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Merci beaucoup de m'avoir invitée à vous parler de cet importante question. Je remercie également le comité d'avoir décidé d'étudier la question de l'obésité juvénile cet automne.
Je suis géographe de la santé. J'étudie donc l'influence du lieu de vie sur l'état de santé. Mes recherches portent surtout sur la façon dont le contexte du quartier influence l'obésité juvénile en structurant des occasions de se livrer à des activités qui favorisent ou au contraire freinent le gain de poids.
On m'a invitée à comparaître aujourd'hui pour présenter les résultats de mes recherches sur les influences socioéconomiques du quartier sur l'obésité juvénile. L'étude a paru dans La revue canadienne de santé publique. Je tiens à souligner la contribution du co-auteur de ce travail, Michael Hayes. Les recherches ont été faites à partir des données de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes de Statistique Canada.
Le statut socioéconomique des quartiers, le SSE, est mesuré à partir des taux de chômage, du revenu familial médian et du pourcentage de la population qui n'a pas fait d'études supérieures. La population étudiée est répartie en quatre catégories égales selon le SSE, depuis le plus faible jusqu'au plus élevé. Ce sont les quartiles. Les mesures de surcharge pondérale et d'obésité se font à partir de la taille et du poids des enfants et des indices de masse corporelle qui servent de seuil à l'International Obesity Task Force. Les tailles et les poids sont ceux qui ont été indiqués par les parents ou les jeunes eux-mêmes.
Le graphique de la page 4 illustre la prévalence du surpoids et de l'obésité par SSE de quartier, chez les enfants et les jeunes. D'abord, un gradient social de surpoids ressort: la prévalence diminue, depuis les 41 p. 100 observés dans les quartiers à faible SSE jusqu'à 27 p. 100 dans les quartiers à SSE élevé. Pareillement, la prévalence de l'obésité chez les enfants diminue systématiquement, passant de 19 p. 100 dans les quartiers à faible SSE à 10 p. 100 dans les quartiers dont le SSE est élevé. On observe la même chose pour l'obésité chez les jeunes.
Je tiens à souligner que la catégorie au SSE le plus faible correspond aux 25 p. 100 des quartiers les moins nantis au Canada et pas seulement à la pauvreté extrême. Les effets du quartier sont réels et subsistent même après vérification d'autres facteurs que sont les études des parents, le revenu du ménage et l'âge et le sexe des enfants.
Le graphique de la page 6 indique le risque de surpoids chez l'enfant, risque ajusté ou non selon les facteurs familiaux. Les couleurs unies correspondent au risque ajusté selon les facteurs familiaux. On constate que l'enfant d'un quartier au SSE faible à un risque de surpoids presque 1,3 fois plus élevé qu'un enfant d'un quartier au SSE élevé. Voilà qui montre que les effets du quartier sont réels et qu'un enfant risque d'avantage d'avoir un excédent de poids s'il habite dans un quartier au SSE faible, quels que soient les facteurs familiaux. Ces effets ne sont donc pas dus au regroupement de familles au statut socioéconomique peu élevé dans des quartiers défavorisés.
Que peut-on attribuer aux facteurs du quartier? Les graphiques suivants fournissent des éléments d'explication des tendances. Le graphique de la page 7 montre le pourcentage de parents qui disent qu'il manque de parcs et de terrains de jeux sans danger dans le quartier. La même tendance se dessine: le manque d'équipement est le plus marqué, à 27 p. 100, dans les quartiers à SSE faible et il s'atténue systématiquement et n'est que de 9 p. 100 dans les quartiers à SSE élevé. La différence est du simple au triple.
Le graphique de la page 8 illustre le pourcentage des enfants et des jeunes qui ne participent pas à des sports, structurés ou non. Les sports structurés sont par exemple le hockey et la gymnastique. Il y a des entraîneurs ou des moniteurs, et il y a le plus souvent des frais à payer. Dans les sports non structurés, il n'y ni entraîneurs ni moniteurs. Ce sont des activités comme le hockey dans la rue et les jeux dans les parcs et les terrains de jeu. Dans ce graphique, je ferai remarquer deux choses.
D'abord, chez les enfants de 5 à 11 ans, il y a une relation nette entre la participation aux sports structurés et le SSE du quartier. Le pourcentage de non-participation le plus élevé, 52 p. 100, est observé dans les quartiers à SSE faible, et il est ramené à 30 p. 100 dans les quartiers à SSE élevé. La différence est appréciable entre le quart supérieur et le quart inférieur. Cela pourrait tenir à des facteurs comme l'absence de programmes dans ces quartiers ou à des obstacles du côté des parents, comme l'incapacité de payer les frais ou de transporter les enfants pour qu'ils participent à ces programmes.
Deuxièmement, alors que les taux de non-participation aux activités non structurées sont semblables dans tous les quartiers, le graphique précédent donne à penser que les enfants de quartiers à SSE faible peuvent se livrer à ces activités dans un cadre moins sûr.
Ces 12 derniers mois, j'ai élargi le champ de cette recherche en étudiant l'émergence des disparités entre quartiers, pour ce qui est de l'obésité et du surpoids, au fur et à mesure que les enfants prennent de l'âge. Cette recherche est importante: si nous pouvons cerner le moment où les disparités se manifestent, nous pourrons élaborer des politiques en conséquence.
Les mêmes données, celles de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes, ont été utilisées, mais on a suivi l'évolution des enfants dans le temps. Le graphique de la page 9 illustre l'évolution du surpoids et de l'obésité selon le revenu du quartier chez une cohorte d'enfants de 2 et de 3 ans.
D'abord, chez les enfants de 2 et 3 ans en 1994, il n'y avait aucun rapport net entre le surpoids et le revenu du quartier. Deuxièmement, quatre ans plus tard, lorsque les enfants avaient 6 et 7 ans, une relation très marquée ressortait entre le SSE du quartier et le surpoids et l'obésité, phénomène qui persiste lorsque les enfants ont 10 et 11 ans.
