SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 6 décembre 2011
[Enregistrement électronique]
[Français]
À l'ordre, s'il vous plaît.
Nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Aujourd'hui, le 6 décembre 2011, nous tenons notre 13e séance de la présente législature.
[Traduction]
Aujourd'hui nous poursuivons l'étude portant sur la persécution de la communauté copte en Égypte. Je passerai incessamment à la question et à notre témoin, mais je voudrais d'abord vous signaler qu'à la fin de la réunion, j'aimerais discuter de quelques questions qui n'ont rien à voir avec le sujet qui nous occupe, dont certaines de nature administrative et budgétaire. Je m'abstiens de vous en dire davantage jusqu'à ce que nous soyons en huis clos. Une des questions se rapporte à un témoin concret qui pourrait éventuellement comparaître, mais il faudra en discuter tout à l'heure. Je propose que nous laissions tout cela pour la fin afin d'éviter de demander à notre témoin de quitter la salle pour le faire rentrer de nouveau par la suite. C'est ce que je suggère.
Monsieur Sweet.
J'aimerais disposer d'une ou deux minutes pour m'étendre un peu sur la question que je vous ai mentionnée. J'en ai parlé avec deux ou trois membres et s'il est peu probable que nous arrivions à un consensus dès cette réunion, ils pourront au moins vérifier leur emploi du temps.
D'accord. Nous tâcherons de prévoir assez de temps pour cela.
Passons directement à notre témoin. Il s'agit d'Alex Neve, secrétaire général de la section anglophone d'Amnistie internationale Canada. M. Neve a déjà témoigné devant nous et il est donc inutile de vous le présenter. Il nous a fourni des documents sur l'Égypte, qui vous ont été distribués.
Monsieur Neve, nous vous cédons l'estrade si vous le voulez bien.
Merci beaucoup.
Bonjour à tous les membres. C'est toujours un plaisir de me retrouver devant vous. Je suis vraiment ravi de l'occasion qui m'est donnée de parler d'enjeux qui revêtent autant d'importance et d'actualité pour les droits de la personne, c'est-à-dire la situation en Égypte et, plus concrètement, la cause des chrétiens coptes.
Il serait oiseux de ma part de commencer par m'attarder sur le côté remarquable et inédit de l'année que Égypte vient de vivre. Contentons-nous de rappeler que si cette audience avait eu lieu il y a à peine un an, le 6 décembre 2010, nous n'aurions même pas pu imaginer l'ampleur des changements qui étaient sur le point de s'opérer. À l'époque, on n'aurait même pas pu rêver à une transformation aussi massive et imminente en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Dix jours encore et le tunisien Mohammed Bouazizi s'immolait en proie au désespoir, déclenchant ainsi le mouvement en faveur du changement qui allait se répandre de manière aussi spectaculaire de la Tunisie à toute la région.
Ce mouvement a apporté des changements réellement avant-gardistes dans divers pays, alors que dans d'autres, il a suscité des répressions d'une brutalité terrifiante. La Syrie, par exemple, pour citer le premier pays qui me vient à l'esprit, où 4 000 personnes ont été tuées dans les huit derniers mois. Je songe également au Bahreïn. Je tiens à signaler aux membres du sous-comité qu'un citoyen canadien, Nasser Al-Raas, a été emprisonné et torturé cette année. Il risque d'être reconduit en prison dès demain pour commencer à purger la peine de cinq ans qui lui a été imposée tout simplement pour avoir participé à une manifestation pacifique au Bahreïn.
En retournant à l'Égypte, au 6 décembre 2010, les décennies du vieil engrenage militaire et brutal sous le règne et la main de fer de Hosni Moubarak semblaient inattaquables, tout comme les graves violations des droits de la personne qui sont monnaie courante dans ce pays. Jusque-là, le monde entier, dont le Canada, n'avait malheureusement fait que très peu pour contrer ces violations et ce, pour diverses raisons, notamment liées à la géopolitique contentieuse et complexe de la région. Pendant de très longues décennies, la communauté internationale n'a rien pu faire pour contrer de manière utile les déplorables antécédents de l'Égypte au chapitre des droits de la personne.
Les inquiétudes étaient nombreuses et les victimes et survivants innombrables. Pendant des années, Amnistie internationale a documenté et parlé des infractions aux droits de la personne perpétrées notamment contre les membres de la communauté chrétienne copte de l'Égypte. En me préparant pour la session d'aujourd'hui, j'ai très rapidement parcouru les événements pour en tirer quelques tristes exemples au fil des ans. Dans nos rapports, nous signalons que les chrétiens coptes sont parmi les civils régulièrement ciblés par des groupes armés islamiques, dont Al-Gama'a al-Islamiyya, à compter de 1992, quand ces groupes ont pris les armes contre le gouvernement égyptien.
Le 14 février 1997 — par une ironie du sort, le jour de la Saint-Valentin — un communiqué de presse d'Amnistie internationale condamnait un attentat qui s'était produit en l'église de Saint-Georges dans une ville de Haute Égypte. Quatre hommes armés et masqués ont fait irruption dans l'église et commencé à tirer sur un groupe de 30 jeunes coptes chrétiens pendant l'homélie. Dix d'entre eux ont été tués et cinq grièvement blessés.
