:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je suis heureux de revenir devant vous aujourd'hui, cette fois pour discuter d'un sujet très important, même s'il ne s'agit pas de pandémie. D'après l'expérience de bien des gens, ce problème va en s'intensifiant au Canada, et il risque d'avoir une incidence sur les personnes, les familles et les collectivités, et dans d'autres sphères que celles auxquelles nous pensons habituellement.
L'ancien Comité permanent de la santé avait demandé que je revienne présenter une nouvelle vision de la prévention de l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale, l'ETCAF, afin que nous puissions en discuter. Tout dépend du point de vue, bien sûr, mais malheureusement, le Parlement a été dissous avant que je puisse remplir cet engagement, et nous voici devant un nouveau comité.
Par conséquent, je suis très heureux d'être ici aujourd'hui afin de discuter de cette vision.
[Français]
La lutte contre l'ETCAF constitue un engagement du gouvernement du Canada depuis le milieu des années 1990. Comme vous le savez, l'appellation « ensemble des troubles causés par l’alcoolisation foetale », ou ETCAF, désigne une gamme de handicaps permanents causés par l'exposition prénatale à l'alcool. Il est l'un des principaux types de retard du développement en Amérique du Nord, et il est une cause importante d'anomalies congénitales évitables.
[Traduction]
Les handicaps primaires associés à l'ETCAF entraînent, selon les estimations les plus réalistes, environ 1,5 million de dollars en coûts supplémentaires directs au cours de la vie d'une personne atteinte. Il faut reconnaître par ailleurs que ces coûts n'incluent pas le potentiel perdu de la personne atteinte ou celui de sa famille ou des personnes qui lui dispensent des soins.
L'ETCAF constitue un risque pour toutes les femmes en âge de procréer qui boivent de l'alcool. Des études récentes ont montré que boire de petites quantités d'alcool pendant la grossesse peut avoir un effet nocif sur le cerveau en développement du foetus.
[Français]
Les anomalies congénitales liées à l'alcool ont des répercussions sur les systèmes de santé publique, de soins de santé, d'éducation, de justice, de maintien de l'ordre et de correction, et sur le bien-être des enfants et des familles. Par conséquent, les différents ordres de gouvernement doivent travailler en partenariat.
[Traduction]
Bien que de nombreux ministères du gouvernement aient des programmes et des projets pour s'occuper des questions relatives à l'ETCAF, à l'heure actuelle le Portefeuille de la santé est le seul organisme fédéral ayant des ressources consacrées à l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale.
[Français]
L'Agence de la santé publique du Canada gère l'Initiative pancanadienne sur l'ETCAF et met l'accent sur le rôle du fédéral en santé publique. Le gouvernement du Canada est également responsable de la prestation de programmes de santé communautaire dans les collectivités des premières nations et des Inuits.
[Traduction]
Un bon nombre des provinces et territoires ont déterminé que l'ETCAF constituait un problème sérieux dont devait s'occuper leur gouvernement et ont élaboré des stratégies de lutte contre l'ETCAF. Ils ont appelé le gouvernement du Canada à faire preuve de leadership et à élaborer une stratégie fédérale.
En 2003, après des consultations avec les provinces et territoires, et les intervenants de toutes les régions du Canada, Santé Canada a publié ETCAF : Un cadre d'action afin d'orienter le développement et la mise en oeuvre des efforts de collaboration.
[Français]
Le cadre d'action est devenu un plan d'action et a servi de norme pour l'élaboration de la vision. Je crois savoir que les membres du comité ont reçu des exemplaires du document sur le cadre.
[Traduction]
La vision est fondée sur une approche à trois volets : la promotion de la santé en général; la prévention de l'ETCAF et la réduction des méfaits par l'atténuation des risques; et troisièmement, le dépistage et la gestion rapides de l'ETCAF et des problèmes sociaux et de santé connexes chroniques.
Dans cette approche, cinq thèmes orientent l'élaboration de la vision. Le premier thème met l'accent sur le renforcement du leadership et de la coordination afin d'assurer l'accès aux outils et aux connaissances dans toutes les régions du pays. À tous les paliers, les intervenants sont forcés de travailler à des questions relatives à l'ETCAF et à des problèmes connexes en résultat direct des besoins croissants de la clientèle. La collaboration nous a permis de travailler de façon plus efficace et efficiente et a facilité l'exécution d'activités et de projets conjoints.
