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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Marc Grégoire, et je suis sous-ministre adjoint de la Sécurité et Sûreté à Transports Canada.
Je suis accompagné aujourd'hui de mes trois directeurs généraux : Merlin Preuss, de l'aviation civile; Luc Bourdon, de la Sécurité ferroviaire, et Bill Nash, directeur général par intérim de la sécurité maritime. Au cas où vous voudriez aborder les questions relatives au transport des matières dangereuses, le directeur général du transport des matières dangereuses, John Read, est aussi présent.
Je suis ici aujourd'hui pour donner suite à votre discussion d'il y a quelques semaines avec le ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités, l'honorable Lawrence Cannon. Le mandat de notre ministre est vaste, mais il est construit sur une idée commune, soit un engagement envers la sécurité, la sûreté, l'efficacité et la durabilité de notre réseau de transport.
Comme nous le savons tous, l'environnement mondial change et évolue constamment et, même si nous ne pouvons assurer la sécurité absolue, nous pouvons gérer les risques pour les maintenir à des niveaux acceptables — pour améliorer notre réseau de transport de façon continue — élément essentiel pour protéger la santé et assurer le bien-être des citoyens canadiens.
[Français]
Le Canada a toujours possédé un des réseaux de transport les plus sûrs et les plus sécuritaires au monde, mais la croissance phénoménale des nouveaux marchés exerce d'énormes pressions sur ce réseau. Les principaux ports commencent à être congestionnés et on se préoccupe de savoir si les réseaux de transport ferroviaire et maritime sont capables de satisfaire à la demande, sans compter les futures augmentations.
Le réseau de transport devient plus intégré et multimodal et on s'attend davantage à ce que le fret et les passagers puissent transiter librement d'un mode de transport à l'autre et traverser les frontières en toute liberté. Les passagers qui circulent entre un aéroport et un port où sont accostés des navires de croisière de l'industrie maritime de la Colombie-Britannique constituent un bon exemple de cette tendance intermodale.
[Traduction]
Au cours des dernières années, les statistiques sur les accidents indiquent une tendance à la baisse générale dans tous les modes de transport, mais les courbes de taux sont pratiquement horizontales. Vous serez peut-être surpris d'entendre que même les statistiques sur les accidents ferroviaires ont diminué en 2006.
Comme on prévoit une augmentation du trafic, le nombre absolu d'accidents pourrait augmenter à moins que le ministère ne trouve d'autres moyens d'améliorer la sécurité pour faire diminuer le taux d'accidents. Autrement dit, si nous ne trouvons pas des façons de réduire le taux d'accidents, le nombre absolu d'accidents pourrait augmenter avec l'augmentation du trafic.
[Français]
Nous nous sommes penchés sur cette question au cours des dernières années et nous avons déterminé qu'une des solutions pour aller de l'avant était les systèmes de gestion de sécurité. Nous devons nous appuyer sur le cadre réglementaire en place et concentrer nos efforts sur des pratiques de gestion des risques. Les systèmes de gestion de la sécurité, ou SGS, font partie de la solution.
Les SGS s'inscrivent tout à fait dans un partenariat entre l'exploitant et le responsable de la réglementation, et ce partenariat est essentiel pour renforcer nos programmes au cours des prochaines années. Les SGS reposent sur une démarche systématique de gestion des risques au sein d'une organisation et prévoient l'intégration de la sécurité dans toutes les activités quotidiennes d'une entreprise de transport. Dans ce contexte, les fournisseurs de services, d'installations et de matériel de transport ont une plus grande part de responsabilités à assumer au titre de la sécurité. Cela signifie que nous devons tous modifier notre façon d'exercer nos activités. La sécurité doit dépasser le stade opérationnel pour s'inscrire dans une démarche globale et faire partie de tous les systèmes opérationnels et de gestion de l'entreprise.
[Traduction]
Les entreprises seront responsables de leurs activités quotidiennes. La démarche consiste à intégrer les processus qui sont déjà en place dans la plupart des organisations plutôt que d'en créer de nouveaux.
Une bonne gestion des risques repose, nous le savons tous, sur des renseignements fiables. Aux fins d'une entreprise, tout comme entre une entreprise et les partenaires en matière de sécurité, il faut que l'information circule sans entrave. Il faut que le système d'établissement de rapports favorise et intègre des rapports proactifs sur les dangers et des rapports réactifs sur les incidents et les accidents.
Les SGS ne remplacent pas le cadre réglementaire actuel. Au contraire, ils ajoutent un niveau à l'intervention de Transports Canada au niveau des systèmes, les conséquences de l'échec d'un système étant plus graves.
