SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 30 mai 2013
[Enregistrement électronique]
[Français]
À l'ordre, s'il vous plaît.
Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Aujourd'hui, en ce 30 mai 2013, nous tenons notre 85e séance.
Cette séance est télévisée.
[Traduction]
Dans le cadre de notre étude sur la situation des droits de la personne en Iran, nous accueillons aujourd'hui deux témoins: Mark Dubowitz, directreur exécutif de la Foundation for Defense of Democracies, et Matthew Levitt, qui travaille pour le Washington Institute for Near East Policy.
Messieurs, vous savez déjà que vous disposez d'environ 10 minutes chacun pour nous présenter vos exposés, après quoi les membres du comité vous poseront des questions.
Si des membres doivent retourner à la Chambe des communes avant la fin de la réunion, faites-le-moi savoir et je pourrai essayer de devancer votre temps de parole. Nous pourrons ainsi poser toutes nos questions aux témoins, même si nous devons pour cela dépasser le temps prévu. Si le comité est d'accord, les membres pourront ainsi, espérons-le, obtenir toutes les réponses à leurs questions.
Je ne sais pas qui veut commencer. Puis-je proposer que ce soit M. Dubowitz, simplement parce que vous êtes à gauche?
Des voix: Oh, oh!
Avec plaisir. Merci beaucoup.
Mesdames et messieurs les membres du sous-comité, c'est un honneur pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui pour vous parler du rôle joué par le Corps des gardiens de la révolution islamique, le CGRI, dans un vaste système de répression en Iran, et pour encourager le gouvernement de ce pays à mettre fin aux violations des droits de la personne et aux atrocités qui en découlent, et pour demander au gouvernement du Canada de désigner le CGRI dans son intégralité, en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales, pour ses violations des droits de la personne, et lui demander également d'inscrire le CGRI sur la liste des organismes terroristes en vertu du Code criminel.
Les démocraties craignent les ennemis extérieurs, mais les régimes non démocratiques craignent leur propre peuple. Cela n'est nulle part plus évident qu'au sein de la République islamique d'Iran, où les hostilités entre l'État et la société ont atteint des nouveaux sommets après l'élection présidentielle frauduleuse du 12 juin 2009. Lorsque les Iraniens sont descendus dans la rue en scandant le slogan « Où est mon vote? », la paranoïa s'est emparée des autorités qui se sont employées à démasquer — selon eux — des ennemis au sein de la société, des agents étrangers, des saboteurs et des soi-disant révolutionnaires de velours.
En 2009, les forces d'application de la loi de la République islamique étaient la première ligne de défense visible du régime, mais le CGRI et le groupe de résistance Basij sont les vrais agents responsables de la répression du mouvement vert pro-démocratie en Iran. Tout indique que le CGRI et le groupe de résistance Basij joueront un rôle tout aussi sinistre au cours de l'élection présidentielle qui aura lieu cette année. En effet, nous avons toutes les raisons de croire que cette élection présidentielle sera tout aussi frauduleuse que la dernière.
Au cours des dernières semaines, des officiers du CGRI ont même commencé à manifester leurs intentions à ce sujet. Ils ont déclaré ouvertement qu'ils allaient trafiquer l'élection. L'un d'entre eux, M. Hojjat al-Eslam Ali Saidi, représentant du guide suprême auprès du Corps des gardiens de la révolution, a tristement déclaré par exemple que « la fabrication d'élections est une tâche naturelle pour les gardiens ». De plus, le groupe Basij a intensifié ses jeux de guerre très médiatisés, non seulement pour se préparer à refouler les dissidents, mais aussi pour les terroriser et les réduire au silence.
La brutalité du régime s'exprime de maintes façons. Le gouvernement des États-Unis, son département du Trésor, a récemment désigné le CGRI pour ses violations des droits de la personne en raison de la cyber-répression qu'il exerce. Comme nous le savons, les gens qui sont arrêtés par le CGRI subissent des violences physiques et psychologiques dans la tristement célèbre cour de la prison Evin, contrôlée par le CGRI. Comme les Canadiens le savent trop bien, c'est dans cette cour que la photojournaliste canadienne Zahra Kazemi a été détenue, torturée et violée. Elle est décédée par la suite.
Pour vous permettre de mieux comprendre le rôle du CGRI dans la répression au sein du pays, je vais vous décrire brièvement la transformation qu'il a subie au cours des dernières années. Depuis la révolution de 1979, le CGRI a été le principal pilier de défense du régime, même si ce n'est pas l'armée traditionnelle du pays; il s'agit d'un point important. Le CGRI a reçu le mandat en vertu de la constitution de « protéger la révolution et ses acquis ». Le statut des gardiens les autorise donc à s'attaquer aux forces « contre-révolutionnaires » de toute nature en ayant recours aux armes, aux poursuites et aux arrestations.
À l'origine, le CGRI a été mis sur pied pour lutter contre les menaces internes et externes. De 1980 à 1988, pendant la guerre contre l'Irak, il a été forcé de se concentrer sur les menaces externes. Il a continué de se concentrer sur ces menaces pendant près de deux décennies par la suite, soit jusqu'à ce que le guide suprême, Ali Khamenei, nomme en septembre 2007 le major-général Mohammad Ali Jafari au poste de septième commandant en chef de l'histoire du CGRI. Cet homme a gagné ses galons pendant la guerre Iran-Irak. Il a alors servi comme commandant des forces terrestres, mais ce qui est le plus important, c'est qu'il est aussi le fondateur du Centre d'études stratégiques du CGRI, créé en 2005. Sous sa direction, le centre, qui est en fait le groupe de réflexion du CGRI, a commencé à mener des recherches sur les révolutions de velours et les soi-disant politiques de changement de régime en douceur des États-Unis.
Jafari affirmait que le CGRI devait se concentrer sur les menaces internes à la stabilité de la République islamique plutôt que sur les menaces externes. Il a restructuré le CGRI, et il est important de bien comprendre comment. Il a intégré le groupe Basij, la force paramilitaire, au sein du CGRI, et il a fait du CGRI une organisation décentralisée, axée sur les provinces, en la dotant de capacités accrues en matière de lutte contre les émeutes.
Nous avons tous vu les méthodes brutales utilisées par Jafari pour réprimer les protestations en 2009. Vous savez tous très bien ce qui est arrivé. Je vous épargnerai donc les détails. Il importe de comprendre toutefois que tous ces Iraniens qui ont été brutalisés, assassinés, violés et torturés ont un visage humain. Parmi eux, il y avait une femme nommée Taraneh Moussavi. La semaine dernière, en fait, un membre de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants du Congrès américain a raconté ce qui était arrivé à Taraneh. Si vous le voulez bien, je vous faire un bref rappel.
Ses amies la décrivaient comme une jolie jeune femme très gentille, avec une voix douce. Elle était très douée pour jouer du piano. Elle est disparue pendant les manifestations, après avoir été arrêtée par les forces de sécurité. Quelques semaines plus tard, sa mère a reçu un appel anonyme d'un agent du gouvernement qui l'informait que sa fille avait été hospitalisée. Les blessures mentionnées ne pouvaient être que le fruit d'un viol brutal.
Lorsque sa famille est arrivée à l'hôpital, elle n'était plus là. Selon un témoignage, on a averti sa famille de ne pas mentionner quand elle avait disparu et de ne divulguer aucune information sur la nature de ses blessures. Son corps carbonisé a été découvert un mois après son arrestation. On a averti sa famille de ne pas organiser de funérailles pour elle et de ne raconter à personne comment elle a été tuée.
