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On vous a remis un exemplaire imprimé de notre mémoire. C'est un document plein de couleurs et en format PowerPoint, mais il est très facile à lire. Nous allons parler de ce qui se trouve dans ce document pendant notre bref exposé au début, puis, bien entendu, pendant la période de questions.
Je ne vais évidemment pas lire toutes les diapositives, mais je me propose plutôt d'aborder quelques-uns des points importants et de me concentrer sur ce qu'il y a de neuf au sujet du programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, sur les principaux facteurs qui déterminent le succès du programme et sur les défis importants auxquels l'organisation fait face.
Je suis convaincu que la plupart d'entre vous connaissez déjà le terme « blessure liée au stress opérationnel ». Au risque de m'écarter de mon sujet pendant un instant, je précise que ce terme a été inventé au Canada, par l'équipe du SSVSO, et on l'a adopté à l'échelle internationale, ce dont nous allons parler lorsque nous aborderons les activités internationales.
Comme vous le savez, il s'agit non pas d'un terme de diagnostic, mais plutôt d'un terme forgé par l'organisation de SSVSO pour mettre l'accent sur la blessure et contrer l'effet de stigmatisation qui y est lié. Il est maintenant couramment utilisé par les cliniciens et les non-cliniciens comme désignant toute blessure psychique — et, comme je l'ai mentionné, à l'échelle nationale et internationale. Je suis convaincu que, si la question est posée pendant la période de questions, les deux officiers qui seront ici avec moi peuvent témoigner de leur participation à des forums internationaux de l'OTAN, en Europe, et, bien sûr, très souvent, aux États-Unis, où elles ont travaillé avec leurs collègues qui ont servi en Irak.
Le document de l'exposé présente des renseignements généraux sur le comité consultatif pour le SSVSO. Le groupe a été créé en 2002, et il rassemble les gens intéressés d'Anciens combattants Canada, de la Défense, des organisations d'anciens combattants, de la GRC et du bureau de l'Ombudsman du MDN, ainsi que différents professionnels de la santé mentale trois fois l'an pour fournir des conseils au SSVSO et une rétroaction à la haute direction des deux ministères qui supervisent les activités de SSVSO.
Vous pourrez prendre connaissance du mandat du comité consultatif en lisant le document, mais, très brièvement, ce mandat consiste à fournir des conseils et une orientation à l'équipe de direction du SSVSO en vue d'améliorer l'exécution du programme, à contribuer au repérage des lacunes ou des manques systémiques du programme de soutien par les pairs, à aider l'équipe de direction du SSVSO à coordonner le programme, à offrir certains volets du réseau de soutien par les pairs en ce qui concerne les organismes et les ministères et à prendre part activement, là où c'est possible et quand c'est possible, au travail de sensibilisation au programme de SSVSO. À titre de président du comité, je le rappelle à tous les membres du comité, tout en reconnaissant que nous n'avons aucun pouvoir exécutif, mais nous les encourageons, comme ils le disent, à répandre la bonne nouvelle en ce qui concerne le succès extraordinaire du programme de soutien par les pairs. Le comité compte 24 membres, et il y a une liste de ces membres dans l'un des documents que l'on vous a remis.
Le SSVSO lui-même — vous allez remarquer que je passe de « comité » à « SSVSO » — existe au sein du MDN depuis le printemps 2001 et il est le fruit des suggestions du CPDNAC, de la Commission d'enquête sur la Croatie et du bureau de l'Ombudsman du MDN. Peu après, on a reconnu le fait que la responsabilité du bien-être des membres des Forces canadiennes et des anciens combattants est une responsabilité conjointe, et on a conclu un partenariat avec Anciens combattants Canada.
Il est clair que c'est la vision et la motivation d'un officier, le Lieutenant-colonel Stéphane Grenier, qui sont à l'origine du SSVSO. Il n'est pas ici parce qu'il a terminé son service. Il souffre du SSPT.
