trois fois à la Chambre un projet de loi en matière d'environnement. Il s'agit essentiellement d'un cadre de travail qui vise exactement le type de droits que vous réclamez. Si je l'ai conçu ainsi, c'est pour qu'il puisse tout couvrir: les espèces en péril, les pêches et ainsi de suite. Je suis heureuse de ces commentaires.
Merci, monsieur Winfield, d'avoir parlé de la partie 9. Elle sert d'épouvantail depuis l'entrée en vigueur de la loi. Elle n'a jamais été élargie; je suis également d'accord avec vos recommandations touchant l'équivalence. Je crois que vous en avez tous deux parlé; il y a là un problème.
J'aimerais que vous parliez, l'un ou l'autre, du fait que le gouvernement fédéral ait à affirmer sa compétence et, ce faisant, qu'il se laisse supplanter par les provinces. Je vois que, selon l'article 55, la ministre de la Santé peut consulter d'autres organismes, mais qu'elle n'y est pas obligée. En fait, elle a des obligations réglementaires à respecter, ce qui n'est pas le cas du ministre de l'Environnement, ce qui est scandaleux. J'aimerais que vous traitiez de ce sujet, que vous nous disiez comment nous pourrions remanier la LCPE de manière qu'elle impose la prise de mesures plutôt que cette continuelle étude.
Je vais vous donner un exemple, celui du mercure. Le mercure figurait sur la liste avant l'adoption de la LCPE. Il était visé par la loi sur la qualité de l'air. Pour le Conseil canadien des ministres de l'environnement, le mercure produit par les centrales au charbon est la principale substance sur la liste des priorités, et il est inadmissible que le gouvernement fédéral n'ait adopté à ce jour aucun règlement sur le mercure.
J'aimerais connaître vos recommandations sur la façon dont nous pourrions amener le gouvernement fédéral à affirmer davantage sa compétence et à prendre des mesures concrètes visant les substances toxiques dont nous avons dressé la liste.
Cela nous ramène à toute cette question des obligations réglementaires que la LCPE impose au gouvernement du Canada. Nous sommes nombreux, je parle des experts qui ont présenté un mémoire, à avoir proposé des obligations réglementaires spécifiques. D'emblée, si nous parlons des émissions de mercure dans l'air, je pense au fait que le gouvernement fédéral doit imposer des normes contraignantes sur la qualité de l'air ambiant, ce qui serait pour lui la seule façon, dans l'absolu, d'exercer son pouvoir et d'assurer sa présence dans le domaine.
M. Krewski a parlé des modèles informatiques d'analyse des niveaux d'exposition; je ne sais pas exactement ce que ces modèles font, mais, jusqu'ici, nous observions des niveaux d'exposition moyens. Dans certaines collectivités, je pense à la nation Aamjiwnaang, près de Sarnia, les niveaux d'exposition dépassent la moyenne. Certaines collectivités sont ainsi exposées à des niveaux de cinq à dix fois plus élevés que d'autres collectivités. C'est pourquoi nous avons besoin de normes contraignantes sur la qualité de l'air ambiant, et le gouvernement fédéral devrait les faire respecter, comme cela se fait aux États-Unis.
Oui, il y aura toujours des inégalités, au pays, mais il y a des choses qui ne devraient pas être inégales. Personne ne devrait craindre que l'air que les enfants respirent puisse les tuer, peu importe dans quelle région du pays ils vivent. Alors, oui, je suis résolument d'accord pour que le gouvernement fédéral assure sa présence dans ce domaine.
De même, on peut envisager les interdictions par présomption. M. Boyd a laissé entendre que, advenant qu'un autre pays de l'OCDE interdise une substance donnée — cela répond également à votre question — il faudrait automatiquement qu'une interdiction temporaire soit annoncée, jusqu'à ce que le ministre ou le demandeur puisse prouver que, pour une raison quelconque, il ne s'agit pas du même produit au Canada et qu'ici, il est sûr. Ces interdictions par présomption, qui sont mises en oeuvre dès qu'un signal donné est déclenché, sont vraiment très utiles pour motiver le gouvernement à agir.
J'ai réfléchi à deux ou trois choses. Premièrement, je crois qu'il est clair que nous avons besoin d'un échéancier. Nous avons besoin de déterminer les mesures d'action et de réaction à prendre dès qu'une substance est inscrite sur la liste des substances toxiques. Je crois que nous devons également faire en sorte de bien comprendre tous les usages de cette substance, lui chercher des substances de remplacement et tirer des leçons de ce qui se fait ailleurs. Par exemple, l'Union européenne a décidé d'adopter une approche fondée sur les dangers; cela veut dire qu'il est probable que ce mécanisme nous donne accès à des substances de remplacement et à des solutions de rechange.
Premièrement, je crois qu'il serait bien d'intégrer, dans notre système de réglementation, des motivations à trouver des solutions de rechange ou des produits de remplacement. J'ai parlé de l'échéancier de l'abandon progressif. J'ai parlé de recourir à des instruments économiques pour fournir des incitatifs économiques visant l'abandon de ces substances. Je crois qu'il est important, dans un dossier comme celui du mercure, de commencer d'abord par se faire une bonne idée des sources de la contamination que l'on observe au Canada. Le problème devra peut-être être réglé avec l'aide des provinces, et je diviserais peut-être la question en deux; la première serait de savoir quel est le problème, et l'autre, de savoir quel rôle le gouvernement peut jouer dans le règlement de ce problème.
Je ne crois pas que nous devrions hésiter à explorer cette question, avec la LCPE pour toile de fond, tout simplement parce que nous craignons d'y trouver certains éléments qui pourraient être difficiles à défendre, sur le plan constitutionnel, quant à la mise en oeuvre. Je crois que nous devrions nous assurer de recueillir toute l'information possible, définir le problème et cerner les éléments de solution potentielle puis, dans les domaines où le gouvernement fédéral n'est pas le seul à pouvoir agir, encourager des mesures de collaboration avec les provinces.
Oui. Nous n'avons jamais assez de temps. Nous commençons donc la deuxième série.
Monsieur Gerretsen, s'il vous plaît.
Nous avons quand même discuté un peu du principe de précaution, mais j'aurais aimé connaître l'opinion de Mme Collins à ce sujet. Vous en avez parlé dans votre déclaration préliminaire. Selon l'Association canadienne du droit de l'environnement, le principe de précaution, c'est le devoir de prévenir les dommages, lorsqu'il est possible de le faire, même si toutes les preuves ne sont pas disponibles. Pourriez-vous nous dire ce qui se passe, si ce principe n'est pas respecté, vu la forme actuelle de la loi?
Bien sûr. Le principe de précaution est bien inscrit dans la loi, actuellement, mais il n'est tout simplement pas appliqué. À mes yeux, l'aspect qui rend cette loi fondamentalement contraire au principe de précaution, c'est qu'elle fait porter au gouvernement le fardeau de prouver la toxicité plutôt que de faire porter à l'industrie le fardeau de prouver l'innocuité. En fait, nous manquons tout simplement d'une bonne base de données pour certaines substances; nous n'avons pas adopté comme l'Union européenne un principe qui nous oblige à interdire la mise en marché en l'absence de données.
Dans le cas des substances protégées par des droits acquis, qui n'ont pas fait l'objet d'un examen poussé en vertu du Plan de gestion des produits chimiques, je dirais que notre politique consiste à espérer que tout ira pour le mieux. C'est de cela que parlait M. Thornton, lorsqu'il parlait d'expérimentation. Quand des substances mal comprises sont libérées dans l'environnement, il s'agit en effet d'une expérience épidémiologique involontaire et incontrôlée.
L'approche de précaution, en fait, oblige le secteur à fournir des données et, dans le cas des substances très préoccupantes, à fournir une preuve d'innocuité.
Je vais donc vous demander de vous faire l'avocat du diable. Sauriez-vous si l'application de ce principe pourrait avoir des répercussions négatives?
