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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 036 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 avril 2007

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Nous avons ce matin une autre réunion du comité des anciens combattants.
    M. Gaudet est de retour et je voudrais lui souhaiter la bienvenue. Il était absent; sauf erreur l'autre comité dont il faisait partie a finalement déposé son rapport à la Chambre. Nous sommes très heureux de revoir son visage familier et souriant parmi nous.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins du ministère de la Défense nationale. Nous recevons ce matin Mme Margaret Ramsay, le major Chantal Descôteaux et le Dr Marc-André Dufour.
    Vous disposez de 20 minutes à vous trois, et vous pouvez faire usage de ce temps comme bon vous semble. Après vos exposés, les membres du comité auront l'occasion de vous poser des questions et de savoir ce que vous pensez. À la fin de la réunion, nous devrons également étudier une motion de Mme Hinton.
    Je cède la parole à nos témoins. Veuillez faire votre exposé.
    Monsieur le président, membres du Comité permanent des anciens combattants, je m'appelle Margaret Ramsay. Je suis officier supérieur d'état major intérimaire des services de santé mentale à la Direction des services de santé généraux. Ainsi, je suis responsable des questions administratives liées aux services de santé mentale offerts aux membres des Forces canadiennes.
    M'accompagnent le major Chantal Descôteaux et le Dr Marc-André Dufour. Chantal est médecin chef à la base des Forces canadiennes de Valcartier et elle est responsable de tous les services médicaux dispensés à la base, y compris les services de santé mentale. Le Dr Dufour est psychologue clinicien et il est le chef des services professionnels en matière de psychologie, dans le cadre des services de santé mentale de Valcartier.
    Nous sommes heureux d'avoir la chance de vous rencontrer aujourd'hui. J'aimerais vous parler des services de santé mentale des Forces canadiennes. Mon exposé vise à vous résumer les méthodes au moyen desquelles les services de santé mentale sont dispensés au sein des Forces canadiennes. Vous savez peut-être déjà que nous sommes au milieu d'un projet de cinq ans qui vise l'amélioration marquée de ces services. Ce projet s'appelle Rx2000. Au cours de ces cinq années, le nombre de dispensateurs de soins de santé mentale aux membres des Forces canadiennes, notamment, va passer de 229 à 447.
    Les soins de santé mentale sont fournis de manière interdisciplinaire dans les Forces canadiennes. Les disciplines impliquées dans la prestation des soins comprennent les médecins de famille, les psychiatres, les adjoints aux médecins, les infirmières praticiennes, les travailleurs sociaux, les infirmières de santé mentale, les psychologues, les conseillers pastoraux et les spécialistes en toxicomanie.
    Je veux vous situer un peu le contexte. En 2001, les Forces canadiennes ont créé l'appellation « traumatismes liés au stress opérationnel » (TSO), qui regroupe plusieurs problèmes de santé mentale souvent provoqués par le stress et les traumas. Le traumatisme lié au stress opérationnel n'est pas un terme médical. L'appellation est officiellement définie comme étant toute difficulté psychologique persistante résultant de devoirs opérationnels effectués par un membre des FC. Le terme TSO est utilisé pour décrire un grand nombre de problèmes, y compris le Syndrome de stress post-traumatique (SSPT), qui conduit généralement à une altération fonctionnelle.
    En 2002, le service de santé des FC a chargé Statistiques Canada de mener une enquête sur la santé mentale des membres des FC, afin de déterminer la fréquence du SSPT et d'autres troubles mentaux. Selon cette étude, 2,8 p. 100 des membres de la force régulière et 1,2 p. 100 des réservistes ont fait état de symptômes correspondant à un diagnostic de SSPT à un moment donné de l'année précédente.
    Pendant leur vie, 7,2 p. 100 des membres de la force régulière et 4,7 p. 100 des réservistes auront répondu au critère diagnostic. Selon les résultats de l'enquête, la dépression et le trouble panique étaient répandus de manière plus importante dans les FC que parmi la population civile. L'enquête a aussi révélé que la durée de la prévalence du SSPT au sein de la force régulière est équivalente à celle de la population du Canada.
    Les niveaux de service au sein des FC — Les soins de santé mentale sont prodigués à deux niveaux de service. La différence repose sur le niveau de spécialisation du service, dont la prestation est qualifiée soit de soins primaires, soit de soins secondaires. Les soins de santé mentale primaires sont désignés « soins psychosociaux ». Les services psychosociaux constituent le niveau de base des services cliniques en santé mentale. Ils sont utilisés comme une ressource commune de l'unité de prestation des soins de santé, ou UPSS, du patient. Outre un service d'intervention en cas de crise, ils fournissent divers services de gestion des services sociaux et administratifs.
    Les services psychosociaux sont considérés comme des interventions brèves. Les niveaux supérieurs de spécialisation (secondaire) sont désignés « services de santé mentale ». Les membres des Forces canadiennes ont accès à ces services grâce à des références des services cliniques primaires. Ces services secondaires sont structurés comme un ensemble de programmes dont le degré de spécialisation varie.
    Les programmes les plus communs sont le programme des centres de soutien pour trauma et stress opérationnels, le programme général de santé mentale et le programme des traitements des toxicomanies.
    L'emploi de la revue de cas interdisciplinaire est un autre principe de base de la prestation des soins de santé mentale. Les soins fournis tant dans les cliniques de soins de santé des Forces canadiennes que par les dispensateurs externes sont revus régulièrement. De cette manière, les membres des Forces canadiennes peuvent être assurés de la haute qualité des soins qu'ils reçoivent en conformité avec les meilleures pratiques fondées sur la preuve.
    Passons maintenant aux lieux de service. Pour s'occuper des besoins médicaux des membres des FC, les services cliniques de santé mentale sont disponibles dans toutes les cliniques médicales à travers le Canada. Les FC ont également cinq grandes cliniques qui offrent une gamme complète de services de santé mentale, y compris les centres de soutien pour trauma et stress opérationnels. Ces centres sont situés à Halifax, Ottawa, Valcartier, Edmonton et Esquimalt. Du point de vue géographique, ils sont dispersés partout au pays pour fournir des services dans chaque région.
    Les membres des Forces canadiennes et leurs familles peuvent également communiquer avec le Programme d'aide aux membres des Forces canadiennes (PAMFC), 24 heures sur 24, et s'adresser au service de référence confidentiel. Il s'agit d'un numéro sans frais. Ce programme fournit un counselling externe, à court terme, pour les membres et leurs familles qui se sentent, au départ, plus à l'aise pour demander une aide hors des services de santé militaire proprement dits.
    Voilà qui conclut mon exposé.
(0910)
    Très bien. Vos collègues ont-ils quelque chose à ajouter? Non? Très bien.
    M. Valley, pour les libéraux, dispose des premières sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci de votre exposé de ce matin.
    Vous avez mentionné plusieurs choses. Je vais commencer par vos dernières observations, si vous me le permettez.
    Vous avez parlé des lieux de service. Certains d'entre nous représentons des circonscriptions dans le nord de l'Ontario, où ne se trouvent pas de bases; il n'y a aucune base dans ma circonscription, à Kenora. Vous avez parlé des cliniques et mentionné qu'il y en a cinq au Canada. Les deux situées le plus près de ma circonscription sont probablement celles d'Ottawa et d'Edmonton.
    Que se passe-t-il lorsqu'un militaire en service a besoin de soins et qu'on le renvoie dans l'une des collectivités, comme la mienne, Dryden? Il se trouve à des milliers de kilomètres de toute aide. Il n'y a pas vraiment de réseau de soutien par les pairs là-bas. Étant donné qu'il n'y a pas beaucoup d'habitants, les membres des Forces canadiennes ne sont pas nombreux.
    Que se passe-t-il alors? Les services sont-ils offerts à l'échelle locale, pour ceux qui en ont besoin? Pourriez-vous nous dire ce qui se passe lorsqu'un militaire, en pareilles circonstances, a besoin d'aide?
    S'il s'agit d'un traumatisme lié au stress opérationnel, nous lui demanderions probablement de venir dans l'un des grands centres pour subir une bonne évaluation, pour être certain d'avoir un diagnostic suffisant et rigoureux et que tout le protocole d'évaluation a été réalisé. Nous pourrions par la suite le renvoyer dans sa localité et tenter de lui trouver des dispensateurs de soins de santé communautaires. Nous disposons d'un certain nombre de dispensateurs d'un bout à l'autre du pays. Il y a environ 500 prestataires qui figurent sur la liste de la Croix-Bleue. La personne pourrait donc obtenir des services localement, dans sa propre communauté.
    S'il n'y a pas de dispensateur local de soins communautaires, ce qui doit, j'imagine, arriver souvent, le militaire doit alors rester dans le grand centre?
    Nous essayons de trouver des ressources plus près d'où ils vivent, surtout s'ils habitent loin des grands centres urbains. Nous essayons de le faire. Petawawa en est un bon exemple. Nous ne voulons pas que les gens aient à conduire de là jusqu'à Ottawa. Nous essayons de trouver des ressources locales, et nous augmentons également les ressources qui sont disponibles à la base.
    Je parle surtout des régions où il n'y a pas d'omnipraticiens et encore moins des psychiatres nécessaires pour offrir les services nécessaires.
    Je sais. Il s'agit probablement de réservistes qui ont pris leur retraite.
    Non, il y a dans la collectivités des militaires qui viennent de revenir d'Afghanistan.
    Je parle des gens qui reviennent dans la collectivité. Ces personnes sont encore dans les FC, et elles reviennent chez elles le temps de leur congé, par exemple.
    Nous disposons de ressources dans à peu près toutes les localités du Canada.
    Les soldats qui sont encore en service, devraient être à leur base d'attache.
    D'après ce que je comprends, ils peuvent passer un peu de temps dans leur collectivité lorsqu'ils reviennent d'Afghanistan.
    Ils ont un mois de congé, mais ils travaillent à leur base d'attache, et c'est là que les soins sont prodigués.
    D'accord.
    Vous avez dit que plus de 7 p. 100 des membres de la force régulière peuvent être atteints de TSO. Vous avez également dit, si je ne m'abuse, que ce pourcentage est beaucoup plus élevé que pour le reste de la population canadienne. Avez-vous un chiffre en ce qui concerne la population canadienne?
    Non. Dans le cas du SSPT, le pourcentage était le même que dans la population canadienne. Le pourcentage relatif à la dépression et au trouble de panique était plus élevé que dans la population canadienne. Dans le cas de la dépression, la proportion était à peu près du double, soit d'environ 7,2 p. 100.
    Merci.
    Enfin, nous avons entre autres parlé de ce que nous pouvons faire lorsque nous dépistons les problèmes. Cette question a déjà été soulevée devant notre comité. Est-il possible de dépister ce genre de problème avant les militaires soient déployés? Que fait-on dans ce cas? Existe-t-il des tests de dépistage pour vérifier si quelqu'un est vulnérable à ce genre de problème?
(0915)
    Voulez-vous commencer à répondre, Major Descôteaux?
    Des professionnels de la santé font un examen de chaque militaire qui est déployé. Ils leur font subir une entrevue.
    Nous faisons également subir à nos militaires des examens médicaux annuels. Ce sont ces examens qui nous permettent de détecter les problèmes. Pour qu'un militaire puisse partir en mission, il doit obtenir le feu vert d'un médecin et d'un travailleur social avant son déploiement.
    La marche à suivre a-t-elle été redéfinie maintenant que nous comprenons mieux le problème de traumatisme dû au stress opérationnel? Est-elle devenue plus complexe comparativement à ce qu'elle était il y a 60 ans, 40 ans ou 10 ans?
    Oui. On examine en détail la vie familiale, les problèmes financiers et les problèmes de santé mentale des militaires. Nous tenons compte de tous ces éléments.

[Français]

    On appelle la conjointe également pour prendre des renseignements, pour vérifier si elle est au courant de ce que va faire le militaire, pour voir si elle est prête pour le départ du militaire. L'entrevue dure généralement de 20 à 30 minutes, et ce, dans le cas d'un militaire volontaire prêt à partir. S'il y a des situations qui demandent une attention particulière, les entrevues peuvent systématiquement durer jusqu'à une heure, avant le déploiement.
     Lors de l'enrôlement d'un militaire, on n'a pas nécessairement d'études qui pourraient nous dire qui on devrait ou qui on ne devrait pas enrôler dans les Forces armées, qui est plus à risque. Une telle étude n'est pas faite. On sait qu'il y a certains facteurs, comme la dépendance à la drogue, pour lesquels les candidats ne sont pas testés au centre de recrutement. La même chose vaut pour la dépendance à l'alcool et certains traits de personnalité. L'entrée au centre de recrutement est assez large, mais ça pourrait être un endroit où on pourrait faire un certain tri afin de retenir des candidats idéaux. Présentement, il nous faudrait faire des études sur ce sujet, afin de ne pas faire de discrimination à l'endroit des gens qui voudraient se joindre aux Forces canadiennes.

[Traduction]

    Merci.
    Lorsqu'un militaire revient d'un théâtre d'opérations, pourriez-vous me dire dans quelle mesure un débreffage immédiat est important? Vous pouvez me faire part de votre opinion tous les trois. Quelle est l'importance des premières 24 ou 36 heures, de la première semaine ou de la seconde? Pourriez-vous nous dire à quel point c'est important?