Les deux prochains thèmes portent sur la sensibilisation du public et des professionnels. En 2002, les femmes nous ont dit qu'elles croyaient que les fournisseurs de soins de santé étaient la source d'information la plus fiable.
[Français]
Elles nous ont également dit que les messages sur la consommation d'alcool durant la grossesse n'étaient pas uniformes. D'autres recherches nous ont appris qu'un grand nombre de fournisseurs de soins de santé ne se sentent pas à l'aise de s'occuper de femmes qui consomment de l'alcool durant la grossesse.
[Traduction]
Par conséquent, au cours des dernières années, le gouvernement du Canada a consacré une bonne partie de ses efforts à la sensibilisation des fournisseurs de soins de santé et à l'amélioration de leurs connaissances et de leurs compétences, ainsi qu'à la fourniture d'outils et de ressources à utiliser avec leur clientèle.
[Français]
Les grandes campagnes de sensibilisation du public coûtent très cher et elles exigent beaucoup de recherche pour segmenter les auditoires en divers sous-groupes de population de femmes en âge de procréer afin que les messages soient conçus avec précision, par exemple en fonction de l'âge, de la situation socio-économique et des facteurs de risque.
[Traduction]
Le Portefeuille de la santé a collaboré avec les provinces et territoires à établir un message commun indiquant qu'« aucune quantité d'alcool n'est sûre pendant la grossesse ». Bon nombre des provinces et territoires, en collaboration avec leurs régies des alcools, ont mené des campagnes de sensibilisation du public efficaces. Avec les fonds limités dont il disposait, le Portefeuille de la santé s'est concentré sur le développement de la base de connaissances requise pour évaluer les leçons tirées des campagnes efficaces et a cherché à assurer l'accès à des outils et des ressources aux communautés et aux groupes afin de les aider à renforcer leur capacité de planifier, de gérer et d'évaluer des campagnes de sensibilisation efficaces pouvant être utilisées dans le cadre de ce travail général de promotion de la santé.
Cela continue d'être un élément important de la lutte contre l'ETCAF et porte ses fruits compte tenu de la plus grande sensibilisation générale aux méfaits causés par la consommation d'alcool pendant la grossesse comme le montre notre sondage de l'opinion publique le plus récent. Ce sondage, mené par Environics au cours des mois de mars et d'avril 2006, révèle une augmentation de 11 p. 100 du nombre de femmes interviewées répondant que toute consommation d'alcool pendant la grossesse peut nuire au bébé.
De plus, au cours des dernières années, l'on s'est concentré sur le diagnostic qui représente le quatrième thème de cette vision. La recherche nous a montré que le dépistage et le diagnostic rapides et une intervention efficace peuvent améliorer le dénouement pour les personnes atteintes, ainsi que pour leurs familles et les fournisseurs de soins.
Suite à cette recherche, le gouvernement du Canada a facilité le travail d'un Comité consultatif national d'experts et d'une grande gamme de spécialistes et d'intervenants afin d'élaborer et de mettre en oeuvre le document ETCAF : lignes directrices canadiennes concernant le diagnostic.
[Français]
Une approche de diagnostic commune est essentielle pour pouvoir créer des bases de données nationales sur l'incidence et la prévalence. À l'avenir, la capacité de suivre les données nationales sur l'incidence et la prévalence nous permettra de déterminer si les activités de sensibilisation et de prévention en matière d'ETCAF ont une incidence sur la réduction du nombre de nouveaux-nés atteints par l'alcool et, par la suite, sur la diminution des coûts associés aux défis pour les individus et pour la société.
[Traduction]
Ce travail porte également ses fruits du fait que la plupart des cliniques de diagnostic du Canada adoptent ces lignes directrices. Cela signifie que nous avons fait le premier pas vers un ensemble de données commun sur les aiguillages et les diagnostics et les comptes rendus communs.
