INDU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 9 décembre 2004
¹ | 1530 |
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.)) |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
¹ | 1535 |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC) |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Gilles Gauthier (directeur, Direction des politiques du droit corporatif et de l'insolvabilité, Secteur des politiques, ministère de l'Industrie) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
Le président |
M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC) |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
º | 1605 |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
º | 1610 |
M. Gilles Gauthier |
M. Wayne Lennon (chargé de projet principal, Direction des politiques du droit corporatif et de l'insolvabilité, Secteur des politiques, ministère de l'Industrie) |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
Le président |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
º | 1615 |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ) |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
º | 1620 |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
Le président |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
M. Paul Crête |
M. Gilles Gauthier |
º | 1625 |
M. Paul Crête |
Le président |
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.) |
M. Gilles Gauthier |
º | 1630 |
Mme Coleen Kirby (gestionnaire, Section des politiques, Corporations Canada, ministère de l'Industrie) |
M. Wayne Lennon |
M. Andy Savoy |
M. Gilles Gauthier |
º | 1635 |
M. Wayne Lennon |
M. Andy Savoy |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
M. Wayne Lennon |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
M. Brian Masse |
M. Wayne Lennon |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
º | 1640 |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
º | 1645 |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Gilles Gauthier |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
M. Gilles Gauthier |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
M. Brian Masse |
Mme Coleen Kirby |
Le président |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
º | 1650 |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
º | 1655 |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
M. Gilles Gauthier |
Mme Christiane Gagnon |
Le président |
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC) |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
M. Michael Chong |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
M. Michael Chong |
Le président |
M. Wayne Lennon |
Le président |
M. Bradley Trost |
» | 1700 |
M. Gilles Gauthier |
M. Bradley Trost |
M. Gilles Gauthier |
M. Bradley Trost |
M. Gilles Gauthier |
» | 1705 |
Mme Coleen Kirby |
M. Wayne Lennon |
M. Bradley Trost |
Mme Coleen Kirby |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
» | 1710 |
M. Bradley Trost |
M. Gilles Gauthier |
M. Wayne Lennon |
M. Bradley Trost |
M. Gilles Gauthier |
M. Bradley Trost |
Mme Coleen Kirby |
M. Bradley Trost |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Werner Schmidt |
Le président |
M. Werner Schmidt |
M. Brian Masse |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
Mme Coleen Kirby |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
» | 1715 |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
M. Werner Schmidt |
M. Gilles Gauthier |
Mme Coleen Kirby |
M. Werner Schmidt |
Mme Coleen Kirby |
M. Werner Schmidt |
Le président |
» | 1720 |
Mme Coleen Kirby |
Le président |
Mme Coleen Kirby |
Le président |
Mme Coleen Kirby |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie |
|
l |
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l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 9 décembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du 9 décembre du Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie. Nous entamons aujourd'hui l'étude du projet de loi C-21, Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif et les autres organisations sans capital-actions.
Nous recevons aujourd'hui un certain nombre de fonctionnaires du ministère qui viennent pour nous aider et je crois savoir que M. Gauthier parlera une vingtaine de minutes. Nous avons pas mal de documentation. Nous disposerons d'amplement de temps pour que les membres puissent poser des questions. Nous savons que c'est un projet de loi plutôt volumineux et de grande envergure, si je puis employer ces termes, et nous sommes impatients de nous atteler à cette tâche.
Avant de commencer, j'informe les membres que notre prochaine réunion de mardi portera sur notre étude de la stratégie industrielle. Nous recevrons le Conseil canadien des chefs d'entreprise, SNC-Lavalin, l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques et l'Association canadienne des producteurs pétroliers. Ils ont tous accepté de venir nous aider mardi et, ensuite, jeudi prochain, nous poursuivrons avec le projet de loi C-21.
Je veux également faire savoir que j'ai parlé avec Werner et avec d'autres, au vu de l'expérience de nos premiers travaux sur la stratégie industrielle, de la possibilité, non pas de modifier notre étude, mais de la recentrer de façon à ce qu'il soit plus facile pour le greffier et moi-même et les chargés de recherche de planifier nos travaux à partir de maintenant. Je ne pense pas que Werner veuille en faire une proposition en règle, bien que je vais faire traduire son projet et le distribuer en invitant les autres membres à exposer leurs idées—mais uniquement si vous êtes d'accord, tout d'abord, pour recentrer notre étude sur la stratégie, aux fins de planification. Peut-être pouvons-nous laisser les choses en l'état jusqu'à la reprise en février, ou bien apporter des modifications, soit mineures soit majeures, à votre gré, aux fins de la planification.
Aussi, dans le courant de la séance d'aujourd'hui, pendant que nous avons le quorum, je demanderai aux membres d'adopter le budget pour notre étude du projet de loi C-21, que vous avez dans votre documentation. Comme tous les budgets, les chiffres sont des maximums.
Brian.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Au sujet du premier point, j'aimerais savoir si nous sommes ici en sous-comité. Il ne me paraît guère légitime pour le comité de se réunir indépendamment et de modifier l'ordre du jour.
Le président: Non, non.
M. Brian Masse: Dans ce cas, il y a un malentendu, car je pensais que...
Le président: Tout ce que je comptais faire, Brian, était de distribuer officieusement à tout le monde, par courriel, l'idée que propose Werner.
¹ (1535)
M. Brian Masse: D'accord, excellent.
Le président: Et j'inviterai ensuite les collègues de part et d'autre à lire sa proposition, la comparer avec l'étude initiale et voir si le changement leur paraît judicieux ou bien de nous faire part de leurs propres études. Donc, nous pourrions, par courrier, dégager un consensus sur le titre à donner à cette étude à partir de maintenant, sur la base de l'expérience accumulée jusqu'à présent. Il s'agira donc simplement d'une communication officieuse par courriel pour essayer de créer un consensus. Ensuite, ultérieurement, nous pourrons officialiser le tout lors d'une réunion. Mais faisons un peu le travail préparatoire. Nous ne sommes pas un sous-comité.
Cela vous convient-il?
M. Brian Masse: Oui, merci.
Le président: Quelqu'un veut-il proposer l'adoption du budget?
M. Brian Masse: Je propose l'adoption du budget.
Le président: Quelqu'un appuie-t-il la motion?
M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC): Le coût va-t-il être de 63 200 $?
Le président: Oui. C'est sur la base des chiffres ordinaires pour la comparution des témoins. C'est un maximum et j'espère que nous n'aurons pas besoin d'autant, mais cela dépendra du nombre de témoins que nos collègues voudront entendre.
M. Werner Schmidt: J'ai une question, monsieur le président. Si nous n'avons pas besoin de l'intégralité de ce montant pour le projet de loi, pouvons-nous transférer le solde à notre étude sur la stratégie industrielle, en cas de besoin?
Le président: Je crois savoir que chaque projet de loi ou chaque étude doit être assorti de son propre budget.
M. Werner Schmidt: Je vois.
Le président: Donc, si nous ne dépensons pas la somme... Ce qui compte, ce sont nos dépenses globales, et si nous avions 50 projets de loi par an, nous demanderions un budget pour 50 projets de loi; si nous avions dix études, nous aurions besoin d'argent pour dix études. Je ne pense donc pas qu'il y ait lieu de trop s'inquiéter...
M. Werner Schmidt: Je me m'inquiète pas au sujet des projets de loi, mais au sujet de notre étude.
Le président: Oui. Je pense que si nous avons besoin de plus de fonds pour l'étude, car nous avons déjà un budget pour elle, et je soumettrai un budget révisé au Comité de liaison.
M. Werner Schmidt: D'accord, dans ce cas j'appuie la motion.
(La motion est adoptée)
Le président: Nous venons d'adopter un montant de 63 200 $ au maximum pour l'étude du projet de loi C-21, ce qui autorise la venue de 50 témoins, si nécessaire. Merci, collègues.
Là-dessus, nous passons à notre sujet du jour.
Merci d'être venu, monsieur Gauthier.
Vous êtes accompagné, je crois, de M. Lennon et de Coleen Kirby. Merci à tous trois de venir nous rencontrer.
J'invite M. Gauthier à commencer. Merci, monsieur.
[Français]
M. Gilles Gauthier (directeur, Direction des politiques du droit corporatif et de l'insolvabilité, Secteur des politiques, ministère de l'Industrie): Monsieur le président, membres du comité, merci. Je suis heureux d'avoir l'occasion de discuter avec vous du projet de loi C-21, Loi régissant les organisations à but non lucratif et les autres organisations sans capital-actions. Je mentionne aussi qu'il y a d'autres fonctionnaires de mon service dans la salle, ainsi que Mme Jane Burke-Robertson, avocate-conseil du secteur privé qui nous a aidés à rédiger le projet de loi. Au besoin, je ferai appel à eux pour répondre à vos questions.
Monsieur le président, ce projet de loi est le fruit de sept ans d'élaboration de politiques, de consultations et de rédaction législative. Il répond aux besoins exprimés par un large éventail d'organisations bénévoles, d'administrateurs, de dirigeants, et par les milieux juridiques et comptables, pour n'en nommer que quelques-uns.
Notre objectif premier était d'élaborer une loi répondant aux besoins du secteur bénévole tout en exigeant que ceux qui sollicitent des fonds auprès du public ou du gouvernement fassent preuve de plus de transparence et d'imputabilité.
Le projet de loi permet de concilier la protection des renseignements personnels et la transparence, les droits des membres et l'obligation qu'ont les administrateurs d'agir dans l'intérêt supérieur de l'organisation, ainsi que le besoin d'établir un solide système de régie interne et le désir qu'ont les organisations de disposer d'un maximum de flexibilité dans leurs activités.
Comme vous le savez, le secteur à but non lucratif est très diversifié. Il existe plus 160 000 organisations à but non lucratif au Canada, dont 18 000 sont constituées en vertu d'une loi fédérale. Elles prennent part à une multitude d'activités et sont, notamment, d'importants partenaires du gouvernement lorsqu'il s'agit de répondre aux besoins des Canadiens. On compte parmi ces organisations des oeuvres de bienfaisance, des fondations privées, des groupes religieux, des clubs de golf et de curling, des aéroports, des groupes culturels, des groupes environnementaux, des associations du milieu des affaires et des associations de consommateurs.
Chacun de ces types d'organisations a des exigences qui lui sont propres, et la longueur et la complexité du projet de loi s'explique en partie par le fait que nous avons besoin d'une loi qui puisse s'appliquer de manière générale à l'ensemble de ces organisations.
Les dispositions détaillées du projet de loi C-21 témoignent de l'établissement d'un ensemble de pratiques qui ont évolué depuis l'entrée en vigueur de la loi actuelle, la Loi sur les corporations canadiennes, qui date de 1917. Ces dispositions s'inspirent du libellé d'autres lois actuelles, comme la Loi canadienne sur les sociétés par actions, la Loi sur les coopératives et les lois provinciales récentes sur les organisations à but non lucratif.
L'objectif du projet de loi est bien simple: fournir au secteur bénévole et au secteur à but non lucratif un cadre moderne en matière de droit des sociétés, lequel permettra aux organisations de se constituer plus aisément en personnes morales, facilitera leur régie interne grâce à l'établissement de normes et de règles claires, et favorisera la responsabilisation.
Bien entendu, le projet de loi ne permet pas de relever tous les défis du secteur à but non lucratif. Il constitue toutefois une démarche concrète qui permettra aux organisations de se prévaloir plus facilement de la protection que leur offre le droit des sociétés moderne.
¹ (1540)
[Traduction]
Monsieur le président, je projet de loi s'appliquera à l'ensemble des organisations à but non lucratif constituées en vertu d'une loi fédérale, aux autres organisations sans capital-actions existantes, ainsi qu'à toute entité décidant de se constituer en personne morale dans l'avenir.
Fondamentalement, le projet ne comprend pas de restrictions juridictionnelles quant à son application, mais il stipule que les organisations ne doivent pas avoir de capital-actions, être des institutions financières ou des établissements d'enseignement, ni, bien entendu, avoir été créées pour mener des activités à caractère illicite.
Le projet de loi contient 19 parties, dont les membres ont reçu un résumé. Aux fins de concision, je mettrai l'accent sur les dispositions qui auront une incidence importante sur le milieu des organisations à but non lucratif constituées en vertu d'une loi fédérale. Je dirais simplement ici que plusieurs parties du projet de loi reproduisent les dispositions du droit commercial usuel en ce qui concerne les instruments financiers, les titres de créances et les actes de fiducie, la modification de la structure, la liquidation et la dissolution, ainsi que le mise sous séquestre.