[Français]

    La période qu'ils passent à Chypre est très importante, selon nous. C'est une période de décompression dans un lieu autre que celui de combat. Les militaires perçoivent souvent cela comme une étape qu'ils préféreraient ne pas franchir afin de retourner tout de suite à la maison, mais à la fin, ils sont très heureux d'avoir eu cette période. C'est la première période de décompression, et je pense qu'elle est essentielle.
    Un autre élément intéressant de la période de décompression est qu'ils sont encore ensemble. Ils ont vécu des événements en commun et ils ne se retrouvent pas seuls, chacun de leur côté. Oui, ils retourneront dans leur famille, mais ils auront quand même vécu quelque chose d'unique et de difficile à communiquer et à partager avec les gens de leur réseau. Le fait qu'ils se retrouvent en compagnie des gens avec lesquels ils ont vécu ces incidents est un autre élément qui peut agir comme un facteur de protection.
    Vous parliez tout à l'heure de certains réservistes qui reviennent d'un théâtre d'opérations, ont une période de décompression, arrivent au Canada et restent avec le groupe avec lequel ils avaient été déployés durant un certain temps avant de retourner dans leur communauté. C'est parfois lors cette dernière étape que les symptômes apparaissent. Si on pouvait s'assurer que ces réservistes aient un contrat — on parle d'argent —, encore en classe C, à la même base pendant une période d'un an, ça nous permettrait d'avoir ces gens au travail près de nous, ce qui nous permettrait de les traiter et de dépister des problèmes éventuels. S'ils pouvaient, au retour de leur mission, avoir encore un contrat d'un an, on les aurait près de nous, ce qui améliorerait probablement les soins qu'ils recevraient.
    Chaque militaire est également soumis à une entrevue post-déploiement, c'est-à-dire après le déploiement. Il s'agit d'une entrevue qui dure habituellement entre une heure et quart et une heure et vingt minutes, dans le cadre de laquelle on fait un retour sur les événements qui se sont produits en mission. Les militaires doivent compléter un questionnaire assez détaillé qui couvre des questions relatives au stress post-traumatique et à la consommation d'alcool. C'est ce qu'on appelle le dépistage amélioré, qui sert à voir un peu, dans un premier temps, les militaires qui pourraient présenter certains problèmes.
(0920)

[Traduction]

    Merci.
    Je remercie M. Valley et nos témoins.
    Le prochain intervenant est M. Perron, du Bloc. Il dispose de sept minutes.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs.
    Je m'adresserai surtout à vous deux, Chantal et Marc-André. Je m'excuse de vous appeler par vos prénoms, mais ce sont peut-être mes 66 ans qui me le permettent.
    J'ai été estomaqué, il y a quelques semaines, quand Mme LeBeau, que vous connaissez sûrement et qui fait partie du Soutien social aux victimes de stress opérationnel des Forces canadiennes, le SSVSO, est venue témoigner ici. Elle m'a dit et répété qu'avant de partir en mission, les militaires reçoivent un cours d'une durée de trois heures et demie environ lors duquel on leur explique un peu les problèmes qui pourraient survenir par rapport au stress post-traumatique. Je n'ai pas compris.
    Voulez-vous dire que ce n'était pas assez?
    Ce n'est pas du tout suffisant. On dépense des millions de dollars pour les envoyer dans le sud des États-Unis. Je n'ai rien contre le fait qu'ils se pratiquent sur un terrain, mais on ne dépense pratiquement rien pour leur faire faire des exercices entre les deux oreilles. On leur fait faire des exercices physiques, mais il y a très peu d'exercices entre les deux oreilles au sein des Forces canadiennes.
    Les exercices sur le terrain sont aussi des exercices entre les deux oreilles, ce qui est très important. Le réalisme des exercices —
    Ce n'est pas ce dont je parle.
    Vous connaissez Pascale Brillon. Elle va chez vous, à Valcartier, et je crois qu'on peut reconnaître qu'elle connaît beaucoup de choses sur ce sujet. Elle est reconnue non seulement au Québec, mais aussi aux niveaux national et international. Donc, ce que dit Pascale, pour moi, c'est quasiment une bible. Je ne sais pas si vos militaires ont lu le guide à l'intention des victimes de Pascale Brillon. Pascale nous dit qu'il faut soigner le stress post-traumatique le plus tôt possible.
    Combien y a-t-il de psychologues sur les lieux en Afghanistan, par exemple? Combien de psychologues vont suivre le Royal 22e Régiment sur les lieux? Il faut s'occuper d'eux 24 heures ou 48 heures ou dans les plus brefs délais possibles après qu'ils ont subi un stress.
    Il y a plusieurs volets à votre question.
    C'est une discussion; faites le tour de mes suggestions.
    D'abord, en ce qui a trait au secteur de l'Est, particulièrement à Valcartier, on est très innovateur et on essaie de mettre beaucoup de choses sur pied. Présentement, il y a un programme qu'on appelle le Programme d'entraînement à la résilience, qui a été utilisé pour la première fois cette année, avant le départ de nos troupes à l'été.
    L'entraînement à la résilience est un entraînement psychologique comme celui dont vous parlez. C'est une frag vest psychologique.
    Je demanderais à Marc-André d'expliquer un peu plus ce programme.
    En fait, la Dre Christiane Routhier, psychologue, a été complètement libérée de ses autres tâches afin de travailler à temps plein au Programme d'entraînement à la résilience, que nous appelons le PEM. C'est un programme qui comporte beaucoup plus que simplement trois heures de cours sur le stress post-traumatique. Il est question, évidemment, du stress relié aux opérations. Il est question des tactiques terroristes aussi. Ce qui est très intéressant dans ce programme, c'est que pour accrocher les militaires davantage, on présente le stress comme une arme de combat. C'est un concept très intéressant qui a été élaboré par la Dre Routhier afin que les militaires voient que c'est une arme qui est dirigée contre eux, qui peut blesser et qui est très subtile. La blessure peut se manifester plusieurs mois après leur retour ici. C'est quand même une arme et c'est la base du terrorisme. D'ailleurs, c'est une guerre de peur. Ils vont vous faire peur et vous aurez peur : c'est un peu le discours qui leur est présenté. On leur explique ce qu'est la peur, ce qu'est le stress au niveau psychologique, mais aussi au niveau physiologique. On leur donne des outils pour qu'ils soient capables de diminuer leur anxiété et d'apprendre à mieux respirer, et même des techniques pour diminuer leur rythme cardiaque.
    On normalise le stress, ce qui est très important aussi. On ne leur dit pas qu'ils n'auront pas peur, que tout va bien aller, qu'ils sont entraînés et que tout sera super. On pourrait leur dire cela, mais on leur dit également que c'est normal de vivre du stress, qu'ils vont en vivre. Après l'avoir nommé, on leur explique comment on peut faire face à ce stress. C'est ce qu'on leur enseigne.
(0925)
    Je m'excuse, mais j'aimerais intervenir.
    Tu as dit au début que c'était la première fois. Y a-t-il des études ou de statistiques qui précisent combien il y en a après le retour, comparativement au cas de la Bosnie, par exemple?
    En effet, ce projet va être validé. Les militaires qui y participent ont passé des tests avant leur déploiement et vont en passer au retour de leur mission. Il s'agit ici d'évaluer l'efficacité de cette démarche, qui se veut davantage préventive.
    On parle du stress, mais il y a aussi un volet présenté par les aumôniers qui porte sur le combattant et la mort. On parle de cette réalité qu'est la mort et du lien entre le travail des armes et la mort, qui est une possibilité. On amène le militaire à se questionner sur le sens qu'il attache à la mission. Il aura plus d'argent, bien sûr, et c'est intéressant, mais dans le contexte dans lequel il est déployé, ils doit se poser des questions qui vont bien au-delà de ce fait.
    Chantal, je veux revenir sur ce que tu as dit au sujet des profils psychologiques à dresser avant d'embaucher un militaire. Je sais pertinemment de quoi il s'agit parce que depuis mon élection en 1997, le stress post-traumatique chez les jeunes constitue pratiquement mon plus grand défi.
    Je sais que la Gendarmerie royale du Canada a un programme dans le cadre duquel le profil psychologique de ses membres peut être établi. Je sais aussi que sa valeur ne fait pas l'unanimité parmi les psychologues et les chercheurs. Je comprends votre situation à ce sujet. L'autre problème auquel vous faites face — et c'est le cas également de la Gendarmerie royale du Canada, des corps policiers et des pompiers — est l'accès à l'information. Si le militaire ou le policier ne veut pas subir ce test, vous ne pouvez pas le forcer à le faire: il est protégé par la Constitution canadienne. Ça peut même mener à des poursuites.
    Quand je pense à tous ces problèmes, une image me vient à l'esprit. J'ai rencontré un jeune militaire à la base de Valcartier. Il m'a parlé de l'escalier de la honte, c'est-à-dire celui qu'on emprunte pour se rendre au deuxième étage, là où se trouvent les psychologues. Il ne faut pas oublier que ces jeunes sont des machos — excusez le terme —, des gars qui se voient forts, sans problèmes, et pour qui la mort n'existe pas. Nous étions semblables quand nous avions leur âge.
    Je tiens à vous féliciter, car vous commencez au moins à travailler dans un certain sens. Il reste que vous ne m'avez toujours pas dit combien il y aurait de psychologues sur les lieux du déploiement.
    Vous avez posé plusieurs questions.
     On débroussaille un peu la question, mais actuellement, il n'y a pas de psychologues sur le terrain. Ce poste n'existe pas chez les militaires.
    Au sein des forces armées en uniforme, on a des travailleurs sociaux et des infirmières en santé mentale. Les Américains ont des psychologues en uniforme. Je pense qu'il pourrait être fort intéressant de considérer la chose. Il faut que vous compreniez qu'on n'enverra pas un psychologue sur le théâtre des opérations pour entamer une longue psychothérapie, parler des traumatismes de l'enfance et de la façon dont les choses se passaient avec la mère à l'âge de deux ans. Il faut appliquer des mesures concrètes sur le terrain, des encouragements.
    Ou les renvoyer au pays.
    Tout à fait. La vraie psychothérapie se fait à la maison, en garnison. Pour ce qui est de l'aide psychologique offerte sur le théâtre des opérations, on pourrait en effet considérer la possibilité qu'il y ait des psychologues en uniforme. Il reste que ça n'existe pas présentement dans notre corps d'armée.
    Je fais confiance aux travailleurs sociaux et aux aumôniers pour ce qui est du travail qu'ils font sur le théâtre des opérations. En Afghanistan, il y a aussi un psychiatre.
     Il y a également des infirmières en santé mentale.

[Traduction]

    Depuis que nous avons des troupes en Afghanistan, nous avons toujours eu un psychiatre, un travailleur social et une infirmière psychiatrique sur le théâtre d' opérations. Nous envisageons également d'enrôler des psychologues dans la réserve à titre de réservistes de catégorie B. Un projet est actuellement en cours à la sélection du personnel pour recruter ces psychologues et les déployer sur le terrain.

[Français]

    Des psychologues vont à Chypre pendant la semaine de décompression. Des gens de Valcartier reviennent de Chypre depuis peu.
    Pour ce qui est de l'escalier de la honte, on en entend souvent parler, mais par des gens de l'extérieur. Je pratique au sein des Forces canadiennes depuis 1993, et je peux vous dire que la demande d'aide de la part des militaires augmente. Cette stigmatisation commence à disparaître. Les vieux dinosaures reliés à l'ancienne mentalité sont à la veille de prendre leur retraite ou l'ont déjà prise, et la génération actuelle est différente.
    Le fait qu'on ait des programmes dans le cadre desquels nos intervenants en santé mentale vont parler aux troupes, dans une optique de prévention, crée des liens et facilite un peu l'accès à nos services. À ce sujet, j'aimerais dire que nous aimerions mettre un peu plus l'accent sur la prévention par l'entremise de programmes de ce genre, mais que les Forces canadiennes manquent de ressources et d'argent. Ça ne s'applique pas seulement à la santé mentale, mais de façon générale. On essaie de faire du mieux qu'on peut avec les ressources qu'on a. C'est ce qui a rendu les liens avec la troupe plus faciles, et je crois qu'on entendra de moins en moins parler de l'escalier de la honte.
(0930)
     La semaine de décompression à Chypre favorise également la demande d'aide, à mon avis. En effet, pendant cette semaine, les militaires rencontrent des professionnels de la santé mentale qui leur disent l'importance d'aller chercher de l'aide. Peut-être avez-vous vu le document Battlemind Training, de M. Carl A. Castro. On y aborde de façon très précise certains éléments du stress opérationnel et on met en scène un militaire qui arrive de mission. Encore là, il s'agit de faire ressortir l'importance d'aller chercher de l'aide. C'est ce qu'on dit de faire aux militaires à Chypre, et c'est excellent. Par contre, pour que ce soit le plus cohérent possible, il faut qu'en garnison, on ait les effectifs nécessaires pour répondre à cette demande d'aide.