Il a servi au Rwanda avec le général Dallaire pendant dix mois. Il est rentré à la maison, a reconnu qu'il avait un problème, il a appris à vivre avec ce problème. En fait, il a été déployé au Cambodge, en Haïti, au Liban, et ainsi de suite, et il a continué de lutter contre ce problème. Il va sans dire que, à un moment donné, il a bien discuté avec des supérieurs sympathiques à sa cause, en particulier le général Dallaire, qui était en poste à l'époque, et qui a été suivi par le général Couture — puisse son âme reposer en paix — qui est devenu un champion du programme de SSVSO. En passant, même s'il souffre encore du SSPT, le colonel Stéphane Grenier sert en Afghanistan à titre d'officier des affaires publiques. Il dit qu'il était temps pour lui de faire face à lui-même, et il faut dire que c'est exactement ce qu'il a fait. La gouverneure générale lui a remis la Croix du service méritoire pour la motivation et l'initiative dont il a fait preuve en mettant sur pied le programme.
Il est passé à autre chose, mais il est remplacé avec compétence par le Major Mariane Le Beau, qui, comme je l'ai mentionné, est un officier qui travaille extrêmement fort et qui est tout à fait dévouée, puisqu'elle a passé de nombreuses années — et qu'elle a servi en Afghanistan. La cogestionnaire, bien entendu, a soutenu Stéphane Grenier dès le départ. Kathy Darte est une des fondatrices, comme nous l'appelons, et elle travaille en collaboration très étroite avec sa collègue du MDN.
La mission du SSVSO est double : il s'agit d'élaborer des programmes de soutien social à l'intention des membres des Forces, des Anciens combattants et de leur famille affectée par le stress opérationnel et d'offrir l'enseignement et la formation qui permettront éventuellement de modifier la culture des FC au chapitre des blessures psychiques. Je veux mettre l'accent sur le mot « famille », parce que la famille a toujours été une chose importante pour ceux qui portent l'uniforme. Comme j'ai servi à l'occasion de 14 missions différentes et que j'ai dû laisser ma famille derrière moi, la plupart du temps, je suis tout à fait d'accord avec l'accent qu'on met sur les familles avec l'adoption récente de la nouvelle charte des anciens combattants.
La clé de l'efficacité du soutien par les pairs, qui est au coeur du programme de SSVSO, c'est le choix des bonnes personnes au départ, les coordonnateurs du soutien par les pairs, et, récemment — mais les choses commencent à bouger, à juste titre — leurs pairs, les coordonnateurs du soutien par les pairs-familles. Je vais garder les chiffres pour la période de questions, et ce sont mes collègues qui répondront aux questions.
En plus du cours de formation de base de deux semaines que les coordonnateurs du soutien par les pairs et les coordonnateurs du soutien par les pairs-familles suivent toujours, le programme de SSVSO comporte aussi, à leur intention, un volet d'enseignement qui a des répercussions profondes, parce qu'on reconnaît leur besoin de prendre soin d'eux-mêmes, ce dont je vais laisser mes collègues parler pendant la période de questions.
Au bout du compte, l'important est que les membres des Forces, les anciens combattants et les familles qui viennent discuter avec un coordonnateur du soutien par les pairs établissent des liens de confiance, peu importe d'où ils viennent et qui les a aiguillés — techniquement, c'est le MDN ou AAC. Ces gens se rencontrent dans un bureau, ou encore, s'ils n'en ont pas envie, ils peuvent se rencontrer dans un Tim Horton, pour discuter à fond des problèmes et pour que le coordonnateur puisse effectuer une évaluation informelle et les aiguiller en fonction de celle-ci, en créant des liens de confiance avec les membres des Forces et les anciens combattants qui s'adressent à lui, en leur permettant de faire avancer les choses à leur rythme et en leur offrant une épaule sur laquelle s'appuyer. Si vous le souhaitez, nous pouvons vous faire part d'expériences personnelles pendant la période de questions.
Il est essentiel que les personnes qui travaillent au soutien par les pairs comprennent le rôle qu'ils jouent, comprennent quand ils doivent cesser d'intervenir et soient prêts à recommander leurs pairs à un professionnel, un clinicien. Le danger, pour les coordonnateurs du soutien par les pairs, c'est l'épuisement professionnel, le stress lié à la compassion, le traumatisme, la dépression et la maladie physique. Ce qui est absolument extraordinaire et qui témoigne à la fois des qualités des participants et de l'intensité des soins dispensés par les deux ministères dans le cadre du programme en question, c'est qu'on a connu que très peu de ces problèmes depuis les cinq ans que le programme existe.