Un autre communiqué de presse d'Aministie internationale datant du 12 janvier 2010 condamne une fusillade perpétrée à partir d'une auto en marche alors que des fidèles coptes sortaient de la messe de Noël. Six fidèles ont été abattus. Cette tuerie est survenue à un moment où les remous et les conflits entre musulmans et coptes étaient très répandus dans la région. Notre communiqué signalait que les autorités égyptiennes avaient négligé de fournir une protection adéquate et de garantir la sécurité de la communauté copte, qui était manifestement vulnérable. L'absence des forces de sécurité était flagrante, car elles sont habituellement déployées pendant les festivités pour surveiller les églises à cette époque de l'année.
Ensuite, au début de cette année, au moment où le remarquable mouvement de protestation en Égypte qui a donné lieu à des changements aussi colossaux atteignait son paroxysme, il y a eu un autre attentat mortel contre une église, le 1er janvier 2011. Des fidèles d'une église copte à Alexandrie ont été ciblés lors d'un attentat à la bombe qui a tué 23 personnes et blessé de nombreuses personnes parmi celles qui assistaient à la messe de minuit pour fêter le réveillon.
Ainsi, avant que les choses ne commencent à changer en Égypte, les antécédents étaient malheureusement flagrants. Il y avait un patron bien établi d'attentats par des groupes armés qui ciblaient la communauté chrétienne copte, visant très souvent les églises, voire les églises au moment de la messe. Ces attentats se poursuivent depuis une vingtaine d'années. On s'apercevait beaucoup trop souvent que les autorités égyptiennes ne faisaient clairement que très très peu pour fournir une sécurité et une protection à la communauté face à cette violence mortelle, ce qui nous amène aux incroyables changements de cette année.
Mais derrière tout ce tapage, derrière cette mise en scène politique et l'exaltation d'un mouvement populaire motivant, et outre la chute spectaculaire de Hosni Moubarak de président inamovible qui sème la crainte à criminel inculpé devant désormais rendre compte de ses actes lors d'un procès très public, peut-on parler de changements vraiment importants et durables au chapitre des droits de la personne? Les changements semblent-ils annoncer un avenir plus radieux pour les droits des Égyptiens? Et que signifient-ils au juste pour la communauté assiégée des chrétiens coptes, qui représenteraient entre 6 et 8 millions d'habitants, soit 10 p. 100 de la population?
Le mois dernier nous avons publié un rapport intitulé « Broken Promises: Egypt's Military Rulers Erode Human Rights ». Je crois que le titre est assez explicite. Je vous ai soumis des exemplaires de ce rapport aujourd'hui et voici ce que nous avons à y ajouter après avoir passé en revue les événements de ces derniers mois.
Le Conseil suprême des forces armées, qui a pris les rênes du pouvoir quand l'ancien président Moubarak a été détrôné le 11 février, avait affirmé qu'il verrait à « une transition paisible des pouvoirs au sein d'un système libre et démocratique ». Or, en prévision des élections du mois de novembre à l'Assemblée du peuple, le Conseil suprême a arbitrairement restreint ces mêmes droits humains, y compris la liberté d'expression, d'association et d'assemblée, qui sont essentiels pour pouvoir débattre les enjeux socio-politiques librement. Toute critique à l'égard des autorités sur le rythme des réformes a été aplatie sans scrupules. Les tribunaux militaires ont emprisonné 12 000 civils. Les procureurs militaires ont convoqué, interrogé, et fait arrêter les personnes qui osaient critiquer l'armée, et les forces militaires ont eu recours à une force excessive pour disperser les manifestants. L'euphorie du soulèvement a désormais cédé la place à la crainte qu'un régime répressif ne soit tout simplement venu se substituer à un autre.
La jubilation de l'heure et la décision très favorablement accueillie des forces armées qui avaient décidé à l'époque de s'abstenir de tirer sur les protestataires pendant le soulèvement ont camouflé le fait que le pays se trouve toujours, par défaut, sous un régime militaire un an après, et ce, malgré le fait que le Conseil suprême des forces armées avait promis que le pouvoir serait cédé à un gouvernement civil élu par le peuple.
Au nom de la sécurité et de la stabilité, les autorités ont commis de nombreuses infractions contre les droits de la personne, faisant fi des clameurs exigeant la justice sociale et des libertés fondamentales qui avaient déclenché le soulèvement au départ. En effet, et de l'avis d'Amnistie internationale, 10 mois plus tard, le Conseil suprême des forces armées s'écarte de plus en plus des promesses liées aux droits de la personne que des millions d'Égyptiens ont exigées lors de la révolution du 25 janvier. L'état d'urgence demeure en vigueur dans le pays. Les proches des personnes illicitement tuées par les forces de sécurité pendant la révolution attendent toujours à être entendues et indemnisées par la justice. La torture et les procès injustes demeurent des pratiques courantes. La discrimination contre les femmes et les minorités religieuses persiste. On continue à faire obstacle à la liberté d'expression, d'association et d'assemblée. Les réfugiés et les personnes à la recherche d'asile continuent à être tués aux frontières avec Israël ou sont arrêtés et déportés de force vers des pays où ils s'exposent à de graves violations des droits de la personne. Des millions de personnes vivant dans des bidonvilles continuent de se voir refuser des services essentiels et attendent toujours que leurs voix soient entendues. Le portrait n'a rien d'optimiste.