[Traduction]

    Très bien. Merci beaucoup.
     Monsieur Perron, je vous signale que vous avez dépassé vos sept minutes de quatre minutes et 32 secondes, donc —
    Notre pauvre M. Stoffer avait hâte de poser une question. C'est maintenant son tour et il a cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Messieurs dames, je ne suis pas certain si vous avez eu l'occasion de lire le Globe and Mail de ce matin.
    Non.
    Je vous suggère à tous de le lire, car cela illustre bien ce que nous demandons de nos militaires canadiens. Ceux d'entre nous qui sont parents auront comme moi de la difficulté à imaginer ce qu'on ressent quand votre petit garçon de dix ans vous dit « Si tu meurs en Afghanistan, je t'en voudrais pour le reste de ma vie. » C'est déjà un SSPT avant même de partir. J'ai lu cet article et je l'ai trouvé extrêmement émouvant.
    Vous avez dit que les TSO sont causés par les fonctions opérationnelles qu'exécutent les membres des Forces canadiennes. N'est-il pas possible que certaines de leurs fonctions provoquent ce stress avant même qu'ils partent?
    Le centre Phoenix offre maintenant de l'aide. La base de Petawawa a fait couler beaucoup d'encre récemment, et je sais que le gouvernement fédéral a maintenant pris des dispositions avec la province pour offrir des services. Il a néanmoins fallu que l'ombudsman présente un rapport et que les médias s'en mêlent pour que les deux gouvernements décident d'agir. Je trouve cela honteux.
    Mais dans un cas comme celui-là, et je suis sûr que ce n'est pas un incident isolé, que font l'armée et les diverses bases — au moyen de services publics ou privés — pour aider une famille comme celle-là?
    Vous avez soulevé une question très importante et c'est l'un des problèmes que nous avons. Les familles ont besoin de beaucoup de soutien.
    Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais l'armée n'a pas le mandat de dispenser des soins aux familles. Nous pouvons offrir un soutien aux familles, mais c'est encore aux provinces qu'il incombe de fournir ces services. Nous devons donc fournir un soutien officieux aux familles.
    Il faudra probablement une mesure législative pour changer cette situation, mais nous n'avons aucun pouvoir à cet égard. Nous essayons d'appuyer les familles de toutes les façons possibles, et nous obtenons de bons résultats. Nous avons augmenté nos ressources de 25 p. 100 dans notre projet de soins de santé mentale et de travailleurs sociaux pour essayer d'offrir ce soutien aux familles.
    Petawawa n'est pas le seul exemple, nous le faisons dans toutes les bases.
    Je vous remercie de votre réponse. C'est une question que nous devrons poser à l'échelon politique et bureaucratique, au lieu de vous la poser à vous. Je suis sûr que la plupart d'entre vous offririez ces services si vous disposiez des ressources nécessaires.
    Tout à fait.
    En outre, j'ai parlé l'autre jour à un dame de la base de Halifax. Les militaires y ont été informés qu'à compter du 1er mars, lorsqu'un militaire quitte la Défense nationale et passe aux Anciens combattants, pour faire l'objet d'une évaluation médicale — Les militaires consultaient auparavant leur médecin des Forces canadiennes pour ce genre d'évaluation, mais ce n'est plus possible. Ils doivent maintenant consulter un médecin civil pour obtenir une évaluation qui leur permettra de réclamer des prestations de ACC. Je me demande si vous étiez au courant. Pourquoi la Défense nationale et ACC exigent-ils cela de personnes qui ont été traitées pendant longtemps par des médecins des Forces canadiennes, quand ces derniers ont à leur disposition toute l'information médicale sur leur santé physique ou mentale?
    C'est ce que nous ont dit l'autre jour un représentant de la Défense nationale et un autre de ACC. Lorsqu'une personne passe à ACC, si elle demande des prestations, ACC réclame une évaluation médicale. Cette personne consulte son médecin des Forces canadiennes, qui lui dit qu'il ne fait plus maintenant ces évaluations et qu'il faut consulter un médecin civil. Je me demande quelle en est la raison?
(0935)
    Permettez-moi de répondre à cette question. La vie des médecins et des professionnels de la santé mentale qui travaillent dans les Forces canadiennes est devenue très difficile depuis que les militaires peuvent demander une pension pendant qu'ils sont encore en service. Il est très important que vous compreniez cela. Si vous pouviez vous occuper de ce problème, nous en serions très heureux.
    Quand j'ai commencé à exercer la médecine, les patients qui venaient me consulter voulaient guérir, ils voulaient demeurer actifs et retourner à leur vie militaire normale. Maintenant qu'ils peuvent obtenir une pension tout en demeurant en service, ce qu'ils veulent, ce sont des prestations, de l'argent. Ils viennent donc nous consulter plus souvent au sujet d'une cheville qui n'est plus en très mauvais état, d'une petite coupure ou de leurs hémorroïdes, car ils veulent des prestations de pensions. Il en va de même pour les problèmes de santé mentale. Quel avantage y a-t-il à guérir lorsqu'on sait qu'on peut obtenir beaucoup d'argent grâce à un diagnostic de SSPT très grave?
    Il nous a été très difficile de composer avec ces deux éléments. Je préférais les choses comme elles étaient auparavant. Les militaires encore en service recevaient des soins, mais si on constatait qu'ils ne pouvaient plus faire partie des Forces canadiennes, qu'ils souffraient d'une incapacité permanente, ils pouvaient présenter une demande de pension. Cela mettait en branle un mécanisme et le dossier était transféré à ACC, etc.
    Maintenant qu'ils peuvent recevoir une pension tout en demeurant en service, il nous est difficile de déterminer qui essaie de profiter du système et qui est vraiment malade. Dans le cas de ceux qui sont vraiment malades, c'est presque comme si nous étions

[Français]

en train de les récompenser du fait qu'ils sont malades. Malheureusement, il est plus avantageux d'être malade à cause de cet avantage pécuniaire disponible à la fin.

[Traduction]

    Cela pose de grandes difficultés aux professionnels de la santé mentale et aux omnipraticiens, car notre travail ne consiste pas à produire un diagnostic qui rapportera de l'argent au patient. Notre travail est de décider si quelqu'un est guéri ou non. Il faut des compétences différentes lorsqu'on soigne un patient qui veut obtenir une pension.
    Le psychiatre, le psychologue ou l'omnipraticien peuvent décider que le patient souffre effectivement de SSPT grave. Mais s'il dit que le patient ne souffre pas de SSPT grave, que le syndrome est bénin et que le patient peut recouvrer, la relation avec le patient risque de n'être plus la même. Le patient ne voudra peut-être plus consulter son médecin pour cette raison.
    C'est un peu comme chez les civils. Les experts donnent des avis, mais si vous êtes le médecin soignant, vous traitez le patient pour qu'il recouvre la santé. Cela nous pose de grands problèmes à tous. Nous voudrions vraiment que le système revienne à ce qu'il était auparavant de façon à ce que les militaires ne demandent de pension que s'ils doivent se retirer de l'armée. Les Américains font les choses autrement que nous. Ils ont encore le même système que nous avions auparavant.

[Français]

    Il doit vraiment y avoir un processus indépendant. Actuellement, on utilise les notes évolutives et les rapports du psychologue traitant — et non pas uniquement le rapport du psychiatre et du médecin —, du matériel thérapeutique et clinique pour établir un montant d'argent.
    Il y a des situations où des militaires reviennent en colère parce qu'ils n'ont pas eu la compensation à laquelle ils croyaient avoir droit, selon la souffrance qu'il ressentent, etc. Il nous demandent pourquoi on ne les a pas écoutés et qu'est-ce que nous n'avons pas compris. En tant qu'intervenants traitants, cela nous met dans une situation très inconfortable.
    On doit vraiment séparer l'évaluation dans le but d'un traitement, soit le travail que je fais et celui que les professionnels de la santé mentale de la défense ont fait, et l'évaluation, l'expertise qui a pour but de déterminer le montant d'une pension. Cela devrait être vraiment séparé pour éviter ce genre de situation.
    Je tiens aussi à préciser que nous ne disons pas que les militaires présentent des symptômes dans le but d'avoir de l'argent. Ce n'est pas le cas. En fait, c'est absolument humain. Je pense que le militaire est pénalisé financièrement si son état s'améliore. Il y a une pénalité financière associée à l'amélioration. C'est simplement ce cadre qui fait en sorte que ça peut éventuellement nuire au traitement. Ce n'est pas du tout de la mauvaise intention ou de la manipulation, mais si le militaire s'aperçoit qu'un de ses collègues reçoit une compensation qui s'élève à tel montant d'argent, il demande pourquoi lui a eu moins. Alors, il remet en question le traitement, le travail des professionnels, qui ne sont pourtant pas là pour établir un montant d'argent.
    Toute cette confusion fait en sorte que les deux processus, celui du ministère des Anciens Combattants et le nôtre, devraient être distincts.
(0940)
    Cela a même été à l'origine d'actes de violence dans notre milieu. Lorsque les militaires souffrent, leurs traits de personnalité un peu moins sympathiques peuvent refaire surface. Si le psychiatre n'a pas dit tout à fait ce que cette personne voulait entendre pour pouvoir obtenir cette compensation, elle peut se mettre en colère. Il y a un trou sur le mur dans le bureau de Marc-André. Je suis obligée d'appeler la police militaire de temps à autre pour calmer les esprits. C'est souvent en lien avec ce dont on parle présentement.
    Les militaires trouvent sur Internet des chartes des anciens combattants qui disent que tel tableau clinique devrait correspondre à telle compensation. Ils sont en mesure de faire une certaine évaluation et ils disent alors que les intervenants traitants les ont mal évalués. Ce n'est pas nous qui déterminons le montant des pensions. Dans leur esprit, puisqu'ils ont utilisé les notes contenues dans notre dossier, c'est un peu notre faute. C'est à ce moment-là qu'il peut y avoir des charges d'agressivité. Ça aussi, c'est compréhensible.

[Traduction]

    Ce n'est pas à nous de décider... Nous sommes prêts à collaborer avec AAC, et nous le faisons. À Valcartier, nous avons un excellent système. Lorsqu'un militaire est libéré, nos gestionnaires de cas rencontrent ceux d'AAC, nous transférons le dossier et nous communiquons les uns avec les autres. Dans la plupart des cas, le psychologue qui s'occupe de la thérapie est déjà un psychologue civil qui continuera à soigner la patient. Nous communiquons bien les uns avec les autres. Mais c'est lorsqu'il s'agit d'argent —
    Vous avez sans doute remarqué que depuis que le ministères des Anciens Combattants a modifié sa politique et s'est davantage orienté vers la réadaptation, ce qui est parfait à mon avis, il y a eu une diminution de la demande. En fin de compte, c'est qu'il y a moins d'argent en cause. Nous disons aux militaires que nous allons les soigner, et il y a donc moins de gens qui réclament ces services.
    Merci, monsieur Stoffer. Cela me rappelle ce que disent les économistes, c'est-à-dire que chaque sou compte.
    Passons maintenant à Mme Hinton, pour sept minutes.
    J'ai lu l'article dont a parlé M. Stoffer, afin d'en savoir un peu davantage sur le cas. Il semble que la famille dont vous avez parlé monsieur Stoffer, reçoit des soins depuis maintenant plus d'un an. Je signale que le gouvernement fédéral investit 230 000 $ dans le Centre Phoenix pour aider des familles comme celle-là. Nous faisons notre part. Je sais que nos témoins font leur part pour aider nos militaires. Je l'apprécie beaucoup.
    J'ai quelques questions qui me viennent à l'esprit. Nous avons maintenant entendu un certain nombre de témoins qui nous ont parlé du SSPT. C'est de toute évidence un syndrome très difficile à diagnostiquer et à traiter. D'après ce que j'ai entendu des témoins, il semble qu'il n'y ait aucun moyen de prédire qui sera touché par le SSPT et qui ne le sera pas. Il semble —
    Il existe certains prédicteurs, madame.
    Il y en a?
    D'accord. Pourriez-vous nous en expliquer quelques-uns lorsque j'aurai fini ma question? Je vous dirai ensuite ce que j'en pense.
    Des choses arrivent, les gens se trouvent dans certaines situations, et les faits s'accumulent. D'après ce que j'ai entendu des témoins, le problème n'est généralement pas dû à un incident. J'aimerais vraiment savoir ce que vous en pensez.
    En ce qui concerne les prédicteurs — et Marc-André pourra vous en dire davantage à ce sujet sans doute — nous savons qu'il en existe un certain nombre: le type de personnalité, si quelqu'un voit tout en noir et blanc, le fait de posséder une personnalité très rigide, le manque d'adaptabilité et le fait d'avoir déjà un problème de toxicomanie rendent plus susceptibles à ce genre de problèmes.
(0945)
    La dépendance à l'alcool et aux drogues?
    Si vous avez souffert d'un traumatisme durant l'enfance, vous serez également plus susceptible au SSPT. Ce sont les principaux prédicteurs.
    Voulez-vous en savoir davantage au sujet des traumatismes répétés?
    Je me fonde sur ce que nous ont dit nos témoins. Je ne sais pas si vous serez d'accord avec moi, mais j'en ai conclu qu'à l'exception de ces indicateurs, rien ne permet vraiment de mesurer comment une personne réagira à de telles circonstances.
    On ne peut pas faire d'analyse sanguine pour le détecter, mais je crois qu'on pourrait faire des études pour examiner cet aspect.
    D'accord.
    Vous avez également abordé une question qui m'a toujours préoccupée. J'ai posé la même question à tous nos groupes de témoins: Comment Anciens combattants Canada pourrait-il modifier le stéréotype négatif des anciens combattants qui souffrent de SSPT en silence? Vous avez déjà répondu en partie à ma question. Vous m'avez dit que les dinosaures partent à la retraite et que la nouvelle génération de soldats est davantage prête à avouer qu'elle a un problème et à demander de l'aide au lieu de faire preuve de stoïcisme.
    Vous êtes anxieux de répondre, docteur Dufour. Je vous laisse la parole.