[Français]
Le travail de création des connaissances inclut le partenariat avec les Instituts de recherche en santé du Canada et d'autres organismes de ce genre afin d'élaborer un programme de recherche commun. Le but à long terme est de créer une capacité canadienne durable de recherche et de chercheurs dans ce domaine.
[Traduction]
Enfin, il est important d'aider les communautés à se prendre en charge. Les communautés, y compris les communautés de pratiques et les travailleurs de première ligne, doivent avoir la capacité de traiter efficacement les questions relatives à l'ETCAF.
Le développement local et la mise en commun des connaissances et des faits probants aideront les communautés à définir des politiques, des programmes et des pratiques efficaces. Cela inclurait une collaboration sectorielle et intersectorielle.
[Français]
Le développement local et la mise en commun des connaissances et des faits probants aideront les communautés à définir des politiques, des programmes et des pratiques efficaces. Cela inclura une collaboration sectorielle et intersectorielle.
[Traduction]
Cela devrait inclure des travailleurs sociaux, de l'aide à l'enfance, des soins aux enfants, des refuges pour sans-abri et de l'éducation, des policiers, des avocats, des juges, des agents de libération conditionnelle et des services correctionnels et des conseillers en emploi, tous au niveau communautaire ou régional.
Monsieur le président, je suis persuadé que la Vision de la lutte contre l'ETCAF offre un moyen cohérent qui engage de multiples partenaires de divers secteurs. Je l'ai déjà dit, et je le répète, en ce qui concerne les questions de pandémie, nous n'avons pas encore atteint nos objectifs, mais nous faisons des progrès. De toute évidence, le gouvernement du Canada a un rôle de leadership important à jouer, et doit travailler avec des partenaires et des intervenants clés à promouvoir la santé des Canadiens et à régler ce problème. Grâce à notre effort collectif, je pense que nous sommes sur la bonne voie, mais il reste encore beaucoup à accomplir.
Merci.
:
Merci. Je vais peut-être partager mon temps, tout dépend des réponses que j'obtiendrai.
Il y a quelque temps, Santé Canada a collaboré avec environ 18 organisations, dont l'AMC, et il a déclaré dans son premier principe que le syndrome d'alcoolisation foetale était la principale cause connue de la déficience mentale au Canada. C'est une affirmation très inquiétante et par ailleurs totalement fausse. En effet, le syndrome d'alcoolisation foetale n'est pas la cause de quoi que ce soit, il en est plutôt le résultat. À l'époque, et encore aujourd'hui, il semble que Santé Canada ne soit pas encore prêt à affirmer que la consommation d'alcool par la mère durant la grossesse est la principale cause connue de la déficience mentale au Canada.
Je tenais à faire cette mise au point, parce qu'elle me conduit toujours à la même conclusion : c'est du déjà vu. Je pense que j'ai déjà entendu cet exposé il y a 10 ans. Je suis désolé, mais je suis déçu. Je n'ai rien entendu de nouveau. Je ne constate aucun progrès. On mentionne à la page 6 de la version française du rapport que le Portefeuille de la santé a collaboré avec les provinces et territoires à établir un message commun indiquant qu'« aucune quantité d'alcool n'est sûre pendant la grossesse ».
Docteur Butler-Jones, on dispose de suffisamment de preuves sur le plan médical comme quoi le risque découlant de la consommation d'alcool pour le foetus se situe entre le quinzième et le vingt-deuxième jour, période de formation des traits du visage humain. Et pourtant, cet énoncé clame qu'aucune quantité d'alcool n'est sûre pendant la grossesse. Cela implique que la femme doit d'abord se demander si elle est enceinte. Et si elle l'est, elle doit prendre une décision.
Cette attitude est vouée à l'échec, et je n'arrive pas à comprendre pourquoi Santé Canada refuse d'admettre que le message devrait plutôt être -- et j'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet -- le suivant : « Si une grossesse est possible, c'est-à-dire, si vous êtes active sexuellement, que vous n'utilisez pas de contraceptif, et si vous êtes en âge de procréer... » C'est ainsi que le message devrait être libellé : « Vous ne devriez pas consommer d'alcool si une grossesse est envisageable ». Et éliminer le risque.
