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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 139 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 janvier 2019

[Énregistrement électronique]

(1545)

[Traduction]

    Bonjour à tous, et bon retour au travail. C'est la première séance de notre comité en 2019.
    Avant de débuter, je veux souhaiter la bienvenue à M. Shipley qui est notre invité pour aujourd'hui, ainsi qu'à Mme May qui nous fait le plaisir de se joindre à nous.
    Bienvenue, Elizabeth.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à nos témoins. Nous sommes vraiment heureux que vous ayez tous pu être des nôtres aujourd'hui.
    Je vous rappelle notre mode de fonctionnement. Chacun de vous aura droit à 10 minutes pour ses observations préliminaires. Nous passerons ensuite aux questions des membres du Comité, à raison de six minutes chacun avec alternance entre les partis.
    J'utilise un système de cartons pour la gestion du temps. Lorsqu'il vous restera une minute, je vous montrerai le carton jaune. C'est simplement pour vous avertir qu'il serait temps de commencer à conclure. Je l'utiliserai tout aussi bien pour vos déclarations que pour la période des questions et réponses. Lorsque vous aurez épuisé tout le temps à votre disposition, je vous montrerai le carton rouge. Je ne vous demande pas de vous arrêter en plein milieu d'une phrase, mais le moment sera venu pour vous de conclure pour que nous puissions passer au prochain intervenant.
    Nous poursuivons aujourd'hui une étude que nous avons amorcée avant Noël. Elle porte sur le leadership international. Le Comité a convenu d'accorder un certain temps, soit quatre heures, à la tarification du carbone dans le contexte de cette étude sur le leadership international. C'est donc le thème de la séance d'aujourd'hui.
    Je vais vous présenter au fur et à mesure.
    Monsieur Leach, voulez-vous commencer? Je crois que vous comparaissez aujourd'hui à titre personnel. Vous avez donc 10 minutes pour votre déclaration préliminaire.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité.

[Français]

     Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui.

[Traduction]

    Je suis très heureux d'être des vôtres aujourd'hui pour présenter mes arguments en faveur de la tarification du carbone et déboulonner certains des mythes entourant les politiques en la matière.
    Je suis professeur agrégé au programme d'énergie et environnement de l'Université de l'Alberta. J'ai été auparavant chercheur invité à Environnement Canada, soit en 2012 et 2013, et président du groupe d'experts de l'Alberta sur le leadership en matière climatique en 2015. Je crois donc être la seule personne à avoir travaillé dans le dossier des politiques climatiques au sein des gouvernements de Rachel Notley et de Stephen Harper. Pour votre gouverne, j'ajoute que j'ai aussi effectué depuis 2016 certaines analyses aux fins du programme fédéral de tarification du carbone dont nous traitons notamment aujourd'hui.
    Le simple fait que nous soyons réunis pour discuter de ces questions est révélateur. Malgré que la tarification du carbone s'applique déjà depuis 10 ans au Canada et depuis plus longtemps encore ailleurs dans le monde, nous sommes encore en train de débattre de la pertinence de ces politiques qui soulèvent une opposition farouche et donnent lieu à beaucoup de désinformation.
    Cela n'empêche pas la quasi-totalité des économistes de convenir que la tarification du carbone permet de réduire les émissions au coût le plus bas possible pour l'économie. Je suis sans doute loin d'être le premier à vous le dire, et mes collègues ici présents auront probablement le même message à vous transmettre. Essayons de mieux comprendre pourquoi il en est ainsi. En mettant à contribution les forces du marché, on permet aux individus et aux entreprises de décider non seulement de quelle manière et à quel moment ils vont réduire leurs émissions, mais aussi de quelle façon et en quelle occasion ils vont se permettre d'en produire. Chacun étant davantage au fait de la valeur de ces émissions, il est mieux à même de décider s'il peut se permettre ou non le prix à payer. Les grands principes économiques nous ont appris qu'il fallait appliquer ces politiques de la façon la plus générale possible au sein de l'économie pour pouvoir en optimiser les bénéfices.
    C'est dans ce contexte que j'aimerais traiter dans mes observations préliminaires de quelques questions et mythes qui circulent couramment au sujet de la tarification du carbone.
    Il y a notamment beaucoup de gens qui se demandent pour quelle raison on devrait taxer les émissions des consommateurs ou même s'en prendre à ceux-ci de quelque manière que ce soit. Nous entendons des gens de toutes les allégeances politiques, pour dire les choses comme elles sont, faire valoir que le problème des émissions polluantes au Canada est le fait des grandes industries. On a encore pu le constater tout récemment lorsque le premier ministre Ford a réclamé que l'on pénalise les pollueurs, et non les navetteurs. Cette façon de voir les choses est toutefois fondée sur des bases erronées. Environ les deux tiers de nos émissions à l'échelle nationale proviennent de petits émetteurs — édifices, maisons, individus, ateliers, etc. — et non de grandes installations industrielles. Dans certaines provinces, cette proportion dépasse les 90 %. Si vous mettez en place des politiques exemptant ces émissions ou ne les tarifiant que partiellement, vous vous retrouvez avec des objectifs nationaux de réduction beaucoup plus coûteux à atteindre et un petit nombre d'industries qui se voient imposer une tarification punitive.
    Qu'en est-il des incidences sur les Canadiens à faible revenu? L'expérience nous a certes démontré qu'il était primordial pour le gouvernement de l'Alberta de ne pas mettre en oeuvre une politique d'application régressive. La situation est tout aussi préoccupante pour les résidants des régions rurales. Les économistes reconnaissent que la tarification du carbone peut être régressive, bien que ce ne soit pas nécessairement toujours le cas, et qu'il y a vraiment lieu de s'inquiéter des répercussions pour les ménages et les résidants ruraux. Nous ne devons pas perdre de vue l'importance de la répartition de ces impacts, mais constater également que les gouvernements qui ont opté pour la tarification du carbone ont pu utiliser les revenus qu'ils en ont tirés pour atténuer en grande partie ces répercussions au moyen de remises directes, de prestations fiscales et de mesures semblables. Il faut toutefois éviter de conclure d'emblée que ces remises ou ces transferts sont suffisants pour que chacun se retrouve en meilleure posture. Ce n'est pas le cas. Dans chaque tranche de revenus, on trouvera encore des gens dont la situation s'est détériorée en raison de ces politiques.
    Il faut en outre bien comprendre que l'efficacité de la tarification du carbone n'est pas minée par le versement de remises de la sorte. La tarification continue de s'appliquer aux émissions. C'est ce qui permet de modifier les comportements. Ce n'est pas le fait que le revenu disponible de chacun décroît qui importe, mais plutôt la fluctuation dans les prix relatifs. Il m'arrive de noter que ceux qui sont les plus préoccupés par les impacts régressifs de ces mesures ont souvent d'importantes réserves quant à la répartition des revenus visant à atténuer ces mêmes préoccupations.
    Nous nous inquiétons par ailleurs du sort des grandes industries, et plus particulièrement des répercussions sur la capacité concurrentielle des secteurs tributaires du commerce. Je sais que vous vous intéressez également aux aspects planétaires de la tarification du carbone. Nous devons d'abord et avant tout reconnaître que ces préoccupations sont fondées et touchent surtout nos provinces qui dépendent des ressources naturelles, comme c'est le cas chez moi en Alberta. Là également, la recherche économique pointe vers une solution évidente qui repose sur l'octroi de crédits d'émissions en fonction de la production économique. En appliquant cette solution parallèlement à la tarification du carbone, on évite de diminuer la rentabilité globale du secteur tout en continuant d'envoyer le message que les émissions seront tarifées et que les entreprises ont tout intérêt à innover. Comme on pouvait s'y attendre, ceux qui s'inquiètent au sujet de la capacité concurrentielle des entreprises ont aussi des réserves relativement à l'octroi de tels crédits. À titre d'exemple, nous avons entendu le chef de l'opposition les qualifier d'exemptions.
    C'est d'ailleurs l'un de mes principaux sujets de recherche. Je m'emploie à déterminer si cela peut correspondre à une exemption. Je peux vous dire que ce n'est pas le cas. Ainsi, les entreprises du secteur des sables pétrolifères tireraient les mêmes avantages d'une technologie réduisant leurs émissions dans le cadre d'un régime de tarification du carbone assorti d'octrois de crédits fondés sur la production que si l'on se limitait à une simple tarification du carbone. Ce ne serait pas le cas avec une exemption à proprement parler.
    On peut entendre toutes sortes d'affirmations concernant l'innovation. Je vais vous donner un exemple. Dans un article publié en décembre dans le New York Times, le président du comité de l'environnement du Sénat des États-Unis indiquait que l'on allait pouvoir rendre l'énergie aussi propre que possible aussi rapidement que possible sans augmenter les coûts pour les consommateurs grâce à l'investissement, l'invention et l'innovation. On entend souvent des arguments de la sorte. Nous y voyons essentiellement une dichotomie qui oppose tarification du carbone et innovation. En fait, ce n'est pas vraiment un choix que nous avons à faire. Les économistes — et David Popp en est un excellent exemple — constatent sans cesse que les politiques fondées sur la tarification du carbone offrent de meilleurs incitatifs à l'innovation que la réglementation tout en évitant le versement de subventions directes.
    Faut-il en conclure pour autant que la tarification du carbone est le remède à tous les maux ou la seule option qui s'offre à nous? Absolument pas. On ne devrait jamais affirmer une chose pareille. La réglementation, les subventions et les autres mesures dans le même sens peuvent aussi avoir des répercussions importantes sur les émissions. Les faits nous démontrent toutefois que la tarification du carbone est la solution à privilégier si l'on veut réduire les émissions au coût total le plus bas possible pour l'économie et stimuler au maximum l'innovation.
    Je vous remercie de m'accueillir ici aujourd'hui.
(1550)

[Français]

     Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Rivers, qui témoigne également à titre personnel.
    Vous avez vous aussi droit à un maximum de 10 minutes pour vos observations préliminaires.
    Merci beaucoup de m'avoir invité à prendre la parole devant vous au sujet du leadership international, notamment en matière de tarification du carbone.
    Je suis économiste de l'environnement et je m'intéresse à la conception des politiques touchant le changement climatique. Mes recherches portent sur les coûts et avantages des différentes politiques ainsi que sur leurs répercussions sur les revenus des ménages et les émissions de gaz à effet de serre. Les observations que je vais vous présenter aujourd'hui s'appuient donc sur ces recherches que j'ai menées.
    Je veux souligner d'entrée de jeu que la quasi-totalité des économistes s'entend pour dire que la tarification des émissions de carbone est la meilleure solution pour lutter contre les changements climatiques. Comme vous le savez sans doute, il est plutôt rare que les économistes s'entendent ainsi. La récente déclaration commune d'économistes américains en faveur de la tarification du carbone qui a été publiée dans le Wall Street Journal est donc remarquable du fait qu'elle témoigne du consensus qui se dégage en la matière. Cette déclaration en faveur de la tarification du carbone a notamment été signée par les quatre anciens présidents de la Réserve fédérale américaine qui sont toujours vivants, 27 lauréats du Prix Nobel d'économie — soit presque tous ceux qui sont encore de ce monde — et 15 anciens présidents du Conseil consultatif économique. Des affirmations semblables ont été faites par des économistes canadiens formant un échantillon très représentatif de la profession. En outre, aucun des économistes chevronnés sondés par le Chicago Booth School of Business n'a contesté la pertinence de la tarification du carbone.
    La tarification du carbone est le meilleur moyen pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du fait qu'elle mise, pour ce faire, sur la main invisible du marché. En l'absence d'une tarification du carbone, les individus et les entreprises n'ont aucun incitatif à réduire leurs émissions. Ils peuvent continuer à utiliser l'atmosphère comme un dépotoir gratuit. Si l'on applique une tarification appropriée du carbone, les particuliers et les entreprises sont incités à réduire leurs émissions. En outre, une tarification du carbone encourage les entreprises à orienter leurs efforts de recherche vers les technologies à faibles émissions, ce qui réduira les coûts à venir pour la réduction de ces émissions, comme vient de le mentionner Andrew.
    Il est important de noter que la tarification du carbone offre une grande flexibilité en permettant aux individus et aux entreprises d'adapter leurs interventions à leur situation particulière. C'est l'une des principales caractéristiques distinguant la tarification d'une approche réglementaire pour la réduction des émissions, et c'est pour cette raison que la tarification du carbone est considérée comme beaucoup plus efficiente du point de vue économique que l'approche réglementaire.
    Je veux profiter de mon temps de parole aujourd'hui pour vous faire part de deux éléments qui ressortent de mes recherches sur la question. Premièrement, tout indique que la tarification du carbone fonctionne et permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Deuxièmement, les coûts économiques de la tarification du carbone sont faibles.
    Concernant le premier point, les faits probants s'accumulent en provenance des différentes régions du monde qui ont imposé une tarification du carbone. Ces éléments démontrent que la tarification a permis de réduire les émissions. Je me suis penché sur le cas de la Colombie-Britannique qui impose une tarification depuis 10 ans. Mes recherches révèlent qu'un prix du carbone fixé à 30 $ la tonne s'est traduit par une diminution de la consommation d'essence et des émissions dans une proportion d'environ 8 % par rapport à ce que l'on aurait pu observer en l'absence d'une tarification. Au moins trois autres études en arrivent à des conclusions très similaires en s'appuyant sur des méthodes et des bases de données différentes. D'autres études réalisées en Colombie-Britannique ont noté des répercussions semblables de la tarification du carbone sur la consommation de diesel et la consommation résidentielle de gaz naturel.
    En Alberta, la tarification du carbone a déjà considérablement réduit les émissions provenant de la production d'électricité. En Europe, elle a été utilisée pour réduire les émissions du secteur des transports en Suède et celles de l'industrie en France, en Allemagne et au Royaume-Uni. C'est un peu la même chose en Colombie-Britannique où les recherches indiquent que la tarification du carbone a entraîné une réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs visés. C'est bien sûr un résultat qui ne devrait pas nous surprendre. Lorsque le prix d'un bien ou d'un service augmente, sa consommation par les particuliers et les entreprises diminue.
    J'aimerais vous parler en second lieu des répercussions économiques de la tarification du carbone. Dans les endroits où la tarification s'applique depuis un bon moment déjà, il n'est pas possible d'observer quelque répercussion que ce soit sur le rendement de l'économie. Ou bien l'impact est nul, ou encore il est trop faible pour être mesurable. À titre d'exemple, la Colombie-Britannique impose une tarification sur le carbone depuis 10 ans, et c'est la province qui a connu la plus forte croissance économique au Canada pendant cette période.
    Des économistes ont également mené des centaines d'études visant à évaluer les impacts possibles de la tarification du carbone sur l'économie à partir de modèles informatiques. Un vaste consensus se dégage de leurs travaux. L'incidence de la tarification du carbone sur l'économie sera très faible. À titre d'exemple, le forum de modélisation énergétique de l'Université Stanford a récemment regroupé une douzaine de spécialistes pour mesurer les impacts éventuels d'une tarification du carbone. Ils ont unanimement indiqué que les impacts d'une politique semblable seraient très faibles, et ce, même si le niveau de tarification devait augmenter considérablement au fil des ans. De nombreux travaux de recherche nous confirment également que la tarification du carbone sera moins coûteuse que les autres approches envisagées pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
    À mon avis, l'approche de tarification du carbone adoptée par le gouvernement fédéral semble donc tout à fait justifiée, compte tenu des éléments d'information disponibles. Elle permettra de réduire les émissions à un coût global très faible pour l'économie et inférieur à celui des autres approches considérées.
(1555)
    L'approche adoptée par le Canada s'appuie sur 15 années d'expérience internationale en matière de tarification du carbone. Elle positionne le Canada parmi les pays à l'avant-garde des efforts déployés pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre.
    Je vous offre une dernière piste de réflexion en terminant. Bien que tout indique que la tarification du carbone permet de réduire les émissions, il ressort aussi clairement que le niveau de tarification actuellement adopté n'est pas suffisant pour nous permettre d'atteindre nos objectifs environnementaux à long terme. Le gouvernement devrait, certes, s'employer en priorité à faire fond sur l'approche actuelle afin de bien cibler les politiques qui contribueront à faire chuter considérablement nos émissions d'ici le milieu du siècle et par la suite.
    Merci beaucoup pour le temps que vous me consacrez.
    Merci.
    La prochaine déclaration préliminaire sera celle de M. Dale Beugin de la Commission de l'écofiscalité du Canada.
    À vous la parole.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui pour traiter de tarification du carbone. Je représente la Commission de l'écofiscalité du Canada, un groupe d'économistes des différentes régions du pays. Le travail des membres de la Commission est appuyé par un conseil consultatif comptant des représentants de tous les secteurs de la sphère politique.
    La Commission a produit de nombreux rapports de recherche recommandant vivement la tarification du carbone comme approche à privilégier du point de vue économique pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre au Canada. Les observations que je vais vous soumettre aujourd'hui s'articulent autour des résultats attendus avec la tarification du carbone comparativement à d'autres options stratégiques et approches possibles.
    Considérons d'abord les impacts environnementaux. Comme nous le savons tous, toute politique climatique vise d'abord et avant tout la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est essentiel d'adopter une politique pour atteindre cet objectif. Sans intervention ciblée, nos émissions vont continuer d'augmenter et nous n'atteindrons jamais nos cibles nationales. Ces émissions auront de plus contribué au réchauffement climatique à l'échelle planétaire, un phénomène dont les coûts seront sans doute faramineux. La récente évaluation climatique nationale menée aux États-Unis mettait d'ailleurs en lumière des impacts planétaires et des coûts très importants pour l'économie. Il faut s'attendre à des répercussions semblables dans les différents secteurs au Canada.
    Il ressort clairement, aussi bien de la théorie économique que de l'application pratique des politiques, que la tarification du carbone permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les entreprises et les pollueurs sont ainsi encouragés à prendre les mesures nécessaires pour éviter cette tarification, que ce soit en adoptant de nouvelles technologies ou en modifiant leurs comportements. À plus long terme, cela permet aussi d'accroître la valeur des technologies émergentes permettant de réduire davantage les émissions à un coût inférieur. Comme l'indiquait M. Rivers, la tarification du carbone peut donc être un outil très puissant pour l'innovation à long terme aux fins de la réduction des émissions.
    Des recherches rigoureuses menées par différents économistes nous indiquent que les émissions de gaz à effet de serre seraient plus élevées dans une proportion allant de 5 % à 15 % si la Colombie-Britannique n'avait pas mis en oeuvre cette tarification du carbone. Les émissions auraient été plus fortes en l'absence d'une telle politique. Les premières indications nous laissent également entrevoir que l'Alberta s'éloigne graduellement de la production d'électricité à partir du charbon, notamment en raison de cette tarification du carbone. Des résultats semblables ont été constatés au sein du réseau électrique au Royaume-Uni, et on signale une chute marquée de l'intensité des émissions en Suède où la tarification du carbone est appliquée depuis longtemps.
    Il faut noter qu'il existe d'autres politiques pouvant mener à une réduction des émissions. La réglementation peut exiger des résultats précis, que ce soit via l'application de normes de rendement fixant le degré d'intensité des émissions au niveau des entreprises ou du secteur, ou rendant même obligatoire l'adoption d'une technologie donnée. Les subventions peuvent aussi permettre de réduire les émissions. On peut se servir des deniers publics pour offrir aux pollueurs des incitatifs visant l'adoption de technologies, de processus ou de comportements qui vont se traduire par une réduction des émissions.
    Il faut toutefois souligner que ces différentes options stratégiques pour la réduction des émissions ne produisent pas des résultats comparables lorsque d'autres facteurs sont pris en compte. C'est le cas par exemple lorsqu'on considère les impacts globaux sur l'économie. La tarification du carbone permet d'obtenir un certain niveau de réduction des émissions au coût le plus faible possible, comparativement aux autres solutions envisageables. Cela s'explique par la marge de manoeuvre qui est ainsi offerte aux pollueurs. Pour éviter de payer une taxe sur le carbone, les particuliers et les entreprises peuvent choisir eux-mêmes la manière dont ils vont s'y prendre pour réduire leurs émissions et le moment où ils vont le faire. C'est ce qui explique le résultat des analyses économiques révélant que l'impact sur l'économie sera sans doute très faible, et ce, même si le prix du carbone devient très élevé. Nos propres exercices de modélisation prévoient une forte croissance économique au Canada avec une tarification du carbone qui atteindra 100 $ la tonne en 2027. Peu importe la manière dont les revenus tirés de cette tarification seront recyclés dans l'économie, la croissance demeurera forte. Les répercussions sur la croissance seront très faibles dans le pire des cas, et négligeables suivant plusieurs de ces scénarios.
    La tarification du carbone est en vigueur depuis 2008 en Colombie-Britannique, et cette province est l'une de celles qui connaît la plus forte croissance au pays. Cette performance ne s'explique pas par la tarification du carbone, mais l'expérience de la Colombie-Britannique a démontré que cette politique n'empêche pas une forte croissance de l'économie.
    Qu'en est-il des autres politiques? Les subventions sont plus coûteuses que la tarification du carbone pour trois raisons. Elles exigent des gouvernements qu'ils choisissent des gagnants en déterminant quelles technologies ou quelles activités seront subventionnées. Les gouvernements ne font pas toujours des choix éclairés en la matière, et il serait préférable qu’on laisse le marché en décider. Comme de telles subventions exigent de puiser à même les deniers publics, il faut augmenter les impôts ou réduire les autres services gouvernementaux. Enfin, ces subventions sont souvent versées à des pollueurs qui auraient pris la mesure visée de toute manière. À titre d'exemple, l'analyse de notre commission a démontré que les subventions versées pour l'achat de voitures électriques coûtent environ 400 $ la tonne de réduction d'émissions. Cela s'explique notamment du fait que la subvention est versée à quelqu'un qui aurait acheté un véhicule électrique de toute manière, c'est-à-dire même en l'absence de subvention ou avec une subvention beaucoup moins élevée.
    La réglementation est généralement plus coûteuse que la tarification du carbone parce qu'elle s'appuie sur le gouvernement, plutôt que sur le marché, pour la détermination des moyens utilisés, des secteurs visés ou du moment choisi pour la réduction des émissions. Une réglementation flexible mise en oeuvre de façon optimale et conçue pour tabler sur les mécanismes du marché comme le fait la tarification du carbone pourrait produire des résultats presque aussi intéressants que la tarification elle-même.
(1600)
    Voici un autre exemple. Selon l'analyse de la Commission de l'écofiscalité du Canada, la combinaison de règlements et de subventions à l'éthanol coûte environ 180 $ par tonne d'émissions réduites. Là encore, les règlements et subventions favorisent certaines technologies plutôt que de rester neutres quant à l'endroit et au moment où les émissions seront réduites.
    Pour ce qui est des effets sur l'entreprise, une tarification du carbone bien conçue peut faire diminuer les émissions tout en protégeant la compétitivité des entreprises canadiennes, même si certains de nos partenaires commerciaux n'imposent pas de tarification du carbone. Selon l'analyse de la Commission, une tarification du carbone axée sur les résultats inciterait les entreprises à améliorer leur rendement pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, plutôt qu'à diminuer leur production ou à choisir d'investir ailleurs. C'est l'approche privilégiée par l'Alberta dans son règlement sur les émetteurs de gaz désignés, qui a ensuite été amélioré grâce à son règlement sur l'encouragement à la compétitivité en matière de carbone. C'est également la solution proposée dans le modèle fédéral.
    La tarification du carbone procure plus d'avantages aux entreprises que d'autres formules, comme la réglementation, parce qu'elle est simple et transparente, souple et non prescriptive et qu'elle permet de réduire les coûts. C'est peut-être pour ces raisons que la Chambre de commerce du Canada a indiqué récemment appuyer la tarification du carbone plutôt que la réglementation pour susciter une transition vers une économie à faibles émissions de carbone au Canada.
    Pour ce qui est de l'incidence sur les ménages, quand on évalue l'effet net de la tarification du carbone sur les ménages, individuellement, il faut tenir compte à la fois du prix du carbone et de l'utilisation des revenus générés. Une analyse crédible réalisée par le gouvernement fédéral conclut que, pour 80 % des ménages, les économies dépasseront les coûts associés au carbone selon la politique fédérale de tarification du carbone. Il faut souligner que ces économies n'affaibliront en rien l'incitatif à la réduction des émissions. Elles seront indépendantes du prix du carbone lui-même. Les émetteurs peuvent en effet réduire leurs émissions et générer une réduction de taxes. Enfin, la tarification du carbone peut également être très équitable. Les économies consenties aux ménages peuvent nous garantir que cette politique n'ait pas de conséquences démesurées sur les ménages à faible revenu.
    Qu'en est-il des autres politiques? Il faut souligner que les autres politiques engendrent aussi des coûts pour les ménages, alors qu'elles ne présentent pas l'avantage du recyclage des recettes. La réglementation impose des coûts directs aux ménages, puisque les entreprises refileront aux consommateurs les coûts qu'ils devront absorber pour s'y conformer. Comme nous l'avons déjà dit, pour réduire les émissions de tant, un règlement exige des coûts plus élevés que la tarification du carbone.
    De même, il faut des revenus pour pouvoir accorder des subventions. Cela signifie qu'il faut, soit réduire d'autres dépenses gouvernementales, soit générer de nouveaux revenus au moyen de taxes, ce qui représente des coûts pour l'économie et pour les ménages.
    Permettez-moi de résumer brièvement ces arguments.
    La tarification du carbone fonctionne. C'est l'option stratégique la plus rentable pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Elle peut et doit être conçue pour protéger la compétitivité des entreprises, tout en assurant un régime équitable pour les ménages à faible revenu.
    Je vous remercie infiniment de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui. J'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci.
    Passons à M. Mark Cameron, directeur exécutif de Clean Prosperity.
    Je souhaite remercier le Comité de m'avoir invité à comparaître cet après-midi en compagnie de ce groupe particulièrement relevé de témoins. Je suis la seule personne ici aujourd'hui à ne pas être économiste. Cependant, j'ai passé beaucoup de temps dans des salles de comité comme celle-ci dans ma vie, à titre de membre du personnel de députés et de ministres, donc je suppose que je suis ici pour proposer une interprétation simultanée de l'« économien » au français.
    Canadians for Clean Prosperity est une organisation à but non lucratif réclamant des solutions axées sur le marché pour relever les défis environnementaux. Depuis notre création, il y a cinq ans, nous militons surtout pour une taxe sur le carbone sans incidence sur les revenus, que nous considérons comme la meilleure solution aux défis que présentent les changements climatiques pour les raisons que mes collègues témoins ont déjà évoquées. Nous participons également à divers débats sur la tarification du carbone au Canada, sur les régimes fédéral et provinciaux.
    Aujourd'hui, je souhaite vous expliquer pourquoi la tarification du carbone et l'approche fédérale actuelle consistant à adopter une loi qui sera le filet de sécurité sur la tarification du carbone sont si importantes et en quoi elles peuvent contribuer à la quête internationale de solutions aux changements climatiques.
    Je remarque que le Comité étudie le volet leadership international du cadre pancanadien. Je suis d'avis que l'exemple que présente le Canada avec son cadre de tarification du carbone et la loi fédérale destinée à en assurer la cohérence partout au pays établit un précédent très important à l'échelle internationale.
     Si le Canada réussit, au cours des prochaines années, à mettre en place un cadre national de tarification du carbone qui s'appuie sur ce filet de sécurité, nous nous positionnerons comme un chef de file mondial, et il y a de bonnes raisons de croire que d'autres pays, particulièrement les États-Unis, le remarqueront. Si par contre nos efforts visant à établir un cadre national de tarification du carbone échouent pour des raisons politiques, l'exemple canadien servira d'avertissement sur la difficulté de créer un régime de tarification du carbone, ce qui pourrait dissuader d'autres pays d'agir.
    Comme vous le savez, il y a différentes formes de tarification du carbone, et le Canada les a presque toutes déjà essayées.
    Il y a d'abord la taxe sur le carbone pure et simple, qui s'applique généralement à toute combustion de combustibles fossiles, une solution pour laquelle la Colombie-Britannique a été une pionnière. À bien des égards, la taxe sur le carbone mise en place en Colombie-Britannique à l'initiative de l'ancien premier ministre Gordon Campbell est le modèle type de la façon dont une taxe sur le carbone sans incidence sur les revenus doit s'appliquer. Il a été abondamment étudié, notamment par M. Rivers.
    Il y a ensuite le modèle de plafonnement et d'échange, selon lequel une administration fixe un plafond d'émissions, et les entreprises doivent acheter des crédits d'émissions, le plus souvent au moyen d'une vente aux enchères. Le système d'échange européen et l'Initiative de l'Ouest sur le climat, en Californie, en sont les deux exemples les plus connus. D'ailleurs, le Québec — et jusqu'à tout récemment, l'Ontario — est un partenaire de l'IOC, et c'est lui qui a instauré le modèle du plafonnement et de l'échange au Canada.
    Il y a une autre variante qu'on appelle parfois le modèle de la base et des crédits, selon lequel les entreprises ont droit à des crédits d'émissions de base, qui se fondent souvent sur l'intensité des émissions dans leur secteur industriel. Si leur niveau d'émissions se situe en deçà ou au-dessus de la base, elles devront acheter des crédits ou pourront en gagner.
    Le règlement de l'Alberta sur les émetteurs de gaz désignés, adopté par le gouvernement provincial conservateur au pouvoir en 2007, en est un exemple. L'actuel règlement sur l'encouragement à la compétitivité en matière de carbone, conçu avec l'aide d'Andrew Leach, qui comparaît aujourd'hui à mes côtés, ainsi que le modèle fédéral de tarification fondé sur le rendement des grandes entreprises sont inspirés de ce modèle. J'ajouterais que la Saskatchewan et l'Ontario ont également fait des propositions très similaires pour la tarification du carbone émis par leurs entreprises. À l'heure actuelle, le modèle de tarification du carbone fondé sur le rendement en vigueur en Saskatchewan propose un tarif de 20 $ la tonne aux secteurs industriels.
    Il y a une autre variante qu'on appelle parfois le modèle des frais et des dividendes sur le carbone. Selon ce modèle, qui est en fait une variante de la taxe sur le carbone, des frais sont imposés pour toutes les émissions dues à la combustion. Le gouvernement redonne ensuite les revenus qui en découlent à tous ses citoyens sous forme de dividendes par habitant.
    Ce modèle est très populaire auprès de la population et reçoit un certain appui politique aux États-Unis. Deux organisations en particulier, le Citizens' Climate Lobby et le Climate Leadership Council, font la promotion active du modèle des frais et des dividendes. Plusieurs projets de loi ayant reçu un appui bipartisan ont été déposés au Congrès des États-Unis pour mettre ce type de modèle en place, mais aucun n'a encore été soumis au vote de la Chambre des représentants ni du Sénat.