[Français]

    Quand on parle davantage de stress opérationnel que de stress post-traumatique, on s'avance un peu par rapport à cette question. Oui, le stress post-traumatique existe: c'est un diagnostic clinique. Le stress opérationnel, quant à lui, est une notion très intéressante. Selon moi, pour tous les militaires qui vivent des opérations et des situations en Afghanistan — j'entend les récits —, c'est difficile de ne pas être traumatisé. Cependant, le stress opérationnel est normal. Le stress est présenté davantage comme une arme de combat qui vous atteindra. Cela veut dire que ça fait partie de la game.
    Il n'y a pas très longtemps que je pratique dans le système militaire, mais si je me fie aux discours que j'entends de la part de certains vieux militaires ou caporaux, ils vivaient effectivement des situations excessivement stressantes, mais ils n'avaient pas le droit d'avoir des réactions. Ils n'avaient pas le droit d'être stressés. Sinon, ils étaient exclus, mis à part. Ils n'avaient même pas le droit d'en parler.
    Maintenant, on leur dit qu'il ne faut pas se mettre la tête dans le sable, qu'ils vont vivre du stress, qu'ils vont avoir peur, que le but de l'ennemi est de leur faire peur, qu'ils seront touchés par le stress. Quand on leur explique la façon dont ils peuvent réagir face au stress, on leur donne le droit d'avoir des réactions.
    Auparavant, il se produisait deux choses dans les Forces canadiennes. Les militaires vivaient des événements stressants et — c'est ce que j'appellerais le deuxième traumatisme — ils n'avaient pas le droit d'avoir une réaction et ils étaient perçus comme des lâches s'ils parlaient. Je vous dirais que ce genre de message fait en sorte que le militaire ne parle pas et s'isole. C'est pour cette raison qu'encore aujourd'hui, 10, 12 ou 13 ans après l'ex-Yougoslavie, il y a des militaires qui, après avoir perdu deux familles, deux maisons, etc., viennent consulter pour la première fois parce qu'il sont complètement détruits. On avait dit à ces vieux militaires que s'ils parlaient, ils étaient des faibles. Ils ne devaient pas parler. Cela a grandi à l'intérieur d'eux, s'est mélangé à leur personnalité et ils se sont adaptés à leur traumatisme. Ils finissent au fond de leur sous-sol à penser que c'est normal de vivre comme cela pour un ancien combattant. C'est catastrophique.
    Maintenant, on leur dit que c'est normal, que ça fait partie de la mission, qu'ils seront touchés par le stress, et qu'au même titre qu'ils doivent apprendre à manipuler leur fusil C-7, ils doivent apprendre à manipuler le stress, à le gérer. On leur donne des outils préventifs et on leur dit si ça ne fonctionne pas, il y a des professionnels. À ce moment-là, on sort de la pathologie. Nous sommes des entraîneurs; nous ne leur montrerons pas à tirer, mais à respirer. C'est un peu bizarre d'entendre cela au début, mais il reste que c'est ce dont on parle.
    Nous disons que le stress opérationnel est normal, qu'ils vont le vivre et qu'il y a des professionnels qui sont là pour les aider. Cela fait en sorte que les militaires consultent beaucoup plus rapidement, et on le constate. On commence à recevoir des militaires qui reviennent de l'Afghanistan et je vous dirais que c'est très différent de ce qu'on voit dans le cas des militaires qui sont allés en ex-Yougoslavie. Ceux-ci vivent leur traumatisme depuis 10, 12 ou 13 ans et ce traumatisme s'est enraciné. Il y a beaucoup moins d'évitement, les situations qui créent de l'anxiété sont très ciblées et on peut facilement travailler. On peut identifier les traumatismes vécus par le militaire dans tel véhicule, on peut faire des hiérarchies d'expositions graduelles — Pascale Brillon vous en a peut-être parlé —  pour arriver à désensibiliser tranquillement le militaire à ce qui crée son anxiété. De cette façon, la thérapie est beaucoup moins longue et le succès thérapeutique est aussi beaucoup plus fort. Il faut donc favoriser la demande d'aide en normalisant les réactions de stress. C'est l'angle qu'on doit prendre et c'est celui qu'on prend.
(0950)
    C'est de l'éducation. Mme Ramsay a besoin d'argent afin de pouvoir le faire et d'avoir des cliniciens qui se consacrent uniquement à cela. Nous avons dû renoncer à une de nos cliniciennes pour mettre ce programme en place. On se tire un peu dans le pied, mais on s'aide pour l'avenir. Il faut axer nos efforts sur la prévention et penser outside the box, à de nouvelles choses.
    Présentement, nos ressources —
     En fait, on utilise nos ressources actuelles pour le volet de la prévention. Il n'y a pas une fonction particulière ni de poste en particulier d'agent de prévention. On est tous des cliniciens, et en plus de traiter nos patients, on prend la responsabilité de faire ces exercices de prévention importants. Mais on ne peut tout faire, et les intervenants de la santé mentale sont épuisés.
    Et les autres intervenants aussi.

[Traduction]

    Il n'interrompra pas votre réponse, mais il va certainement interrompre ma question. Je vais essayer de vous en poser une autre avant que vous répondiez.
    Je suis désolé, mais votre temps est écoulé.
    C'est ce que je pensais.
    Passons maintenant à M. St. Denis, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être venus nous rencontrer.
    Madame Descôteaux, permettez-moi de revenir aux renseignements très intéressants et presque renversants que vous nous avez fournis au sujet des incitatifs.
    Il ne s'agit pas de manquer de respect à nos militaires qui croient être malades, mais si nos politiques pervertissent le système, cela signifie que nous devrions utiliser certaines ressources pour ceux qui veulent obtenir des prestations et d'autres ressources pour ceux qui veulent recouvrer la santé. Il faut que nous établissions une meilleure différence, car les objectifs, sont distincts.
    Si les ressources et les équipes servent aux deux fins, et qu'il y a un conflit à l'intersection des deux types de service, on n'optimise pas les services offerts au personnel militaire. Il arrive que les politiques les mieux intentionnées aient des conséquences imprévues.
    Je tiens à signaler à notre attaché de recherche que c'est une question importante pour notre comité. Je vous remercie d'en avoir parlé.
    Avez-vous des idées à nous proposer quant à la façon de mieux offrir ces deux types de service? Suffirait-il de revenir à la façon dont nous faisions les choses auparavant, faut-il faire la distinction entre ceux qui peuvent guérir et ceux qui renoncent à guérir et préfèrent obtenir des prestations? Avez-vous des solutions à nous proposer?
    Dans le système médical militaire, lorsqu'il faut imposer des limites dans certains domaines à un patient qui nous consulte, ce patient est classé dans une catégorie médicale temporaire. On décidera que pour les six premiers mois, sa santé ne lui permet pas d'être déployé, qu'il doit consulter le service de santé mentale chaque semaine, qu'il ne peut pas lever un objet de 30 livres, etc. Nous écrivons toute la liste des limites. Cela s'applique aux premiers six mois. On peut y ajouter une deuxième période de six mois si le patient n'est pas encore guéri.
    Après un an ou un an et demi, selon le problème, nous devons décider si les limites seront permanentes ou non. Dans l'affirmative, le patient est classé dans une catégorie permanente. Le système médical et l'administration décident si le patient sera déchargé ou non des FC et informe celui-ci de la décision — c'est-à-dire s'il sera maintenu en service avec ses limites ou s'il fera l'objet d'une décharge médicale. Le moment où la décision est communiqué au patient serait le plus opportun pour que celui-ci présente sa demande de pension, car jusqu'à ce moment, on fera tous les efforts nécessaire pour le guérir, pour l'aider à recouvrer la santé.
    Une fois qu'on a déterminé que les limites sont permanentes, le patient serait autorisé à demander une pension. Mais si vous êtes autorisé à demander une pension pour un problème de genou alors que vous en êtes à votre douzième année de service et que vous continuez votre service jusqu'à votre 25e année, peut-on vraiment parler de blessures permanentes, si vous êtes en mesure de continuer à courir et à faire des marches forcées? Pour nous, cela n'a pas de sens. Et pourtant, nous avons des patients qui sont en service actif et qui ont droit à des services de déneigement l'hiver parce qu'ils reçoivent une pension pour des problèmes de dos, par exemple. Ces patients sont encore en service actif dans l'infanterie. C'est ridicule. Nous avons des exemples de ce genre. Nous le constatons nous nous interrogeons. Nous versons une pension à ce patient pour des problèmes de dos, nous payons des services de tonte de pelouse ou d'autres services, et pourtant, il est encore en service actif. Cela n'a aucun sens. Ces services ne devraient être offerts qu'une fois qu'on a décidé que les limites sont permanentes.
(0955)
    Ce n'est pas manquer de respect à ceux qui ont besoin de services de santé que de poser cette question, car si on utilise à d'autres fins les ressources qui devraient servir à ceux qui en ont besoin parce que le système est perverti, nous avons alors le devoir de nous en occuper.
    Les affaires des anciens combattants sont nouvelles pour certains d'entre nous. Je suppose qu'il y avait une justification à cette politique. Pourriez-vous nous dire, aussi logiquement que possible, comment on a justifié une politique qui permet à une personne en service actif de demander une pension?
    Je n'en connais pas vraiment la raison. À vrai dire, je n'en sais rien.
    C'est simplement que le pendule est allé trop loin de l'autre côté. Il faut corriger la situation.
    Il faut trouver un équilibre.
    C'est cela, oui.
    Anciens combattants Canada devrait expliquer les raisons du changement de la politique.
    D'accord, merci, monsieur le président.
    Passons maintenant à M. Gaudet, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Je suis très heureux d'intervenir à ce comité.
    Vous ne parlez pas souvent des conjoints ou conjointes des personnes qui se rendent dans des missions. Je rencontre souvent ces conjoints ou conjointes et ils sont très anxieux. Il n'y a rien dans vos propos de ce matin sur la famille. C'est comme la période avant « pro », si je puis dire, avant qu'ils partent. Ne pourrait-il pas y avoir un genre de —?
    Comme Mme Ramsay l'a dit, on n'a pas le mandat de traiter la famille. C'est important de le savoir. J'aimerais bien traiter la famille, mais il faudrait que je traite aussi l'enfant, la femme, l'époux, et qu'il y ait des cliniques pour ce faire. Traiter quelqu'un, ce n'est pas simplement s'occuper de sa santé mentale. Il faut également tenir compte des aspects biologique, psychologique et social. On n'est pas équipés pour le faire pour l'instant.
    Cependant, certains services sont offerts aux familles. Il y a un centre de soutien à la famille sur chacune des bases. Ce sont souvent ces centres qui offrent ces services — je parle de Valcartier — et ils travaillent en étroite collaboration avec nous.
    Pour ce qui est du traitement de la famille, voici ce qu'on peut faire. Si un militaire subit un stress opérationnel et qu'il pourrait être bénéfique qu'on voie sa conjointe ou ses enfants afin de leur faire comprendre ce qu'il vit, on le fera dans la mesure de nos capacités.
    Vous comprendrez que je suis obligée de dire à mes intervenants de donner la priorité aux militaires qui reviennent au pays. Je reconnais toutefois que traiter un militaire signifie également traiter son milieu et sa famille. Si on ne peut pas les traiter nous-mêmes sur place, on s'assurera de les acheminer au bon endroit, soit au Centre de la famille où travaillent des psychologues et des travailleurs sociaux, soit à certains centres situés en ville.
    Des séances de breffage sont offertes à tous les époux et épouses avant le départ, en collaboration avec le Centre de la famille. Malheureusement, les membres de la famille ne sont pas tous des militaires et on ne peut pas les obliger à y assister. Très souvent, ils ne se présentent pas à ces séances.
    Certains sites Internet sont mis à leur disposition, il y a des caméras Web et toutes sortes de choses. Entre le moment où j'ai été déployée et aujourd'hui, il y a une grande différence pour ce qui est des possibilités, pour les militaires, de discuter avec leur famille. Plusieurs services existent, mais encore faut-il qu'ils les utilisent.
    Afin qu'on puisse aider la conjointe ou la famille, le militaire doit être dans nos services. On doit offrir des services au militaire. On aide sa famille indirectement dans le but d'aider le militaire. C'est ce qu'on nous demande de faire. Est-ce la meilleure chose à faire? Pourrait-on élargir ces services? Il faudrait voir, mais pour le moment, c'est vraiment en aidant le militaire.
    Si un militaire était en mission et que sa conjointe se présentait dans nos services, on ne pourrait pas l'aider. Il faudrait l'envoyer au Centre de la famille Valcartier, dans notre cas, ou aux ressources provinciales, parce que le militaire n'est pas dans nos services.
(1000)
    Je suis d'accord, je comprends votre point de vue et je n'y vois aucun problème. Cependant, je pense que l'anxiété d'une épouse à l'égard de son conjoint militaire pourrait faire en sorte qu'elle n'ose pas intervenir dans son recueillement pour savoir ce qu'il vit. Quoi qu'il en soit, c'est le mari et la femme qui vivent l'un avec l'autre, et il doit certainement y avoir de l'anxiété entre eux.
    Je suis d'accord avec vous, monsieur Gaudet, mais ce n'est pas à moi de dire ce qui est le mieux à faire. Je vous dis ce qu'on nous demande de faire. Pourrait-on en faire plus? Oui, probablement. Toutefois, ce qu'on nous demande de faire, la directive, c'est ce que je vous ai présenté.
    Pourquoi n'invitez-vous pas les familles à Chypre quand les soldats reviennent, afin qu'ils puissent décompresser ensemble?
    Ce serait intéressant. On aurait des tournois familiaux, probablement.
    Je vous pose simplement la question.
    Oui, je vais répondre à la question.
    Le but de Chypre est justement de permettre au militaire de vivre beaucoup d'émotions, tout en épargnant sa famille. Ce qui s'y passe est intense; ce qu'on y raconte est particulier.
    Je ne sais pas si vous avez déjà vu des milliers de gars qui reviennent de la guerre, mais on me dit que c'est très bien que la famille ne soit pas présente. Les militaires vivent ce qu'ils doivent vivre entre eux, ils partagent ce qu'ils ont à partager. Lorsqu'ils arrivent dans leur famille, ils ont davantage décompressé.
    Sinon, ils vont garder leurs émotions pour eux, afin d'épargner leurs conjoints. Ils ne voudront pas discuter de ces choses, alors que c'est le contraire que nous voulons. Nous voulons qu'ils puissent s'exprimer et se défouler un peu.
    Cependant, comme nous en discutions dernièrement, nous aimerions, au retour du militaire, organiser une sorte de rencontre à laquelle la famille serait invitée.
    Exactement.
    On le fait avant le départ et certaines choses sont faites après le retour. On pourrait maintenant essayer d'organiser une rencontre avec le militaire et sa famille. On va étudier ces possibilités.
    N'abandonnez pas ces idées.
    Actuellement, dans le cadre du Programme d'entraînement à la résilience, on s'est plus penchés sur le volet prédéploiement. On commence à étudier davantage le volet post-déploiement, et Mme Routhier y travaille. On est en train d'explorer ces pistes afin de voir, dans le prolongement de Chypre, où les militaires ont décompressé entre eux, ce qu'on pourrait leur offrir.
    Encore une fois, tout cela vient s'ajouter à nos tâches d'intervenants en santé mentale, sans qu'il y ait plus de personnel et où on continue de recevoir des demandes. Voilà le problème.
    J'en arrive justement à mon autre question.
    C'est seulement une petite question, monsieur le président.