Les principales conclusions de ces recherches sont que les quartiers où le SSE est le plus bas ont des taux plus élevés d'obésité, une moins grande participation aux sports structurés et un manque de parcs et de terrains de jeux sûrs. Les disparités, sur le plan du surpoids et de l'obésité, semblent apparaître entre les âges de 2 et de 10 ans.
On m'a demandé de parler de ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour lutter contre l'inégalité entre les quartiers et l'obésité juvénile. Selon moi, une politique efficace exigera que le gouvernement fédéral exerce un leadership actif en mobilisant les provinces, les municipalités et d'autres protagonistes.
Un soutien fédéral à l'implantation de programmes universels d'activité physique au moyen d'un appui ciblé aux municipalités serait peut-être nécessaire. Des programmes universels appliqués par l'entremise de centres communautaires pourrait commencer à atténuer le rapport variable entre le niveau de SSE des quartiers et la non-participation aux programmes de sport, et d'autres programmes ciblés pourraient s'imposer pour améliorer les taux de participation dans les quartiers à faible SSE, car ces taux sont actuellement très bas.
J'invite que le gouvernement fédéral à jouer un rôle actif pour atténuer les obstacles à la pratique de l'activité physique chez les enfants. On pourrait, pour y arriver, offrir un soutien ciblé aux municipalités ou aux provinces. Par exemple, on pourrait faire augmenter la participation si on assurait le transport des enfants entre leur foyer et les activités de loisirs, surtout dans le cas des enfants des quartiers ou des familles à faible SSE, ou si on éliminait les frais de participation aux programmes, spécialement pour les enfants ou les quartiers à faible SSE.
On juge important de faire augmenter la participation des enfants aux activités non structurées pour réduire l'obésité juvénile, et une amélioration de la sécurité dans les parcs et sur les terrains de jeux ferait vraisemblablement augmenter la pratique de ces activités. Il faut accorder une aide ciblée aux municipalités pour atténuer les préoccupations des quartiers au sujet de la sécurité.
Par exemple, la surveillance des parcs et des terrains de jeux après les heures de cours pourrait améliorer la sécurité et encourager l'utilisation de ces équipements. Des mesures d'atténuation de la circulation dans les quartiers, et surtout aux abords des parcs et des terrains de jeux, pourraient améliorer la sécurité.
Sans ces initiatives, les efforts visant à accroître l'activité physique non structurée risquent d'être à peu près stériles ou d'avoir des conséquences non souhaitées, comme exposer les enfants à des dangers.
En outre, les politiques visant à atténuer les inégalités, en ce qui concerne le surpoids et l'obésité, devraient être axées sur les jeunes enfants.
Pour conclure, je dirai que tous les enfants canadiens devraient pouvoir grandir dans des quartiers qui sont dotés de parcs et de terrains de jeux sûrs et offrent des possibilités d'activité physique. Pour lutter contre l'obésité juvénile, il faudra des politiques axées sur les quartiers où habitent les enfants, et le gouvernement fédéral devrait jouer un rôle actif dans ces initiatives.
J'invite le gouvernement fédéral à se demander, lorsqu'il élaborera une politique de lutte contre l'obésité, ce que cette politique fera pour les enfants qui habitent dans les quartiers où les revenus sont faibles. Une politique efficace doit rejoindre les enfants de ces quartiers.
Encore une fois, merci de m'avoir invitée à vous parler de cette question importante.
Je remercie également les responsables du programme des centres de données de recherche de Statistique Canada, qui m'ont permis de consulter les fichiers de microdonnées de l'ELNEJ. L'analyse a été faite à partir de ces données.
J'avais l'impression, à tort, que j'allais donner une présentation en PowerPoint aujourd'hui. Vous avez donc un document correspondant sous les yeux. Il porte sur la relation entre faible revenu et saine alimentation. Si vous voulez bien vous y reporter, je vais m'en servir pour vous expliquer certaines données.
Prenez d'abord la page 2, qui illustre notre conception du rapport entre revenu et achat d'aliments. Je vous ferai remarquer une ou deux choses dans le graphique.
D'abord, les achats de fruits et de légumes augmentent régulièrement avec le revenu. Ces données sont fondées sur les dépenses alimentaires des ménages d'après l'Enquête sur les dépenses alimentaires des familles de Statistique Canada. Lorsque le revenu baisse, comme on le voit dans la partie inférieure du graphique, il y a une chute dangereuse des achats alimentaires, en ce qui concerne surtout les fruits et les légumes, mais aussi les produits laitiers.
Pour tracer les courbes du graphique, on a simplement divisé les achats selon les quatre groupes du Guide alimentaire canadien. Si on analyse chacun des groupes et étudie plus soigneusement ce que le consommateur achète dans ces catégories, on observe d'autres tendances inquiétantes au sujet des habitudes alimentaires, qui semblent être liées chez les Canadiens au degré d'aisance matérielle.
À l'intérieur des catégories, on remarque par exemple que, dans les viandes et les produits substituts, les Canadiens à faible revenu sont plus portés à acheter des viandes grasses. Lorsque le revenu est plus élevé, les achats de viandes maigres augmentent. De la même façon, dans les produits laitiers, lorsque le revenu augmente, les ménages sont plus portés à acheter du lait à faible teneur en gras. Les personnes à revenu plus élevé sont aussi plus portées à acheter des céréales pour le petit déjeuner.
Il y a donc dans les ménages canadiens un rapport très net entre le revenu et les dépenses alimentaires.
Si on essaie de voir la qualité nutritionnelle des aliments achetés, on remarque nettement que les Canadiens à faible revenu ont un désavantage sur le plan social. Lorsque le revenu augmente, il y aussi amélioration de la qualité nutritionnelle des aliments achetés. Nous constatons que les ménages à faible revenu achètent des aliments plus énergétiques qui contiennent moins d'éléments nutritifs. Je reviendrai sur des deux notions plus tard, si vous le voulez.