    Au début de 2018, un certain nombre de leaders américains très en vue et de grandes entreprises ont exprimé leur appui à un plan de dividendes sur le carbone présenté par deux anciens secrétaires d'État et secrétaires au trésor républicains, James Baker et George Shultz. S'il y a une forme de tarification du carbone qui a une chance de succès politique aux États-Unis et qui pourrait recevoir un appui bipartisan, ce serait probablement une quelconque version du modèle des frais et des dividendes sur le carbone. La chose qui ressemble le plus à ce modèle qui existe actuellement dans le monde, c'est le filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone. Des frais directs sont imposés, la redevance sur les combustibles, pour toutes les émissions dues aux combustibles fossiles dans les provinces ou territoires assujettis au régime, et la loi prescrit que le gouvernement fédéral retourne à la province ou au territoire tous les revenus qu'il y a perçus.
    L'automne dernier, le gouvernement fédéral a annoncé que 90 % des revenus tirés de la redevance sur les combustibles seraient retournés directement aux ménages sous forme de remises directes par habitant accordées au premier déclarant d'un ménage, puis de remises proportionnelles accordées également au conjoint, ou au deuxième déclarant, ainsi qu'aux enfants à charge. Les 10 % qui restent seraient redistribués aux petites entreprises, aux écoles, aux hôpitaux et aux autres organisations devant absorber le prix du carbone.
    Selon l'analyse réalisée par le témoin ici présent Dave Sawyer, qui représente les Canadians for Clean Prosperity, le modèle de frais et de dividendes sur le carbone serait celui qui profiterait le plus aux ménages. En fait, le gouvernement fédéral estime qu'en Ontario, 8 ménages sur 10 bénéficieraient de ces incitatifs fédéraux à l'action climatique.
(1605)
    Ce qui se joue actuellement dans les quatre provinces canadiennes où vit environ 50 % de la population et qui génèrent environ 50 % du PIB, c'est le premier test à grande échelle d'application concrète du modèle des frais et des dividendes. Si ses résultats sont concluants, et que l'on considère qu'il permet de réduire les émissions tout en préservant la plupart des consommateurs et des ménages d'une augmentation de prix, ce sera un exemple important qui sera cité partout dans le monde et qui sera analysé attentivement aux États-Unis et ailleurs.
    S'il échoue et que le Canada recule en matière de tarification du carbone, alors nous rendrons la tarification du carbone beaucoup plus difficile pour les autres pays, qui ne voudront pas répéter l'expérience négative vécue ici. C'est ce qui est arrivé en Australie et en France, où il y a eu récemment des manifestations importantes. Quand la tarification du carbone suscite de la résistance quelque part, le progrès peut en souffrir ailleurs. Par contre, les exemples positifs comme ceux du Royaume-Uni ou de la Colombie-Britannique peuvent devenir des modèles favorisant l'action ailleurs.
    Il est donc essentiel pour le leadership international du Canada en matière de tarification du carbone que son filet de sécurité fédéral sur la tarification du carbone soit un succès au cours des prochaines années, et j'espère que ce sera mentionné dans le rapport du Comité.
    Merci beaucoup.
(1610)
    Je vous remercie de ces observations.
    Pour terminer, nous entendrons David Sawyer, qui représente l'Institut pour l'IntelliProspérité.
    Bonjour. Je vous remercie de m'accueillir aujourd'hui.
    Je m'appelle Dave Sawyer. Je suis agrégé supérieur à l'Institut pour l'IntelliProspérité de l'Université d'Ottawa. Je suis également économiste spécialisé en réglementation. J'ai travaillé au cours de la dernière année pour des gouvernements libéraux, néo-démocrates et conservateurs sur la politique climatique, si bien que j'ai une assez bonne idée des différents points de vue des gouvernements et de la façon dont ils mettent en oeuvre la politique sur le carbone au sein de la fédération. Je vous décrirai un peu la situation actuelle, vous présenterai un genre d'état de la situation, après quoi je vous ferai part de mes conclusions.
    Il y a à peine trois ans, il semblait inconcevable que le Canada, collectivement, se dote d'une véritable politique sur le carbone susceptible de nous permettre d'atteindre un sommet d'émissions en 2020. Notre analyse de l'écart nous porte désormais à croire qu'ensemble, les politiques fédérales et provinciales sur le carbone pourraient, grâce à quelques ajustements, nous permettre d'atteindre notre cible d'émissions pour 2030 en limitant les conséquences économiques à une petite fraction de la croissance annuelle du PIB. Il semble même que le nouveau cadre stratégique qui émerge au Canada, qui comprend un régime de tarification du carbone, des règlements et des mesures d'innovation — ainsi qu'un recyclage des revenus pour parer les problèmes de répartition mentionnés par Mark et les autres —, soit suffisamment robuste pour pousser notre ambition encore plus loin, à coût raisonnable, pour intensifier notre décarbonisation d'ici la moitié du siècle, ce qui signifie que nous avons l'architecture, les boutons et les commandes nécessaires pour adapter l'architecture actuelle afin d'aller encore plus loin si nous le choisissons.
    Or, la théorie et la modélisation diffèrent de la pratique. Dans les faits, le cloisonnement et la divergence des politiques provinciales et des préférences stratégiques continuent de miner l'aptitude du Canada, collectivement, à stimuler une action économiquement avantageuse. Il faut blâmer pour cela les gouvernements fédéraux successifs qui ont laissé le champ libre aux dirigeants des provinces, au sein de la fédération — évidemment de leur province —, pour imposer ou non leur propre vision des choses. Les diverses mesures prises dans les provinces qui se sont dotées de leur propre politique adaptée sur le carbone ont donné lieu au fouillis qui caractérise aujourd'hui l'effort climatique pancanadien. Il faut également jeter le blâme sur la politique partisane qui continue de peser plus lourd que les risques économiques à long terme.
    La vérité simple, c'est que nos ambitions climatiques nationales sont étroitement liées aux attentes géopolitiques de nos partenaires commerciaux et par conséquent, à nos propres aspirations géopolitiques. Comme le monde continue d'exiger des politiques de plus en plus ambitieuses — et il faut admettre que l'ambition du Canada est principalement motivée par des facteurs externes, selon moi, ou à tout le moins était-ce le cas jusqu'à tout récemment —, le Canada, s'il veut contenir ses coûts, devra trouver une solution à la fragmentation actuelle de ses politiques.
    Jusqu'à maintenant, le gouvernement fédéral a bien réussi à manoeuvrer parmi les politiques fragmentées de la fédération. Il a établi une pierre angulaire de sa politique sur le carbone grâce au cadre pancanadien élaboré en collaboration avec les provinces, en permettant aux divers régimes fiscaux et commerciaux du Canada de demeurer dans la mesure où ils respectent les prix minimaux imposés pour la taxation ou prévoient une réduction des émissions conformes à la cible de 2030 s'ils choisissent un régime d'échange. Il y a de la souplesse. Ainsi, les provinces n'ont pas à s'en remettre au gouvernement fédéral pour établir leur politique climatique.
    Pour remédier à la névrose omniprésente dans la politique climatique, sur le plan de la compétitivité, les provinces et le gouvernement fédéral semblent sur la bonne voie. Le modèle de référence fédéral pour la tarification du carbone se veut un modèle hybride pour les grands émetteurs industriels ou les secteurs touchés par les échanges et rejetant de grandes quantités d'émissions. Le régime fédéral s'inspire beaucoup de ceux du Québec et de l'Alberta, qui se fondent sur des indicateurs de rendement pour établir les coûts d'une fraction seulement des émissions de GES, mais comme M. Leach le disait, « on continue d'envoyer le message que les émissions seront tarifées » dans un but de réduction.
    Bien sûr, la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, l'Ontario, la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador et le Manitoba ont maintenant tous proposé ou sont en train de mettre en place des modèles de tarification du carbone similaires pour leurs grands émetteurs. Nous nous attendons à ce que l'Ontario présente très bientôt son nouveau régime de tarification du carbone. Il est vrai que la « Résistance » a proposé ses propres modèles. Pourquoi? C'est simple: parce que l'industrie l'exige.
    Les dirigeants d'entreprises s'inquiètent de leur compétitivité. Nous avons travaillé avec 300 grandes entreprises industrielles de l'Alberta et de l'Ontario, et la compétitivité est une priorité pour leurs dirigeants. Par ricochet, c'est évidemment une priorité pour les gouvernements.
    La plupart des économistes et des mordus de politique vous diront à leur tour qu'ils aiment le modèle fédéral de tarification du carbone. Celui-ci impose une tarification applicable à toute l'économie tout en établissant des normes de prix ou de quantité qui permettront de mieux harmoniser l'ensemble hétéroclite de régimes sous-nationaux. Cette harmonisation est nécessaire pour contenir les coûts, mais en acceptant les disparités d'une province à l'autre, le cadre pancanadien repousse peut-être le moment de s'attaquer véritablement à la question, et on peut le comprendre. Il se trouve pratiquement à institutionnaliser le cloisonnement provincial, ce qui nous expose au risque d'être pris avec des mesures d'atténuation coûteuses, parce que chacun ferait sa propre petite affaire. C'est ce qui empêche les mordus de politique de dormir la nuit: l'idée que cette fragmentation coûteuse demeure et que les coûts restent inégaux d'une politique et d'un endroit à l'autre, puis qu'il coûte très cher de se conformer aux diverses politiques et d'assurer une certaine harmonisation.
    Bien sûr, la politique sur le carbone ne se limite pas à la tarification du carbone. Les gouvernements de toutes allégeances le comprennent, puisque le cadre pancanadien tient compte des diverses politiques provinciales sur le carbone, qui comprennent des règlements, des régimes de tarification du carbone, des fonds d'innovation et des structures de gouvernance coopératives. À l'heure actuelle, le plan prospectif de la réglementation prévoit environ 14 règlements ou modifications en vue de la réalisation du plan de tarification du carbone. Parmi les règlements proposés, notons un règlement sur les émissions de méthane dans le secteur pétrolier et gazier de l'Alberta, un autre établissant une norme de carburant propre en Colombie-Britannique, des règlements sur les véhicules et des mesures de contrôle des HFC.
(1615)
    La plupart des spécialistes de la politique sur le carbone seront d'accord pour dire que ce programme réglementaire est logique. Nous pouvons adapter nos règlements actuels sur l'équipement, les bâtiments et les véhicules pour combler les lacunes des politiques et surtout, les pousser plus loin pour atteindre des objectifs plus ambitieux. Le plus souvent, ce genre de stratégie peut nous faire économiser des coûts de fonctionnement et d'équipement à long terme. Les économistes appuieront assez souvent les règlements axés sur le rendement, puisqu'ils offrent de la souplesse sur le plan de la conformité, beaucoup comme la tarification du carbone. On trouve justement une forme de tarification carbone dans les normes fédérales sur les véhicules que le premier ministre Harper a mises en place. Nous voyons de plus en plus de nouveaux règlements de ce genre, et dans l'ensemble, les économies estiment que c'est une bonne avenue.
    Les avis restent tout de même polarisés sur l'idée d'un recours accru à la voie réglementaire: soit l'on croit que la réglementation permet de corriger les failles du marché et de réduire davantage les émissions, soit l'on croit que les règlements coûtent plus cher qu'une tarification du carbone. Pour ce qui est de la tarification du carbone elle-même, il y a de nombreuses discussions sur la meilleure façon de faire. Comme il est facile de cacher les coûts des règlements dans les méandres de l'étude d'impact, les politiciens ont tendance à aimer les règlements, puisqu'ils sont associés à un faible coût politique par tonne. Si l'on veut faire quelque chose sans faire trop de bruit, on réglemente et on en cache les coûts.
    Je mentionnerai pour terminer qu'il faut se rappeler que la politique sur le carbone, au sein de la fédération, va bien au-delà de la tarification du carbone. Le grand défi, au Canada, ne consiste pas à déterminer s'il faut imposer une tarification du carbone. Nous le faisons déjà beaucoup. C'est littéralement la loi qui prévaut depuis le 1er janvier de cette année. Devant cette mégatendance à la décarbonisation, nous devons réfléchir au-delà de la dimension politique pour maintenir des coûts bas et stimuler l'innovation de manière à pouvoir vendre notre modèle dans le monde. Ensuite, bien sûr, nous devrons probablement accorder un peu plus d'attention à la façon dont nous pouvons accroître notre résilience économique aux phénomènes météorologiques de plus en plus dangereux qu'on connaît.
    Merci.
    Excellent.
    Je remercie tout le monde de ces exposés. Nous passerons directement aux questions et aux réponses.
    Pour commencer, je donnerai la parole à M. Amos pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie cet auguste groupe de témoins. C'est vraiment très impressionnant de vous voir tous devant nous, et c'est une merveilleuse occasion à saisir.
    J'aimerais m'adresser d'abord à M. Cameron. Y a-t-il des affirmations des autres témoins avec lesquelles vous êtes fortement en désaccord ou diriez-vous plutôt que vous êtes d'accord avec eux dans une grande mesure?
    Dans une grande mesure, je suis d'accord avec tous les autres témoins, en effet.
    Comment qualifieriez-vous le discours du Parti conservateur du Canada sur la question de la tarification de la pollution?
    Jusqu'à maintenant, le Parti conservateur du Canada a exprimé son appui à la cible de réduction de Paris, soit la CPDN du Canada d'une réduction de 30 % en deçà des niveaux de 2005 d'ici 2030. Il a voté en faveur de cette cible l'an dernier, et j'estime que c'est une bonne cible. C'est celle qu'avait proposée le premier ministre Harper. Le Parti conservateur n'a pas expliqué clairement comment il avait l'intention de l'atteindre. Il a dit ne pas vouloir de la tarification du carbone, à tout le moins pour le consommateur. Il y a eu des discussions concernant une tarification du carbone pour les entreprises, mais rien n'a véritablement été proposé à part cela pour atteindre la cible de 30 %.
    Concernant la qualité du discours politique, d'autres témoins ont abordé la question, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Certains d'entre nous, en première ligne, avons déploré la piètre qualité du débat.
    Il y a deux niveaux de compétence. J'en ai discuté avec des conservateurs fédéraux comme provinciaux...
(1620)
    Je m'excuse, nous devons nous interrompre une seconde. Il y a un rappel au Règlement, donc je dois entendre de quoi il s'agit. J'ai arrêté le chronomètre.
    Monsieur Warawa, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Nous sommes réunis pour entendre l'avis d'experts sur la question de la tarification du carbone. Nous ne sommes pas réunis — et ce n'est pas le mandat du Comité — pour demander aux témoins de critiquer différentes positions politiques, surtout avant une élection. Si le Comité souhaite maintenant modifier les objectifs de cette étude, nous devons le savoir.
    Les témoins d'aujourd'hui ne forment pas un groupe équilibré. En effet, ils présentent un seul point de vue sur un enjeu complexe. C'est une préoccupation que je vous ai exprimée au début de la réunion. Idéalement, un groupe de témoins devrait être formé de gens qui représentent les deux côtés d'un débat. Toutefois, aujourd'hui, nous avons seulement les représentants d'un côté, et pour une raison quelconque... Cela me va, mais si nous demandons maintenant aux témoins experts de critiquer des positions politiques... ce n'est pas la raison pour laquelle nous sommes réunis aujourd'hui.
    Je comprends ce que vous dites. Cependant, je ne suis pas certain qu'il s'agit d'un rappel au Règlement. Vous avez fait votre déclaration, et nous avons accordé une certaine marge de manoeuvre aux membres du Comité. Je demanderais à M. Amos d'en tenir compte lorsqu'il posera ses questions.
    J'aimerais faire valoir que ses questions ne sont pas recevables. Ce n'est pas dans le mandat du Comité de demander aux témoins de formuler des critiques sur les positions politiques des principaux partis. Ce n'est pas l'objectif de cette étude et je crois donc que ses questions sont irrecevables, ce qui constitue un rappel au Règlement.
    Pour le moment, je n'ai pas encore de problème avec cela, mais je comprends ce que vous dites, et je demanderais donc à M. Amos de tenir compte du point de vue qui a été exprimé. Je crois que si nous finissons par nous engager dans une série de questions très partisanes, nous aurons été prévenus que cela pourrait entraîner un résultat non positif en ce qui concerne la façon de s'attaquer au changement climatique au Canada. Nous parlons du climat ou de la tarification de la pollution dans un contexte international, et j'encourage donc les membres du Comité de tous les partis à tenir compte de cela lorsqu'ils posent leurs questions à nos témoins.
    En ce qui concerne le commentaire sur les témoins, chaque parti a eu l'occasion de choisir un certain nombre de témoins selon son nombre de sièges au Comité. Les libéraux ont donc obtenu six témoins, les conservateurs ont obtenu trois témoins et le NPD a obtenu un témoin. Il s'est avéré que les témoins des conservateurs étaient libres mercredi, et ils comparaîtront donc tous ce jour-là, avec le témoin du NPD. Aujourd'hui, nous entendons de nombreux témoins qui ont été choisis par le Parti libéral. Je ne fais que le préciser pour répondre à la question que vous avez posée dans votre intervention.
    Merci.
    Monsieur Amos, il vous reste quatre minutes et 25 secondes.
    À des fins d'éclaircissements, je répondrai à des questions qui ont été soulevées par les témoins. Je vais continuer de faire cela. Le commentaire concernait les répercussions nationales découlant de la qualité du débat sur la tarification de la pollution causée par le carbone, et je crois donc que c'est pertinent. La nature, la qualité et la profondeur de ce discours sont exactement les raisons qui me poussent à poser ces questions.
    Monsieur Cameron, selon vous, quelles pourraient être les conséquences d'un discours trop partisan au sujet de la tarification de la pollution sur le Canadien ordinaire, qui ne pense pas comme un économiste, mais qui tente de vivre dans le monde réel et qui s'intéresse seulement à ces débats publics en période d'élection?
    Permettez-moi de revenir sur votre question précédente pendant un moment. Je crois que deux niveaux de discussion sont en cours au sein du Parti conservateur. J'ai certainement participé à un dialogue avec les conservateurs à l'échelon fédéral et à l'échelon provincial, et il s'agissait d'un dialogue très complexe sur des questions liées à la tarification du carbone ou aux solutions de rechange pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, il y existe également un discours public, surtout dans les médias sociaux, qui est très négatif et rhétorique, selon moi. Nous tentons de résoudre un problème de politique publique très complexe, et il est probablement avantageux, pour toutes les parties concernées, d'éviter la rhétorique et de se concentrer plutôt sur les différences de politiques fondamentales.
    Je vous remercie de votre intervention.
    Monsieur Rivers et monsieur Leach, avez-vous des commentaires sur les défis liés à la création d'un discours plus positif et sur les contributions de l'opposition? Si vous n'avez aucun commentaire, c'est correct. J'ai d'autres questions à poser.
(1625)
    Restons sur le sujet des questions de politiques fondamentales.
    En ce qui concerne la question des compétences, je sais qu'il n'y a aucun avocat parmi vous — et c'est très bien —, la question liée à la compétence fédérale d'établir un filet de sécurité est une question fondamentale, et elle sera débattue devant les cours d'appel canadiennes cette année et probablement l'année prochaine. Dans quelle mesure est-il important d'obtenir des précisions judiciaires sur la compétence du gouvernement fédéral pour qu'un mécanisme de tarification soit efficace d'un bout à l'autre du Canada? Tous les témoins qui s'intéressent à la question peuvent y répondre.
    Je peux aussi reformuler ma question. Quelles sont les répercussions négatives qui découlent de l'incapacité d'imposer une tarification uniforme sur la pollution d'un bout à l'autre du Canada, un prix de base, en quelque sorte?
    Je crois que c'est le résultat qui compte, du point de vue économique, dans le cas d'une tarification du carbone uniforme d'un bout à l'autre du pays, et c'est le résultat qui minimisera les coûts généraux. Cette coordination pourrait être effectuée de manière ascendante, entre les provinces qui se coordonnent ensemble, ou elle pourrait être effectuée de manière descendante, en confiant au gouvernement fédéral un rôle de coordination. Du point de vue économique, c'est le résultat de la politique harmonisée qui est le plus important pour minimiser les coûts.
    Que ce soit imposé par l'échelon fédéral et que les politiques provinciales soient anticipées ou qu'il s'agisse d'une harmonisation ascendante... Nous analysons des modèles depuis la table ronde nationale de 2008. Nous avons conclu qu'une fragmentation continue augmente les coûts d'environ 25 %. Dans le cadre pancanadien, lorsqu'on uniformise et qu'on met à l'échelle les politiques provinciales, l'harmonisation de la tarification du carbone réduit le prix d'environ 50 $. C'est un montant assez important, dans la mesure dans laquelle on peut essentiellement profiter de réductions des coûts et de diverses réductions commerciales au sein de la fédération, tout en évitant de nuire aux occasions à faibles coûts qui se présentent ailleurs.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Je parlerai seulement de la question économique, car j'ai certaines compétences dans ce domaine. J'aimerais me faire l'écho des commentaires formulés par les deux autres témoins, c'est-à-dire que le domaine économique suggérerait d'uniformiser le plus possible les règles du jeu entre les provinces. Ce serait le rôle que jouerait le gouvernement fédéral en imposant ce filet de sécurité, afin d'uniformiser les règles du jeu d'une province à l'autre.
    Votre temps est écoulé. La parole est à M. Godin.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je pense que ce qui est important, comme plusieurs l'ont mentionné tout à l'heure, c'est le résultat. Nous sommes conscients qu'il y a des changements climatiques, et nous nous devons de trouver des solutions pour avoir une meilleure qualité de vie et un meilleur environnement.
    Ma question s'adresse à l'ensemble des témoins.
    Avez-vous évalué la situation canadienne? La situation canadienne est la suivante. En ce qui concerne la taxe sur le carbone, on ne peut pas faire référence à d'autres pays, et je vais vous dire pourquoi.
    Le Canada est le deuxième plus grand pays au monde. On s'entend que la Russie n'a pas mis en place une taxe sur le carbone. Pour nous assurer que la taxe sur le carbone est la seule solution pour atteindre nos objectifs, pouvez-vous me confirmer que vos recherches ont pris en considération ce que font en la matière les autres pays de grande densité et ayant un grand territoire?