[Traduction]

    Non, monsieur Gaudet. Je suis désolé. Si je vous y autorise, M. Perron prendra encore plus de temps la prochaine fois. M. Perron prend plus de temps que tous les autres.
    Monsieur Shipley, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup d'être venu nous rencontrer. C'est une bonne occasion pour nous de faire la corrélation entre les divers renseignements.
    Madame Ramsay, j'ai trouvé intéressantes les observations que vous avez faites dans votre exposé au sujet des changements qui sont apportés, entre autres en ce qui concerne l'augmentation des services de soins de santé pour les cinq prochaines années et le lien qui doit toujours exister entre les Forces canadiennes, la Défense et ACC. Franchement, je crois que c'est nécessaire. Je vais me concentrer sur ACC, et j'aimerais avoir votre avis à ce sujet, car c'est là notre mandat.
    Tout le monde dit que nous devons faire davantage. Je ne sais pas si nous atteindrons un jour l'idéal, mais cela ne nous empêche pas de vouloir être équitable et d'offrir à nos anciens combattants les services, la protection et les soins de santé dont ils ont besoin.
    Pourriez-vous nous en dire davantage au sujet des changements dans la relation entre la Défense nationale et ACC en ce qui concerne la capacité d'offrir de meilleurs services pendant la transition? Nous nous trouvons dans cet entre-deux, dans une période de transition; la question a été soulevée par M. Stoffer et Mme Hinton l'a confirmée en apportant des précisions. Pourriez-vous nous parler brièvement de ce changement dans la relation, s'il y en a eu un?
(1005)
    Il y a certainement eu un changement, à mon avis, au cours des quatre ou cinq dernières années. Nous venons de signer un protocole d'entente avec ACC. Ce protocole porte sur le réseau relatif aux TSO, et nous travaillons en étroite collaboration pour mettre sur pied un réseau de cliniques d'un bout à l'autre du pays. ACC a ouvert cinq nouvelles cliniques de traitement des TSO, et nous en avons cinq. Nous essayons d'offrir ces services dans tout le pays et de faire en sorte que les patients aient le même accès aux cliniques de l'une ou l'autre organisation.
    C'est un dossier qui évolue, et il reste encore bien des questions à régler, dont la question de la priorité d'accès et des méthodes d'évaluation clinique — c'est-à-dire si nous sommes d'accord et qui devrait être évalué à quelle clinique. Mais les choses avancent. Nous avons régulièrement des réunions avec AAC — je rencontrerai un groupe de Saint-Anne-de-Bellevue vendredi cette semaine — et nous discutons de ces questions.
    Nous allons mettre sur pied un comité consultatif qui se réunira tous les trois mois afin de conseiller le comité directeur qui se réunit à Charlottetown, où sont représentés la Défense nationale et Anciens combattants Canada. Mais il s'agit d'un réseau apparenté.
    Nous avons également inclus la GRC dans ce réseau pour le traitement des traumatismes liés au stress opérationnel. La GRC est l'autre organisation qui utilise les services de ACC. Ses membres subissent des traumatismes semblables à ceux de nos propres soldats.
    Je dois dire que nous entretenons de bonnes relations. C'est un travail qui évolue, et nous nous réunissons régulièrement.
    La base de Valcartier, qui est la plus grande au Canada — je tiens à le signaler — compte le plus de lacunes. Si un de mes patients qui est très malade doit être libéré pour cause de stress opérationnel, par exemple, je dois pouvoir compter sur une bonne équipe qui assumera les soins de ce patient.
    Comme vous le savez, au Québec, il est très difficile d'avoir un rendez-vous avec un omnipraticien ou un psychiatre. C'est un peu plus facile pour les psychologues. Mais il nous faut une équipe de soins interdisciplinaires pour les patients les plus difficiles et, à l'heure actuelle, c'est pratiquement impossible. Les anciens combattants nous parlent souvent du mal qu'ils ont quand ils quittent les forces armées en raison des lacunes du système de soins de santé.
    La clinique de Ste-Anne-de-Bellevue, c'est un bon départ, mais elle est à Montréal, pas à Québec, pas à Edmonton ni à Petawawa. Près de nos bases les plus importantes, à tout le moins, il nous faut des cliniques comme la clinique Paul-Triquet à Québec, qui connaît quand même des problèmes parce qu'elle relève en partie des autorités provinciales. Nous y avons trois bureaux et on espère pouvoir se doter de meilleures installations, dans un immeuble plus grand, mais la situation est loin d'être idéale.
    Quand on établit un profil médical permanent qui mène à une décharge médicale, je dois, tant que le patient n'a pas encore été libéré, le confier à Anciens combattants Canada afin que mon équipe et moi puissions aider les membres actifs à rester dans les forces armées.
    Si nous sommes accaparés par des patients très malades qui n'attendent que leur décharge — et c'est un processus qui peut prendre beaucoup de temps chez nous — mon personnel doit, chaque semaine, s'occuper de ces cas chroniques et la liste de ceux qui attendent d'être pris en charge s'allonge. Il faut donc qu'une équipe s'occupe des patients très malades afin que je puisse me concentrer sur les nouveaux patients. Ainsi, le traitement a de meilleures chances de succès si nous n'intervenons pas trop tard.
    J'ai une question complémentaire: on manque de professionnels de la santé pour assurer les soins ordinaires en Ontario, au Québec et ailleurs — Voilà déjà un obstacle.
    Quelqu'un a demandé l'autre jour où l'on trouve le personnel pour ces nouvelles cliniques. Où trouvez-vous les professionnels de la santé? On nous a répondu qu'on les trouvait dans le secteur privé et qu'on travaillait en collaboration avec le secteur privé.
    Quand vous envoyez vos patients à Anciens combattants Canada, ceux qui s'occuperont d'eux doivent-ils avoir une formation particulière?
(1010)
     — ce n'est pas comme soigner un parlementaire qui souffre du syndrome du stress post-traumatique?
    Malheureusement, quand un grand nombre de patients qui avaient servi en Bosnie en 1992 a été libéré et envoyé à ACC pour traitement, ACC a dû trouver beaucoup de psychologues en peu de temps et je crois que tous les psychologues n'avaient pas la compétence que nous aurions souhaitée. Ils ont fait de leur mieux, mais j'estime qu'il nous faut une équipe spécialisée pour dispenser les soins aux patients souffrant de SSPT. Il en va de même pour nous.

[Français]

    Nous, les membres des Forces canadiennes et les gens qui traitent les anciens combattants, devrions avoir des fonds particuliers nous permettant de maintenir à jour nos connaissances sur ces problèmes. C'est une grosse tâche. On regarde ce que font les États-Unis et les autres pays. On se débrouille entre nous pour envoyer l'un de nous aux États-Unis, pour aller au congrès de Sainte-Anne, mais on devrait faire cela beaucoup plus. Il faut s'assurer, pour le bien du ministère des Anciens Combattants, que les gens qui traitent nos patients lorsqu'ils sont libérés soient plus compétents qu'en ce moment. Je ne vous dis pas qu'ils sont tous mauvais, mais la qualité n'est peut-être pas idéale. Il faut que ce soit examiné de plus près.
    Il existe aussi un lien avec la connaissance du milieu militaire. Il s'agit d'un monde en soi. En y travaillant, on finit par comprendre comment il fonctionne, mais je ne sais pas combien de temps un psychologue civil — j'en suis un — qui n'a aucune connaissance de la réalité militaire et qui se met soudainement à travailler au ministère des Anciens Combattants peut avoir besoin pour finir par comprendre le jargon. Cela m'apparaît problématique, mais nous, à Valcartier ou dans les autres bases, pourrions encadrer ces gens pour nous assurer qu'ils aient une bonne connaissance de la réalité des militaires. Nous pourrions leur faire faire des stages, travailler avec le milieu universitaire. Il ne faut toutefois pas oublier que ce serait en plus des mille et une autres tâches que nous avons à faire. Là se trouve encore le véritable problème. Idéalement, nous ferions cela, mais nous ne verrions plus de patients. Quels choix ferons-nous?
     Merci.

[Traduction]

    Après les rencontres avec les représentants d'ACC, nous avons signé un protocole d'entente sur le choix des prestataires de soins aux patients pris en charge par ACC, et seuls des psychiatres, des psychologues cliniciens et des travailleurs sociaux détenteurs d'une maîtrise sont autorisés à dispenser ces soins. Nous avons dressé une liste commune de prestataires de soins en collaboration avec la Croix Bleue.
    Quand nous savons qu'un patient sera libéré, nous tentons de le diriger vers l'un de ces cliniciens afin que la transition entre les forces armées et ACC se fasse sans heurt.
    Cela aide, mais nous avons encore beaucoup de travail à faire pour trouver les prestataires de soins dans la collectivité qui ont les compétences nécessaires pour traiter le SSPT.
    On ne parle pas beaucoup du SSPT dans les écoles; c'est pour cela. Les deux plus grands défis en psychiatrie sont le SSPT et le trouble obsessionnel compulsif.
    C'est maintenant au tour de M. Cuzner. Vous avez cinq minutes.
    J'ai deux petites questions. J'apprécie les réponses franches que nous avons obtenues aujourd'hui au sujet de certains facteurs de dissuasion. On a vu la même chose dans le cas de la réforme de l'assurance-emploi qui a été modifiée de manière importante vers le milieu des années 1990. Je suis sûr que les personnes qui ont apporté ces modifications l'ont fait dans un certain but, mais tout à coup on constate des résultats et des conséquences non voulus. Certains éléments du programme avaient en fait un effet dissuasif, mais nous avons pu les éliminer après coup.
    Est-ce qu'il y a un mouvement a l'heure actuel au sein des Forces canadiennes, une évaluation en cours pour déterminer le moyen de traiter les questions relatives aux pensions? Est-ce que vous travaillez à quelque chose qui pourrait modifier la façon dont c'est administré à l'heure actuelle?
    Non?
    Ce n'est pas une question qui concerne les Forces canadiennes. Ce n'est pas nous qui leur versons leur pension. C'est le ministère des Anciens Combattants qui accorde —
(1015)
    Ah, c'est d'abord le ministère de Anciens Combattants qui les accordent? Très bien.
    — les pensions aux militaires actifs.
    Nous répétons sans cesse à notre chaîne de commandement que ce n'est pas une bonne chose, et je suis donc heureuse de vous le dire aujourd'hui, mais le militaire présente sa demande à ACC.
    D'abord à ACC? Très bien. Doux Jésus —

[Français]

    Mais ils utilisent le dossier clinique que nous préparons, au ministère de la Défense nationale. Ils utilisent donc le matériel lié au traitement dans les dossiers médicaux pour déterminer les pensions. Ce mouvement est tout à fait —

[Traduction]