Toutes ces dispositions sont analogues à celles de la Loi canadienne sur les sociétés par actions et reflètent les pratiques actuelles. Toutes ces parties, au total, constituent une centaine des 330 articles du projet de loi.
L'ensemble de ces dispositions ne s'appliquent pas à toutes les organisations; elles sont néanmoins essentielles pour que la loi-cadre en matière de droit corporatif soit exhaustive.
Le processus de constitution est énoncé dans la Partie 2. Le projet de loi propose un système de constitution « de plein droit », ce qui signifie que la constitution est acceptée suite au simple dépôt de statuts constitutifs; pour ce faire, il suffit d'utiliser le formulaire approprié et d'acquitter le droit afférent. Cette disposition permettra d'accélérer grandement la processus de constitution. Des démarches qui exigeaient environ deux semaines en vertu du système de « lettres patentes » actuelles ne prendront plus qu'un ou deux jours, ou même que quelques heures, puisqu'il sera également possible de déposer une demande par voie électronique.
En outre, les organisations pourront créer différentes classes de membres, régionales ou autres, ce qui leur offrira la souplesse nécessaire pour établir une structure décisionnelle conforme à leurs besoins. Une fois constituée, une organisation aura la capacité juridique d'une personne physique, c'est-à-dire qu'elle pourra exercer ses activités en son nom propre, conclure des contrats et posséder des biens. La Partie 3 contient des dispositions détaillées à cet égard.
L'organisation devra maintenir les livres de régie interne, soit les registres des directeurs et des membres, les procès-verbaux des réunions et les états financiers, etc., tel que spécifié à la Partie 4.
La Partie 9 fait état des dispositions relatives à la nomination des administrateurs et des dirigeants ainsi qu'à leurs droits et obligations. Les organisations doivent avoir au moins un administrateur, exception faite de celles qui sollicitent des fonds auprès du public ou qui reçoivent des fonds du gouvernement, auquel cas un minimum de trois administrateurs est exigé. Les administrateurs sont responsables de la gestion de l'organisation. Le projet de loi stipule que les administrateurs doivent essentiellement tenir un rôle actif dans les affaires du conseil d'administration, assumer leurs responsabilités avec l'attention et la diligence qui s'imposent, et agir dans l'intérêt supérieur de l'organisation.
C'est ce que nous appelons la norme de diligence, qui est bien décrite par le droit des sociétés et qui vaut, à notre avis, tout autant pour le secteur à but non lucratif. Quelles que soient la taille et la nature d'une organisation sans but lucratif, ses membres, ou le public en général lorsqu'il s'agit d'une organisation qui recourt à la sollicitation, sont en droit d'escompter que les administrateurs agissent effectivement avec honnêteté et de bonne foi dans le cadre des activités de l'organisation.
¹ (1545)
Advenant un différend quant à la signification exacte du devoir de diligence proposé, les tribunaux ont toute l'expérience nécessaire pour résoudre des litiges de cette nature, d'autant que ce concept a été précisé plus avant dans un arrêt récent de la Cour suprême.
Le projet de loi assure également aux administrateurs une protection plus claire contre les responsabilités injustifiées, cette protection étant expressément liée au devoir de diligence. Les administrateurs respectant les normes prescrites de diligence sont protégés par un moyen de défense reposant sur la « diligence raisonnable ». En d'autres mots, ils ne seront pas tenus responsables s'ils accordent une attention adéquate à leur travail et accomplissent leur tâche de leur mieux et dans l'intérêt supérieur de l'organisation. Cette dernière pourra accorder une indemnité aux administrateurs si des poursuites sont intentées contre eux, à condition bien sûr que les administrateurs aient agi conformément à la norme de diligence raisonnable. Les organisations pourront en outre acheter une assurance-responsabilité pour leurs administrateurs et leurs dirigeants.
Au cours des consultations qui ont précédé le projet de loi, les répondants se sont dits très favorables à l'établissement d'une norme claire de diligence raisonnable et d'une défense assortie afin de réduire l'incertitude et d'aider les organisations à attirer des personnes qualifiées pour agir en qualité d'administrateurs. L'intégration d'une norme formelle de diligence et d'un moyen de défense basé sur la diligence raisonnable permettra de corriger ce qui est généralement considéré comme l'une des principales lacunes de la loi actuelle.
Enfin, le projet de loi comprend une disposition sur le conflit d'intérêt qui exige que les administrateurs divulguent les conflits d'intérêt pouvant découler des transactions matérielles de l'organisation et s'abstiennent de prendre part aux décisions lorsque la situation l'impose.
Monsieur le président, les organisations visées par cette loi sont généralement dirigées par leurs membres. Les organisations disposeront d'une souplesse accrue pour élaborer des règlements répondant à leurs besoins et à ceux de leurs membres. Voilà qui forme un contraste criant avec la situation qui prévaut actuellement en raison du système de lettres patentes, qui exige que les règlements soient soumis à l'approbation du gouvernement avant de prendre effet.
Tous les droits des membres sont énoncés dans la Partie 10. Ils visent à favoriser une participation active et à inciter les membres à superviser correctement et efficacement les activités des administrateurs. Les membres ont, entre autres, le droit d'accéder aux registres de l'organisation, notamment à ceux des membres et des administrateurs, à la liste des membres et à leurs adresses, et à des exemplaires des états financiers et des rapports d'experts comptables. La loi actuelle ne comprend qu'un nombre restreint de dispositions à ce sujet.
Les dispositions régissant l'accès à la liste des membres prévoient également un certain nombre de mesures de protection visant à empêcher les abus et à atténuer les préoccupations relatives à la protection des renseignements personnels, craintes qui ont été fréquemment soulevées au cours du processus de consultation.
Premièrement, le grand public n'a pas le droit d'accéder à la liste des membres : seuls les membres le peuvent. Deuxièmement, chaque membre ne peut accéder à la liste qu'une fois par année et doit, pour ce faire, signer une déclaration solennelle selon laquelle il n'utilisera cette liste qu'aux fins prévues par la loi. Troisièmement, une organisation ou un membre peut également s'adresser au directeur nommé en vertu de la loi et demander l'autorisation de refuser l'accès au registre lorsque la divulgation d'information pourrait être préjudiciable à une personne ou à l'organisation.
Sous le régime de la Partie 10, les membres peuvent exiger la convocation d'une réunion des membres et y formuler des propositions. Certaines dispositions précisent que les membres doivent être avisés de la tenue des réunions et peuvent voter, s'ils sont absents, par vote postal. Ces dispositions permettent à chaque organisation de stipuler dans ses statuts la meilleure façon de procéder pour cela. Pour garantir l'impartialité du processus, le règlement d'application de la loi précisera l'éventail des options possibles et, si nécessaire, il sera possible de s'adresser au directeur nommé en vertu de la loi si l'on souhaite recourir à une méthode qui ne serait pas mentionnée dans le règlement.
¹ (1550)
Enfin, les membres pourront recourir à des mesures correctives si leurs droits ont été enfreints, utilisant le recours en cas d'abus ou le recours similaire à l'action oblique pour faire valoir les droits de l'organisation. Ces recours sont précisés dans la Partie 16 du projet de loi.
En raison du renforcement des droits des membres, il a fallu réagir aux préoccupations des organisations religieuses qui s'inquiètent du fait qu'un membre pourrait contester en justice une de leurs décisions en faisant valoir que ses droits ont été brimés. Le projet de loi prévoit un moyen de défense fondé sur un précepte religieux, de sorte que lorsqu'une organisation prend une décision reposant sur sa doctrine ou ses préceptes religieux, cette décision ne peut être infirmée par les tribunaux.
La notion de « précepte religieux » n'est pas définie de façon à permettre aux tribunaux de l'appliquer au cas par cas. Effectivement, les tribunaux canadiens ont en de nombreuses occasions été appelés à évaluer les effets d'une poursuite fondée sur les préceptes religieux des particuliers en recourant aux principes de la justice naturelle. On peut s'attendre à ce que les tribunaux adoptent un raisonnement semblable aux fins de l'application de cette disposition particulière.
Les Parties 11 et 12 stipulent des dispositions régissant la responsabilité comptable. Les exigences relatives à la présentation de l'information financière différeront en fonction de deux critères : le fait qu'une organisation recoure à la sollicitation, c'est-à-dire qu'elle sollicite des dons auprès du public ou reçoit des subventions gouvernementales; ou bien ne sollicite pas de dons, c'est-à-dire qu'elle est financée directement par ses membres. Le deuxième critère porte sur la taille de l'organisation, mesurée selon ses revenus annuels. Ces seuils seront définis dans le règlement d'application.
Aussi, le projet de loi établit des catégories permettant de déterminer si une organisation doit faire l'objet d'une vérification exhaustive ou s'il suffira de procéder à une mission d'examen, mécanisme légèrement moins rigoureux et certainement moins onéreux. Dans le cas d'organisations de très petite taille, les membres peuvent décider, sous réserve d'unanimité, de se soustraire entièrement à un examen financier formel.
Toutes les organisations devront offrir aux membres, aux administrateurs et aux dirigeants un accès aisé à leurs états financiers et aux rapports d'experts comptables, le cas échéant. De plus, les organisations qui ont recours à la sollicitation devront soumettre leurs états financiers au gouvernement, c'est-à-dire à Corporations Canada, pour que les renseignements soient accessibles au public. La communication des états financiers constitue l'un des moyens essentiels permettant aux organisations de faire preuve d'une transparence et d'une responsabilité accrues à l'égard des millions de Canadiens qui font des dons à des oeuvres de bienfaisance.
Au total, les exigences relatives à la présentation de l'information financière prévues par le projet de loi offriront une souplesse de loin supérieure à celle permise par la loi actuelle, qui oblige toutes les organisations à se soumettre à une vérification annuelle, et ce même si nous savons que cette obligation n'est pas respectée dans bien des cas. Du même coup, la responsabilité des organisations s'en trouvera grandement accrue, puisqu'il leur sera formellement demandé de rendre leurs états financiers et les rapports d'experts comptables facilement accessibles à leurs membres et, dans le cas d'organisations ayant recours à la sollicitation, au public en général.
Le projet de loi prévoit la nomination d'un directeur en vertu de la loi, qui sera en fait le même directeur qui a été nommé en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Ce directeur est à la tête de Corporations Canada, qui relève d'Industrie Canada et administre l'ensemble des lois fédérales régissant les sociétés. Il sera responsable des questions administratives d'ordre général, conformément à la Partie 18. Il sera également investi d'un pouvoir d'enquête afin de régler les questions découlant de l'administration de la loi et d'obtenir une ordonnance des tribunaux.
Il faut toutefois souligner qu'au Canada l'application du droit des sociétés repose avant tout sur le droit à des actions privées, ce qui explique que la loi insiste sur la responsabilité des membres et sur le recours aux tribunaux. C'est ce que confirment les Parties 15 et 16. Un certain nombre d'organisations sont actuellement constituées en vertu d'une loi spéciale du Parlement et sont régies par la Partie 3 de la Loi sur les corporations canadiennes. Il existe plus de 200 de ces entités, dont la plupart ont été établies il y a plus de 50 ans.
En vertu de la Partie 19, ces organisations, lorsqu'elles ne disposent pas d'un capital-actions, seront assujetties au cadre du projet de loi et seront soumises aux mêmes obligations de présentation de l'information financière de base, c'est-à-dire la soumission de rapports annuels et la tenue de réunions annuelles.
¹ (1555)
En outre, la Partie 19 élargira la portée des dispositions relatives au changement de nom, à la liquidation et à la dissolution de ces organisations; il sera donc moins nécessaire de recourir à une nouvelle loi spéciale pour chaque modification, comme c'est le cas actuellement.
Au cours des dernières années, plusieurs sénateurs ont souligné à quel point il est compliqué et coûteux pour les organisations de modifier leur charte puisqu'il faut chaque fois modifier la loi. Le projet de loi mettra fin à cette situation en permettant d'effectuer ces modifications au moyen de procédures administratives plutôt que de modifications législatives. Il n'élimine évidemment pas le droit du Parlement de proposer et d'adopter des lois concernant ce type d'organisations.
[Français]
Monsieur le président, le dernier point que j'aimerais aborder est le processus de transition. Les organisations à but non lucratif actuellement régies par la Loi sur les corporations canadiennes disposeront de trois ans pour se soumettre à la nouvelle loi.