[Traduction]

    Je ne dirais pas qu'une taxe sur le carbone est la seule solution possible pour n'importe quel pays. Je crois que les témoins ont dit que la taxe sur le carbone représente, au mieux, une partie de la solution pour le Canada, mais c'est une partie très importante, car on fixe le prix du carbone. En ce qui concerne les autres grands pays, la Chine, par exemple, établit un prix sur le carbone cette année. L'Australie, un pays très semblable au Canada, avait mis sur pied un système de tarification du carbone, mais l'a éliminé. Cela avait été fait sur une base nationale, et ce pays travaille actuellement sur un projet lié à l'intensité des émissions. Il est faux d'affirmer qu'un grand pays ne peut pas imposer la tarification du carbone en raison de son étendue géographique. En effet, l'État de la Californie a autant d'habitants que le Canada et il couvre également un vaste territoire, mais il a tout de même établi un prix sur le carbone. Je ne crois donc pas qu'on peut dire que l'établissement d'un prix sur le carbone n'est pas une solution sensée pour le Canada juste parce que c'est un vaste pays.
(1630)

[Français]

    Il faut comprendre qu'on ne parle pas ici de population, mais de territoire.

[Traduction]

    Je comprends.

[Français]

    C'est très important de le préciser.
    Nous ne sommes pas anti-taxe sur le carbone. Nous sommes en désaccord sur le fait que le gouvernement fédéral impose des choses. Il y a un coût à cela.
    Il a été démontré que trois provinces ont obtenu de bons résultats. La Colombie-Britannique a pris l'initiative, et vous avez tous plaidé en faveur de la Colombie-Britannique. L'Alberta a de bons résultats. Le Québec a décidé, lui, pour toutes sortes de bonnes raisons, de ne pas appliquer une taxe sur le carbone, mais de créer un marché du carbone.
    Chaque province du Canada connaît ses réalités. Comme je vous l'ai dit d'entrée de jeu, nous avons pour objectif d'améliorer l'environnement. Ne serait-il pas mieux d'outiller et d'accompagner les différentes provinces et les territoires pour arriver aux résultats souhaités?
    Comme plusieurs personnes, vous avez dit que la taxe sur le carbone n'est pas la solution ou qu'elle n'est pas la seule solution. Pourquoi une fédération comme le Canada, qui a la particularité d'être un très grand pays et où la population est concentrée dans les régions du Sud, veut-elle que la taxe sur le carbone s'applique uniformément à toutes les provinces alors qu'elles n'ont pas la même réalité?
    C'est la même chose en ce qui concerne le développement économique. Sous le gouvernement conservateur précédent, il y avait six ministres du développement économique. Pourquoi? C'est parce qu'il y a six régions différentes. On pourrait extrapoler avec plus, mais à un moment donné, on doit regrouper les choses.
    J'aimerais entendre ce que vous avez à dire là-dessus.