Le viol et l'assassinat de Taraneh ne sont qu'un parmi d'innombrables cas de torture et de violence commis dans les prisons en Iran, comme en témoignent le rapport du rapporteur spécial des Nations Unies et le rapport de 2012 sur les droits de la personne en Iran du département d'État américain. Tout cela confirme les preuves que nous avons que des prisonniers sont emprisonnés pendant des semaines, voire des mois, sans que soient portées des accusations ou qu'ils puissent parler à un avocat, et en étant soumis à de terribles tortures, battus avec des bâtons, électrocutés, violés, privés de sommeil, privés de nourriture et d'eau et soumis à de fausses pendaisons.
Jafari a donc passé son test. Il a tué plus de 70 protestataires non armés — les forces de l'opposition parlent de plusieurs centaines. Il a torturé, mutilé et emprisonné un grand nombre d'autres, et il a réussi à persuader les chefs de l'opposition d'exhorter leurs partisans à rentrer chez eux. Malheureusement, la communauté internationale, à l'exception du Canada, est restée muette devant tout cela, et c'est sans doute ce qui a convaincu l'opposition iranienne de mettre un terme à ses protestations pacifiques.
Le Canada a joué un rôle de premier plan dans la défense des droits de la personne en Iran. Il a poursuivi ses efforts en prenant d'autres mesures pour condamner les violations des droits de la personne commises par le CGRI.
J'aimerais vous faire part ici de quelques recommandations stratégiques pour que le Canada continue de montrer la voie à cet égard. En décembre 2012, le gouvernement du Canada a ajouté la Force al-Qods du CGRI à la liste des groupes terroristes du Code criminel, une mesure indispensable pour confirmer que le CGRI présente bel et bien une menace à la paix et la sécurité internationales. Je suis convaincu que Matt vous en parlera plus en détail.
Je prie instamment le gouvernement du Canada de passer à l'étape logique suivante, soit d'imposer des sanctions au CGRI dans son intégralité, tant pour ses actes terroristes que pour ses violations des droits de la personne en Iran. Cette recommandation se fait l'écho des propos tenus par le ministre des Affaires étrangères, l'honorable John Baird, il y a à peine quelques semaines devant un groupe de défenseurs de la démocratie iraniens lors d'une conférence à Toronto à laquelle j'ai participé, soit que le Canada se doit d'attirer l'attention sur « la dictature militaire et cléricale rétrograde » en Iran et de protéger les dissidents et ceux qui ont le courage de dire la vérité au sujet du groupe Basij et du CGRI. Le ministre Baird a ajouté: « Le monde doit cibler les actifs du CGRI et révéler les richesses qu'il amasse au détriment du peuple ».
En effet, le Canada poserait un geste symbolique important en désignant le CGRI. Cela permettrait de cibler les biens que le CGRI possède au Canada et révélerait les richesses qu'il amasse au détriment du peuple. Tous les profits réalisés par le CGRI servent à financer, en fin de compte, ses activités infâmes, notamment ses programmes de missiles balistiques et nucléaires, ses organisations terroristes à l'étranger et son vaste appareil de répression des droits de la personne en Iran.
Le Canada doit fermer toute entreprise commerciale du CGRI. Il faut pour ce faire procéder à une désignation générale du CGRI comme entité terroriste, ce qui rendrait illégale toute transaction financière avec cette entité, de même qu'à une désignation générale du CGRI comme auteur de violations des droits de la personne en vertu du paragraphe 4(1) de la LMES. Cela permettrait d'imposer au CGRI des pénalités importantes, d'affaiblir grandement la légitimité du régime iranien, et d'envoyer un message éloquent au peuple iranien.
Les violations des droits de la personne commises par le régime iranien répondent aux critères de base prévus au paragraphe 4(1) de la LMES qui permettent au gouvernement d'imposer des sanctions économiques. La LMES a déjà été utilisée pour cibler des entités du CGRI et des individus s'adonnant à des activités de prolifération, mais elle a aussi déjà été utilisée pour sanctionner les violations des droits de la personne commises par le gouvernement Assad et ses partisans en Syrie, par le gouvernement du Zimbabwe, par celui de la Birmanie, par celui du Soudan, pour ne nommer que ceux-là. Le gouvernement du Canada a donc eu recours à la LMES à maintes occasions pour cibler des régimes et des éléments qui sont responsables de violations massives des droits de la personne.
J'aimerais conclure en vous résumant les trois motifs qui justifient que le CGRI soit désigné pour ses violations des droits de la personne. Premièrement, le CGRI a, en vertu de la constitution, le mandat de « protéger la révolution et ses acquis ». Concrètement, cela veut dire que la révolution de 1979 n'est pas un événement historique, un événement du passé, mais un processus continu ou une révolution permanente. De ce fait, l'Iran se trouve dans une situation d'urgence permanente, ce qui autorise le CGRI à considérer toute opposition au régime comme un geste contre-révolutionnaire.
Deuxièmement, la loi portant création du CGRI l'autorise à violer les droits fondamentaux des citoyens iraniens sur la base de simples soupçons faisant d'eux de soi-disant contre-révolutionnaires.
Troisièment, comme je l'ai mentionné, la restructuration du CGRI sous la direction du major général Jafari, qui cible dorénavant les menaces à l'intérieur même du pays, a entraîné le massacre de protestataires dans la foulée de l'élection présidentielle frauduleuse de 2009, ainsi qu'à des assassinats, des actes de torture et des mauvais traitements qui ont encore cours aujourd'hui.
Les membres du CGRI qui prouvent vouloir quitter les rangs de l'organisation ne devraient pas se voir imposer de sanctions. Il faut donc interdire le CGRI, sauf ceux, au cas par cas, qui ont décidé de prendre leur distance de l'organisation. Le Canada doit toutefois mettre les membres du CGRI au pied du mur: soit ils demeurent associés à une dictature militaire et cléricale répressive, soit ils respectent les droits de la personne de leurs citoyens.
En terminant, j'aimerais mentionner que cette séance n'aurait pas pu tomber à un meilleur moment puisque l'élection présidentielle aura lieu dans deux semaines à peine, et qu'elle sera à coup sûr frauduleuse et marquée par les gestes d'intimidation et de répression du CGRI. Je félicite les membres du comité de leur position courageuse en faveur du peuple iranien. J'espère que vos gestes cette semaine résonneront dans les rues en Iran, d'Abadan à Isfahan, et de Tabriz à Téhéran.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup. C'est un plaisir pour moi d'être ici et un honneur d'être assis à côté de Mark Dubowitz.
Je vous ai fourni pour vos dossiers une version longue de mon exposé, qui, si je comprends bien, est en train d'être traduit en français. Je vous en présente maintenant un résumé seulement.
En 1948, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme. L'article 3 se lit: « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne ». Il est tout particulièrement opportun, en cette semaine que le Parlement canadien a désigné « Semaine de la responsabilisation de l'Iran », de prendre acte du lourd bilan des actes de violence et de terrorisme commis ou soutenus par l'Iran, en violation flagrante du droit qu'a tout citoyen à la « sûreté de sa personne ».
Comme on l'a déjà mentionné, les violations des droits de la personne en Iran ne datent pas d'hier. Toutefois, ces violations s'étendent maintenant au-delà des frontières du pays, notamment en Syrie, où Téhéran appuie activement les violences commises contre la population civile par le gouvernement de Bashar al-Assad, et ailleurs dans le monde, où des agents iraniens et des groupes iraniens au sein du Hezbollah tentent d'assassiner aussi bien des diplomates que des civils. On constate même que ces violations, tant au pays qu'à l'étranger, sont plus que jamais interreliées. Il arrive souvent, en effet, que les violations des droits de la personne commises par le régime au pays et à l'étranger soient ordonnées et coordonnées par les mêmes personnes.