Est-ce que Santé Canada pourrait adopter cette formulation et demander aux provinces et territoires d'en faire autant? Et serait-il possible de faire un pas en avant dans ce dossier où rien n'a été fait de concret depuis dix ans?
:
J'aimerais relever deux points. D'abord, votre affirmation comme quoi il n'y aurait eu aucun progrès. En fait, il y a eu des améliorations. Maintenant, est-ce que la situation a évolué autant que nous l'aurions voulu? Non. Je suis d'accord avec vous. Y a-t-il encore des choses à faire? Certainement.
Mais il faut reconnaître que nous avons fait des progrès sur le plan de la sensibilisation du public. Nous avons en effet accompli des progrès importants sur le plan de la sensibilisation des professionnels, des lignes directrices relatives au diagnostic, et ainsi de suite.
Et pour ce qui est du rôle du gouvernement fédéral par rapport à celui des provinces et territoires, c'est un sujet à débattre par les administrations elles-mêmes. Mais dans les limites des autorisations budgétaires nous ayant été accordées, nous considérons que nous avons réalisé d'importants progrès.
En ce qui concerne le message à livrer, il est vrai qu'il est assez complexe, comme vous le savez, qu'il s'agisse de parler de la consommation d'alcool et de la grossesse ou de la consommation de médicaments durant la grossesse ou encore de la question en rapport avec d'autres aspects de la santé et des compromis à faire selon les décisions que l'on choisit de prendre.
Évidemment, le risque n'est pas le même durant toute la grossesse. Mais ce risque est présent avant même que les femmes ne tombent enceintes. C'est la raison pour laquelle les orientations, les avis de santé publique, diffèrent du message commun que tous les groupes sont prêts à véhiculer dans la publicité, et ainsi de suite. En effet, l'Agence de la santé publique fait état du message général suivant... et ce message vaut autant avant la conception qu'avant la naissance du bébé. Il faut continuer à mettre au point le message diffusé dans le grand public, de sorte que l'on comprenne bien la nuance entre la quantité d'alcool, le moment de la consommation d'alcool et, dans ce dernier cas, l'étape de la préconception par rapport à l'étape prénatale, et l'importance durant la première de... Autrement dit, toute femme susceptible de tomber enceinte ou envisageant une grossesse devrait agir comme si elle l'était déjà, non seulement en ce qui concerne la consommation de l'alcool, mais aussi de médicaments en vente libre et d'autres substances risquant d'avoir des effets nocifs sur le foetus. C'est la raison pour laquelle j'ai une formation en médecine. Et c'est le message véhiculé par l'Agence de la santé publique. Mais, le message en question est trop complexe pour être exposé en entier dans une simple brochure.
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Merci d'être ici aujourd'hui. Je crois qu'on soulève une problématique dont on est conscients.
Le projet de loi C-5 concernant la création de l'Agence de la santé publique du Canada traite de la santé en général et de votre collaboration pour la mise sur pied d'initiatives. Lorsqu'on pose des questions au sujet d'une problématique qui relève de Santé Canada, le nouvel administrateur, M. Butler-Jones, dit ne pas avoir de réponses, car c'est Santé Canada qui s'en occupe. On n'a pas l'impression que ces deux entités sont des vases communicants, ce qui ne facilitera pas les choses lors de la mise sur pied de futures initiatives. À qui va-t-on s'adresser? À la nouvelle agence ou à son directeur, ou à Santé Canada?
La protection et la promotion de la santé figurent dans le préambule de la loi instituant la nouvelle agence. Si je pose des questions sur la santé des Autochtones, par exemple, je peux m'adresser à vous et vous me donnerez des réponses.
Prenons l'argent qui a été injecté pour contrer et prévenir l'alcoolisme foetal. En 2001, vous avez investi environ 25 millions de dollars, et on ignore les retombées de cet investissement. Vous voulez maintenant élaborer un plan national car, dites-vous, les provinces et les territoires vous ont demandé de le faire.