[Traduction]

    Je répondrai en premier.
    Je crois qu'il est important de souligner que le filet de sécurité du gouvernement fédéral est un filet de sécurité. Il s'applique aux provinces qui n'ont pas de règlement semblable. Le Québec, qui a un système de plafonnement et d'échange, n'est pas directement touché par le filet de sécurité fédéral. On considère que le système de plafonnement et d'échange est l'équivalent opérationnel de la politique fédérale, et le Québec utilise donc sa propre politique.
    Il y a une équivalence entre le système de plafonnement et d'échange utilisé au Québec et le système de tarification du carbone ou le système de perception de redevances utilisé dans d'autres provinces. On peut prendre l'exemple d'un automobiliste. Au Québec, un automobiliste sera touché par le système de plafonnement et d'échange par l'entremise d'une augmentation du prix de l'essence qu'il met dans son auto, et l'expérience de cet automobiliste québécois sera exactement la même que celle d'un automobiliste de la Colombie-Britannique, car cette province a également une taxe sur le carbone. Autrement dit, la politique qui a été adoptée au Québec n'est pas plus avantageuse pour les automobilistes du Québec qui réduisent leurs émissions de carbone que celle qui a été adoptée en Colombie-Britannique. Ces politiques sont équivalentes sur le plan opérationnel, et c'est la raison pour laquelle elles sont toutes les deux permises dans le cadre des règlements fédéraux.
    J'aimerais également faire un commentaire.
    L'un des avantages du cadre pancanadien, c'est qu'il accorde aux provinces la souplesse nécessaire pour mettre en oeuvre leur propre politique de tarification du carbone de différentes façons. Nous avons observé différents niveaux et différentes approches liées à la tarification du carbone fondée sur le rendement et aux normes fondées sur le rendement. Nous avons également observé des approches très différentes en matière de recyclage de recettes. Différentes provinces ont différentes priorités dans différents contextes, et cela peut justifier l'adoption de différentes approches en matière de recyclage des recettes.
    On peut donc atteindre un équilibre entre le fait d'accorder aux provinces le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour adapter leurs politiques à leur propre contexte, ce qui est important et légitime, et le fait de progresser vers une tarification du carbone uniforme et coordonnée d'un bout à l'autre du pays, afin de minimiser les coûts généraux.
    Vous avez la parole.
    Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais parler de la Colombie-Britannique. Ma circonscription est Kootenay—Columbia, dans le sud-est de la Colombie-Britannique.
    Lorsque la question de la tarification du carbone en Colombie-Britannique est soulevée, nous entendons parfois parler des différentes approches liées à la réduction des émissions de carbone. Je dois dire que je suis absolument pour la tarification de la pollution. Nous entendons parfois des gens affirmer que le ralentissement économique de 2008, et non la tarification de la pollution, est responsable de la diminution des émissions de carbone. Nous entendons aussi parfois des gens affirmer que les émissions ont commencé à augmenter parce que la Colombie-Britannique a cessé d'augmenter sa tarification du carbone, comme elle le faisait chaque année pendant un certain temps.
    J'aimerais entendre ceux d'entre vous qui ont étudié attentivement la situation de la Colombie-Britannique parler de ces enjeux.
(1635)
    J'ai mené certaines des études sur la Colombie-Britannique. De nombreuses autres personnes mènent des études semblables, et elles tentent d'aborder les enjeux dont vous avez parlé. Elles tentent de faire valoir que toutes sortes de choses peuvent avoir un effet sur les émissions de gaz à effet de serre ou sur les décisions prises par les habitants de la Colombie-Britannique, et qu'il faut donc se demander comment nous pouvons attribuer tous les changements liés aux émissions de gaz à effet de serre à une seule politique lorsque nous savons qu'il y existe toutes sortes d'autres facteurs qui pourraient également être responsables.
    Essentiellement, dans le cadre de ces études, on peut soit utiliser des données sur chaque ménage — par exemple, la quantité de gaz utilisée par un ménage ou la distance parcourue en automobile par ce ménage —, soit utiliser des données sur l'essence vendue chaque mois dans une province, et comparer ensuite ces données à celles des autres provinces. La récession de 2009, par exemple, s'est également produite dans les autres provinces. On tente donc de tenir compte d'autres facteurs qui pourraient être responsables de ces tendances, en plus de la tarification du carbone, par exemple des changements liés à la population ou aux prix ou d'autres facteurs. On tente donc d'établir une comparaison avec les autres provinces et de tenir compte d'autres facteurs, afin de parvenir à ces conclusions.
    Je dirais qu'il est impossible de déterminer avec une certitude absolue les effets d'une tarification du carbone ou d'une politique dans un endroit, car nous ne vivons pas dans deux mondes différents. En effet, nous n'avons pas un monde dans lequel cette tarification du carbone a été imposée et un monde exactement semblable dans lequel cette tarification n'a pas été imposée. Nous tentons donc, à l'aide de statistiques, de créer ces deux mondes différents et de déduire l'effet de la tarification du carbone à partir de ces différentes données.
    Dans l'ensemble, êtes-vous d'avis que les données scientifiques laissent croire que la diminution des émissions de carbone était liée, dans ce cas, à la tarification du carbone?
    Oui. Une demi-douzaine d'études sont parvenues à cette conclusion. Cela laisse croire que la tarification du carbone a permis de réduire les émissions comparativement au niveau où elles seraient sans cette tarification. Ce n'est pas compliqué — le prix de l'essence augmente, le prix du gaz naturel augmente, et on s'attend donc à ce que les gens utilisent une moins grande quantité de ces combustibles.
    Nous avons des milliers d'études sur ce que nous appelons l'« élasticité de la demande énergétique », c'est-à-dire des demandes de gaz naturel, d'essence ou de diesel en fonction de l'augmentation ou de la diminution du prix de ces combustibles. Nous pouvons également utiliser ces études pour tenter de déduire certaines choses. Ce n'est pas comme si une seule étude était parvenue à cette conclusion, car il y a maintenant des preuves robustes à l'appui de cette conclusion.
    Parfois, nous entendons dire que pour être vraiment efficaces, nous devons augmenter le prix à 200 $ la tonne. Ce montant semble revenir souvent ces dernières années. Y a-t-il un montant idéal?
    J'aimerais tenter de répondre en premier.
    Une faible tarification du carbone entraîne de plus faibles réductions des émissions de carbone. Une tarification plus élevée du carbone fera augmenter les réductions d'émissions. Il ne s'agit pas de savoir si c'est oui ou non ou si les réductions d'émissions sont efficaces ou non. C'est plutôt une question de degré et d'échelle.
    Si le seuil est n'importe quel niveau de réduction d'émissions, cette affirmation est incorrecte. En effet, même une faible tarification du carbone entraîne des réductions d'émissions, comme nous l'avons constaté en Colombie-Britannique. S'il s'agit d'atteindre un objectif national en matière de réduction des émissions, comme d'autres témoins l'ont dit, des prix du carbone plus élevés ou des politiques plus rigoureuses seront nécessaires pour obtenir ces réductions plus importantes.
    J'aimerais faire un bref commentaire. Il y a toujours des interactions avec les politiques. Les règlements sur l'efficacité énergétique des voitures et l'abandon progressif des centrales alimentées au charbon, deux mesures établies par le premier ministre Harper, facilitent le travail de la tarification du carbone par la suite, car les voitures sont plus efficaces et nous utilisons moins de carburant. Oui, il y a plus de gens et nous conduisons davantage, mais ces automobiles utilisent moins d'énergie et produisent ainsi moins d'émissions. Les émissions ne sont pas aussi élevées, et la tarification du carbone ou toute autre politique qui vise à atteindre l'objectif peut être moins rigoureuse.
    Nous avons toutes ces politiques et initiatives qui réduisent ces marges d'émissions un peu partout. Nous avons des règlements, des subventions et la tarification du carbone et toutes ces mesures facilitent l'atteinte de cet objectif, au bout du compte.
    En 2007, j’ai reçu un chèque du gouvernement de la Colombie-Britannique, avant la mise en oeuvre de sa tarification du carbone, en 2008. Je me sens quelque peu délaissé. Pensez-vous que la Colombie-Britannique devrait adopter la nouvelle politique du Canada, pour que mes électeurs et moi puissions recevoir un chèque par la poste?
    Je pense que la politique fédérale est assez bien conçue. Il s’agit essentiellement d’un modèle de frais et dividendes qui produit un dividende presque égal par habitant. La province a versé de l’argent aux ménages à revenus faibles et moyens, en plus de réduire l’impôt des sociétés et des particuliers. Ensuite, on a commencé à jongler avec divers crédits d’impôt et des choses du genre, ce qui me plaisait moins.
    Évidemment, je pense que la meilleure approche serait simplement de consacrer l’argent à un programme de rabais — du moins l’argent provenant du secteur de la consommation —, de façon à le remettre directement aux consommateurs sous forme de rabais ou de chèques.
(1640)
    Merci.
    La Colombie-Britannique devrait augmenter le taux d’imposition des particuliers pour combler le manque à gagner.
    En tant que Britanno-Colombien, je ne suis pas certain que cela me plaise.
    Nous passons à M. Fisher.
    Messieurs, merci d’être ici. J’aimerais avoir 40 minutes pour vous poser des questions pour que certains de ces excellents commentaires figurent clairement au compte rendu.
    On entend très souvent que la tarification de la pollution n’est qu’un outil parmi d’autres pour combattre les changements climatiques. En définitive, pour le compte rendu, la tarification de la pollution fonctionne-t-elle? Andrew.
    Les cours de la demande sont à la baisse; donc, cela fonctionne.
    Merci.
    Dans ma circonscription de Dartmouth—Cole Harbour, les technologies propres sont en plein essor. J’en vois partout.
    J’ai discuté avec un propriétaire d’entreprise du secteur des énergies éolienne et solaire. Au cours des quatre ou cinq dernières années, si je ne me trompe pas, il est passé de six employés à plus de 60. Il dit qu’il aimerait embaucher le plus de techniciens formés que possible, mais qu’il n’arrive pas à trouver assez de main-d'oeuvre pour croître aussi rapidement qu’il le voudrait.
    En quoi l’adoption d’une tarification de la pollution favorise-t-elle la croissance du secteur des technologies propres?
    Cela n’aura pas nécessairement d’incidence sur les difficultés à trouver des gens pour faire le travail ou sur les salaires que vous offrez. La tarification du carbone n’y changera rien. La tarification du carbone aura toutefois pour effet de créer un marché pour ces meilleures technologies. Elle récompense les entreprises qui parviennent à réduire les émissions dans leur chaîne d’approvisionnement, etc.
    J’aimerais attirer votre attention sur un article rédigé par David Popp pour l’Institut C.D. Howe, et sur ses règles pour les gouvernements qui veulent promouvoir les technologies propres. La première de ces règles est la tarification du carbone, car cela n’oblige pas le gouvernement à déterminer quelles innovations sont pertinentes. Comme mes collègues l’ont indiqué, je pense, cela ne fait que créer une source de revenus possible ou des économies de coûts, ce qui accroît la valeur des technologies propres.
     Excellent.
    Mark, vous avez indiqué ce qui suit sur Twitter: « Je suis convaincu que le programme de tarification du carbone devrait un jour devenir un programme national inspiré du filet de sécurité fédéral. » Pouvez-vous expliquer votre raisonnement à ce sujet?
    Oui. J’ai écrit une lettre d’opinion dans le Globe and Mail à ce sujet avec Dave McLaughlin, de l’Institut international du développement durable.
    Nous pensions qu’à terme, après 2020, il serait sensé d’utiliser le modèle du filet de sécurité fédéral comme modèle national, et ce, pour deux raisons. La première est d’atteindre la cohérence et l’harmonisation à l’échelle nationale dont les autres témoins ont parlé. L’autre, ce sont les allocations fondées sur la production ou les normes de rendement en matière d’émissions qui ont été mises en place dans les diverses provinces pour régler les problèmes de compétitivité. Une autre façon de régler cela serait d’ajuster les mesures transfrontalières visant le carbone, ce qui ne peut être fait qu’à l’échelon national. Je pense qu’à long terme, il vaudrait la peine d’examiner une tarification nationale du carbone assortie de rabais aux consommateurs, puis le passage d’allocations fondées sur la production à l’ajustement de mesures transfrontalières.
    Selon vous, est-ce une possibilité, à long terme?
    Si je pouvais prédire l’avenir, je crois que je pourrais faire autre chose.
    David, vous avez préparé un rapport à ce sujet, dont Dale a brièvement parlé. Partant des données de votre rapport et en prenant l’Ontario comme exemple, pouvez-vous nous expliquer quelle serait la situation financière du ménage ontarien moyen avec le filet de sécurité fédéral?
    C’est assez simple. L’exposition carbone de votre ménage est fonction de l’immeuble où vous habitez, du nombre de personnes qui y habitent et des véhicules que vous avez. Donc, cela comprend votre chauffage, votre véhicule, puis votre consommation de biens non énergétiques. En fait, n’importe lequel d’entre nous pourrait probablement répondre à la question. Lorsque vous additionnez tout cela pour déterminer l’exposition carbone de l’épicerie, alors que la tarification du carbone se répercute dans les chaînes d’approvisionnement et que les secteurs de l’électricité et du ciment refilent une partie des coûts, les prix augmentent, c’est certain. Lorsqu’on examine cela, qu’on fait le calcul et que l’on compare cela aux rabais à venir, on constate que pour la plupart des ménages, l’exposition carbone est plus basse que le montant du rabais. Comme Mark l’a indiqué, 8 ménages sur 10 sont en meilleure posture.
    C’est assez simple.
    Qu’en est-il des familles à faible revenu?
    Les familles à faible revenu sont un cas intéressant; elles consacrent une part plus importante de leurs revenus à l’énergie, de sorte qu’elles sont exposées de façon disproportionnée, ce qui suscite des préoccupations. Beaucoup d’administrations ont augmenté les montants versés des suppléments aux ménages à faible revenu, mais puisque leurs dépenses en énergie ne sont pas très élevées par rapport à la taille du rabais, ils en sortent gagnants. C’est très avantageux.
(1645)
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste encore une minute.
    J’ai entendu les commentaires de Dale à ce sujet. Je pensais poser la même question à Andrew.
    Concernant les familles à faible revenu?
    Plutôt par rapport à la première partie. En prenant l’Ontario comme exemple, comment les gens s’en sortiront-ils financièrement sous le filet de sécurité fédéral?
    Je n’ai pas de données étoffées pour l’Ontario, mais j’ai des statistiques pour l’Alberta, où l’on constate maintenant qu’environ 40 % des ménages albertains s’en sortent mieux, en général, grâce au rabais. Le pourcentage est plus faible qu’au moment de l’entrée en vigueur de la tarification, car le gouvernement n’a pas augmenté le montant du rabais. Cette part sera plus importante avec le filet de sécurité fédéral. Je pense que Dave a de très bonnes statistiques à ce sujet.
    J’aimerais aussi souligner, cependant, que même lorsque nous examinons la situation de ces groupes, les gens seront considérés de façon individuelle, et tous seront touchés différemment. Donc, avec la tarification du carbone, les particuliers et les sociétés pourront décider comment réagir, mais on ne peut pas nécessairement dire que tous les membres du groupe seront mieux placés, parce que l’utilisation des émissions varie beaucoup d’une personne à l’autre. Il y aura des différences selon les circonscriptions, les professions, etc. Il faut donc prendre garde de ne pas généraliser en disant que tous ceux qui correspondent à ce portrait s’en sortiront mieux.
    Merci, monsieur le président.
    Nous passons maintenant à M. Shipley.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins. Je n’ai jamais vu de groupe de témoins plus avisé que celui d’aujourd’hui.
    Mes questions seront plutôt simples. Pouvez-vous m’indiquer le pourcentage des émissions mondiales produites par le Canada?
    Allez-y, monsieur Rivers.
    Nous produisons un peu moins de 2 % des émissions mondiales.
    Pouvez-vous me dire quel est le pourcentage des émissions mondiales produites par la Chine, l’Inde, la Russie, les pays d’Europe de l’Est et l’Asie? Comme ce sont tous des économistes, je suppose qu’ils ont tous les chiffres.
    Je ne suis pas certain de tous me les rappeler. Pour la Chine, c’est environ 26...
    Eh bien, je pense que les États-Unis représentent environ 30 %...
    Non, c’est un peu moins que cela. La Chine devance...
    Et nous, c’est moins de 2 %.
    Moins de 2 %, en effet.
    Ils sont notre principal partenaire commercial, je pense. Pouvez-vous me dire comment un prix de 20 $ la tonne permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada?
    Je ne pense pas qu’on puisse avancer un chiffre précis, mais je dirais environ...
    Dans ce cas, quelqu’un parmi vous peut-il me dire combien...
    Les recherches dont nous avons parlé indiquent que le prix de 30 $ la tonne appliqué en Colombie-Britannique a permis de réduire les émissions de 5 à 15 %.
    Quand?
    Cela a été mis en place en 2008.
    C’était donc pendant la récession, comme mon collègue l’a mentionné.
    Non. C’est en 2012 qu’il a atteint les 30 $.
    Il a été porté à 30 $ en 2012.
    J’essaie simplement de comprendre, parce qu’une des choses dont nous discutons...