Lorsque la révolution a débuté en mars 2011 en Syrie, l'Iran y a dépêché la Force al-Qods pour aider le régime à étouffer la protestation. Un mois plus tard, le gouvernement des États-Unis désignait la Force al-Qods dans son intégralité pour ses violations des droits de la personne dans ce pays, en particulier pour ses actes de répression, de violence et de torture à l'égard du peuple syrien, et pour l'arrestation et la détention arbitraire de manifestants pacifiques.
Le ministère du Renseignement et des Forces de sécurité iranien et les forces d'application de la loi ont aussi joué un rôle actif dans le conflit en Syrie et ont aussi été désignés par le gouvernement américain pour leurs violations des droits de la personne. Ces deux entités ont fourni un soutien matériel à la Direction générale du renseignement de la Syrie, en plus d'avoir dépêché de leur personnel à Damas pour aider le gouvernement syrien à mater le peuple syrien. C'est toutefois la Force al-Qods qui tire les ficelles et qui est l'unité iranienne la plus active en Syrie.
Le gouvernement des États-Unis a déjà désigné plusieurs individus au sein de la Force al-Qods, entre autres, pour leurs violations des droits de la personne. En mai 2011, par exemple, le troisième plus haut gradé au sein de cette force, Mohsen Chizari, a été désigné pour ses violations des droits de la personne et sa participation aux côtés du gouvernement syrien à la répression violente des manifestants dans ce pays. En 2006, par ailleurs, Chizari avait été emprisonné par les forces américaines en Irak sur la base de preuves indiquant qu'il importait des armes utilisées contre les forces de la coalition, mais le gouvernement irakien l'a par la suite relâché.
En janvier dernier, un haut commandant de la Force al-Qods a été tué en Syrie près de la frontière libanaise, lors d'une attaque menée par Israël contre un convoi d'armes iraniennes destiné au Hezbollah au Liban. Le général Hassan Shateri était membre de la Force al-Qods depuis des décennies. Les autorités iraniennes ont dit qu'il s'occupait de la « reconstruction d'après-guerre » au Liban, mais elles n'ont donné aucune explication sur sa présence en Syrie. Lors de ses funérailles, on a pu voir les drapeaux du Hezbollah flotter aux côtés de ceux de la Force al-Qods, et le guide suprême Khamenei, qui a pris la parole à ses funérailles, l'a appelé « notre Imad Moughniyah », une allusion au chef terroriste du Hezbollah.
La comparaison avec Moughniyah semble indiquer que la « reconstruction » n'était pas exactement ce à quoi Shateri s'employait. En fait, il avait déjà été désigné par le département du Trésor américain, sous un nom d'emprunt, pour avoir fourni du soutien financier, matériel et technologique au Hezbollah à titre de représentant personnel de l'Iran au Liban.
Le département du Trésor américain a également désigné le chef de la Force al-Qods, Qassem Soleimani, non seulement pour ses activités terroristes, qui constituent en soi des violations des droits de la personne, mais aussi expressément pour ses violations des droits de la personne en Syrie. Puis, quelques mois après sa désignation, on a appris que Soleimani avait participé au complot visant à assassiner l'ambassadeur saoudien à Washington dans un restaurant populaire à Washington, D.C. Arbabsiar, l'individu qui a plaidé coupable pour ce complot, a été condamné un peu plus tôt aujourd'hui.
Dans l'évaluation faite par le directeur du Renseignement national, le général James Clapper, le complot d'Arbabsiar révèle ce qui suit:
... que certains représentants iraniens — y compris sans doute le guide suprême Ali Khamenei — ont fait de nouveaux calculs et sont maintenant prêts à mener une attaque aux États-Unis en réponse à des actions... qui menacent ou semblent menacer le régime.
Le principal groupe terroriste allié de l'Iran, le Hezbollah, joue lui aussi maintenant un rôle très actif en Syrie, même si son alliance avec le régime sanguinaire d'Assad est en train de lui coûter un appui politique important au Liban, en particulier parce que sa participation est en train de provoquer un bain de sang sectaire au Liban également.
Comme le dit si bien un journaliste libanais, les activités de déstabilisation du Hezbollah en Syrie sont en train de « faire perdre au parti son masque de vertu ». Comme l'a clairement démontré ce qui s'est produit à Qusayr, le Hezbollah intensifie ses activités en Syrie. L'Iran et le Hezbollah appuient tous les deux « pleinement » le régime Assad.
En août 2012, le Hezbollah a de nouveau fait l'objet d'une désignation du département du Trésor des États-Unis, mais ce n'était pas cette fois en tant qu'organisme terroriste, mais c'était plutôt à cause de ses activités de déstabilisation en Syrie. Un mois plus tard, le Trésor désignait plusieurs membres de la direction du Hezbollah pour le rôle qu'ils ont joué en Syrie, précisant que le Hezbollah recourt constamment au terrorisme contre des cibles civiles pour atteindre ses objectifs, et que cette tendance ne faisait qu'augmenter, dernièrement. Selon le Trésor, sous la direction de Nasrallah, le Hezbollah offre de l'entraînement, des conseils et un soutien logistique au régime d'Assad à l'appui de la violente répression du peuple syrien, et cela n'a fait que prendre de l'ampleur.
L'Iran se sert du terrorisme comme outil de politique étrangère depuis la révolution islamique de 1979. Quelques années plus tard, en 1986, la CIA a établi, dans un rapport maintenant déclassifié intitulé Iranian Support for International Terrorism, que l'Iran soutenait le terrorisme pour faire avancer ses propres intérêts, mais que selon la perception, ce régime religieux a pour mission d'exporter sa révolution islamique et de mener une lutte constante, par tous les moyens, contre les États qu'il considère comme des oppresseurs.
Quelques années plus tard, en 1989, un rapport de la CIA mettait en évidence plusieurs facteurs qui faisaient que l'Iran risquait plus vraisemblablement de prendre de plus grands risques pour soutenir le terrorisme. Ces facteurs se sont un peu atténués passé le milieu des années 1990, mais sont en train de revenir en force.
Le premier était la domination des éléments radicaux parmi les chefs religieux, ce qui s'est traduit par la forte hostilité iranienne envers l'Ouest. Puis, tout comme maintenant, la possibilité de voir se manifester des chefs pragmatiques était très faible. De plus, susciter des tensions à l'étranger permettait de détourner l'attention des problèmes intérieurs, et mener une guerre asymétrique donnait à Téhéran une arme puissante à un moment où son armée et son économie étaient faibles.
Selon les rapports produits par la CIA à la fin des années 1980, les dirigeants iraniens voient le terrorisme comme étant un instrument important de la politique étrangère à utiliser pour faire avancer les objectifs nationaux, mais aussi pour exporter les idéaux révolutionnaires islamistes du régime. Dans son appui au terrorisme, l'Iran mise principalement sur le Hezbollah. La relation qui les lie a été décrite par le directeur du renseignement national comme étant un partenariat dans lequel les Iraniens représentent l'associé principal. Ce partenariat stratégique, comme le directeur du centre national de lutte contre le terrorisme l'appelle, est le produit d'une longue évolution qui remonte aux années 1980, alors que le Hezbollah n'était qu'un allié de l'Iran.