Puisque les parties I et II de la Loi sur les corporations canadiennes ne s'appliqueront plus, elles seront abrogées afin d'éviter qu'il y ait confusion. Il n'existera donc plus de chevauchement ou de contradiction dans les règles qui s'appliquent aux organisations à but non lucratif constituées sous le droit fédéral.
Aucuns frais ne seront imposés dans le cadre de ce processus. Si une organisation ne fait pas de demande de transition au cours de la période prévue de trois ans, le directeur, nommé en vertu de la loi, amorcera le processus de dissolution au cours duquel on communiquera de nouveau avec l'organisation afin de confirmer son statut. Tous les efforts nécessaires seront déployés pour communiquer avec chaque organisation constituée présentement en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes et les renseigner au sujet de la nouvelle loi. Nous nous efforcerons également de les aider à effectuer la transition. Par exemple, nous préparerons des modèles de statuts constitutifs et de règlements internes auxquels le public aura accès, ce qui facilitera grandement la tâche des petites organisations à but non lucratif, qui n'ont peut-être pas les moyens financiers de recourir aux services d'un conseiller juridique pour effectuer la transition.
En ce qui a trait aux nouvelles organisations qui pourraient souhaiter se constituer en vertu d'une loi fédérale, les frais qui devront être versés à cet égard seront établis par le règlement. Il en coûte actuellement 200 dollars pour effectuer une demande de constitution et 30 dollars de plus pour soumettre la déclaration annuelle obligatoire. Nous sommes présentement en train de compléter nos analyses de coûts, et il ne semble pas que des changements significatifs à la structure des frais soient nécessaires. Nous espérons compléter nos analyses au début de l'année prochaine. Le barème des frais devra, en outre, respecter les exigences gouvernementales en matière de recouvrement des coûts.
Monsieur le président, le temps n'a peut-être pas permis de traiter toutes les dispositions et tout le contenu de la loi, mais j'espère au moins en avoir clarifié les principaux éléments. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions et à celles des membres du comité. Merci.
º (1600)
Le président: Merci, monsieur Gauthier.
Nous allons commencer par M. Michael Chong.
[Traduction]
M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai plusieurs questions portant sur divers aspects du projet de loi, mais auparavant j'aimerais en savoir un peu plus sur l'Initiative du secteur bénévole qui a abouti à ce projet de loi. J'aimerais savoir, en particulier, si l'ISB a bien été menée à terme. Deuxièmement, est-ce que la totalité des 94,6 millions de dollars initialement alloués à cela ont été dépensés?
Ce n'est qu'une très courte question. J'en aurais d'autres après.
M. Gilles Gauthier: Merci.
Je ne suis pas sûr de pouvoir vous donner une explication pleinement détaillée. Ceci était l'un des projets identifiés au titre de l'ISB en 1999 et 2000. Mais étant donné la particularité de ce projet, qui est relativement technique, il a été mené quelque peu en parallèle avec le processus ISB général.
Je pense que vous devriez vous renseigner sur le processus ISB global auprès du ministère du Développement social, qui est le premier responsable de ce programme.
M. Michael Chong: L'une des choses que j'ai entendues—il y a eu quantité de rapports à ce sujet et c'est l'un des sujets de l'Initiative ISB—c'est que le secteur sans but lucratif, le secteur bénévole, connaît pas mal de difficultés depuis quelques années. En particulier, le nombre des bénévoles est en baisse au Canada. Ceux qui restent fournissent toujours plus d'heures de bénévolat par personne et s'essoufflent. Aussi, cette Initiative ISB était-elle une tentative de renforcer le troisième pilier de la société canadienne.
L'une des choses intéressantes que je vois dans ce projet de loi, c'est qu'il impose un degré supérieur de responsabilité, de transparence etc. Parallèlement, nombre des choses demandées par le secteur ont été intégrées dans une approche plus générale visant à répondre à certaines de ses préoccupations.
J'aimerais entendre votre point de vue sur les contraintes de déclaration supplémentaires introduites par ce projet de loi et les dispositions touchant la responsabilité civile accrue. Je sais que le ministre a dit que ces dispositions nouvelles réduisent en fait la responsabilité, par rapport à l'ancienne loi qui en imposait une potentielle beaucoup plus forte, alors que la nouvelle loi introduit la norme de responsabilité et l'obligation de diligence. Mais je ne suis pas sûr que dans le monde réel on aboutisse à une situation où les oeuvres de bienfaisance porteront sensiblement plus de responsabilité civile. Nombre de ces postes d'administrateurs ne sont pas rémunérés. Je le sais car je siège moi-même à deux de ces conseils. Cela peut rendre les gens plus réticents à siéger dans ces conseils d'administration, et cela peut amener certaines oeuvres caritatives à souscrire une assurance pour couvrir leurs administrateurs, ce qui représente un autre coût supplémentaire.
Pourriez-vous dire au comité si vous avez réfléchi à cet aspect du projet de loi?
M. Gilles Gauthier: Merci de la question.
Le projet de loi va certainement rendre les choses beaucoup plus faciles pour les organisations désireuses de s'enregistrer. Actuellement, le système des lettres patentes est très lourd. La constitution de plein droit va grandement améliorer cet aspect des choses. Il y avait unanimité lors de nos consultations sur cet aspect.
Pour ce qui est de la responsabilité personnelle et de la difficulté que rencontrent souvent les organisations à trouver des gens pour siéger à leur conseil d'administration, c'était clairement aussi un domaine où une intervention législative était nécessaire. Au moins, le système est-il plus prévisible. Est-ce que cela va changer les choses du jour au lendemain pour l'organisation? C'est difficile à prédire, mais le fait d'avoir dans la loi une norme de diligence clairement définie et une définition claire de la diligence raisonnable, absente actuellement de la Loi sur les corporations canadiennes, devrait lever le degré d'incertitude que ressentent actuellement les organisations.
Pour ce qui est de l'achat d'assurance, ce projet de loi prévoit explicitement l'achat par les organisations d'une assurance-responsabilité personnelle. Je sais que les organisations travaillent beaucoup là-dessus et se regroupent et se concertent avec le Bureau d'assurance du Canada pour mettre en commun leurs ressources et pouvoir obtenir des tarifs en rapport avec leur situation financière.
De manière générale, nous estimons que cette certitude légale accrue permettra au moins aux administrateurs de savoir à quoi ils s'engagent lorsqu'ils acceptent de siéger à un conseil d'administration.
º (1605)
M. Michael Chong: Mon autre question porte sur le statut d'oeuvre de bienfaisance. Je sais que le projet de loi ne porte pas là-dessus, mais les oeuvres de bienfaisance sont un sous-ensemble du secteur sans but lucratif. L'une de leur grandes doléances est que le processus d'attribution du statut est alambiqué et manque de transparence, surtout dans le cas des oeuvre désireuses de s'inscrire comme oeuvres éducatives.
J'aimerais savoir si vous avez envisagé, ou si le Ministère a jamais envisagé, au début de la rédaction de ce projet de loi de rationaliser ce mécanisme et ces règles, comme vous l'avez fait pour la constitution en organisation dans ce projet de loi.
M. Gilles Gauthier: Non, il n'y a rien de spécifique à ce sujet. Au contraire, on a sciemment cherché à éviter tout débordement intempestif. Nous avons eu de nombreuses discussions avec les fonctionnaires de l'Agence du revenu du Canada. La constitution en organisation aux termes de ce projet de loi n'influe en aucune façon sur le traitement fiscal en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Nous avons même sciemment rédigé ce texte pour éviter tout débordement.
M. Michael Chong: Je comprends la logique, du point de vue ministériel, mais pour de nombreuses organisations caritatives qui sont à la fois société sans but lucratif et organisme de bienfaisance enregistré, tout cela est l'affaire d'un même gouvernement. Beaucoup se demandent pourquoi on a modifié une partie du système et pas l'autre.
J'ai une dernière question. Il s'agit davantage d'une question technique sur un élément du projet de loi. Certaines organisations sans but lucratif de ce pays ont été créées par une loi spéciale du Parlement. Dans les notes de la Bibliothèque du Parlement et dans le projet de loi, je remarque que certains articles du projet de loi s'appliquent à ces entités spécialement incorporées. Pourriez-vous nous expliquer comment cela se fait?
M. Gilles Gauthier: En gros, nous voulions préserver le cadre actuel des entités créées par une loi spéciale. Nous ne voulions pas changer, avec ce projet de loi, la structure déjà mise en place par ces lois spéciales. Il s'agissait simplement de rendre les choses plus faciles et de leur appliquer l'obligation générique touchant leurs assemblées annuelles et les listes de membres.
Nous ne touchons tout simplement pas aux droits et obligations de ces sociétés créées par une loi spéciale. Nous les plaçons telles quelles sous le régime de la nouvelle loi et autorisons un peu plus de flexibilité s'agissant de modifier leur charte. Actuellement, pour modifier une charte, il faut de nouveau une loi spéciale.
M. Michael Chong: D'accord.
M. Gilles Gauthier: À part cela, il n'y a pas de changement.
M. Michael Chong: J'ai une autre courte question. Ces dernières années, un certain nombre d'organisations sans but lucratif, particulièrement les oeuvres de bienfaisance enregistrées au niveau fédéral, ont été radiées parce que le gouvernement les considérait associées à des organisations terroristes ou comme terroristes elles-mêmes. Est-ce que la radiation de ces entités ces dernières années s'est répercutée sur le statut d'organisation sans but lucratif de ces entités? Le projet de loi a-t-il un effet quelconque à cet égard?
º (1610)
M. Gilles Gauthier: Pas à ma connaissance. Je ne suis même pas sûr qu'il y ait eu radiation en vertu de cette disposition particulière.
Vous pouvez dissoudre une organisation s'il est établi qu'elle a des activités illégales. Une disposition expresse donne le droit à quiconque, y compris le directeur désigné en vertu de la loi, de demander à un tribunal la dissolution d'une organisation. S'il y avait un problème d'activités illégales, c'est une mesure qui pourrait être prise.
L'autre changement majeur que nous introduisons est l'obligation de produire des états financiers. Cette obligation n'existe pas actuellement et sera un instrument fondamental pour assurer la transparence des affaires financières des organisations.
Peut-être mon collègue pourrait-il ajouter un mot.
M. Wayne Lennon (chargé de projet principal, Direction des politiques du droit corporatif et de l'insolvabilité, Secteur des politiques, ministère de l'Industrie): La Loi sur l'enregistrement des organismes de bienfaisance prévoit une procédure permettant d'enlever à une organisation le statut d'oeuvre de bienfaisance mais ne change rien à son statut corporatif. Elle restera une organisation sans but lucratif mais ne sera pas autorisée à remettre des reçus à des fins fiscales et ne sera pas exemptée d'impôt.
M. Michael Chong: C'est le régime actuel. Le projet de loi changerait-il cela?
M. Gilles Gauthier: Non.
M. Michael Chong: C'était ma question. Merci.
Le président: Christiane, s'il vous plaît.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Merci. Je suis une nouvelle membre du Comité permanent de l'industrie,des ressources naturelles, dessciences et de la technologie. Je siège également au Comité permanent du développement des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées. Au sein de ce comité, on traite de questions liées au développement social. Certains membres du comité, dont M. Crête, vont suivre ce dossier avec intérêt. Nous allons rencontrer des organismes sans but lucratif.
Je me pose un peu les mêmes questions que mon collègue du Parti conservateur. Je me demande aussi comment les petites corporations à but non lucratif vont pouvoir se retrouver dans ce projet de loi. Vont-elles pouvoir le comprendre? Auront-elles tous les outils nécessaires pour comprendre son orientation et ainsi tâcher d'y faire apporter des aménagements ou des amendements qui tiennent compte de leurs responsabilités.
On dit qu'il en existe 160 000 et que, de ce nombre, 18 000 sont au Québec. Est-ce exact?
M. Gilles Gauthier: Il y a 18 000 organisations qui possèdent une charte fédérale.
Mme Christiane Gagnon: Cela m'amène aussi à vous demander comment ceci peut s'harmoniser avec la charte du Québec.
M. Gilles Gauthier: Chaque organisation a le choix de s'incorporer au niveau fédéral ou au niveau provincial. Ce projet de loi ne changera pas cela. Puisque les plus petites sont souvent plus habituées aux conditions locales, elles seront possiblement plus intéressées à s'incorporer au niveau provincial. Cependant, rien dans la loi ne les empêcherait de s'incorporer au niveau fédéral.
Vous avez demandé comment elles s'y retrouveront et si le projet de loi est suffisamment flexible. Nous avons apporté un changement très important à la loi: on laisse beaucoup plus de latitude aux organisations pour établir des règlements internes dans un bon nombre de domaines. Cela leur laisse la possibilité de définir leurs règles de régie interne d'une manière qui respecte leurs besoins et qui corresponde à leurs ressources financières ou à leur expertise.