    Monsieur le président, honnêtement, je n’ai pas encore entendu parler des effets. J’entends seulement parler des montants d’argent qu’on soutirera aux gens. Pour un observateur et pour moi... Je suis en agriculture, et cela a un énorme... Je sais que les témoins disent que cela n’aura pas cet effet, et tout le monde est d’accord avec cela. Je peux vous dire que dans ma circonscription, les gens ne sont pas d’accord.
    Ce que je veux savoir, dans ce cas, c’est quelle sera la réduction à 60 $ la tonne. Cela va commencer à 20 $, puis monter à 50 $, 60 $, 100 $ ou 600 $. Je ne sais pas vraiment jusqu’où cela ira, parce que le gouvernement ne nous l’a pas dit. Quelle sera la réduction des émissions de carbone à 30 $ la tonne?
    Le gouvernement a publié des évaluations des cibles prévues à ce prix.
    Est-ce fondé sur des modèles?
    Oui.
    Merci.
    Si je me rappelle bien, on prévoyait une réduction entre 50 et 90 mégatonnes avec un prix de 50 $ la tonne, et nous en sommes actuellement à 710 mégatonnes.
    Pouvez-vous me dire, d’après toutes vos recherches, si le CO2 est un polluant?
    Allez-y, monsieur Sawyer.
    Puis-je répondre à l’autre question?
    Je n’ai que quelques minutes.
    Très bien.
    Sous l’ancien premier ministre Harper, il était considéré comme un polluant aux termes de la LCPE, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Donc, oui.
    En ce qui concerne la dernière question sur les carburants agricoles, les carburants liquides sont exemptés. Donc, une tarification du carbone de 1 000 $ n’aura aucune incidence sur l’utilisation du diesel sur les fermes. Cela aura un effet pour les immeubles, manifestement, mais il n’y a aucun incitatif d’efficacité énergétique liée aux carburants agricoles.
(1650)
    Mais cela s’applique à l’électricité, n’est-ce pas?
    [Inaudible] l’électricité directement.
    Je veux seulement avoir une précision.
    Les fermes pourraient obtenir des crédits. Si elles peuvent réduire les émissions de méthane, elles peuvent générer des crédits. Si vous pouvez générer du gaz naturel renouvelable avec le fumier et les déchets sur la ferme, vous pourrez obtenir des réductions et des crédits en vertu des normes sur le carburant propre du gouvernement fédéral.
    Pour la production laitière?
    Oui.
    Donc, la taxe sur le carbone s’applique aux aliments que j’achète, au transport de ces aliments, aux intrants pour la culture, aux engrais et aux intrants. En fait, selon les recherches que nous avons faites sur l’agriculture — nous nous sommes penchés là-dessus —, on arrive à une moyenne d’environ 7 000 $, en Ontario, car tous les producteurs laitiers sont aussi des producteurs industriels, en quelque sorte.
    J’essaie seulement de comprendre. Comment notre innovation... La tarification du carbone favorise l’innovation. Comment nous comparons-nous à nos concurrents sur le plan de l’innovation? Accusons-nous un retard si important à cet égard sans tarification du carbone?
    Monsieur Cameron.
    Je pense que l’idée est d’être un chef de file de l’innovation. On ne veut pas être deuxième ou troisième. Il n’y a pas de récompense pour le deuxième. Si vous devancez le peloton, vous pourrez alors exporter votre innovation partout dans le monde. C’est vraiment là que nous voulons être.
    Il ne fait aucun doute...
    Je veux savoir où nous en sommes.
    Je dirais que nous sommes au milieu du peloton. Ce n’est pas où nous voulons être sur le plan de la compétitivité.
    En Ontario, dans l’industrie laitière... Savez-vous où vont les gens d’Europe et d’autres pays pour trouver de l’équipement novateur? Ils viennent en Ontario, parce que nous sommes des chefs de file en innovation et que nous sommes en mesure de prendre des risques pour progresser.
    Quant aux rabais, je suis toujours intéressé lorsqu’un gouvernement veut en accorder. Pouvez-vous me dire combien coûte ce rabais, quel pourcentage de chaque dollar est remis?
    Monsieur Beugin.
    Je suis désolé; pourriez-vous clarifier la question, s’il vous plaît? Je ne comprends pas.
    Je parle des rabais, lorsqu’il y en a. À ce moment-là, le gouvernement collecte l’argent, décide qui aura un remboursement, puis envoie un chèque. Savez-vous quel pourcentage du montant perçu est remboursé? À quel point est-ce efficace?
    Vous parlez des coûts de transaction et des coûts de fonctionnement du gouvernement liés à ce processus.
    M. Bev Shipley: Oui.
    M. Dale Beugin: Je pense qu’ils sont assez peu élevés, étant donné que l’ARC offre déjà des rabais et que tous les ménages reçoivent le même montant. Ces rabais ne sont pas personnalisés; c’est uniforme.
    Très bien.
    C’est bon. Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Bossio.
    Wow, ça alors! Quel formidable groupe de témoins! C’est tout simplement phénoménal.
    Je veux juste apporter quelques précisions par rapport aux propos de M. Shipley. Les émissions du Canada représentent un peu moins de 2 %, et sa population, 0,5 %. Quels rangs occupons-nous actuellement pour les émissions par habitant? Je pense que nous avons toujours été parmi les deux premiers à l’échelle mondiale. Est-ce vrai?
    Quelques pays exportateurs de pétrole du Moyen-Orient occupent un rang plus élevé que nous, mais nous sommes parmi les premiers.
     Parmi les pays de l'OCDE, nous sommes au premier rang, pour les émissions par habitant. Ne trouvez-vous pas qu'il est de notre responsabilité morale de nous occuper de notre propre pollution? N'êtes-vous pas d'accord?
    Je crois que nous pouvons même aller plus loin. Si le Canada ne fait rien pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, comment pouvons-nous nous attendre à ce que d'autres pays le fassent? C'est exactement la nature du problème d'action collective que constituent les changements climatiques. Ce n'est que si tout le monde agit que nous pourrons nous attaquer aux coûts et aux risques élevés que comportent les changements climatiques.
    Vous êtes allé en plein dans la direction que je voulais prendre. Étant donné le plan que nous avons présenté en tant que gouvernement fédéral, estimez-vous que nous ayons adopté une démarche équilibrée, entre la tarification de la pollution, les frais et dividendes sur le carbone, le modèle de remboursement, les investissements dans le transport, les investissements dans l'innovation, l'adoption d'un régime de réglementation plus équilibré et le contrôle des émissions, le tout fonctionnant conjointement? Je crois qu'on a plus de 50 mesures visant à réduire nos émissions de GES.
    Premièrement, estimez-vous que ce soit la bonne démarche à adopter? Deuxièmement, vous avez mentionné précédemment qu'à l'échelle internationale, on regarde le modèle du Canada et on dit que s'il a du succès, d'autres seront encouragés à utiliser le même modèle; cependant, si nous échouons d'ici quelques années, l'effet sera tout le contraire. Estimez-vous que ce soit l'équilibre que nous avons trouvé qui en fait un modèle si formidable et important pour le reste du monde?
(1655)
    Je crois que c'est une démarche solide qui réduit les coûts au minimum et qui mise sur la tarification du carbone. Je crois que cela pourrait aller plus loin. Je pense que les économistes de la Commission de l'écofiscalité préconiseraient qu'on mise encore plus sur la tarification du carbone et encore moins sur d'autres instruments.
    Cela étant dit, je pense que c'est une démarche équilibrée qui mise sur la gestion des coûts, la gestion des réductions des émissions et l'adoption d'un rôle de chef de file.
    Diriez-vous que c'est une évolution, plutôt qu'une révolution? Si vous essayiez de tout faire en une seule fois... Comme je crois l'avoir entendu souvent de la part de nombreux économistes, c'est la progression de cette tarification qui est essentielle, au fil du temps, pour en arriver au point où nous atteindrons nos cibles.
    Oui. Je crois que vous voulez...
    Je vois M. Rivers hocher de la tête.
    Aimeriez-vous dire quelque chose?
    Je crois que vous frappez en plein dans le mille. Vous reconnaissez le fait que ce ne sont pas les émissions d'une année en particulier qui sont la cause du problème. Ce sont les émissions cumulatives au fil du temps qui causent le problème. Nous voulons une démarche qui cible nos émissions cumulatives au fil du temps, ce qui signifie qu'il faut envoyer un signal à long terme à l'économie disant que nous sommes sur la voie de la décarbonisation.
    En même temps, nous voulons éviter tout choc négatif qui affecterait l'économie. Nous voulons progresser tranquillement, mais pour en arriver à une politique très ferme avec le temps.
    Merci.
    Cela m'amène à un autre point. Nous avons entendu d'autres personnes exprimer des préoccupations concernant les effets sur notre économie. Diriez-vous que si les entreprises ont ce signal clair concernant la tarification, sur une longue période de temps, les investissements qu'elles feront vont en réalité stimuler l'augmentation de leur productivité et de leurs innovations, ce qui en fera des entreprises plus fortes et plus concurrentielles à long terme?
    Je crois que connaître à l'avance la tarification du carbone est exactement ce que les entreprises souhaitent. Elles veulent des certitudes, afin de pouvoir prendre des décisions d'investissement qui demeureront valables à long terme, et elles veulent savoir comment elles vont payer. Je crois qu'on s'attend aussi à ce que les contraintes relatives au carbone à l'étranger ne fassent que se resserrer, car les autres territoires vont s'y mettre aussi, et ce, plus vigoureusement, et ils vont peut-être même se mettre à imposer leurs propres mesures à la frontière.
    Bref, prendre les devants et réduire davantage nos émissions maintenant plutôt qu'attendre à plus tard peut améliorer la compétitivité du Canada dans un monde sous contrainte carbone.
    Monsieur Leach, je vous vois hocher de la tête aussi. Vous ou M. Rivers aimeriez peut-être ajouter quelque chose.
    Ce que j'ajouterais, c'est qu'il n'est pas seulement question des contraintes carbone d'autres pays, mais de l'origine de vos capitaux. C'est une chose que nous avons constatée à bien des égards au Canada — les pressions que nous subissons à l'échelle internationale pour abaisser nos émissions, améliorer notre performance, etc., et le lien avec l'accès aux capitaux. À l'échelle internationale et nationale, nous voyons que les gestionnaires d'importants fonds élaborent des politiques d'investissement durables et retirent les investissements dans des sources d'émissions excessives. Plus nous sommes vus comme étant à l'avant-garde en matière d'innovation, plus nous allons avoir accès à des capitaux.
     Monsieur Rivers, allez-y.
    Votre question porte donc sur la croissance économique et la tarification du carbone.
    Oui, et sur les effets... Ce que je veux dire, c'est que vous pouvez dire que cela aura des effets sur nos entreprises, qui seront incapables de soutenir la concurrence à cause de règles inégales.
    Oui. D'après moi, la tarification du carbone sera sans effet sur l'économie dans son ensemble. Nous n'allons pas connaître une forte croissance ni une forte décroissance. Je crois que la croissance va augmenter dans les secteurs plus propres de l'économie et diminuer dans les secteurs moins propres de l'économie, mais pour l'économie dans son ensemble et pour les travailleurs de façon générale, il n'y aura pas de grands effets.
    Sur le plan de l'innovation, est-ce que cela force une économie à innover?
    Je ne crois pas qu'il soit bien démontré que l'activité liée à l'innovation va augmenter globalement, mais l'innovation sera réorientée vers les activités propres. Cela ne va pas faire augmenter le nombre de scientifiques ou le nombre de brevets, mais les scientifiques et les brevets vont plutôt se retrouver du côté des activités à faibles émissions de carbone.
    Merci.
    Monsieur Warawa, c'est à vous.
    Merci. C'est une discussion très intéressante.
    Je suis d'accord avec certains propos des témoins, mais pas avec les conclusions finales. Il est intéressant de voir que devant les mêmes données, nous arrivions à des conclusions différentes.
    Le climat change en effet. C'est anthropogénique. Quelle est la solution? Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que si les grands émetteurs de GES n'embarquent pas, il n'est pas possible de réduire notre empreinte carbone de manière à produire un effet — l'effet que nous souhaitons. Diriez-vous que dans l'ensemble, le point de départ, c'est que nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre?
(1700)
    Je vais revenir à ce que Dale a dit il y a une minute. Je crois personnellement que vous abordez cela de la mauvaise façon. Pour moi, on ne conclut pas un accord mondial pour que chaque pays réduise ensuite ses émissions…
    Mais vous manquez le… je ne vais pas me mettre à débattre de cela avec vous, monsieur Rivers…
    Pour moi, ce genre de consensus concernant la réduction des émissions va venir du bas…
    Je vais vous demander de garder le silence, maintenant, parce que c'est moi qui ai la parole. Ce n'est pas un débat.
    La question était celle de savoir si nous avons besoin que les émissions de gaz à effet de serre soient réduites à l'échelle mondiale pour que nous puissions atteindre nos cibles mondiales. La réponse est oui. Comment pouvons-nous y arriver? Est-ce en veillant à ce que le Canada participe? Tout à fait.
    Absolument.
    Le Canada participe-t-il déjà? Tout à fait.
    Non.
    Nous ne nous entendons pas là-dessus.
    Monsieur Cameron, vous avez dit que, par habitant, le Canada est probablement au premier rang dans le monde. Comment calcule-t-on cela? Est-ce qu'on se fonde sur la quantité des émissions au Canada ou sur la production de ce que nous exportons? Ce n'est pas cela. Je crois que c'est calculé d'une façon qui n'est peut-être pas réaliste ou juste en fonction de l'atteinte des cibles mondiales.
    Le calcul se fonde sur nos émissions intérieures divisées soit par la population ou par le PIB. La méthodologie est la même et c'est celle qui s'applique partout dans le monde, dans tous les pays.
    Est-ce que cela tient compte du carbone que nous séquestrons?
    Oui. Toute séquestration du carbone est incluse.
    Non. La séquestration n'est pas incluse pour le Canada, la forêt arboricole… Ce n'est pas compris.
    Parce que cela ne le serait pas… Si nous…
    On inclut toutes les émissions liées à la production de pétrole et de gaz que nous exportons du Canada. N'est-ce pas vrai? Toutes les émissions… Ce que nous exportons du Canada.
    Non. C'est seulement pour ce qui est intérieur… Pour nos exportations de pétrole et de gaz, les émissions qui y sont liées s'ajoutent aux émissions du pays où ces produits sont consommés, et non à celles du pays de production. Ce sont les émissions liées à notre production qui sont incluses dans ces statistiques, mais ce sont eux qui en savent plus à ce sujet.
    Je vous remercie de la mise au point.
    Venant de la Colombie-Britannique…
    Le protocole dont vous parlez est celui qui vise l'utilisation des terres, l'évolution de l'utilisation des terres et la foresterie comme facteurs de l'inventaire des émissions.
    Parlant de l'agriculture, nous avions des représentants des producteurs de canola ici, il y a quelques semaines. C'était avant Noël. Quelques réunions passées. Ils ont réduit leurs émissions en recourant au semis direct. La production grimpe et ils sont des leaders mondiaux. Ils disent que la tarification du carbone pourrait les encourager à envisager de déménager aux États-Unis. Ils peuvent en cultiver là-bas. La science vient du Canada, mais il n'y a pas de taxe sur le carbone aux États-Unis alors qu'il y en aura une au Canada, et ils disent que cela leur cause du tort et les rend moins concurrentiels. C'est ce qu'ils disent. C'est ce qu'ils ont dit devant le Comité. Êtes-vous en désaccord avec eux ?
    Ce que je dirai, c'est que j'aimerais bien voir les données. Comme je l'ai dit nous menons des analyses à l'échelle des installations et à l'échelle des exploitations agricoles constamment. Bien sûr qu'il y a des coûts et qu'il y a des risques, et que certaines personnes vivent un doute énorme, mais nous aimerions voir les données.
    Je trouve que les gens ont tendance à être un peu confus quand on leur explique ce que sont les coûts du carbone et l'exposition au carbone en réalité. Quand il est question d'exploitations agricoles, il y a beaucoup de confusion. J'ai eu des discussions au téléphone, la semaine passée avec des gens, et il y a beaucoup de confusion.
    Je pense qu'il faut renseigner les gens. Bien sûr qu'il y a des risques, mais une grande partie de leurs émissions ne sont pas soumises à une tarification et ne sont pas touchées. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a aucun risque sur le plan de la compétitivité, mais j'aimerais regarder cela et les aider à comprendre.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute et 20 secondes.
    Je suis de la Colombie-Britannique, où la tarification du carbone était de 30 $, et ce montant a grimpé à 35 $. Ce n'est plus sans répercussions sur les recettes. Ce sont des recettes produites par la Colombie-Britannique. Les émissions en Colombie-Britannique — et j'y ai vécu toute ma vie — étaient en baisse, pour de multiples raisons, mais je crois que les gains d'efficacité étaient un facteur très important. Depuis 2011, les émissions des voitures sont nettement moindres qu'avant cela, tout comme les appareils, et il y a aussi le crédit d'impôt pour les rénovations des maisons, et toutes les autres mesures.
    La taxe sur le carbone a-t-elle été efficace en Colombie-Britannique? On prétend ici que oui. Je dis que non. Elle n'a pas entraîné de changements dans les comportements. Mais c'est mon opinion, et vous avez la vôtre.
    La question que je veux vous poser est la suivante. En ce moment, c'est 35 $ la tonne, et c'est une taxe de 112 %. Il y a une taxe de vente provinciale de 7 %, et la TPS, de 5 %. La taxe sur le carbone est de 112 %. C'est 112 % sur le gaz naturel.
(1705)
    Le gaz naturel...
    Il y a des émissions de carbone.
    Ce que je veux savoir, c'est jusqu'à quel point la taxe sur le carbone doit grimper pour être efficace, pour causer un changement de comportement. Le changement de comportement dont nous parlons, c'est amener les gens à renoncer à leur voiture et à ne pas chauffer leur maison. Jusqu'à quel montant la taxe doit-elle grimper?
    Quiconque veut essayer de répondre à cela doit le faire brièvement, car le temps est écoulé.