Il y a plusieurs nouvelles initiatives dans le cadre du SSVSO dont il serait intéressant de parler, et nous vous invitons à y revenir pendant la période de questions. La nouvelle initiative de soutien par les pairs en cas de deuil offrira un soutien à la famille immédiate des gens qui ont perdu un être cher pendant son service militaire, et, encore une fois, ce seront les gens qui ont vécu un événement semblable qui offriront le soutien. Je tiens à vous faire remarquer que je mets l'accent sur le mot « pair ».
Le succès du programme intéresse beaucoup de gens dans le monde, et, comme je l'ai mentionné, les deux cogestionnaires peuvent parler de ces démarches en détail.
L'opération de « décompression » dans un tiers lieu qui se déroule à Chypre offre aux membres des Forces qui reviennent de mission en Afghanistan l'occasion de passer quelques jours en transition entre le théâtre des opérations et leur salon, tout cela dans le cadre d'un programme de redéploiement auquel on a apporté des améliorations importantes. Comme j'en ai fait l'expérience moi-même, je peux vous assurer que ce programme fonctionne bien. Nous avons poussé plusieurs personnes qui relevaient de mon commandement et qui avaient été sur les lieux de massacres et ainsi de suite. Nous ne renvoyons pas le capitaine X auprès de sa femme 24 heures plus tard. Il faut qu'il passe par la décompression, ce qui signifie passer trois ou quatre jours ailleurs et peut-être avoir la possibilité de discuter à fond des problèmes, d'obtenir du soutien de la part de ses pairs, qui peuvent lui offrir une épaule sur laquelle s'appuyer, comme je l'ai déjà mentionné.
Nous avons appris qu'il y a plusieurs facteurs déterminants importants pour le succès d'un programme du genre de celui dont il est question ici. Le premier facteur, qui doit être le plus important, c'est la nécessité de faire participer les pairs dès le début de l'élaboration du programme et des politiques. Un excellent partenariat interministériel est aussi essentiel au succès, tout comme le recours à une équipe de gestion multidisciplinaire. Une autre chose importante a été de mettre l'accent sur le fait, pour les coordonnateurs, de prendre soin d'eux-mêmes et l'établissement de limites réalistes.
Comme je l'ai mentionné au début, le recrutement et le choix des bonnes personnes est une chose essentielle, et c'est peut-être le domaine dans lequel le programme a été excellent, à mon avis. Pour aider ce noyau d'employés chargés de soutenir les pairs à se reposer, il est nécessaire de recruter, de former et de maintenir en poste un réseau de bénévoles.
Tout cela est une répercussion d'une collaboration interministérielle qui a commencé il y a dix ans, au moment où les deux ministères étaient chacun à un bout de la table. J'imagine qu'ils se parlaient, mais, depuis la nouvelle charte des Anciens combattants, ou à partir de la création du Conseil consultatif sur les Forces et de ce qui en a découlé — je m'éloigne un peu du sujet — un certain nombre de personnes qui se trouvent dans cette salle ont participé personnellement au processus. Cela faisait vraiment chaud au coeur de voir les deux ministères collaborer. En d'autres termes, comme l'a recommandé le conseil, c'est une démarche homogène. C'est là où nous en sommes rendus aujourd'hui, et ces deux officiers sont ici pour en témoigner.
En ce qui concerne les défis à relever, ils sont certainement nombreux. Il y a encore, par exemple, un certain nombre d'obstacles systémiques. Certains cliniciens se méfient encore lorsque des personnes qui ne sont pas des professionnels de la santé mentale viennent jouer dans leur plate-bande. Je ne sais pas si je suis autorisé à dire ce que je vais dire, mais, à la lecture des transcriptions des témoignages de certaines personnes que vous avez reçues, je pense qu'on peut constater que les professionnels ont encore des réticences à l'égard du soutien par les pairs. Cependant, d'autres gens qui ont pu apprécier d'eux-mêmes la valeur du travail des coordonnateurs du soutien par les pairs chantent leurs louanges au sein des deux ministères.