Je crois que le principe de précaution — c'est mon avis et je l'ai toujours soutenu — devrait être utilisé de pair avec ce que j'appelle un filtre de l'utilité. Je vais vous donner un exemple. Un membre de ma famille doit la vie à un médicament expérimental, et deux fois plutôt qu'une. Les deux fois, elle était à l'article de la mort, et un médicament expérimental contre le cancer lui a sauvé la vie chaque fois. Le mode d'action du médicament n'était pas tout à fait bien compris, et il y avait un risque, mais toutes les personnes concernées étaient bien évidemment prêtes à tolérer ce risque, étant donné les avantages énormes.
Nous n'avons jamais jusqu'ici eu recours à un tel filtre de l'utilité, qui s'appliquerait à des substances présentant un certain risque mais qui sont essentielles à l'économie ou parce qu'elles rehaussent la qualité de vie.
À mon avis, l'Union européenne et le Japon ont prévu des interdictions par présomption dans le cas des substances très préoccupantes. Le fardeau retombe donc sur les épaules des intervenants de l'industrie, qui doivent justifier le recours à une substance donnée par des raisons socio-économiques cruciales, prouver qu'il n'existe pas de substance de remplacement sûre et prouver que nous en avons besoin...
Je crois qu'il y a des circonstances... je ne dis pas que nous devrions en revenir à l'époque où on faisait du feu en frappant deux pierres l'une contre l'autre, mais nous en sommes arrivés à une situation où nous accordons bien trop souvent le bénéfice du doute aux substances. Nous faisons comme si l'absence d'une preuve de risque est une preuve de l'absence de risque; ce n'est tout simplement pas ainsi que cela se passe.
Merci.
Je vais changer de sujet et parler du mécanisme de signalement des déversements. Je crois que M. Winfield pourrait se proposer pour répondre, ou quiconque se sent capable de le faire.
Si j'ai bien compris, dans le cas d'un rejet ou d'un déversement d'une substance dans l'environnement, la loi a prévu un mécanisme de signalement qui peut être utilisé dès que la situation est constatée. Je crois que le signalement se fait d'abord verbalement, mais que le signalement est ensuite suivi par une déclaration écrite. Je m'excuse. La loi est tellement compliquée qu'il est difficile de s'y retrouver; pourriez-vous me dire si cette disposition s'applique aussi rétroactivement?
Par exemple, si une municipalité découvrait, 50 ans après les faits, qu'une usine de gazéification ou une tannerie avaient par leurs activités contaminé un certain site; existerait-il un mécanisme qui lui permettrait de signaler la contamination, après les faits, ou qui l'obligerait à le faire?
Pensez-vous que ce serait nécessaire? Je représente une circonscription du sud-est de l'Ontario où il y avait à une certaine époque beaucoup de manufactures; dans une de ces usines, un certain monsieur a déclaré — je passerai sous silence le nom du fabricant — que son emploi d'été consistait à enterrer des barils.
Il y a ainsi beaucoup d'endroits où se trouvent de telles substances, même si on l'ignore. Mais, lorsqu'une municipalité ou que le nouveau propriétaire d'un terrain se met au travail et retrouve ces substances, ne serait-il pas tout aussi important de s'assurer qu'il peut documenter et régler la question de façon appropriée? Est-ce que le cas est prévu dans une autre loi ou faudrait-il qu'il soit prévu par la LCPE?
Il y a deux choses à savoir. Cela relèverait principalement, en fait, des provinces, des lois provinciales.
Il y aurait des exceptions, par exemple s'il s'agit d'une substance toxique, figurant sur la liste de la LCPE et si des exigences réglementaires spécifiques étaient en cause.
L'autre dimension de la question, c'est bien sûr la partie 9 de la LCPE, qui prévoit que, si une substance donnée se retrouve sur le territoire domanial, le gouvernement du Canada peut alors prendre des mesures; évidemment, jusqu'ici, il n'existe pour ainsi dire aucun règlement en vertu de la LCPE à ce sujet, et le commissaire à l'environnement et au développement durable même décrit en détail les problèmes concernant la détermination des sites contaminés, même s'ils se retrouvent sur le territoire domanial, et l'étendue duproblème sur le seul territoire domanial.
Le problème, pour l'instant, c'est que nous n'utilisons pour ainsi dire jamais les dispositions prévues par la loi.
Il y a un phare appartenant au gouvernement fédéral sur une île que je possède; depuis 200 ans, lorsqu'il y a des travaux de peinture, on gratte la peinture au plomb, qui tombe au sol. Il y a ainsi de nombreux exemples de sites contaminés appartenant au gouvernement fédéral. Je serais curieux de savoir s'il n'y aurait pas une disposition visant à s'assurer que ces... mais je comprends votre réponse.
Madame la présidente, je vais laisser un peu de mon temps à mon collègue, M. Fast.
J'aimerais remercier les quatre témoins. Je trouve que vous nous avez donné des informations très précieuses. Merci à vous tous de vous préoccuper du bien-être des Canadiens et de vouloir qu'ils puissent vivre en santé et en sécurité.
J'aimerais revenir à ce que M. Krewski disait au sujet de l'eau. J'étais autrefois maire de la ville de Fort St. John; à ce titre, j'étais très fier du nouveau système que nous avons décidé de mettre en place pour amener l'eau de la rivière de la Paix en la pompant sur une distance d'une vingtaine de kilomètres grâce à une technologie de pointe et aux techniciens les mieux formés qui soient en Colombie-Britannique. Vous avez piqué ma curiosité, et vous m'avez fait dresser l'oreille, lorsque vous avez parlé d'une loi sur la qualité de l'eau potable.
J'avais l'impression que la plupart des provinces avaient adopté des lois sur les ressources en eau douce et qu'elles étaient responsables de la distribution de l'eau, des orientations à ce sujet et de la sécurité générale à l'échelle de la province. Pourquoi pensez-vous que nous aurions besoin d'une loi fédérale sur la qualité de l'eau potable?
La qualité de l'eau est une responsabilité des provinces. Mais nous devons réfléchir aux interactions entre les provinces et le gouvernement fédéral.
Je n'aurais pas de conseil avisé à donner sur la façon de faire fonctionner tout cela sans heurts, comme vous le faites, mais le projet de loi sur la sûreté des produits liés à l'eau potable, qui avait été présenté en 1997 ou en 1998, mais n'est pas allé au-delà de la première lecture en Chambre, s'attachait à une facette de ce problème. Le projet de loi s'attachait aux dispositifs de traitement de l'ensemble du système de distribution, aux usines de filtration et aux produits utilisés dans ces usines. Le projet de loi a fait l'objet de longues consultations. Il a reçu l'appui de nombreux intervenants du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et des administrations municipales, car il était conçu de manière à ne pas entrer en conflit avec les compétences existantes.
Il existe probablement encore des copies de ce texte. Il était plutôt court. Il faisait environ 18 pages, ce qui est peu, comparé au texte de la LCPE, qui en fait, je crois, 257. Je voulais tout simplement dire qu'il y avait peut-être là quelques belles idées que l'on pourrait utilement reprendre pendant notre étude de la LCPE.
Merci.
Je m'adresse encore une fois à M. Krewski; j'ai entendu les trois autres témoins recommander que l'on intègre une justice environnementale dans la LCPE. Je ne vous ai pas entendu commenter cet aspect, et c'est probablement parce que vous êtes le seul scientifique parmi nos témoins.
Avez-vous une opinion quelconque à ce sujet?
J'en ai une.
Le programme de second cycle sur le risque que nous offrons, à l'Université d'Ottawa, consacre une session au principe de la prise de décisions, à la communication, aux perceptions et à la réglementation. Nous couvrons tous les sujets. Nous avons publié un document sur les 10 principes de la prise de décisions fondées sur le risque. Il fait partie des références que j'ai jointes à mes notes, et c'est moi qui donne ce cours-là.