Je vais passer dans un instant à ce que tout cela veut dire pour la communauté copte, mais je voudrais insister sur l'une des nombreuses inquiétudes que je viens de signaler, soit la discrimination qui se poursuit à l'égard des femmes, car c'est un aspect clé du programme général des droits de la personne dans le pays.
Les Égyptiennes ont joué un rôle décisif dans la révolution, mais les espoirs qu'elles ont osé caresser pendant ces jours de révolte n'ont pas été exaucés. D'aucuns diraient même qu'ils sont sur le point d'être complètement anéantis. Les femmes continuent à être massivement exclues de toute participation à l'avenir de leur pays, et il est urgent de changer la situation.
Il est de multiples facteurs qui contribuent aux difficultés auxquelles sont confrontées les femmes pour pouvoir jouer un rôle égal à celui des hommes et participer à la construction de la nouvelle Égypte: le manque de sensibilisation politique attribuable à un taux d'alphabétisation très faible, au harcèlement et à la coercition des électeurs; des agressions contre les candidates; des comportements sociaux faisant obstacle aux femmes cherchant à occuper une charge publique; les femmes laissées en marge des partis politiques et des syndicats; des systèmes de quotas inefficaces — plus faibles encore que lors des élections égyptiennes antérieures; et l'exclusion des femmes des fonctions et organes décisionnels importants — par exemple, pas une seule femme n'a été désignée pour siéger à l'important comité établi en mars dernier pour s'occuper des amendements constitutionnels.
Si nous conjuguons tout cela, quelle est donc la situation pour la communauté copte du pays? Nous devons reconnaître et souligner au départ que des Égyptiens de toutes les religions et confessions ont pris part à la révolution du 25 janvier. Ils ont tous placé leur foi et leur espoir dans ce mouvement en faveur du changement, sur un pied d'égalité. Néanmoins, les minorités religieuses ont continué à subir la discrimination de la part des autorités et à recevoir une protection inadéquate de l'État face à une violence qui se poursuit, voire ne fait que s'exacerber.
La discrimination et les attaques contre les chrétiens coptes sont particulièrement prévalents et semblent s'être aggravées depuis que le Conseil suprême des forces armées a assumé le pouvoir. Par ailleurs, les coptes continuent à être discriminés à l'heure de désigner les hauts fonctionnaires, y compris parmi les agences de sûreté. À l'issue d'un attentat contre une église en Haute Égypte en septembre, des milliers de gens, coptes pour la plupart, se sont manifestés le 9 octobre sur la Place Maspero au Caire pour demander que l'on mette fin à la discrimination et que l'on garantisse le respect du droit à la liberté religieuse.
Les militaires ont répliqué en faisant usage d'une force excessive, voire en dirigeant leurs véhicules blindés à toute vitesse contre les foules. L'incident aurait coûté la vie à 26 coptes, un musulman et un soldat et 321 personnes auraient été grièvement blessées.
Le Conseil suprême a carrément fait abstraction des appels à une enquête indépendante sur ce qui s'était produit. Au lieu de cela, l'armée mène sa propre enquête. Elle semble surtout vouloir punir les personnes qui ont déploré l'incident. Dans ce contexte, il est notoire que le blogueur et activiste égyptien très connu Alaa Abd El Fattah, un des grands dirigeants de la révolution du 25 janvier, est en état d'arrestation depuis le 30 octobre simplement pour avoir critiqué le fait que les militaires se chargent de mener leur propre enquête interne sur l'incident de la Place Maspero. Plus d'un mois après, il demeure détenu, et la cour d'appel vient de lui refuser à peine hier de le libérer en attendant son procès.
On estime qu'au cours des trois dernières décennies l'Égypte a vécu une quinzaine d'attentats contre les coptes, mais depuis les derniers huit mois, c'est-à-dire depuis la révolution du 25 janvier, on a compté au moins six attentats contre des églises et/ou des conflits entre musulmans et coptes — nous parlons donc de 15 attaques en 30 ans et de six en à peine un peu plus de 10 mois.
Le 4 mars, l'église Shahedain, dans un village au sud du Caire, a été détruite. Le 8 mars, il y a eu des disputes violentes entre des musulmans et des coptes dans un quartier du Caire, où résident de nombreux éboueurs coptes, où 10 personnes ont perdu la vie. En avril, des conflits se sont soldés par deux morts. En mai, il y a eu des attaques contre deux églises: l'église Mar Mina et l'église de la Vierge Marie, laissant au moins 15 morts. En septembre, l'église Mar Girgis à Assouan a été détruite. Les 4 et 9 octobre, des protestataires coptes ont été attaqués par des soldats et des hommes de main armés non identifiés.
Face à ce patron extrêmement préoccupant de violence et d'attaques, il n'y a eu pour ainsi dire aucune intervention de la part des autorités. Sur le plan officiel, il est traditionnel que lorsqu'on est confronté à des actes violents pour des motifs religieux en Égypte, on favorise une soi-disant réconciliation en convoquant une rencontre entre les dirigeants religieux au lieu de prendre des mesures en vue d'identifier et de poursuivre les auteurs et les responsabiliser de ces violations très graves des droits de la personne.
Dans la nouvelle Égypte, les coptes demeurent nettement sous-représentés à l'heure de désigner les hauts fonctionnaires et autres dignitaires, tels les présidents des universités ou des postes clés dans le milieu de la sûreté.