Il faut comprendre que le cadre de la loi, même s'il apparaît assez technique, est très simple. Après s'être incorporé, on définit ses statuts. S'incorporer revient à remplir un formulaire d'une page et demie environ. Après cela, on possède un statut légal, et les règlements internes créent la dynamique du fonctionnement de l'organisation. Nous allons préparer des exemples de règlements internes. Nous allons aussi préparer des exemples de demande d'incorporation, pour rendre le tout un peu plus facile aux petites organisations qui souhaitent avoir un modèle sur lequel se baser pour définir leur propre statut.
º (1615)
Mme Christiane Gagnon: Quel pourcentage des 18 000 organisations à but non lucratif qui ont une charte fédérale sont de grandes corporations? En avez-vous une idée? Combien sont de petites organisations, et combien d'autres sont plus grandes?
M. Gilles Gauthier: Malheureusement, notre banque de données actuelle ne permet pas de différencier facilement la nature des organisations. Il faudrait les prendre une à une et essayer de le déterminer. Il y en a de très grandes, mais il y en a de très petites aussi.
Mme Christiane Gagnon: Ceci m'amène à poser ma deuxième question. Vous prévoyez une plus grande accessibilité aux informations, comme les listes de membres, par exemple. Vous savez qu'il y a des coûts reliés à l'envoi des listes de membres. Souvent les listes peuvent être longues et des coûts y sont reliés.
M. Gilles Gauthier: La nouvelle loi prévoit que l'organisation pourrait imposer des frais pour l'obtention d'une liste de membres ou pour obtenir des copies additionnelles des états financiers. L'organisation peut imposer des frais.
Mme Christiane Gagnon: Peut-elle imposer des frais à la personne qui désire avoir une copie de la liste de membres?
M. Gilles Gauthier: Oui.
Mme Christiane Gagnon: C'est une amélioration, puisque souvent les petites corporations n'ont pas les moyens financiers de se conformer aux exigences de la loi. Il y a donc une ouverture à ce niveau.
Je laisse mon collègue M. Paul Crête utiliser l'autre moitié de la période de questions. Il a probablement d'autres questions à vous poser.
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ): Quelque chose m'intéresse particulièrement dans les notes explicatives qu'on nous a données. Il s'agit de la notion de mission. On dit qu'une corporation qui n'agit pas en accord avec sa mission « sera ouverte à toutesallégations affirmant qu’elle n’agissait pas légalement. »
Je n'ai pas retrouvé dans le projet de loi de définition de ce qu'est une mission ou un énoncé de mission. Ceci ne pourrait-il pas créer des situations problématiques? Les organismes pourraient être accusés, par exemple, d'avoir des activités qui ne sont pas conformes à leur mission. Dans un tel cas, ces organismes pourraient avoir recours à des contestations juridiques pour prouver qu'ils ont agi conformément à leur mission, mais il n'y a pas de définition de ce qu'est une mission. En tout cas, je n'en ai pas trouvé.
M. Gilles Gauthier: La définition de la mission devra être incluse dans les statuts, au moment de l'incorporation.
M. Paul Crête: Parlez-vous de la mission de l'organisme?
M. Gilles Gauthier: Il y aura une définition très simple et très générale.
M. Paul Crête: Je veux dire qu'il n'y a pas de définition du terme « mission » dans le projet de loi. Le mot « mission » n'y est pas défini. S'il y a contestation judiciaire, peu importe que l'organisme se conforme ou non à sa mission, il me semble que le fait que la loi, qui définit les responsabilités, ne contienne pas de définition de ce qu'est une mission pourrait présenter des problèmes.
M. Gilles Gauthier: Il est vrai que le projet de loi ne définit pas le terme « mission ». L'intention est la suivante: on doit trouver, dans les statuts constitutifs, un énoncé assez général de ce que sont les objectifs généraux de l'organisation. Cette façon de faire donne beaucoup plus de latitude aux organisations. Présentement, avec le système de lettres patentes ou de charte, l'objet définit de façon très étroite toutes les activités que l'organisation peut entreprendre. Si certaines de ses activités sortaient du cadre de sa charte, cela constituerait sûrement une violation de ses statuts constitutifs. La nouvelle loi permettra beaucoup plus de flexibilité, puisque la mission sera définie, de façon très générale, par l'organisation au moment de son incorporation. Ensuite, elle aura le droit de s'acquitter de tous les droits et obligations d'une personne morale.
M. Paul Crête: La réforme de la loi, selon moi, s'inspire un peu du concept d'économie sociale. Ce concept s'est développé tout particulièrement au Québec, où des organismes à but non lucratif agissent comme des organismes à but lucratif, sans avoir d'objectif de rentabilité. Dans la loi, retrouve-t-on de façon particulière des dispositions qui vont permettre à ce type d'économie, l'économie sociale, de se développer plus que dans le passé?
M. Gilles Gauthier: Absolument, car le titre de la loi fait référence à...
º (1620)
M. Paul Crête: Excusez-moi. J'ai déjà eu à discuter d'une loi sur l'assurance-emploi, et cette loi n'a sûrement pas permis d'assurer des emplois. Par conséquent, je vois peu de relation entre le titre d'une loi et ses conséquences.
M. Gilles Gauthier: Je voulais dire qu'elle s'applique à toute entité qui n'a pas de capital-actions. Elle ne se restreint pas simplement à celles qui ne généreront pas de profits. C'est tout à fait le contraire, car certaines génèrent des profits et les redistribuent à leurs membres ou les utilisent à d'autres fins. La loi exige simplement qu'il n'y ait pas de capital-actions, donc pas de paiements de dividendes, etc. Un organisme qui travaille dans le domaine de l'économie sociale et qui n'a pas de capital-actions pourra se constituer en vertu de cette loi.
M. Paul Crête: C'est bien. Je dispose d'encore un peu de temps. Le ministère québécois du Développement économique et régional et de la Recherche, le MDERR, a mis sur pied des programmes d'aide aux entreprises. Souvent ces programmes excluent les organismes à but non lucratif. La loi, comme telle, va-telle permettre d'améliorer cette situation? Pourra-t-on faire cela par le biais de cette loi?
M. Gilles Gauthier: J'imagine que les règles d'attribution des programmes gouvernementaux sont définies par les autorités qui les créent.
M. Paul Crête: Oui, mais selon moi, une des raisons était associée à l'absence de structure économique semblable à celle d'un organisme s'occupant de commerce ou de management. C'étaient plutôt des gens qui offraient un service social souvent de façon bénévole.
Si l'on veut qu'une économie sociale se développe parallèlement à l'économie capitaliste traditionnelle, le contenu de la loi aidera-t-il à cette cause?
M. Gilles Gauthier: Si l'une des conditions d'accessibilité au programme est le fait que l'organisme en question doit être constitué en corporation ou en société, évidemment, celui-ci pourra recourir à cette loi afin de s'incorporer sans capital-actions et ainsi être admissible au programme.
Cela augmente la possibilité pour les organismes de s'incorporer ainsi, même s'ils n'ont pas nécessairement comme objectif de faire des profits. C'est la structure de capital qui importe. S'ils n'ont pas de capital-actions, ils pourront s'incorporer grâce à cette loi.
M. Paul Crête: Merci.
Le président: Soyez bref.
M. Paul Crête: Oui. Tout à l'heure, vous avez dit que vous n'aviez pas le portrait concernant les 18 000 entreprises qui sont sous charte fédérale. Sans nous fournir les chiffres, serait-il possible de connaître approximativement le chiffre d'affaires moyen de ces organismes? Les états financiers doivent sûrement indiquer que, par exemple, 12 000 génèrent entre 50 000 $ et 200 000 $ par année et 3 000 autres, plus de 1 million de dollars. N'y a-t-il pas moyen de savoir si ces 18 000 entreprises sont de grande ou de petite taille, et de connaître leur répartition?
M. Gilles Gauthier: Étant donné que la loi actuelle date de 1917, elle ne prévoit aucun compte rendu des activités des sociétés. Ainsi, il n'existe aucun rapport financier pour celles-ci. Il est donc présentement impossible pour nous de faire une différenciation.
Par contre, si cela peut être utile au comité, nous pouvons vous donner quelques pages d'exemples de titres d'organisations qui sont assujetties à la loi actuelle.
M. Paul Crête: La seule optique sera de voir si la loi correspond aux besoins de grands ou de petits organismes. C'est une question qu'on nous a demandé de vérifier.
M. Gilles Gauthier: Le projet de loi vise tout aussi bien les petites que les grandes organisations. Lorsqu'il y avait un besoin de différencier relativement à la taille, on l'a fait, par exemple dans les dispositions se rapportant aux rapports financiers. À ces endroits, des distinctions sont faites selon la taille des organismes. Néanmoins, à notre avis, la structure comme telle s'applique aussi bien à une petite qu'à une grande organisation.
º (1625)
M. Paul Crête: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, Paul
Andy Savoy, s'il vous plaît.
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci d'être venu.
[Français]
J'aimerais poursuivre dans le même sens que Paul Crête.
[Traduction]
S'agissant des petites organisations, nous avons reçu mardi les petites et moyennes entreprises—des fabricants, des entreprises indépendantes—et l'une de leurs critiques à l'endroit des programmes gouvernementaux était que, par exemple, le programme de crédit d'impôt pour la R-D était assorti de formalités trop complexes pour les petites entreprises. Il leur en coûte, par exemple, 10 000 $ de frais comptables pour accéder à un programme qui leur rapportera peut-être 10 000 $ ou 5 000 $. Je m'inquiète donc.
En milieu rural, et ma circonscription est entièrement rurale, nous sommes très dépendants du secteur bénévole. Il joue un rôle vital dans nos collectivités. Je dirais que l'apport net à nos collectivités du secteur bénévole est sans doute encore plus grand dans les régions rurales du Canada que dans les autres.
Suite à ce que disait Paul, s'agissant de l'entrée au conseil d'administration des petites organisations sans but lucratif, je pense qu'il faut veiller très soigneusement à ce que ce projet de loi ne soit pas dissuasif ou soit d'une lecture impénétrable. Dans cet ordre d'idées, avez-vous tenu compte de tout l'éventail des tailles d'organisations? Je sais que vous en avez parlé dans votre réponse à la question de Paul, mais lorsque je considère tout cela, il faut bien voir que le projet de loi C-21 va imposer aux OBNL des contraintes supplémentaires. Si c'est le cas, cela va dissuader les bénévoles à siéger dans les conseils.
N'y a-t-il pas moyen d'alléger le fardeau, en quelque sorte, des petites OBNL? Quels avis avez-vous reçus de ces dernières lors de la rédaction du projet de loi et sous quelle forme? Quelles recherches avez-vous effectuées sur cet aspect spécifique, soit la façon dont les OBNL pourront s'acquitter des obligations comptables supplémentaires imposées par le projet de loi?
M. Gilles Gauthier: L'une des principales doléances exprimées pendant les consultations intéressait la lourdeur des formalités actuelles de constitution, qui dissuade quantité de petites organisations. Le fait que l'on passe à la constitution de plein droit, où il suffit de remplir un formulaire d'une page et demie, a été salué par toutes les petites organisations.
Une fois que vous êtes constitué et jouissez de toutes les protections légales apportées par le projet de loi, surtout s'agissant de la responsabilité personnelle des administrateurs et le fait que ceux-ci peuvent se défendre en cas de poursuite en invoquant la diligence raisonnable, je pense que cela devrait contribuer largement à minimiser le degré d'incertitude que connaissent actuellement les petites organisations.
La principale préoccupation exprimée lors des consultations concernait les obligations de déclaration financière et le fait qu'imposer une vérification comptable aux très petites organisations n'avait guère de sens. Cela consommerait de 5 à 10 p. 100 du revenu annuel des petites organisations. C'est pourquoi nous avons décidé d'appliquer ces différents seuils. Nous nous sommes également concertés avec la profession comptable pour affiner la notion de mission d'examen, qui est un examen des comptes moins poussé, toujours effectué par une tierce personne, mais beaucoup moins approfondi et donc moins onéreux. Cette possibilité devrait atténuer les craintes des petites organisations sur le plan des obligations de déclaration financière.
º (1630)
Mme Coleen Kirby (gestionnaire, Section des politiques, Corporations Canada, ministère de l'Industrie): Par ailleurs, pour ce qui est de la compréhension du projet de loi, à moins d'être expert en droit des sociétés, la lecture périodique de ce texte n'apporte rien. Même les juristes nous posent sans cesse des questions dans ce domaine.