L'Iran a utilisé les réseaux du Hezbollah pour diverses activités terroristes qui étaient dans ses intérêts, qu'il s'agisse de l'assassinat de dissidents iraniens ou des attentats menés, entre autres, contre l'ambassade israélienne d'Argentine en 1992, contre le centre communautaire juif AMIA en Argentine en 1994 et contre les installations militaires des tours de Khobar en 1996.
L'Unité 1800 du Hezbollah se consacre à soutenir les groupes terroristes palestiniens et à faire entrer des membres du Hezbollah en Israël pour y mener des missions de reconnaissance et des opérations, alors que l'Unité 3800 a été créée spécialement pour entraîner des militants irakiens chiites et pour mener des attaques contre les forces coalisées en Irak.
Cependant, l'Iran a récemment utilisé le Hezbollah à des fins liées plus étroitement à ses ambitions d'ordre nucléaire. Au cours des dernières années, les Forces Qods ont créé une unité destinée précisément à cibler les intérêts diplomatiques de l'Ouest partout dans le monde: c'est l'Unité 400. Dans l'intervalle, Téhéran a donné au Hezbollah l'ordre de cibler les touristes israéliens partout dans le monde afin de dissuader les Israéliens, entre autres, de prendre des mesures contre le programme nucléaire iranien, ainsi que pour envoyer un message clair: quiconque cible ses installations nucléaires s'expose à être encore plus la cible d'opérations de terrorisme asymétrique.
De toute évidence, l'Iran fait peu de cas des droits de la personne et le démontre encore une fois en ciblant des civils. C'est clair: le Hezbollah a fait sauter un autobus rempli d'Israéliens à Burgas, en Bulgarie, tuant par la même occasion le conducteur d'autobus bulgare, et blessant 30 autres personnes. Deux semaines avant, un agent du Hezbollah — un citoyen européen — avait été arrêté à Chypre. Une semaine après l'attaque réussie de Burgas, qui impliquait un citoyen ayant la double nationalité libanaise et canadienne, les Bulgares ont trouvé un agent des Forces Qods — apparemment un citoyen canadien aussi — qui surveillait l'une des principales synagogues de Sofia, la capitale de la Bulgarie.
À la suite de son arrestation à Chypre, Hossam Yaacoub a admis, dans sa déposition à Chypre, et je le cite:
Je ne crois pas que les missions que j'ai réalisées à Chypre étaient liées à la préparation d'une attaque terroriste à Chypre. Je recueillais tout simplement de l'information sur les Juifs, et c'est ce que mon organisation fait partout dans le monde.
En conclusion, il n'y a aucun doute: l'Iran commet de graves violations des droits de la personne, tant en Iran qu'à l'étranger. Cependant, depuis 2009, ces violations sont plus inextricablement liées que jamais. Les partenariats d'organismes terroristes comme le Hezbollah ont amplifié ces violations, et les directives de mener des attentats terroristes contre des touristes civils partout dans le monde viennent des autorités iraniennes. Puis il y a les complots des Forces Qods qui visent entre autres les diplomates américains, britanniques, saoudiens et israéliens.
Maintenant, l'Iran et le Hezbollah offrent une aide considérable à la campagne de violence que le régime al-Assad mène contre son propre peuple, la dernière des fort nombreuses violations des droits de la personne commises partout dans le monde. En réalité, l'organisation de défense des droits de la personne de l'ONU vient d'adopter une résolution non contraignante qui condamne l'intervention de combattants étrangers — soit le Hezbollah et l'Iran — venant se battre pour le régime syrien, en particulier à al-Qusayr.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de venir témoigner.
Je serai ravi de répondre à toutes vos questions.
Merci, monsieur Levitt.
Chers collègues, si chaque personne avait cinq minutes, il serait impossible de lever la séance et de sortir d'ici à 14 heures précises, compte tenu des dépassements de temps qui se produisent de temps en temps. Êtes-vous d'accord pour que nous prenions quelques minutes de plus de sorte que chacun ait cinq minutes?
Des voix: D'accord.
Le président: Parfait. Nous avons déjà apporté un changement pour répondre aux besoins d'une personne qui doit partir tôt, et nous pouvons faire d'autres changements, du moment que vous en informiez le président et la greffière.
Nous allons commencer par Mme Grewal.
Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs Dubowitz et Levitt.
Monsieur Levitt, votre collègue, Mehdi Khalaji, de la Washington Institute for Near East Policy, a mentionné dans un article, il y a un certain temps, que depuis les manifestations qui ont suivi les élections de 2009, les violations des droits de la personne empirent de jour en jour. Connaissant votre expertise en tant que directeur et agrégé supérieur du Stein Program on Counterterrorism and Intelligence, au Washington Institute, j'aimerais que vous nous donniez des exemples précis des violations des droits de la personne qui ont empiré de jour en jour. Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer la situation relative aux droits de la personne en Iran?
Je vous remercie de votre question.
Effectivement, mon collègue, Mehdi Khalaji, fait partie des plus ardents porte-parole sur cette question.
Permettez-moi de revenir au problème dont Mark et moi parlons aujourd'hui, et de faire le lien avec les violations des droits de la personne que l'Iran commet à l'intérieur, mais également à l'étranger, car il y a un lien distinct entre ces deux aspects qui remonte à la révolution verte de 2009. Selon de multiples sources — et j'en parle dans mon mémoire —, quand le régime iranien a décidé de sévir afin de réprimer les mouvements populaires paisibles, dans le sillage des dernières élections, le ministère du Renseignement et de la Sécurité, une organisation du renseignement très professionnelle, était mal à l'aise à l'idée de s'en prendre à ses compatriotes iraniens. À cause de cela, cette organisation a été démise, tout comme ses principaux membres.
Les Gardiens de la révolution islamique, l'organisation de résistance Basij et les Forces Qods ont été plus que ravis de faire ce que le régime leur demandait: embuscades, intimidation, présence de Basij sur les campus, etc. Ils ont de ce fait été promus, ce qui a produit un effet sur leur capacité de mener des opérations à l'étranger. En réalité, leur capacité s'en est trouvée diminuée, parce que les Gardiens de la révolution islamique ne peuvent pas, sans le soutien du ministère du Renseignement et de la Sécurité, s'adonner à leurs activités de terrorisme asymétrique à l'étranger. Cela a eu une incidence non seulement sur leur capacité d'agir en Iran, mais aussi à l'étranger.
Il est évident que la révolution verte a représenté un tournant décisif, en ce que le régime iranien a alors indiqué à quiconque regardait qu'il n'y a en réalité aucune limite à ce qu'il peut faire pour rester au pouvoir, notamment, à son propre peuple. Pour ce qui est des événements en Syrie, il est prêt à aller aussi loin pour ses alliés. Il a donc en premier conseillé au régime al-Assad d'arrêter de réprimer les réseaux sociaux. Tout à coup, les réseaux sociaux se sont mis à proliférer, il s'est ouvert des comptes Facebook, puis on a constaté que, manifestement, l'Iran donnait à la Syrie les moyens de suivre les réseaux sociaux et de prévenir les manifestations. Ce n'était que le début, et les choses ont beaucoup empiré. Nous nous inquiétons entre autres de ce que l'Iran donne à la Syrie toutes sortes d'options cinétiques — et non seulement la répression des réseaux sociaux — pour étouffer la rébellion en Syrie, dans une grande mesure comme elle l'a fait à l'intérieur de ses propres frontières.
Le système judiciaire iranien permet de nombreuses violations des droits de la personne, entre autres, la discrimination contre les femmes et les minorités ethniques ou confessionnelles et l'imposition de sentences brutales comme la lapidation.