    Oui. Il y a beaucoup de choses à dire là-dessus.
    En effet.
    Premièrement, la recherche démontre de façon constante que la tarification du carbone en Colombie-Britannique a entraîné la réduction des émissions. Une demi-douzaine d'études au moins sont arrivées aux mêmes conclusions malgré une grande diversité d'ensembles de données et de démarches.
    Pour ce qui est de savoir jusqu'à quel point la taxe doit grimper, comme M. Beugin l'a mentionné, chaque augmentation de la tarification du carbone va mener à une réduction correspondante des émissions. Je ne crois pas que la tarification du carbone, quelle qu'elle soit, mène généralement à l'élimination du chauffage dans les bâtiments ou de l'utilisation de véhicules. Je pense que nous verrons des changements dans les technologies et les combustibles utilisés dans ces deux cas.
    Nous allons maintenant passer à Mme Dzerowicz, pour six minutes.
    Je vous remercie infiniment pour vos excellents exposés. Je suis députée de la circonscription Davenport, dans le centre-ouest de Toronto. Il y a là toutes sortes d'environnementalistes extraordinaires et passionnés qui veulent que nous progressions beaucoup plus vite que ce que le cadre pancanadien actuel nous permet. Puis il y a tout un groupe qui croit aux changements climatiques, mais qui n'est pas trop sûr des répercussions que le prix de la pollution aura.
    La première question que j'allais poser est la même que celle que mon collègue Darren a posée. Est-ce qu'ils vont être obligés de payer les pots cassés? Nous entendons cela très souvent, que ce sera très coûteux et qu'ils vont devoir payer davantage.
    Monsieur Cameron, vous avez dit que dans 8 cas sur 10, ils seront mieux. Qui sont les 2 cas sur 10 pour qui ça ne sera pas mieux?
    Dans ces 2 cas sur 10, cela dépend vraiment de votre comportement. C'est une question de moyennes. Vous pourriez être un milliardaire qui conduit un véhicule électrique et mène une vie très modeste, et vous économiseriez de l'argent. Ou vous pourriez être une famille à faible revenu qui flambe son argent — je ne sais pas — en faisant brûler du charbon dans sa cour, ce qui serait plus coûteux.
    Somme toute, on pourrait s'attendre à ce que les 2 cas sur 10 soient des familles à revenus élevés ayant des profils d'émissions élevées, mais ce serait fonction de votre propre comportement en tant que particulier ou ménage.
    C'est très utile. Je vous remercie.
    Manifestement, tout le monde se préoccupe de la question de la compétitivité. Vous avez tous mentionné cela, et je pense que c'est vous, monsieur Beugin, qui avez dit que toute tarification du carbone devrait être conçue de manière à préserver la compétitivité et à protéger les personnes à faible revenu. D'après vous, est-ce que nos dispositions législatives visant le filet de sécurité sur la tarification du carbone répondent à ces deux éléments?
    Oui. Elles répondent aux préoccupations relatives à la compétitivité grâce au régime de tarification du carbone basé sur la production, ainsi qu'aux préoccupations relatives aux ménages à faible revenu grâce aux remises aux ménages.
    Monsieur Leach, vous avez mentionné une autre chose que j'ai également entendue, et c'est la question de savoir si les grands émetteurs seront exemptés ou non. Vous avez abordé cela directement. Pourriez-vous encore une fois nous dire pourquoi les grands émetteurs ne seront pas exemptés dans le cadre de votre plan?
    Je crois qu'il est important de déterminer si une partie de leurs émissions sont exemptées ou s'ils reçoivent des crédits d'émission gratuitement. Il est important de savoir que, dans le cadre du régime proposé par le gouvernement fédéral, du régime mis en place en Alberta et même des régimes qui étaient en vigueur en Ontario et au Québec avant les changements, la valeur totale de toute réduction des émissions est préservée.
    Si vous réduisez vos émissions de 10 %, cela signifie simplement que vous aurez davantage d'argent dans vos poches ou que vous paierez moins de taxe sur le carbone, tandis que si 80 % de vos émissions sont exemptées, la valeur de la réduction des émissions sera liée seulement aux 20 % restants. Il est important de préserver la valeur et de réduire en même temps le coût moyen pour les entreprises.
    Vous avez aussi parlé — vous tous, dans une certaine mesure — de la tarification de la pollution et des répercussions négatives sur la croissance de l'économie. Je crois que j'ai entendu dire très clairement que les répercussions sur la croissance économique devraient être positives.
    Qui veut répondre?
    Je vais commencer, et les autres pourront...
    Je ne crois pas que c'est le message qui a été transmis. Je pense qu'on a plutôt dit que les répercussions ne seraient pas très grandes. La plupart des modèles économiques indiquent qu'il y aura des répercussions négatives de petite ampleur. Il n'y aura pas de répercussions graves comme on l'a entendu dire cette semaine, notamment une récession ou un arrêt de la croissance économique. On prend un coût qui était imposé à l'échelle mondiale à d'autres et on en applique une partie ici, au Canada. Il faut prendre cela avec un grain de sel.
(1710)
    Je suis d'accord avec Andrew. Nos modèles indiquent que la croissance va demeurer positive même si on applique une tarification élevée du carbone, quoiqu'elle sera légèrement moins forte qu'elle le serait en l'absence d'une telle politique. La tarification du carbone entraîne un ralentissement extrêmement minime de la croissance.
    Je pense qu'il faut souligner que, si nous voulons atteindre nos cibles de réduction des émissions, la façon la moins coûteuse d'y parvenir, celle qui aura les moins grandes répercussions sur la croissance, est la tarification du carbone. Une approche réglementaire aurait une plus grande incidence sur la croissance que la tarification du carbone.
    Je vais ajouter quelque chose.
    Ce que nous avons pu observer en Alberta, c'est le coût et les répercussions sur la croissance qu'entraîne l'absence d'une tarification du carbone. Le projet Keystone XL en est un très bon exemple. Les politiques qui nous sont imposées de l'extérieur ont un coût bien plus élevé.
    Pour faire suite à ce que Nicholas a dit, je dirais qu'il ne faut pas prétendre que le Canada peut tout simplement continuer à produire autant d'émissions qu'il le souhaite, quand il le souhaite, sans que cela ait des conséquences. C'est impossible. Si nous pensons que le Canada va agir et doit agir, alors la tarification du carbone est la meilleure solution.
    Comme vous le savez, je crois, M. Shipley a fait remarquer plus tôt que nous avons tendance à parler des coûts par rapport aux émissions réelles et de l'ampleur de la réduction des émissions. La tarification du carbone ne contribuera pas à réduire les émissions jusqu'au niveau où elles doivent s'établir pour respecter les objectifs de l'Accord de Paris, mais le cadre pancanadien contient un certain nombre d'initiatives qui, ensemble, devraient nous permettre d'atteindre les objectifs de l'Accord de Paris. Nous ne sommes pas encore tout à fait rendus là. Je crois qu'il nous restait encore à réduire nos émissions de 66 mégatonnes avant que l'Ontario se retire du système de plafonnement et d'échange. Je pense que nous avons encore du travail à faire. C'est ce que je crois comprendre. Je ne pense pas que quiconque croit que la tarification du carbone nous permettra de réduire nos émissions jusqu'au niveau que nous devons atteindre pour respecter nos objectifs de l'Accord de Paris.
    C'est la combinaison de différentes solutions qui nous permettra d'y parvenir, n'est-ce pas?
    J'aimerais souligner que je ne parlerais pas de la tarification du carbone aussi simplement. Ce n'est pas un interrupteur. Si c'en est un, c'est plutôt un gradateur. Il existe de nombreux niveaux de tarification du carbone. On peut avoir une tarification très élevée qui nous permettrait d'atteindre nos objectifs ou une tarification moindre qui ne nous permettrait pas d'atteindre nos objectifs.
    Oui, comme l'a fait remarquer M. Beugin, plus la tarification est élevée, plus vite les gens modifieront leurs comportements.
    C'est exact.
    Votre temps est écoulé.
    Le dernier intervenant pour ce tour est M. Stetski.
    Je crois que vous allez céder votre temps de parole à Mme May ou le partager avec elle.
    Oui, si mes collègues sont d'accord, j'aimerais donner l'occasion à la chef du Parti vert de poser une ou deux questions.
    Madame May, vous avez trois minutes.
    Je vous remercie.
    Je vous suis très reconnaissante, Wayne. Merci.
    Premièrement, je vous remercie. Vous êtes de remarquables leaders d'opinion au Canada et chercheurs sur la tarification du carbone. Je suis très heureuse que vous soyez ici, car même si vous n'êtes pas des spécialistes du climat, vous avez su répondre à certaines des questions qui ne concernaient pas votre domaine.
    Les échanges qui ont eu lieu m'ont rappelé les propos d'une climatologue, Mme Katharine Hayhoe, qui a affirmé récemment — je vais paraphraser — qu'il est étrange que certaines personnes semblent avoir davantage peur d'agir face au changement climatique et d'assumer le coût que cela entraînera que de la fin de l'humanité causée par l'inaction. Les risques sont plutôt grands, et nous ne nous en occupons pas comme il se doit.
    Soit dit en passant, je ne suis pas membre du Comité, mais je proposerais aux membres de s'entretenir à huis clos par vidéoconférence avec la personne que je considère être en ce moment la leader à l'échelle mondiale de l'appel à l'action, l'adolescente suédoise de 16 ans Greta Thunberg. Vous pourriez peut-être discuter avec elle par vidéoconférence.
    Je voudrais profiter de mon temps de parole, qui s'écoule rapidement, pour mettre l'accent sur les solutions que nous pouvons mettre en place, outre la tarification du carbone. Je vais être très claire. Sachez tous que, parmi les députés de l'opposition, je suis la seule qui a voté en faveur de l'ensemble du budget afin que la tarification du carbone soit mise en place. C'est donc important à ce point-là pour moi. Toutefois, cette mesure n'est pas du tout suffisante, car nous savons que l'objectif de l'Accord de Paris est de réduire de 30 % nos émissions d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 2005, mais c'est carrément insuffisant pour maintenir le réchauffement à 1,5 degré Celsius, ce que nous devons faire.
    Je vais m'adresser à vous, David Sawyer, car je sais que vous avez dirigé le volet canadien d'un très gros projet qui s'appelle Deep Decarbonization Pathways. Pourriez-vous nous parler de vos principales conclusions quant aux mesures que le Canada doit prendre pour procéder à la décarbonisation en profondeur?
(1715)
    Oui, bien sûr.
    Le Canada s'est doté d'une structure réglementaire qui fait l'envie du reste du monde et qui constitue un exemple à suivre. Je me trouvais récemment à l'OCDE, et des gens me demandaient « Que fait-on au Canada? » Ce qu'on cherche à faire ailleurs dans le monde, c'est justement combiner les solutions que sont la tarification du carbone, la réglementation, les programmes de subventions à l'innovation, les mesures de contrôle des émissions de méthane et les adapter pour favoriser encore davantage la décarbonisation.
    C'est ce que prévoit largement la politique albertaine sur le changement climatique ainsi que la politique fédérale actuelle. Je le répète, nous avons fait les calculs, et ces politiques peuvent être adaptées pour favoriser une décarbonisation en profondeur. Si on examine les réductions annuelles actuelles, nous pouvons constater que la réglementation sur les véhicules mise en place par le premier ministre Harper contribue à la décarbonisation en profondeur. Nous avons interdit l'utilisation du charbon, ce qui, encore une fois, était un objectif et une politique du premier ministre Harper. Nous devançons à cet égard presque tous les autres pays.
    Puis-je vous demander rapidement où nous pouvons améliorer l'efficacité du réseau électrique est-ouest pour intégrer des sources d'énergie renouvelables?
    Bien sûr. L'électricité décarbonée — davantage d'électricité de charge et d'utilisations finales — est absolument essentielle à la décarbonisation en profondeur. C'est tout ce que j'ai à dire. C'est effectivement une priorité.
    Chers collègues, il nous reste quelques minutes avant la fin de la réunion. Je propose que les deux côtés disposent de quatre minutes. Je serai strict avec le respect du temps, car autrement nous allons manquer de temps.
    Je vais commencer par ce côté. Quelqu'un veut-il prendre la parole pour quatre minutes?
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Des politiciens provinciaux ont évoqué à de nombreuses reprises l'idée que la tarification de la pollution, particulièrement la tarification du carbone, pourrait entraîner une récession au Canada cette année. Est-ce que c'est le moindrement possible?
    Je vais demander à M. Rivers de répondre en premier.
    Rien ne permet d'affirmer que la tarification du carbone de l'ampleur qu'on propose et qui sera en vigueur risque d'entraîner une récession. Je pense que nous le savons intuitivement. La tarification sur le carbone équivaut à quelques cents pour l'essence et à un petit montant pour le gaz naturel.
    C'est le genre de variations des prix qui se produisent couramment et qui n'entraînent pas une récession. Nous n'avons pas à nous fier uniquement à notre intuition, car il existe une foule d'études sur le sujet. Le gouvernement canadien en a effectué un grand nombre, à l'instar d'universitaires. Il n'existe aucune preuve que cette mesure aura une grande incidence sur l'économie. Elle ne changera pas grand-chose. Nous ne savons pas si elle aura une incidence légèrement positive ou négative, mais nous savons que les répercussions seront minimes.
    Monsieur Cameron, convenez-vous que le premier ministre Ford tient des propos qui ne sont pas réalistes?
    Oui, j'en conviens. Il s'agit d'une hausse de seulement 4 cents et demie du litre d'essence — nous observons ce genre de hausse tous les mois, voire toutes les semaines — et en plus l'argent sera retourné aux Ontariens; 90 % des recettes seront remis directement aux ménages sous la forme d'un chèque et 10 % seront répartis de diverses façons. S'il y a une légère hausse du prix de l'essence et que tout l'argent revient aux Ontariens, il est difficile de voir comment cela pourra avoir une incidence sur l'économie. Il pourrait s'agir d'une incidence de l'ordre de 0,001 %.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Le taux d'inflation en Ontario était moins élevé en 2017, lorsque le système de plafonnement et d'échange était en vigueur. La hausse de l'inflation était moindre qu'au cours de l'année précédente et de l'année suivante. La croissance du PIB est positive lorsqu'il y a une tarification du carbone en Ontario. Nous avons fait l'analyse de prévisions et nous avons constaté que l'incidence sur le PIB correspondait à un ralentissement de la croissance pendant quatre jours en 2020. À 20 $ la tonne, nous avons effectivement de la difficulté à voir une incidence, et les données macroéconomiques de Statistique Canada n'indiquent aucune répercussion apparente.
    Je crois qu'il faut souligner que les données pour l'année précédente complète révèlent que les quatre provinces qui avaient mis en place une tarification du carbone ont affiché la croissance économique la plus rapide au Canada. Il ne s'agit pas d'un lien de cause à effet, mais c'est un argument très valable pour réfuter l'idée que la tarification du carbone pourrait causer une récession. Nous en avons fait l'expérience et nous n'avons pas constaté ce résultat.
    La parole est maintenant à Mme Dzerowicz, s'il nous reste du temps.
    Vous avez mentionné, monsieur Cameron, que 90 % des recettes sont retournés aux citoyens et que 10 % sont répartis de diverses façons. Je crois que l'argent bénéficiera non seulement aux collectivités agricoles, mais aussi à des régions comme Davenport, à nos écoles et à nos hôpitaux. Est-ce la bonne façon de répartir l'argent? Est-ce que cela est vu d'un bon oeil dans le cadre du plan global?
(1720)
    Nos recommandations en ce qui a trait aux 10 %... Le seul secteur qui est touché et qui ne reçoit rien directement est celui des petites et moyennes entreprises. Nous recommandons de réduire le taux d'imposition des petites entreprises de 0,5 %. Ce serait essentiellement une façon d'utiliser cette source de revenus. Les écoles et les hôpitaux sont des établissements financés par la province. Je crois que le gouvernement fédéral a éliminé les programmes de réduction des émissions dans les écoles et les hôpitaux, alors l'incidence est moindre sur eux que sur les petites et moyennes entreprises.
    Alors les 10 % des recettes ne sont pas redistribués actuellement aux petites et moyennes entreprises.
    Le gouvernement n'a pas encore décidé comment il va répartir ces recettes.
    D'accord, je vous remercie.
    Monsieur Godin, allez-y.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vais m'adresser à M. Cameron.
    Dans votre introduction, vous avez mentionné d'entrée de jeu que le leadership est à venir. C'est vrai, effectivement. Il faut mettre en place des mécanismes qui, s'ils fonctionnent bien, nous permettront de devenir des leaders. Je suis entièrement d'accord avec vous. On ne peut pas se déclarer leader, parce qu'on en est aux balbutiements.
    La majorité des témoins ont beaucoup parlé du succès de la Colombie-Britannique sur le plan de la taxe sur le carbone en lien avec l'émission des gaz à effet de serre. Je ne sais pas si je comprends bien — je ne suis pas un expert —, mais j'ai lu sur le site Web de l'Office national de l'énergie une analyse, datée du 27 décembre 2017, dans laquelle on mentionne que les émissions de gaz à effet de serre de la Colombie-Britannique étaient à leur plus bas en 2009. Il y a eu des augmentations jusqu'en 2014, une réduction en 2015 et de nouveau une augmentation en 2016. Pourtant, les émissions n'ont jamais été aussi basses qu'en 2009.
    On s'inspire d'un modèle, et vous encensez la taxe sur le carbone de la Colombie-Britannique. En revanche, la documentation que j'ai consultée laisse entendre que ce n'est pas totalement vrai que les émissions des gaz à effet de serre ont diminué en Colombie-Britannique.
    Pouvez-vous me parler de cela?