Les autorités n'ont rien fait pour mettre fin à l'interdiction de construire des lieux de culte ou de restaurer ceux qui existent déjà, ce qui a fait que de nombreuses églises au pays ont été fermées ou détruites parce qu'elles n'avaient soi-disant pas le permis nécessaire.
En mai, un comité a été établi pour rédiger une loi contre la discrimination et une loi unifiée pour les lieux de culte. Le code pénal a été modifié de manière à établir une amende minimale de 5 000 $ US pour toutes formes de discrimination, y compris la discrimination religieuse, mais aucune loi n'a encore été adoptée concernant la construction de bâtiments religieux.
Le Canada peut et doit se mobiliser face à ces inquiétudes concrètes sur la persécution soutenue des chrétiens coptes mais aussi face aux celles plus vastes portant sur la discrimination profondément ancrée contre les femmes et au patron extrêmement préoccupant qui se poursuit où les droits de la personne sont systématiquement enfreints en Égypte dix mois après une révolution qui promettait un avenir très différent sur ce plan.
Le Canada devrait faire pression auprès des autorités égyptiennes afin qu'elles libèrent Alaa Abd El Fattah; qu'elles lancent une enquête sur la violence qui a eu lieu à la Place Maspero en la confiant à un organe vraiment indépendant; qu'elles passent en revue, modifient ou abolissent toute loi le moindrement discriminatoire, y compris pour des motifs de religion ou de sexe; qu'elles changent toutes les lois et pratiques existantes qui discriminent contre les minorités religieuses, y compris le paragraphe 98f) du code pénal, qui criminalise l'exploitation de la religion pour déranger la paix nationale, ainsi que le décret présidentiel 291/2005, qui restreint les réparations et l'expansion des églises chrétiennes.
Le Canada devrait exhorter les autorités égyptiennes à s'engager à entreprendre un programme qui veillera à ce que les femmes occupent un rôle central dans la construction de la nouvelle Égypte et faire en sorte que l'égalité et la non-discrimination soient au noyau même du processus de réforme du pays. Amnistie internationale a des recommandations très précises dans ce domaine, que vous trouverez dans le rapport que je vous ai remis, « Women Demand Equality in Shaping New Egypt ».
Enfin, le Canada devrait exhorter les autorités égyptiennes à tous les niveaux, y compris parmi les personnes qui viendront les remplacer à l'issue des élections parlementaires récentes et en cours, à souscrire au manifeste d'Amnistie internationale sur les droits de la personne en Égypte, que nous avons simplement baptisé « 10 Steps for Human Rights ». Notre manifeste comprend des mesures aussi évidentes que l'abolition de la loi d'urgence en Égypte et la fin de l'état d'urgence perpétuel du pays. Le pays, comme vous le savez tous, ou du moins la plupart d'entre vous, est en situation d'urgence depuis 1967 — l'année où le Canada fêtait son centenaire — soit 44 ans d'un régime d'urgence qui, en toute franchise, n'a été qu'un prétexte pour enfreindre gravement les droits de la personne, 44 ans d'un régime d'urgence qui hélas, n'a fait que se répandre au lieu d'être restreint depuis les 10 derniers mois.
Je vous ai laissé un exemplaire de notre manifeste des droits de la personne et je vous exhorterais à le parcourir. Je crois qu'il est clair et concis et qu'il souligne très utilement les changements principaux sur lesquels la communauté internationale devrait insister et faire pression auprès de l'Égypte afin que ce pays se mette à la hauteur.
C'était les commentaires que j'avais à faire, tant en ce qui a trait à la situation des chrétiens coptes dans le pays ainsi qu'à d'autres préoccupations plus générales dont je voulais vous faire part: la cause des femmes et la situation des droits de la personne en général. Bien entendu, je suis très ouvert et intéressé à entendre toute question ou commentaire que vous pourriez avoir.
Merci.
Merci monsieur Neve.
Comme nous sommes au 6 décembre, nous avons un problème inhabituel du côté de l'emploi du temps. Il y aura un moment de silence à la Chambre des communes qui va restreindre notre temps un peu ici, ce que je n'avais pas prévu quand nous avons commencé cette réunion. Pour laisser du temps pour tout, je vais en fait demander à tout le monde de se limiter à quatre minutes par question et réponse. Je crois que c'est le seul moyen de jongler avec le tout et nous occuper de tout ce que nous avons à l'ordre du jour.
Dans cet esprit, nous commençons normalement par une question émanant du membre conservateur. Monsieur Sweet.
Merci beaucoup monsieur le président. Je ferai attention au chronomètre.
J'ai relevé bon nombre d'aspects, mais je vais essayer de simplifier le tout.
Vous avez dit qu'un régime oppressif est en train d'être remplacé par un autre. Compte tenu des chiffres que vous avez cités concernant un impôt prélevé des chrétiens coptes depuis 30 ans, et ensuite l'an dernier, je crois que c'était —
— cela pose un problème important dans la mesure où toute la communauté est affectée. Vous avez bien évidemment des biens qui sont détruits, des personnes qui sont tuées et d'autres mutilées. Avec ces restrictions, selon lesquelles on n'est pas autorisé à rebâtir ou à bâtir des églises, on peut littéralement piétiner les croyants sans leur laisser la moindre installation, simplement parce qu'ils ne peuvent pas obtenir un permis. Est-ce une affirmation exagérée?
