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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités


NUMÉRO 047 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 30 avril 2007

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Bienvenue à la 47e réunion du Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités. En vertu du paragraphe 108(2), l’ordre du jour a trait à la sécurité ferroviaire.
     Nous accueillons aujourd’hui M. David Chudnovsky, député de Vancouver-Kensington à l’Assemblée législative, M. George Kosinski, ancien ingénieur de locomotive du CN et M. Todd Cotie, représentant de la section 2004 de la United Steelworkers.
    Normalement, nous vous demandons une présentation de sept minutes. Nous commencerons par les présentations, et nous passerons ensuite aux questions des participants.
    Nous commencerons par M. Chudnovsky, s’il vous plaît. Bienvenue.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci au comité de me permettre de m’adresser à vous aujourd’hui.
    Je m’appelle David Chudnovsky. Je suis député de l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique pour le comté de Vancouver-Kensington, qui est tout simplement le meilleur des 79 comtés de la Colombie-Britannique. J’assume également, au nom de l’opposition officielle, les fonctions de critique du ministre des Transports, et c’est de là que découle mon intérêt pour de cette question.
    J’aimerais tout d’abord rappeler qu’en août 2005, comme vous le savez sans doute, un déversement catastrophique s’est produit dans la rivière Cheakamus, près de la ville de Squamish. Ce déversement a entraîné le déraillement d’un train du CN, et je me suis alors beaucoup impliqué dans cette question.
    Avant d’aller plus loin, monsieur le président, j’aimerais rendre hommage à votre greffier, Mark D'Amore, qui nous a grandement aidés à nous préparer en vue de cette procédure et qui s'est assuré de la traduction du mémoire, etc. Donc, je tiens à remercier Marc.
     Tout d’abord, monsieur le président, je signale le déversement survenu dans le canyon de Cheakamus parce que je veux sensibiliser le comité au fait qu’il ne s’agit pas simplement d’un exercice technique. La population de la Colombie-Britannique a peur, et ce depuis quelques années. Les gens sont nerveux. Les personnes qui habitent dans les corridors ferroviaires du CN ont connu tellement de déraillements qu’elles y pensent en permanence. Vous vous souviendrez — et je suis sûr que vous avez examiné quelque peu cette question — que pendant quelque temps, il semblait que les déraillements étaient quotidiens ou survenaient tous les deux jours.
     Je vous réfère à l’annexe 1 de ma présentation. Je ne la parcourrai pas en entier, mais elle offre un aperçu rétrospectif des déraillements survenus jusqu’à maintenant. Elle ne retrace que les incidents des deux ou trois dernières années, survenus uniquement en Colombie-Britannique, et elle comporte néanmoins plusieurs pages.
     Je tiens tout d’abord à souligner à quel point les résidents de la Colombie-Britannique prennent cette question au sérieux, sans parler de la crainte et de la nervosité qu’ils éprouvent en ce qui concerne le CN.
     J’aimerais également, avant de commencer, souligner que j’ai demandé au ministre des Transports, l’honorable Kevin Falcon, de m’accompagner aujourd’hui, afin de vous communiquer les renseignements qu’il est en mesure de vous fournir avec moi. Il a choisi de ne pas venir, mais je vous incite à communiquer avec l’honorable Kevin Falcon, ministre des Transports de la Colombie-Britannique, qui, notamment, a participé à la négociation de la vente de l’ancien B.C. Rail au CN. J’aimerais, entre autres, demander au ministre — et je lui ai posé la question à maintes reprises — si, à l’époque de la privatisation de B.C. Rail, des discussions ont eu lieu, le cas échéant, avec les responsables du CN au sujet du maintien de la sécurité ou de la protection de l’environnement. Quels engagements ont été pris échéant?
     Je tiens à préciser que mon idée est faite — et celle de mes collègues également — en ce qui concerne les facteurs qui ont rendu la situation avec le CN si particulière au cours des dernières années. Pourquoi autant de déraillements, de tragédies et de quasi-tragédies sont-ils survenus en Colombie-Britannique? Je crois, monsieur le président, qu’il existe des explications à ces incidents, et que nous devons les examiner attentivement.