Le principe de précaution figure dans ce document, tout comme la prise de décisions fondées sur le risque et l'équilibre entre les avantages et les risques. Lynda a donné un exemple parfait, celui de la relation entre un patient et son médecin, dans un cas où le risque est aussi important pour la personne que les avantages qui lui sont offerts. C'est un compromis naturel entre les risques et les avantages. Ce n'est pas vraiment ainsi que cela se passe dans les cas des polluants de l'environnement; je n'arrive pas à trouver des avantages qui justifieraient un compromis, mais dans cette liste de 10 principes, nous avons inclus la justice environnementale.
Je ne serais pas déçu de voir dans le préambule une allusion quelconque à la justice environnementale et peut-être aussi des allusions à quelques autres orientations générales sur la façon dont nous pourrions prendre des décisions de façon juste et équitable.
La seule chose qui me préoccupe, quand nous parlons d'accorder de nouveaux droits... la plupart des Canadiens supposent que ces droits sont indissociables de la qualité de résident ou de citoyen de notre pays. Si vous concédez de nouveaux droits, de par la loi... il y a quelques avocats parmi les témoins. Je suis moi-même avocat et je sais que dès que vous aurez accordé ces droits, le gouvernement fédéral sera immédiatement tenu de s'acquitter d'un certain nombre d'obligations et de responsabilités. Et ce seront les tribunaux qui devront non seulement interpréter ces droits, mais, au fil du temps, en étendre la portée. Cela se fait subrepticement, pendant que le temps passe. Je n'oublie pas que nous vivons dans un monde imparfait, que nous n'avons que des ressources limitées; nous avons beau vouloir combler absolument tous les besoins de nos citoyens, nous vivons dans un monde imparfait. La seule chose qui me préoccupe, c'est que des droits accordés officiellement, comme ici, coûteront cher aux Canadiens, puisqu'ils prendront beaucoup de ressources.
Nous ignorons quels recours les tribunaux nous offrent s'il y a des recours en dommage et intérêts ou des ordonnances de mandamus, qui obligeraient les gouvernements à agir d'une certaine manière.
Je ne crois pas que vous trouverez bien des gens prêts à affirmer qu'il n'y a pas de droits intrinsèques. C'est au moment où ils sont inscrits dans les lois et qu'ils deviennent officiels. Dans le cas qui nous occupe, je suis à peu près convaincu que le gouvernement fédéral hériterait immédiatement de certaines responsabilités qui pourraient peut-être aussi s'étendre aux provinces.
Je dirais que le fait d'intégrer la justice environnementale dans la LCPE serait probablement la meilleure manière de protéger le gouvernement fédéral. Comme vous le savez probablement, une poursuite a déjà été entamée au titre de l'article 15, et elle n'est pas réglée. Je ne sais pas si vous êtes au courant.
Non. Je suis absolument certaine que l'affaire se rendra jusqu'à la Cour suprême du Canada.
Je suis en général tenante d'une approche conservatrice quand il est question de nouvelles actions en justice. J'ai souvent refusé des cas qui semblaient... Je puis vous donner cinq ou six exemples, rattachés à la LCPE, que je serais prête à défendre sans hésiter. Il s'agit d'infractions de l'article 15, et il y en a déjà.
Par exemple, il y a la question de l'évaluation de la vulnérabilité ou de l'exposition qui se fait en fonction d'une personne moyenne, et ce n'est pas une façon de protéger les enfants. Je crois que les parents d'enfants asthmatiques ayant perdu la vie auraient facilement gain de cause s'ils présentaient une réclamation au titre de la nouvelle LCPE.
Je crois que la meilleure chose à faire, c'est de faire ce qui s'impose. Il faut donner effet à la justice environnementale. Personne ne prétend que la perfection est possible, en matière d'environnement, mais tout le monde prétend que ces larges écarts au chapitre de la protection ne devraient pas exister.
Nous n'avons plus de temps pour vous, mais peut-être que quelqu'un reviendra sur le sujet. C'est un bon sujet.
Monsieur Fisher.
Merci, pour reprendre le mot célèbre de Mike Bossio: wow. Quelle quantité d'information!
Puisque je ne suis pas parmi les premiers à intervenir, bon nombre de mes questions ont déjà été posées; Mark Gerretsen en a posé deux ou trois.
En tant que Néo-Écossais, je suis toujours heureux lorsque des compatriotes déposent des projets de loi ou proposent des stratégies ou des programmes remarquables. Justement, hier, la ministre de l'Environnement et des Changements climatiques était en visite dans ma circonscription de Dartmouth—Cole Harbour pour voir tout ce qui se fait en Nouvelle-Écosse dans le domaine de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et les changements climatiques.
Revenons en arrière — pas trop loin —; Mme Megan Leslie, qui était notre députée, avait travaillé au projet de loi ou à la motion sur les microbilles, et les microbilles avaient fini par être déclarées toxiques en application de la LCPE. Le gouvernement a reconnu que les microbilles étaient toxiques en application de la LCPE. J'ai suivi l'affaire dans les actualités. Vous pouvez quand même aller dans un magasin quelconque aujourd'hui et acheter plusieurs produits contenant des microbilles. Ma question est probablement redondante et j'en connais probablement la réponse.
Je vais m'adresser à Lynda, sur cette question, car j'ai eu l'impression que vous vous retrouviez comme une voiture de course prise dans un bouchon de circulation, alors que vous vouliez poursuivre votre témoignage. Est-ce que la LCPE permet une bonne gestion des risques? J'imagine que vous allez devoir extrapoler un peu pour parler du principe de substitution et des moyens dont nous pourrions nous rendre là où nous voulons aller. Comment pourrions-nous donner plus de mordant à cette loi?
Bien sûr.
Non, la LCPE ne permet pas une gestion appropriée des risques. Selon de très nombreux critères, pour parler comme Dayna Scott, nos normes en matière de protection sont les moins élevées de tous les pays industrialisés. Notre règlement sur la persistance et la bioaccumulation, par exemple, offre la moins bonne protection de tous les pays du monde. Nous tolérons des niveaux de persistance et de bioaccumulation très élevés avant d'appliquer le règlement, par rapport à ce qui se fait dans les autres pays industrialisés.
En ce qui concerne le principe de substitution, il y a à mon avis plusieurs façons d'arriver là où nous voulons arriver. Nous pouvons y arriver par exemple en imposant des taxes aux pollueurs. Il faudrait que l'utilisation des substances les plus dangereuses entraîne des coûts supérieurs. Vous pouvez aussi mettre à contribution les lois du marché. Il existe un domaine passionnant, celui de la chimie verte.
Il stimule en effet l'innovation. Il nourrit en effet l'économie. Cela, nous le savons.
M. Darren Fisher: Nous parlons de la tarification de la pollution.
Mme Lynda Collins: D'accord, la tarification.
Cela a très bien été établi au Massachusetts, qui a fait l'exercice de recueillir des données touchant la réduction des substances toxiques. L'État a constaté que cela avait permis aux entreprises d'économiser des millions de dollars et à l'environnement de se passer de plusieurs tonnes de substances toxiques.
Je crois que le principe de substitution devrait se retrouver dans l'article 2, qu'il devrait être une des obligations réglementaires du gouvernement. Je crois aussi que les interdictions par présomption sont un outil très puissant qui devrait favoriser la substitution. Dans le cas d'une substance qui soulève de très grandes préoccupations, une substance carcinogène, mutagène, peu importe, il faut une interdiction par présomption. Le fardeau retombe sur les épaules des intervenants de l'industrie, qui auront à prouver soit que leur produit est sûr, soit qu'il n'existe pas de substitut sûr, soit encore qu'il est absolument nécessaire.
S'il existe un substitut sûr, tant pis pour le secteur. L'autre substance sera interdite, et le marché sera réservé au substitut, celui qui est sûr.