En soi, la simple taille du territoire dont s'occupent de très petits groupes de coordonnateurs du soutien par les pairs et de coordonnateurs du soutien par les pairs-familles est une chose extraordinaire, lorsqu'on sait qu'il n'y a, à l'heure actuelle, que cinq cliniques d'Anciens Combattants Canada traitant les TSO et un certain nombre de CSTSO du MDN. Se rendre à l'endroit où se trouve l'un de nos coordonnateurs du soutien par les pairs peut poser un réel défi, surtout pour les réservistes qui vivent loin d'une base importante.
Faire grossir le réseau de bénévoles dont j'ai parlé est un autre défi quotidien pour nos CSP — et je pourrais ajouter que cela relève en partie d'eux. Une fois réalisé l'investissement nécessaire pour trouver et former des bénévoles, le défi devient de les maintenir en poste. Les groupes de soutien par les pairs qui sont une partie si importante du programme exigent aussi beaucoup d'efforts et des ressources importantes, parce que de nombreux pairs sont réticents à participer à des rencontres dans les bases. Comme je l'ai déjà mentionné, même trouver un endroit pour se rencontrer peut poser problème. C'est pourquoi j'ai dit que les gens se rencontrent parfois chez McDonald ou chez Tim Horton.
Je vais revenir là-dessus, parce qu'il y a beaucoup de soldats qui ne sont pas prêts à admettre qu'ils ont un problème. Ils ne veulent pas qu'on les voie entrer dans un « établissement de santé mentale » ou un établissement du genre dans une base militaire. On va les étiqueter, et, à leurs yeux, ce n'est pas une bonne chose ou ce n'est pas viril — si on veut utiliser ce mot — puisqu'ils doivent se redresser et se débarrasser du problème. On leur offre donc différentes possibilités.
Le dernier défi de la liste n'est certainement pas le moindre. Il ne fait aucun doute que la culture des Forces canadiennes, en ce qui a trait aux questions de santé mentale, a évolué de façon importante au cours des six dernières années environ. Cependant, il y a encore beaucoup de choses à faire, et, à mon avis, les vieilles habitudes ne vont jamais disparaître complètement. Nous devons continuellement nous battre contre le stigmate rattaché aux blessures liées au stress opérationnel, y compris le SSPT et d'autres problèmes.
L'enseignement et la formation sont des éléments clés des changements culturels, et, comme c'est souvent le cas, les besoins à court terme ont priorité sur des investissements à long terme. Même pour conserver les acquis des quelques dernières années, il faut déployer des efforts importants, et cela va continuer d'être un défi constant.
Mesdames et messieurs, juste avant de terminer, je voudrais dire que ce programme qui fonctionne très bien est financé par les deux ministères, bien entendu, et 75 p. 100 des gens qui reçoivent des services sont d'anciens combattants, 25 p. 100, des membres des Forces, plus ou moins quelques points de pourcentage, et les deux officiers qui sont ici vont me corriger si je me trompe. De toute façon, cela ne fait pas grande différence, parce que, monsieur le président, on peut comprendre que ces pourcentages sont ce qu'ils sont en raison du fait que le programme est unique parce que de nombreux anciens combattants, qu'ils aient pris part à une mission en Corée, à Beyrouth, en Yougoslavie ou en ex-Yougoslavie, s'adressent à nous et nous disent : « J'ai un problème »; « J'ai participé à un bombardement effectué à partir d'Aviona et j'ai un problème »; « J'ai participé à l'opération de nettoyage lors de la tragédie de Swiss Air, et j'ai un problème »; « J'étais à bord de l'avion qui s'est écrasé en atterrissant à Alert, et j'ai un problème »; « Je suis un technicien en recherche et sauvetage, et j'ai un problème ». Ces gens arrivent soudainement, et ils sont, dans certains cas, à la retraite. Alors, à mon avis, le programme est vraiment une réussite extraordinaire.
Merci de votre attention. J'aimerais maintenant vous inviter à poser des questions. Si vous voulez bien me les poser, je vais demander à l'officier le mieux placé pour y répondre de le faire, monsieur.