    Et auparavant, ils utilisaient ces documents...
    Alors vous n'avez aucune recommandation à nous faire?
    Une recommandation?
    Avez vous une recommandation à formuler, ou non.
    Oui, c'est celle que je vous ai donnée. Nous ne devrions pas pouvoir demander une pension tant que nous en sommes pas à la veille d'être libérés. Voilà notre recommandation.
    J'ai été très heureux d'apprendre que vous recrutez activement des professionnels en matière de santé mentale à l'intention des réservistes également. Je pense que c'est un programme très utile.
    Étant donné l'augmentation du nombre de réservistes déployés en Afghanistan... En réponse à une question de mon collègue, vous avez dit que lorsque les militaires retournent à leur base, ils y ont accès à des professionnels. Qu'en est-il des réservistes qui retournent dans leurs collectivités? À quel genre de service ont-il accès? Est-ce que vous recrutez des professionnels à contrat?
    Nous faisons d'abord passer un examen préalable aux réservistes qui retournent à la base de soutien, puis ils retournent très rapidement chez-eux. Je recommande que nous ne les laissions pas retourner chez-eux tout de suite, mais qu'ils restent avec nous et continuent à travailler pendant une autre année, afin qu'ils soient près de nous. Ils seraient rémunérés et seraient sur place où nous pourrions leur apporter un soutien. Il nous serait alors plus facile de les évaluer. Ils pourraient rester dans un groupe. Ils pourraient se défouler avec les autres, au lieu de se trouver quelque part où personne ne comprend ce qui lui arrive.
    Voilà notre première recommandation. La deuxième est qu'ils reviennent à Valcartier pour une évaluation s'ils deviennent malades. C'est ce qu'ils devraient faire. Nous les évaluons. Nous formulons le diagnostic puis nous prenons des dispositions pour qu'ils reçoivent des soins près de leur domicile. Mais, malheureusement, étant donné ce qui se passe à ACC — et ça c'est une autre histoire — parfois, ils ne nous sont pas renvoyés. Ils sont encore réservistes, mais ils vont consulter dans le civil. Ils obtiennent un mauvais diagnostic rendu par un médecin civil qui n'a pas l'habitude de traiter ces problèmes.
    Supposons qu'on diagnostique à tort un cas de SSPT et que le réserviste n'obtienne pas les soins dont il a besoin pour ce dont il souffre réellement, soit un trouble d'adaptation doublé d'un trouble de la personnalité. Cela nous occasionne des difficultés avec le patient. Celui-ci revient nous voir et nous dit qu'il devrait être réformé pour raison médicale en raison du diagnostic établi par un médecin civil. Cela occasionne des difficultés entre nous.
    Les règles ont été mal établies. Ils devraient être obligés de revenir nous voir. Ils ne devraient pas être autorisés à toucher leur pension immédiatement. Nous devrions établir le diagnostic. Nous devrions les soigner de notre mieux puis prendre des dispositions pour qu'ils soient soignés dans le civil et c'est alors que ACC devrait prendre le relais. C'est un autre problème que nous avons en ce qui concerne les réservistes.
    L'autre chose qui n'est pas claire au sujet des réservistes, du moins pour moi —
    Pour moi aussi.
    Bon nombre de médecins des bases ne savent pas comment traiter les réservistes? À quel niveau de soins ont-ils droit, en fonction de leur contrat? Je pense que l'ombudsman s'y intéresse, car il est venu à notre base. C'est un problème. Les lois ne sont pas claires et j'essaie de fournir le meilleur soin possible à tous ceux qui viennent nous voir, mais les patients les plus difficiles sont ceux qui souffrent de trouble de la personnalité et ils profitent un peu du système. Ces patients constituent un défi.
    Puis, il y a ceux qui sont vraiment malades et qui ne savent pas qu'ils devraient s'adresser à nous pour obtenir les soins dont ils ont besoin. Nous faisons donc de notre mieux. Ce qu'il y a de bien, c'est que nous leur fournissons toute l'information nécessaire avant leur déploiement de sorte qu'ils savent qu'à leur retour ils devraient venir nous voir. Je ne sais pas si on fait la même chose partout au Canada, mais en tout cas nous essayons.
    Nous faisons également une évaluation quatre mois après le retour de mission et tous les réservistes sont convoqués à un examen médical et à une évaluation de leur santé mentale.
(1020)
    Mais parfois les réservistes ne viennent pas.
    Il est parfois difficile de communiquer avec eux. Nous en sommes responsables pour un an. Mais nous avons certainement constaté que les réservistes demandent beaucoup plus de services. À Terre-Neuve, nous avons déjà affecté des ressources additionnelles. À St. John's, nous avons simplement ajouté des services psychologiques. Nous avons un travailleur social à plein temps à Gander, surtout à l'intention des réservistes qui reviennent. Nous savons bien que les besoins sont plus grands dans cette base où ils viennent pour recevoir des soins.
    En outre, comme le disait Marc-André il est d'autant plus important de surveiller la qualité des soins offerts dans ces cas.
    Il est très difficile de traiter des patients qui souffrent de SSPT. Il est parfois plus facile pour un médecin de famille de leur accorder un congé de maladie ou de leur prescrire une pilule ou pour un psychologue de s'apitoyer sur leur sort. Mais ce n'est pas ainsi que nous sommes censés les traiter.
    Nous avons donc créé un groupe de personnes qui se sentent inutiles, qui ont le sentiment de ne plus pouvoir travailler. Elles veulent simplement dire qu'elles n'ont pas été bien traitées, etc. Ce n'est pas ainsi que les choses sont censées se passer. Les gens sont censés guérir et recommencer à jouer un rôle actif dans la société. C'est un problème. Nous devons examiner de quelle manière les soins sont fournis partout et nous devons pouvoir les surveiller autant que possible, avec l'aide de personnes comme Pascale Brillon et Stéphane Guay.
    Nous ne parlons même pas d'un retour au travail. Nous disons qu'ils doivent continuer à travailler même malades et en traitement, parce que nous savons que plus les gens sont longtemps en congé, moins ils ont de chance de se rétablir et de retourner au travail. C'est donc quelque chose qu'il faut promouvoir.
    Et je pense que nous y arrivons. Nous avons un programme de retour au travail dans la plupart des cliniques, mais cette même mentalité n'existe pas dans le secteur civil. Un bon nombre de médecins trouvent tellement facile d'accorder des congés de maladie. C'est très difficile de pratiquer correctement la médecine et de dire à quelqu'un qu'il est temps qu'il retourne travailler, sans quoi il va se retrouver dans son sous-sol à boire, à avaler des pilules et à se dire qu'il ne vaut rien.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Sweet qui disposera de cinq minutes.
    Madame Ramsay, vous nous avez parlé d'une étude qui avait été faite en 2002. Savez-vous quel est l'échantillonnage qui avait été utilisé dans les forces armées?
    Il s'agissait de 5 000 membres des forces régulières et de 3 000 réservistes.
    C'est un échantillon substantiel.
    En effet, très substantiel.
    Nous avions demandé à Statistique Canada de s'en charger, d'abord parce que cet organisme est indépendant et ensuite parce que tout était confidentiel. Il n'y a donc pas eu d'archivage permanent. Tout cela a été conservé à Statistique Canada.
    Très bien. Je voulais simplement connaître la taille de l'échantillon —
    En effet, c'était bien cela.
    — pour savoir si on pouvait s'y fier. Mais un échantillon de 5 000, c'est très bon.
    Major, vous nous avez dit qu'il était extrêmement difficile de soigner le SSPT. Peut-on dire qu'un comportement obsessionnel-compulsif est quelque chose du même ordre, et est-ce la raison pour laquelle il y a tellement peu de psychiatres et de psychologues auxquels on puisse faire appel?
    Ce que nous savons en psychiatrie, c'est que ces deux troubles de l'anxiété sont parmi les plus difficiles à soigner et à bien soigner. Il faut que nous soyons à la fine pointe dans ce domaine, il faut avoir la formation nécessaire, mais également poursuivre les études médicales à ce sujet. Lorsqu'il s'agit de AAC, il faut vraiment avoir la certitude que le psychologue du village de Saint-Meumeu-des-Creux peut soigner ce genre de cas, et c'est extrêmement difficile. Si nous pouvions par conséquent avoir ces grosses cliniques dotées de tous les experts et si nous pouvions avoir la certitude que lorsque nous y envoyons des patients, c'est là qu'ils seront le mieux traités, c'est cela que je voudrais.
    Mais pour vous qui êtes une professionnelle, avez-vous le sentiment que les psychiatres et les psychologues répugnent probablement un peu à se spécialiser dans ces cas en raison de la difficulté et de la complexité aussi de ce genre de pathologie, est-ce bien cela que je dois comprendre?
    En tout cas, il est difficile de trouver des psychiatres.
(1025)

[Français]

    C'est à cause du volume de la clientèle. Dans les Forces canadiennes, la consultation pour motif de stress post-traumatique est assez fréquente. Lorsqu'on pratique dans le milieu civil, on constate des cas de stress post-traumatique mais ils ne sont pas liés aux opérations militaires. Le contexte est différent et les types de traumatisme sont différents. Pascale Brillon vous a expliqué qu'il peut y avoir plusieurs traumatismes qui sont vécus durant une longue période de temps. Cette réalité fait que oui, on peut détecter des traumatismes chez les policiers, chez les pompiers, mais que la réalité des soldats est vraiment particulière.
    En ce qui a trait à la question de demeurer à la fine pointe des connaissances, il faut dire que notre volume de clientèle nous permet d'acquérir ce genre d'expertise. Toutefois, en ce qui concerne la formation — c'est un aspect que je considère important —, il faut demeurer à la fine pointe du savoir-faire, compte tenu de la particularité de notre mandat. Mais on gratte les fonds de tiroirs pour pouvoir obtenir des budgets de formation et cela est assez scandaleux. On a le devoir de se maintenir à la fine pointe des connaissances, et quand il y a des colloques internationaux, des événements importants, on tire presque à la courte paille pour déterminer qui aura la chance d'y aller. C'est un réel problème.

[Traduction]

    Très bien. Vous nous parlez également d'un budget de formation pour vous permettre de préparer vos propres professionnels là-bas, c'est cela?
    En effet.
    Et aussi le ministère.
    Ce que vous nous avez dit nous a beaucoup plus encouragés au sujet du déploiement de nos soldats et du genre de formation que vous leur dispensez afin de les rendre en quelque sorte plus résistants, comme vous l'avez vous-même dit.
    Vous en avez dit un mot, mais je voudrais plus de précision : effectue-t-on actuellement des recherches dans deux directions, la première étant l'élargissement des prédicteurs? La plupart des prédicteurs sont externes, c'est bien cela? Il s'agit de toxicomanies, de cas où le patient a été victime d'abus dans sa jeunesse, ce genre de choses. Vous n'en avez signalé qu'un, un caractère intransigeant du point de vue des éléments existentiels dans leur esprit. Fait-on actuellement des recherches pour élargir la palette des prédicteurs de manière à ce que les psychiatres et les psychologues puissent peut-être offrir une formation aux travailleurs sociaux qui pourraient ainsi fouiller plus loin pour déterminer si le patient va ou non réagir? En fait c'est cela la nature de la chose. C'est une réaction au traumatisme qui est dépourvu d'élasticité et qui devient, bien entendu, un problème de comportement ou un problème psychologique. À votre connaissance, y a-t-il des recherches sur ce sujet?
    Quand au second élément, a-t-on fait déjà des recherches au sujet de la sensibilisation, peu importe le terme que vous voudrez utiliser, j'entends par là soumettre le soldat au genre de stress qu'il va connaître là-bas, pour lui donner le moyen d'y mieux résister le moment venu? Je sais qu'il y a des manoeuvres, des jeux de guerre en quelque sorte, mais cela, c'est pour leur propre personnel. Ce n'est pas, comme le faisait remarquer un des témoins, comparable au fait de voir un jeune garçon de 9 ans bardé de cartouchières, ou au fait d'avoir soi-même à tuer quelqu'un. C'est quelque chose qui, dans notre culture, est totalement obscène.
    Voilà donc les deux questions que je vous soumets.

[Français]

    Je ne suis pas chercheur. C'est une question qu'il aurait été intéressant de poser à Stéphane Guay, par exemple, qui fait de la recherche vraiment spécifique à ce sujet. Il se fait sûrement de la recherche dans ce domaine, j'en suis convaincu, mais je ne pourrais vous dire de quel genre et ce qui se fait exactement.

[Traduction]

    À Valcartier, il y a un centre de recherche à côté de chez nous. On y trouve une salle virtuelle. C'est une autre initiative que nous avons. Nous avons assisté à une séance de cyberthérapie, avec des gens de l'armée américaine qui étaient là pour assurer la formation. On entre dans la salle virtuelle et on est trois dimensions — avec le plafond et le plancher. Et vous êtes littéralement sur les lieux. C'est là où nous aimerions nous mettre en relation avec le centre de recherche, et c'est ce que nous avons commencé à faire. Mais ici encore, nous le faisons pendant nos temps libres, et nous n'en avons guère.
    L'un de nos psychologues essaie de voir s'il ne serait pas possible de conduire un programme de formation qui pourrait précisément aider à renforcer la résistance des gens, en leur montrant par exemple des morts et en leur apprenant à réagir — Nous aimerions également utiliser ce centre pour présélectionner les gens avant leur déploiement. Si quelqu'un ne réagit pas bien dans la salle virtuelle, c'est qu'il n'est sans doute pas apte à aller en opération.
    Il y a donc des pistes possibles pour nous, mais pour l'instant, nous n'avons pas assez de gens pour faire tout cela. Nous aimerions pouvoir le faire. Il y a des recherches en cours, mais pas chez nous pour l'instant.
    Je pense que nous allons coopérer avec ce centre de recherche pour l'utilisation de la salle virtuelle. Les recherches vont alors pouvoir en découler.
(1030)
    Ce qui était très encourageant, c'est que vous êtes en train de mettre en place ces équipes de professionnels. Avez-vous visité les grands établissements canadiens pour leur parler précisément de cette pénurie de psychologues et de psychiatres?
    Tout à fait. Nous faisons tout le temps ce genre de choses pendant les grands congrès. Il y a d'ailleurs un colloque qui aura lieu en mai à Saint-Anne-de-Bellevue et où nous aurons un kiosque de recrutement à la fois pour les Ressources humaines et pour les Ressources humaines des Forces canadiennes.
    Nous pourrions facilement utiliser davantage de gens, mais on ne nous le permet pas. Notre organigramme ne nous permet pas de recruter. Je sais que les pouvoirs publics sont en train d'examiner cela. On y travaille. Il faudra voir si nous sommes efficaces et jusqu'à quel point nous le sommes avant que nous puissions avoir davantage de gens dans cette spécialité. C'est ce que nous souhaiterions. Je pense que nous aurions des psychiatres et des psychologues civils à nos côtés, parce que cela donnerait une équipe intéressante et dynamique à la fois. Mais pour l'instant, je ne puis que vous parler du cas de Valcartier, et je sais bien que nous devrions pouvoir élargir notre organigramme.
    Nous validons cela au fur et à mesure en procédant base par base pour voir quelle est la bonne combinaison et quel est le bon nombre de cliniciens qu'il faudrait pour chaque base.