Je crois qu'il serait très intéressant d'intégrer cette notion de substitution au processus de gestion du risque prévu par la LCPE. Les précédents sont nombreux, d'autres administrations ont pris cette voie-là, et nous ne passerions pas pour des radicaux. Cette notion ouvre des possibilités intéressantes, il suffit de penser aux produits de substitution qui existent déjà.
Ma question pourrait elle aussi vous sembler rhétorique ou redondante. Aujourd'hui, personne n'a vraiment parlé des populations vulnérables du Canada. Le sujet a déjà été abordé. Nous avons entendu de nombreux témoignages, avant les vôtres, qui portaient sur les populations vulnérables.
Quelles dispositions spécifiques de la LCPE pourrions-nous renforcer si nous voulons répondre adéquatement au besoin des collectivités marginalisées et vulnérables?
Je vais encore une fois donner la parole à Lynda, d'abord, puis peut-être à M. Doelle.
Oui, c'est une excellente idée.
Je crois que l'exigence de protéger des populations vulnérables devrait être intégrée au paragraphe 2(1) et que cette exigence devrait devenir un devoir pour le gouvernement. Plus spécifiquement, certains témoins ont indiqué, dans leur exposé, que la susceptibilité des populations vulnérables devrait obligatoirement être visée par les évaluations de la toxicité faites en application de l'article 64 et de l'évaluation préalable des risques faite au titre de l'article 74, je crois. Il est tard.
Oui, j'aimerais ajouter quelque chose. Je crois pour commencer qu'il est essentiel de reconnaître le problème, étant donné que nous avons dû défendre le principe de la justice environnementale dans différentes administrations, dans toutes sortes de contextes, et il a parfois été difficile de faire prendre cette question au sérieux. S'il existait une loi qui reconnaisse clairement que la justice environnementale est un aspect dont il faut tenir compte, qu'il faut en tenir compte tout au long du cycle de vie d'un processus de réglementation et qu'il faut le faire respecter, notre pays s'en trouvera bien mieux.
J'aimerais dire une petite chose pour conclure.
Vous avez tous les quatre formulé des recommandations et des suggestions absolument extraordinaires, que nous allons examiner. J'espère que si vous voulez ajouter des choses que vous n'avez pas eu l'occasion de dire aujourd'hui, pendant votre témoignage, vous n'hésiterez pas à nous les communiquer plus tard.
Dan, vous avez parlé d'un certain rapport. Je ne sais pas quelle importance il a.
Je vous ai envoyé de nombreux documents, certains courts, d'autres longs. Je me ferai un plaisir de vous envoyer plusieurs autres choses à ce sujet, mais j'aimerais dire...
J'aimerais dire une chose. Si vous communiquez des documents, pourriez-vous les faire traduire? Est-ce qu'ils sont accessibles dans les deux langues officielles? Si ces documents n'existent que dans une seule langue, cela représente un peu un problème, pour nous.
Vous les avez déjà inscrits en référence, à la fin de votre exposé. Oui, donnez-nous une liste des documents que vous aimeriez que nous consultions.
Il y en a deux ou trois autres qui répondraient de façon plus précise à cette question. Il s'agit en fait de la littérature scientifique où est décrit le concept du programme Tox21.
J'aimerais en effet ajouter une petite information. C'est en réponse à la question de savoir comment nous gérons les risques. Je serai très bref, madame la présidente.
L'une des choses que j'aimais dans la version précédente de la LCPE, c'est que, une fois qu'une substance figure sur la Liste des substances d'intérêt prioritaire, une phase de gestion du risque s'enclenche, et elle est assortie d'un délai précis. J'aime aussi les tables de concertation où des intervenants de divers horizons pouvaient discuter et avaient l'occasion de faire preuve de créativité. Tout cela correspond assez bien aux cinq manières de gérer les risques dont je fais la promotion.
Voici les cinq piliers de cette approche: il y a d'abord les approches fondées sur la réglementation; ensuite, les mesures d'encouragement et de dissuasion; il y a ensuite les approches axées sur la consultation, dans le cadre desquelles on dit aux gens comment éviter les risques; il y a ensuite les mesures venant des milieux communautaires; enfin, il y a la technologie. Si nous envisageons d'aller plus loin dans ce large spectre des options de gestion du risque, ce cadre à cinq piliers, qui est inscrit dans la liste des documents de référence que j'ai fournie, pourrait vous être utile.
J'apprécie énormément les témoins que nous recevons aujourd'hui et l'expertise qu'ils apportent à notre étude.
J'ai adoré la discussion sur le principe de précaution et le risque, car j'ai passé ma carrière auprès d'enfants du niveau secondaire. Il est évident que le principe de précaution ne veut rien dire, pour eux.
Nous avons des problèmes, lorsque vous en parlez, et il en a été question lors de notre dernière séance. La nicotine est un de ces problèmes. Le cancer est quand même causé, et dans ce cas, le taux de mortalité est le plus élevé au pays, par le tabagisme, et pourtant le tabac est légal. Pour une population vulnérable, ce serait le syndrome d'alcoolisme foetal. J'en ai vu beaucoup, chez les enfants. Nous croyons que les enfants devraient vivre dans un environnement sûr, mais cela n'est pas le cas, étant donné les actes des adultes, des actes qui sont légaux. Nous avons fait une tentative avec la prohibition, mais cela n'a pas fonctionné.
Des produits chimiques circulent dans notre société, et ils annulent tout ce que vous dites, car les gens sont prêts à prendre des risques. Nous vivons aujourd'hui une crise des opiacés, il y a des gens qui risquent leur vie. Comment voyez-vous le risque et le principe de précaution, avec toutes ces substances chimiques qui circulent dans la société, lorsque les enfants... il y a la nicotine, l'alcool, le syndrome d'alcoolisme foetal... les adolescents et les jeunes adultes font à leur tête, quel que soit le risque. Le principe de précaution ne veut rien dire.
Comment pouvons-nous, en tant qu'État, réguler la situation? La prohibition n'a pas fonctionné.
Je discutais récemment avec les membres d'un groupe du droit de la santé, et je leur ai dit que les intervenants du droit de la santé devaient parler aux intervenants du droit de l'environnement, étant donné que toutes les autres initiatives de promotion de la santé exigent en réalité la collaboration des individus. Vous dites aux gens d'arrêter de fumer, et ils doivent arrêter. Vous leur dites de faire de l'exercice, de passer des tests de dépistage du cancer, peu importe, et vous leur demandez de collaborer. C'est la zone d'impact idéale, et elle vous permettra de faire le don de la santé, en tant que gouvernement. Vous avez là une occasion profonde et puissante.
Quand vous améliorez la qualité de l'air ambiant, vous sauvez des milliers de vies. Personne ne le conteste.
Oui, vous avez tout à fait raison. Il y aura toujours des occasions pour les gens de se ruiner la santé. Mais, dans ce dossier, vous pouvez, à titre de gouvernement, permettre aux gens de recouvrer la santé. C'est une occasion assez incroyable, à mon avis.
Mais en fait, vous avez raison. Il y aura toujours des gens prêts à se jeter en bas d'une falaise, à grimper le mont Everest, à fumer et à jouer avec leur santé. Parfois, la santé est menacée par quelqu'un d'autre, et c'est une injustice, et nous nous en occupons. Mais, en ce qui concerne l'environnement, il y a des injustices poignantes.
Je vais maintenant m'adresser à vous en tant que mère; j'ai en effet un enfant qui fait partie de ces populations vulnérables. J'ai un fils qui a de graves incapacités. Nous vivons au centre-ville, car il se déplace en fauteuil roulant et, au centre-ville, les choses sont accessibles. Il y a deux ans, mon fils a commencé à faire des crises respiratoires aiguës, et je l'ai vu lutter pour sa vie dans une salle d'urgence; en même temps, je savais que ces crises étaient probablement causées en partie par la pollution automobile.
Ce n'est pas correct. Nous pouvons faire mieux que ça, au Canada.
Mais tous les ans, il y a 10 000 décès liés à des accidents survenus en milieu hospitalier. Devrions-nous arrêter d'aller à l'hôpital?