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C'est un bon point. Je dirais qu'il faut remonter 40 ans en arrière. Je me rappelle l'époque où nous étions stationnés en Allemagne — une jeune famille — de 1960 à 1963, avec un bataillon. C'est au moment de la construction du Mur de Berlin et de la crise cubaine, et ainsi de suite. Lorsque les soldats étaient déployés, ils se préoccupaient toujours de ce qui allait advenir de leur famille. Eh bien, il fallait trouver une manière de se rendre jusqu'à la base, avant d'être renvoyé au Canada. C'était ce qui tenait lieu de soutien familial. Dieu merci, il y avait le système régimentaire, qui s'appliquait.
Depuis, cependant — je fais un bond en avant dans le temps —, comme je ne cesse de le rappeler, le conseil consultatif d'Anciens combattants Canada et des Forces canadiennes s'est vu confier la tâche de formuler des recommandations au sujet d'une charte : il fallait soit modifier l'ancienne charte soit en rédiger une nouvelle. Pendant les délibérations, M. Pierre Allard, qui est ici aujourd'hui, de la Légion royale canadienne, était membre de ce conseil, comme moi, et on a demandé à un certain nombre d'entre nous de se rendre dans les différentes bases pour avoir des discussions informelles avec les soldats, de 30 à 40 personnes, dont les rangs allaient de simples soldats à capitaines, deux ou trois anciens adjudants, sans qu'on relève les noms, pour organiser une table ronde et discuter, avec le consentement du commandant de la base, celui du QGDN, et ainsi de suite. Nous étions censés faire cela trois fois — une fois pour l'armée, une fois pour la marine et une fois pour la force aérienne — mais nous avons fini par le faire 18 fois.
En même temps que nous, il y avait là-bas deux membres féminins de notre conseil qui étaient là pour parler aux familles, parfois au centre de ressources pour les familles des militaires, et parfois les gens ne voulaient pas se rencontrer là-bas, et ils se rencontraient ailleurs, en comités réduits. Les soldats avec qui nous avons discuté, et pas seulement eux, ont exprimé haut et fort qu'ils étaient vraiment surchargés et stressés au plus haut point. Ils étaient stressés, et les gens qui étaient laissés derrière eux l'étaient aussi. Si, sur une section de quatre soldats, trois étaient partis, et qu'une personne devait tout faire, quel effet cela avait-il sur la famille? Notre équipe chargée du soutien à la famille l'a exprimé haut et fort lorsque nous avons présenté un exposé au sous-ministre et à d'autres intervenants, et, au bout du compte, au ministre, et on a accepté que, parmi toutes les choses que nous envisagions à l'époque, la famille figure en haut de la liste. Croyez-le ou non, la famille allait être au premier plan, avant même les anciens combattants.
Le ministre et son ministère ont accepté et adopté le rapport en question en rédigeant la nouvelle charte des anciens combattants, et ainsi de suite. C'est donc comme ça que les choses ont commencé. Depuis, évidemment, comme vous l'avez entendu dire, le programme a évolué au cours des cinq dernières années. Stéphane Grenier l'a écrit au début, assis à sa table de cuisine de cuisine : Comment vais-je influencer le système afin d'aider mes pairs? En passant, ma femme aussi a un problème, parce que je suis devenu renfermé. Je suis devenu renfermé, elle est devenue renfermée, et cela a un effet sur la famille.
Ce n'est pas une chose propre à M. Grenier, c'est une chose qui caractérise un certain nombre d'entre nous qui sommes passés par là : où pouvons-nous obtenir de l'aide? La famille fait donc partie du processus, mais il faut être capable de marcher avant de pouvoir courir. L'idée était la suivante : avec l'aide des deux champions du programme de SSVSO à l'époque, le Général Couture et le SMA Brian Ferguson du ministère des Anciens combattants, allons de l'avant, faisons en sorte que les pairs puissent courir, et nous allons régler les problèmes liés à la famille.
Cela donne peut-être l'impression qu'on a dit eh bien, d'accord, amenez la famille. On a amené la famille, et, maintenant, on rassemble les soldats et leur famille, et on s'occupe de tout le monde. J'empiète sur le domaine des deux cogestionnaires, mais de mon point de vue, on s'occupe à la fois des soldats et de leur famille. Bien sûr, il y a beaucoup de travail à faire.