Si l'on prend la LCSA, par exemple, nous avons 180 000 sociétés, dont 800 sont cotées en bourse. Nous avons l'habitude de traiter avec des petites sociétés, si bien que pour toutes les formalités majeures à remplir, nous avons un énoncé de politique et des trousses d'information et des lignes d'aide, tant téléphoniques que sur l'Internet. Nous prévoyons donc de publier des documents explicatifs rédigés non pas en langage juridique mais en langage clair que les profanes puissent comprendre.
Notre plus gros souci en ce moment, c'est la transition par laquelle nous obligeons tout le monde à passer. La trousse d'information actuelle représente une vingtaine de pages en anglais, car nous la rédigeons d'une manière simple leur expliquant ce qu'elles doivent faire : une liste récapitulative des formalités, des modèles de règlement intérieur, un modèle de clauses de prorogation et des indications claires sur les étapes à franchir pour effectuer cette transition. Nous savons que certaines de ces organisations, petites ou grandes, n'ont pas nécessairement un personnel comprenant parfaitement ce qui est requis.
Ce n'est pas là nouveau pour nous. Nous savons ce qui nous attend. Même si nous sommes encore loin de la mise en oeuvre, nous cherchons déjà à établir des formulaires et des politiques pour expliquer aux organisations ce qu'elles vont devoir faire et leur proposons des mécanismes pour cela sans qu'elles soient obligées de faire appel à un spécialiste.
Certaines de ces organisations ont en leur sein des spécialistes et vont... Mais si vous constituez une entité réellement simple avec une seule catégorie de membres et des exigences minimes, il ne devrait pas être difficile pour la plupart de s'en tirer elles-mêmes. Elles doivent déjà tenir des réunions annuelles. Elles doivent informer leurs membres de la tenue d'une assemblée annuelle à laquelle ils peuvent assister.
Elles remplissent déjà un formulaire d'une page chaque année, ou devraient le faire. Donc, nombre des exigences ne sont pas nouvelles. C'est simplement un processus légèrement différent, un processus souple. Au lieu de dire : « vous devez faire ceci », nous leur disons qu'elles doivent choisir parmi plusieurs mécanismes celui qui leur convient le mieux.
Dans un club de curling ou une association de golf, un avis placé sur un bulletin d'affichage annonçant l'assemblée annuelle devrait suffire. Si vous êtes une grosse organisation d'envergure nationale, l'affichage d'un avis quelque part ne va pas vous aider. Dans ce cas, il peut falloir un courriel adressé à tout le monde, ou bien un envoi postal. Tout dépend de ce qui est rationnel pour l'organisation, de ce qu'elle veut faire, de la façon dont les membres veulent être informés et des frais qu'elle veut consentir.
Nous laissons donc à l'organisation le choix de décider ce qui lui convient, qu'elle soit grande ou petite. C'est son choix. Vous pouvez avoir un revenu de 100 millions de dollars mais seulement cinq membres, si bien qu'il est plus facile d'envoyer un courriel à chacun. D'autres peuvent n'avoir qu'un revenu de 20 000 $ mais compter 200 membres, auquel cas vous pouvez choisir un mécanisme différent qui vous convient.
Si nous avions un système de classification des organisations par taille, quel serait le critère? Serait-ce le revenu? Serait-ce le nombre de membres? Serait-ce la distribution géographique des membres? Serait-ce le type d'organisation? De cette façon, nous laissons aux organisations elles-mêmes toute la souplesse dont elles ont besoin.
M. Wayne Lennon: Il ne faut pas perdre de vue non plus que des parties entières du projet de loi ne s'appliquent absolument pas aux petites organisations sans but lucratif, telles que les dispositions sur les actes de fiducie, les titres de créances, la liquidation et dissolution. Bien que le projet de loi puisse être assez impénétrable à première vue, tout comme la LCSA, un petit entrepreneur peut créer une société et utiliser le projet de loi et s'occuper de ses affaires sans guère prêter attention à la plus grande partie du texte. C'est la même chose ici.
M. Andy Savoy: La différence entre organisations qui sollicitent et ne sollicitent pas est un peu floue dans mon esprit. Une organisation qui accepte des dons publics ou qui est financée par l'État sollicite-t-elle? Comment différenciez-vous entre une organisation qui sollicite et une qui ne sollicite pas aux fins du projet de loi? Pourriez-vous clarifier cela pour moi?
M. Gilles Gauthier: La définition de sollicitation figure en tête du projet de loi. En substance, vous sollicitez si vous avez demandé des dons publics ou accepté des subventions gouvernementales au cours de l'une des trois années précédentes. Vous êtes une organisation non sollicitante si votre financement, pour l'essentiel, provient des membres, comme un club de golf. Si l'organisation vit des cotisations des membres, elle ne sollicite pas. Centraide, bien évidemment, est une organisation sollicitante.
º (1635)
M. Wayne Lennon: Vous êtes également une organisation sollicitante si, sans demander de dons, vous recevez de l'argent d'une organisation qui est sollicitante. Vous ne pouvez donc pas constituer une organisation factice qui va solliciter des dons auprès du public et vous les reverser, et prétendre que vous n'êtes pas une organisation sollicitante. Vous serez défini comme telle.
M. Andy Savoy: C'est excellent. Merci.
Le président: Merci beaucoup, Andy.
Brian Masse, je vous prie.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
J'ai eu l'occasion de participer au processus de consultation de l'ISB dans ma ville. Cette mesure est surprenante en soi. Je ne pense pas qu'elle figurait haut dans la liste des priorités des oeuvres caritatives... de ce qu'elles ont besoin pour développer leurs organisations et servir leurs différentes clientèles...
Je suis curieux. Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que ce projet de loi a été précédé de plusieurs années d'élaboration de politiques et de consultations. Dans quelle mesure ce texte ressemble-t-il à votre ébauche initiale, quels aménagements ont été apportés au fil de plusieurs années? Qu'est-ce qui a changé dans l'intervalle?
M. Gilles Gauthier: Le document de consultation, le cadre qui a été utilisé dans les consultations de 2001 et de 2002, contenait en gros les mêmes éléments. Nous avons demandé s'il serait bon d'avoir un système de classification. Nous avons demandé les réactions sur l'accès aux listes des membres. Nous avons présenté différentes options—aucun accès à la liste des membres ou un accès illimité. Même chose pour l'information financière. Quelle sorte de mécanisme était le mieux pour assurer la transparence? Au cours des consultations, certains disaient que toutes les organisations, qu'elles soient ou non sollicitantes, devraient rendre leurs comptes publics. D'autres pensaient différemment.
Les éléments principaux du cadre, soit la méthode de constitution, les droits des membres, les déclarations financières sont essentiellement inchangés par rapport aux consultations de 2001 et 2002.
M. Wayne Lennon: Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de le lire, mais dans le classeur d'information qui a été distribué, vous trouverez un sommaire des consultations menées et des erreurs relevées.
M. Brian Masse: Mais je me demandais si vos ébauches ont évolué. Y a-t-il eu des changements considérables dans un domaine donné entre votre ébauche initiale d'il y a quelques années et le texte d'aujourd'hui?
M. Gilles Gauthier: Pas réellement. La conclusion principale qui est ressortie des consultations était qu'un système de classification ne fonctionnerait probablement pas bien.
M. Brian Masse: D'accord.
M. Wayne Lennon: Il y a eu beaucoup d'ajustements successifs à la définition de la sollicitation, par exemple, pour savoir quel devrait être le seuil, comment il serait appliqué—toutes sortes de questions ont été posées à ce sujet.
M. Brian Masse: D'accord. Je suis heureux de voir que votre mécanisme de constitution va être beaucoup plus rapide, pouvant être fait sur l'Internet ou électroniquement et donc de manière presque automatique; c'est avantageux pour tout le monde. Je me demande seulement comment on pourra empêcher les organisations ou enregistrements frauduleux. Y a-t-il des sanctions pour cela? Par ailleurs, comment va-t-on les déceler? Est-ce, par exemple, lorsqu'elles ne présentent pas leurs déclarations annuelles? Quelle sorte de budget avez-vous pour ce type de vérification?
J'ai passé la plus grande partie de ma carrière dans le secteur sans but lucratif avant mon élection et nous avions toujours affaire à certaines organisations qui se présentaient sous un faux jour. Elles étaient bien particulières. Ensuite elles se sont lancées dans la sollicitation de fonds à l'étranger, sans avoir les structures en place et sans expliquer clairement ce pour quoi elles militaient.
Quels garde-fous y a-t-il dans le système pour éviter la création d'une organisation frauduleuse qui n'est pas représentative de la collectivité?
Mme Coleen Kirby: Ce n'est pas habituellement l'organisation qui est frauduleuse, c'est la manière dont on s'en sert. La constitution de l'organisation n'est pas habituellement le problème et ne représente pas la fraude en soi. Le projet de loi met l'accent sur la transparence et la responsabilité. Si les membres savent ce que fait l'organisation, il leur est beaucoup plus facile de déterminer si quelqu'un cherche à frauder, à lever des fonds pour un objet particulier et s'en sert pour des choses illégales.
Chaque fois que les membres ont le droit à une enquête ou possèdent un recours, le directeur désigné possède le même...
º (1640)
M. Brian Masse: Je ne suis pas assez clair. Comment pouvez-vous déterminer cela, si quelqu'un s'est enregistré électroniquement en indiquant la raison d'être et la structure de l'organisation, etc. Quelle autre communication intervient entre...
M. Gilles Gauthier: Vous avez tout à fait raison. En passant à un système de constitution de plein droit, il n'y a pratiquement aucun contrôle effectué au moment de l'incorporation. Les gens présentent leur demande, remplissent le formulaire et présentent leurs statuts constitutifs. La constitution leur est alors accordée. Il n'y a aucun contrôle à ce stade. Ensuite, le projet de loi donne beaucoup plus de possibilités de suivre l'organisation, que ce soit par le biais de l'obligation de faire rapport aux membres ou des déclarations annuelles au directeur désigné en vertu de la loi. C'est donc après l'incorporation qu'il y aura une possibilité accrue pour les membres ou le gouvernement d'agir, s'il y a soupçon de fraude ou...
M. Brian Masse: De quelles ressources disposez-vous pour faire ce suivi? Voilà le problème. Je crée une organisation que j'enregistre électroniquement, tout ce que vous voudrez. Quel est le premier point de contact où aura lieu une sorte d'analyse de la validité de la demande? Quelles ressources avez-vous pour vérifier...? Est-ce que cela va intervenir, par exemple, si je ne dépose pas un rapport annuel à la fin de l'année ou omet l'un des rapports requis? À quel stade établissez-vous une première connexion, autre qu'électronique, avec ce mécanisme?
M. Gilles Gauthier: De toute évidence, ce serait sur réception de plaintes des membres... Nous pouvons alors utiliser les pouvoirs d'enquête conférés par le projet de loi pour demander des clarifications, ou prendre le mesures nécessaires telles que demander à un tribunal l'envoi d'un inspecteur sur place pour analyser ce qui se passe au sein de l'organisation concernée.
M. Brian Masse: Donc, si moi et dix de mes amis décidons de nous constituer en organisation par l'Internet, tant qu'il n'y a pas de plainte de l'une de ces personnes, ou que nous omettons des déclarations obligatoires, il n'y a pas de contact réel, je peux former mon organisation? N'y a-t-il pas là un problème? C'est ce que je...
M. Gilles Gauthier: Eh bien, la constitution de plein droit est une méthode utilisée partout en droit des sociétés au Canada, et même aux États-Unis. Cela vaut aussi bien pour le secteur commercial. Il n'y a pas de différence.
Mme Coleen Kirby: Vous n'êtes pas obligé de justifier pourquoi vous avez besoin d'une organisation. Si vous voulez en créer une et qu'elle ne fait rien, c'est parfaitement légal.
M. Brian Masse: Je m'inquiète simplement du changement introduit par cette technologie et certaines des pratiques
Mme Coleen Kirby: Nous avons fait un constat très intéressant, soit que les déclarations électroniques sont beaucoup plus susceptibles d'être exactes...
M. Brian Masse: Oui.
Mme Coleen Kirby: ... conformes à la loi et de meilleure qualité que lorsqu'elles sont présentées sur papier.