Je crois que les inquiétudes sur les deux fronts sont bien fondées. Bien entendu, l'inquiétude à propos de la violence, de la sécurité physique et de la sûreté comme telle occupe le tout premier plan. Le fait que les chrétiens coptes aient été si nombreux à être attaqués et tués, souvent à l'intérieur ou aux alentours de leurs lieux de culte, est tout à fait inacceptable. Mais le fait que cela se produise dans le contexte plus vaste de la discrimination, dont des mesures qui font qu'il soit difficile de maintenir des lieux de culte, s'inscrit dans un patron plus vaste, qui laisse manifestement une communauté religieuse en état de siège. J'estime que la communauté internationale doit demeurer attentive aux diverses manières dont les chrétiens coptes subissent ces mauvais traitements, en faisant clairement pression pour que des mesures soient prises en réponse aux agressions et que d'autres réformes législatives et initiatives soient instituées pour veiller à ce que la liberté religieuse puisse vraiment s'épanouir.
C'est là une question complexe à elle seule. Quand on a un régime qui a carrément opté pour la discrimination — vous avez fait allusion aux amendes de 5 000 $ pour discrimination religieuse — si on applique la loi de la même manière que l'on fait au Pakistan, elle finit par s'appliquer uniquement à une certaine collectivité. Nous sommes déjà en train de voir les résultats de cela, avec un de nos témoins qui est en train de consacrer sa vie à cela, à essayer de lutter contre ces lois.
Nous avons eu des témoignages assez puissants en ce qui concerne les Frères musulmans. Est-ce que je pourrais vous demander ce qu'il en est de ce groupe d'après vous?
Amnistie internationale ne prend pas position pour des partis politiques proprement dits. Nous avons bien entendu beaucoup à leur dire au sujet de leurs responsabilités à l'égard des droits de la personne, qu'ils cherchent à être élus ou qu'ils se soient contentés d'assumer le pouvoir. Nous garderons les yeux bien ouverts à ce chapitre en ce qui a trait aux Frères musulmans afin de veiller à ce que toutes ces inquiétudes, mais plus particulièrement les programmes relatifs à l'égalité et à la non-discrimination — les minorités religieuses et les femmes sont en tête de liste — soient quelque chose dont ils devront vraiment rendre compte.
J'espère que vous surveillerez la chose de très près.
Enfin, il y a les mesures prises par les forces de sécurité. Selon vos observations, y aurait-il lieu de croire qu'une partie de cela soit attribuable à un manque d'exécution...? À ce que j'ai compris, il y aurait des preuves de leur participation aux actes violents dans certains cas. Avez-vous le sentiment que ces décisions sont prises par les échelons supérieurs et non pas par les agents de l'ordre individuellement?
Nous n'avons pas de réponse définitive à cela, mais nous sommes très certainement conscients de ces enjeux. C'est d'autant plus la raison pour laquelle, en revenant à l'incident de la Place Maspero en octobre, nous insistons qu'il faut une enquête rigoureuse et indépendante qui se penche non seulement sur les menus détails de la tragédie qui s'est produite dans la place, mais sur le contexte élargi dans lequel elle a eu lieu. Cela constituerait selon moi une occasion importante de veiller à un examen exhaustif de ce genre de questions.
Il est évident que pour l'instant le Conseil des forces armées ne semble pas le moindrement enclin à commander une enquête indépendante de la sorte. J'estime que la communauté internationale doit maintenir la pression, voire adopter des mesures concrètes pour veiller à ce qu'une telle enquête ait lieu.
Merci, monsieur le président.
Comme d'habitude, les informations que vous fournissez sont extrêmement exhaustives.
Nous avons accueilli il y a deux séances le père El Shafie, de One Free World International. Ses conclusions rejoignaient presque exactement les vôtres. En fait, il s'est exprimé avec véritable passion à propos de la situation à laquelle sont confrontées toutes les communautés chrétiennes là-bas, et non pas seulement les coptes.
Quelle sera selon vous la réaction à ce chapitre de la communauté internationale, particulièrement celle des États-Unis et de l'Union européenne? Tout le monde était frappé de fierté et d'enthousiasme face aux événements du printemps.
Tout au long de cette année, nous avons eu le sentiment que la communauté internationale titubait en essayant de suivre le rythme des changements qui se produisaient en Égypte. Nous avons vu cela même au tout début de la révolution, comme elle a fini par être appelée. Pour commencer, la communauté occidentale, sans oublier le Canada, a été prise par surprise. Ensuite, elle a tardé à comprendre ce qui se passait. Puis, elle a hésité à renoncer à Hosni Moubarak. Il y avait quelque nervosité à l'idée de donner son appui inconditionnel aux exigences visant des changements démocratiques. Certains pays, dont éventuellement le Canada, ont fini par assimiler le programme et se mettre à la hauteur.
À présent, les choses sont en train de fluctuer de nouveau un peu. Bien entendu, comme nous passons à la phase des élections, et compte tenu de l'imposante prépondérance des partis décidément religieux, les Frères musulmans étant un exemple flagrant, les gouvernements se sentent de nouveau un peu confus sans trop savoir comment réagir. C'est pourquoi nous proposons ce cadre de travail pour les droits de la personne au gouvernement égyptien et à la communauté internationale toute entière. C'est une recette pour une véritable transformation en Égypte. Le point de mire que les pays doivent réellement se donner à présent n'est pas d'occuper une position nuancée ni d'afficher des doutes par rapport à ce qui est en train de se produire. Il leur faut se concentrer et adopter une position solide sur ces inquiétudes fondamentales à l'égard des droits de la personne.