Kathy ou Mariane, voulez-vous ajouter quelque chose?
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Pour répondre à votre question au sujet des réservistes, je tiens à souligner, comme je l'ai dit plus tôt, que tout le monde est le bienvenu au programme du SSVSO. Qu'ils soient en uniforme ou non, nous les servons tous.
Il y a un certain nombre de réservistes qui se sont présentés et se sont prévalus des services du programme de SSVSO. Un des travailleurs dûment formés en soutien par les pairs dans le cas du programme est lui-même membre de la réserve. Il s'appelle Vince Tytler, et il travaille à Vancouver.
Pour une bonne part, le rôle du coordonnateur consiste à se faire connaître dans sa région géographique, et cela consiste en partie en un réseautage. En partie, il s'agit de sortir et de prendre la parole devant les unités de la réserve, de dire aux gens ce qu'est le programme de SSVSO et les services qui sont offerts, et répandre la bonne nouvelle pour ainsi dire.
En partie, notre programme sert non seulement à fournir une aide individuelle aux gens, mais aussi à réunir les Anciens Combattants et les membres des forces dans un contexte de groupe. À ces réunions de groupe, il y a des membres de la réserve. Ils viennent et rencontrent des pairs, d'autres grands amis, d'autres membres de la réserve, d'autres membres des forces régulières et d'autres Anciens Combattants. C'est du bouche à oreille.
C'est un défi : vous avez tout à fait raison, ils s'en retournent chez eux. Il nous faut donc simplement nous appliquer toujours à faire un travail de sensibilisation et d'éducation, et à faire en sorte que le programme soit connu.
Pour ce qui est de la scène internationale et des meilleures pratiques, c'est une très bonne question. Nous — les gestionnaires, le Lieutenant-colonel Grenier, le Major Le Beau et moi-même —, nous avons présenté notre programme sur la scène internationale, à plusieurs occasions. Nous savons que nous avons un programme qui est tout à fait unique.
Il n'y a nulle part ailleurs dans le monde un programme qui ressemble au nôtre, pour ce qui est de la manière dont nous l'avons mis sur pied. D'autres pays se tournent vers nous. Ils veulent entendre parler du programme; nous l'avons donc présenté en Australie, aux États-Unis, en Europe. Nous sommes invités à retourner en Europe cette année. Nous avons présenté le programme à l'OTAN.
Dans le monde, il existe plusieurs programmes que les administrations militaires et les responsables des Anciens Combattants ont mis sur pied, mais ces programmes sont légèrement différents du nôtre. Je crois que notre succès tient en partie — et ce sont les autres pays qui l'ont relevé — au fait que Anciens Combattants et la Défense nationale travaillent ensemble au programme. Il n'y a pas de programme distinct pour Anciens Combattants dans un ministère des Anciens Combattants et un autre programme à la Défense. Il y a un programme pour tous, que vous portiez encore l'uniforme ou non, et pour les familles.
De même, nos collègues à l'étranger nous parlent des paramètres du programme et de l'importance que nous y attachons. Les personnes qui y travaillent sont très bien formées. Nous ne nous contentons pas de les engager pour simplement les envoyer travailler. Ce sont les mêmes critères de sélection qui s'appliquent à tous, c'est-à-dire qu'il faut que ce soit un ancien combattant — la personne doit avoir servi dans les Forces — et elle doit avoir été blessée.
Puis, nous formons la personne. Nous offrons une formation approfondie, qui se déroule à l'hôpital Sainte-Anne. Le personnel des Anciens Combattants chargé des questions de santé mentale à l'hôpital Sainte-Anne, aux côtés d'autres personnes de la Défense nationale et du ministère des Anciens Combattants, offre la formation. C'est une formation presque sans interruption. Ça ne s'arrête pas. Nous renforçons la formation continuellement.
L'autre élément auquel nous attachons de l'importance dans notre programme, c'est la question des limites — il faut que vous vous limitiez au rôle qui vous est donné — et à l'auto-administration des soins, car pour travailler avec les autres, il faut savoir se soigner soi-même.