Les témoins peuvent-ils nous donner leurs opinions sur ce qui peut être fait précisément pour améliorer le contexte judiciaire et mettre fin à ces sentences brutales?
Permettez-moi de répondre à votre question.
S'il est une chose que nous sous-estimons du régime iranien, c'est cela. Contrairement à l'Irak de Saddam, ou à la Corée du Nord, qui sont des dictatures staliniennes, le régime iranien se soucie dans une certaine mesure, en réalité, de sa réputation internationale. Les dirigeants du régime iranien se voient soutenir une formidable révolution mondiale.
Ils essaient, en réalité, d'augmenter leur popularité. Ils essaient de gagner en popularité dans le monde musulman. Il ne faut donc pas sous-estimer l'effet de la dénonciation. En fait, de nombreux dissidents iraniens sont toujours en vie parce que le Canada et d'autres pays ont dénoncé des dirigeants du régime et nommé les dissidents, ici et à l'étranger, au Canada et en Iran.
Je pense que le travail que vous faites est essentiel, par exemple, pendant la Semaine de la responsabilisation de l'Iran, quand vous jumelez des parlementaires canadiens à des dissidents iraniens, car vous mettez en évidence le nom, le visage et l'histoire de ces personnes. Sans cela, il est clair à mes yeux que ces personnes disparaîtraient et qu'on n'en entendrait plus parler. Garder les gens sous les feux des projecteurs et ne pas les laisser devenir des statistiques, c'est primordial. Ensuite, identifier les Gardiens de la révolution islamique iranienne et les forces Basij pour leurs violations des droits de la personne serait d'une profonde importance, concrètement, mais aussi, symboliquement.
Encore une fois, des gens sont libres de voyager partout dans le monde et de se servir des ambassades iraniennes pour obtenir une protection diplomatique. Hier, Alberto Nisman, le procureur argentin, a publié un rapport de 500 pages sur l'attentat de l'AMIA en 1994, dont M. Levitt a parlé. Ce que M. Nisman souligne en réalité, c'est que les Iraniens ont utilisé le modèle de l'AMIA pour étendre leur influence partout en Amérique latine et dans le monde, en se servant des ambassades, des mosquées, des bureaux culturels et de toute l'infrastructure qui donne au régime iranien la latitude et la liberté opérationnelle nécessaire pour planifier des attentats terroristes et pour intimider les dissidents.
J'applaudis encore une fois le gouvernement canadien parce qu'il a reconnu que l'ambassade iranienne à Ottawa servait exactement à de telles fins, notamment à intimider des Irano-Canadiens, et pour avoir expulsé ces soi-disant diplomates iraniens d'Ottawa, alors qu'il s'agissait, dans bien des cas, d'agents du renseignement et de dirigeants des Gardiens de la révolution islamique iranienne. Je pense que vous avez envoyé un message très clair. Je vous prie d'encourager vos collègues d'Amérique latine et d'Europe à faire exactement la même chose.
[Français]
[Traduction]
Merci à nos témoins. Vos témoignages sont très précieux et le sous-comité en tiendra compte.
À notre dernière séance, nous avons entendu M. Payam Akhavan, de l'Université McGill. Il s'est dit très préoccupé de ce que la communauté mondiale ait en fait permis à la question nucléaire en Iran d'éclipser la situation relative aux droits de la personne là-bas. Il a dit qu'on craint que le grand accord permettrait aux dirigeants iraniens de faire des compromis sur la question nucléaire avec la communauté mondiale, afin qu'on soit conciliant et qu'on ne tienne pas compte de la violence que le régime fait subir à son propre peuple. Il a fait remarquer qu'en fin de compte, le peuple iranien serait le grand perdant.
Pouvez-vous nous parler de cela?
Ayant travaillé à des questions de non-prolifération et de sanctions pendant de nombreuses années, je peux vous dire qu'il a tout à fait raison, et je pense que c'est là où nous nous en allons. Si Ali Kmamenei et les Gardiens de la révolution étaient intelligents, ils concluraient le grand accord avec le P5+1. Ils répondraient aux exigences nucléaires de la communauté mondiale, et toutes les sanctions disparaîtraient.
Ce qui explique cela, c'est que la majorité des sanctions que les États-Unis ont imposées sont liées au programme nucléaire iranien. Certaines sanctions sont liées aux activités terroristes iraniennes, mais très peu sont liées aux droits de la personne. Il a donc tout à fait raison dans son évaluation du risque — qu'un grand accord ferait disparaître toute cette question et nous amènerait à ignorer les violations des droits de la personne commises par l'Iran. C'est entre autres pourquoi il est si important qu'un pays comme le Canada lie les sanctions aux questions de droits de la personne, non seulement à l'échelle individuelle, mais dans le but de cerner les instruments que l'État utilise dans cette répression — les Gardiens de la révolution islamique iranienne et l'organisation Basij.
En soulignant les violations des droits de la personne commises par les Gardiens de la révolution islamique iranienne et par le Basij en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales, vous veillerez à ce que cela ne disparaisse pas, même si une entente est conclue au sujet du nucléaire. Je pense que c'est l'une des plus importantes recommandations que moi-même et d'autres puissions faire au gouvernement du Canada; souligner les violations des droits de la personne à cette échelle et dans cette mesure, pour qu'elles demeurent à l'avant-plan pendant des années.
En dénonçant le régime, en exposant les violations des droits de la personne, en mettant un visage et un nom sur chaque histoire de dissident, nous pourrions résoudre ce problème, même si le régime iranien répond à ses obligations sur le plan du nucléaire. En passant, je suis sceptique, mais s'il le fait, nous ne voulons pas que les questions de violation des droits de la personne disparaissent sans laisser de trace.
Merci.
Comme vous l'avez mentionné, nous nous réunissons à un moment opportun, quelques semaines avant les prochaines élections. Est-ce que l'un de vous serait en mesure de nous donner de l'information sur la répression, à l'aube des élections du mois prochain, ainsi que sur des cas particuliers?
Oui, il y a des cas particuliers, à l'aube des élections qui auront lieu dans deux semaines. Comme je l'ai mentionné, nous avons vu des dirigeants des Gardiens de la révolution islamique iranienne parler en public de la répression, et parler de la façon dont les élections devraient être organisées. Nous avons vu le commandement de la cyberdéfense des Gardiens de la révolution et leur département particulier, le centre d'inspection des crimes organisés. Il s'agit d'une escouade de répression électronique qui exerce un contrôle étroit sur les cyberactivités des Iraniens. Elle surveille les sites Web, les courriels, Twitter et Facebook au moyen de la technologie de l'Ouest afin d'identifier les dissidents iraniens, et elle utilise la technologie de l'Ouest pour les identifier, les cibler et les emprisonner, ou pire encore.
Nous constatons une cyberoffensive d'un côté, et de l'autre, nous voyons le Basij et les Gardiens de la révolution qui se préparent à ce qui sera, selon leurs attentes, pire qu'en 2009. Ils craignent que cela ne soit pas un mouvement vert provenant des banlieues de Téhéran-Nord, mais qu'il s'agisse de manifestations dans les petites villes et les villages d'Iran, où le mouvement vert se conjugue à ce que j'appellerais un mouvement bleu. Ce sont les cols bleus qui sont frustrés par l'état de l'économie iranienne, par les politiques économiques néfastes de Mahmoud Ahmadinejad, ainsi que par le chômage et l'inflation.