Ce changement de culture doit être amorcé au sommet de l'organisation, c'est-à-dire là où s'exerce le pouvoir, le leadership et la responsabilité ultime.
En matière de sécurité aérienne, selon la nouvelle politique, la personne qui est habilitée à imposer une nouvelle politique, à en diriger la mise en oeuvre, à la financer et à la soutenir devient responsable du rendement de l'organisme de l'aviation civile au chapitre de la sécurité. Le gestionnaire supérieur responsable est probablement le propriétaire ou le président directeur général de l'entreprise. À toutes fins utiles, il s'agit de la personne qui, en fin de compte, a la responsabilité de la rentabilité de l'entreprise. Du point de vue de Transports Canada, ça donne un visage au certificat.
[Français]
Les organisations qui oeuvrent dans le secteur de l'aviation au Canada et qui ont implanté un système de gestion de la sécurité ont constaté non seulement une amélioration de la sécurité dans leur entreprise, mais également des avantages commerciaux ou économiques, dans la mesure où les risques sont recensés avant qu'ils n'aboutissent à un incident. Les problèmes mineurs sont réglés avant qu'ils ne prennent des proportions inquiétantes. Qui dit réduction des risques, dit réduction des coûts d'assurance et augmentation de la confiance, non seulement dans le secteur public, mais également au sein de l'industrie.
[Traduction]
Il y a un lien entre le rendement au chapitre de la sécurité et le rendement économique et ce lien peut conduire à l'installation d'un nouveau climat de sécurité et de sûreté aérienne dans le monde. Les accidents son coûteux, très coûteux, sans parler des coûts indirects en terme de baisse du chiffre d'affaires et de perte de temps occasionnée par les blessures. Une sécurité rehaussée ferait en sorte que les affaires iront mieux.
Au chapitre de la sécurité maritime, l'adoption d'un système de gestion de la sécurité par tous les modes constitue pour Transports Canada une priorité et je souhaite vous donner un bref aperçu des progrès réalisés dans le secteur du transport maritime et ferroviaire.
Commençons par la sécurité maritime.
[Français]
Le commerce maritime international canadien s'est vu prescrire les systèmes de gestion de la sécurité par l'entremise du Règlement sur la gestion pour la sécurité de l'exploitation des navires, en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada de 1998. Ce règlement a été élaboré pour s'assurer que le Canada respecte ses obligations internationales. En 2002, la portée de ces dispositions a été élargie à la plupart des navires naviguant en eau internationale et ayant une jauge brute supérieure à 500 tonneaux.
Au Canada, en moyenne, 60 navires et plus de 20 compagnies maritimes engagés dans le commerce international ont obtenu la pleine certification statutaire de leur système de gestion de la sécurité. Bien que Transports Canada n'ait pas encore imposé de système de gestion de la sécurité au transport maritime intérieur, nous en avons encouragé l'adoption volontaire.
[Traduction]
À ce jour, près de 15 compagnies de navigation et 155 navires circulant en eau canadienne ont volontairement adopté ces systèmes de gestion de la sécurité et obtenu leur homologation.
La Direction générale de la sécurité maritime continue d'appuyer l'adoption du Code international de gestion de la sécurité et examine tous les moyens possibles de l'appliquer à l'industrie maritime canadienne. Le Code fournit une norme internationale pour la gestion et l'exportation des navires en toute sécurité ainsi que pour la prévention de la pollution. Se faisant, il requiert un engagement à l'égard de la culture et de la sécurité à tous les niveaux de l'organisation ou de la compagnie, qu'il s'agisse des cadres supérieurs, des capitaines ou de l'équipage.
[Français]
Dans le même ordre d'idées, le Règlement sur le système de gestion de la sécurité ferroviaire est entré en vigueur le 31 mars 2001. Ce règlement exige que toutes les compagnies de chemin de fer de compétence fédérale se dotent de systèmes de gestion de la sécurité.
Les systèmes de gestion de la sécurité prévoient un cadre formel pour l'intégration de la sécurité ferroviaire dans l'exploitation courante des chemins de fer. Ils permettent également à Transports Canada de surveiller le rendement en matière de sécurité et de conformité à la réglementation en effectuant la vérification et l'analyse des indicateurs de rendement et autres données de sécurité.
Par ailleurs, Transports Canada dispose d'un programme régulier d'inspection et d'un mécanisme qui lui permet d'effectuer la vérification de l'infrastructure ferroviaire, de l'équipement et des méthodes d'exploitation, afin de déterminer le niveau de conformité atteint en fonction des normes et règlements à l'appui de la Loi sur la sécurité ferroviaire.