Si nous songeons à la révolution iranienne des années 1970, elle a débuté comme une révolution étudiante. À mesure qu'elle a évolué, le clergé s'en est emparée. Les membres du gouvernement et d'autres soulèvent des inquiétudes maintenant à propos des Frères musulmans. En ce qui a trait aux élections, nous pensions qu'ils n'allaient obtenir qu'un certain nombre de sièges, une quarantaine, si je me souviens bien, mais ils ont présenté 80 candidats. Cela ressemble un peu à ce qui s'est passé en Iran. Je ne sais pas si les mollahs y ont donné leur appui officiellement. C'est un des aspects qui font que nous nous sentions très inquiets.
Je crois qu'il nous faudra surveiller la chose de près. Comme je l'ai déjà dit, je ne crois pas que la réponse soit de limoger ou d'interdire certains partis politiques, etc. De toute évidence, la démocratie c'est la démocratie et les droits de la personne sont les droits de la personne. Ce qui a mal tourné dans de si nombreux pays par le passé, dont certainement l'Iran, et ce qui s'est avéré tellement problématique en Égypte, c'est que les obligations à l'égard des droits de la personne, les cadres de travail des droits de la personne, ont été placés à l'arrière-plan par rapport à d'autres considérations géopolitiques. Cela ne peut pas se produire en Égypte. Pas cette fois-ci.
Malgré le départ de Moubarak, ses acolytes au sein des militaires ont pour ainsi dire conservé le contrôle, ce qui risque de perpétuer la trajectoire déplorable du régime en ce qui a trait aux droits de la personne.
Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
Le président: Vos quatre minutes se sont écoulées.
M. Wayne Marston: C'est bon. Je vais donc m'arrêter là, car nous voulons nous assurer de nous retrouver à temps à la Chambre.
Merci.
Je vous remercie du compte rendu que vous avez fait, ou plutôt de votre aperçu historique des actes violents perpétrés contre les minorités religieuses, plus particulièrement contre les chrétiens coptes, depuis les dernières années.
J'ai étudié vos dix recommandations et je me demande qui va s'occuper d'instituer ces changements. Il est clair que nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les dirigeants militaires provisoires s'en chargent. C'est ce qui nous permet de spéculer pour tenter de savoir qui va former le prochain gouvernement et si cette personne aura la volonté et la détermination nécessaires pour instituer ce genre de changements, qui devront naturellement être propres au peuple égyptien. Ils n'y ont jamais eu droit, ou du moins depuis très longtemps. Croyez-vous que les Frères musulmans, puisqu'on s'attend à ce qu'ils forment un gouvernement, vont apporter ce genre de changements? Croyez-vous qu'ils vont sentir la pression internationale? Pensez-vous qu'ils s'en soucient?
Eh bien, je suis un défenseur des droits de la personne. Je vis comme un éternel optimiste, mais je suis déterminé également. En ce qui a trait à l'Égypte, je crois que ce qu'il nous faut, ne serait-ce qu'en partie, et peu importe si ce sont les Frères musulmans ou tout autre parti qui gouverne ou prenne part au gouvernement du pays, c'est de voir comment, pour la première fois, une pression importante émane de l'intérieur du pays. Et je crois que l'essor de cet incroyable mouvement égyptien pour la démocratie et les droits de la personne a été vraiment épatant et motivant depuis cette dernière année. Cet élan n'est pas prêt de s'éteindre. Tout parti au pouvoir devra composer avec cette pression.
Or en même temps, cette fois-ci — du jamais vu depuis des décennies — il faut que ce mouvement soit jumelé à une pression internationale utile et soutenue, imbue de principes. Pendant des années, voire des décennies, le Hosni Moubarak poursuivait impunément le lamentable patron de violation des droits de la personne au pays: il n'y avait aucune pression, pour ainsi dire pas la moindre critique, et il n'est donc guère surprenant que les choses n'aient pas bougé.
J'estime donc que les deux aspects se conjuguent, tout en reconnaissant le fait qu'il y a eu un changement monumental émanant de l'intérieur du pays, un changement qui n'est pas prêt de partir... Il y a d'autres forces en jeu, bien sûr, mais le mouvement est là et il va faire pression pour obtenir des changements.
J'estime également que nous ne devrions pas nécessairement renoncer à l'idée que l'on ne peut pas et que l'on ne devrait pas s'attendre à ce que les forces armées instituent quelques changements au fil des mois ou de l'année et quelque où elles retiendront un certain pouvoir présidentiel. Par exemple, cette question de l'état d'urgence est devenue un critère incontournable pour la communauté internationale. Elle doit figurer en tête de la liste de ce que tous les gouvernements — y compris le nôtre et celui des États-Unis — exigent de ce gouvernement, ce gouvernement actuel, ce gouvernement provisoire.
Certaines des questions touchant des réformes de plus longue haleine pourraient sans doute être amorcées d'ores et déjà même si elles ne seront pas parachevées par le gouvernement actuel; ce sont des initiatives qui devront se déployer au fil des ans, voire au fil de plusieurs générations.