Nous avons découvert que lorsque les gens n'aiment pas une question du formulaire et veulent l'éviter, ils présentent un document papier, en espérant que cela passe. L'environnement électronique est beaucoup plus sûr que l'environnement papier—et je sais que cela surprend beaucoup de gens, mais c'est notre expérience jusqu'à présent. Tous nos problèmes viennent toujours des formulaires papier.
M. Brian Masse: Un autre changement curieux, c'est le mécanisme de vote à distance, par la poste. Ce sont des façons de voter très controversées.
Il y a des divergences de vues. Certaines municipalités acceptent même le vote postal pour leurs élections, d'autres non. Quel a été le facteur déterminant qui vous a amené à recommander ces deux formes de vote?
M. Gilles Gauthier: Ce sont des moyens de voter autorisés qui visent essentiellement à maximiser la participation des membres. Si vous êtes une organisation nationale, il peut ne pas être faisable pour les membres de se rendre en personne à l'assemblée annuelle pour voter. Il est donc logique d'autoriser le vote postal, car alors le vote devient plus démocratique.
º (1645)
M. Brian Masse: Faut-il suivre pour cela un format standard, ou bien l'organisation peut-elle déterminer les modalités de ce vote postal?
Mme Coleen Kirby: Le vote postal est déjà autorisé à l'heure actuelle, mais c'est au terme d'une politique, et non de la loi, car la loi actuelle est silencieuse à ce sujet.
M. Brian Masse: Oui.
Mme Coleen Kirby: De la façon dont nous avons structuré cela, les différentes options de vote des absents doivent respecter certaines contraintes minimales absolues. Nous laissons l'organisation choisir. Les membres choisissent en inscrivant une disposition dans leur règlement intérieur et ils doivent fixer les règles eux-mêmes. Donc, qu'il s'agisse d'un vote postal, ou d'un vote téléphonique ou électronique....
Dans le secteur commercial, soit vous devez être présent dans la salle soit vous donnez une procuration. La sollicitation de procuration peut être très coûteuse. Nous avons cherché à élargir les modalités, d'autant que le vote postal est l'une des options largement utilisées par nombre de ces organisations.
M. Brian Masse: Est-il prévu un financement pour ces organisations pour les aider à faire cela? Je sais que certaines n'ont pas les moyens. Seront-elles obligées de le faire quand même?
Mme Coleen Kirby: Non.
M. Gilles Gauthier: Non, il est permis...
M. Brian Masse: J'ai mal compris.
Mme Coleen Kirby: Elles ne sont pas obligées d'y avoir recours. Si elles veulent ne permettre que le vote des personnes présentes dans la salle, cela suffit. C'est le minimum qu'elles doivent assurer. Tout le reste dépend d'elles.
M. Brian Masse: Très bien.
J'ai une question concernant les trois années de transition et la communication. Quel type de financement avez-vous pour cela? Quel budget a été alloué à votre programme de communication avec les organisations?
M. Gilles Gauthier: Tout cela fait partie de notre affectation budgétaire courante. Il n'y a pas de crédit supplémentaire pour cette initiative en particulier. Nous pensons pouvoir nous débrouiller avec les ressources existantes.
M. Brian Masse: Y aura-t-il une campagne publicitaire ou bien sera-ce uniquement par contact direct? C'est cela que j'aimerais savoir, comment...
Mme Coleen Kirby: Notre principal moyen est le contact direct. En théorie, nous avons ou devrions avoir une adresse exacte pour chaque organisation. Lorsque nous avons déposé le projet de loi, nous avons fait un envoi postal massif à leur intention, il y a trois ou quatre semaines, disant : « Le projet de loi a été déposé. Si vous voulez intervenir, voici l'adresse d'un contact au Parlement. Vous allez devoir... »
Nous allons procéder par contact direct, car nous devrions être en mesure de contacter ces gens-là directement.
M. Brian Masse: Oui, mais cela suppose que les organisations n'aient pas déménagé, surtout les plus petites. Ce n'est pas parce qu'elles n'ont pas réagi qu'elles apprécient nécessairement ce que vous avez fait.
Mme Coleen Kirby: Étant donné qu'il faut présenter une déclaration chaque année...
M. Brian Masse: Oui.
Mme Coleen Kirby: ... et dans celle-ci la première question est « Quelle est votre adresse? ». Si l'organisation n'a pas présenté ses déclarations, alors elle est en contravention de la loi actuelle, auquel cas il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire et d'ailleurs si nous agissons... Si nous appliquons la loi, nous devons les dissoudre pour défaut de déclaration.
M. Brian Masse: Donc, vous avez trois ans pour faire cela.
Mme Coleen Kirby: Oui.
Le président: Merci, Brian.
C'est le tour de Michael, qui sera suivi de Christiane et de Brad.
M. Michael Chong: Ma première question porte sur l'alinéa 21(1)g) du projet de loi, qui impose aux organisations sans but lucratif de tenir à jour une liste des membres. Est-ce que le Ministère a l'intention d'imposer également l'inscription dans ce registre des adresses et numéros de téléphone?
M. Gilles Gauthier: Oui.
M. Michael Chong: Je formule de graves réserves dans ce cas, car cela pourrait potentiellement causer de gros maux de tête. Les sociétés cotées en bourse ont des actionnaires. Il arrive, en raison d'actes commis par des actionnaires ou de la nécessité de procéder à des votes, que les gens aient besoin d'accéder à cette liste des actionnaires—par exemple, pour distribuer des bulletins de vote, ou des circulaires de renseignements, ou tout ce que vous voudrez, qui va toucher les actionnaires et leurs droits. Mais cela n'est jamais fait directement par le groupe qui veut apporter le changement. C'est toujours fait par le biais de la société qui détient les actions.
C'est la pratique habituellement, n'est-ce pas?
M. Gilles Gauthier: Oui.
M. Michael Chong: Donc, typiquement, ce n'est pas une situation où la personne qui veut faire pression sur les actionnaires fait distribuer une circulaire d'information, ou tout ce que vous voudrez, par le courtier en valeurs.
Or, ici, les noms, adresses et numéros de téléphone seront à la disposition de tout membre qui les demande. Oui, ils doivent signer une déclaration statutaire, mais rien ne garantit que ces renseignements ne vont pas être disséminés ou utilisés à des fins commerciales ou frauduleuses, tout ce que vous voudrez.
Je sais qu'il y a une déclaration solennelle à fournir, mais comment prouver que telle personne est la source de la fuite de renseignements? Comment prouver que la personne qui utilise les renseignements, la tierce partie, a effectivement obtenu la liste auprès de quelqu'un d'autre et non pas de la personne qui a signé la déclaration solennelle? N'y a-t-il pas une meilleure façon pour nous de permettre aux membres de communiquer avec les autres membres sur un sujet en particulier sans leur confier toute la liste? N'y a-t-il pas une façon de sauvegarder la vie privée des personnes qui choisissent de devenir membres mais ne tiennent pas nécessairement à ce que leur nom circule partout?
Par exemple, peut-être pourrait-on imposer aux administrateurs et dirigeants des organisations sans but lucratif de distribuer à leurs membres toute communication d'un autre membre, ou quelque chose du genre. Si quelqu'un met la main sur cette liste...
Supposons que vous soyez une organisation sans but lucratif comptant 50 000 membres, dont beaucoup ont signé et payé leur cinq dollars sans imaginer que leurs noms puissent être rendus publics, tout d'abord, et pourraient être exploités à des fins commerciales, deuxièmement... tout d'un coup, ils sont exposés à ce risque et une déclaration solennelle n'y changera rien.
º (1650)
Mme Coleen Kirby: Nous avons cherché à réaliser un équilibre dans le projet de loi. Si nous voulons que les membres supervisent l'organisation, ils doivent pouvoir communiquer les uns avec les autres. Si les administrateurs sont les seuls à connaître les membres, et si c'est un administrateur qui commet une fraude en volant l'argent, comment les membres peuvent-ils se regrouper pour le mettre à la porte? À l'inverse, il se pose manifestement un problème majeur de protection de la vie privée.
Nous avons cherché à régler le problème au moyen de la déclaration solennelle qui limite les utilisations de l'information. Nous avons également érigé en infraction l'utilisation de l'information. Les infractions énoncées dans le projet de loi vont plus loin que celles de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Quiconque utilise l'information est sanctionné, et pas nécessairement la personne qui la procure. Si j'ai légitimement obtenu l'information et l'ai transmise à quelqu'un d'autre qui l'a exploitée, vous pouvez poursuivre la tierce partie.
Nous avons donc cherché à équilibrer la nécessité de la communication et la nécessité de l'accès. Actuellement, les sociétés doivent déjà recueillir ces renseignements. Si vous voulez organiser une assemblée annuelle et que vous devez envoyer une convocation à tous vos membres, vous avez intérêt à pouvoir les trouver.
M. Michael Chong: Prenons un exemple hypothétique. Quelqu'un devient membre d'une organisation en escomptant que son nom ne tombe pas dans le domaine public. Un autre membre se procure la liste des membres, et cette liste parvient d'une façon ou d'une autre aux mains d'un journaliste. Ce journaliste écrit dans le journal que telle personne est membre de telle organisation. Nous dites-vous que dans ce cas...
Mme Coleen Kirby: Le journaliste pourrait être inculpé.
M. Michael Chong: D'accord.
Mme Coleen Kirby: Il pourrait écoper d'une amende maximale de 5 000 $ et de six mois de prison pour utilisation inappropriée de cette information.
M. Michael Chong: Quelle que soit la source?
Mme Coleen Kirby: Oui. Et ça, c'est la sanction pénale. Manifestement, s'il y a violation, vous pouvez également intenter des poursuites civiles.
M. Michael Chong: Pouvez-vous m'indiquer...
Mme Coleen Kirby: Les infractions sont toutes énoncées à l'article 260.
M. Michael Chong: Bien, d'accord.
Je n'ai pas d'autres questions.
Le président: Merci, Michael.
Christiane, s'il vous plaît, and ensuite Brad.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Tout à l'heure, vous avez dit que chacun était libre d'adhérer à la charte québécoise ou à la charte fédérale. Dites-moi quelles sont les motivations d'un organisme sans but lucratif de vouloir une charte fédérale. Quels sont les avantages? En connaissez-vous les raisons?
M. Gilles Gauthier: J'imagine qu'avec cette loi, il y aura peut-être de gros avantages, puisque la loi québécoise est presque aussi archaïque que la loi fédérale actuelle. En fait, le gouvernement du Québec avait déposé une série de propositions pour réformer sa propre loi sur les associations, il y a quelques mois. On adopte plus ou moins le même genre de structure. Si jamais les deux systèmes étaient modernisés selon les mêmes orientations, encore là, les organisations seraient libres de choisir. Ce n'est pas une question de juridiction, c'est un libre choix de la part de l'organisme.
º (1655)
Mme Christiane Gagnon: J'aurais pensé que les organismes, par exemple, voulaient faire des activités dans une autre province et que ceci facilitait leurs opérations. J'aurais pensé que c'était là ce qui les motivait à demander une charte fédérale.
M. Gilles Gauthier: Pas nécessairement. Un organisme ayant une charte provinciale peut tout aussi bien entreprendre des activités dans d'autres provinces.
Mme Christiane Gagnon: Il n'y a pas de limitation?
M. Gilles Gauthier: La seule restriction dans ce cas est qu'ils ne peuvent évidemment pas déplacer leur siège social dans une autre province.
Mme Christiane Gagnon: D'accord.
M. Gilles Gauthier: À part cela, il n'y a pas de limitation.
Mme Christiane Gagnon: Donc, c'est un choix. Tout à fait.
[Traduction]
Le président: Merci, Christiane.
Brad.
Mike, si vous en avez encore une autre, c'est bon.
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC): Je vais laisser Michael poser la sienne.
M. Michael Chong: J'ai une question portant sur l'article 260. L'amende prévue à l'article 260, soit 5 000 $—c'est l'amende maximale—me semble un peu faible, étant donné le préjudice potentiel qui peut être causé.
Je reviens à mon exemple initial. Quelqu'un devient membre en escomptant que son nom ne soit pas rendu public et il apparaît pourtant dans un journal, l'affaire va en justice et le journal écope d'une amende de 2 000 $. Le journal paie l'amende car c'est moins cher que d'aller en appel ou de continuer à se battre. Cela ne lui coûte pas grand-chose. Pour un grand journal, 2 000 $ ne représentent pas une grosse sanction. Pourtant, la réputation de quelqu'un a été endommagée.
Avez-vous jamais envisagé un montant d'amende plus élevé?
M. Gilles Gauthier: Eh bien, cette amende sanctionne une infraction pénale, par déclaration sommaire de culpabilité, mais il subsiste toujours le recours civil en dommages-intérêts pour la personne lésée, qui pourrait être...