     Premièrement, je crois que le CN n’était pas prêt à aborder la topographie, la géographie et l’environnement de la Colombie-Britannique, lors qu’il a repris l’ancienne ligne ferroviaire de B.C. Rail, à l’époque. Les responsables croyaient qu’ils exploitaient simplement une ligne de chemin de fer comme ils le faisaient dans le reste du pays. Toutefois, comme nous le savons, la Colombie-Britannique a des caractéristiques topographiques et géographiques uniques. Les changements d’élévation, les courbes et la diversité de la topographie sont telles qu’elles se distinguent des conditions qui se présentent aux principales sociétés ferroviaires de l’Amérique du Nord. Il s’agit donc du premier facteur qui explique, selon moi, les problèmes que nous avons connus en Colombie-Britannique.
     Deuxièmement, nous sommes passés d’une société d’État, une société qui appartenait aux résidents de la Colombie-Britannique et était administrée par ceux-ci, et qui, dans une certaine mesure du moins, était exploitée dans le but de fournir un service et un rendement à la population de la province. Nous sommes passés de ce type d’exploitation à une très grande société internationale dotée d’une stratégie et de principes très différents en ce qui a trait à son fonctionnement. Dès lors, on a donc fait des choix très spécifiques, par exemple, celui de déplacer les locomotives et le matériel roulant du contexte de la Colombie-Britannique au reste du continent. Ce facteur semble avoir contribué à quelques-uns des problèmes auxquels nous faisons face.
    J’aimerais dire en passant que j’ai lu la transcription de la présentation que vous avez reçue, la semaine dernière, de M. Gordon Rhodes, avec qui nous avons communiqué au cours des deux ou trois dernières années. Je veux préciser que dans tous les cas — j’ai lu la présentation très attentivement — les situations, les problèmes, la réduction des normes de sécurité qu’il décrivait et qui sont attribués au CN, nous, au bureau de la Colombie-Britannique, en avons aussi entendu parler, de sources autres que M. Rhodes.
     J’aimerais signaler que, dans le mémoire — et j’espère que vous aurez l’occasion de le lire — nous avons énuméré, entre autres, bon nombre des situations qui nous ont été décrites par des personnes de la Colombie-Britannique, un certain nombre de changements sur lesquels nous avons concentré notre attention. Nous avons choisi de nous attacher aux modifications et aux pratiques adoptées par le CN, après qu’ils ont repris l’exploitation de B.C. Rail. Quelques-unes ont fait l’objet de nombreuses discussions au cours de vos débats: la longueur des trains, le freinage dynamique et la puissance au centre des trains. Il existe un certain nombre d’autres questions dont vous n’avez guère entendu parler; je vous incite à les examiner. Ces questions se trouvent à la page 4; je n’ai pas le temps de les lire de façon précise.
     Le dernier point que j’aimerais souligner — et j’espère qu’il y aura une période de questions et réponses — a trait au fait que la relation entre la société, à titre d’employeur, et les travailleurs, à titre d’employés, fait partie des facteurs qui ont contribué aux problèmes auxquels nous faisons face. L’annexe 2, à la fin de mon mémoire, décrit quelques-uns des problèmes du point de vue des relations avec les employés utilisées par le CN.
     Monsieur le président, j’aimerais, en dernier lieu, remercier une autre personne qui m’a aidé dans la rédaction du mémoire, dont, je l’espère, les intervenants pourront prendre connaissance d’une manière approfondie. J’aimerais remercier votre recherchiste — qui, selon la législation de la Colombie-Britannique, peut m’accorder le sixième de son temps — Mme Sarah Goldvine, qui a largement contribué à la préparation de ce document au cours des dernières années.
     Je vous remercie de votre patience.
(1540)
    Merci.
    Monsieur Kosinski, s'il vous plaît.
    Je m’appelle George Kosinski-Ritmeester, puisque j’ai joint le nom de ma femme au mien lorsque nous nous sommes mariés. Le personnel de chemin de fer de l’époque me connaissait sous le nom de George Kosinski.
     J’ai travaillé au CN pendant cinq ans, à titre d’aiguilleur, de garde-freins et de conducteur, puis à titre d’ingénieur de locomotive pendant dix ans, jusqu’à ce que je démissionne, en 1989. A l’exception de la voie du CN qui avait appartenu auparavant à B.C. Rail, j’ai conduit des trains dans toutes les sous-divisions à l’ouest de Wainwright (Alberta) jusqu’au Pacifique, sauf la section de Blue River à Boston Bar, en Colombie-Briatnnique. Lorsque j’ai démissionné, en 1989, j’étais déjà alarmé par la réduction importante des effectifs d’entretien des voies qui avaient lieu et par l’élimination du wagon de queue. Je viens de terminer la première ébauche d’une évaluation approfondie du plan d’action de Transports Canada en vue de régler les questions de sécurité du CN, communément appelé le rapport de vérification du CN, que j’appellerai le rapport dans la suite de ma présentation.