[Traduction]
Transports Canada mène des enquêtes sur toute préoccupation ferroviaire soulevée par les interventions ou le public voyageur afin de déterminer si la plainte constitue une menace à la sécurité ferroviaire ou un défaut de conformité à la loi ou à un règlement connexe.
[Français]
À la suite de l'augmentation du nombre des déraillements en voie principale qu'a connus la compagnie de chemin de fer Canadien National en 2005, le ministère a immédiatement pris les mesures qui s'imposaient pour freiner cette tendance à la hausse, d'où un certain nombre de mesures prises par la compagnie de chemin de fer, notamment l'inspection accrue des voies, ce qui a permis de réduire de manière significative le nombre de déraillements qu'on a observés au cours des derniers mois.
[Traduction]
En conclusion, Transports Canada travaille étroitement avec le Bureau de la sécurité des transports, les intervenants et les représentants des travailleurs à améliorer constamment la sécurité du réseau canadien des transports.
[Français]
Transports Canada est d'abord et avant tout un organisme axé sur la sécurité. Pour sa part, le Canada continue d'être reconnu mondialement comme chef de file de la sécurité des transports, et nous voulons conserver cette réputation.
[Traduction]
Concrètement, cela signifie que le Canada dispose d'un système de transport sécuritaire au sein duquel tout le monde travaille à l'atteinte d'un objectif commun. Il se munit d'une réglementation qui impose des règles axées sur les résultats en matière de sécurité conçues, le cas échéant, pour donner à l'industrie des transports toute la latitude dont elle a besoin pour innover dans le respect des objectifs de sécurité.
[Français]
C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions, s'il y en a.
Les agents de bord jouent un rôle fondamental dans la sécurité à bord d'un avion, particulièrement dans le cas d'un accident, et ils s'acquittent très bien de ce rôle. Selon moi, rien n'indique que le fait d'avoir 10, 20 ou 30 agents de bord contribuera à faciliter l'évacuation de l'avion. Dans le cas qui nous occupe, il s'agissait d'un Airbus A340, et pour évacuer l'avion, la réglementation du pays, de la France, exigeait la présence de six agents de bord. Il y en avait donc davantage.
Aujourd'hui, au Canada, pour un Airbus A340 transportant le même nombre de passagers, il faudrait huit agents de bord, selon la règle d'un agent de bord pour 40 passagers. Si la règle d'un agent de bord pour 50 passagers était mise en application, et si la compagnie aérienne décidait de choisir cette règle, au lieu de choisir l'une ou l'autre, et que la règle s'appliquerait non aux avions ou aux vols en particulier, mais à toute la flotte, si la compagnie aérienne prenait cette décision, il y aurait tout de même huit agents de bord. La règle d'un agent de bord pour 50 passagers que nous proposons n'est pas seulement le nombre de sièges divisé par 50, elle comprend également un certain nombre de variables. Dans le cas des grands avions de ligne comme le Airbus A340, il faut qu'il y ait un agent de bord à chaque sortie d'urgence. Cet avion transportait 297 passagers. Donc si on applique le ratio simple d'un agent de bord pour 50 passagers, nous obtenons six, ce qui est la règle en France et, en passant, dans un très grand nombre de pays. Tous les pays européens, les États-Unis, la plupart des pays d'Asie, de même que si je me souviens bien le Japon, Singapour, la Chine et la Corée respectent tous la règle d'un agent de bord pour 50 passagers aujourd'hui. Il y aurait eu six agents de bord. Selon notre proposition, il y aurait eu huit agents de bord.
Ainsi, selon la décision de l'entreprise, cette règle pouvait en fait, à certaines occasions, demander davantage d'agents de bord qu'à l'heure actuelle pour certaines entreprises. À d'autres occasions, il se peut qu'il y ait une très faible diminution, mais la réduction ne correspond pas du tout à une réduction de la sécurité.
J'aimerais d'abord faire un petit commentaire. Nous sommes d'accord pour avoir un briefing. En effet, vous nous dites que le rapport de 1 à 50, avec des mesures de médiation, équivaut au rapport de 1 à 40 qui existe présentement. Il y aurait lieu de s'en reparler.
J'aimerais revenir à ce que je vous disais tout à l'heure concernant les systèmes de gestion de la sécurité dans le transport aérien. Évidemment, l'aviation civile, ce n'est pas seulement Air Canada, laquelle est une petite entreprise nationale. Au Québec, il y a plus de 100 entreprises d'aviation. Il y en a des petites, des moyennes et des grandes.