Il est donc difficile de suivre cette nouvelle agence et le rôle qu'elle joue auprès de Santé Canada et de l'ensemble du système de santé au Canada. Je ne pense pas que le Québec vous ait interpellé sur cette question. Je ne vais pas énumérer pour l'instant l'ensemble des mesures prises par le gouvernement du Québec pour contrer le phénomène de l'alcoolisme foetal.
Le gouvernement fédéral est responsable de toute la question de la santé des Autochtones. Pourtant, on n'a pas l'impression qu'une partie de l'argent investi pour la santé des Autochtones — 17 millions de dollars tout au plus — a servi à contrer le phénomène de l'alcoolisme foetal. Combien d'argent a été versé pour contrer ce phénomène? Il est assez difficile de voir comment vous pourrez harmoniser les stratégies mises en place par la nouvelle agence et par la direction de Santé Canada. À qui va-t-on s'adresser? Qui nous donnera les vrais chiffres et l'heure juste sur l'évolution de la consommation d'alcool pendant la grossesse?
Je ne tiens pas à ce que vous répondiez à ma première question verbalement. Je préférerais que vous nous transmettiez la réponse par écrit, plus tard. Ces activités sont prévues à court, à moyen ou à long terme, et je trouve que tout cela manque un peu de précision. Cela doit probablement varier pour chaque secteur, mais est-ce que court terme veut dire la semaine prochaine, le mois prochain ou l'année prochaine, je l'ignore. Bon nombre de questions qui me préoccupent sont considérées comme des initiatives à moyen terme. J'apprécierais que vous nous fassiez connaître par écrit le calendrier de réalisation de ces initiatives plutôt que de prendre les quelques minutes dont je dispose pour y répondre.
Deuxièmement, et à cet égard je suis d'accord avec le premier intervenant, il s'agit vraiment d'une question liée à la santé des femmes. C'est le nourrisson qui en est la victime, mais ce problème touche la santé des femmes. Des groupes de parents adoptifs ayant des besoins spéciaux sont très actifs dans ce domaine dans les diverses régions du pays. Le numéro du 5 mai du Journal de l'Association médicale canadienne décrivait notamment les normes de diagnostic uniformes, et la publication devait se pencher par la suite sur l'outil de dépistage -- du moins, je pense que le comité était censé le faire.
En ce qui concerne les femmes à risque, j'aimerais ajouter -- parce que je n'ai entendu personne les mentionner -- les gens qui assument une responsabilité quelconque, même si cette responsabilité est minime, pour la santé des Autochtones en milieu urbain, et non la santé des Autochtones dans les réserves.
Dans ma province, la Colombie-Britannique, l'un des plus importants groupes de bébés atteints de l'ETCAF proviennent du Royaume-Uni. C'est pourquoi vous mentionnez les partenariats internationaux sous le premier thème. En effet, au Royaume-Uni, on dit encore aux futures mères qu'il n'y a aucun danger à consommer de l'alcool; on leur dit qu'elles peuvent en boire une certaine quantité, ce qui est proprement révoltant. Il est interdit de fumer, mais on peut boire en petite quantité. Donc, je m'intéresse beaucoup aux partenariats internationaux, parce que nous constatons qu'un grand nombre de bébés de la Colombie-Britannique en provenance du Royaume-Uni sont atteints de l'ETCAF ou de quelque chose d'approchant.
Deuxièmement -- si vous avez le temps de répondre à ma question -- nous nous concentrons beaucoup sur les enfants, les nourrissons, les tout-petits, etc., mais une fois devenus adolescents et jeunes adultes, nous constatons qu'ils deviennent de jeunes contrevenants aux prises avec le système pénal. J'aimerais savoir si l'on fait quelque chose pour ces personnes afin qu'elles ne finissent pas en prison ou en conflit avec la loi, tout simplement parce qu'elles n'ont pas reçu l'attention nécessaire lorsqu'elles étaient plus jeunes.
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Merci beaucoup. Je ne veux pas reprendre les propos de Paul Szabo, mais je suis de son avis à bien des égards. Je suis vraiment d'accord avec lui.
Maintenant, tout le monde dit que le programme s'étalera sur dix ans. Laissez-moi vous dire quelque chose. Avant que j'entre en politique, en 1989, je faisais partie d'un groupe de travail sur ce syndrome mieux connu sous le nom de SAF-EAF. Je représentais alors l'Association médicale canadienne.