[Traduction]

    Comme d'autres témoins l'ont fait remarquer, de nombreux facteurs peuvent avoir une incidence sur les émissions de gaz à effet de serre. Pour déterminer précisément les répercussions d'un seul facteur, il faut utiliser des statistiques pour essayer d'établir ce qui est attribuable à la tarification du carbone et ce qui ne l'est pas. Autrement dit, quel aurait été le prix du carbone n'eût été la taxe sur le carbone en Colombie-Britannique?
    L'analyse statistique effectuée par Nicholas et d'autres révèle que les émissions auraient été encore plus élevées en Colombie-Britannique si la province n'avait pas mis en place une taxe sur le carbone. Cette conclusion découle d'une analyse économétrique rigoureuse et très crédible.
    Il convient aussi de souligner que le PIB de la Colombie-Britannique a affiché une croissance plus rapide que celui de toute autre province, et la population de la Colombie-Britannique est en croissance. Les émissions augmentent à un rythme plus lent que celui de la croissance de la population et de l'économie.

[Français]

     C'est comme certaines autres provinces au Canada. On ne peut pas dire que, sans taxe sur le carbone, la situation aurait été différente, et l'augmentation aurait été pire. Je ne peux pas tenir cela pour acquis, car ce que vous venez d'affirmer est hypothétique.
    J'ai une dernière question à poser, rapidement. La taxe sur le carbone que le gouvernement libéral fédéral veut imposer aux provinces nous permettra-t-elle d'atteindre l'objectif de 2030?
    Ma question est simple, mais la réponse ne l'est peut-être pas.

[Traduction]

    Je crois qu'il est clair que cette mesure contribuera à réduire les émissions, et jusqu'à maintenant..

[Français]

    Allons-nous atteindre l'objectif?

[Traduction]

    Les estimations publiées donnent à penser que nous n'atteindrons pas entièrement nos objectifs pour 2030. La tarification du carbone combinée à la réglementation concernant le méthane et le charbon ne nous permettra pas d'atteindre entièrement la cible de 2030.

[Français]

    Ce que je comprends, c'est que nous avions fixé des objectifs lorsque nous étions au pouvoir et que le gouvernement libéral a repris nos objectifs. Aujourd'hui, on se rend compte que, même si on met cela en place, on n'atteindra pas les objectifs fixés.
    Ne devrait-on pas trouver d'autres solutions? Ne devrait-on pas être plus innovateur? Ne devrait-on pas en faire davantage pour être de vrais leaders?
    Voulez-vous répondre à ma question, monsieur Beugin?

[Traduction]

    Je ne crois pas que c'est une question d'outil, mais bien une question de rigueur. On peut avoir des règlements ou des politiques sur la tarification du carbone plus musclés. Pour accentuer la réduction des émissions, il nous faut des politiques plus rigoureuses. Cela signifie qu'il faut accroître la tarification du carbone au fil du temps ou même mettre en place des politiques de réglementation plus énergiques. Je le répète, la question n'est pas de savoir s'il faut ou non une tarification du carbone.
(1725)
    Je vous remercie.
    Monsieur Stetski, les quatre dernières minutes vous appartiennent.
    J'ai une brève question à poser. Je ne me souviens plus si c'était M. Cameron ou M. Sawyer, mais l'un de vous a mentionné que les chambres de commerce ont décidé de soutenir la mesure. J'aimerais que vous m'en disiez un peu plus à ce sujet.
    Dans un rapport publié en décembre dernier, la Chambre de commerce du Canada a fait savoir qu'elle appuie la tarification du carbone, qu'elle considère comme une mesure de réduction des émissions de gaz à effet de serre transparente et axée sur le marché.
    Bien entendu, la Chambre de commerce du Canada représente de petites entreprises partout au pays.
    Je vais vous poser une dernière question. Si vous pouviez parler aux premiers ministres des provinces qui s'opposent à la tarification du carbone actuellement, que leur diriez-vous? Comment pourriez-vous les convaincre que c'est une bonne mesure à adopter?
    Je crois que je reprendrais certains des propos qui ont été formulés, à savoir notamment que la situation varie d'une province à l'autre et que la tarification du carbone est une politique générale qui offre de la souplesse quant à l'utilisation des recettes. Elle offre également aux gens beaucoup de souplesse quant aux moyens d'adaptation. Le gouvernement n'impose donc pas des solutions et n'impose pas non plus des innovations ou ce genre de choses; il laisse le marché produire les résultats souhaités.
    Je crois que je répéterais ce que nous avons mentionné plus tôt, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une politique dont l'effet est prouvé. Elle contribue à réduire les émissions, et ce, à un coût très minime, moindre que toute autre solution pour réduire les émissions.
    Étant donné qu'il faut agir et qu'il faut une politique, il vaut mieux en avoir une dont le coût est minime plutôt qu'une autre qui coûte plus cher. La tarification du carbone constitue la solution la moins coûteuse de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
    Sur le plan politique, les quatre provinces qui ne sont pas en faveur de la taxe fédérale sur le carbone ont la possibilité d'établir leur propre régime de tarification du carbone, qu'il s'agisse d'un système de plafonnement et d'échange ou d'une taxe sur le carbone, et d'utiliser les recettes comme bon leur semble. Si elles ne veulent pas du régime fédéral, elles ont tout le loisir d'établir leur propre système.
    Je dirais aux premiers ministres de tout simplement mettre en oeuvre les systèmes qu'ils ont conçus. Ils sont prêts à aller de l'avant; ils les ont examinés et ils peuvent tout simplement les mettre en oeuvre.
    Je vous remercie.
    Nous sommes rendus à la fin de la réunion.
    J'aimerais remercier tous les témoins pour leur présence. Nous avons eu une très bonne discussion.
    L'avis que nous avons reçu indique que notre prochaine réunion doit avoir lieu jeudi, mais en fait elle se tiendra mercredi à 15 h 30. L'avis a été mis en ligne, ce qui est une bonne chose. Je ne veux pas que quiconque rate cette réunion. La discussion sera peut-être un peu différente mercredi, mais je crois que cette séance est importante.
    Encore une fois, je vous remercie d'avoir comparu devant le Comité. Je remercie tous les membres pour les formidables et respectueuses discussions que nous avons eues aujourd'hui. Profitez bien du reste de cette journée hivernale à Ottawa.
    La séance est levée.
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