Je vous disais que les systèmes de gestion de la sécurité que vous voulez implanter dans chacune des entreprises toucheront aussi ces petites entreprises. D'un autre côté, ce seront vos systèmes d'inspection qui vérifieront si elles sont sécuritaires.
Le minimum que vous aviez auparavant est devenu le maximum, par exemple en ce qui a trait aux heures de formation des inspecteurs au Québec. J'aimerais ajouter, en passant, que ce sont ceux qui ont le moins de formation en vol au Canada. Donc, en termes de ce que vous dépensez pour assurer la formation de vos inspecteurs, le minimum est devenu le maximum. C'est comme si vous leur disiez qu'à partir de maintenant, ils vont faire leurs inspections différemment. Vous avez dit vous-même que vous alliez vérifier plus qu'autre chose, mais ce sont de petites entreprises.
La population a besoin d'être rassurée quant au fait que les inspecteurs qui devront intervenir auront la même formation qu'auparavant. Dans les petites entreprises, votre inspecteur prend l'avion pour vérifier si celui-ci est conforme aux normes. C'est ce qu'il fait présentement.
Or, si vous limitez les budgets ou si vous faites en sorte que le minimum de formation pour les inspecteurs devienne le maximum, ce sera comme au Québec. Vérifiez-le, parce que c'est comme cela au Québec présentement. Le minimum que vous exigiez est devenu le maximum en termes d'heures de formation de vos inspecteurs, et tout cela. C'est comme si vous disiez que vous allez donner moins de formation à vos inspecteurs parce que vous faites davantage confiance à l'entreprise privée.
Vous nous avez dit aujourd'hui que l'entreprise privée doit prendre plus de temps, etc. Je pense que vous ne devez pas faire cela. Vous devez maintenir un système d'inspection dans tous les secteurs, de sorte que nous puissions donner à la population l'assurance que le système d'inspection, dans chacun des secteurs, est encore efficace et qu'il y a des personnes pour faire les inspections. Je sais que la formation de vos inspecteurs coûte cher, probablement plus cher dans le domaine aérien que dans le domaine ferroviaire, parce qu'on parle d'heures de vol, mais c'est nécessaire pour rassurer la population.
Plus tôt, vous avez parlé d'humains. Nous travaillons pour le peuple. Je vous le dis, il n'est pas certain que celui-ci se sente rassuré après ce que vous avez fait.
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Merci, monsieur le président. Je voudrais faire un commentaire et poser quelques questions.
D'abord, monsieur Grégoire, vous avez dit qu'il va falloir attendre des années avant de voir les bénéfices des systèmes de gestion de la sécurité. Cela m'inquiète. Depuis 2005, le nombre d'accidents ferroviaires est le plus élevé qu'on ait vu depuis 10 ans. S'il faut attendre des années avant de voir les bénéfices, il est dangereux d'implanter des systèmes qui mèneront à cette situation. Nous en verrons peut-être les bénéfices dans quelques années, mais le nombre d'accidents sera plus élevé au début. C'était mon commentaire.
À présent, je vais poser mes questions.
[Traduction]
Comme les autres membres du comité présents, je suis inquiet à l'idée que l'on puisse réduire la proportion d'agents de bord. Je m'inquiète tout particulièrement de l'incidence que cela pourrait avoir sur les aînés et les personnes handicapées. Il y a tout lieu de croire qu'il s'agit d'un système d'évacuation autogéré. Je pense que ce n'est pas une façon responsable d'assurer la sécurité des vols.
Plus tôt, j'ai demandé si des études avaient été faites sur les pratiques dans d'autres pays. Voici en fait ce que je veux savoir. De quel genre d'études dispose le ministère pour d'écrire le danger, le danger accru — ce qui est indéniable dans les évacuations où l'on doit faire descendre les passagers, et particulièrement des personnes handicapées — et justifier d'une certaine façon par les avantages obtenus par ailleurs? Si vous disposez de ce genre d'études, nous aimerions les voir.
Enfin, pour ce qui est des systèmes de communication des données sur l'aviation civile, j'aimerais savoir comment le public peut y avoir accès. Monsieur Preuss, vous avez dit très clairement qu'il y a des considérations liées à la protection des renseignements personnels, mais une fois que les précautions nécessaires sont prises, les données sont accessibles. Cela étant, comment, en ma qualité de membre du Comité des transports, puis-je avoir accès à ce système de communication de données?