     J’aimerais utiliser les minutes qui me sont accordées pour mettre en relief quelques-uns des points et des principales omissions qui se trouvent dans ce rapport.
     Le rapport de la phase comporte la mention suivante en ce qui concerne la cause du déraillement: « Raison inconnue/Donnée non remplie — facteur contributif pas encore déterminé » et indique que le nombre de déraillements de ce type a triplé de 2000 à 2005, soit une augmentation plus rapide que le nombre total de déraillements. Ce point met en évidence non seulement l’urgence de la nécessité de régler ces facteurs inconnus, mais aussi la nécessité possible d’affecter de nouveaux enquêteurs qui, compte tenu de leur regard neuf sur la question, découvriront peut-être des faits importants omis par leurs prédécesseurs.
     Le rapport précise que « En cas de non-respect des prescriptions législatives ou de menaces contre la sécurité, Transports Canada prend immédiatement des mesures coercitives ». Bien que cette affirmation semble offrir certaines mesures de protection externes, elle n’est malheureusement pas formulée d’une manière suffisamment ferme. Il faudrait préciser que Transports Canada prendra des mesures d’application de la loi à l’égard de toute menace pour la sécurité, indépendamment du fait que celle-ci respecte ou non les exigences législatives. Si Transports Canada n’a pas d’autre pouvoir que celui de veiller à la conformité aux exigences législatives, son autorité devrait être accrue, ou le Parlement devrait intervenir immédiatement afin d’appliquer des interdictions au titre de la loi à l’égard de menaces précises touchant la sécurité.
     Dans les discussions qui ont eu lieu après le déraillement de 1997, qui a causé la mort de deux ouvriers de la sous-section d’Ashcroft, le vice-président national de Brotherhood of Maintenance of Ways Employees, M. Gary Housch, a déclaré que le CN avait éliminé plus de la moitié de ses effectifs d’entretien au cours de la décennie qui avait précédé l’incident, exprimant clairement sa préoccupation liée au fait que le manque d’effectifs d’inspection des voies avait peut-être contribué à l’incident. Néanmoins, en ce qui a trait aux activités axées sur l’inspection visuelle d’une voie peu avant qu’elle ne soit franchie par un train, au moins aux endroits et dans les conditions qui illustrent un besoin incontournable, le chapitre 3 du rapport de la phase un sur les mesures correctives ne comporte même pas l’ombre de la possibilité d’accroître les effectifs. De fait, pas une seule des neuf initiatives mises en œuvre par le CN et énumérées à la page 29 n’aurait permis de prévenir l’accident, ce qui illustre le risque lié au fait de trop se fier à la technologie et de sous-utiliser les effectifs humains.
     Quoi qu’il en soit, il n’est guère utile de recourir davantage à de l’équipement de vérification des voies si, comme on le souligne dans le rapport, le CN n’utilise pas les données découlant de ces essais pour prendre les mesures nécessaires de manière à ce que l’état des voies ne se détériore pas au point que celles-ci ne soient plus conformes aux normes de sécurité avant l’inspection suivante.
     Le système de classification des mesures disciplinaires doit être éliminé. Les superviseurs de première ligne qui exercent des pressions sur les employés pour qu’ils adoptent des pratiques non sécuritaires devraient être assujettis à la procédure disciplinaire des enquêtes internes, qui peut mener à l’attribution de points de démérite, dont l’accumulation peut entraîner un renvoi. Lorsqu’il peut être raisonnablement établi qu’un facteur ayant contribué à un accident a trait à une pratique non sécuritaire qui semble ne pas être sanctionnée par les échelons supérieurs de la direction, il ne suffit pas d’infliger une amende à la société, même lorsque cette amende est supérieure au bénéfice net réalisé compte tenu de la pratique non sécuritaire. Les dirigeants de la société doivent également se voir infliger une amende à titre personnel, tout comme les ouvriers le sont lorsqu’ils enfreignent les normes de sécurité ou le règlement de leur propre initiative.