Je crois que, en ce qui concerne en particulier les risques environnementaux, nous devrions ici distinguer les risques pris volontairement des risques involontaires.
La question concerne en particulier le fait que nous sommes involontairement exposés aux contaminants dont il est question ici, ceux qui sont visés par la LCPE. Nous n'avons aucun choix, en ce qui concerne les voies d'exposition, précisément en raison du fait que ces contaminants se trouvent dans l'environnement ambiant. En fait, dans certaines populations vulnérables, nous avons même constaté que les voies d'exposition étaient différentes, dans le cas des enfants, par exemple.
C'est assez différent de la situation dans laquelle vous donnez de plein gré votre consentement. Même si vos anciens étudiants étaient d'une certaine manière mal informés, ils donnaient quand même leur consentement, et je crois que c'est une différence fondamentale. C'est ici que le rôle de l'État devient important, étant donné que, à titre de gouvernement, vous avez le mandat de vous occuper des situations où le risque est involontaire et l'exposition aussi.
J'aime bien cette question. J'aimerais souligner rapidement deux ou trois choses. Entre autres, en ce qui concerne la portée de la LCPE, il faut savoir si nous parlons de la fumée de cigarette dans l'environnement ou du tabagisme proprement dit.
Il est certain que le tabagisme est la principale cause de cancer du poumon, étant responsable d'environ 90 % des cancers du poumon enregistrés au pays, mais entre autres causes, et c'est mon second point, tout de suite après sur la liste des causes, il y a le radon présent dans nos maisons, qui est responsable d'environ 10 % des cas. La très grande majorité des cas de cancer du poumon qui sont reliés au radon, toutefois, se déclarent chez les fumeurs étant donné la synergie entre les deux agents. Si vous cessez de fumer, vous réglez en même temps le problème du radon.
Ce point s'est présenté pendant que nous faisions un projet scientifique sur « la prochaine génération de méthodes d'évaluation des risques »; par exemple, vous avez une loi particulière qui cible un agent environnemental, comme le radon, mais il y a aussi un facteur lié au style de vie, par exemple le tabagisme, qui échappe à sa portée; pourtant, comme les deux facteurs interagissent, il serait peut-être possible dans le cadre d'un programme interministériel ou intergouvernemental de concevoir des interventions en santé publique qui viseraient plusieurs buts. C'est ce que nous appelons l'approche pour l'évaluation des risques concernant la santé humaine.
Explorons donc un peu plus cette question. Vous dites qu'il existe une façon rapide de traiter... j'aimerais beaucoup savoir comment fonctionne cette technologie.
Dans combien de temps pensez-vous qu'elle sera accessible? Pensez-vous qu'elle sera largement adoptée?
Elle est déjà accessible. Nous avons eu des discussions avec des collègues de Santé Canada au sujet de la possibilité d'appliquer quelques-unes de ces nouvelles technologies, à grande échelle, aux substances figurant sur la Liste intérieure des substances.
La technologie existe déjà. Pour soumettre un grand nombre d'agents environnementaux à ces nouvelles procédures de test, il faudrait beaucoup d'argent, mais le prix à payer serait faible par rapport aux avantages que procureraient les nouvelles données. Il était impossible de recueillir ce type de données il y a 10 ans. Si vous vouliez faire un investissement et appliquer ces nouvelles technologies à des substances chimiques jamais encore testées, ce serait très rentable, à mon avis, et cela pourrait être fait immédiatement.
Je dois vous interrompre.
Il nous reste encore assez de temps et, si nos invités sont d'accord, je suis prête à poursuivre les séries de questions. Je pourrais accorder encore six minutes à tout le monde.
Qu'en pensez-vous? Êtes-vous tous d'accord?
Vous dites oui?
Une voix: [Inaudible]
Savez-vous quoi? Je vous ai oublié, Will. Je suis vraiment désolée.
J'ai oublié Will, parce que je voulais donner plus de temps à Linda, de façon à ne pas avoir à vous interrompre. C'est ma faute.
Nous ferons donc une série de cinq minutes, si tout le monde est d'accord, après en avoir accordé six à Will.
Je vais vous en donner cinq de plus, Linda, puis nous en resterons à cinq minutes.
Je suis désolée, Will; toutes mes excuses.
Je remercie nos témoins.
Vos déclarations préliminaires sont vraiment édifiantes. J'ai bien hâte de pouvoir lire les documents écrits avec plus d'attention.
J'aimerais d'abord demander à M. Doelle d'expliquer davantage la notion d'application des procédures d'évaluation environnementale aux évaluations de toxicité, telles qu'elles sont menées aujourd'hui dans le cadre de la LCPE.
Pourriez-vous parler de la question des substances animées, des nouvelles espèces génétiquement modifiées? Pensez-vous que cette approche de l'évaluation environnementale qui fait davantage de place à la participation du grand public pourra se révéler utile? Sauriez-vous dire comment elle pourrait être mise en pratique dans le contexte de l'examen de la LCPE?
Je vais répondre d'abord à votre dernière question; la façon de la mettre en pratique consisterait probablement à ajouter à la LCPE une disposition sur le déclenchement des évaluations environnementales, mais cela dépend aussi de la façon dont se déroule l'examen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Je crois qu'il faut que cela se fasse en coordination.
Si nous décidons d'intégrer à la LCEE une liste des éléments déclencheurs, plutôt que de conserver les déclencheurs administratifs que nous avions précédemment, vous disposeriez de plusieurs façons de vous assurer qu'il est possible de faire une évaluation environnementale.
Je vais reprendre votre exemple; je crois que la décision dans l'affaire AquaBounty illustre parfaitement le cas où le saumon génétiquement modifié a été introduit ou proposé au Canada pour la première fois, et cette situation soulève deux possibilités.
La première possibilité, c'est que les installations qui proposent d'introduire cette nouvelle substance fassent l'objet d'une évaluation de projet. Mais, si l'on considère que c'est un nouveau type d'activités plus large, je crois que l'occasion se prête tout à fait à une évaluation environnementale stratégique, quelque chose que nous sommes nombreux à réclamer, dans le contexte de l'examen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, qui nous permettrait en fait d'aller poser quelques questions fondamentales.
Il s'agirait de questions visant à savoir si des activités de ce type devraient être permises, et sous quelles conditions, de questions sur les solutions de rechange et sur l'utilité de la chose. Toutes les questions et tous les enjeux qui ont été soulevés dans le cadre de notre discussion sur les substances toxiques, leurs usages et la façon de réduire ou d'éliminer le risque, prennent encore plus d'importance, à mon avis, quand vous parlez d'une nouvelle substance.
C'est ce que je vous suggérerais de faire, d'utiliser un processus qui a fait ses preuves ailleurs, à l'échelon d'un projet, certainement, de faire participer le public à une discussion sur l'utilité de tout cela et aussi sur les solutions de rechange.
Le défi, c'est de déterminer quels types de substances doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale davantage axée sur le projet.
Si un des témoins veut formuler un commentaire à ce sujet, je l'écouterai avec plaisir.
Monsieur Winfield.
Autant je suis d'accord sur le fait qu'il serait très utile que certains des processus d'évaluation des nouvelles substances soient davantage apparentés à une évaluation environnementale, autant je suis prêt à considérer les choses d'un point de vue plus général; il reste que le défi, évidemment, consiste pour le gouvernement fédéral à déterminer sur quelles bases il peut le faire.
Pour le moment, le processus d'évaluation des nouvelles substances, dans le cadre de la LCPE, est lié de très près à une détermination de la toxicité. C'est la base qui permet au gouvernement fédéral d'agir, et c'est aussi ce qui détermine les limites de l'évaluation.