Je crois que les autres pays remarquent donc qu'il s'agit d'un programme très officiel. C'est officiel du fait de la manière dont nous l'avons mis sur pied et de la manière dont nous continuons à surveiller les gens. Nous avons besoin de les surveiller toujours. Le Dr Richardson —qui est le conseiller médical des Anciens Combattants rattaché au programme et qui, malheureusement, ne pouvait comparaître aujourd'hui parce qu'il est en vacances — et moi-même suivons ces gens au moyen d'une recherche à long terme, en étudiant leur santé et leur bien-être. Nous mesurons leur santé au moment où ils commencent à faire ce travail pour nous, puis nous mesurons continuellement leur santé au fil de leur emploi chez nous.
Essentiellement, ce que nous constatons, c'est qu'il n'y a pas de diminution du niveau de santé des personnes en question. De fait, elles se portent mieux, et c'est parce qu'elles sont maintenant en mesure de se remettre à travailler, de contribuer à la société et d'aider d'autres personnes qui se trouvent dans la même situation qu'elles.
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Merci. C'est une excellente question.
D'abord et avant tout, je vous remercie de ces remarques bienveillantes. Elles sont appréciées.
J'aborderai votre question dans une minute, mais, d'abord, je reviendrais à la question de l'expérience que vous avez évoquée en ce qui concerne les cliniciens, les psychologues et ainsi de suite... comme vous le savez peut-être, les premiers ont été envoyés sur le terrain pendant deux ou trois semaines, au début, en Bosnie, période trop courte. Y étant allé, j'ai vu que les soldats les regardaient d'un oeil noir — un truc du genre « J'arrive du QGDN et je suis là pour vous aider ». Les soldats aimeraient bien mieux s'entretenir avec leurs pairs.
Cela dit, d'après ce que j'en sais — et j'exprime un avis personnel —, le système de santé des Forces canadiennes cherche à envoyer du personnel clinique sur le terrain même en Afghanistan, comme vous l'avez entendu dire. Il y a une personne sur place. Le psychiatre en chef revient à peine d'une tournée de quatre mois, et il y en a deux qui l'ont remplacé. Il y a une personne à Halifax qui, à un moment donné, était médecin d'unité au Rwanda et médecin d'unité sur le plateau de Golan, qui a une formation de spécialiste et qui est allé non pas une fois, mais deux fois en Afghanistan à titre de psychiatre. C'est le genre de gars qui met de côté son rang et qui parle avec les soldats; il fait cela très, très bien. Il y a donc une certaine expérience qui s'accumule parmi le personnel clinique, sans compter les soldats expérimentés sur le terrain qui se parlent entre eux. Mais merci d'avoir soulevé la question.
Au ministère des Anciens Combattants — et je dis ceci à titre particulier plutôt qu'en tant qu'employé d'un ministère ou de l'autre, ce que je ne suis pas —, il y a eu une évolution marquée des choses, pourrait-on presque dire, par rapport à il y a dix ans en ce qui concerne une certaine bienveillance. Il y a dix ans, c'était presque un affrontement de principe quand quelqu'un s'adressait à AAC pour obtenir une forme quelconque de rente, de traitement et ainsi de suite. Il y a eu une évolution radicale des choses parce que le bénéfice du doute est maintenant accordé à la personne — et, évidemment, il y a certaines formalités bureaucratiques qu'il faut respecter.
La culture n'est plus la même, à mon avis, et cela a commencé par d'importantes modifications faites à AAC il y a six à huit ans, époque à laquelle on a décidé d'axer les choses sur la personne plutôt que sur le système, en accordant le bénéfice du doute à la personne. Je suis donc tout à fait certain que ce genre d'activité continuera. Avec l'exemple des deux cercles qui se recoupent, comme M. Stoffer l'a fait voir, ou l'approche harmonieuse dont j'ai parlé moi-même, il y a moins de risques que les gens passent entre les mailles du filet qu'il y a quelques années. Y en aura-t-il encore qui passeront entre les mailles du filet? Bien entendu. Aucun système n'est parfait. Au moins, nous avons fait des progrès considérables.
Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, madame Hinton, mais merci de l'avoir posée.