Des représentants de l'industrie des boissons alcoolisées et des entreprises de distillation faisaient partie de ce groupe de travail. Des parents d'enfants atteints du SAF-EAF faisaient également partie de ce groupe. Nous avons établi un merveilleux programme avec des objectifs à court, à moyen et à long terme. C'était bien fait et l'un des volets de ce programme visait l'étiquetage. Nous avions suivi de près certaines initiatives mises en place en Californie qui semblaient donner de bons résultats, dont l'affichage dans les restaurants, les établissements où l'on vend de l'alcool et, bien sûr, l'étiquetage des produits alcoolisés. Je me souviens que cela choquait tout le monde -- c'était il y a 17 ans -- de voir que l'industrie canadienne des produits alcoolisés étiquetait les bouteilles qu'elle envoyait aux États-Unis, mais qu'elle ne les étiquetait pas au ici. Nous savions qu'elles pouvaient l'être, mais la volonté de le faire n'y était pas. Étant donné que c'est un moyen de prévention très efficace contre ce que je considère comme un gaspillage de générations de gens nés avec un syndrome que l'on peu facilement prévenir, je trouve cela désespérant de voir que 17 ans plus tard nous entendons encore des commentaires du genre “ cela coûtera trop cher ” ou encore “ les campagnes de sensibilisation sont très dispendieuses ”.
Le coût lié à ce gaspillage humain est très élevé. Personne n'a même calculé les pertes sur le plan de la productivité des jeunes atteints du SAF-EAF. Personne n'a calculé le coût que représente l'incarcération d'une personne qui, soit dit en passant, n'a rien d'une criminelle, mais qui est aux prises avec ce problème. Aucune des initiatives que nous avons mentionnées il y a longtemps ne se sont concrétisées. Aucune formation n'a été donnée aux agents de correction et aux agents de police pour qu'ils puissent mieux distinguer une personne vraiment criminelle d'une personne atteinte de troubles causés par l'alcoolisation foetale. Rien de tout cela n'a été fait. Nous n'avons absolument rien fait en matière de prévention.
Je peux parler des risibles 900 000 $ qui ont été versés aux Instituts de recherche en santé du Canada. Je peux également parler du million de dollars sur deux ans que chacun a versé au comité sur la consommation non médicale de médicaments ou de drogues, lorsque celui-ci est venu faire ses recommandations, parce que c'était une farce également.
Ainsi, nous devons nous poser deux questions même si je sais bien qu'elles relèvent des compétences provinciales. Le gouvernement fédéral lancera-t-il, par l'entremise de la nouvelle Agence de santé publique du Canada, des activités qu'il peut faire dans le cadre de ses sphères de compétence? Créera-til une base de données? Deviendra-t-il un centre d'échange d'information? Et troisièmement, sera-t-il en mesure de regrouper certaines pratiques exemplaires des provinces et de les appliquer? Le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de coordination et faire preuve de leadership à ce chapitre. Des problèmes ont été soulevés et on n'y a pas donné suite. J'aimerais savoir si on a l'intention d'y voir.
J'aimerais savoir s'il y aura formation des agents de correction et des policiers. J'aimerais savoir si nous allons parler d'investir des sommes appropriées dans la recherche. J'aimerais savoir si nous allons parler d'étiquetage et de prévention. La prévention est possible. Nous devons empêcher que cela arrive. Je veux savoir si ce sera fait.
Dix-sept ans plus tard, je siège ici en tant que médecin. Il y avait des dépliants dans tous les cabinets de médecins. Vous devez savoir cela. En 1988, l'Association médicale de la Colombie-Britannique a produit des dépliants à même ses propres fonds et les associations médicales de toutes les provinces lui ont emboîté le pas. Les associations médicales sont venues nous rencontrer et nous ont dit qu'elles le faisaient et elles ont demandé de l'aide à Santé Canada afin de poursuivre sur une plus longue période. Les patients qui se présentaient dans nos bureaux prenaient ces dépliants, ils les lisaient et en parlaient à leur médecin.