Si nous adoptions un point de vue plus général — et je ne dis pas que cela ne serait pas très utile —, nous aurions alors besoin d'autres fondements constitutionnels et nous devrions nous raccrocher à un autre instrument fédéral, par exemple la Loi sur les pêches dans l'affaire AquaBounty, ou quelque chose d'autre, car il faut déterminer le fondement de ce type d'évaluation afin de pouvoir en mettre les résultats en application. C'est le dilemme, dans cette approche.
La LCPE nous contraint aux évaluations de la toxicité, pour toute une gamme de motifs légaux, et nous devons élargir les fondements de l'évaluation, sous l'angle fédéral, ou du moins les motifs des évaluations, sous l'angle fédéral, si nous voulons être en mesure d'intégrer ces questions plus larges. Je suis tout à fait d'accord — et je pense en particulier à des choses comme les produits de la biotechnologie, mais aussi à d'autres nouvelles substances — pour dire que nous désirons discuter de toutes ces questions, des justifications, des effets en aval, des solutions de rechange. Il serait très souhaitable de discuter des évaluations des nouvelles substances, mais il est difficile de le faire dans la structure actuelle de la LCPE.
Merci de votre commentaire.
J'aimerais inviter Mme Collins à préciser sa réponse à la question de M. Fast.
Il semble que certaines personnes croient que le ciel va peut-être leur tomber sur la tête si des droits environnementaux sont enchâssés dans la loi et que les responsabilités seraient trop générales. Y a-t-il une façon de rassurer les personnes qui s'opposent à la modification de la loi? Je crois qu'il s'agit d'un élément important.
Je crois qu'il s'agit également d'un élément important. Je dirais seulement d'observer ce qui se fait à l'échelle internationale. En réalité, nous sommes le seul de 12 pays au monde qui ne codifient pas les droits environnementaux. En fait, le ciel n'est tombé sur la tête de personne.
Au Canada, bien sûr, le gouvernement couvre les frais de soins de santé alors il n'est pas logique sur le plan économique de ne pas régler les graves problèmes de santé publique. On n'externalise pas les coûts. Le gouvernement en est responsable. Il coûte bien moins cher de prévenir en amont les dommages à la santé.
Merci beaucoup.
La parole est à Mme Duncan. Nous vous accordons cinq minutes supplémentaires. Vous aurez alors huit minutes.
Merci beaucoup. C'est très gentil.
J'ai plusieurs questions à poser, même si j'ai beaucoup apprécié le témoignage et particulièrement l'effort de fournir des mémoires écrits.
Ma première question s'adresse à M. Krewski.
Vous avez mentionné, monsieur, cette nouvelle façon d'évaluer les toxines qu'un certain nombre d'autres compétences ont adoptée. Quelle a été la réponse du gouvernement canadien?
Je crois que le gouvernement canadien connaît très bien les nouvelles données scientifiques. Il les examine et commence à utiliser certaines parties de la trousse complète d'outils que nous avons offerte au monde. De fait, je crois que Santé Canada en particulier a été très proactif parce qu'il participe actuellement à un processus de planification relativement à ce que nous aimerions voir en 2017 et en 2020, années représentant deux points de contrôle clés concernant les produits livrables figurant sur la LIS qui sont visés par la LCPE, et le ministère a également mis en place un processus de planification visant 2020 et au-delà. Je dirais que notre gouvernement fédéral, du moins en ce qu'il est représenté par le ministère de la Santé, se trouve plus que jamais à la fine pointe des nouvelles données scientifiques.
C'est encourageant.
J'apprécie vraiment tous les témoignages que nous avons entendus, même ceux déposés avant que je me joigne au Comité, concernant l'équité et la justice environnementale, particulièrement à l'égard des populations vulnérables. Lorsque nous avons procédé à l'examen des émissions produites par des centrales électriques, principalement par des centrales au charbon de l'Alberta, ce que le gouvernement a convenu de faire, c'est d'adopter ce que j'ai proposé: un protocole visant les secteurs à forte incidence. Vous savez probablement que les États-Unis ont adopté un protocole visant les secteurs à forte incidence pour les centrales au charbon. Ce mécanisme est mis de l'avant lorsqu'une situation se présente dans laquelle se trouve une source consolidée de pollution, comme une centrale au charbon, des sables bitumineux, une industrie pétrochimique et ainsi de suite. Pensez-vous qu'il existe une façon d'intégrer cela à la loi?
Dans le modèle albertain, on retrouve un certain nombre d'éléments déclencheurs. Un d'eux est lorsque vous avez plusieurs cas de non-conformité ou lorsque de nouvelles données scientifiques deviennent accessibles. Cela déclencherait un examen de la situation, y compris de l'impact sur la collectivité. Je me demande si tous deux vous pouvez parler d'un éventail d'options qui s'offrent à nous afin de nous permettre d'assurer la protection des populations vulnérables sous le régime de la loi.
Je crois que la portée est possiblement très large, vu que la plupart des polluants atmosphériques préoccupants, comme les précurseurs de smog et les polluants atmosphériques dangereux, figurent déjà sur la liste de substances toxiques. La portée possible des mesures réglementaires fédérales est donc déjà très large.
Je pense qu'un modèle possible visant cet aspect est celui qui existe déjà, par exemple, en vertu de la Clean Air Act des États-Unis, laquelle est assortie de la notion de région non conforme. La conséquence, bien sûr, est que vous avez une sorte de norme nationale de la qualité de l'air ambiant qui vous permet ensuite de déterminer que cette zone à Fort McMurray ou ailleurs ne respecte pas la norme, et, par conséquent, d'autres interventions seront nécessaires.
Je crois que c'est tout à fait faisable, et nous avons des précédents à cet égard, comme des substances toxiques, mais aussi, comme il a été suggéré, nous pourrions également viser la pollution de l'air interprovinciale. Je crois que c'est très faisable. Ce qui nous manque, ce sont des dispositions entourant les normes sur la qualité de l'air en soi, mais ce n'est pas irréalisable. Il pourrait y avoir des lignes directrices qui seraient ensuite des éléments déclencheurs de mesures réglementaires concernant les substances toxiques responsables du non-respect des normes de la qualité de l'air ambiant.
Je suis d'accord avec vous. Je suis particulièrement favorable à l'approche de la Clean Air Act des États-Unis qui a des conséquences exécutoires. Essentiellement, si des États ne respectent pas la norme nationale de la qualité de l'air ambiant, ils perdent certains financements fédéraux. La raison pour laquelle je suis favorable à cette loi est que nous avons des données indiquant que ça a fonctionné. Nous avons en réalité constaté de réelles améliorations, par exemple, dans les concentrations de matière particulaire fine dans les régions non conformes après l'imposition de mesures ayant ces conséquences.
Monsieur Doelle, voulez-vous ajouter quelque chose?
J'ai le temps pour une dernière petite question. Je suis vraiment intéressée à entendre d'autres observations que vous avez si vous pensez à une disposition d'équivalence. Au fil du temps, j'ai été profondément préoccupée par le fait que l'intérêt des relations amicales entre le gouvernement fédéral et les provinces l'avait emporté sur l'exercice du pouvoir fédéral. J'aimerais donc entendre tous vos commentaires à ce sujet. Devons-nous modifier la loi? Devons-nous changer l'attitude du gouvernement fédéral afin de nous assurer que cette loi a préséance sur le fait de s'assurer d'avoir des relations amicales fédérales-provinciales?
Je crois que la réponse courte est oui à vos deux questions.
Ce qui doit se produire dans le cadre de la loi, c'est qu'il doit y avoir beaucoup plus de critères précis concernant le moment où le gouvernement du Canada peut conclure un accord sur une disposition d'équivalence avec une province. Le gouvernement doit non seulement demander qu'il y ait un texte législatif ou réglementaire définissant les exigences relatives à l'équivalence, mais il doit se demander si la province a la capacité d'administrer la loi et de faire cela. Il doit également y avoir des dispositions exigeant des rapports réguliers sur le rendement. Le gouvernement propose d'avoir non seulement des accords administratifs sur une disposition d'équivalence, mais aussi que ces accords soient constamment mis à jour et ne soient pas assortis d'une date limite.