[Français]

    En ce qui touche Valcartier, cela soulève également un problème d'infrastructure parce que, même si on avait ce personnel, il faudrait l' installer dans le stationnement ou sur le toit dans le moment. Nous n'avons pas les locaux nécessaires.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Stoffer, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame, vous serait-il possible de nous communiquer les questions qui ont été posées pendant ce sondage?
    Certainement.
    Ce serait très utile pour nous d'avoir cela. Ce serait intéressant de voir les questions posées à ces 5 000 et à ces 3 000 membres des deux corps.
    Par ailleurs, quel est l'âge moyen des prestataires de soins pour les différents groupes que vous avez identifiés au MDN?
    C'est très variable. Encore la semaine dernière, j'étais à Esquimalt où deux de nos psychiatres vont prendre leur retraite — réduisant un peu leurs heures de travail pour ne travailler qu'à mi-temps — mais nous y avons aussi de très jeunes gens qui viennent d'arriver.
    La seule chose que nous recherchons généralement, c'est l'expérience. Nous ne recrutons pas des gens fraîchement diplômés de l'université. Nous n'avons toujours pas de programme de mentorat. En général donc, nous sommes plutôt à la recherche de psychologues cliniciens qui ont entre trois et cinq ans d'expérience, c'est pareil pour les travailleurs sociaux.
    C'est différent dans les forces armées. Nous formons notre propre personnel par le truchement de programmes de formation conduits dans les universités, et puis nous avons nos propres programmes de mentorat.
    Je sais ce que la plupart des politiciens font après une dure journée passée à parler à leurs électeurs et à croiser le fer à la Chambre des communes, mais qui s'occupe de vous? Je suis sûr que si quelqu'un défonce votre mur à coups de poing, vous menace ou n'arrête pas de vous harceler, pas une seule fois, mais encore et encore, cela doit être très difficile pour vous et pour votre famille. Ne vous sentez pas obligé de répondre si vous considérez que c'est trop personnel.
    Mais à part le sport et cette camaraderie qui vous permettent de vous vider le coeur entre vous, lorsque vous arrivez chez vous le soir, vous êtes parfois tout seul. J'imagine que vous revivez votre journée et que cela doit être très stressant. Alors qui donc s'occupe de vous?
    Voulez-vous répondre à cela?
    Ce dont je me suis rendu compte au sujet des médecins militaires, c'est que nous avons plutôt tendance à ne pas consulter ces gens-là, parce que nous leur envoyons nous-mêmes nos patients. Par conséquent, si nous tombons malades, ce n'est pas eux que nous allons consulter. Nous allons plutôt consulter un psychologue civil, quelqu'un qui est plus âgé et qui a de l'expérience, quelqu'un qui va pouvoir s'occuper des médecins militaires. En règle générale, pour ce qui est des autres professionnels comme le personnel infirmier, les travailleurs sociaux et les autres professions médicales, cela ne leur fait rien de les consulter. C'est uniquement pour le personnel en uniforme.
    Nous avons connu des cas où des gens — un médecin-chef, un psychiatre militaire, tombaient malades, et c'est toujours un problème. Il est presque impossible de soigner un collègue ou la personne qui est censée être votre patron. Nous essayons donc de faire preuve d'ingéniosité. Nous essayons d'aller consulter un médecin-chef d'une autre base qui vient chez nous. Nous faisons ce genre d'arrangement ou alors nous avons des médecins civils spécialement pour nous.
    Pour ce qui est du volet civil, je vais laisser Marc-André répondre.

[Français]

    Comme employés de la fonction publique, on a accès à des programmes d'aide aux employés grâce auxquels on peut consulter des professionnels de la santé. Avec un mandat aussi lourd, le travail d'équipe prend alors tout son sens. L'interdisciplinarité que nous exerçons dans le travail est importante. Par exemple, si le cas d'un patient est particulièrement difficile, on peut en parler avec notre collègue qui est dans le bureau à côté, qui est psychiatre et qui voit également ce patient, ou avec le travailleur social qui connaît la famille, etc. Les ressources dans le secteur civil n'ont pas cette capacité.
    Le psychologue en pratique privée est dans son bureau, isolé, et voit également un grand nombre de patients. Il peut téléphoner à ses collègues, mais on sait que la distance physique entraîne un éloignement qui fait en sorte qu'il n'osera peut-être pas le faire. Comme équipe, ce qui est avantageux pour nous, c'est qu'on a régulièrement des réunions au cours desquelles on partage nos idées au sujet des cas difficiles et au cours desquelles on se donne le droit de « ventiler », comme on dit dans notre jargon. On a la liberté de dire qu'on trouve cela dur et on peut se permettre d'exprimer des choses qu'on n'exprime évidemment pas devant le patient. Les réunions servent aussi de soupape, ce qui est très, très important.
    Le problème, c'est que la surcharge de travail fait qu'on n'a plus le temps de se parler. À Valcartier, par exemple, lors de nos réunions, il manque généralement de 25 à 30 p. 100 des personnes, si ce n'est pas davantage, parce que des gens sont en train d'offrir des formations aux militaires qui partent en mission, alors que d'autres mènent des entrevues prédéploiement ou post-déploiement. Ceci crée une forme d'essoufflement qui, malheureusement, fait que notre travail ressemble un peu à celui qui se fait dans le civil.
    Il ne faut pas en arriver là. Il faut se donner un milieu de travail dans lequel on pourra dire que les gens se consacrent à la clinique, qu'on a du temps pour se réunir et que ce temps est sacré. On n'arrive cependant pas à le faire parce qu'on est trop sollicités.
    Contrairement à ce qui se fait dans un centre hospitalier ou chez quelqu'un qui travaille dans le civil, en tant que professionnels de la santé, cela fait partie de nos tâches que de rencontrer les militaires et de les préparer à leur mission. La prévention est très importante. Une partie de nos tâches est de les rencontrer avant qu'ils partent en mission, de parler à leurs conjointes pour vérifier que tout est en ordre. Une partie de nos tâches est aussi de les accueillir à leur retour. Présentement, 2 400 militaires s'apprêtent à partir, ce qui fait beaucoup de monde. Si on mène une entrevue d'une heure et quart de prédéploiement avec 2 000 personnes, en plus de celles qu'on fait en thérapie, on tient tout cela à bout de bras et il devient alors dangereux de s'épuiser.
(1035)
    En ce qui touche vos intervenants

[Traduction]

qui travaillent avec ACC, ils n'ont pas ce que nous essayons d'avoir. C'est la raison pour laquelle nous devons ouvrir ces cliniques où ils pourront se consulter mutuellement. Nous devons envoyer en ville certains de nos membres en service actif parce que nous ne sommes pas en nombre suffisant pour eux. Par contre, nous sommes en liaison avec les psychologues, et nous les payons pour qu'ils viennent nous rencontrer à Valcartier lorsque nous organisons des réunions interdisciplinaires. Ils peuvent donc également se confier à nous.
    Merci, monsieur Stoffer.
    Nous passons maintenant à Mme Hinton qui disposera de cinq minutes.
    Je vous remercie.
    La journée a été fort intéressante. Je n'ai jamais vu ici de témoins que je trouvais inintéressants, mais cette fois-ci, cela a été également très instructif.
    Je vous livre le fruit de ma réflexion. Il arrive également qu'un auto-examen nous aide à comprendre que nous souffrons de stress, que nous avons un problème qui nécessite de l'aide. J'aimerais savoir si l'on encourage ce genre d'auto-examen. Voilà le genre de question que je voudrais vous poser.
    Juste un commentaire qui vous paraîtra peut-être un peu stupide, mais chaque fois que le micro-ondes s'arrête chez moi, cela m'angoisse. Je ne parvenais pas à comprendre pourquoi jusqu'à ce que je me sois même livré à un petit auto-examen. Lorsqu'on est député, c'est la fameuse cloche de convocation qui régit toute notre vie. La cloche sonne, et plus elle sonne vite, moins on a de temps pour arriver à la Chambre. Cela provoque de l'angoisse. On ne veut pas être en retard pour ceci ou cela ou que sais-je encore. Un jour, mon four à micro-ondes s'est arrêté et mon mari m'a demandé pourquoi cela me perturbait tellement, parce qu'après tout c'est une toute petite chose. Et c'est alors que je me suis enfin rendu compte que c'était exactement cela, c'est à cause des cloches qui sonnent ici. Vous savez, c'est très pavlovien comme réaction.
    Il est arrivé plusieurs fois chez les militaires qu'un événement tout à fait ordinaire, tout à fait normal dans le quotidien, déclenche chez eux une réaction très particulière, et j'aimerais savoir ce que le major ou M. Dufour —

[Français]

    Le Programme d'entraînement à la résilience, dont je vous ai parlé plus tôt, comprend également un volet pairs aidants. À la limite, même si le militaire est plus ou moins conscient de ce qu'il est en train de vivre, on essaie de former des gens au sein des unités, idéalement des gens du même grade, qui vont l'alerter. On appelle cela le buddy system. En d'autres mots, il y a une personne qui porte attention à une autre, son buddy, et qui va lui dire que quelque chose ne va pas, qu'elle ne se comporte pas comme à l'habitude et qui va lui demander si elle est consciente de cela.
    À Valcartier, on a aussi des comités de prévention du suicide, des comités sur la violence dans lesquels sont engagés des militaires qui se trouvent au sein des unités. Ce sont un peu nos  yeux sur le terrain, si on veut. Ils peuvent se rendre compte si quelqu'un ne va pas bien. On s'assure même que les photos des thérapeutes soient affichées quelque part. Il est ainsi possible d'identifier, par exemple, la personne qui s'occupe de toxicomanie.
    Au cours de l'entrevue post-déploiement, à leur retour, les militaires remplissent un questionnaire d'auto-examen dans lequel différents symptômes sont décrits. La personne doit indiquer, par exemple, si elle sursaute si telle situation se présente, si cette réaction correspond beaucoup ou pas beaucoup à celle qu'elle aurait. Donc, cela est fait à leur retour et c'est important parce qu'ils n'ont pas toujours le temps de s'arrêter et de prendre conscience de ce qu'ils vivent. Les présentations que nous offrons vont un peu en ce sens. Les militaires s'y reconnaissent. Le fameux Battlemind de M. Castro, dont je parlais tout à l'heure, en est un exemple. J'ai des clients qui ont vu cette présentation et cela les interpelle grandement parce que, par exemple, on peut y voir un militaire s'adresser à son fils un peu de la même façon qu'il s'adresserait à quelqu'un d'un grade inférieur. Son ton est très sec, très directif, ce qui serait tout à fait opportun en théâtre opérationnel, mais lorsqu'il s'agit d'un garçon de cinq ans qui veut jouer avec son père, il faut que ce dernier change de ton. Il faut qu'il s'adapte. Ce sont des scènes de la vie des gens, et c'est donc plus facile pour le militaire de se reconnaître dans ces situations. Cela favorise cet exercice de remise en question et de demande d'aide, évidemment, parce qu'en même temps, on fait la promotion des services de santé. Il faut être en mesure de remplir son mandat.
(1040)

[Traduction]

    Peut-être ne serez-vous pas à même de répondre à ceci, et je n'essaie nullement de vous mettre sur la sellette, mais 7,2 p. 100 représente un chiffre relativement élevé, et cela uniquement pour les cas de dépression et de trouble panique, c'est cela que je vous ai entendu dire. Ce chiffre représente deux fois la moyenne normale au Canada. Je suis sûre que si on prend par exemple le cas des pompiers, et c'est un excellent exemple, ils doivent entrer dans des bâtiments en feu, ils savent qu'ils mettent leur vie en jeu, ils doivent souvent sortir des flammes des enfants qui ont été asphyxiés par la fumée et qui en sont morts, ou qui voient des gens brûler vif. Cela doit être horrible. Avez-vous fait des comparaisons entre les pompiers et les militaires pour ce genre de chiffres?
    Je dirais que si on regarde non pas dans ce livre-là mais dans l'autre, celui de Pascale Brillon, on peut voir qu'elle signale quelques études à ce sujet. On pourrait avoir des pourcentages, mais ces pourcentages varient d'une étude à l'autre. Après exposition à un traumatisme, il y a environ 15 p. 100 de risques de souffrir de stress post-traumatique, peu importe qu'on soit militaire ou non. Si je me souviens bien, je pense qu'elle signale quelques caractéristiques, et je dirais donc qu'il doit y avoir des chiffres à ce sujet quelque part, mais je n'en suis pas sûre.
    L'étude de Statistique Canada ne s'est pas consacrée à cela, par contre elle reposait sur un très bon échantillonnage, c'est-à-dire 5 000 personnes, mais sur ces 5 000, combien y en avait-il de la marine, de l'aviation et de l'armée de terre? C'est un autre élément que je voulais signaler à votre attention. Si les 5 000 en question appartenaient tous à l'armée de terre, les chiffres seraient peut-être différents maintenant.