Ceci n'a jamais été fait. Pourquoi? Dites-moi pourquoi. J'en ai tout simplement ras le bol.
:
Merci, monsieur le président.
Docteur Butler-Jones, vous avez habituellement les réponses à toutes les questions, mais vous me surprenez aujourd'hui. Vous confirmez les appréhensions que nous avions quant à un organisme de santé publique à part. Les chevauchements font en sorte que plus personne ne sait quoi que ce soit. Je vous regarde depuis tout à l'heure: les petits mots par-ci, les petits mots par-là. Personne n'est au courant de quoi que ce soit. Cela me déçoit énormément.
L'année dernière, lorsque vous êtes venu nous parler du syndrome de l'alcoolisme fœtal, on avait dit que les Autochtones dans les réserves avaient de gros problèmes. Ces problèmes n'ont pas été résolus. Je pense que le problème initial est celui de la pauvreté. Tant qu'on ne l'aura pas réglé, on ne réglera aucun autre problème. Cela, on n'en discute pas. Au Québec, depuis déjà une dizaine d'années, des dépliants sont remis à toutes les femmes qui entrent chez les médecins, chez les obstétriciens. Pourquoi est-ce si difficile pour Santé Canada de se renseigner au Québec et de demander qu'on lui fasse parvenir un dépliant s'il n'a pas l'argent nécessaire pour faire la recherche? Je ne comprends pas, et je ne vois pas comment vous pouvez aider les gens en faisant paraître des articles dans un journal qui n'est lu que par les médecins au lieu de faire quelque chose qui serait lu par les personnes concernées. Je ne comprends pas votre action, d'autant plus que ce petit livret est tellement beau, tellement poétique: vision d'avenir, imaginez un monde où tous les Canadiens et Canadiennes feront preuve de compassion à l'égard des femmes. Mais avant de faire preuve de compassion à l'égard des femmes, il faut commencer par y croire au sommet, au ministère, dans les instances où on prend les décisions. Il me semble que tout cet argent a été dépensé inutilement et que rien n'a été fait.
On n'a pas de statistiques réelles sur la prévalence de l'alcoolisation fœtale. On ne sait pas combien d'enfants en souffrent vraiment. Je ne comprends pas cela. Comment se fait-il que l'on n'ait pas de données concrètes? Je ne comprends pas qu'après avoir investi autant d'argent dans ce domaine, on en soit encore au stade du rêve et de l'imagination, qu'on n'en soit pas encore au stade de l'action. Cela me fait beaucoup de peine. Comme femme, comme mère, comme grand-mère, ça me fait de la peine de savoir qu'il y a aujourd'hui des femmes enceintes qui vont prendre de l'alcool parce qu'elles n'auront pas eu accès à un dépliant d'information. Cela m'attriste énormément.
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Merci, Monsieur le président.
J'aimerais vous entretenir sur quatre points. D'abord, si je rassemblais les intervenants à ce sujet, des mères nous parleraient des cuites qu'elles ont pu prendre lorsqu'elles étaient enceintes et qui se sont soldées par la naissance d'un bébé souffrant de TCAF. Alors je demanderais non pas aux hauts responsables, mais aux personnes qui ont agi de la sorte, ce qu'elles auraient dû savoir à ce sujet ou quels programmes de mentorat auraient permis d'éviter de telles situations.
Mon deuxième point concerne les dépliants. Ces charmants dépliants que l'on retrouve dans les cabinets des médecins et que les gens peuvent lire à l'occasion, peut-être même souvent, mais n'oublions pas qu'une large pan de la population au pays est analphabète, ainsi que vous nous l'avez rappelé. Nous devons informer les gens par d'autres moyens et ne pas perdre de vue que nous ne rejoignons pas tous les citoyens avec nos charmants dépliants. Quant à la langue d'usage, il ne sert à rien de diffuser des dépliants de langue anglaise si les gens parlent tous le panjabi. Voilà un autre point que je voulais soulever.