Le problème est qu'il y a une réglementation fédérale et qu'ensuite une province ou un territoire pourrait affirmer avoir une disposition d'équivalence s'ils ont la même réglementation et les mêmes politiques d'application. Ce qui s'est produit, c'est qu'il n'y a aucune réglementation fédérale, et ils se contentent de dire: « Oh, pensez-vous faire quelque chose? »
En effet, on reçoit une offre anticipée relative à une disposition d'équivalence du gouvernement fédéral du moment qui dit: « Eh bien, nous ferons peut-être quelque chose à cet égard, mais il y aura une offre d'équivalence sur la table immédiatement. » Je crois que la situation commande une approche beaucoup plus ferme. Si les normes prévues par la LCPE sont censées avoir une portée nationale, alors les provinces doivent respecter un critère réel d'équivalence. C'est ce qui se produit aux États-Unis. Les États doivent administrer les normes de l'EPA sous le régime de la Clean Air Act, mais il existe des critères très rigoureux définis par l'EPA des États-Unis quant à savoir si elle permet cela. Par le passé, l'EPA a retiré aux États qui n'avaient pas connu un rendement adéquat le droit d'établir des dispositions d'équivalence et a pris en main elle-même l'administration du régime réglementaire de la Clean Air Act au sein de l'État.
Il s'agit d'une approche beaucoup plus ferme de la part du gouvernement fédéral. Cela n'empêche pas des relations harmonieuses entre le gouvernement fédéral et les provinces. Je ferais valoir que c'est plus juste pour les provinces qui prennent des mesures et obtiennent des résultats. Elles ne sont pas désavantagées par rapport à d'autres provinces qui disent: « Oh, oui, nous avons un accord sur une disposition d'équivalence », mais qui n'ont rien fait.
L'autre chose qui m'a troublé grandement, dans le cadre de mon enquête, c'est que je ne pouvais pas trouver d'évaluation du rendement des provinces relativement à l'équivalence existante ou à l'accord administratif. Je serais extrêmement prudent avant d'assouplir les règles à l'égard de ces provinces sans avoir de meilleures données probantes sur le rendement selon le régime existant.
Ce qui est intéressant, c'est que lorsque la LCPE a été déposée initialement — et vous y avez sûrement participé ou vous étiez encore jeune alors, et je ne l'étais pas —, le ministre fédéral avait mis en place deux règles. La première était que vous deviez avoir une réglementation égale et l'autre était que vous deviez disposer de politiques et de stratégies équivalentes en matière d'application. Cela semble avoir été mis de côté.
Une des choses sur lesquelles nous n'avons pas eu le temps de nous pencher est qu'il existe a une deuxième loi, n'est-ce pas? Il y a la loi d'application en ce qui concerne l'environnement que Jim Prentice a promulguée. Cela a toujours été censé faire partie de la LCPE. Nous devons aussi demander quels sont les mécanismes qui assurent l'application de la loi et la conformité? Tout d'abord, on doit réglementer et établir la norme.
Je demeure profondément troublée du fait que la première substance prioritaire, le mercure, n'est toujours pas réglementée. Je crois que cela dénote un grave problème avec la loi et les attitudes des gens envers cette loi.
Je crois que vous avez tous fait des recommandations extrêmement pertinentes. Nous allons avoir beaucoup de plaisir en essayant de rédiger notre rapport. Il sera aussi épais que la loi.
Je n'ai plus de question. Je tiens à remercier tout le monde des excellents témoignages.
Monsieur Krewski, pour revenir aux interdictions par présomption, nous avons entendu que certains des autres témoins soutenaient ces interdictions. Je me demande si vous avez une position à ce sujet. Si oui, quelle incidence les interdictions par présomption auraient-elles sur le processus actuel d'évaluation au Canada?
Croyez-vous que si un pays de l'OCDE prend des mesures, alors nous devrions immédiatement en prendre aussi, du moins à titre provisoire?
Je ne suis pas certain de vouloir suivre servilement une décision prise par une autre compétence réglementaire dans un autre pays parce que celui-ci peut avoir des principes différents au moment d'élaborer et d'appliquer une réglementation environnementale. Je crois que nous nous en tirons assez bien au Canada. Ce n'est pas parce que les États-Unis interdisent un additif alimentaire que nous ferons automatiquement la même chose au Canada. Nous examinons les données scientifiques et ensuite prenons une décision responsable.
Je crois que nous devrions en prendre note, et peut-être que cela devrait être un signal d'alarme. Nous devrions l'examiner, mais je ne suis pas certain qu'une interdiction automatique serait nécessairement toujours la bonne décision.
Lorsque je pense à certains des pays de l'OCDE, je ne suis pas certain qu'ils ont nécessairement la même qualité de données scientifiques et de méthodes que nous pouvons utiliser au Canada. Je ferais beaucoup plus confiance à nos processus, à nos données scientifiques et à notre gouvernement qu'à un certain nombre de ces autres gouvernements.
J'espère que, dans l'avenir, nous nous tournerions vers un ensemble commun de principes d'évaluation des risques et de processus décisionnels relatifs aux risques. C'est dans l'intérêt de la mondialisation. Dans l'intérêt d'éviter les obstacles commerciaux non tarifaires. Je crois que nous en sommes encore loin. Une perspective internationale est toujours une bonne chose à ne pas oublier lorsqu'on élabore un texte législatif.
On a beaucoup vanté l'approche fondée sur les dangers, laquelle est en place dans l'Union européenne, comme étant meilleure qu'une approche de gestion fondée sur les risques. Les États-Unis utilisent cette approche.
Avez-vous un commentaire sur le système européen? Le trouvez-vous supérieur? Peut-être pouvez-vous mentionner certains de ses défauts en comparaison du système canadien?
Mon seul commentaire serait qu'ils sont différents. Je connais très bien le système européen parce que nous passons beaucoup de temps en Europe. Nous avons en réalité effectué des présentations relatives au règlement REACH destinées aux partisans européens du règlement. Nous passons beaucoup de temps aux États-Unis à travailler avec l'EPA sur son approche davantage fondée sur les risques. Je vois des forces et des limites aux deux.
J'espère que nous pourrons trouver un genre de — je n'essaie pas de tergiverser à ce sujet — juste milieu grâce auquel nous pourrions obtenir le meilleur des deux mondes. Il existe des domaines dans lesquels une approche prudente, une approche fondée sur les dangers est particulièrement appropriée: si nous ne faisons rien concernant les éléments majeurs, comme les changements climatiques, nous allons regretter de n'avoir rien fait. C'est probablement un domaine clé. Je ne suis pas sûr qu'on doive appliquer cette formule-là systématiquement à des activités qui produisent l'équivalent de 10 kilogrammes par année.
Je voulais formuler ce commentaire à un moment donné; aussi bien le faire maintenant.
Ce que vous avez devant vous est une merveilleuse possibilité de repenser un important texte législatif qui a un impact énorme. Beaucoup de choses ont changé depuis la version de 1999 de la loi; on doit tenir compte de nouvelles données scientifiques, de réflexions en cours sur les approches décisionnelles, de considérations possibles d'autres facteurs et même se demander si la justice environnementale a peut-être ou non un rôle à jouer... C'est seulement une très belle occasion de voir si on peut faire aussi bien que possible.
J'aime la dernière loi. Je m'attends à ce que la prochaine soit encore meilleure.
Merci.
Je vais poser la question suivante aux quatre témoins: certains d'entre vous ont-ils été consultés par le gouvernement relativement aux modifications futures de la LCPE? Je parle non pas du présent Comité, mais du gouvernement lui-même.
Aucun d'entre vous n'a été directement consulté?
Nous avons été consultés concernant les données scientifiques et la façon dont nous les utilisons, mais pas à propos de la LCPE.
Je suis curieuse. Habituellement, je ne pose pas de questions, mais j'en ai une, et toutes les bonnes personnes qui peuvent y répondre sont dans la salle. J'ai été grandement impressionnée par ce que vous nous avez dit aujourd'hui.