Ce qu'ils craignent fort, c'est que ces deux mouvements, le vert et le bleu, se conjuguent et mènent à des manifestations majeures. Ils prennent les devants en intervenant physiquement et dans le cyberespace pour empêcher cela.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais encore une fois féliciter mon collègue, le professeur Irwin Cotler, d'avoir organisé la Semaine de la responsabilisation de l'Iran. Je souhaite de nouveau assumer ma responsabilité au comité en attirant votre attention sur trois Iraniens bien précis. Nous souhaitons sensibiliser les gens du monde entier à leur sort. Il s'agit d'abord de Navid Khanjani, un étudiant bahá'í, qui s'est vu refuser le droit d'aller à l'université à cause de sa foi et a été condamné à 12 ans d'incarcération à la prison d'Evin, à Téhéran, où il subit de mauvais traitements.
Les deux autres sont le pasteur chrétien Youcef Nadarkhani, qui a été condamné à mort pour avoir pratiqué sa foi et aussi le pasteur Saeed Abedini, qui a la double citoyenneté américaine et iranienne, et qui a été arrêté, battu et condamné à huit ans de prison. Sa santé se détériore dans ces conditions, et je ne sais pas s'il survivra très longtemps.
Merci de votre patience, monsieur le président.
Merci beaucoup, messieurs, pour votre exposé. Monsieur Levitt, pourriez-vous fournir au comité une copie du rapport déclassifié de la CIA dont vous avez parlé?
Bien sûr. J'aurais dû mentionner que certaines parties de mon exposé ont été tirées de mon prochain livre, sur le Hezbollah, qui sera également disponible au Canada au cours des prochaines semaines. On trouvera tous ces renseignements dans le livre.
Je serai bref, parce que notre temps de parole est limité. Vous avez tous deux fait allusion aux relations très compliquées des divers dirigeants de ce régime de répression iranien. Vous avez donné beaucoup d'exemples de ce qui se fait au sein des Forces Qods.
Où se situent les membres des Forces Qods dans l'organigramme de leadership du pays? Quel rapport existe-t-il, au juste, entre eux et la milice de la garde républicaine, les Basij, qui, d'après ce que vous dites, ont maintenant fusionné? Sont-ils en train d'inviter ou d'inciter d'autres organisations à opprimer leurs concitoyens?
Les Basij et les membres des Forces Qods relèvent tous des Gardiens de la révolution islamique iranienne; mais il importe surtout de comprendre la personnalité de Qassem Soleimani, le chef des Forces Qods, et sa relation avec le Guide suprême. Qassem Soleimani n'est pas obligé de passer par Jafari, le chef des Gardiens de la révolution islamique. Nous croyons qu'il peut s'adresser directement au Guide suprême.
Dans la foulée du complot d'Arbabsiar pour assassiner l'ambassadeur saoudien à Washington, D.C., les gens se sont bien gardés de dire que le Guide suprême était à l'origine de cette attaque. Les États-Unis et la Grande-Bretagne notamment ont été jusqu'à montrer directement du doigt Qassem Soleimani. Je n'ai pas d'autres preuves concrètes à vous donner, mais si vous croyez que Qassem Soleimani organiserait, sans l'aval du Guide suprême, un complot pour assassiner l'ambassadeur saoudien à Washington, D.C., dans un restaurant connu pour être fréquenté par des sénateurs américains, détrompez-vous.
Vous avez raison, il existe un problème généralisé au sein du leadership dans ce pays, où on ne trouve pas de franc-tireur. En fait, comme Mark et moi l'avons dit, tout est permis si cela fait avancer la révolution. Par conséquent, votre observation est fondée et, un des documents que j'ai fournis — qui, d'après ce que j'ai compris, sont en train d'être traduits —, c'est un article de mon collègue, Patrick Clawson, qui présente exactement le même argument que vous. En réalité, les décideurs politiques tant républicains que démocrates n'hésiteraient pas à sacrifier les droits de la personne s'ils pensaient pouvoir faire une bonne affaire. Ce n'est pas gentil de ma part, mais c'est bien vrai — raison pour laquelle, comme Mark l'a dit, nous devons intégrer ces valeurs dans tout ce que nous faisons.
Je me permets d'ajouter quelque chose à ce que vous avez dit, Mark. Il ne suffit pas d'augmenter le nombre de désignations de violateurs des droits de la personne. Quand nous mettons le doigt sur de telles violations et d'autres comportements, chaque fois que c'est le cas — et c'est presque toujours le cas —, nous devons souligner que les mêmes personnes qui appuient le terrorisme et les programmes de missiles et de prolifération nucléaire sont celles qui violent les droits de la personne. Quand nous en sommes certains, il faut le dire haut et fort.
C'est ce que j'ai essayé de faire quand j'étais sous-secrétaire adjoint du renseignement et de l’analyse au département du Trésor, et c'est encore ce qui s'y fait aujourd'hui. Trouvez des façons de mentionner qu'il s'agit des mêmes personnes, pour que ce soit bien clair.
Encore une petite question, à laquelle vous pourrez répondre en même temps que la précédente.
En passant, soyez assurés qu'il y a suffisamment de personnes autour de cette table vouées à la défense des droits de la personne en Iran pour garantir que la cause ne sera pas sacrifiée de sitôt.
Apparemment, seulement huit des 686 personnes ayant demandé l'autorisation de se présenter aux élections ont été retenues comme candidats. D'après ce que je comprends, autrefois, certaines d'entre elles étaient des proches du régime. Pourriez-vous nous dire ce qui se passe au sein du régime à la lumière de ces faits?
Selon moi, après réflexion, le Guide suprême a compris qu'il avait perdu le contrôle pendant les élections de 2009, à savoir quelqu'un qu'il croyait être un loyaliste, mais qui a fini par être un populiste. Cet ancien maire de Téhéran comprenait comment mener une campagne électorale auprès des gens ordinaires, mais il a eu la grosse tête et il a donné bien du fil à retordre au Guide suprême, aux Gardiens de la révolution islamique, à Soleimani, à Jafari et à toute cette dictature militaro-religieuse et répressive au cours des dernières années, en contestant le régime et en passant par-dessus leurs têtes pour demander l'appui du peuple iranien.
Cette fois-ci, Khamenei n'a donc pas pris de chances. Il n'a pas permis à Rafsanjani de se présenter parce qu'il craignait qu'il aurait trop d'emprise. Il n'a pas non plus permis à Mashael, le chef d'état-major et beau-père d'Ahmadinejad, de se présenter parce que les deux hommes étaient trop proches. La liste a donc été raccourcie de sorte que, comme vous l'avez dit, il ne reste plus que huit personnes, qui ont toutes un curriculum vitæ impeccable au chapitre de la révolution. Quand vous regardez Jalili, qui est reconnu comme étant le favori, au cours des dernières années et même des dernières semaines, il a dit très clairement, dans ses déclarations publiques, qu'il partage le point de vue de Khamenei sur la révolution, la société iranienne et le rejet de la communauté internationale. Il est un loyaliste extrême.
Quant à Rezai et Velayati, ces deux hommes non seulement partagent son point de vue sur la révolution, mais ils ont également été impliqués par le procureur argentin dont j'ai parlé, Alberto Nisman, dans l'attaque de 1994 contre le centre de l'AMIA à Buenos Aires. Interpol a lancé des mandats d'arrêts contre eux. Ces fugitifs recherchés à l'échelle internationale sont en lice pour la présidence.
Khamenei s'est assuré qu'aucun des huit candidats ne contesterait son autorité ni celle de Soleimani ni celle des gardes révolutionnaires. Dans ce sens, cette année, les élections seront plus frauduleuses qu'en 2009. Cette fois-là, on a truqué les bulletins de vote pour garantir qu'Ahmadinejad gagnerait. Cette fois-ci, on a truqué les candidatures pour veiller à ce que, peu importe qui gagne, il s'agira d'un loyaliste extrême.