Pensez-vous qu'il en sera ainsi, cependant? N'oubliez pas que ce gouvernement ne détient pas le mandat nécessaire. Il gouverne dans une situation d'urgence. Les militaires pourront-ils légitimement affirmer qu'ils représentent le peuple égyptien en instituant ces changements progressivement pendant le temps qu'il leur reste au pouvoir?
Les militaires ont absolument le pouvoir de le faire.
M. Russ Hiebert: Ils ont le pouvoir —
M. Alex Neve: Les pouvoirs qui leur sont conférés en vertu de leur décret constitutionnel ont une très grande portée et sont en fait plus vastes que les pouvoirs qui seront détenus par quiconque deviendra le président élu de l'Égypte. Ils ont donc très certainement les pouvoirs nécessaires pour faire tout cela.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous présente les excuses du professeur Cotler, qui n'a pas pu être des nôtres aujourd'hui. Je le remplace. Il sait beaucoup plus que moi au sujet de la question, alors veuillez accepter mes excuses.
J'ai deux questions qui m'ont intrigué au cours de votre présentation. Premièrement, au tout début de vos propos, vous avez fait allusion au monsieur qui doit retourner en prison — aujourd'hui, demain...? Vous l'avez juste brièvement mentionné au début. Pouvez-vous me donner davantage de précisions à ce sujet? Le Canada a-t-il fait tout son possible pour aider cette personne? Pourriez-vous juste nous l'expliquer un peu?
Je sais que cela n'était pas très catholique de ma part, parce que cela ne faisait pas partie du sujet qui nous occupe. Il s'agit de la même région du monde, mais du Bahreïn, et non pas de l'Égypte; si l'affaire est présente dans nos esprits, c'est parce que son recours aura lieu demain. C'est donc la synchronicité de cet événement et le fait qu'il se situe dans la même région, et que cela rejoint certaines des mêmes questions et clameurs en faveur du changement qui se produisent au Moyen-Orient, qui font qu'il s'agisse de la même question, bien évidemment.
Il s'agit d'un citoyen canadien. Il a été arrêté au Bahreïn en mars et accusé d'avoir participé aux manifestations démocratiques qui ont eu lieu dans ce pays. Il a été arrêté pendant un mois, pendant lequel il a été cruellement torturé et il existe des rapports médicaux pour le confirmer. Ensuite, après un procès profondément injuste, il a été condamné à une peine de prison de cinq ans. Il attend son recours, qui doit avoir lieu demain. Il n'y a pas grand lieu d'espérer que ce recours change la situation; mais nous ne devons tout de même pas perdre espoir. Mais demain est manifestement une journée absolument cruciale pour lui là-bas, car si son recours échoue, il y a de bonnes chances pour qu'il retourne tout de suite en prison.
Nous avons souvent soulevé le cas auprès du gouvernement, auprès du ministre d'État Ablonczy, qui se charge des affaires consulaires, bien entendu, et nous apprécions les diverses façons dont le Canada s'est attaché à offrir tout son soutien consulaire à M. al-Raas. Nous sommes toutefois déçus de ne pas avoir pu obtenir une affirmation claire que le gouvernement ait officiellement communiqué avec le gouvernement du Bahreïn pour s'opposer aux chefs d'accusation et exiger la liberté du détenu.
Voilà ce que nous cherchons: ne pas nous contenter d'observer et de surveiller le cas, mais de faire comprendre clairement au gouvernement du Bahreïn qu'il s'agit d'une atteinte aux normes internationales en matière de droits de la personne que d'envoyer quelqu'un en prison simplement parce qu'il a participé à une manifestation pacifique, et que cela doit se terminer.
Lors de votre témoignage, vous avez parlé du nombre de personnes qui ont été tuées pour des motifs d'ordre religieux. Ma question est la suivante, et ce sont les analystes qui l'ont préparée, croyez-vous vraiment que le droit à la liberté religieuse s'imposera à un moment donné dans l'ère post-Moubarak? Est-ce possible? Quels sont les obstacles qui risquent de l'empêcher et que peut faire le Canada pour aider? À quel point est-ce que cela va être vraiment difficile?
Nous n'allons pas prétendre que c'est facile. Est-ce possible? Oui, bien sûr, c'est possible. Tout est possible quand il y a la volonté de le faire. Faut-il que des changements vraiment spectaculaires se produisent? Oui.
J'ai parlé de certains de ces changements. Dans certains cas, il s'agit de questions de réforme législative qui doivent être réglées au plus vite, tant pour ce qui est de supprimer certaines dispositions discriminatoires qui existent dans les lois égyptiennes, que pour ce qui est de renforcer les mesures de protection. Nous devons également voir l'Égypte s'engager de manière résolue à mettre fin à l'impunité face aux violations des droits de la personne. Cela se fait d'autant plus nécessaire dans le domaine des attaques contre les minorités religieuses tels les coptes, mais plus généralement également — le fait que les gens mènent le genre d'attaques que j'ai énumérées dans ma présentation et que vous avez entendues de la bouche d'autres témoins, contre les communautés religieuses, sans jamais payer le moindre prix. Ainsi la règle de droit et le programme de réforme de la justice doivent être des éléments clés également dans la question qui nous occupe.