Il existe donc une relation très nette entre le revenu et le type d'aliments que les ménages peuvent acheter.
Les mesures de la sécurité alimentaire qui figurent dans les enquêtes nationales récentes sont une autre façon de considérer les questions de revenu et leur effets sur la saine alimentation. Il y a dans le document que vous avez sous les yeux trois questions qui se trouvaient dans l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes pour 2000-2001: au cours des 12 derniers mois, combien de fois vous-êtes-vous préoccupé du fait qu'il pourrait manquer de nourriture en raison d'un manque d'argent? Combien de fois vous êtes-vous retrouvé à ne pas manger les aliments variés ou de qualité dont vous pensiez avoir besoin, faute d'argent? Ou pis encore: combien de fois avez-vous manqué de nourriture faute d'argent? Lorsque ces trois questions ont été posées dans un sondage national, il y a quelques années, 3,7 millions de Canadiens ont répondu « oui » à au moins l'une d'entre elles.
La répartition de ceux qui répondent par l'affirmative à ces questions est très claire. Il est très évident que, lorsque le revenu adéquat du ménage diminue, la probabilité d'insécurité alimentaire augmente radicalement, au point que, dans la partie inférieure du spectre économique, près de la moitié des ménages au Canada déclarent éprouver des problèmes d'insécurité alimentaire comme ceux décelés par ces trois questions fort simples.
Si on creuse un peu plus et essaie de voir qui sont ceux qui disent avoir du mal, faute d'argent, à acheter assez de nourriture ou une nourriture de la qualité jugée nécessaire, les constatations sont encore plus troublantes. Si on considère leurs sources de revenu, on remarque, comme vous pouvez le voir à la page 11 du document, que la probabilité d'éprouver des problèmes d'insécurité alimentaire est trois fois plus élevée chez les assistés sociaux. Ceux dont l'aide sociale est la source de revenu sont presque quatre fois plus susceptibles de déclarer ne pas avoir assez à manger.
Un autre groupe particulièrement vulnérable à l'insécurité alimentaire est celui des personnes qui dépendent de programmes fédéraux comme l'assurance-emploi.
Vous remarquerez aussi, à la page 11, que ceux qui semblent protégés des problèmes de sécurité alimentaire dans notre population sont les aînés. Sur ce point, je vous félicite tous. C'est un élément positif de la politique sociale, mais c'est le seul que je signalerai aujourd'hui.
Avant de poursuivre, encore un mot sur l'aide sociale. Pourquoi les assistés sociaux sont-ils plus susceptibles d'éprouver des problèmes d'alimentation et d'insécurité alimentaire? Parce que les prestations, gérées au niveau provincial, sont nettement plus basses que l'idée qu'on peut se faire du seuil de pauvreté. À chaque fois, dans l'ensemble du Canada, si on compare l'aide sociale aux dépenses nécessaires pour satisfaire les besoins élémentaires, on conclut que les prestations sont scandaleusement insuffisantes. On dirait que les provinces se disputent la dernière place.
D'autres politiques fédérales ou provinciales ont un lien particulier avec l'insécurité alimentaire chez les Canadiens à faible revenu: l'amputation du financement des logements sociaux, la restructuration de l'assurance-emploi, et le supplément de la Prestation nationale pour enfants, qui était un programme prometteur, lorsqu'il a été annoncé, comme moyen de limiter les ravages de la pauvreté chez les enfants, mais dont on a récupéré les versements auprès des assistés sociaux dans la plupart des provinces, de sorte qu'il reste sans effet sur la santé et le bien-être des prestataires.
Quel est le lien avec l'obésité juvénile ou la santé? Nous savons que ceux qui disent souffrir d'insécurité alimentaire ont un apport alimentaire nettement plus faible. L'étude des données sur l'apport alimentaire montre aussi que, dans les ménages souffrant d'insécurité alimentaire, les mères sacrifient leur propre alimentation pour leurs enfants. Les enfants, surtout en bas âge, sont parmi les plus favorisés de ces ménages, mais même alors, il semble y avoir des compromis sur l'apport alimentaire. L'analyse définitive de ce rapport ne vous a pas encore été présentée, car nous sommes toujours en train d'étudier les résultats de la plus récente Enquête sur la santé dans les collectivités, qui fournit à l'échelle nationale des données représentatives sur l'apport alimentaire.
Les relations entre l'insécurité alimentaire et la santé sont également préoccupantes. Les comparaisons transversales font ressortir les unes après les autres des rapports entre l'insécurité alimentaire des ménages et un état de santé et de bien-être qui laisse à désirer sur les plans mental, physique et social tant chez les enfants que chez les adultes. Il semble y avoir des problèmes de poids, mais nous réitérons notre mise en garde, pour ce qui est de l'obésité juvénile, car il faudra attendre une analyse plus poussée des dernières données de l'ESCC.
Je voudrais vous dire quelques mots de recherches que nous faisons actuellement sur le terrain, à Toronto. Nous réalisons une étude, qui est financée par les IRSC, sur 500 ménages à faible revenu dans 12 quartiers très pauvres de Toronto. Nous allons dans ces quartiers pauvres et frappons à la porte de logements loués au prix du marché ou subventionnés. Si le ménage a un enfant de moins de 18 ans et si son revenu est faible — nous interprétons ce critère très généreusement —, nous l'invitons à participer à une entrevue, ce qu'acceptent 66 p. 100 des ménages. Ils nous donnent une idée de la prévalence et de l'expérience de l'insécurité alimentaire dans les familles à faible revenu dans au moins un grand secteur de la ville.
Je veux signaler trois choses à propos de cette étude. D'abord, avec notre méthodologie, nous constatons que 65 p. 100 des familles rencontrées souffrent d'insécurité alimentaire. Pour ce qui est de l'accès aux produits alimentaires vendus au détail — je sais que le comité a effleuré la question —, nous remarquons que l'accès aux produits dans les grands supermarchés à escompte varie entre ces 12 quartiers très pauvres. Il y a indéniablement des différences, sur le plan de l'accès, dans le centre de la ville.
Par contre, nous ne relevons aucune relation entre l'accès aux produits vendus au détail et la sécurité alimentaire. Aucune association non plus avec l'achat de fruits et de légumes. Je sais que l'accès aux produits vendus au détail est un gros problème dans certains secteurs, mais je vous dirais qu'il ne faut pas en tenir compte outre mesure dans votre étude sur les problèmes d'accès à l'alimentation pour les Canadiens à faible revenu. D'après nos recherches, il y a un problème de pouvoir d'achat plutôt que d'accès.
Nous avons aussi étudié l'impact des initiatives communautaires que sont les banques d'alimentation, les jardins communautaires, les cuisines communautaires et les programmes d'alimentation à l'école. Certes, les familles interviewées profitent quelque peu de ces programmes, mais jamais, d'après nos observations, la participation à ces programmes n'assure une protection. En fait, on dirait que, dans certains cas, ils n'ont aucune pertinence.
Enfin, étant donné les modalités d'échantillonnage des familles, nous avons étudié les questions de logement subventionné et d'abordabilité des logements. Quels sont les facteurs qui semblent déterminer quelles familles sont les plus susceptibles de souffrir d'insécurité alimentaire dans cet échantillon de 500 familles à faible revenu à Toronto? Deux choses: le revenu et l'abordabilité des logements.
Résumons. J'ai essayé de vous montrer le plus rapidement possible que l'insuffisance du revenu des ménages, chez les Canadiens à faible revenu, est un obstacle de taille à une saine alimentation. Selon moi, cet obstacle tient à bien des égards à l'échec de la politique sociale. Le fait que des taux aussi extraordinairement élevés d'insécurité alimentaire s'observent chez des sous-groupes de la population à faible revenu, définis par des facteurs simples, comme l'aide sociale, montre de façon convaincante l'incapacité de tout ce qu'on peut présenter comme un filet de sécurité sociale de protéger les moins bien nantis de notre économie contre de très graves problèmes en matière d'alimentation.
Les privations alimentaires que nous observons, l'ampleur des compromis en matière de nutrition que nous décrivons, sont un vrai sujet de préoccupation. Elles montrent très nettement la nécessité d'un leadership fédéral dans les programmes de soutien du revenu si on veut que tous aient assez d'argent pour se nourrir et nourrir leurs enfants.
Merci.
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Je vais donc mettre les gants de boxe de côté.
Je vais expliquer pendant quelques minutes des enjeux importants que tous devraient connaître...
Des statistiques intéressantes viennent de paraître. D'abord, nous savons déjà que les Sud-Asiatiques ont un risque accru de contracter des maladies cardiovasculaires. D'autres recherches ont aussi établi que non seulement les enfants sud-asiatiques accusent un prévalence plus élevée d'obésité, mais aussi qu'on observe chez un des précurseurs du diabète, comme l'insulinorésistance. J'en parlerai brièvement.
Une autre donné intéressante qui me vient à l'esprit est que l'âge le plus précoce où se manifeste l'athérosclérose, forme de plaque qui se forme dans les vaisseaux coronariens, se situe entre 3 et 10 ans. Cela dit, il y aussi une pandémie d'obésité qui commence dès l'enfance, et nous devons essayer de trouver des solutions.
L'International Obesity Task Force a également publié d'autres données intéressantes. Selon lui, d'ici 2010, plus de la moitié des enfants nord-américains auront une surcharge pondérale ou seront obèses. Quand nous entendons des données comme celles-là, nous pensons toujours à nos voisins et nous disons que c'est un problème des Américains, avec leurs habitudes de consommation. Or, le même groupe a étudié la progression de la prévalence de l'obésité chez les enfants américains et canadiens. Elle est de 0,5 p. 100 aux États-Unis et de 1 p. 100 au Canada. Entre 1981 et 1996, l'obésité juvénile a doublé aux États-Unis et triplé au Canada.
Les enfants trop lourds et obèses courent un risque près de huit fois plus élevé que les autres d'avoir des problèmes d'hypertension et d'hypercholesterolémie, sans parler du diabète, qui va de pair avec l'obésité juvénile. Les diabétiques sont considérés comme exposés à de très hauts risques, des risques plus élevés d'accident vasculaire cérébral et de crise cardiaque. Les enfants obèses, et surtout les adolescents obèses verront leur taux de mortalité doubler au cours des 20 prochaines années. Leur risque de mourir double.
À propos des Sud-Asiatiques, en particulier, des travaux intéressants ont été publiés, certains en Angleterre, d'autres au Canada. Je vais vous parler d'une ou deux études. L'une vient de Birmingham. On y a remarqué que 12 p. 100 des adolescentes caucasiennes de 14 à 16 ans et 23 p. 100 des garçons avaient un problème de poids ou d'obésité. Pour le même groupe d'âge, les proportions étaient de 42 et de 41 p. 100 dans la population sud-asiatique.
Je vous ai déjà dit que, pour une raison quelconque, on observe chez les enfants sud-asiatiques du même groupe d'âge, qu'ils soient obèses ou non, des précurseurs du diabète. Si on ajoute le problème de l'obésité, cela fait monter nettement les taux de mortalité et de morbidité.
D'autres études récentes ont montré qu'il n'y avait pas que des facteurs génétiques. Des facteurs qui tiennent au milieu de vie sont également associés à l'obésité juvénile. L'un d'eux a été signalé dans une étude parue récemment: regarder la télévision plus de huit heures par semaine a mené à l'obésité chez de jeunes enfants. Dans le groupe des 2 à 4 ans, les chercheurs ont décelé d'autres paramètres, dont l'obésité des parents: les enfants qui voient leurs parents obèses acceptent cette façon d'être beaucoup plus facilement que si leurs parents étaient de corpulence normale.
Un autre paramètre est la durée du sommeil. Le fait de dormir moins de 10,5 heures par nuit, à 3 ans, est lié à un risque d'obésité plus tard dans la vie. Il y a également un lien entre l'acquisition précoce de tissus adipeux dans les années préscolaires et l'obésité juvénile avec les conséquences qu'elle entraîne par la suite.
Certes, des facteurs génétiques sont à l'oeuvre, mais le principal message à transmettre est que la cause est le milieu de vie. Il est inacceptable de prétendre qu'une tendance d'origine génétique explique la récente augmentation de prévalence de l'obésité dans notre population.
On vous a parlé de paramètres nutritionnels et socioéconomiques. Bien sûr, il faut adopter une alimentation et un mode de vie sains. Prenons l'exemple de Singapour. On y a élaboré un programme de mise en forme. Il s'agit d'un programme de dix ans qui a débuté en 1992, mais qui se poursuit encore aujourd'hui. Il comprend la sensibilisation des enseignants, le conditionnement, l'évaluation des élèves, la diminution de la teneur en sucre dans les boissons consommées par les enfants et plus d'activité pendant les heures passées à l'école. Le programme a fait récemment l'objet d'une réévaluation. Non seulement les jeunes sont plus en forme, mais la prévalence de l'obésité a aussi beaucoup diminué.
Le mémoire que vous recevrez souligne des points clés. Je vais terminer par des conseils aux parents, surtout aux parents sud-asiatiques.
D'abord, l'appétit des enfants. Les enfants n'ont pas à vider leur bouteille ou terminer leur repas chaque fois. J'ignore si vous êtes nombreux à avoir déjà mangé avec une famille sud-asiatique. Je ne vois qu'un Sud-Asiatique parmi nous. Vous devriez avoir honte. Dans ce milieu culturel, les parents obligent les enfants à terminer leur repas. Ils les encouragent aussi à se faire servir une deuxième et une troisième fois. Il est impoli de ne pas terminer son repas, de laisser quelque chose dans l'assiette. Cette habitude n'existe pas ailleurs que dans le Sud. D'autres Sud-Asiatiques ont les mêmes tendances culturelles.
Il faut aussi conseiller aux parents d'éviter les aliments préparés à l'avance et les aliments sucrés. À quoi cela rime-t-il? De nos jours, tout va vite. Nous sommes tous des professionnels occupés. Il m'arrive aussi, professionnel occupé qui vit seul, de passer à l'épicerie et de prendre des aliments préparés. Il suffit de les passer au micro-onde ou d'ouvrir la boîte et de réchauffer. Ces aliments sont très caloriques et bourrés d'agents de conservation, ce qui donne lieu à d'autres problèmes.
Autre conseil: limiter la quantité d'aliments très caloriques conservés à la maison. Chez un Sud-Asiatique, ouvrez quelques placards. Il y en a toujours un qui est plein d'aliments de pacotille. Cela ne se voit pas nécessairement chez les gens qui ne sont pas de cette région. Il n'y a pas nécessairement des bretzels seulement. Il y a des fritures, pleines d'agents de conservation, des aliments emballés qui viennent de l'Asie du Sud et qu'on peut acheter dans les épiceries d'ici et même chez Loblaws, par exemple.
Nous devons offrir aux enfants une alimentation riche en fibres. Il faut apprendre à ne pas récompenser l'enfant par de la nourriture ou des sucreries. Cela se fait beaucoup dans la population sud-asiatique. Pour encourager les enfants à terminer leurs devoirs ou à faire autre choses, on leur donne quelque chose de sucré. Il ne faut pas offrir des sucreries à l'enfant pour qu'il finisse son repas.
Il faut limiter les heures de télévision. J'ai déjà parlé de l'étude qui traite de la question. Il faut encourager les jeux actifs, prévoir des activités familiales régulières, et cela vaut plus particulièrement pour la population sud-asiatique.
On lit dans une étude récente que, à moins d'inciter les parents à participer à l'éducation nécessaire pour amener leurs enfants à perdre du poids, à participer aux activités nécessaires pour perdre du poids, l'échec est assuré.
Je voudrais signaler une ou deux autres modifications du comportement. Des études récentes, publiées il y a une quinzaine de jours, je crois, ont aussi proposé une autosurveillance, une vérification du poids tous les jours. On disait autrefois qu'il était inutile de se peser tous les jours, que cela tournait à l'obsession. En fait, il s'agit d'un excellent moyen d'aider non seulement les enfants, mais aussi les parents à prendre conscience des effets des interventions menées auprès des enfants.
Comme je suis à court de temps, je vais m'arrêter là et laisser le reste pour la période des questions.
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Si j'ai bien compris la question, vous parlez de donner plus d'argent directement aux familles plutôt que de retirer les enfants de leur famille et de leur donner un milieu de vie plus favorable ailleurs.
Il me semble très important de cibler les familles et non des membres des familles. Nous avons maintenant bien des programmes qui isolent un membre du ménage. Le Programme canadien de nutrition prénatale est un bel exemple. Il y a d'autres programmes, le PACE, par exemple, qui distinguent des groupes vulnérables, mais qui tendent ensuite à améliorer la situation d'un seul membre du ménage, comme l'enfant, la femme enceinte ou le bébé jusqu'à six mois, par exemple. Selon moi, des programmes semblables ont peu de potentiel comme moyen d'atténuer les problèmes de pauvreté dans toute la famille et donc chez la personne ciblée. Il me semble donc important que l'argent aille aux familles.
Nos recherches à Toronto ont révélé un fait très inquiétant: lorsqu'une famille a du mal à se nourrir, cette difficulté n'est que l'un de ses nombreux problèmes. Bien sûr, il y a des gens dont la situation est très pénible qui vont dans les banques d'alimentation, et parfois une personne dont les enfants profitent d'un programme d'alimentation à l'école, mais par ailleurs, ces personnes tardent à payer leurs factures et on leur coupe des services publics comme le téléphone. Il y a d'autres compromis qui se font à l'intérieur du ménage.
Lorsqu'on donne de l'argent à la famille pour relever son niveau de vie, tout s'améliore, d'après nos études. Nous pouvons prévoir une plus grande participation à des activités physiques, moins de tensions dans le ménage, un milieu plus favorable à l'épanouissement des enfants. Nous pouvons aussi prévoir une alimentation plus saine.
Il est très inefficace d'essayer, de l'extérieur, de pratiquer une microgestion du ménage en lui disant de consacrer son argent à l'alimentation ou à l'activité physique, si on compare ce type d'action à des mesures visant à fournir un revenu suffisant pour répondre aux besoins de base. Nous pouvons ensuite donner de l'aide pour atténuer d'autres problèmes dans le ménage.
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Merci, monsieur le président. Merci beaucoup aux témoins de leurs exposés très intéressants.
J'ai trouvé particulièrement intéressante la recommandation qui porte sur la criminalité et le sentiment de sécurité dans les quartiers. Je crois que c'était dans l'exposé de Mme Oliver sur les quartiers. À moins que ce ne soit dans celui de l'autre témoin. Intéressant. Sauf erreur, cela se trouve à la page 12 de vos diapositives. On a l'impression que, depuis une dizaine d'années, les quartiers sont de moins en moins sûrs.
Voilà un bon rappel pour nos amis du ministère de la Justice. Une partie de leur travail sur les peines avec sursis, qu'ils essaient d'éliminer, sur le relèvement de l'âge de consentement ou encore sur les moyens d'empêcher des prédateurs sexuels d'entrer chez nous, comme cela s'est produit en Ontario... Ma question porte sur des choses qui... Vous avez parlé de transports subventionnés, et nous avons un crédit d'impôt pour les transports, pour les transports en commun, qui faisait partie des engagements de notre programme électoral. Je voudrais connaître l'avis des témoins à ce sujet.
La Chambre est saisie d'un projet de loi, le C-283, qui porte sur l'étiquetage des produits alimentaires. On demande aux entreprises et aux producteurs d'indiquer le contenu des aliments. On se demande si le projet de loi est applicable, dans les faits, et s'il aura vraiment un effet. Certains témoins pourraient-ils parler du projet de loi C-283?
J'ai trouvé intéressants les propos au sujet de Singapour, qui a une réputation toute particulière. Je ne voudrais pas y être surpris en train de mâcher de la gomme.
Pourrait-on dire un mot de ce qu'il est possible de faire de concret au Canada? Nous sommes tous acquis à l'idée qu'il faut lutter contre l'obésité juvénile, mais que peuvent faire le gouvernement fédéral et les provinces, concrètement, qui aura un effet sur la vie des enfants, qui améliorera leur état de santé?
Je lance toutes ces questions, et j'attends vos réponses.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins.
Je représente une circonscription où les revenus sont très faibles. Statistiquement, c'est la plus pauvre au Canada: 47 p. 100 des familles et 52 p. 100 des enfants vivent sous le seuil de la pauvreté. Je suis donc réconforté d'entendre qu'il semble y avoir un consensus grandissant sur le lien entre la faiblesse des revenus et cette maladie que vous avez qualifiée d'épidémie ou de pandémie, docteur.
Je suis très inquiet. Dans ma circonscription, la pauvreté a surtout un visage autochtone. Ce sont des Amérindiens qui ont quitté le désespoir des réserves pour essayer de trouver une vie meilleure au centre de Winnipeg. Les problèmes dont vous parlez sont nombreux et flagrants dans cette population. Il y a de plus en plus de gens en fauteuil roulant à cause d'amputations rendues nécessaires par le diabète, des problèmes de santé, et la composition de l'alimentation.
Nous cherchons des recommandations concrètes à faire dans un rapport. Voici ma première question. Au cours de la dernière législature, nous avons travaillé très fort pour obtenir l'interdiction des gras trans. Nous avons travaillé avec les sénateurs Yves Morin et Wilbert Keon, tous deux cardiologues de renom, et nous avons réussi à faire adopter cette mesure par le Parlement. Le Parlement a décidé d'interdire les gras trans, et pas seulement d'exiger qu'on les indique dans l'étiquetage. Nous avons mis sur pied un groupe de travail qui a consacré 18 mois à l'étude de la question et a fini par recommander leur interdiction. Pas seulement l'étiquetage. L'interdiction.
Depuis que je fais partie du comité, je n'arrive pas à amener les témoins —médecins, professeurs, étudiants au doctorat — à dire au comité qu'il doit demander dans son rapport d'interdire les gras trans ou qu'il doit dire dans son rapport qu'il faut appliquer les recommandations du groupe de travail sur l'interdiction de ces substances. Pouvez-vous, s'il vous plaît, m'aider en affirmant clairement qu'il faut interdire les gras trans?
Une voix: Pas très subtil.
M. Pat Martin: J'ai essayé la subtilité, mais cela n'a rien donné avec les autres témoins.
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Mme Dhalla a parlé plus tôt du Crédit d’impôt pour la condition physique des enfants. Quelle est votre réaction à la prestation universelle proposée par le gouvernement pour la garde des enfants? Elle représente pour les parents 1 200 $ par année et par enfant de moins de 6 ans. La prestation est imposable entre les mains du conjoint qui gagne le moins. Pour les Canadiens à faible revenu, c'est un versement sans impôt de 100 $ par enfant de moins de 6 ans. Nous avons établi un lien clair entre le niveau de revenu et la qualité de l'alimentation. Le lien me semble clair et vous avez présenté de bonnes preuves à cet égard.
L'alimentation et sa qualité nutritive sont forcément un élément important des soins aux enfants. Si on conduit son enfant chez une gardienne du quartier, il sera important de lui donner une alimentation nutritive. Cette prestation va aider toutes les familles au Canada.
De ce côté-ci de la table, nous sommes profondément convaincus, et tous les députés sont sans doute d'accord, qu'il faut avoir un filet de sécurité sociale efficace au Canada. C'est essentiel. Les ressources seront toujours rares. Lorsque je vous demanderai ce que vous pensez, dans 30 secondes, je présume que vous direz entre autres qu'il faut faire plus. Nous dirons toujours qu'il faut faire plus, mais je voudrais savoir ce que vous pensez de la prestation universelle pour la garde des enfants. Elle donne directement de l'argent aux parents, ce qui améliorera leur revenu et, donc, leur alimentation.
Nous savons que, si le revenu augmente, l'alimentation s'améliore, ce qui fait diminuer le nombre de cas de diabète de type 2, de maladies cardiaques et, il faut le dire, d'opérations de pontage et d'angioplastie pour le Dr Grover et ses collègues.
Voilà la question que je pose aux trois témoins. La prestation universelle pour garde des enfants sera-t-elle utile, dans cette optique? Il est vrai que les ressources sont toujours rares et qu'il faut faire plus, mais ce montant aidera-t-il à lutter contre le problème dont nous parlons aujourd'hui, à améliorer l'état de santé des Canadiens?
Merci de vos exposés. Je ne fais pas partie du comité, normalement, mais je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui.
Je n'allais pas poser ce genre de question, mais je voudrais savoir quelles mesures, à votre avis, le gouvernement fédéral peut prendre. Je me place dans le contexte des deux initiatives qui ont déjà été signalées.
On vient de nous parler du supplément aux familles pour la garde des enfants, ce qui est au fond une allocation familiale, à mon avis. Hier, j'ai participé à un exposé au cours duquel on a dit que la famille monoparentale était celle qui recevait le moins si... pour les familles comparables gagnant 50 000 $. Celles qui reçoivent le moins sont les familles à deux revenus qui gagnent entre 30 000 et 40 000 $.
Même pour les services de garde — ou peu importe à quoi chacun consacre ces 100 $ par mois —, ce sont ceux dont vous parlez qui en profitent. Il y a aussi le fait que le supplément de la prestation nationale pour enfants, 249 $, a été supprimé.
On nous a parlé tout à l'heure du crédit d'impôt pour la pratique des sports. Récemment, un club local de mon quartier, à Winnipeg, a communiqué avec moi et m'a expliqué ce qu'il advenait du crédit d'impôt — il recueille de l'information pour moi. Ceux qui ont le crédit s'inscrivent pour la pratique de sports et ceux qui ne l'ont pas et qui étaient autrefois subventionnés ne le font pas. Selon moi, cette mesure a nui aux familles à faible revenu.
J'ai trouvé vos exposés très intéressants. Avez-vous des propositions constructives à faire pour les familles à faible revenu? Évidemment, on pourrait améliorer l'assurance-emploi et le filet de sécurité sociale, mais, dans les champs de compétence fédérale, quelles recommandations le comité devrait-il faire au gouvernement?
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J'ai deux questions, une pour le Dr Grover et une autre pour Mme Tarasuk.
Docteur Grover, j'ai beaucoup aimé votre intervention. Je pense que ce que vous dites sur les jeunes du Sud-Est asiatique qui sont, dès le jeune âge, sujets à avoir des maladies graves plus tard est très important. Je sais que dans certains pays du Sud-Est asiatique, je gagnerais probablement des concours de beauté, parce que l'obésité y est considérée comme un critère très élevé. Si on est riche, on est obèse, de sorte que plus on est gros, plus on est riche.
Je ne sais pas comment vous pouvez régler ce problème. Je pense que l'éducation doit commencer dès le jeune âge et se faire à tous les niveaux.
Le site Internet de l'hôpital où vous travaillez mentionnait que l'année dernière, on y a servi 92 000 tasses de café, 42 000 livres de frites et près de 10 000 livres de boeuf haché, tous des aliments qui causent les maladies que vous soignez. Les médecins, les hôpitaux et les diététiciennes devraient être les premiers à être renseignés et à veiller à ce qu'on offre des diètes adéquates.
Madame Tarasuk, j'ai bien écouté ce que vous avez dit, parce que c'est important. Vous avez raison de voir une corrélation entre la pauvreté, l'obésité des enfants, l'inactivité, etc. Cependant, on parle ici d'obésité mais également du Guide alimentaire canadien qui sera publié sous peu.
Dans ce guide, Santé Canada ne tient pas compte des 25 p. 100 de calories que l'on consomme et qui proviennent d'aliments autres que ceux qui sont décrits dans le Guide alimentaire canadien. Ces aliments sont le ketchup et tous les condiments, le vin, les aliments sucrés, dont les bonbons, etc. Santé Canada nous dit que ce n'est pas important et que si on ne mentionnent pas ces aliments, les gens n'en mangeront pas.
Pensez-vous qu'il est utopique de penser ainsi? Santé Canada a-t-il raison de ne pas inscrire ces 25 p. 100 de calories sous prétexte que, si on ne les inscrit pas, les gens n'en mangeront pas?
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Merci, je suis flatté que vous ayez fait des recherches sur mon hôpital. Mais avant de pointer du doigt mon hôpital, vous devriez regarder les biscuits que vous servez.
Des voix: Oh, oh!
Dr. Arvi Grover: J'ai rencontré quelques fois le PDG de notre hôpital et le service d'alimentation pour discuter précisément de cette question. Pour être honnête, je me fais toujours répondre que c'est une question d'argent. On sert ce que la plupart des gens veulent. Ils veulent des frites et des hamburgers, des repas très caloriques et gras qui remplissent bien le ventre. Mais la situation commence à changer parce que je les ai menacés à plusieurs reprises et beaucoup de menaces visaient à les sensibiliser. Nous devons nous sensibiliser nous-mêmes.
Quant à votre autre question, c'est-à-dire comment apporter des changements dans les diverses collectivités, il faut une approche complexe, et il faut sensibiliser les masses. Nous devons établir le contact dans leurs lieux de culte, peut-être, et organiser des séances d'information ou des colloques où, en une seule séance, on peut informer non seulement les parents, mais aussi les enfants, afin qu'ils aient une petite idée de l'état morbide dont il s'agit.
Pour la plupart des gens, comme vous le dites, c'est la forme que prend l'affluence. Plus on est gros, plus on est prospère. En Afrique et dans certaines régions de l'Asie, c'est l'impression qu'on a, et il faut changer cette attitude. Même dans les collectivité sud-asiatiques, il y a eu une évolution. En Inde, au Bangladesh et dans quelques autres pays, le changement est déjà fait. Les gens font plus d'exercice; la plupart des enfants sont plus en forme.
Toutefois, les immigrants originaires de ces pays ont conservé les valeurs de leur pays d'origine, et ils tiennent à vivre de cette façon.
Il y a beaucoup de travail innovateur à faire pour aider à modifier ces habitudes.
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Merci, monsieur le président.
Plusieurs spécialistes du domaine de la santé nous ont présenté des observations et des recommandations sur le Guide alimentaire canadien. Nous avons posé la question à trois ou quatre personnes qui donnent des conseils. Or, celles-ci ont de graves conflits d'intérêts, car elles font partie de l'industrie.
On a posé plus tôt une question au ministre de la Santé sur l'indépendance de certaines personnes qui prennent des décisions et qui orientent les décisions des ministres. On se retrouve dans la même situation.
J'aimerais qu'on obtienne la première version préliminaire de 2006, puis celle de 2007. J'ai encore reçu un courriel de certains médecins selon lequel l'orientation qu'on a prise au sujet des aliments autres déborde la question des calories. D'autres sujets qu'on nous a soumis nous donnent à penser qu'on a des préoccupations par rapport au Guide alimentaire canadien.
Dans l'ensemble, le guide répondra-t-il aux attentes de la population quant aux conseils visant à combattre l'obésité?
Au contraire, ce serait faire preuve de transparence. Vous dites de laisser cela à des experts, mais si je laisse cela à des gens qui font partie de l'industrie, ce n'est pas la même chose. Ceux qui sont venus nous dire cela ne sont pas n'importe qui: ce sont le Dr Freedhoff et M. Bill Jeffery. Ces médecins ont une expertise que je respecte. Quoi qu'il en soit, on aimerait être prêts lorsque le guide sera publié.
Mme Bush, dont je respecte la ténacité, nous a induits en erreur. Ces deux médecins ont essayé d'exercer certaines pressions pour tenter d'influencer l'orientation du guide. Elle a dit qu'on ne pouvait plus apporter aucun changement au guide. Pourtant, elle a dit au comité au début qu'on pouvait encore faire des recommandations à cet égard. Or, nous savons maintenant que le processus est terminé, parce qu'elle l'a dit à certains témoins.
Cela nous inquiète. Quand le Guide alimentaire canadien sera publié, j'aimerais pouvoir analyser le processus et demander certains conseils, comme l'a dit , le secrétaire parlementaire du ministre. On comprend qu'il veuille sécuriser son ministre, mais nous aussi, comme comité, avons un travail de surveillance à faire. Nous devons nous assurer que les décisions sont aussi éclairées qu'on semble nous le dire.
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Merci, monsieur le président.
Mme Dhalla a soulevé la question de Yoni Freedhoff. Quelqu'un peut-il me confirmer qu'il a comparu devant le comité? D'accord. C'est donc à son témoignage que vous vous êtes reporté. J'en ai également parlé la dernière fois.
Il soulève d'excellentes questions au sujet de l'apport et de la dépense d'énergie. J'ai posé cette question aux fonctionnaires de Santé Canada à la dernière séance consacrée à ce sujet. Ses opinions sont certainement importantes.
J'ai également posé la question parce qu'il nous a fait parvenir un courriel depuis Boston, où il assiste à l'assemblée annuelle de la Société de l'obésité. Il avait apporté le guide alimentaire de Santé Canada et demandé au Dr Walter Willet, également spécialiste et président de la nutrition à la Harvard School of Public Health, de donner son avis sur les matières grasses.
Là encore, il soulève d'excellentes questions, et je suis d'accord, mais le comité est là pour étudier la question de l'obésité juvénile, pas pour revoir le Guide alimentaire canadien. J'avoue que je trouve inquiétant ce que j'ai entendu au sujet de ce guide — qui est un petit élément de ce qui nous intéresse ici, à propos de l'obésité juvénile, mais je doute fort que le comité ait le mandat de revoir le Guide alimentaire canadien. Nous sommes probablement tous d'accord pour dire que ce serait une entreprise valable et intéressante, si nous avions le temps de l'étudier, mais, à ce stade-ci, cela ne relève pas du mandat du comité.
Des députés se posaient des questions au sujet de la tenue de séances supplémentaires pour entendre des témoins qui veulent comparaître pour parler de l'obésité juvénile. Sauf votre respect, je ne vois pas quel intérêt nous aurions à essayer d'obtenir le Guide alimentaire canadien au comité avant sa publication pour le modifier, en quelque sorte. Je ne crois pas que nous ayons ni le temps ni le mandat de nous attaquer à cette question. J'invite les députés à en tenir compte.
Nous avons entendu parler des vastes consultations entreprises par Santé Canada pour élaborer le guide, que nous soyons d'accord ou non, et en arriver au point où il est rendu. J'invite les députés à en tenir compte au moment de se prononcer.