Merci, monsieur le président.
C'est simplement une question de procédure. J'ai fait circuler un avis de motion qui, selon moi, pourrait faire l'objet d'un consensus. Je pense que, sur le plan symbolique, il serait bon de l'adopter aujourd'hui. Vous pourriez peut-être mettre la motion aux voix à la fin de cette séance ou...
Je vais le faire.
Est-ce que tous les députés ont lu la motion?
Des voix: Oui.
Le président: Monsieur Cotler, vous devez tout de même en proposer l'adoption.
Très bien. Voyons premièrement s'il y a consentement unanime.
Y a-t-il consentement unanime à l'égard de la motion?
(La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Parfait.
Nous veillerons à ce qu'elle soit rendue publique.
Passez à vos questions. Nous ne voulons pas perdre de temps.
Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Dubowitz. J'espère que le gouvernement adoptera vos deux suggestions, à savoir de désigner les Gardiens de la révolution islamique iranienne comme violateurs des droits de la personne aux termes de la Loi sur les mesures économiques spéciales et comme entité terroriste aux termes du Code criminel.
Puisque vous avez mis l'accent sur le fait qu'il faut clairement établir un lien entre les sanctions et les violations des droits de la personne, voici ma question. Est-ce que d'autres entités ou personnes importantes se penchent sur ce que l'Union européenne a fait et ce que les États-Unis ont fait récemment, de manière à pouvoir nous indiquer comment nous pourrions renforcer nos sanctions pour violations des droits de la personne?
Monsieur Cotler, voilà une question très opportune.
La semaine dernière, le Comité des affaires étrangères de la Chambre des représentants aux États-Unis a adopté une loi à l'unanimité, intitulée la Nuclear Iran Prevention Act of 2013. Une des dispositions charge le gouvernement de présenter au Congrès un rapport qui contient une liste de tous les dirigeants iraniens impliqués dans des violations des droits de la personne, et ensuite, 30 ou 60 jours après la présentation dudit rapport, de déterminer quelles sanctions prendre contre eux.
La prémisse veut que ce grand système de répression national soit dirigé par un seul homme, Ali Khamenei, mais que beaucoup d'autres dirigeants y jouent un rôle, notamment des commandants des Gardiens de la révolution islamique iranienne, des procureurs, des juges, des gardiens de prison, des membres des Basij et des membres du Parlement iranien. Quand on regarde l'ensemble de l'appareil gouvernemental, on voit qu'une foule de personnes sont impliquées dans des assassinats, la torture et l'emprisonnement. La loi demande que ces personnes soient identifiées et subissent des sanctions comme le gel de leurs avoirs et le refus de leur accorder des visas. Elle demande aux autres pays d'adhérer à ces interdictions de voyager.
Je pense qu'il serait bon que le gouvernement canadien — qui, encore une fois, fait preuve de beaucoup de leadership dans le dossier des droits de la personne, plus que tout que notre gouvernement et même plus que les gouvernements européens — désigne les Gardiens de la révolution islamique iranienne comme des violateurs des droits de la personne aux termes de la Loi sur les mesures économiques spéciales et s'en prennent ensuite aux membres de cet appareil répressif de manière à les identifier et à adopter des sanctions contre eux, tant individuellement que collectivement.
Merci. Nous donnerons suite à ces suggestions.
Si je le puis, j'aimerais poser une brève question à Matthew Levitt. En me fondant sur vos recherches, j'ai écrit un article sur les alliances terroristes entre l'Iran et le Hezbollah, dont les activités s'étendaient sur les cinq continents et dans plus de 25 pays de 2011 jusqu'à l'attentat de Burgas, le 18 juillet dernier.
Je crois remarquer que ces activités ont diminué depuis l'attentat de Burgas. Est-ce à cause du rôle que joue le Hezbollah en Syrie et de l'importance qu'il accorde à ce qui s'y passe? Ou est-ce que les attaques terroristes continuent en fait de se multiplier dans divers pays et continents?
Les attaques n'ont pas du tout diminué. Nous faisons l'erreur de nous fier aux sources ouvertes et de penser que tout ce qui est publié est vrai. Les organisations clandestines comme le Hezbollah et les Forces Qods font beaucoup plus que ce qui est rapporté dans les médias. Qu'il s'agisse d'attentats manqués ou d'activités de surveillance douteuses du Hezbollah, notamment à l'aéroport de Johannesburg, que ce soit en Ukraine, en Grèce ou en Turquie, le Hezbollah et les Forces Qods continuent d'être très actifs.
Bien que je ne fasse plus partie du milieu du renseignement, les gens avec qui je parle m'informent que le Hezbollah et les Forces Qods profèrent très souvent des menaces à l'endroit des civils et des diplomates. Dans mon livre, par exemple, les lecteurs ne seront pas surpris d'apprendre plus de détails que ce qui est connu par la plupart des gens au sujet de leurs activités en Amérique du Sud et en Amérique du Nord, notamment au Canada. Toutefois, à mon avis, les gens seront surpris, tout comme je l'ai été, de voir tout ce que fait le Hezbollah en Asie du Sud-Est, notamment en Malaisie, dans les Philippines, à Singapour, et en Afrique et au Moyen-Orient, au delà de l'Europe et des autres endroits où nous savons qu'ils sont actifs depuis bien longtemps.
J'aimerais faire une dernière observation au sujet de la question précédente sur le nombre de candidats qui peuvent se présenter. Mark a tout à fait raison de dire que le Guide suprême considère que le président actuel ne suit pas ses consignes, et qu'il a donc choisi de limiter ceux qui pouvaient se présenter comme candidats. Après les élections de 2009, un de mes amis iraniens m'a dit que ce qui était nouveau, ce n'est pas que ces élections aient été volées, mais plutôt qu'elles l'avaient été de façon si évidente et si flagrante. Il a alors prédit — et c'est bien ce qui arrive en ce moment — que le régime recommencerait à avoir recours à des moyens institutionnels pour exercer son contrôle sur les élections de manière à ce que cela soit plus discret. C'est bien ce que nous voyons, et ce n'est pas surprenant. Il s'agit encore de violations des droits de la personne, mais c'est moins évident, alors cela suscite moins de colère et de réactions tant au pays qu'à l'étranger.
Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aussi aux témoins pour leurs exposés aujourd'hui.
Pour améliorer la situation des droits de la personne en Iran, vaut-il mieux interpeller les autorités iraniennes ou soutenir la société civile ou oeuvrer sur les deux fronts à la fois? Autrement dit, quelle est la meilleure façon d’amener des réformes en Iran?
En bien, si vous croyez que le régime en Iran peut être réformé, alors je suppose qu'il serait parfaitement logique d'interpeller les autorités. Or, je ne crois pas que ce soit le cas. Je crois que le gouvernement de l'Iran est organisé de manière à être répressif et à décider qui peut se porter candidat. Je crois que le fait d'appeler ce gouvernement démocratique tourne la démocratie en dérision. Il ne s'agit pas vraiment d'une démocratie: vous ne pouvez pas choisir pour qui voter, qui sera candidat. Ce sont des instances non élues qui font ces choix.