Nous savons que les niveaux de CO2 montent et que, à un moment donné, celui-ci est toxique pour les humains. Avons-nous une idée de la limite? Nous connaissons la quantité de CO2 qui pourrait tuer une personne, mais que se passe-t-il ailleurs? Ces niveaux augmentent. Savons-nous quels taux de CO2 influent sur le fonctionnement et la santé des gens? Avons-nous une idée de ce qu'est le CO2, de sa toxicité et de ses taux? Y a-t-il des gens qui réalisent une étude à ce sujet?
Je vais d'abord tenter de répondre.
Je crois que la réponse est une combinaison de ce qui est sécuritaire à l'échelle mondiale. On peut engager un débat pour savoir si c'est 2° ou 1,5°, peut-être...
Je ne pensais pas aux effets du réchauffement climatique. Je comprends cela. Je pense au produit chimique réel, à la qualité de l'air, au CO2 comme substance toxique.
En toute honnêteté, je crois qu'on a jugé le CO2 toxique en vertu de la LCPE à cause de son effet dans les émissions de gaz à effet de serre, non pas en raison de...
Je comprends cela, mais il me semble que nous nous sommes concentrés sur l'aspect de gaz à effet de serre du CO2 et de son taux croissant dans l'atmosphère, mais qu'en est-il de sa toxicité? Savons-nous à quel niveau il commence à influer sur le fonctionnement de l'être humain?
Je n'ai pas les résultats des tests relatifs à la DL 50 pour le CO2, mais je crois que nous sommes très loin de la toxicité du CO2 dans des concentrations ambiantes. S'il s'agissait de sulfure d'hydrogène, ça serait une tout autre histoire: si vous passez de 1 ppm à 5 ppm, vous passez d'un environnement sécuritaire à un qui est mortel en peu de temps.
N'oubliez pas qu'une des dimensions est, bien sûr, que la définition de toxicité dans la loi existante est très large et a été en réalité élaborée dans le but précis d'être en mesure de bien décrire une chose qui a un effet toxique non pas directement au niveau des gens, mais à un niveau environnemental systémique. C'est la raison pour laquelle il a été jugé toxique.
En effet, lorsqu'on a initialement élaboré cette définition, on ne pensait pas au CO2. On pensait en fait aux CFC et aux substances appauvrissant la couche d'ozone. On voulait s'assurer que la définition serait assez large afin de cerner ces types de menaces mondiales. Je crois que la classification des six substances du Protocole de Kyoto d'après la LCPE démontre que la définition est large et flexible pour cerner ces menaces très sérieuses.
J'étais en train de penser que nous savons lorsqu'il est toxique — lorsqu'on expire —, mais existe-t-il des effets que nous connaissons sur des personnes pouvant être plus susceptibles? Nous savons que, dans le cas d'autres produits chimiques et d'autres mélanges, des personnes sont touchées par certains produits chimiques et d'autres non.
Connaissons-nous le gradient, ou sommes-nous bien au-delà de celui-ci?
Si vous retirez un atome d'oxygène de cette molécule et la transformez en monoxyde de carbone, nous avons des données épidémiologiques qui montrent que, dans les concentrations ambiantes, il existe des effets néfastes sur la santé qui peuvent être démontrés dans la population générale.
Je ne suis pas préoccupé par la toxicité du dioxyde de carbone, à ce stade, dans des concentrations ambiantes.
Excellent.
Je sais qu'il y a beaucoup de... Oui, je sais, ce sont les concentrations, n'est-ce pas?
Où en sommes-nous? Nous avons terminé.
Nous avons une possibilité ici pour M. Gerretsen de poser les dernières questions.
Merci, madame la présidente.
Je veux seulement revenir sur un commentaire que Mme Collins a fait il y a environ 20 minutes. Il concernait les mesures préventives et le fait d'avoir un argument économique pour agir en amont au lieu d'en aval, en ce qui concerne particulièrement la santé. Malheureusement, je crois que les politiques sont très souvent fondées sur une émotion, laquelle est très souvent une réaction.
Toutefois, à cette fin, comment croyez-vous que la LCPE peut être particulièrement réformée afin d'encourager ce type de comportement?
Je crois que ces comportements sont compris dans toutes les recommandations qui vous ont été présentées par Mme Scott, M. Boyd, Ecojustice, l'Association canadienne du droit de l'environnement...
Oui, absolument. C'est le but de ces recommandations.
Je voudrais seulement ajouter que l'émotion peut aussi jouer en votre faveur. Pour ce qui est de la question de l'harmonie entre les provinces et de suggérer l'idée aux provinces et aux électeurs... on doit un peu éduquer le public, que ce soit au sein du gouvernement ou à l'extérieur de celui-ci.
En réalité, tout le monde ici a perdu quelqu'un en raison du cancer. Tout le monde connaît une famille avec un enfant atteint d'asthme. On aurait pu empêcher certaines de ces pertes. En fait, je crois qu'on peut utiliser les émotions humaines naturelles des gens qui sont des émotions appropriées afin d'obtenir des appuis.
Monsieur Krewski, M. Fast posait des questions plus tôt sur l'approche fondée sur les risques, et vous avez semblé indiquer que vous croyez qu'avec la technologie, l'évaluation des risques pourrait être effectuée sans qu'il faille adopter une approche fondée sur les dangers. J'aimerais préciser les choses parce que vous avez parlé de risques et de dangers au cours de votre exposé. Je penserais que l'efficacité de ces technologies et la réduction des coûts liée à leur utilisation feraient en sorte en réalité qu'une approche fondée sur les risques et les dangers soit équitable et que vous n'excluiez pas nécessairement l'approche fondée sur les risques dans votre témoignage.
Je crois que les deux approches peuvent être appliquées dans le bon contexte. De nombreux critères relatifs à la prise de décisions que je soulignerais dépendront du contexte des risques. Parlons-nous d'un contaminant environnemental? D'un médicament qui peut sauver des vies? D'un nouveau pathogène? Voilà des contextes différents relatifs à la prise de décisions.
Toutefois, en ce qui concerne les enjeux environnementaux, je crois qu'une approche préventive et une approche fondée sur les risques ont toutes deux leur place. Plus nous avons de données, plus notre approche sera fondée sur les risques.
C'est ce que je disais. Du point de vue de la population vulnérable, compte tenu de ces technologies, l'approche nous donne en réalité la capacité de recueillir beaucoup plus de données et de les utiliser pour soutenir cet aspect de l'approche.
Oui. Nous pouvons évaluer de nombreux autres contextes différents avec les nouvelles technologies et obtenir plus de renseignements sur des sous-groupes différents de populations.
Monsieur Winfield, quels sont certains des changements qui n'ont pas été apportés en 1999 qui, à votre avis, ont été des occasions manquées?
Je crois que nous n'avons pas assez de temps pour que M. Winfield réponde à la question et je crois que vous avez déjà abordé plusieurs aspects aujourd'hui.
Voulez-vous répondre rapidement?
Je soulignerais de nouveau quelques thèmes. Le premier est le besoin de mesures après qu'une substance a été jugée toxique. L'autre est le thème de la réduction de la LCPE au rang de loi résiduelle, laquelle a été présentée au cours des dernières étapes du processus de 1999. Je crois qu'on devrait l'examiner très attentivement relativement aux provinces, mais aussi en ce qui concerne les autres lois et les autres ministères. On en parle beaucoup également dans la présentation du gouvernement afin de poursuivre dans cette voie. Je crois qu'il s'agirait d'une erreur... La LCPE est censée être le point de référence. Elle est censée être la norme à l'aune de laquelle on évalue d'autres lois et ce qui se produit sous le régime d'autres lois lorsqu'on mesure des substances préoccupantes. C'est à cet égard que je tendrais à souligner les préoccupations relatives au point où nous en étions rendus en 1999.
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