M. Michael Chong: Mais il n'y a pas de disposition prévoyant un recours civil dans ce projet de loi. Parlez-vous d'un recours en vertu d'autres textes de loi?
M. Gilles Gauthier: Oui, c'est juste.
Mme Coleen Kirby: S'il y a eu atteinte à votre réputation, vous avez le recours normal en diffamation.
La sanction maximale pour un délit dans le Code criminel n'est que de 2 000 $ ou moins de deux années de prison. Notre amende est en fait plus élevée que celle du Code criminel.
M. Michael Chong: Oui, mais la norme de preuve pour une infraction au Code criminel est sensiblement plus élevée que pour une poursuite civile. Donc, oui, c'est un moyen de dissuasion mais la norme de preuve est très rigoureuse. Il faut s'acquitter du fardeau de la preuve et tout ce que vous voudrez, ce qui n'est pas le cas dans une poursuite civile. Il n'y a pas de disposition relative à une poursuite civile dans ce projet de loi.
Je crains toujours un scénario où—et c'est plausible— quelqu'un met la main sur une liste de membres. Les gens ont signé en s'attendant à ce que leur nom reste confidentiel, et tout d'un coup ils tombent dans le domaine public. Le préjudice causé à leur réputation pourrait être considérable et il ne semble pas exister...
On pourrait envisager une sanction pénale plus forte ou bien prévoir des dispositions de poursuite civile avec un fardeau de la preuve moindre. Cela serait alors plus dissuasif.
Le président: Merci, Michael.
M. Wayne Lennon: Une possibilité pourrait être... Vous avez mentionné les listes d'actionnaires. Dans le cas de valeurs mobilières, la loi permet à quiconque de se procurer la liste des actionnaires d'une société cotée en bourse. Ce n'est pas par l'intermédiaire d'un courtier, mais directement auprès de la société. Les gens qui ne veulent pas voir leur nom figurer sur cette liste peuvent demander la suppression. Je suppose que l'on pourrait faire la même chose pour les organisations sans but lucratif, mais alors vous obligerez les petites à tenir à jour deux listes de membres, ceux qui veulent voir leur nom divulgué et ceux qui le refusent.
Si le but de l'exercice est de minimiser le fardeau administratif pour ces petites sociétés, cela ne sera pas nécessairement bon pour elles.
Le président: Merci.
Je crois que la dernière question est pour Brad, à moins que Werner en ait une autre ensuite.
M. Bradley Trost: Sur le même sujet, je crois savoir que les partis politiques ne sont pas couverts par cela.
Mais c'est un exemple réel. Cela arrive sans cesse en Saskatchewan, tant à gauche qu'à droite. Nous mettons la main sur la liste du parti adverse et les manoeuvres et intimidations qui s'ensuivent sont écoeurantes. Les emplois sont menacés, des gens se font mettre à la porte. Je peux citer des noms, dans les deux camps, en Saskatchewan qui se sont faits purger parce qu'ils appartiennent au mauvais parti politique.
Malheureusement, c'est une pratique courante, et qui ne devrait pas avoir cours au Canada. Mais il n'y a aucune façon de le prouver. Tous ceux qui font de la politique savent ce qui se passe.
C'est juste un commentaire, pour vous inciter à repenser à la façon de protéger les gens.
» (1700)
M. Gilles Gauthier: Il y a toujours la possibilité qu'une personne demande au directeur de l'organisation de ne pas communiquer la liste, ou d'en retrancher son nom. Ce mécanisme est prévu.
M. Bradley Trost: C'était juste une remarque générale pour clore cette discussion. Je sais que vous avez pleinement conscience du problème.
J'ai tout d'abord une question très générale qui va situer où je veux en venir.
On a indiqué qu'il existe un large éventail d'organisations sans but lucratif qui s'occupent de mille choses, poursuivent des objectifs différents et ont différentes façons de travailler. Pour quelles raisons les a-t-on toutes groupées ensemble dans une même loi-cadre, au lieu de distinguer entre, mettons, celles qui sollicitent et ne sollicitent pas des dons, les organisations religieuses et non religieuses, etc.? Quel est le raisonnement d'ensemble qui a présidé à cela?
M. Gilles Gauthier: Il est souvent très difficile de classer une organisation. Elles peuvent évoluer avec le temps et changer d'activité. Parfois elles en ont plusieurs. Un groupe religieux peut également avoir une action sociale. Il devient très difficile de tronçonner les choses de cette manière.
Voilà le problème pratique.
Par ailleurs, de façon plus fondamentale, la structure de base devrait s'appliquer quelle que soit la nature de l'organisation. Il faut avoir un conseil d'administration. Il faut tenir des assemblées annuelles. Il faut tenir des registres et présenter des déclarations financières. Ce genre de structure fondamentale est applicable à toutes—du moment que l'organisation a assez de flexibilité pour adapter son règlement intérieur à ses besoins propres. Le projet de loi autorise cette flexibilité dans divers domaines.
M. Bradley Trost: L'un des aspects qui me préoccupe particulièrement c'est que, en énonçant la défense fondée sur les préceptes religieux pour les organisations religieuses, on s'en remet à la discrétion des tribunaux, c'est-à-dire au précédent le plus récent. Le fait qu'il n'y ait pas plus de précision m'inquiète un peu. Je vais vous donner quelques exemples pour vous montrer à quel point cela peut être complexe.
Permettez-moi de remonter un peu en arrière.
Pour ce qui est de l'argument reposant sur le précepte religieux, par exemple, j'appartiens à une confession comptant très peu d'adeptes. Je suis baptiste allemand nord-américain. Nous n'avons pas des articles de foi très élaborés. Nous adhérons à des principes généraux et fondamentaux, particulièrement normatifs pour un baptiste, contrairement à la religion catholique par exemple.
Le problème, c'est que toutes sortes de choses sont implicites ou représentent une pratique qui n'est pas toujours spécifiquement énoncée. Prenez l'exemple de l'église de mes grands-parents et de mon père. La congrégation a renvoyé l'un de ses prêcheurs parce qu'il avait servi de l'alcool à son mariage. Cela peut faire rigoler le reste du monde, mais pas nous. L'alcool est historiquement interdit. Mais ce n'est explicitement énoncé dans aucun article de foi.
Je crains donc que si l'on s'en remet à la discrétion des tribunaux, certains éléments spécifiques ne soient pas protégés. Si ce prêcheur prétendait récupérer son emploi de pasteur adjoint ou quelque chose du genre, quel moyen de défense existera-t-il contre lui?
Autrement dit, je ne fais pas confiance à la jurisprudence générale des tribunaux. Pourquoi ne pas avoir quelque chose de plus précis ici?
Je ne fais allusion en rien à l'actualité d'aujourd'hui.
M. Gilles Gauthier: Le fait est que la situation ne se présente que si un membre conteste une décision de l'organisation—en invoquant l'oppression, par exemple. Et l'organisation pourra alors recourir à la défense du précepte religieux pour justifier la décision prise.
Le tribunal ne va pas demander si le précepte religieux en soi est raisonnable. Il n'est pas là pour juger du caractère approprié de votre confession de foi. Il va simplement examiner si l'acte commis dans les circonstances spécifiques était raisonnable, du point de vue de la responsabilité et des devoirs des membres envers un des leurs. Ce critère du caractère raisonnable s'applique à l'effet sur l'individu et non pas à la nature du précepte religieux lui-même.
» (1705)
Mme Coleen Kirby: L'autre problème, c'est que si vous couchez tout par écrit, les juges interprètent les mots que vous utilisez. Nous avons essayé de trouver une définition d'organisation religieuse à un moment donné. Nous avons un peu exploré cet aspect et conclu qu'il était impossible d'avoir une définition d'une « organisation religieuse ». Que faites-vous dans le cas d'un groupe humaniste? Dans le cas de la tradition judéo-chrétienne, il est possible de parler de Dieu. Mais dans le cas de certains groupes religieux, il n'y a pas « un » dieu, il y a en dix. Ce n'est tout simplement pas possible.
Lorsqu'il est possible pour un juge ou un tribunal de déterminer si un groupe est ou non une organisation religieuse, c'est là la question à laquelle il lui faut répondre et il possède la flexibilité pour cela, au lieu d'être obligé de dire : « Le texte dit qu'il faut remplir les quatre critères suivants et le groupe n'en remplit que trois et donc nous devons le débouter ». Les définitions s'accompagnent parfois d'un risque.
M. Wayne Lennon: Et il n'y a pas actuellement de défense fondée sur le précepte religieux, si bien qu'un membre pourrait contester n'importe quelle décision en invoquant l'oppression. Au moins, l'organisation aura-t-elle un moyen de défense générale où elle pourra arguer « Ceci relève d'un article de foi » ou « Ce sont là nos doctrines ».
Un exemple où cette défense ne serait pas applicable est le cas d'un lieu de culte qui cesserait d'être viable une fois que l'organisation décide de le vendre. Dans ce cas, il s'agit strictement d'une décision commerciale ne relevant pas d'un précepte religieux. Tout membre qui s'estimerait opprimé pourrait se pourvoir en justice. Mais on peut imaginer toute une série de circonstances similaires à celle que vous avez évoquée mettant en jeu la doctrine ou les préceptes religieux, et ce sera alors au tribunal de déterminer où tracer la ligne.
M. Bradley Trost: C'est une réponse très intéressante, monsieur.
Voici une question pour laquelle j'utiliserai une illustration similaire pour ouvrir le champ du problème. Je m'interroge sur les juridictions mixtes—fédérale-provinciale, canado-américaine. Encore une fois, je prendrai l'exemple de la ma confession.
Le culte baptiste nord-américain compte environ 60 000 adeptes établis de part et d'autre de la frontière canado-américaine. Nous avons des temples dans tout le Canada et, comme baptistes, nous disons que l'église individuelle exerce l'autorité suprême. Nous sommes un culte congrégationnel, rejetant le système presbytérien ou épiscopal qui marque la plupart des autres. Nous avons là une juridiction à plusieurs niveaux : le Canada, les États-Unis, la structure confessionnelle et la suprématie de l'église locale.
Prenant cela comme illustration, comment l'imbrication des juridictions affecte-t-elle ce qui est à la fois local et national—l'église locale et la structure nationale, qui est très distincte de celle d'autres églises comportant des diocèses—et aussi reliée aux États-Unis lorsqu'il y a double enregistrement? Le culte global a son siège en Illinois; le siège canadien est situé, je crois, à Edmonton. Mais nous faisons tous partie d'un même tout et les églises locales ont une structure propre. Je sais que d'autres organisations—comme les loges, etc.—sont dans la même situation.
Comment cela fonctionnerait-il?
Mme Coleen Kirby: Il s'agit de savoir qui est la corporation. Est-ce l'église locale? Est-ce l'organisation nationale qui est incorporée? S'il s'agit d'une organisation internationale, il faudra que son siège soit au Canada.
Pour vous donner un exemple, l'église catholique et l'église anglicane aiment établir des corporations au niveau des diocèses ou des églises locales, et nous en avons donc un grand nombre. L'évêque de « remplissez le blanc »...
M. Gilles Gauthier: [Note de la rédaction : Inaudible]
Mme Coleen Kirby: Par exemple, mais il y en a beaucoup d'autres et je dois admettre que je ne pourrais prononcer tous les noms et je ne sais où toutes sont situées.
Si vous avez un problème, vous allez poursuivre une organisation bien précise. S'il s'agit de prouver l'existence d'un précepte religieux, il faudra faire comparaître des experts, comme dans toute autre affaire judiciaire. Si vous êtes en désaccord sur la capacité mentale d'une personne, vous présentez vos experts, la partie adverse présente les siens et le juge tranche. Mais si l'organisation se trouve être juste une église locale, alors on va très certainement se concentrer sur les préceptes religieux de cette église locale.
» (1710)
M. Bradley Trost: Il s'agit donc de choisir à quel niveau on veut enregistrer l'organisation. Comme je l'ai dit, il y a des juridictions imbriquées. Certaines églises baptistes appartiennent à deux ou trois cultes, d'autres à aucun. C'est un peu comme si vous étiez à la fois franc maçon et chevalier de Colomb—il peut y avoir de petites contradictions. Il faudra qu'ils choisissent où ils vont enregistrer l'organisation et établir des liens à partir de là.