Il existe deux gouvernements en Iran. D'une part, il y a celui qui est censé avoir été élu, et qui, de toute manière, n'a essentiellement aucun véritable pouvoir. D'autre part, il y a le gouvernement révolutionnaire, qui n'a aucunement été élu et qui contrôle tous les aspects du pouvoir au pays, notamment les médias, l'appareil judiciaire, l'armée et les services de renseignement. Je ne crois pas que l'établissement d'un dialogue avec l'Iran n'ait aucune chance de mener à une réforme de la société civile.
Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas établir de dialogue, seulement qu'il ne faut pas le faire avec le gouvernement. Il existe des défenseurs de la société civile chez eux. Malheureusement, nous ne pouvons pas les rencontrer ouvertement en Iran. Cela leur créerait des problèmes. Voilà pourquoi nous nous réunissons ici aujourd'hui. Cependant, vous pourriez les rencontrer ailleurs, discrètement, de manière à ne pas les exposer, eux et leur famille, au danger.
Il faut interpeller, appuyer et trouver des façons d'encourager ceux qui tentent d'ériger une société civile en Iran. Toutefois, je ne crois pas que le gouvernement jouera quelque rôle que ce soit à cet égard, à part essayer justement de réprimer toute tentative dans ce sens.
J'aimerais parler d'une merveilleuse initiative qui a eu lieu à Toronto, il y a deux semaines, à savoir la Conférence sur le dialogue mondial. Celle-ci a été parrainée, je crois, par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et la Munk School of Global Affairs. Des défenseurs irano-canadiens de la société civile y ont été invités, en compagnie de collègues européens et, grâce à la technologie, 150 000 Iraniens ont pu suivre la conférence en Iran, poser des questions et faire des commentaires au moyen des médias sociaux. J'ai participé à la conférence, et j'ai trouvé qu'il s'agissait d'un parfait exemple de façon d'établir un dialogue avec la société civile iranienne, comme Matt le suggère.
Je conviens avec Matt qu'il ne vaut pas la peine d'interpeller le régime au sujet de la démocratie et des droits de la personne. Le seul dossier sur lequel il pourrait valoir la peine de l'interpeller, jusqu'à un certain point, serait leur programme nucléaire. J'appuie une solution diplomatique. Les cinq séries de discussions à avoir eu lieu jusqu'à présent avec le régime iranien à ce sujet ont échoué. C'est une bonne idée de parler du programme nucléaire avec les autorités. C'est certainement plus qu'une bonne idée d'imposer en même temps des sanctions au régime — sur le plan économique ainsi que sur les plans de la prolifération nucléaire et des violations des droits de la personne —, parce que, de toute évidence, on ne réussira jamais à faire changer l'orientation de ce régime à moins d'exercer d'importantes pressions de manière à réduire à néant les aspirations d'Ali Khamenei et de ses gardes révolutionnaires au chapitre du nucléaire.
Il est inutile d'engager un dialogue avec le régime au sujet de questions relatives à la société civile. Cela dit, encore une fois, je pense que le Canada fait preuve de leadership en établissant un dialogue avec des membres de la société civile comme il l'a fait il y a deux semaines, à l'Université de Toronto.
Merci.
L'Iran a présidé la conférence de l'ONU sur le désarmement. Dans quelle mesure la réputation de l'ONU est-elle compromise quand celle-ci permet à l'Iran d'assumer un tel rôle?
Vous savez, monsieur, c'est encore pire que cela. Cela donne l'impression d'être un mauvais téléroman, mais, en fait, c'est bien pire. Les Nations Unies sont tellement influencées par les largesses de l'Iran et gouvernées par d'étranges modalités de vote et les blocs de pays que les Iraniens ont présidé non seulement la conférence sur le désarmement, mais aussi, je crois, des conférences sur les droits des femmes. L'Iran détient aussi un siège au conseil d'administration de l'autre organisme phare de l'ONU, le Programme des Nations Unies pour le développement — le PNUD, je crois —, qui, chaque année, distribue des centaines de millions de dollars dans le monde entier. En tant que membre du conseil, l'Iran décide où va cet argent. De toute évidence, son argent lui permet d'acheter de l'influence.
Je pourrais vous donner une litanie d'exemples où les Nations Unies ont dérogé à leurs principes fondateurs — qui, au départ, avaient été mis de l'avant par un grand Canadien. Nous voyons les Iraniens manipuler les institutions et les processus de l'ONU et obtenir le contrôle d'organismes clés et, surtout, de centaines de millions de dollars des contribuables canadiens et américains pour s'en servir à ses propres fins.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Monsieur Dubowitz, dans le cadre de projets relatifs aux droits de la personne en Iran, votre organisation surveille les entreprises étrangères qui vendent du matériel et de la technologie à l'Iran, matériel dont le régime se sert pour violer les droits de la personne. Pourriez-vous fournir au sous-comité le nom de certaines de ces entreprises, plus particulièrement celles d'Europe et d'Amérique du Nord, et nous parler des genres de violations des droits de la personne que celles-ci facilitent?
Merci pour cette question.
Vous avez parfaitement raison. Au cours des deux ou trois dernières années, des sources ouvertes, le Wall Street Journal, Reuters et Bloomberg, ont fait d'excellents reportages présentant des détails concernant des entreprises internationales qui vendent des outils de répression électroniques au régime iranien. Je serais ravi de vous envoyer le rapport détaillé que nous avons, très fourni en notes en bas de page. Nous ne l'avons pas encore rendu public, mais nous l'enverrons au comité. Vous y trouverez des noms, des dates et les technologies qui ont été vendus.
Je profite aussi de l'occasion pour féliciter le Canada de ce qu'il a fait hier, en imposant un embargo commercial contre l'Iran, tout en prévoyant des exemptions applicables à des technologies de protection en ligne qui aideraient les Iraniens à contrecarrer ce que le président Obama appelle le rideau électronique de l'Iran. Voilà l'aspect positif de la technologie — le fait de pouvoir fournir au peuple Iranien la technologie nécessaire pour les aider à faire échouer la répression électronique.
Par ailleurs, aux termes de la Loi sur les mesures économiques spéciales, le Canada interdit à tout Canadien de fournir des outils de répression électroniques au régime iranien. L'industrie canadienne des logiciels et des télécommunications est dynamique, notamment dans cette ville, et il importe de ne pas permettre au régime iranien de mettre la main sur ces technologies avancées permettant de suivre et de cibler les gens. Celles-ci sont vendues par des entreprises occidentales à des services de police de bonne réputation du monde entier et sont assujetties à des règles et à des mesures de contrôle. Le fait de les vendre à n'importe quel élément de ce régime voudrait dire que celui-ci l'utiliserait pour cibler tout particulièrement les dissidents en vue de les assassiner, les torturer et les mettre en prison sans raison valable.
Alors, oui, absolument, je m'assurerai de vous fournir un rapport très détaillé contenant le nom exact des entreprises impliquées.
En passant, je tiens à mentionner que tout ce que vous nous fournissez doit être envoyé à la greffière, qui veillera alors à ce que ce soit distribué en anglais et en français, conformément à nos propres règles. Nous nous chargerons des traductions nécessaires. Nous sommes toujours reconnaissants pour tout ce que vous pouvez nous envoyer. Évidemment, cela s'applique à vous deux.
Chers collègues, vous avez été très généreux de nous permettre de dépasser le temps alloué.
Monsieur Cotler, souhaitez-vous ajouter autre chose?
D'accord.
Merci de nous avoir permis de dépasser le temps qui nous était alloué. Je vous en suis reconnaissant. Merci pour vos excellents exposés.
Je tiens à préciser que nous avons adopté cette question à l'unanimité et que nous publierons un communiqué de presse à cet égard.
Merci, chers collègues.
La séance est levée.
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