Si j'occupais le poste de mon ancien ministre de la Santé ou du ministre de l'Éducation ou tout autre poste qui vous est attribué lorsqu'on ne peut trouver l'emploi qui vous convient, je dois dire que sans données empiriques, je ne pourrais pas, en tant que ministre provincial, établir un budget en fonction des ressources nécessaires, que ce soit dans le système d'éducation, au postsecondaire ou -- j'espère que non -- dans le système carcéral, dans le secteur de la réintégration sociale du système carcéral à tout le moins. Sans données empiriques, je ne peux établir de budget. Le montant approximatif de 1,5 million de dollars est un autre élément très important de l'équation -- bien que je ne crois pas que les gens aux prises avec des TCAF vivent en général au-delà de 65 ans. C'est comme cela que je le comprends, alors je pense que c'est un âge qui est probablement... Sans cette information, je ne peux établir de budget et je n'aurai pas l'argent nécessaire pour offrir les services dont les gens ont besoin, parce que même si ce poste de dépense a 20 ans, il est relativement nouveau.*
Voilà les points qui me préoccupent. J'aimerais entendre vos commentaires à ce propos. Merci.
Je sais que vous ne voulez pas jouer le rôle de chevalier du roi... ou de la reine en l'occurence, dans ce dossier, Dr Butler-Jones, mais je pense qu'il devrait y avoir... et j'ai toujours pensé ainsi, alors si je ne suis pas d'accord avec le rôle que l'on veut faire jouer à l'Agence de santé publique, ce n'est pas à défaut d'avoir essayé. Je crois que l'administrateur en chef de la santé publique du Canada ne devrait pas se limiter à jouer le rôle de simple bureaucrate. Je pense qu'il devrait faire du mieux qu'il peut pour défendre l'état de santé des Canadiens.
J'ai cru comprendre que vous alliez prendre la relève ou que l'Agence allait prendre la relève d'une bonne partie du travail de l'Agence de santé publique ou des stratégies en matière de santé publique mises en place par le ministère de la Santé. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que la coordination est très importante — et que les compétences provinciales doivent de toute évidence être prises en compte — mais je pense qu'il y a risque de dédoublement au palier fédéral si trop de gens effectuent les mêmes choses dans un même ministère. Il doit y avoir une personne responsable de l'établissement d'une stratégie et elle doit en avoir la responsabilité jusqu'au bout, ou si ce n'est pas le cas, cette personne, contraitement au bureaucrate, doit pouvoir dire que ça ne marche pas, que ce n'est pas une bonne idée, qu'il faut établir tel ou tel objectif, etc. Une personne qui porte deux chapeaux ne peut faire cela. C'est cela qui me préoccupe.
J'aimerais par exemple que l'Agence de santé publique établisse une série d'objectifs mesurables étalés sur dix ans, pour en arriver à établir un véritable bilan de santé, à atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés sur le plan de la santé de la population, et pour réduire les TCAF. Mais comment y arriver si on ne connaît même pas le taux d'incidence des maladies?
Je pose à nouveau ma question : le gouvernement férédal considère-t-il qu'il pourra servir de plaque tournante afin de regrouper les provinces et de mettre en commun des données qui serviront à l'établissement de taux d'incidence à l'échelle nationale... qui serviron ensuite à établir des objectifs mesurables sur dix ans dans le but de réduire le taux d'incidence des TCAF au Canada?
Ma seconde question s'adresse au ministère de la Santé. Travaillez-vous de manière horizontale avec le Service correctionnel du Canada, la GRC et d'autres organismes qui s'occupent de criminalité, etc., et leur donnez-vous de la formation afin qu'ils réalisent que les comportements des personnes atteintes de TCAF diffèrent de ceux des criminels.
La différence entre ces deux catégories de personnes est bien réelle. Une multitude de jeunes qui sont incarcérés sont considérés comme des criminels alors qu'ils ne le sont pas. Il leur manque certaines capacités intellectuelles et ils présentent des problèmes comportementaux qui doivent être identifiés. Mais il ne faut pas criminaliser un jeune qui est en réalité aux prises avec un problème de santé. J'aimerais demander à Santé Canada si vous travaillez-vous sur tout le territoire... ?
J'aimerais que le Dr Butler-Jones me dise s'il pense que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle à ce chapitre et s'il assumera ce rôle.