[Français]

    Ce que je vais vous dire ne s'appuie pas sur une recherche, mais je crois que le fait d'être éloigné de son réseau social naturel n'est probablement pas un facteur de protection du stress post-traumatique. Vivre des événements qui sont difficiles dans son métier n'est pas simple, mais si on peut arriver le soir à la maison et être auprès de ses proches et appeler un ami, ce sont des facteurs de protection. La possibilité, par exemple, pour un pompier qui perd un collègue dans un incendie d'en perdre un autre le lendemain et encore un autre trois jours plus tard est beaucoup plus faible que celle de vivre une situation semblable en Afghanistan, où les morts surviennent de façon régulière et constante. Ce sont des traumatismes qui se répètent dans un contexte où les soldats sont éloignés de chez eux. La vie militaire exige une énorme capacité d'adaptation. C'est tout à fait normal; il faut que cela soit comme cela. Mais il reste que sur le plan de la santé mentale, c'est quand même un exercice très exigeant. C'est mon opinion.

[Traduction]

    Monsieur Perron, vous avez cinq minutes.

[Français]

    On va m'accuser de parler trop et de parler vite.
    Chantal, j'ai bien apprécié votre formidable énoncé. Vous vous êtes plainte, sûrement avec raison, d'un manque d'argent. Je ne dirais pas que je suis mal à l'aise, mais je me demande comme il se fait que la Défense nationale, qui est prête à investir des milliards de dollars pour des avions, des chars, des souliers, des bottes, des uniformes, ne peut pas réserver 0,5 ou 1 p. 100 de son budget pour la santé mentale.
    J'aimerais que vous fouilliez cela et que vous m'envoyiez une lettre ou un rapport qui dirait que votre budget idéal en santé mentale s'élèverait à un certain nombre de milliers ou de dizaines de milliers ou de millions de dollars. J'aimerais que l'on me soumette des chiffres. Je sais que ce n'est pas facile.
(1045)
    D'après moi, la santé mentale, ce n'est pas seulement le service de santé mentale, dont Mme Ramsay est responsable. C'est la santé en général.
    La santé en général.
    C'est tout notre groupe de santé. Cela inclut les médecins de première ligne, les medics, les infirmières, l'infrastructure, les bâtiments et les véhicules. Notre budget englobe tous ces éléments et il sert également à éduquer ces gens. Aujourd'hui, on parle plus précisément de la santé. Ce n'est pas moi qui fais les règlements.
    Vous pouvez nous donner un chiffre approximatif.
    J'ai l'impression que le médecin-chef des forces armées, Mme Kavanagh, notre grande patronne, pourrait vous dire la part du budget qui est allouée aux services de santé. Je n'ai pas ces renseignements, mais Mme Ramsay pourrait peut-être compléter.

[Traduction]

    Le comité de gestion du projet nous avait donné 98 millions de dollars pour ces augmentations dont je vous ai parlées dans les notes d'information, c'est-à-dire pour ajouter 218 personnes à l'effectif et améliorer un peu l'infrastructure. Tout cet argent, nous le dépensons assurément. Par conséquent, si on compare cela aux autres éléments du système de soins de santé, nous avons été relativement bien traités financièrement parlant. Mais c'est une industrie en expansion rapide et nous pourrions toujours utiliser davantage d'argent.
    Ces cliniciens sont très coûteux à engager. Un psychiatre gagne entre 250 000 $ et 300 000 $. Ce sont des ressources coûteuses à acquérir, mais le CGP nous a relativement bien traités en nous donnant ces 98 millions de dollars pour cinq ans en avril 2004.

[Français]

    Combien y a-t-il de soldats à Valcartier? Marc-André ou Chantal, combien de collègues s'occupent de la santé? Est-ce un rapport de 1 à 10, de 1 à 100, de 1 à 1 000 ou de 1 à 10 000? Si vous n'avez pas la réponse, vous pourrez nous la faire parvenir.
    Les chiffres varient selon la saison. À l'été, les cadets et la réserve viennent à Valcartier. On traite entre 7 000 et 9 000 patients, y compris ceux de la réserve.
    Il y a une trentaine d'intervenants en santé mentale, ce qui inclut toutes les professions.
    Pour 7 000 patients?
    Oui. Il ne s'agit pas de 7 000 personnes de la population générale. On aurait peut-être les effectifs nécessaires en temps de paix, en temps normal. Il faut ajuster nos effectifs en fonction de la mission en Afghanistan. La mission en Afghanistan change la donne. Les entrevues prédéploiement sont plus longues et le niveau de dangerosité est plus élevé, de sorte que les militaires sont plus anxieux. Au retour, il y aura probablement plus de demandes de consultation. On doit donc s'ajuster afin d'offrir des services de santé mentale qui soient mieux adaptés à l'Afghanistan.
    Merci beaucoup. Cela a été fort intéressant et j'ai appris beaucoup de choses.
     Voici une autre chose que je pourrais vous suggérer. Pascale nous a dit avoir de la difficulté à recruter des psychologues et des psychiatres dans la société, mais surtout des psychologues compétents qu'on pourrait former. On pourrait discuter avec les associations de psychologues des différentes provinces afin qu'elles forment des jeunes mieux adaptés au service militaire. La plupart des psychologues qui sortent de l'université sont des généralistes.
    Il n'y a pas de lien entre le milieu militaire et universitaire, effectivement. Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je suis un peu intrigué. Avez-vous bien dit qu'un psychologue gagne entre 250 000 $ et 300 000 $?
    Non, un psychiatre, un médecin.
    C'est fascinant. Je n'en reviens pas. Uniquement pour ceux qui travaillent dans les bases?
    En effet. Ce sont les psychiatres civils que nous engageons.
    Je vous remercie beaucoup.
    Mesdames et messieurs les témoins, il y a encore quelqu'un qui va poser des questions peut-être, mais c'est de sa motion dont nous sommes saisis, et il s'agit donc de quelque chose qui concerne les travaux du comité.
    S'il y a consensus, nous pourrions en traiter avec les autres témoins.
(1050)
    Très bien.
    Nous avons donc quelques questions qui concernent les travaux du comité et j'aimerais donc remercier les témoins qui ont comparu aujourd'hui. En ce qui me concerne, je le sais, ces comparutions m'apprennent toujours quelque chose. Ce que j'ai appris aujourd'hui, c'est qu'un de ces jours il va falloir que j'aille à Valcartier pour visiter la base.
    Je vous remercie énormément d'être venu nous donner ainsi une idée des changements que nous pourrions apporter, notamment aux différents programmes.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant cinq minutes.

    Nous allons maintenant parler de la motion de Mme Hinton.
    Gilles a posé la question du rapport, de l'adoption et ainsi de suite, mais je vais plutôt lui demander d'en faire une motion, une motion dont nous nous saisirons une prochaine fois.
(1055)

[Français]

    Monsieur le président, je peux donner aux membres du comité mon point de vue. On peut ne pas en discuter ici et en discuter en dehors de la réunion. Je présenterai officiellement une motion à cet égard. J'ai discuté avec le président ce matin afin que le rapport sur un ombudsman soit adopté par la Chambre. On pourra en discuter à un autre moment.

[Traduction]

    Le greffier me rappelle que nous avons une téléconférence à 9 h 30 lors de notre prochaine réunion. Donc nous aurons une demi-heure de 9 heures à 9 h 30. Si M. Perron le souhaite, il pourra le présenter. J'espère qu'il le fera par écrit. Je pense que c'est une idée intéressante, mais aujourd'hui nous sommes saisis de cette motion.
    Mme Hinton a donné avis de la motion qui suit :
Que, conformément à l'article 97.1 (1) du Règlement, le comité présente un rapport réclamant une prolongation de 30 jours de séance pour terminer son examen du projet de loi C-287 — loi instituant la journée nationale des Casques bleus.
    Souhaitez-vous prendre la parole sur la motion?
    Si je souhaite prendre la parole? Eh bien, oui.
    Elle est assez simple. Je pense qu'il est important, puisque la question nous a été renvoyée, de discuter du projet de loi de M. St. Denis. Nous n'avons pas encore eu le temps de nous en occuper. Pour pouvoir l'étudier, il nous faudra une prolongation de 30 jours.
    Je pense que tout député qui présente un projet de loi peut légitimement s'attendre à ce que le comité auquel il est renvoyé en discute. Si nous ne l'étudions pas, nous aurons manqué à notre responsabilité envers M. St. Denis et c'est pourquoi je demande une prolongation de 30 jours pour que nous puissions l'inscrire à notre programme et en discuter.
    Allez-y, monsieur St. Denis.
    Tout d'abord, j'aimerais poser une question de procédure au greffier. Quelle est la date limite à laquelle nous devons avoir terminé l'étude du projet de loi?
    Je crois que c'est le 2 mai.
    Très bien, le 2 mai. Combien de réunions nous reste-t-il d'ici au 2 mai?
    Il y en a deux jeudi et mardi. Très bien. Avons-nous prévu des témoins pour ces deux séances?
    Nous avons prévu des témoins seulement pour la séance de jeudi prochain, par téléconférence.
    Alors, nous n'avons rien de prévu pour mardi?
    Jeudi prochain est libre également.
    Ainsi que mardi prochain, c'est-à-dire le 1er mai.
    C'est exact.
    Pour ma part, je pense que tous nos travaux sont importants. Vous pouvez établir un ordre de priorité si vous le souhaitez, mais je pense que dans le cas d'un projet de loi d'initiative parlementaire, le comité n'a pas à se prononcer sur son bien-fondé. Il a le devoir d'examiner les projets de loi d'initiative parlementaire qu'il reçoit au fur et à mesure. Je ne sais pas si nous sommes libres mardi. J'aimerais dire à Betty que je ne pense pas qu'il faille plus d'une réunion pour adopter ou rejeter ce projet de loi. Nous pourrions l'étudier mardi et nous n'aurions pas besoin de le reporter.
    Si nous le reportons encore 30 jours, cela nous amène en juin, et puis qui sait jusqu'à quelle date ça pourra nous mener? En fait, je ne suis pas d'accord avec Betty sur ce point.
    Je pense que si nous n'adoptons pas cette motion pour demander une prolongation de 30 jours nous n'aurons pas la chance d'en discuter. Je n'ai pas d'objection à ce que l'on fasse mardi ou jeudi prochains — ça me va — mais si cette motion n'est pas adoptée, nous n'aurons peut-être pas le temps. J'essaie de vous donner l'assurance que nous en discuterons.
    À défaut d'une motion à cet effet, le comité sera réputé avoir fait rapport du projet de loi, alors rien n'est perdu, d'une manière ou d'une autre.
(1100)
    Nous devons en discuter en comité.
    Je ne dis pas le contraire.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Stoffer.
    Est-ce que je peux proposer un amendement de pure forme nous engageant à débattre de ce projet de loi mardi prochain?
    Est-ce un amendement de pure forme?
    Je ne pense pas que nous puissions modifier cette partie. Il ne s'agit que d'un détail technique. Je le propose de cette façon parce que c'est la façon habituelle de le faire. Je n'ai pas de problème, et je ne pense pas que personne n'y verrait d'inconvénient si nous discutions de la question la semaine prochaine, mais ça ne peut être un amendement de pure forme parce que c'est quelque chose de particulier —
    Allez-y, monsieur Perron.

[Français]

    J'ai une question à poser au greffier. Tu contrôles l'horaire des réunions. Peut-on en discuter mardi ou jeudi prochain? Sinon, quand pourrons-nous discuter au plus tôt de ce projet de loi?
    Cela dépend du temps dont le comité a besoin pour en discuter.
    Je suppose que cela peut prendre quelques heures, guère plus, car c'est un projet que —
    On pourrait tenir une réunion complète afin de discuter du projet de loi. On peut aussi en discuter à la fin d'une réunion, pendant une demi-heure ou quelque chose du genre. Cependant, si la motion n'est pas adoptée, on en fera automatiquement rapport à la Chambre, sans amendement et sans en avoir discuté, ce qui aura le même effet que d'en discuter. Vous comprenez ce que je veux dire?
    Je comprends. Il y a plusieurs détails techniques que je ne connais pas. C'est votre domaine.
    D'accord. J'espère que j'ai répondu à votre question.

[Traduction]

    Un instant, s'il vous plaît. Je vais donner la parole à M. St. Denis et puis à M. Stoffer.
    Si j'ai bien compris la motion de Betty, il s'agit de protéger le droit du comité de discuter de ce projet de loi. Sachant que le projet de loi figure au programme de mardi, nous sommes tous d'accord avec la prolongation, qui ne sera peut-être pas nécessaire. C'est là comme mesure de sécurité. Ce n'est pas nécessaire de l'inclure comme amendement de pure forme, bien que j'apprécie la modification de Peter. Alors, ça me va.
    Très bien. Il n'y a rien de sournois ici. C'est simple et direct.
    Monsieur Sweet.
    Si tous les membres du comité croient, comme c'est le cas pour M. St. Denis, que nous pouvons aller de l'avant et approuver ce projet de loi, alors qu'il soit inscrit à l'ordre du jour de la réunion de mardi. En fait, ma préoccupation, c'est que si nous l'examinons mardi, mais que nous ne l'approuvons pas, nous n'aurons pas la latitude de reporter l'examen et de continuer la discussion plus longuement — le projet de loi contient certains éléments dont j'aimerais discuter. Donc, si tout le monde est du même avis, et si nous sommes prêts à aller de l'avant, je n'aurai pas d'objection.
    Monsieur Stoffer.
    Je me demandais tout simplement, pourquoi les 30 jours? Y a-t-il une raison technique pour laquelle il faut 30 jours et non pas sept jours, par exemple? Y a-t-il une raison particulière pour cela?
    Je pense que c'est tout simplement une formule d'usage.
    Ah, c'est une formule.
    Une voix: C'est dans les Règlements de la Chambre.
    Très bien. Je crois que nous avons un consensus sur cette question, à savoir que nous en débattrons mardi prochain.
    Y a-t-il consentement unanime?
    Je crois que oui.
    Très bien, la séance est levée. Nous nous reverrons jeudi.