M. Gilles Gauthier: L'organisation doit également déterminer qui sont ses membres, car ce n'est pas nécessairement évident dans le cas d'un groupe religieux. Dans le contexte catholique, par exemple, toutes les personnes assistant à la messe ne sont pas membres au sens juridique. Il se peut que les membres d'une organisation au niveau du diocèse soient simplement les diverses églises locales. Tout dépend donc de la façon dont vous structurez votre organisation et dont vous définissez vos membres, et tout cela relève du choix de l'organisation.
M. Wayne Lennon: Je peux être membre d'un diocèse donné et aller régulièrement à la messe dans un autre, mais ce qui compte c'est le lieu où j'ai volontairement choisi de m'inscrire comme membre et où l'organisation a volontairement choisi de s'incorporer.
M. Bradley Trost: D'accord. Dans ce cas, j'imagine que le culte le fera là où c'est le plus facile et, si quelqu'un veut le poursuivre, il devra le faire en fonction de la structure antérieurement décidée.
M. Gilles Gauthier: C'est juste.
M. Bradley Trost: Et comment cela s'appliquerait-il dans le contexte international?
Mme Coleen Kirby: Si vous êtes une organisation internationale demandant l'incorporation sous le régime de cette loi, votre siège doit être au Canada, et donc les tribunaux canadiens auront compétence. Un grand nombre d'organisations religieuses ont déjà des corporations à des niveaux multiples, toutes interreliées. J'en connais une en particulier qui n'a tout simplement pas de représentation de l'Ontario. Le reste du pays est couvert par quatre corporations, mais pas l'Ontario. Elle ne m'a jamais expliqué pourquoi. J'imagine que quelque chose lui déplaît en Ontario.
M. Bradley Trost: C'est que la province se prend pour tout le pays.
Le président: Merci, Brad.
Les derniers mots appartiennent à Werner.
M. Werner Schmidt: Je n'ai que quelques questions. Je ne sais pas combien de temps nous comptons siéger, monsieur le président.
Le président: Oh, six heures, sept...
M. Werner Schmidt: D'accord.
Le président: Mais je préférerais 5 h 30.
M. Werner Schmidt: Je comprends.
M. Brian Masse: Vous vous retrouveriez peut-être seul, monsieur le président.
M. Werner Schmidt: Oui.
Je trouve que c'est là un texte de loi très intéressant. L'accouchement a été dur, je n'en doute pas, et les complications nombreuses. Nous n'en n'avons effleuré que quelques-unes.
J'aimerais vous demander si une grosse organisation comme un administration portuaire ou aéroportuaire, qui est une société sans capital-actions, peut se constituer en vertu de la Loi sur les corporations?
M. Gilles Gauthier: Oui.
M. Werner Schmidt: Elle peut?
M. Gilles Gauthier: Oui. Les 19 grandes administrations aéroportuaires actuelles du Canada sont toutes constituées en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes...
M. Werner Schmidt: Oui, mais...
M. Gilles Gauthier: ... et par conséquent elles peuvent être prorogées en vertu de celle-ci.
M. Werner Schmidt: D'accord, mes excuses, mais je ne comprends pas clairement. Cette loi est conçue pour couvrir les corporations sans capital-actions.
M. Gilles Gauthier: Oui.
M. Werner Schmidt: Est-ce que la définition d'une corporation sans capital-actions la fait relever automatiquement de cette loi, ou bien peut-elle demander à être constituée en vertu de la Loi canadienne sur les corporations, sans capital-actions?
Mme Coleen Kirby: Je crois qu'il y a un malentendu. Actuellement, la Partie II de la Loi sur les corporations canadiennes couvre les organisations sans capital-actions. Cette loi-ci couvre également les corporations sans capital-actions. Ce sont les mêmes.
M. Werner Schmidt: Mais l'une des dispositions de cette loi ne prévoit-elle pas l'abrogation...
M. Gilles Gauthier: Oui. À la fin de la période de transition, la Loi sur les corporations canadiennes sera abrogée et la seule façon pour une organisation sans capital-actions d'être incorporée au niveau fédéral sera par le biais de cette loi.
Mme Coleen Kirby: À aucun moment n'existera-t-il le choix de se constituer en vertu de cette loi-ci ou en vertu de la Loi sur les corporations canadiennes. C'est soit la nouvelle, soit l'ancienne.
M. Werner Schmidt: Dans ce cas, cela signifie que si cette loi est adoptée telle quelle, une administration portuaire n'a d'autre choix que d'être constituée en vertu de celle-ci ou bien de ne pas être constituée du tout...
M. Gilles Gauthier: C'est juste.
Mme Coleen Kirby: ... ou alors au niveau provincial...
» (1715)
M. Werner Schmidt: Bien sûr. Je suis d'accord, et cela s'appliquerait à ce genre de situation.
Mon autre question est celle-ci. Une organisation constituée en vertu de cette loi est-elle soumise à toutes les autres règles de droit concernant les sociétés, ou bien est-elle exemptée de certaines autres lois, par exemple en cas de poursuite de particuliers ou de sociétés?
Permettez-moi d'être un peu plus précis. Ma question est trop ambiguë, je m'en rends compte.
Prenons une organisation reconnue comme oeuvre de bienfaisance en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. Si elle est enregistrée comme organisation sans capital-actions en vertu de cette loi, c'est-à-dire comme société sans but lucratif, et qu'elle entreprend une activité qui dégage un profit, que se passe-t-il? Doit-elle alors s'enregistrer en vertu de la Loi sur les sociétés ou bien est-elle toujours considérée comme légitimement non...?
M. Gilles Gauthier: Elle reste légitimement constituée en vertu de cette loi car elle n'a pas de capital-actions.
M. Werner Schmidt: Donc, le seul critère est de ne pas avoir de capital-actions?
M. Gilles Gauthier: Effectivement, et la seule chose qui compte alors, c'est de savoir ce que vous faites du profit? Si vous voulez conserver votre statut d'oeuvre de bienfaisance, vous allez devoir...
M. Werner Schmidt: C'est un sujet différent.
M. Gilles Gauthier: Exactement. Mais, ici, la seule chose qui compte, c'est que vous n'ayez pas de capital-actions.
Mme Coleen Kirby: Bien que ces organisations soient couramment appelées sans but lucratif... Je pense que Centraide de la région Ottawa-Gatineau a annoncé avoir recueilli 10 millions de dollars en dons au cours des trois derniers mois. Je pense qu'elle a dégagé un profit, elle a recueilli plus d'argent qu'elle n'en a dépensé pour la collecte. Donc, le problème de l'appellation sans but lucratif est qu'elle est très trompeuse.
Il est plus difficile de comprendre le concept d'absence de capital-actions, mais c'est une description plus exacte, car il indique que vous ne distribuez pas l'argent sous forme de dividendes aux actionnaires. Mais si vous êtes une oeuvre de bienfaisance, vous avez intérêt à gagner plus d'argent que vous n'en dépensez, c'est-à-dire que vous réalisez un profit.
M. Werner Schmidt: Je n'ai qu'une dernière question, monsieur le président, si vous le permettez. Il s'agit du pouvoir du directeur, qui a le droit de faire trois choses, me semble-t-il, selon ma lecture sommaire du texte de loi. Il a le droit de dissoudre une organisation. Il a aussi le droit de modifier les statuts constitutifs s'ils ne lui plaisent pas, sous certaines conditions. Son troisième pouvoir est de soit faire enquête personnellement soit de faire ordonner une enquête par un tribunal.
Mme Coleen Kirby: La loi confère au directeur un certain nombre d'obligations, dont l'une est de délivrer des certificats, tels que certificat de constitution en personne morale, certificat de modification, de restructuration, de fusion—il y en a toute une série. Mais avant qu'il puisse délivrer un certificat, il doit recevoir un document. Donc, en cas de modification des statuts, avant de délivrer un certificat de modification, il doit avoir en main les statuts de modification. Avant qu'une organisation ou ses administrateurs soient autorisés à envoyer au directeur des statuts de modification, il leur faut l'autorisation des membres. Donc, le directeur ne modifie pas les statuts de son propre chef. Il ne peut le faire que suite à une décision des membres et de l'organisation elle-même.
Pour ce qui est des enquêtes, le directeur a des pouvoirs minimes s'agissant d'assurer le respect de la loi au niveau administratif. S'il veut lancer une enquête plus approfondie, il doit saisir un tribunal qui désignera un inspecteur. Ce peut être lui, mais il doit passer par un tribunal, si bien qu'il y a supervision judiciaire.
Dans le cas de la dissolution, le directeur ne peut dissoudre une organisation sans ordonnance judiciaire que si l'organisation enfreint les prescriptions administratives de la loi. Peut-être n'a-t-elle pas un conseil d'administration, ne dépose-t-elle pas ses déclarations annuelles et ne paie pas les droits correspondants, par exemple. Si quelqu'un obtient un certificat de constitution et que le chèque est refusé par la banque et qu'il n'est pas remplacé, le directeur peut dissoudre l'organisation à titre de sanction.
Mais la liste des mesures que peut prendre le directeur sans ordonnance judiciaire est relativement limitée.
M. Werner Schmidt: Merci.
Le président: Merci, Werner.
Si mes collègues le permettent, j'aimerais poser une courte question. J'essaie d'anticiper les appels que nous risquons tous de recevoir de notre légion locale, des club Lions ou Rotary suite à l'adoption de ce projet de loi, amendé ou non. Dites-nous rapidement en quoi la vie va changer au lendemain de l'adoption ou dans les mois suivants pour une Légion, un club Lions, Kiwanis—peut importe—tous les clubs de service dans nos circonscriptions?
» (1720)
Mme Coleen Kirby: Je donnerai une réponse en deux parties. Premièrement, tous vont devoir passer par la transition, ce qui suppose un examen de leur règlement et l'adoption de statuts.
Le président: C'est un examen par les membres.
Mme Coleen Kirby: Par les membres de leur règlement, et l'adoption de statuts de maintien. Les statuts de maintien seront un document de deux pages, au maximum. Si vous avez un règlement relativement moderne, vous n'aurez probablement pas beaucoup de changements à y apporter. Si vous n'avez pas revu votre règlement depuis 40 ou 50 ans, il faudra sans doute un remaniement plus poussé.
La deuxième étape relève du fonctionnement normal d'une organisation qui ne procède pas à une restructuration radicale ou quelque chose du genre. Elle va devoir remettre une déclaration annuelle, ce qu'elle fait déjà; ce sera un nouveau formulaire d'une page. Elle va devoir tenir une assemblée annuelle, ce qu'elle est déjà censée faire. Elle va devoir produire des états financiers, ce qu'elle devrait déjà faire aussi. Il lui faudra procéder à un examen financier d'une sorte ou d'une autre; il pourrait y avoir un changement à ce niveau, selon leur catégorie.
Le gros changement pour ce qui est des états financiers, c'est qu'elle va devoir dorénavant les transmettre à ses membres, ce qui n'est pas obligatoire aujourd'hui, bien que certaines le fassent déjà, nous le savons. Elles vont devoir prévenir leurs membres de la tenue d'une assemblée annuelle. Encore une fois, ce sont là des choses assez normales qu'elles sont déjà censées faire. Beaucoup le font, et il n'y aura donc pas de changement radical dans leur fonctionnement de routine.
Pour celles qui n'appliquent pas la loi actuelle—et nous savons qu'il y en a un nombre assez important—l'accent sera soudainement mis beaucoup plus sur certaines contraintes. Elles ne pourront plus dire, la loi m'oblige à effectuer une vérification comptable, mais je n'en ai pas envie, alors je ne la fais pas. C'est là où interviendra le changement radical.
Le président: Résumons donc, si vous le permettez. Pour l'organisation qui applique déjà les lignes directrices actuelles, la vie ne changera pas radicalement.
Mme Coleen Kirby: Excepté pour les formalités de transition, les choses ne devraient pas changer radicalement.
Le président: Merci beaucoup.
Je remercie nos témoins d'être venus nous éclairer aujourd'hui et peut-être leur demanderons-nous de revenir une fois que les collègues auront entendu les témoins du public et du secteur sans but lucratif, pour répondre à de nouvelles questions. Merci beaucoup.
Je rappelle aux membres que nous allons avoir une courte réunion pour affaires internes vers la fin de la réunion de mardi, qui portera sur les questions relatives aux nominations posées par le leader en Chambre du gouvernement. Il s'agira de savoir si nous laissons tout le monde sur la liste—ce qui est ma préférence personnelle—ou d'en rayer. Deuxièmement, il y a la motion demandant que l'avis de 24 heures soit bilingue.
Là-dessus, si vous n'avez pas d'autres questions, je lève la séance.
Merci à tous. Bonne soirée.