Mais plus fondamentalement, bien entendu, il faut qu'un changement culturel se produise. C'est une question de longue haleine. C'est important et le Canada devrait absolument chercher des moyens de soutenir ce genre de changements également, et non pas simplement des réformes rapides à entreprendre d'ores et déjà ou à court terme, mais s'occuper du programme à long terme également.
Cela conclut ce cycle de questions. Merci.
Mme Grewal vous posera une dernière question et ensuite nous poursuivrons à huis clos. Madame Grewal, je vous en prie.
Merci, monsieur le président, et merci à vous aussi, monsieur Neve.
Monsieur Neve, croyez-vous que la violence et la discrimination à l'endroit des chrétiens coptes en Égypte se soient intensifiées depuis la chute du régime Moubarak? Pouvez-vous s'il vous plaît élaborer un peu là-dessus?
Oui. Il est toujours difficile de mesurer de manière concluante les violations des droits de la personne. C'est néanmoins ce que l'on nous demande continuellement. Est-ce que les choses vont mieux dans ce pays que l'an dernier? Est-ce que les choses vont de mal en pire ici ou là-bas? En définitive, il est impossible de le déterminer. Nous avons cependant signalé que depuis les dix derniers mois il appert que nous ayons assisté à une détérioration de la situation des chrétiens coptes, ce qui ne veut nullement dire évidemment que la situation était bonne avant la chute de Moubarak.
Nous avons très certainement attiré l'attention sur la recrudescence des attaques et de la violence. Ces attaques se sont multipliées, comme je l'ai mentionné dans mes remarques, au cours de cette période de dix mois, par rapport au nombre d'incidents des décennies précédentes. Cela ne veut nullement dire qu'une situation est meilleure que l'autre. Nous ne souhaitons pas privilégier l'expérience de certaines victimes par rapport à d'autres, mais nous avons vécu une époque très difficile et inquiétante, sans que nous ayons pu percevoir le moindrement un début du changement qui se fait nécessaire pour améliorer la situation. Autrement dit, nous ne voyons pas que les forces de sécurité aient commencé à faire preuve d'une plus grande volonté à intervenir et à fournir une protection. Nous ne voyons pas encore certaines des réformes législatives si attendues. Nous ne sommes pas en train de voir un changement ni de veiller à ce que les chrétiens coptes puissent occuper davantage de postes importants au sein du gouvernement pour mettre fin aux exclusions et à la discrimination à ce chapitre également.
Nous avons donc vécu une époque extrêmement inquiétante.
Que peut faire le Canada pour encourager et exhorter l'Égypte à respecter et à protéger les droits de sa minorité copte?
Je crois que certaines des suggestions que j'ai soulevées en ce qui a trait aux sortes de réformes législatives qu'il s'agit d'adopter devraient être au premier plan des rapports canado-égyptiens. J'estime qu'il existe des cas particuliers très concrets et des situations individuelles qu'il faut soulever — par exemple, exiger une enquête indépendante des actes violents de la Place Maspero au mois d'octobre, et la libération du blogueur, un activiste qui a été arrêté pour la simple raison d'avoir déploré ces incidents.
Mais plus généralement, je crois que ce qui est extrêmement important c'est que le Canada adopte un programme vraiment solide en ce qui a trait aux droits de la personne, dans la ligne de ce que nous avons proposé au gouvernement égyptien, et d'en faire la pièce de résistance de nos relations avec le gouvernement égyptien tout en travaillant avec d'autres pays pour nous assurer vraiment que cela deviendra le mantra de la communauté internationale dans les années à venir.
Quel est le rôle des forces de sécurité égyptiennes en ce qui a trait à la discrimination et à la violence perpétrées contre la communauté copte? En quoi consiste son rôle?
Il me semble qu'il y a eu des occasions où l'on a soulevé des inquiétudes à propos du rôle direct que certains officiers auraient joué dans certains actes violents. Dans ce contexte, nous l'avons dit, les agents de sécurité auraient été responsables de la violence à la Place Maspero. J'ai souligné qu'ils sont supputés avoir dirigé leurs véhicules blindés à toute vitesse contre la foule de protestataires coptes. Ça c'est un niveau de la situation.
Or, je crois que la préoccupation plus vaste et plus permanente réside dans le fait que les forces de sécurité de l'Égypte n'ont tout simplement pas fait assez et dans certains cas, ils n'ont pour ainsi dire absolument rien fait pour fournir une protection aux communautés coptes victimes d'actes violents. Ils ont abandonné cette communauté à la violence sectaire alors qu'en fait ils avaient la responsabilité et l'obligation juridique d'intervenir pour veiller à sa protection.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur Neve. J'apprécie, comme toujours, et comme nous tous, votre présence et votre clarté de vision, et dans le cas qui nous occupe, je vous sais gré également des données contextuelles très utiles que vous nous avez fournies lors de votre témoignage aussi bien que dans votre mémoire. Nous vous en sommes très reconnaissants. Merci de votre présence ici.
Nous devons passer à huis clos, chers collègues, et il nous faut agir rapidement. Je crois d'ailleurs que nous allons commencer notre séance à huis clos directement.
Il ne s'agit pas d'une question de haute sécurité, alors même si M. Neve n'a pas encore quitté la salle, ce ne sera pas la fin du monde pas si nous passons au mode huis clos. Alors procédons.
[Les travaux se poursuivent à huis clos]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication