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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 008 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 juin 2006

[Enregistrement électronique]

(1130)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Tout d'abord, cette réunion s'annonce très intéressante. Je crois que cela fait un certain temps que nous l'attendions. Je remercie les représentants du ministère de la Santé d'être venus, ainsi que ceux de l'Agence de la santé publique du Canada. Je leur commencerai par leur demander de nous faire leur exposé.
    Nous accueillons M. Neil Yeates, sous-ministre adjoint, Direction générale des produits de la santé et des aliments, Mme Sharma, directrice générale associée, Direction des produits thérapeutiques, Direction générale des produits de la santé et des aliments, et aussi les représentants de l'Agence de la santé publique. Merci, docteur Stachenko et docteur Mao, d'être parmi nous.
    Nous vous remercions d'être venus nous rencontrer pour nous faire part de votre lumières sur la question. Il s'agit naturellement de notre étude sur les implants mammaires remplis de gel de silicone.
    Nous allons inviter les représentants du ministère, qui sont assis à la table, à nous présenter rapidement leur exposé, et ensuite nous leur demanderons de se retirer de la table pour faire place aux autres témoins.
    C'est une réunion assez particulière et je tiens aussi à saluer la présence du Dr Mitchell Brown en le remerciant d'être là. Docteur Brown, vous nous entendez et vous nous voyez?
    Merci, et nous avons une bonne image de vous. Heureusement que cette technologie fonctionne bien, et merci du temps que vous nous consacrez.
    Après avoir entendu les représentants du ministère, nous vous donnerons la parole au cours de la deuxième partie pour intervenir avec les témoins de cette deuxième moitié de la séance, si vous êtes d'accord.
    Sans plus tarder, nous allons donner la parole aux représentants de Santé Canada et nous passerons ensuite à l'Agence de la santé publique.
    Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie de la possibilité qui m'est donnée de vous faire une mise à jour de l'examen des six demandes en attente de permis de matériels médicaux pour les implants mammaires au gel de silicone.
    Comme vous le savez, les matériels médicaux sont régis par le Règlement sur les instruments médicaux et la Loi sur les aliments et drogues, qui relèvent de la responsabilité de la Direction générale des produits de santé et des aliments dont je suis le sous-ministre adjoint.
    Ma collègue, la Dre Supriya Sharma, directrice générale associée de la Direction des produits thérapeutiques, est avec moi aujourd'hui.
    Nous sommes heureux de comparaître devant le comité pour discuter des questions soulevées au cours des dernières semaines et répondre à vos questions.
    Pour traiter des deux questions fondamentales soulevées récemment, je commencerai par vous donner une brève explication de la façon dont Santé Canada réglemente et examine les matériels médicaux, en deuxième lieu je vous parlerai du rôle que jouent les organismes consultatifs externes dans le processus d'examen réglementaire, et pour terminer je ferai le point sur les six demandes en attente pour des implants mammaires au gel de silicone.
    Comme vous le savez, les implants mammaires, y compris les implants à solution saline et au gel de silicone destinés à la reconstruction après une mastectomie, à l'augmentation primaire ou au remplacement, sont réglementés en tant que matériels médicaux au Canada. L'importation, la vente et la publicité des matériels médicaux au Canada sont réglementées par la Loi sur les aliments et drogues et par le Règlement sur les instruments médicaux. Le Parlement, en promulguant la Loi, a créé un cadre législatif régissant l'approbation des matériels médicaux mis en vente au Canada. Le Règlement sur les instruments médicaux, créé en vertu de la Loi, confère à ce cadre les pleins pouvoirs exécutoires.
    Dans ce contexte, le ministre est légalement habilité à approuver les permis de vente de ces matériels médicaux au Canada. En retour, le ministre se fie à l'expertise et aux processus scientifiques et réglementaires de Santé Canada pour s'acquitter de ses responsabilités. Les décisions sont prises à la suite d'une analyse indépendante, impartiale et objective des preuves scientifiques liées à la sûreté, à la qualité et à l'efficacité du matériel médical pour lequel une demande de permis est présentée. Ces décisions sont prises en tenant compte d'avis et de conseils scientifiques experts dans un environnement qui favorise la collaboration entre les membres d'une équipe de spécialistes dans divers domaines et disciplines.
    Ce processus est conforme aux principes clés sous-jacents à l'intégrité et à la qualité du cadre décisionnel réglementaire de Santé Canada et à la confiance du public dans la capacité de Santé Canada de s'acquitter de son mandat et de prendre des décisions objectives et réglementaires fondées sur des données probantes. Le cadre décisionnel de Santé Canada est établi sur les principes clés qui inspirent ses décisions fondées sur des données probantes, dont la reconnaissance de l'importance de disposer de renseignements complets; de la valeur du travail d'équipe et des conseils experts, étant donné que les décisions fondées sur les données probantes sont tributaires d'un processus de collaboration dans le cadre duquel les divers points de vue sont recherchés et examinés à toutes les étapes de l'évaluation; et de la valeur des multiples disciplines des experts consultés et des employés de Santé Canada qui contribuent à nos équipes de prise de décisions, comme la microbiologie, les sciences des matériaux, la chimie, la physiologie, la toxicologie, le génie et l'éthique.
    Le Règlement sur les instruments médicaux est établi en fonction d'une approche moderne et internationalement reconnue axée sur les risques. Je souligne ce point car il vient s'ajouter à la reconnaissance de l'importance de disposer de renseignements complets pour soutenir le processus décisionnel. Ensemble, ces deux points constituent les déterminants fondamentaux de l'approche réglementaire de Santé Canada en ce qui a trait aux matériels médicaux à hauts risques, ou de classe IV, comme les implants mammaires. Conformément au Règlement sur les instruments médicaux et aux documents d'orientation de Santé Canada disponibles au grand public, les fabricants de matériels médicaux de classe IV doivent présenter certains renseignements précis avec chaque demande de permis d'un matériel médical. Ces renseignements, doublés de ceux obtenus des experts externes et du grand public, constituent un bloc considérable de données scientifiques, manufacturières et qualitatives qu'analyse Santé Canada pour prendre une décision réglementaire.
    J'ajouterai que ces groupes conseillent Santé Canada sur des questions très précises liées à la sûreté et à l'efficacité des implants mammaires au gel de silicone décrits dans les demandes de permis. Santé Canada tient compte des conseils des groupes consultatifs dans son évaluation des demandes de permis pour des types précis de matériels médicaux.
(1135)
    On n'a pas demandé au groupe consultatif de prendre des décisions au nom du ministre de la Santé ni de recommander d'autoriser ou non la vente d'un des produits précis au Canada. Seul Santé Canada est autorisé à prendre une telle décision au nom du ministre. Comme le savent très bien les membres de ce comité, les conseils résultant des délibérations du groupe consultatif d'experts ont été présentés dans le rapport final de ce groupe consultatif à Santé Canada, le 2 décembre 2005. Ce rapport, après avoir été examiné et traduit, a été rendu public par l'ancien ministre de la Santé le 12 janvier 2006.
    Les travaux de ce groupe consultatif sont maintenant terminés et le rapport fait état des différents points de vue de ses membres. Santé Canada examine présentement ce rapport ainsi que d'autres documents importants dans le cadre de l'examen réglementaire des six demandes de permis en attente pour des implants mammaires au gel de silicone.
    Santé Canada prendra sa décision après avoir effectué une évaluation structurée, fondée sur des données probantes et scientifiques de tous les renseignements obtenus. Il est de notoriété publique que les sociétés Mentor Corporation et Inamed Corporation ont chacune présenté une demande de permis pour des matériels médicaux et que ces demandes sont présentement examinées par Santé Canada. Les six premières demandes ont été reçues voilà bientôt cinq ans. L'équipe d'examen de Santé Canada est dirigée par deux scientifiques, un chimiste et un spécialiste des sciences des matériaux, qui consultent des médecins et des ingénieurs en biomédecine, le cas échéant. À eux deux, ces scientifiques comptent plus de 20 années d'expérience dans l'examen des matériels médicaux.
    Santé Canada a examiné plus de 65 000 pages de preuves soumises par les fabricants. Santé Canada a passé en revue la documentation scientifique, le rapport du groupe consultatif d'experts sur les implants mammaires, la documentation de la Food and Drug Administration des États-Unis et les présentations des personnes et des groupes intéressés. La documentation scientifique uniquement comporte plus de 2 500 articles, dont plus de 300 rapports de synthèse rédigés dans les années 60. Afin d'obtenir des renseignements complets pour documenter l'examen de chacune de ces demandes de permis, en janvier 2006, soit tout récemment, au cours de l'examen de chacune de ces demandes et conformément aux conseils reçus de la part du Groupe consultatif d'experts sur les implants mammaires, Santé Canada a demandé à chacun des fabricants de préciser les renseignements présentés ou de fournir des renseignements supplémentaires. Santé Canada continue l'examen de ces demandes et, une fois les évaluations terminées, prendra les décisions réglementaires qui s'imposent, conformément aux responsabilités qui lui ont été conférées par le ministre habilité en vertu de la Loi sur les aliments et drogues et du Règlement sur les instruments médicaux.
    Santé Canada peut prendre les décisions suivantes: délivrer un permis de vente au Canada; délivrer un permis assorti de conditions applicables après l'approbation, ou refuser le permis. Une fois que la décision réglementaire a été prise, Santé Canada informe la population canadienne en publiant un résumé des motifs de décision pour chacune des demandes qui porte sur la nature des preuves examinées et les conclusions pertinentes.
    En terminant, permettez-moi de mentionner à nouveau à quel point le cadre créé par le Parlement est solide, car il est doté des pouvoirs exécutoires que lui confère le Règlement sur les instruments médicaux pour régir l'approbation des matériels médicaux pouvant être vendus au Canada et exécuter les responsabilités que le Parlement a confiées au ministre de la Santé dont les décisions sont fondées sur l'expertise et les processus scientifiques et réglementaires de Santé Canada. Ce cadre repose sur l'analyse indépendante, impartiale et objective de preuves justifiables et sur des principes clés qui favorisent le recours à un processus de collaboration requérant l'obtention de renseignements complets, l'examen des opinions émises par des experts multidisciplinaires et la prise en compte des meilleurs conseils scientifiques disponibles permettant de prendre des décisions réglementaires.
    Je vous remercie, monsieur le président. Ceci conclut nos remarques préliminaires. Je dois préciser au comité que je devrai malheureusement partir après la première partie de cette audience, mais que ma collègue, la Dre Sharma, sera là pendant toute la séance.
(1140)
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à l'Agence de la santé publique.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de discuter avec vous des résultats de l'étude de cohorte sur les implants mammaires. Je suis le docteur Stachenko. Je suis administratrice en chef adjointe de la santé publique et responsable de la direction générale de la promotion de la santé et de la prévention des maladies chroniques de l'Agence de la santé publique du Canada. Je suis heureuse que le docteur Yang Mao puisse se joindre à nous. Il est directeur de la division de surveillance des maladies chroniques au Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques. Il participe également à l'étude de cohorte à titre de chercheur.
    L'étude de cohorte sur les implants mammaires est la plus vaste étude conçue à ce jour pour enquêter sur le risque de cancer et d'autres effets sur la santé chez les femmes ayant reçu un implant mammaire à des fins esthétiques. Les premiers résultats scientifiques de cette étude sont maintenant disponibles. Comme vous le savez, un article sur l'incidence du cancer a été publié en anglais en décembre 2005 par l'International Journal of Cancer. En réponse à la demande de la greffière, datée du 11 mai 2005, l'Agence de la santé publique du Canada a demandé à l'éditeur de la revue la permission de traduire l'article et d'en faire parvenir une version française au comité. J'ai cru comprendre que celle-ci avait été remise hier à la greffière.
    En outre, un deuxième article fondé sur l'étude a été rédigé. Il porte sur le risque relatif de mortalité lié au cancer du sein et à d'autres causes. Cet article a été accepté récemment par l'American Journal of Epidemiology, et il devrait être publié d'ici la fin du mois.
    L'étude de cohorte sur les implants mammaires a requis l'identification, en Ontario et au Québec, des femmes qui avaient eu recours à une chirurgie d'augmentation mammaire à des fins esthétiques au cours de la période allant de 1974 à 1989 inclusivement, ainsi que l'accès à leurs dossiers médicaux. L'étude comporte des renseignements sur plus de 40 000 femmes âgées de 18 ans et plus. Elle a permis de réunir les dossiers de patientes ayant eu recours à une chirurgie plastique en Ontario et au Québec, et d'établir des liens entre ces dossiers et la base de données du Registre national du cancer, tenu par Statistique Canada.
    Les femmes et les médecins qui ont participé à l'étude ont reçu l'assurance que l'étude avait été soumise à des examens scientifiques et éthiques rigoureux.
(1145)

[Traduction]

    Depuis le moment où l'étude a été annoncée, les cadres de respect de la vie privée, de protection des renseignements personnels et d'accès à l'information ont beaucoup évolué, tant au gouvernement du Canada que dans les provinces de l'Ontario et du Québec, d'où provenaient les cohortes, ce qui a considérablement allongé le temps prévu au départ pour obtenir l'accès aux dossiers des patientes et établir des liens entre ces dossiers et les données sur le cancer. La collecte des données s'est terminée en juin 2003.
    À partir de 2003, nos épidémiologistes et leurs collègues du Québec et de l'Ontario ainsi que les universitaires ont pu réaliser les analyses épidémiologiques et rédiger les articles scientifiques en moins de temps que prévu.
    Le premier article sur l'incidence du cancer a révélé que les femmes ayant reçu des prothèses mammaires à des fins esthétiques ne semblent pas présenter un risque accru de développer un cancer à long terme. Pour l'ensemble des sièges de cancer, les taux d'incidence étaient similaires chez les patientes ayant reçu des prothèses et celles ayant eu recours à une autre chirurgie plastique. En fait, les femmes ayant reçu des prothèses présentaient un taux d'incidence plus faible du cancer du sein que les patientes ayant eu recours à une autre chirurgie plastique. En outre, il ne semble pas y avoir de risque accru chez les femmes ayant reçu un implant mammaire quant aux autres sièges de cancer examinés.
    De plus, je peux aujourd'hui présenter certains des principaux résultats du deuxième article sur la mortalité, qui sera bientôt publié. En règle générale, les taux de mortalité étaient moindres chez les femmes qui avaient reçu un implant mammaire que dans l'ensemble de la population. Un taux plus bas de décès dû au cancer et à des maladies circulatoires explique ces résultats. Les auteurs suggèrent que l'autosélection peut expliquer ces taux de mortalité moindres: les femmes qui décident d'avoir recours à une chirurgie esthétique invasive ont en effet tendance, en moyenne, à être en meilleure santé que l'ensemble de la population.
    Toutefois, on remarque que, conformément aux travaux précédents, des taux accrus de suicide ont été observés chez les femmes qui avaient reçu un implant mammaire par rapport à l'ensemble de la population, mais il n'existe pas de différence statistique par rapport aux autres patientes ayant eu recours à une chirurgie plastique. Les auteurs laissent entendre qu'il faudrait procéder à des études plus approfondies pour recueillir des données détaillées sur les facteurs de risque de suicide tant chez les patientes ayant reçu un implant mammaire que dans d'autres populations ayant eu recours à une autre chirurgie esthétique.
    En conclusion, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous faire part de ces résultats. L'Agence de la santé publique du Canada les communiquera dans une circulaire d'information aux associations de médecins et aux groupes de femmes qui ont participé à la réalisation de cette étude.
    J'aimerais aussi remercier le comité de l'intérêt qu'il porte aux initiatives courantes d'analyse des risques de l'Agence en ce qui concerne le cancer et d'autres maladies chroniques.
    Merci.
    Je vous remercie de vos exposés.
    Je signale à mes collègues que dans les notes d'information que vous avez reçues, il manque une page -- la meilleure -- et que nous allons vous l'obtenir.
    Merci beaucoup pour vos exposés. Une fois que les autres intervenants auront présenté les leurs, nous passerons aux questions.
    Nous invitons maintenant la Dre Chidwick à s'approcher, ainsi que la Dre Zuckerman.
    Nous sommes aussi reliés par vidéoconférence au Dr Brown.
    Docteur Brown, merci d'avoir pris le temps de participer à cette téléconférence sur cet important sujet. Vous avez la parole.
(1150)
    Merci beaucoup de m'accueillir et de me permettre de participer à la réunion de votre comité depuis mon hôpital à Toronto.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la santé, je vous remercie de m'avoir invité à m'adresser à vous et à répondre à vos questions.
    Permettez-moi de me présenter. Je suis spécialiste de la chirurgie plastique, reconstructive et esthétique et membre du personnel actif du Women's College Hospital. Je suis chirurgien universitaire à plein temps et professeur agrégé du Département de chirurgie de l'Université de Toronto.
    Ma pratique clinique est axée essentiellement sur la chirurgie esthétique et reconstructive du sein. J'ai eu l'honneur et le privilège de traiter des milliers de femmes pour des problèmes allant d'un développement congénital anormal du sein à la reconstruction consécutive à une opération du sein en raison d'un cancer en passant par des modifications esthétiques.
    L'an dernier, Santé Canada m'a invité à participer bénévolement au groupe consultatif scientifique et au groupe consultatif d'experts sur les implants mammaires au gel de silicone. J'ai été honoré de constater que Santé Canada estimait que mon expérience clinique de l'utilisation des implants mammaires au gel de silicone et à solution saline pourrait être utile pour trouver des réponses à des questions précises concernant les applications des matériels à base de gel de silicone proposés par les fabriquants.
    Je tiens à féliciter Santé Canada d'avoir rassemblé ces chercheurs scientifiques et ces experts et d'avoir organisé la tribune publique ouverte. Je crois que tous les Canadiens doivent être fiers de toutes les personnes qui ont été invitées à participer à ces groupes et leur faire confiance.
    Contrairement à ce qu'on a pu voir ailleurs dans le monde, ces groupes étaient composés d'un vaste éventail de personnes hautement qualifiées et respectées dans leurs domaines d'excellence respectifs. Pratiquement tous les intervenants étaient bien représentés et le groupe comportait une représentation équilibrée des domaines d'expertise, des sexes, des catégories d'âge et des régions géographiques.
    Le rapport du groupe d'experts a été élaboré dans le cadre d'un débat intense et ouvert, après un examen approfondi de tous les documents présentés, des exposés des fabricants et des interventions lors de tribunes publiques. On a demandé au groupe d'experts de répondre à des questions précises en fonction des informations dont nous disposions et de notre expérience clinique.
    Je crois fermement que le rapport présenté au ministre de la Santé constitue une réponse équilibrée, réfléchie et complète aux questions posées. Ce rapport est une synthèse des points de vue de tous les membres présents, et là où il y a eu des opinions dissidentes, le rapport précise clairement le nombre de membres du groupe qui étaient pour ou contre les affirmations présentées. Je suis fier d'avoir participé à ce processus, et en tant que consommateur canadien, je suis réconforté de savoir qu'un tel mécanisme existe pour l'approbation des instruments au Canada.
    Monsieur le président, je suis venu ici pour appuyer mes patientes et leur droit de prendre des décisions informées en matière d'implants mammaires à des fins esthétiques ou reconstructives.
    Aucun matériel n'a fait l'objet de plus d'études, d'analyses et de recherche que la silicone. La silicone est actuellement l'un des produits les plus communément utilisés dans des implants en médecine. C'est une composante des lentilles pour la cataracte, des dérivations ventriculopéritonéales utilisées en neurochirurgie, des articulations artificielles des doigts et des poignets, des prothèses des testicules et du pénis, des endoprothèses et des implants mammaires à solution saline, pour n'en nommer que quelques-uns. Chaque jour au Canada, on insère des centaines d'implants qui contiennent de la silicone sous une forme ou une autre. La silicone est utilisée pour le traitement des fournitures médicales, les sacs intraveineux, et comme revêtement des aiguilles médicales. On estime que le diabétique moyen se fait injecter directement 200 milligrammes de silicone par an à l'occasion de ses piqûres d'insuline. La silicone est aussi utilisée dans le traitement des bouteilles, des articles de verre et du caoutchouc, et on en trouve dans de nombreux produits alimentaires en vente dans les magasins. Saviez-vous par exemple qu'on relève des niveaux de silicone élémentaire nettement plus élevés dans les aliments pour bébés en vente dans les magasins que dans le lait maternel de femmes qui ont reçu des implants mammaires au gel de silicone?
    De nombreuses recherches rigoureuses ont été effectuées pour évaluer les risques potentiels pour la santé présentés par les implants remplis de gel de silicone, et dans la très grande majorité des cas, on n'a pas pu établir de lien entre l'utilisation de ces implants et une détérioration de la santé chez les femmes.
    Aucun dispositif n'est parfait; tous les implants ont tôt ou tard des défaillances. Si vous me demandiez aujourd'hui si je souhaiterais en savoir plus sur la durée de vie, les taux de défaillance et les risques à long terme de tous les instruments que j'utilise actuellement, je vous répondrais certes par un oui catégorique. L'information est une bonne chose, et plus on en a, mieux c'est. Mais si vous me demandez quand on peut dire que cela suffit, parce qu'on a suffisamment d'information pour permettre à une personne raisonnable de prendre une décision correctement informée sur les avantages et les risques liés aux implants mammaires remplis de gel de silicone, je vous répondrai que c'est maintenant.
(1155)
    Les implants mammaires au gel de silicone sont massivement utilisés à travers le monde entier. Dans presque tous les pays en dehors de l'Amérique du Nord, ils représentent 99 p. 100 de tous les implants utilisés. Aux États-Unis, la FDA a remis des lettres d'approbation conditionnelle aux deux fabricants. Une fois les conditions en question remplies, ces implants devraient pouvoir être utilisés couramment.
    Les femmes ne sont pas toutes de bonnes candidates pour les implants remplis de gel de silicone. Les implants à solution saline présentent certains avantages et donnent d'excellents résultats chez de nombreuses femmes. Toutefois, dans bien des cas, les implants remplis de gel présentent des avantages importants. Ils sont souples, au contact ils ressemblent plus au tissu mammaire naturel, et ils se déplacent plus naturellement sous le sein: ce sont là des considérations importantes pour les femmes qui se font greffer des implants mammaires. En outre, ils risquent moins de provoquer une froissure, problème fréquent avec les implants à solution saline qui se traduit par un pli palpable d'apparence non naturelle à la périphérie du contour du sein.
    J'utilise des implants mammaires cohésifs à la silicone dans ma pratique depuis 2001 et je peux affirmer catégoriquement qu'aucun nouveau dispositif ni aucune nouvelle technologie n'a eu des retombées aussi positives sur mes patientes. Ces implants sont idéaux pour traiter de jeunes femmes présentant un développement congénital anormal du sein, et les choix de consistance et de formes donnent d'excellents résultats chez les femmes qui s'inquiètent de l'apparence de leurs seins après une grossesse et un allaitement au sein. Les résultats sont bien supérieurs à ceux que l'on constate avec les implants à solution saline et la satisfaction des patientes est systématiquement élevée.
    Dans le domaine de la chirurgie reconstructive, les nouveaux implants au gel cohésif ont complètement transformé ce que nous pouvions offrir à nos patientes. Entre 1995 et 2000, 70 p. 100 des reconstructions de seins que j'ai effectuées à la suite d'une mastectomie ont été de grosses interventions chirurgicales à l'aide des propres tissus naturels de la patiente, en général prélevés sur le ventre. Bien que ces procédures donnent d'excellents résultats, ce sont des opérations importantes qui entraînent des cicatrices à d'autres endroits du corps et une convalescence prolongée. C'est souvent une option inacceptable, notamment pour de jeunes femmes qui ont de petits enfants ou des femmes qui ne sont pas prêtes à accepter une interruption d'activité aussi longue.
    Les implants à solution saline disponibles à cette époque donnaient des résultats très décevants, car on constatait chez la quasi-totalité des patientes des plissements, une sensation artificielle du sein au toucher et une forme exagérément ronde du sein qui semblait souvent très différent de l'autre sein naturel non opéré.
    Ces femmes n'avaient alors guère d'autre choix que de subir des reconstructions plus importantes. Depuis 2001, 75 p. 100 des reconstructions s'effectuent au moyen de nouveaux implants remplis de gel cohésif, c'est-à-dire le contraire de ce que je faisais auparavant. Ces nouveaux implants au gel, ceux dont nous parlons aujourd'hui, sont très différents des précédents. Ils sont fait d'un gel beaucoup plus visqueux et plus épais; si vous en entaillez un, c'est un peu comme si vous coupiez un ourson de gélatine.
    Ces implants sont disponibles dans un vaste choix de tailles et de formes et permettent aux chirurgiens que nous sommes d'obtenir des résultats qui se rapprochent beaucoup plus de la forme du sein naturel et de réaliser des seins au contact beaucoup plus naturel. Par ailleurs, en cas de rupture de l'implant, le gel risque beaucoup moins de s'échapper de son enveloppe que ce n'était le cas avec les anciens implants des années 1970 et 1980.
    Depuis 2001, j'ai utilisé ces implants chez plus de 100 patientes chez lesquelles j'ai fait de la reconstruction à la suite de mastectomie. Les résultats ont été excellents, le niveau de satisfaction élevé, les taux de complications et de réopération faibles, et les patientes ont pu bénéficier d'une option de rechange viable à des interventions de reconstruction plus envahissantes.
    Je suis préoccupé par l'orientation que votre comité a choisi de suivre. Un groupe d'experts parfaitement qualifié pour répondre aux questions qui lui étaient posées a soumis un rapport détaillé et complet au ministre de la Santé. Les Canadiens ont été invités à participer à une tribune pour communiquer directement leurs points de vue au groupe d'experts. Les exposés, aussi bien favorables qu'opposés aux implants, étaient réfléchis et approfondis.
    En fait, la Dre Zuckerman qui est là en tant que témoin aujourd'hui, était inscrite comme 40e oratrice ce jour-là, mais elle n'a pas participé au colloque et n'a pas non plus présenté son point de vue au groupe consultatif. Pourtant, vous lui donnez aujourd'hui l'occasion d'intervenir à votre comité en l'absence du groupe d'experts, et je vois mal comment on peut justifier une telle position auprès des nombreuses canadiennes qui sont favorables à l'utilisation de ces implants. Où sont-elles? Pourquoi n'ont-elles pas été invitées à témoigner à votre comité aujourd'hui? Quels sont les éléments nouveaux intervenus depuis cette tribune publique qui justifient l'invitation qui a été faite à la Dre Zuckerman de s'adresser à votre comité aujourd'hui?
(1200)
    J'aimerais vous lire une lettre d'une femme que je connais personnellement. Il s'agit en fait de l'épouse d'un membre du clergé de ma synagogue. Ce n'est pas une de mes patientes, mais quand elle a entendu parler de l'orientation que prenait ce comité, elle m'a demandé de trouver un moyen de vous communiquer son avis.
Je suis une femme de 35 ans chez qui on a diagnostiqué un cancer du sein il y a deux ans alors que j'attendais des jumeaux. J'ai dû prendre plusieurs décisions très vite, mais j'estime que je les ai prises en toute connaissance de cause. En tant qu'experte en psychologie technique, j'ai une bonne formation en recherche scientifique. Pour moi, l'enjeu est de taille: il s'agit de mes jumelles de deux ans et de leur frère de trois ans. En tant que porteuse du gène BRCA1, j'ai estimé que je n'avais pas d'autre choix que d'avoir une double mastectomie. J'ai parlé à plusieurs autres porteuses du gène BRCA1 pour connaître leurs décisions en matière d'implants. Après avoir consulté des chirurgiens plasticiens, des médecins spécialisés dans le lupus, des chirurgiens généralistes, des experts-conseils médicaux, des chercheurs et des oncologues dans plusieurs hôpitaux d'enseignement de haut niveau au Canada et aux États-Unis, j'ai opté pour la reconstruction avec expansion des tissus et mise en place d'implants mammaires remplis d'un gel de silicone. J'ai été bien informée des risques que présentent les implants à la silicone, mais j'estimais que les avantages l'emportaient largement sur ces risques. Après toutes ces consultations, mes propres lectures et les témoignages que j'ai recueillis, j'estime que j'ai pris la bonne décision.

En tant que jeune femme professionnelle, je veux avoir la meilleure apparenceet me sentir aussi bien que possible dans ma peau. Tout d'abord, je tiens à ce que mes filles acquièrent une image saine du corps humain; et deuxièmement, c'est important pour ma propre image et mon estime personnel. J'ai une vie très active et je voulais la poursuivre de façon aussi normale que possible. Je trouve que les implants que j'ai choisis sont très réaliste et confortables, et ils ne m'ont posé aucun problème jusqu'à présent. Je suis très heureuse de ma décision, et je referais exactement la même chose si c'était à refaire. Je conseille souvent à d'autres femmes dans ma situation d'envisager les implants au gel cohésif pour une reconstruction du sein. Il est réconfortant de savoir qu'en tant que femme j'ai le droit de décider de ce qui entre dans mon corps.

Je vous remercie.

Melissa Lieberman-Moses
    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui et j'ai hâte de pouvoir répondre aux questions des membres du comité.
    Merci beaucoup, docteur Brown.
    Nous allons passer au témoin suivant, la Dre Chidwick.
    Vous avez la parole.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de vous présenter quelques brèves remarques sur le processus auquel j'ai assisté et participé en tant que membre du groupe consultatif; sur le rôle que j'ai joué en tant qu'éthicienne; et sur certaines considérations d'éthique concernant les implants mammaires.
    Je faisais partie à la fois du groupe consultatif scientifique et du groupe consultatif d'experts sur les implants mammaires organisés par Santé Canada. C'était la première fois qu'on me demandait de participer à un groupe pour examiner un tel sujet, et je n'avais donc pas d'idée préconçue sur le résultat de ces consultations.
    Permettez-moi tout d'abord de vous dire quelques mots sur le processus. Je cite: « Les participants ne doivent pas forcément être d'accord sur les réponses à toutes les questions d'ordre moral, mais tous doivent s'entendre sur la procédure à utiliser pour se prononcer sur les questions morales ». Cette citation montre bien l'importance du processus suivi pour élaborer les réponses.
    Je peux vous dire sans hésiter que le processus auquel j'ai participé a été ouvert, transparent et rigoureux. Les participants du groupe venaient d'horizons divers, et avaient des expériences et des connaissances variées. La plupart d'entre nous ne nous connaissions pas au début, et nous avons passé des heures à discuter rigoureusement des problèmes et des faits. Tous les points de vue présentés lors que ces discussions ont été reçus avec respect et également respectés; autrement dit, d'après mon expérience, le débat n'a été guidé ou dominé par aucune perspective préconçue. J'ai assisté à ce que j'appelle l'unité dans la diversité, c'est-à-dire que les membres du groupe proposaient tout un éventail de points de vue à partir desquels s'est dégagé progressivement un consensus.
    Santé Canada avait clairement défini notre tâche ou notre rôle qui figure sur son site Web. On nous demandait de donner des réponses à des questions précises. Santé Canada avait bien précisé que nous n'étions pas là pour recommander l'approbation des implants mammaires ni pour décider de ce qui était bon pour les Canadiennes.
    Le président, le Dr Wells, a su remarquablement orchestrer la présentation des divers points de vue et créer une ambiance de discussion franche et honnête sur les faits et valeurs pertinents. Je me suis sentie libre d'exprimer toutes mes opinions sur la question et de poser toutes les questions je voulais sur toutes sortes de détails scientifiques. De même, lors de la consultation publique, nous avons entendu des points de vue divers allant de l'appui sans réserve et l'enthousiasme à l'inquiétude en passant par les réserves et les mises en garde. Tous ces points de vue ont été écoutés, respectés et intégrés aux discussions qui ont suivi.
    Je vais maintenant vous dire quelques mots de mon rôle. Le domaine dans lequel je travaille s'appelle la bioéthique. La bioéthique consiste globalement à avoir une réflexion critique sur les problèmes moraux et éthiques qui se présentent dans le contexte de la santé en vue de déterminer les voies à suivre, en expliquant pourquoi et en décrivant la procédure à suivre. Les éthiciens s'intéressent donc à la question morale de savoir ce qu'il faudrait faire par opposition à la question de savoir ce qu'on peut faire. Nous appuyons nos réponses sur des raisonnements d'ordre moral et nous invoquons des principes moraux dont beaucoup vous sont certainement familiers, tels que l'autonomie, la valorisation et la justice.
    De nombreux mythes courent au sujet de l'action des éthiciens, et il est donc bon de préciser que nous ne sommes ni des experts en moralité, ni des arbitres du bien et du mal, ni même des experts juridiques ou des gestionnaires du risque, une police morale ou des décideurs ou encore des experts omniscients. Les éthiciens sont simplement des ressources auxquelles peuvent faire appel les professionnels de la santé, les patients, le public et d'autres personnes pour faciliter des échanges, négocier à l'occasion de conflits, obtenir des opinions sur des cas, élaborer des politiques, faire de la recherche et enseigner l'éthique.
    Les considérations d'éthique fondamentales. Parmi les paramètres des questions posées par Santé Canada figurait une considération d'éthique fondamentale, celle du consentement éclairé. Il y avait par exemple la question de savoir qui devait prendre les décisions concernant les implants mammaires et s'il s'agissait de décisions que les patientes pouvaient prendre elles-mêmes, et qui devait définir le risque, les avantages et les inconvénients.
(1205)
    On admet généralement que ce qui est bon pour une personne ne l'est pas nécessairement pour une autre. Les cas dans lesquels on peut imposer à une autre personne des choses qu'on considère comme avantageuses sont très rares.
    Si nous partons du principe que nous devons apporter des soins axés sur le patient, c'est-à-dire suivre « une démarche qui se place délibérément dans la perspective du patient ou de la patiente sur ce qui est important », l'opinion du patient ou de la patiente va influer sur la coordination et l'intégration des soins. Autrement, nous devons nous laisser guider par le patient et par l'importance qu'il accorde aux préjudices, aux avantages et aux risques. Il s'agit donc de déterminer ce que les patients doivent savoir pour avoir une opinion éclairée.
    En résumé, voici quelques-unes des considérations éthiques fondamentales:
    Premièrement, la personne doit déterminer ce qui constitue un risque, un avantage ou un préjudice, et ceci dans le contexte de l'utilisation de matériels sûrs et efficaces.
    Deuxièmement, le consentement éclairé est un processus et non un événement. Il se dégage progressivement et les gens peuvent changer d'avis.
    Troisièmement, toute décision concernant un traitement comporte des risques, des avantages et des préjudices, et il importe que les personnes concernées s'assurent que les traitements sont aussi sûrs et efficaces que possible et que les patients reçoivent toutes les informations pertinentes.
    Quatrièmement, il y a toujours des inconnues que nous connaissons. Ce sont des données qui pourront par exemple être révélées à l'avenir mais qu'on n'a pas maintenant. Il y a aussi toujours des inconnues que nous ne connaissons pas, par exemple des résultats imprévus qui pourraient être négatifs aussi bien que positifs. Il faut faire part de ces deux types d'inconnues au patient ou à la patiente. Cette information doit leur être présentée.
    Cinquièmement, et pour terminer, il est important de poursuivre continuellement l'examen de cette question. Pour pouvoir améliorer le processus à l'avenir, il est essentiel d'avoir une rétroaction.
    En conclusion, je crois savoir que c'est la première fois que Santé Canada s'est lancé dans une telle démarche à propos des implants mammaires. Je crois que le processus a été mené de façon ouverte, transparente et rigoureuse et qu'on peut aborder avec confiance les résultats auxquels il a abouti.
    Merci beaucoup. Je me ferai un plaisir de vous fournir des informations complémentaires et de répondre à vos questions.
(1210)
    Merci beaucoup, docteure.
    Nous passons maintenant à la Dre Diana Zuckerman, présidente du National Research Center for Women & Families.
Mme Diana Zuckerman (présidente, National Research Center for Women & Families):
    Très bien, merci.
    Je suis la Dre Diana Zuckerman, et je suis honorée d'être ici. Notre centre de recherche utilise l'information scientifique en vue d'améliorer la santé et la sécurité des femmes, des enfants et des familles. Je vous parle du point de vue d'une personne formée en psychologie et en épidémiologie, qui a été membre du corps professoral et chercheuse aux Universités de Havard et Yale, et a enseigné les méthodes de recherche avant de déménager à Washington, D.C., pour travailler à des dossiers traitant de santé au Congrès américain, à la Chambre des représentants et au Sénat américains, au Département américain de la santé et des services humanitaires, à la Maison-Blanche et dans des organismes sans but lucratif. Je suis aussi actuellement membre du Centre de bioéthique de l'Université de Pennsylvanie.
    Mes travaux actuels sont axés sur le cancer du sein. J'ai lu toutes les études épidémiologiques publiées sur les implants mammaires et j'aimerais discuter brièvement des questions connues et inconnues à la lumière de ces études. Je vous parlerai également d'une enquête criminelle lancée par la FDA américaine sur un des fabricants d'implants, et des nombreux appels et courriels que nous avons reçus de femmes au Canada qui ne peuvent faire enlever rapidement leurs implants mammaires de silicone non étanches.
    Je préciserai tout d'abord que nous avons commis de nombreuses erreurs à l'égard des implants mammaires aux États-Unis, et que j'espère que le Canada fera preuve de plus de sagesse que nous.
    Les essais cliniques constituent une source d'information importante sur les risques à court terme des implants mammaires de silicone. Bien que les implants de silicone soient sur le marché depuis plus de 40 ans, on ne procède à des essais cliniques sur les femmes que depuis deux ou trois ans. C'est une grave lacune. Les essais cliniques ont été exécutés par les compagnies d'implants mammaires dans le cadre de leurs démarches pour obtenir l'autorisation de commercialiser les implants aux États-Unis et au Canada, et ils comportent donc un élément de partialité.
    En revanche, les études épidémiologiques sont la source principale d'information sur ce qui arrive réellement aux femmes qui ont des implants mammaires depuis au moins cinq ans, mais pratiquement toutes les études épidémiologiques sur les implants mammaires ont été financées par les compagnies qui fabriquent des implants ou des matériels de silicone. En fait, Dow Corning a versé des millions de dollars à une entreprise des États-Unis qui a publié la quasi-totalité des études épidémiologiques sur les implants mammaires. Ce n'est donc peut-être pas par hasard que toutes ces études financées par Dow Corning ont conclu que les implants mammaires étaient sécuritaires.
    Toutefois, quand on examine de près ces études en se reportant à la section consacrée aux résultats et non pas simplement aux conclusions, on constate la présence manifeste de problèmes même dans les études financées par Dow. Par exemple, une étude a montré que les femmes qui ont des implants mammaires pendant une période prolongée sont nettement plus susceptibles de signaler des douleurs chroniques aux seins. Leurs seins sont constamment douloureux. Elles ont aussi plus tendance à prendre des antidépresseurs, mais malgré cela, l'étude a conclu que les implants étaient sécuritaires.
    Heureusement, un certain nombre de petites études ont été menées par des chercheurs indépendants financés par le gouvernement canadien et le gouvernement américain, et c'est sur ces études que je vais me concentrer aujourd'hui.
    La première étude dont je veux parler était menée par des chercheurs de la FDA qui ont examiné le phénomène de la rupture et des fuites des implants. Les chercheurs de la FDA ont constaté que, chez la plupart des femmes qui avaient des implants mammaires depuis au moins sept ans, au moins un de ces implants fuyait, était déchiré, même si elles ne le savaient pas. Il s'agissait de femmes qui étaient heureuses et qui n'avaient pas recherché d'aide médicale. À l'occasion d'un examen IRM, on s'est aperçu qu'au moins un de leurs implants était brisé, et que dans 21 p. 100 des cas l'implant fuyait du tissu cicatriciel pour se répondre dans leur corps.
    Les femmes dont les implants fuyaient étaient nettement plus susceptibles de signaler de la fibromyalgie ou d'autres maladies douloureuses et débilitantes. Cette étude montre donc que la durée pendant laquelle les femmes ont eu des implants est importante. Il faut vraiment se concentrer sur les femmes qui ont des implants depuis assez longtemps, et pour savoir si un implant fuit, il faut faire un examen IRM. Les examens cliniques ne le montrent pas.
    Ce qui est arrivé à ces femmes, et ce que nous avons constaté en leur parlant, c'est que la plupart d'entre elles étaient très heureuses de leurs implants pendant plusieurs années, parfois pendant de nombreuses années, mais que lentement mais sûrement, les implants se sont mis à fuir. Ils fuient. Les femmes ne s'en rendent pas compte, et en général, après plus de sept ou 10 ans, elles finissent par apprendre trop tard que les implants ont fui dans les ganglions lymphatiques de l'aisselle et que le produit peut à partir de là passer dans les poumons et dans le foie.
(1215)
    Je voudrais commencer par vous parler des problèmes d'esthétique liés aux implants mammaires, puisque les informations concernant la rupture et les fuites sont importantes mais ne sont pas concluantes. Voici une femme de 29 ans dont les implants ont été retirés après sept ans. La contracture capsulaire était si douloureuse qu'elle a préféré faire retirer ses implants plutôt que de les garder. Je signale au passage que cette photo provient du site Web de la FDA.
    Ce n'est évidemment pas un résultat intéressant, et ce n'est pas à cela qu'une jeune femme a envie de ressembler, mais voici une femme qui n'a pas été chanceuse. Elle s'appelle Sharyn Noakes. Ses implants ont fui dans ses seins en bon état. Quand on les a enlevés, avec une partie du tissu mammaire, les seins se sont trouvés complètement déformés. Vous voyez qu'ils sont tout plissés, et qu'ils ne ressemblent nullement à des seins normaux.
    Voici Kathy Nye, une survivante du cancer du sein qui a souffert de nécrose. Vous devez savoir que quand la peau ou le tissu meurt, il ne repousse pas. Dans ce cas, l'implant sort du sein, et c'est la masse rouge galbée que vous voyez ici. C'est l'implant, et le sang qui l'entoure s'écoule par la déchirure du sein. Inamed, l'un des fabricants d'implants, a constaté un taux de nécrose de 6 p. 100 chez les patientes ayant subi une reconstruction à la suite d'un cancer du sein. C'est un problème grave.
    Je vais maintenant vous parler un peu de ce qu'on appelle les symptômes de maladie auto-immune. Ces données ont été présentées à la réunion de la FDA, mais elles n'ont pas été publiées et elles ne sont pas largement diffusées, donc je tiens à vous en faire part. On a demandé aux fabricants d'implants d'interroger les femmes sur leurs symptômes, et ils ont constaté une augmentation statistiquement importante des douleurs et d'autres symptômes auto-immuns après seulement deux ans. Je n'en présente ici que deux. Je n'ai pas voulu vous montrer quelque chose de trop compliqué. Mais vous voyez le pourcentage de femmes qui ont eu ces problèmes au début, et au bout d'un an, et à partir de deux ans il y a une augmentation statistique significative.
    La question était donc la suivante. Elles ont deux ans de plus, et elles n'avaient que 30 ans environ au début, donc il n'est pas normal que ces femmes souffrent de douleurs articulaires ou de fatigue chronique, mais que se passe-t-il si l'on tient compte du vieillissement? On a donc demandé à un statisticien de faire cette étude, et comme vous le voyez, même si les symptômes ne progressaient pas aussi rapidement dans le temps, il y avait quand même une hausse significative. Ces symptômes s'accentuent au fil du temps. Ce que ne disent pas ces diapositives, c'est qu'on a effectué une étude qui a montré que quand on a retiré les implants chez ces femmes qui présentaient ces symptômes rhumatologiques, dans plus de 90 p. 100 leur état s'est amélioré.
    Aleina Tweed, épidémiologiste du British Columbia Centre of Excellence for Womens' Health, a mené une étude sur des patientes ayant subi une chirurgie d'augmentation mammaire au Canada, et dont la plupart avaient des implants depuis 10 ans ou plus. Elle a conclu que les femmes ayant des implants avaient consulté leurs médecins et spécialistes plus souvent et avaient été hospitalisées quatre fois plus souvent que les autres. Alors, pourquoi ne cite-t-on pas plus souvent cette très importante étude canadienne? Pour une simple raison: parce que personne n'a été payé pour s'occuper des relations publiques afin de la faire connaître. En revanche, quand ce sont les études de Dow Corning qu'on publie pour montrer que les implants sont sans danger, c'est toute une entreprise de relations publiques et toute une vaste machine publicitaire qui se charge faire connaître ces études. On en entend parler. On présente des rapports à leur sujet. Je suis sûr qu'on en a parlé à la réunion de Santé Canada. On en a certainement parlé à la réunion de la FDA.
    Le problème des études de Dow Corning, c'est qu'elles ont tendance à inclure des femmes qui ont des implants depuis très peu de temps, un mois, parfois même un jour seulement. Or, tous les épidémiologistes vous diront que les maladies qu'ils examinent, qu'il s'agisse de maladies auto-immunes ou de cancer, prennent du temps pour évoluer. Si l'on veut examiner les maladies auto-immunes, on ne peut pas prendre des femmes qui n'ont un implant que depuis un mois ou même un an. Les études de Dow Corning n'ont donc qu'une valeur statistique réduite puisqu'elles ont porté sur des femmes qui n'avaient des implants que depuis très peu de temps au lieu d'examiner celles qui en avaient depuis plus longtemps. Voilà pourquoi ces études financées par Dow semblent toujours aboutir à des résultats très différents de ceux des études financées par des chercheurs indépendants et notamment gouvernementaux.
(1220)
    Par conséquent, bien qu'on ne puisse pas conclure catégoriquement, d'après les études réalisées, que les implants mammaires provoquent des maladies auto-immunes, on ne peut pas non plus conclure le contraire. Il me semble que la norme au Canada, comme aux États-Unis, est qu'on doit prouver qu'un produit est sécuritaire, et non pas prouver qu'il ne l'est pas.
    Je vais vous dire quelques mots de l'étude réalisée par le National Cancer Institute, qui est semblable à l'étude de mortalité dont on vous a parlé aujourd'hui. Je n'avais pas entendu parler de cette étude canadienne sur la mortalité parce qu'elle n'a pas été publiée, mais elle est analogue. Les résultats sont toutefois légèrement différents.
    L'étude du National Cancer Institute a porté sur des femmes qui avaient des implants mammaires depuis au moins 12 ans, c'est-à-dire une période plus longue que celle visée par l'étude canadienne, où l'on parlait je crois de 9 ou 10 ans. De plus, les femmes examinées dans l'étude du National Cancer Institute avaient en moyenne des implants depuis 20 ans. C'est très important du point de vue du cancer, puisque le cancer évolue généralement sur 15 ou 20 ans. Ces études sont très difficiles à réaliser, car il faut suivre les femmes pendant longtemps.
    L'étude du National Cancer Institute a montré que ces femmes risquaient deux fois plus d'avoir un cancer du cerveau ou du poumon, ou de se suicider. Les données concernant le suicide étaient donc semblables à celles de l'étude canadienne. Celles concernant le cancer du cerveau et le cancer du poumon étaient apparemment différentes.
    Comme dans le cas de l'étude canadienne -- une étude remarquablement conçue -- on a fait la comparaison avec des femmes qui avaient subi d'autres chirurgies esthétiques. C'est très important. Je ne sais pas vraiment s'il y a une différence entre l'étude canadienne et l'étude américaine, parce que je n'ai pas vu cette étude canadienne, mais d'après ce que j'en ai entendu dire, les femmes visées par cette étude avaient des implants depuis nettement moins longtemps.
    Enfin, j'aimerais vous parler de la qualité et de l'intégrité des données. Les compagnies Inamed et Mentor ont commencé à fabriquer des implants mammaires il y a des années et ont commencé à étudier les femmes qui en avaient en 1990. Si elles avaient poursuivi ces études lancées en 1990, nous disposerions de plus de 15 ans de données et nous pourrions vraiment nous prononcer sur les risques à long terme présentés par ces implants. Malheureusement, après avoir entamé ces recherches, les compagnies ont perdu la trace de leurs patientes et nous n'avons aucune idée de ce qu'elles sont devenues.
    L'an dernier, plusieurs employés de Mentor m'ont appelée personnellement, en raison du travail que nous accomplissions sur cette question, pour me dire qu'ils étaient préoccupés par l'inexactitude des données présentées par leur compagnie à la FDA. Ces données étaient reprises dans les journaux américains où ils avaient pu les voir. Après avoir parlé à ces employés de Mentor, je les ai mis en contact avec la FDA, qui a lancé en décembre une enquête qui se poursuit actuellement. Je crois savoir que si la FDA ne s'est pas encore prononcée sur les implants mammaires -- cela fait un an, et c'est très long pour cet organisme -- c'est à cause de cette enquête criminelle en cours. L'un des ingénieurs de Mentor, par exemple, a dit que les fuites d'implants étaient plus fréquentes que ne voulait bien le dire la compagnie.
    Enfin, j'aimerais vous signaler qu'une étude de chimie analytique qui vient de sortir a démontré la présence d'un taux très élevé de platine toxique dans le lait maternel de femmes ayant reçu des implants mammaires, ainsi que dans leur sang et leur urine. C'est très important car le platine peut entraîner des dommages neurologiques. C'est une substance très toxique.
    Les fabricants d'implants ont prétendu que le platine utilisé dans les implants mammaires n'était pas toxique, mais les chercheurs ont constaté que bien que ce platine ne soit pas toxique quand il est intégré dans l'implant, une fois que l'implant est dans le corps, les choses peuvent changer. C'est aussi très important dans le contexte du cancer du sein. Comme vous le savez peut-être, il y a souvent du platine dans les agents utilisés en chimiothérapie, et par conséquent si une femme reçoit un traitement de chimiothérapie au platine pour un cancer du sein et se fait ensuite greffer des implants mammaires, elle est exposée à des doses particulièrement élevées de platine, ce qui peut être dangereux.
(1225)
    Enfin, j'aimerais vous dire que de nombreuses femmes du Canada se sont adressées à nous. Elles nous ont notamment dit que lorsqu'elles avaient constaté que leurs implants fuyaient et souhaité se les faire enlever, elles avaient eu beaucoup de difficulté à trouver de chirurgiens esthétiques disposés à le faire.
    Je pense que le Dr Brown peut vous en parler aussi, puisque c'est un chirurgien esthétique de renom. Plusieurs femmes nous ont dit qu'elles s'étaient adressées à lui et que son personnel leur avait répondu que si elles voulaient se faire enlever des implants mammaires au silicone qui fuyaient dans le cadre du système de soins de santé du Canada, elles allaient devoir attendre au moins un an et demi. Nous trouvons que c'est vraiment un délai très long.
    En conclusion, si Santé Canada décide d'autoriser les implants au gel de silicone, nous pensons qu'il y aura plus de femmes à s'en faire greffer, et plus de femmes à devoir se les faire enlever. Je ne suis pas certaine qu'il y ait suffisamment de chirurgiens esthétiques au Canada disposant d'une grande expérience du retrait d'implants mammaires au silicone qui fuient, pour que cette intervention puisse être effectuée dans des délais raisonnables.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci.
    Et merci à tous nos témoins.
    Les deux ministères sont représentés ici, Santé Canada et l'Agence de la santé publique du Canada, et comme le temps est limité, nous vous invitons à revenir à la table.
    Je précise aussi à mes collègues que deux de nos témoins vont devoir nous quitter avant la fin, M. Yeates et la Dre Stachenko.
    Nous allons donc passer aux questions, que vous pourrez poser à qui vous voudrez.
    Madame Brown.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à la Dre Chidwick. Tout d'abord, je vous félicite d'avoir participé au groupe d'experts de Santé Canada.
    Dans le rapport que vous avez soumis au ministre, la première recommandation se lit comme suit: « Le groupe croit que les questions concernant les effets potentiels sur la santé de toute exposition aux silicones à faible poids moléculaire n'ont pas été suffisamment traitées ».
    Puisque c'est la première recommandation et qu'elle me paraît très ferme, est-ce que cela signifie d'après vous que le groupe suggère au ministre de ne pas approuver ces demandes pour l'instant?
    C'est à quelle page?
    C'est à la page 6: « …les questions concernant les effets potentiels sur la santé de toute exposition aux silicones à faible poids moléculaire n'ont pas été suffisamment traitées ».
    Vous me demandez donc si, en fonction de cela, nous ne lui recommandons pas d'approuver ces demandes?
    Oui. Si l'on n'a pas suffisamment examiné les questions de sécurité, n'est-ce pas logique de ne pas accorder ces autorisations?
(1230)
    Je crois que notre tâche ne consistait pas à recommander ou non l'approbation. C'est une réponse qui relève plutôt du processus de consultation des personnes habilitées à prendre ces décisions.
    Un peu plus loin, dans ses recommandations, votre groupe recommande que « les fabricants fassent la preuve que le silicone ayant fui comporte des risques acceptables d'hypersensibilité et d'auto-immunité en faisant une révision critique des données tant de l'entreprise que de la littérature de documentation et, si nécessaire, en entreprenant des études sur des modèles animaux ».
    Par conséquent, là encore, d'après votre deuxième recommandation, on ne dispose pas de données suffisantes pour conclure que les implants sont sûrs.
    Vous dites qu'aucune de vos recommandations sur le processus et aucune des conclusions de votre groupe ne visent à suggérer au ministre ce qu'il doit ou ne doit pas faire, mais ces deux recommandations me paraissent tout de même plutôt claires.
    Le Dr Brown est ici. Il faisait lui aussi partie du groupe, et il peut intervenir s'il le veut. Si vous n'obtenez pas de réponse, nous poserons la question au Dr Brown.
    J'ajoute, et peut-être le Dr Brown pourrait-il compléter cette réponse, qu'encore une fois je ne crois pas que mon rôle était de tirer des conclusions. Nous étions là pour évaluer ce que nous avions sous les yeux, répondre à des questions très précises en laissant la décision aux décideurs.
    À la page 8, vous dites: « À cause du manque de données de laboratoire sur la fatigue, une certaine incertitude est liée à la durée de vie prévue », et à la page 11: « Les données fournies sont suffisantes pour établir la manière dont les dispositifs se comportent in vivo. Cependant, elles n'abordent pas tous les aspects de l'innocuité à long terme ».
    Je faisais partie du groupe et je m'associe à ces remarques. Mais encore une fois, c'est à d'autres personnes qu'il appartient de déterminer ce que cela signifie en matière de risques et en termes d'avantages ou d'inconvénients. Tout matériel comporte un certain degré d'incertitude et des questions qui ne sont pas totalement cernées. Le groupe l'a parfaitement reconnu, et c'est ailleurs que ces conclusions doivent être interprétées.
    Merci.
    Vu la complexité de cette technique, docteur Brown, avez-vous quelque chose à ajouter? Si oui, levez la main et vous pourrez répondre.
    Oui, j'aimerais faire quelques remarques.
    Je crois qu'un des aspects les plus remarquables du groupe consultatif d'experts était la diversité de sa composition. Vous pouvez demander à la Dre Chidwick ou à moi-même de vous parler plus précisément des recommandations du groupe concernant les excès de fatigue, les taux de rupture, la psychologie, etc. La Dre Chidwick a parlé d'immunologie dans une de ses interventions. L'avantage de notre groupe, c'est qu'il était composé d'experts de tous ces domaines qui nous ont permis, collectivement, d'élaborer une réponse aux questions qui nous étaient posées par Santé Canada.
    Je ne me présente pas comme expert en biomatériaux ou en immunologie. J'ai participé au processus de consultation utilisé pour élaborer ce rapport. Nous avons manifestement discuté de la notion de sécurité et cherché à savoir quand on a assez d'information, et quand il est raisonnable de demander des compléments d'information utiles. La question est de savoir à partir de quand une personne dispose d'assez d'information pour prendre une décision raisonnable et éclairée en fonction des risques qui lui sont exposés.
    Ma question suivante s'adresse à Sylvie Stachenko.
    Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Yeates?
    Non. Je ne veux plus entendre parler de cela. Je veux demander à Sylvie Stachenko...
    Non, je peux en rester là. Ça va.
    Très bien.
    Allez-y, madame Brown.
    Sylvie Stachenko, Dieu merci, nous a apporté un résumé de l'étude épidémiologique sur laquelle notre comité essaye de mettre la main depuis environ trois ans.
    Je relie vos notes et je vois que vous avez dit que le taux de suicide chez les femmes qui avaient reçu un implant mammaire au gel de silicone était à peu près le même que chez l'ensemble des patientes ayant eu recours à une chirurgie plastique, mais qu'il était par contre plus élevé que parmi l'ensemble de la population. Mais qu'en est-il des taux de cancer? Le taux de cancer chez les patientes ayant reçu un implant mammaire au gel de silicone était le même que parmi l'ensemble des patientes ayant subi une chirurgie plastique ordinaire, mais plus élevé que dans l'ensemble de la population, n'est-ce pas? Non?
(1235)
    Non. La réponse est non.
    Très bien. Donc, la seule aberration que vous ayez trouvée était...
    C'était la mortalité.
    La mortalité? Le décès, et c'était habituellement par suicide?
    Par suicide. C'est bien cela.
    D'accord.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bien. Merci.
    Madame Demers.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais d'abord adresser mes questions à M. Brown.

[Traduction]

    Est-ce que vous m'entendez?
    Oui, je vous entends, merci.
    Je constate qu'il me faudra poser mes questions en anglais.
    J'ai aussi des lettres de certaines de vos patientes. Elles ne sont pas tellement encourageantes. L'une d'elles nous dit qu'avant de pouvoir obtenir un rendez-vous avec vous pour faire enlever ses implants mammaires, il lui a fallu attendre neuf mois, après quoi il fallait encore attendre 12 mois pour les faire enlever parce que vous aviez trop de travail à faire des implants et des reconstructions.
    La même personne nous dit que si elle était prête à payer 4 800 $ pour passer en tête de la liste des patients assurés par le programme d'assurance-maladie de l'Ontario, vous étiez alors disposé à l'opérer avant les autres patientes, qui étaient assurées par le régime d'assurance-maladie de l'Ontario. En outre, elle a dû vous donner un dépôt de 800 $ qui n'était pas remboursable si elle décidait de ne pas se faire opérer par vous.
    Pouvez-vous expliquer pourquoi vous appliquez une pratique pareille à des personnes qui veulent désespérément se faire enlever leurs implants?
    Merci, madame Demers.
    Je dois dire pour commencer que l'Information que vous venez d'énoncer est tout à fait inexacte. Ce n'est absolument pas conforme à la situation réelle, alors permettez que je m'explique.
    Je vois régulièrement des patientes qui viennent me consulter parce qu'elles sont inquiètes au sujet de leurs implants mammaires, ou qui veulent simplement les faire vérifier parce que leur chirurgien n'est peut-être pas disponible, soit qu'il est décédé, soit pour d'autres raisons. Si une femme vient me voir pour un problème d'implant mammaire et qu'elle demande, en donnant un consentement éclairé, qu'une intervention soit faite — qu'il s'agisse de remplacer l'implant, d'en modifier la position, de l'enlever, etc. —, j'aime alors l'opérer immédiatement, si c'est possible. Je n'ai aucune raison de vouloir faire attendre une patiente.
    Au Canada, tout au moins en Ontario à l'heure actuelle, les femmes qui viennent à mon bureau et qui s'inquiètent de problèmes médicaux ayant trait à leurs implants se voient offrir une opération chirurgicale dans le cadre du régime d'assurance-maladie de l'Ontario. C'est un service médical assuré. Je dois alors opérer à l'hôpital financé publiquement où je travaille, nommément le Women's College Hospital.
    On m'accorde seulement un certain nombre d'heures d'opération. La totalité du temps opératoire qu'on m'accorde est consacrée aux patientes qui subissent une chirurgie reconstructive, comme les patientes que vous avez décrites. La totalité du travail de chirurgie esthétique que je fais et qui n'est pas assuré par le ministère de la Santé est effectué à l'extérieur de l'hôpital, de manière à ne pas rogner sur les heures d'opération dont je dispose à l'hôpital.
    Je peux seulement utiliser le temps qui m'est accordé. Quatre jours de chirurgie m'ont été enlevés pendant l'été à cause du ralentissement à l'hôpital. On m'a aussi enlevé des journées parce qu'il n'y a pas suffisamment d'infirmières pour assurer la bonne marche du bloc opératoire. On m'a aussi enlevé des journées parce qu'il n'y a pas suffisamment d'anesthésistes. Je fais donc le travail que je peux...
    Excusez-moi, docteur Brown. Puis-je dire à ces femmes qu'on va leur rembourser leur dépôt?
    Excusez-moi. Je vais terminer mes observations.
    Non, je suis désolée, vous avez très peu de temps et ce n'était pas ma question. Ma question était celle-ci : exigez-vous que ces femmes payent 4 800 $ pour passer devant les autres? Voilà ma question.
    La réponse est un non catégorique. Les patientes qui viennent me voir...
(1240)
    Elles peuvent donc se faire rembourser?
    Je vais maintenant terminer ma réponse.
    Les patientes qui viennent me voir pour un problème d'ordre médical se voient seulement offrir des services dispensés à l'hôpital financé publiquement, sans que mon bureau leur fasse payer un sou.
    Si une patiente se présente à mon bureau parce qu'elle a des implants qu'elle a décidé de se faire poser il y a de nombreuses années, s'il n'y a aucune raison médicale de les enlever et si elle souhaite seulement les faire enlever, c'est son choix. Ce n'est pas un problème médical. Ce n'est pas un service qui est assuré dans notre province, et on fait alors payer aux patientes des frais qui sont normaux pour ce type d'intervention.
    Merci.
    Merci, docteur Brown.
    Docteur Brown, combien d'appareils d'IRM existent au Canada, d'après vous?
    Je ne connais pas la réponse à cette question.
    Ne suggérez-vous pas à vos patientes, après qu'elles se soient fait poser des implants mammaires, d'aller chaque année ou à tous les deux ans passer un examen IRM pour s'assurer qu'il n'y a pas de fuite? N'est-ce pas la procédure normale?
    Ça ne l'est pas, madame Demers. Il n'y a pas consensus pour dire qu'il y a lieu de passer régulièrement des examens IRM. Ce n'est pas la pratique courante au Canada et ce n'est pas ce qu'a recommandé le radiologue qui a fait partie de notre groupe consultatif expert.
    Cela s'applique-t-il aux femmes qui doivent se faire examiner les seins chaque année après l'âge de 50 ans?
    Oui. La norme actuelle au Canada est un auto-examen mensuel, et des mammographies et examens par ultrason au besoin. L'examen par IRM est utilisé comme vérification secondaire ou tertiaire si un problème potentiel est décelé.
    Madame Demers, votre temps est écoulé.
    Monsieur Fletcher, vous avez cinq minutes.
    Je m'intéresse au processus. Les femmes qui ont des implants mammaires ont-elles eu leur mot à dire dans l'étude de cohorte sur les implants mammaires?
    Oui, il y a eu un processus de consultation en 1992 et 1995. Les femmes ont participé à ces consultations et ont même participé à l'élaboration du protocole et à la conception de toute l'étude. Elles ont donc été parties prenantes dès le départ.
    Cette étude était-elle éthique?
    Cette étude a fait l'objet d'examens rigoureux pour en vérifier l'éthique. Comme vous le savez, les femmes venaient de deux provinces, l'Ontario et le Québec, et les enquêteurs dans ces provinces venaient de l'Université Laval au Québec et de Action Cancer Ontario. Les examens ont été faits par le comité d'éthique de l'Université de Toronto et par le processus d'examen éthique de l'Hôpital du Saint-Sacrement, dans ces deux provinces.
    D'autres examens éthiques ont été faits lorsque le lien a été établi avec les dossiers, ce qui a été fait plus tard, comme je l'ai dit. Cette phase a également exigé un processus d'examen éthique rigoureux.
    La réponse est donc que cette étude a donné lieu à tous les examens éthiques rigoureux qui étaient nécessaires.
    Qui a financé cette étude?
    Au départ, le financement venait du Conseil du Trésor, mais les provinces ont également fait leur part, surtout en nature, et le coût total de cette étude de 1995 jusqu'à maintenant est d'environ 2,5 millions de dollars. Une grande partie de ce budget est constituée de ressources et de contributions en nature, par exemple le temps des chercheurs, des épidémiologistes, et l'analyse.
    Vous avez mentionné les chercheurs. Comment ont-ils obtenu les dossiers médicaux des patientes?
    Comme vous le savez, les études de cohortes épidémiologiques exigent une approche rigoureuse, comportant notamment un volet accès à l'information. Au Québec, il y a un organisme dont j'ignore le nom — peut-être que le Dr Yang Mao pourrait me le dire —, mais il existe dans cette province un organisme qu'il fallait consulter pour divulguer l'information.
    En Ontario aussi, il y a une réglementation... Je pense qu'il y a également en Ontario une loi qu'il faut invoquer pour que les médecins puissent divulguer les dossiers des patientes. Ces deux organismes ont assurément été consultés et ont accepté la divulgation des renseignements, mais il est certain que l'on a veillé rigoureusement à ce que les personnes en cause restent anonymes.
    Peut-être que le Dr Yang Mao, qui a participé à l'élaboration de la méthodologie, pourrait ajouter à cette réponse.
(1245)
    Au Québec, les renseignements sont tirés des dossiers de chirurgie Med-Echo et du bureau du plasticien. Nous annonçons publiquement la divulgation de ces dossiers et les envoyons aux patientes. Nous leur disons que si elles ne veulent pas participer, elles peuvent téléphoner à un numéro ou remplir une carte que nous fournissons. Mais les données viennent du bureau de chirurgie Med-Echo et du bureau du plasticien.
    Merci.
    Madame Priddy, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse au Dr Zuckerman. Je ne me rendais pas compte avant d'avoir fait récemment certaines lectures sur le platine et les implants mammaires... Pourriez-vos me dire si le niveau de platine est demeuré le même dans ce que j'appellerais la première génération, la deuxième génération et la troisième génération d'implants mammaires, ou bien si ce taux a sensiblement diminué?
    La deuxième partie de ma question — je pense que c'était en partie sur l'écran — est celle-ci : quels sont les deux ou trois résultats les plus courants ou peut-être les plus graves que vous constatez chez des femmes qui ont dans leur corps des quantités importantes de platine qui reste présent et réagit avec leur corps? Je pense que les autres exemples donnés ne concernent pas le platine.
    L'une des complications les plus courantes dont se plaignent les femmes qui ont des problèmes qui semblent liés à leurs implants consiste en des troubles de concentration et des pertes de mémoire. La situation s'améliore quand les implants sont enlevés. Les femmes sont souvent dans la trentaine et elles se sentent comme si elles étaient septuagénaires. Elles ont de la difficulté à se concentrer, elles ont des trous de mémoire, elles n'arrivent pas à parler de manière cohérente. Ces troubles neurologiques pourraient être liés au platine.
    Il n'y a aucune donnée comparant les différentes générations. Le platine semble venir de l'enveloppe et non pas du gel. Le platine est utilisé pour épaissir le silicone, pour fabriquer l'élastomère dont est composée l'enveloppe. Ce n'est pas la forme naturelle du silicone. C'est pourquoi on utilise cet élément. Des recherches sont en cours pour vérifier si les nouveaux implants mammaires au gel cohésif contiennent plus de platine; on est peut-être obligé d'utiliser du platine pour épaissir le gel à ce point.
    La quantité de platine utilisé pour fabriquer les implants mammaires est censée être vraiment microscopique — des quantités infimes. Mais nous ne savons pas si certains renferment en fin de compte plus de platine que prévu, à cause du procédé de fabrication. Cela explique peut-être pourquoi certaines femmes deviennent très malades à cause de leurs implants mammaires tandis que d'autres femmes restent en santé.
    Je pense que ma prochaine question s'adresse à Santé Canada, mais je n'en suis pas certaine. Les implants mammaires sont un matériel médical. Pourriez-vous me dire quel pourcentage de l'ensemble des « matériels médicaux » pour lesquels on présente une demande correspond aux implants mammaires?
    Désolé, je ne suis pas sûr de comprendre la question.
    Pour les fins de la discussion, disons que 100 personnes font une demande pour obtenir un matériel médical...
    Dans le cadre du programme d'accès spécial. Je vois.
    Oui, quel pourcentage de ces 100 demandes vise des implants mammaires?
    Merci pour cette précision.
    Je peux vous donner les chiffres de l'année dernière, pour vous donner une idée. Nous avons reçu environ 11 000 demandes pour l'ensemble des matériels médicaux, dont environ 8 500 pour des implants au gel de silicone. J'ajoute toutefois que certaines demandes que nous recevons pour d'autres instruments, médicaments ou matériels peuvent nous arriver en paquets de plusieurs centaines.
(1250)
    Merci. Cette précision est utile.
    Est-ce qu'il me reste du temps?
    Pour une brève question.
    Très bien.
    C'est au sujet du groupe d'experts. Je vais peut-être me contenter de faire une observation, car cela va prendre tout mon temps.
    Trois personnes figurent sur la liste à titre d'experts du milieu des patients, et elles étaient toutes les trois infirmières. Dois-je comprendre qu'elles ont également été des patientes ayant reçu des implants mammaires? Le groupe d'experts comprenait-il une véritable patiente qui était experte en la matière? Quand on me dit « expert du milieu des patients », je m'attends à ce qu'il y ait eu une patiente ayant subi cette intervention particulière.
    Aucun membre du groupe n'a discuté ouvertement de son dossier médical. Les gens que je...
    Les personnes énumérées à titre d'experts du milieu des patients étaient en fait des infirmières ayant suivi une formation supplémentaire qui ont travaillé avec des patientes.
    Ce sont des personnes qui avaient travaillé avec des patientes. La question de savoir si elles avaient une expérience personnelle en tant que patientes n'a pas été abordée au groupe d'experts.
    Il est donc fort possible qu'aucune patiente n'ait participé à cette étude mettant prétendument l'accent sur les patientes.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Madame Davidson, vous avez cinq minutes.
    Je voulais poser une question au Dr Brown.
    Pour obtenir les implants mammaires au gel de silicone, les médecins doivent demander l'autorisation dans le cadre d'un programme d'accès spécial. L'accès spécial est défini comme « l'accès à un instrument médical en cas d'urgence ou lorsque les traitements classiques ont échoué, ne sont pas disponibles ou ne conviennent pas ».
    Relativement aux implants mammaires au gel de silicone, pourriez-vous nous expliquer le sens de l'expression « cas d'urgence » et « traitements classiques »? De plus, faites-vous une demande d'accès spécial pour les implants mammaires? Pourriez-vous donner au comité une estimation de la fréquence à laquelle vos demandes d'accès spécial portent sur le remplacement d'un implant qui n'a pas réussi, sur des demandes de reconstruction ou d'augmentation à des fins esthétiques?
    Merci.
    Oui, dans le cadre du programme d'accès spécial, je fais effectivement des demandes pour obtenir les implants mammaires au gel de silicone. Je dirais qu'environ 40 p. 100 à 50 p. 100 sont destinés à des chirurgies mammaires reconstructives chez des femmes qui ont subi des mastectomies ou des tumorectomies et que le reste, soit 50 à 60 p. 100, est réparti entre les femmes qui font remplacer un implant, qui ont probablement eu des implants mammaires au gel de silicone dans le passé, et les femmes qui subissent une chirurgie d'augmentation mammaire primaire avec indications spécifiques, par exemple forme tubéreuse anormale du sein, auquel cas les instruments qui sont actuellement disponibles, comme les implants mammaires remplis avec un soluté physiologique, causeraient probablement des problèmes importants et augmenteraient le taux de réopération chez ces patientes.
    On pourrait en donner comme exemples des patientes qui ont une quantité très minime de tissu dans certaines zones, par exemple une patiente aux seins de forme tubéreuse ou une patiente qui a subi une mastectomie, auquel cas il y a très peu de tissu pour couvrir un implant dans un certain secteur ou lorsqu'un implant de soluté physiologique serait extrêmement palpable et très peu naturel d'apparence et au toucher. Ce sont des cas où les matériels classiques qui sont actuellement disponibles ne conviendraient pas.
    Merci.
    D'après votre expérience, combien de temps durent ces implants? Quand vous voyez vos patientes, combien de temps s'écoule-t-il avant que certaines d'entre elles commencent à éprouver des problèmes, et quel semble être le pourcentage de celles qui ont effectivement un problème?
    Nous venons juste de terminer une étude de nos données pour les cinq premières années après que j'aie commencé à utiliser ces instruments en 2001. Bien sûr, j'aimerais et j'espère disposer de données plus étoffées avec les années.
    À l'heure actuelle, mon taux de réopération pour quelque raison que ce soit — c'est-à-dire pour toutes les patientes, que ce soit une chirurgie reconstructive parce qu'une patiente a vu ses seins changer à cause de l'allaitement, ou bien pour un remplacement d'un implant — est de 5,7 p. 100 sur la période de l'étude, pour toute une gamme de raisons. Ce peut être causé par un mauvais positionnement, par exemple un implant qui s'est retourné ou qui a changé de position. Ce peut être un cas d'asymétrie, ce qui est un problème potentiel courant, surtout quand on reconstruit un seul sein et qu'on essaie de l'apparier au sein naturel de l'autre côté. Il peut aussi s'agir de problèmes associés au tissu de cicatrisation ou à des contractures autour de l'implant.
    Je n'ai pas identifié une seule rupture d'implant rempli de gel que j'ai utilisé dans ma carrière. Il y en a peut-être que je n'ai pas identifié et qui pourraient l'être seulement par une étude de suivi à plus long terme ou en faisant passer un examen par IRM à toutes les patientes sans exception, mais je n'ai pas encore vu un seul implant perforé.
(1255)
    Merci.
    Est-ce qu'il me reste du temps?
    Vous pouvez poser une très brève question.
    Bon, très rapidement, je voudrais demander au Dr Zuckerman de nous parler d'implants testiculaires fabriqués à l'aide de substances semblables, qui sont également en vente sur le marché. Pourriez-vous nous parler de ces matériels du point de vue de la FDA? Comment évalue-t-on les données cliniques concernant leur innocuité?
    On en sait beaucoup moins sur ces matériels, mais je crois que l'implant testiculaire est fabriqué d'un silicone plus dur. Je ne crois pas que ce soit du gel, mais si ça l'est, il contient beaucoup moins de gel.
    L'un des problèmes des implants mammaires est qu'il y a tellement de silicone. S'il est perforé et qu'il fuit, il y a une énorme quantité de silicone qui peut s'introduire dans le corps, tandis que dans le cas d'un très petit implant comme l'implant testiculaire, même s'il est fabriqué de gel et qu'il est perforé, le corps serait exposé à une quantité de gel beaucoup plus petite. Par conséquent, le risque de problèmes est beaucoup moindre.
    De plus, le nombre d'hommes qui ont des implants testiculaires est très limité en comparaison du nombre de femmes qui ont des implants mammaires, et nous en savons donc beaucoup moins sur la question. Quand on a des millions de femmes qui obtiennent un produit aux États-Unis, on constate beaucoup plus de problèmes. Même si la proportion est la même, c'est beaucoup plus facile de faire un suivi.
    Par ailleurs, pour les femmes qui ont des implants mammaires, il a fallu 40 ans ou 30 ans avant qu'on commence à en parler ouvertement. Je ne pense pas que les hommes qui ont des implants testiculaires en parlent très ouvertement, pas encore.
    Merci. Nous abordons là un sujet très sensible.
    Ruby Dhalla, vous avez cinq minutes.
    Merci à tous ceux qui ont pris le temps de venir aujourd'hui. C'est une question extrêmement importante pour bon nombre de mes commettants dans Brampton—Springdale, comme pour beaucoup de mes collègues autour de la table et, de manière générale, pour toutes les femmes de notre pays.
    J'ai quelques préoccupations sur la manière dont le Canada pourrait aborder ces problèmes. On a envisagé de créer un groupe qui se pencherait sur les aspects scientifiques, médicaux et cliniques et ce groupe a été mis sur pied. Peut-être pourrez-vous répondre par oui ou non, car le temps file : les personnes nommées à ce groupe étaient-elles tenues de déclarer un éventuel conflit d'intérêts?
    Elles étaient tenues d'identifier tout conflit d'intérêts, oui.
    Merci.
    Dans ce cas, étant donné que nous savons que ces personnes étaient tenues de déclarer un éventuel conflit d'intérêts, je trouve très inquiétant que trois des neuf membres du groupe aient identifié un conflit d'intérêts et que deux de ces personnes ont en fait été des conseillers rémunérés de compagnies qui produisent ces matériels médicaux. Pourquoi Santé Canada n'a-t-il pris aucune mesure pour garantir que ce groupe puisse donner des conseils objectifs et sans parti pris?
    Nous avons estimé qu'il était très important d'avoir accès à des gens qui sont impliqués dans ce domaine. Il était donc inévitable d'avoir de tels intérêts et affiliations, si nous voulions des gens qui possédaient une expérience concrète. Nous estimons que c'est essentiel. Le rapport du groupe d'experts a été remis et reflète en fait un très solide consensus et un très vaste éventail de points de vue. Donc, étant donné la nature de l'affaire qui nous occupe, nous pensons qu'il était très important de pouvoir compter sur des gens qui avaient acquis une expérience concrète dans ce domaine.
    Sauf le respect que je vous dois, compte tenu du grand nombre de plasticiens au Canada et aux États-Unis, s'il fallait en arriver là, ce dont je doute beaucoup, Santé Canada n'aurait-il pas pu écarter les gens retenus pour ce groupe d'experts et trouver d'autres personnes qui n'étaient pas en conflit d'intérêts?
    Vous pouvez imaginer que pour mes collègues et moi-même autour de cette table, c'est très difficile pour nous d'être en présence de recommandations qui ont été formulées par un groupe consultatif qui était notoirement en conflit d'intérêts, alors que Santé Canada n'a rien fait pour y remédier. Quand des gens sont payés par une compagnie qui produit de tels implants au gel de silicone, beaucoup de femmes aux quatre coins de notre pays vont mettre en doute la validité des recommandations formulées par ces gens-là.
    Nous estimons que les gens qui ont été retenus pour être membres du groupe ont bien rempli leur rôle. Ils avaient des affiliations, mais nous ne trouvions pas qu'ils étaient en conflit d'intérêts. Dans une certaine mesure, c'est inévitable, étant donné la nature du dossier en question. Nous estimons que l'expérience d'experts comme le Dr Brown, qui comparaît également aujourd'hui, est très importante et que nous avons besoin d'entendre ce qu'ils ont à dire au sujet des pratiques utilisées ici au Canada. Je pense que nous devons le savoir.
    J'ai le plus grand respect pour le Dr Brown et l'excellent travail qu'il a accompli pour les femmes, mais je suis certaine qu'il y a beaucoup d'autres plasticiens au Canada qui n'ont pas ce conflit d'intérêts. Santé Canada a-t-il fait des efforts quelconque pour chercher des personnes qui n'étaient peut-être pas en conflit d'intérêts? Dans l'affirmative, en quoi ont consisté ces efforts déployés par Santé Canada?
(1300)
    Je vais demander au Dr Sharma de vous parler plus en détails de la manière dont on a procédé pour choisir les membres du groupe.
    Au sujet des conflits d'intérêts, et je suis certaine que le Dr Brown pourra en parler également, les préoccupations soulevées dans le passé par le comité au sujet des conflits d'intérêts portaient essentiellement sur les plasticiens membres du groupe, dont on insinuait qu'ils avaient en quelque sorte reçu une rémunération pour avoir formulé leurs recommandations. Je suis certaine que le Dr Brown va réitérer cela. Mais il y a aussi sur le marché des implants remplis de solution saline et le fait d'avoir procédé à ces interventions chirurgicales ne présente donc aucun avantage comparatif sur le plan pécuniaire.
    Quant au choix des membres du groupe, on a choisi également des représentantes des patientes et d'autres personnes qui avaient des opinions différentes de celles des plasticiens. Il importe de se rappeler que les membres du groupe d'experts sont bénévoles. Il est vrai que nous avons tout un éventail de plasticiens auxquels nous pouvons nous adresser, mais c'est toujours difficile de trouver des gens qui sont disponibles et qui sont en mesure de venir et de se présenter aux réunions.
    Pour ce qui est des autres conflits d'intérêts qui ont été évoqués, je crois que le Dr Brandon a également été mentionné. Il est l'expert nord-américain sur les données en matière de perforation. Ce serait assurément très difficile de trouver un expert nord-américain qui n'a jamais conseillé d'autres gouvernements ou des entreprises.
    Merci.
    Monsieur Batters.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être présents, et merci aussi à M. Brown qui participe à nos travaux par vidéoconférence.
    À titre de nouveau membre du comité de la santé, je vais commencer par faire quelques observations de la part de quelqu'un qui voit tout cela de très haut, après quoi je demanderai aux représentants de Santé Canada et peut-être aussi au Dr Zuckerman de commenter cette première observation.
    Premièrement, cette affaire donne évidemment lieu à un débat très animé et il y a de part et d'autre des arguments présentés avec beaucoup de passion. À titre de nouveau membre du comité, je trouve que chacun pourrait être gagnant en prenant un peu de recul et en cherchant plutôt à trouver ce qui serait dans l'intérêt supérieur des patientes.
    Je dirai aux gens de Santé Canada qu'après avoir examiné cette affaire et pris connaissance des documents, je trouve que le processus tout entier semble très lourd et ardu. Santé Canada a demandé que ces implants soient retirés de la vente en 1992 — c'était il y a 14 ans — et il y a environ 19 000 demandes par année qui sont présentées au titre du programme d'accès spécial. Cela m'apparaît un véritable cauchemar.
    Vous avez fait de nombreuses études et vous avez demandé à plus d'un groupe d'experts de se pencher sur cette question. Il y a des études sur le sujet. J'ai hâte d'entendre le point de vue du Dr Zuckerman sur l'expérience aux États-Unis. Quand allez-vous prendre une décision et faire des recommandations au ministre?
    J'ai tendance à être d'accord avec le Dr Brown pour dire qu'à un moment donné, ça suffit. Quand on pense avoir suffisamment d'informations... Peut-être que vous n'en êtes pas encore là, peut-être est-ce votre argument, mais 14 ans ont passé. Quand allez-vous enfin dire : « Voici l'information, monsieur le ministre, à vous de prendre une décision »?
    Le ministre Clement est un homme très occupé, je suis certain qu'il n'a pas le temps... Peut-être pouvez-vous expliquer le processus donnant lieu à ce qui semble être un permis du ministre dans le cadre du programme d'accès spécial. Des milliers de demandes sont présentées à ce titre. Vous pourriez peut-être me dire si quelque chose m'échappe. De nombreuses études ont été faites, quand donc allons-nous prendre une décision et présenter le tout au ministre?
    Le député a tout à fait raison, le processus a été prolongé. Nous arrivons à la fin du processus pour ce qui est de nos analyses des études qui ont été faites et de l'examen de la littérature. Je le répète, nous touchons au but.
    Je dois apporter une précision : ce n'est pas le ministre qui va prendre cette décision, mais bien le ministère. Ce pouvoir est délégué à Santé Canada.
    La Direction générale de la santé publique?
    Oui, notre direction générale.
    Nous arrivons au terme de ce qui a été en effet un long processus, mais comme vous l'avez fait remarquer, beaucoup de gens ont manifesté leur intérêt à ce sujet, les produits en question ont suscité beaucoup d'inquiétudes. Nous voulons donc nous assurer d'aller au fond des choses et de scruter à la loupe toutes les données sur l'innocuité, sur l'efficacité, sur la qualité, pour être bien certains d'avoir en main toute l'information qu'il nous faut pour prendre une décision dans un sens ou dans l'autre. Je le répète, nous arrivons au terme de ce processus.
(1305)
    Absolument, docteur Yeates, mais le problème, c'est l'accumulation de demandes d'approbation des matériels médicaux. Cela m'apparaît absolument ridicule. Si j'étais une femme canadienne, et si je voulais obtenir un implant pour des raisons esthétiques ou, qu'à Dieu ne plaise, pour une reconstruction à la site d'une intervention chirurgicale, cela serait un véritable cauchemar et je ne sais pas comment je pourrais prendre cette décision. Ce doit être un cauchemar pour les médecins aussi, mais les patientes ont vraiment toute ma sympathie.
    Si j'avais un peu plus de temps, monsieur le président, je voudrais poser deux ou trois questions au Dr Brown. Combien de temps me reste-t-il? Une minute et demie?
    Docteur Brown, je voudrais aborder plusieurs questions et je vous demanderais de m'éclairer. Pour ce qui est des augmentations mammaires pour des raisons esthétiques, ma préoccupation initiale était que cela pouvait allonger les listes d'attente dans nos hôpitaux. Or vous semblez dire que ces interventions sont faites dans votre clinique privée. Est-ce vrai, monsieur, que toutes ces opérations sont faites dans des cliniques privées? Une chirurgie primaire...
    Je peux seulement parler au nom de...
    Désolé, je veux parler de chirurgie primaire pour augmentation.
    Je comprends. Je peux seulement parler au nom de mon cabinet personnel. J'utilise chaque minute du temps qui m'est accordé à l'hôpital Women's College pour ma pratique de chirurgie reconstructive. Tout le temps qui s'ajoute...
    Merci.
    Merci, monsieur. Je veux poursuivre, parce que j'ai très peu de temps.
    Vous conviendrez peut-être avec moi qu'on en a désespérément besoin. Peut-être des lignes directrices rigoureuses sont-elles en place.
    Je vous prie de croire, monsieur, que je suis animé de bonnes intentions. Je n'essaie nullement de vous prendre en défaut.
    Pour une femme qui a des problèmes avec ses implants, peu importe que ceux-ci aient été mis en place dans le cadre du régime financé publiquement ou dans votre clinique privée, si elle a des problèmes avec ses implants, peut-elle les faire enlever si elle paye pour ce faire, si elle décide qu'elle ne peut plus attendre l'opération qui est prévue à une date éloignée à l'hôpital public?
    Je crois que si une intervention est assurée à titre d'acte médical nécessaire, ce serait enfreindre la Loi canadienne sur la santé que de payer pour faire faire cette intervention plus rapidement dans un cadre différent. C'est ce que je crois.
    Merci, monsieur Batters.
    On m'informe que M. Yeates et Mme Stachenko doivent maintenant partir. Je les remercie d'être venus. Je leur en suis très reconnaissant.
    Nous allons poursuivre en interrogeant les autres témoins.
    Madame Keeper.
    J'ai une question qui s'adresse à l'Agence de santé publique et je me demande si Mme Sharma serait en mesure de répondre à cette question, puisqu'elle travaille à Santé Canada.
    Je vais répondre.
(1310)
    Merci, docteur.
    Les résultats de l'étude sur l'incidence du cancer parmi une cohorte de femmes en Ontario et au Québec montrent, comme vous l'avez dit, qu'il n'y a aucune corrélation entre un taux accru de cancer et les femmes qui ont reçu des implants mammaires. Est-ce la position officielle de l'Agence de santé publique du Canada? Ce résultat va-t-il influer sur la manière dont vous faites la promotion de la sécurité ou des risques des implants mammaires chez les femmes au Canada?
    Nous allons simplement déclarer que l'étude indique qu'il n'y a pas de taux accru de cancer, dans cette étude. Évidemment, si vous examinez la sécurité et d'autres questions, en fait l'ensemble de la réglementation, nous ne sommes qu'un des éléments à prendre en compte. Il s'agit d'une étude de cohorte qui n'est qu'un des éléments pris en compte dans un processus décisionnel très complexe.
    Il n'y a pas seulement la question de l'incidence à long terme; la problématique comprend d'autres éléments dont nous avons discuté ici. Essentiellement, notre position est fondée sur cette étude longitudinale qui, soit dit en passant, est conforme à d'autres études de cohorte. Il est très important de signaler que celle-ci permet d'obtenir des statistiques beaucoup plus solides parce qu'elle englobe beaucoup plus de femmes que n'importe quelle étude de cohorte. En pratique, il est important de dire que, pour ce qui est d'examiner des catégories précises et des sous-groupes, cette étude permet d'étayer plus solidement des assertions.
    Deuxièmement, comme le Dr Zuckerman l'a dit, quand on examine l'incidence à long terme, il faut des périodes de suivi de plus de cinq ans, surtout quand on étudie le cancer. Cette étude-ci a un intervalle de suivi moyen de 15 ans, et le suivi s'étend dans certains cas jusqu'à 25 ans. En comparaison d'autres études de cohorte internationales, cette étude particulière nous a donné une plus grande puissance statistique et une assez bonne période de suivi nous permettant de valider les autres études. Or nos constatations sont très cohérentes.
    Quand nous discutons de l'incidence sur la santé de la population, tout converge. Nous ajoutons à cette base de connaissance et ce que nous ajoutons a un plus grand poids statistique, étant donné la puissance statistique de l'étude.
    Vous avez également dit que vous avez constaté une augmentation du taux de suicides parmi ces patientes. Du point de vue de la santé publique, avez-vous examiné d'autres facteurs, peut-être la fibromyalgie, des troubles du système immunitaire ou d'autres pathologies?
    Il faut préciser que dans ces études, nous nous penchons sur la mortalité. Évidemment, de ce point de vue, nous n'avons pu examiner la morbidité, ce qui revient un peu à la question que vous posez.
    Est-ce que l'Agence de santé publique ou le gouvernement fédéral prévoit commander d'autres études pour examiner ces autres questions?
    À la lumière de ces résultats, nous allons discuter des prochaines étapes avec nos partenaires provinciaux, universitaires et du gouvernement fédéral. Il s'agit évidemment d'une étude de cohorte. Comme vous le savez, il y a beaucoup de bases de données dans notre pays. Il y a des bases de données sur les facteurs de risque obtenues grâce à l'enquête sur la santé des collectivités. Ce que nous pouvons faire, ce serait de voir s'il y aurait peut-être moyen d'établir des liens plus serrés afin de mieux comprendre les questions que vous soulevez.
    On en discute donc, aucune décision ferme n'a été prise et nous en sommes seulement à examiner les possibilités en matière de recherches plus poussées.
    Docteur Zuckerman, vous avez constaté qu'il y avait effectivement des taux accrus de cancer. Pourriez-vous nous donner quelques explications sur cette étude et nous dire comment vous en êtes arrivé à ces conclusions?
    Bien sûr.
    Ce n'est pas mon étude; c'est une étude du National Cancer Institute. C'est une étude comparable mais qui n'a peut-être pas tout à fait la même envergure que l'étude canadienne dont on vient de parler. Elle portait sur des femmes qui avaient des implants depuis en moyenne 20 ans plutôt que 15 ans. Elle portait donc sur une période un peu plus longue.
    J'ai fait afficher la diapo. Ils ont constaté que le taux de décès causés par le cancer du cerveau avait doublé, que le taux de décès causés par le cancer du poumon avait doublé, et que le taux de suicides avait doublé. Tout cela en comparaison avec des femmes qui avaient subi d'autres types de chirurgies plastiques. Les femmes qui subissent des chirurgies plastiques sont plus nombreuses à fumer. Il est donc important de les comparer entre elles, et non pas à l'ensemble de la population.
    En examinant de plus près l'incidence du cancer du poumon, par exemple, ils ont constaté que les femmes qui fumaient et qui avaient des implants mammaires avaient plus de chance de mourir du cancer du poumon que les femmes qui fumaient mais qui n'avaient pas d'implant mammaire. Cette différence était peut-être attribuable à la double vulnérabilité du tabagisme et des fuites de silicone, mais qui sait?
    Il est possible que si l'on continue de suivre ces femmes pendant une plus longue période, on obtienne des résultats différents. Si l'on prend des gens qui fument depuis en moyenne 10 ou 15 ans, la plupart ne sont pas encore morts du cancer du poumon. Mais si l'étude porte sur une période de 25 ans, beaucoup d'entre eux en meurent. Ça prend du temps.
    Merci.
    M. Dykstra cède son tour à M. Batters.
    Monsieur Batters, vous avez cinq minutes.
    Merci encore, monsieur le président.
    Je veux poursuivre dans la même veine que tout à l'heure et je vais m'adresser d'abord au Dr Sharma et ensuite au Dr Zuckerman.
    Au sujet du processus qui est en place, docteur Sharma, à quoi pouvons-nous nous attendre comme prochaine étape? Comment Santé Canada passe-t-il de l'étude des données scientifiques et autres à une décision en termes de politique de réglementation de ce matériel? Où en sommes-nous et quelles sont les prochaines étapes? Pouvez-vous nous donner un échéancier?
    Je suppose que, quand vous parlez d'une décision en termes de politique de réglementation, vous voulez dire une décision quant à l'autorisation d'utiliser ces produits.
(1315)
    Oui, exactement.
    En fait, nous en sommes aux dernières étapes de l'étude scientifique et, comme vous l'avez dit, cette étude est en cours, pour certaines applications, depuis environ cinq ans. Pour vous donner un contexte, normalement, l'étude pour les appareils médicaux de classe III et de classe IV dure 75 ou 90 jours. Cette étude-ci est donc beaucoup plus poussée et approfondie que celles que l'on fait pour d'autres matériels médicaux.
    Nous arrivons au terme de ce processus. À la fin du processus, on fait une recommandation. La recommandation peut prendre trois formes. On peut recommander d'accorder un permis. Dans ce cas, les implants seraient en vente libre. On peut recommander d'accorder un permis assorti de conditions. Ou bien la décision peut être de ne pas accorder de permis. J'ai dit que nous en étions aux dernières étapes, mais des renseignements susceptibles de prolonger le processus peuvent surgir au cours de ces dernières étapes.
    Absolument.
    J'ai une autre question qui s'adresse au Dr Sharma.
    À l'heure actuelle, dans le cadre du programme d'accès spécial — je rappelle que l'on reçoit des milliers de demandes dont beaucoup sont accordées — dans quelle mesure les décideurs examinent-ils ces demandes de façon approfondie? Si j'ai bien compris, c'est le ministre qui décide. Il y a des milliers de demandes.
    Je ne peux pas croire — c'est peut-être un parti pris de ma part — qu'à chaque fois que le Dr Brown ou l'un de ses collègues professionnels présente une demande, on fait une étude détaillée pour chaque patiente. Mais c'est peut-être le cas. Pouvez-vous me dire en quoi consiste le processus, à chaque fois qu'on accorde ou qu'on refuse l'une de ces demandes présentées dans le cadre du programme d'accès spécial?
    Absolument, et j'en profite pour apporter une précision sur un point soulevé tout à l'heure.
    Nous parlions de chiffres. Pour les implants mammaires, au cours de la dernière année financière, il y en a eu environ 8 000. Bien que le nombre de demandes soit plus restreint pour d'autres matériels médicaux, comme M. Yeates l'a dit, les demandes nous parviennent parfois par paquets. Par exemple, pour une endoprothèse à élution de médicaments que l'on implante dans le coeur, nous accordons environ 8 000 permis, et c'est donc comparable aux implants mammaires.
    Chaque demande qui est présentée dans le cadre du programme d'accès spécial émane d'un médecin qui fait la demande pour une patiente individuelle qui veut des implants mammaires. Chaque demande est étudiée, examinée et analysée au regard de quatre séries de critères qui doivent être respectés avant que le ministre — ce pouvoir est en fait délégué aux fonctionnaires du ministère — puisse autoriser la demande. Cette étude est faite pour chaque demande.
    Merci.
    Docteur Brown, est-ce un véritable cauchemar que d'obtenir l'approbation pour les patientes? Faut-il passer par un processus long et ardu pour obtenir l'approbation?
    Non, ce n'est pas particulièrement long et ardu. J'essaie de présenter une demande d'accès spécial seulement quand j'estime que c'est tout à fait indiqué pour une raison précise. En pareil cas, comme je fais essentiellement un tri préalable en ne présentant pas de demande à moins qu'il n'y ait une indication appropriée, ma demande est généralement approuvée.
    Merci, monsieur.
    Docteur Zuckerman, quelle est l'expérience aux États-Unis quant au processus pour les patientes qui veulent obtenir des implants au gel de silicone?
    Le processus est assez similaire. Le silicone est censé être réservé aux femmes qui ont besoin d'une reconstruction après avoir eu le cancer du sein ou qui doivent faire remplacer un implant. Cependant, aux États-Unis, on englobe dans la reconstruction les femmes dont les seins n'ont plus l'air aussi jeunes parce qu'elles ont allaité. J'ai été étonnée de constater que c'était considéré comme une difformité, mais apparemment, c'est le cas. Par conséquent, un pourcentage très élevé des femmes aux États-Unis obtiennent des implants mammaires au gel de silicone parce que leurs seins ressemblent aux seins d'une femme de 35 ans et non plus de 20 ans. Ces femmes peuvent obtenir très facilement des implants mammaires; il suffit qu'un médecin dise que c'est pour une reconstruction. Et comme je l'ai dit, leur définition de la reconstruction ne correspond pas à l'idée que les femmes canadiennes se font, à mon avis, d'une reconstruction mammaire.
    C'est un problème en ce sens que ces femmes sont censées être étudiées. Aux États-Unis, si elles obtiennent des implants par accès spécial, elles sont censées être étudiées sur une longue période, et elles ne le sont pas. En fait, elles ne sont pas étudiées du tout.
    Je suis désolé, votre temps est écoulé.
    Madame Barbot, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Comment pouvez-vous dire que le docteur Brown, qui utilise ces implants depuis 2001, ne profite pas directement de la décision qui sera prise? En effet, ces implants mammaires ne sont pas couverts par l'assurance.

[Traduction]

    Ce que j'ai dit, c'est que comme les implants remplis de solution saline sont autorisés à la vente au Canada — c'est le cas depuis 1971 —, si une patiente veut des implants mammaires et si des frais sont exigés pour ce service, il n'y a aucune différence dans la rémunération, que l'on utilise un implant à solution saline ou un implant au gel de silicone.

[Français]

    J'aimerais savoir si, à l'heure actuelle, des recours collectifs sont intentés contre Santé Canada et, le cas échéant, en vertu de quel motif.
(1320)

[Traduction]

    Les tribunaux sont saisis d'un certain nombre de litiges. Certains ont en fait été rejetés et réglés. Le gouvernement du Canada n'a pas versé d'argent pour régler ces litiges, je veux parler de ceux qui avaient été intentés en Colombie-Britannique. Pour les autres, je ne peux pas en parler parce qu'ils sont en instance devant les tribunaux, mais nous soutenons que les décisions réglementaires et scientifiques qui ont été prises dans ces dossiers étaient scientifiquement solides.
    J'ai une question pour le Dr Brown.
    Que dites-vous du fait que les survivantes du cancer qui ont des implants ont davantage de complications et ont plus de chances d'avoir besoin de nouvelles interventions chirurgicales pour remédier à ces problèmes, en comparaison des patientes qui ont eu des augmentations mammaires?
    Merci.
    Ce fait n'est pas du tout étonnant. La chirurgie reconstructive mammaire est très complexe et très difficile et c'est une opération très délicate pour le plasticien, peu importe qu'il utilise un implant ou bien des tissus prélevés sur d'autres parties du corps. La chirurgie d'augmentation mammaire est généralement une intervention assez simple; nous avons alors affaire à une partie naturelle et normale de l'anatomie et nous en modifions l'apparence. Si c'est bien fait, le taux de complications est très faible.
    Dans le cas de la chirurgie reconstructive, on essaie de reconstruire, de créer un nouveau sein, essentiellement à partir de rien. C'est une intervention beaucoup plus difficile et complexe, sans compter que c'est souvent une procédure unilatérale. Beaucoup des cas de réopération qui sont cités dans ces études visaient à apporter des retouches pour des raisons de symétrie, par exemple en relevant ou en réduisant un sein opposé pour essayer de faire en sorte qu'il ressemble davantage au sein qui a été reconstruit.
    Cette donnée ne m'étonne donc pas du tout.
    Merci beaucoup.
    Madame Brown.
    Merci beaucoup.
    Docteur Sharma, vous recevez plus de 8 000 demandes pour ces matériels; combien d'employés de Santé Canada examinent ces demandes et quelles sont leurs compétences?
    Vous voulez parler du programme d'accès spécial.
    L'accès spécial, les 8 000 implants au gel de silicone...
    En tout temps, il y a habituellement deux ou trois personnes qui étudient ces demandes. Le programme d'accès spécial pour les matériels médicaux est dirigé en fait par un médecin, un professionnel de la santé, et les gens qui étudient les demandes sont des chimistes et des gens qui possèdent une expertise dans ces matériels, essentiellement.
    Bien. Les demandes ne sont donc pas toutes examinées par des médecins, mais par des chimistes.
    Non. En bout de ligne, elles sont toutes examinées par le médecin, parce que c'est lui qui est à la tête de ce programme.
    Il dirige les employés du programme. Ceux-ci lui font une recommandation et il doit l'approuver ou la rejeter — ou bien peuvent-ils dire oui de leur propre chef?
    Non. Il doit approuver ou rejeter et il lit lui-même tous les formulaires de demande d'accès spécial.
    Sur les 8 000 demandes et plus, combien ont été rejetées l'année dernière?
    Je n'ai pas les chiffres sous la main, mais c'est un très petit nombre. Moins de 100 ont été refusées.
    Au sujet du groupe d'experts et de son rapport, il me semble que l'on était très négatif au sujet des implants remplis de solution saline, tout au moins durant les discussions et je suis certaine que vous les avez suivies. Chose certaine, durant l'audience publique à laquelle j'ai assisté, j'ai entendu beaucoup de commentaires négatifs sur l'utilisation d'implants à solution saline. C'est pourquoi les plasticiens veulent obtenir l'approbation pour utiliser ce nouveau type de silicone.
    Compte tenu de tous les commentaires négatifs sur les implants à solution saline, Santé Canada envisage-t-il de les retirer du marché?
    Vous soulevez probablement deux points distincts.
    La plupart des commentaires sur les implants à solution saline ont été faits dans le cadre d'une comparaison avec des implants remplis de gel pour des indications particulières. En conséquence, ces commentaires étaient assez négatifs. Par exemple, les implants remplis de solution saline ne donnent pas de très bons résultats chez les patientes dont la paroi de la cage thoracique est très mince. Les patientes ont un risque plus élevé de contractures, entre autres. Cela ne reflétait donc pas vraiment l'ensemble des connaissances que nous possédons sur les implants remplis de solution saline.
    Les implants de solution saline sont disponibles depuis 1971 et font l'objet d'un suivi continuel, comme les autres appareils médicaux de classe 4. Il y a donc un programme dans le cadre duquel nous examinons les risques et les conséquences négatives qui y sont associées. Il y a un réexamen. Tout cela se poursuit et, à l'heure actuelle, il n'y a pas suffisamment d'éléments de preuve pour justifier le retrait du marché des implants remplis de solution saline.
    Docteur Sharma, savez-vous combien de plasticiens il y a au Canada?
(1325)
    Je l'ignore.
    Mais peu importe combien il y en a, vous dites que, quand vous avez tenté d'en choisir deux ou trois pour votre groupe, votre choix était tellement limité que vous avez dû en choisir deux qui avaient déjà un lien pécuniaire avec les deux compagnies qui demandent que le matériel en question soit approuvé, soit autorisé à la vente.
    Nous avons pressenti un certain nombre de plasticiens qui ont refusé, soit parce qu'ils n'étaient pas disponibles, soit parce qu'on ne leur offrait pas d'honoraires. Mais nous avons beaucoup cherché avant de trouver des plasticiens qui ont accepté de faire partie du groupe.
    Combien en avez-vous invité avant de retenir les personnes en question?
    Il faudrait que je vérifie.
    Pouvez-vous nous procurer ce renseignement?
    Absolument.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous avons deux autres intervenants et je leur demanderais de se partager le temps. Il nous reste cinq minutes et chacun aura donc deux minutes et demie.
    M. Dykstra est le suivant, et ensuite Mme Demers.
    Merci, monsieur le président. Je serai précis. J'ai deux questions et je vais essayer de les poser le plus rapidement possible.
    La première porte sur le processus et je ne sais pas trop à qui la poser. Si l'on constate une fuite dans le sein d'une femme, quel est le processus appliqué en pareil cas? Comment cela fonctionne-t-il? Tout indique qu'il y a de longs délais d'attente qui sont nuisibles pour la santé des femmes. Quelles lignes directrices précises appliquons-nous en pareil cas, au niveau de l'Ontario ou, mieux encore, au niveau fédéral? Existe-t-il des lignes directrices?
    Je peux seulement vous parler du programme d'accès spécial, s'il est question des implants remplis de gel. Quand un implant rempli de gel est obtenu dans le cadre du programme d'accès spécial, on est tenu de signaler à Santé Canada, dans les 72 heures, tout incident négatif associé à cet implant. Il y a donc obligation d'obtenir l'information sur le matériel en question.
    Quant à savoir comment cela se passe au niveau du praticien pour l'enlèvement de l'implant, cela relève de la pratique de la médecine et je m'en remettrais probablement au Dr Brown pour répondre à cela.
    Docteur Brown, avez-vous des commentaires à formuler là-dessus?
    Il faut que le médecin discute de ce qu'il a trouvé avec sa patiente et qu'il lui explique les options disponibles. Il n'y a pas consensus pour dire que, même en présence d'une fuite connue d'un implant, ce soit nécessairement une indication exigeant l'enlèvement. On présente donc aux femmes des options à la suite de la constatation; la probabilité de l'existence d'une fuite, même si celle-ci a été identifiée potentiellement par une mammographie, un examen par IRM ou par ultrason; et les options pour l'enlèvement et le remplacement. Tout cela est expliqué et ensuite une date est fixée pour l'intervention au besoin.
    J'essaie de faire le tri de mes patientes au meilleur de mes connaissances. Si une femme présente des indications claires d'une fuite à un implant et s'il semble que le gel s'est échappé de la capsule qui se forme autour de l'implant, j'essaie d'opérer cette femme dans les plus brefs délais pour régler le problème. Cela se fait essentiellement au cas par cas.
    Docteur Zuckerman.
    À la réunion de la FDA, il a été décidé catégoriquement que les implants qui fuient doivent être enlevés le plus vite possible, et qu'il n'est presque jamais évident qu'un implant fuit. C'est pourquoi l'examen IRM est tellement important. Je suppose que c'est une différence entre le groupe d'experts de Santé Canada et celui de la FDA. Ces derniers ont estimé catégoriquement que dès qu'un implant commence à fuir... en fait, s'il y a rupture, il va commencer à fuir et il faut donc l'enlever immédiatement.
    Merci.
    Madame Demers.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Sharma, j'aimerais d'abord savoir si, d'après vous, Santé Canada a une certaine responsabilité à l'égard du bien-être et de la santé des Canadiens et des Québécois en général.
    Par ailleurs, les renseignements requis pour présenter une demande d'autorisation d'accès spécial visant à obtenir des implants mammaires exigent que le médecin et la patiente signent tous deux le formulaire de déclaration. Or, comment se fait-il qu'il n'y ait sur le formulaire aucun espace réservé à la signature de la patiente?
    De plus, on a pu constater dans le cadre d'un reportage de Radio-Canada que les médecins n'informaient pas la patiente qu'elle devait signer un formulaire pour obtenir des implants mammaires. Comment expliquez-vous cela?

[Traduction]

    En réponse à la première partie de la question, je vais parler précisément du mandat de la direction générale des produits de santé et des aliments, en particulier en ce qui a trait aux produits de santé.
    Nous avons un mandat, absolument. Notre mandat est de maximiser la sécurité des produits que nous réglementons tout en minimisant les risques. Cela contribue à la santé et à la sécurité des Canadiens et c'est absolument notre raison d'être.
    Au sujet de la signature, l'exigence est que le praticien, le demandeur, doit signer le formulaire. Le praticien y déclare qu'il a effectivement discuté des risques et des avantages du matériel avec la patiente, mais la patiente elle-même n'est pas tenue de signer le formulaire.
(1330)

[Français]

    Oui, mais il y a une réquisition voulant que la patiente signe le formulaire. Je regrette, madame Sharma, mais c'est dans les documents émis par le ministère de la Santé, plus précisément dans les lignes directrices du Programme d'accès spécial. Dans le cas des implants mammaires, la patiente et le médecin doivent tous deux signer le formulaire. C'est à la page 3 de votre document. Il s'agit des lignes directrices pour l'industrie.

[Traduction]

    Je me reporte au règlement qui régit le programme d'accès spécial aux matériels médicaux. L'article 22 du Règlement sur les instruments médicaux stipule seulement que le professionnel de la santé doit signer une déclaration attestant qu'il ou elle a discuté des risques et des avantages avec la patiente. Je peux jeter un coup d'oeil au document dont vous parlez, mais cela ne figure pas dans le règlement.
    Merci. C'est tout le temps que nous avons.
    Je veux remercier les témoins d'être venus et d'avoir présenté cette information au comité. Je remercie les membres du comité pour leurs questions, et je remercie tout particulièrement le Dr Brown d'avoir pris du temps sur sa pratique médicale pour venir nous expliquer les aspects technologiques.
    Dr Mitchell Brown: Merci.
    Le président: Nous allons discuter mardi de la question de savoir si nous voulons donner une suite quelconque à ce dossier, au moment où nous abordons le rapport sur le syndrome d'alcoolisation foetale.

[Français]

    J'aimerais déposer une motion avant la fin de la séance.

[Traduction]

    Vous pouvez déposer une motion en tout temps.
    La séance est levée.