     Par exemple, si le récent accident qui a entraîné la mort de l’ingénieur du CP à Trail mettait en cause une locomotive qui n’était pas équipée de freins dynamiques, je jugerais que cet incident est attribuable à de la négligence criminelle de la part de la direction.
     La page 19 précise que « La Direction générale de la sécurité ferroviaire de Transports Canada, conjointement avec le Centre de développement des transports du Ministère, procède actuellement à un examen de l'exploitation des trains longs ». Le but consiste à élaborer des paramètres en vue d’une initiative de recherche décrivant les conséquences sur la sécurité et les normes et pratiques exemplaires de l’industrie liées à l’exploitation de trains longs. Compte tenu des nombreux déraillements survenus récemment, il est inadmissible d’attendre les résultats de cet examen. Il est primordial de prendre des mesures immédiates, non seulement afin d’assurer une protection contre des catastrophes naturelles éventuelles, mais également afin de protéger les ouvriers, qui ne devraient pas être obligés de travailler dans des conditions dans lesquelles la mort d’un ou de plusieurs de leurs collègues, ne fût-ce que sporadiquement, semble inévitable.
     À titre de mesure provisoire, jusqu’à ce que l’examen soit terminé, une restriction cadre relative à la longueur des trains devrait être imposée. Chaque train exploité dans une subdivision située entre Edson, en Alberta, et la côte ouest devrait être limité à une longueur de 100 wagons et, en ce qui concerne les trains qui transportent des produits chimiques toxiques, à 50 wagons, et à une vitesse de cinq milles à l’heure sous la limite de vitesse. Ces restrictions devraient également s’appliquer dans les régions montagneuses des autres provinces, de même qu’en terrain plat comportant de nombreuses courbes serrées, ainsi que dans les autres lieux où des conditions permanentes ou temporaires révèlent un besoin incontournable.
(1545)
    L’examen permettra peut-être de déterminer qu’il est judicieux de conserver ces restrictions de façon permanente. Transports Canada semble pouvoir appliquer ce type de restrictions; cependant, s’il ne peut les autoriser ou ne veut pas le faire, le Parlement devrait promulguer une loi afin d’imposer ces restrictions. Si le gouvernement fédéral a le pouvoir de forcer les travailleurs du secteur ferroviaire en grève à retourner au travail, il devrait également pouvoir, et devoir, veiller à ce que les collectivités desservies par les trains ne soient pas soumises à des marges de sécurité dangereusement réduites.
     Le CN pourrait se plaindre de ce que de telles restrictions augmenteraient les coûts d’exploitation; toutefois, le fait qu’il a versé 46 millions de dollars en salaires, en primes et en stock options à son président-directeur général en 2005 révèle que l’entreprise pourrait facilement absorber une légère augmentation de ses frais d’exploitation.
    J’aimerais également aborder la question du repos, qui est absente du rapport. Cependant, des restrictions temporelles m’empêchent d’offrir davantage qu’un bref commentaire.
     La structure de rémunération, telle qu’elle était constituée en 1989 et qu’elle est peut être toujours constituée, crée un conflit avec le souhait d’obtenir un repos suffisant. Une étude de 1983 menée par une commission d’étude présidentielle des États-Unis condamnait la structure de rémunération existante. On y tirait la conclusion finale qu’il n’existait aucune raison — logique, juridique, morale ou autre — de perpétuer le système actuel, pour l’enfant pas encore né et pour des motifs qui n’ont pas encore été utilisés. On pourrait donc vérifier si, 24 ans plus tard, ce système est toujours perpétué.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
     Monsieur Cotie, bienvenue.
    Je vous remercie de m’offrir la possibilité de m’adresser au comité permanent.
    Je m’appelle Todd Cotie. Je suis opérateur de machinerie de CN Rail depuis 12 ans. À l’heure actuelle, je suis le coordonnateur de la santé et de la sécurité du local 2004 de USW, où je représente 3 200 travailleurs d’entretien des voies de l’ensemble du Canada. Je parle au nom de ces membres.
    Les responsables de United Steelworkers sont très préoccupés par la sécurité des travailleurs que nous représentons, de même que celle de l’ensemble des usagers du système ferroviaire et des collectivités qui sont traversées par les chemins de fer.
    Tout d’abord, j’aimerais exposer certaines préoccupations générales liées à ce que nous considérons comme la détérioration de l’engagement à l’égard de la sécurité au CN, où le bénéfice net relègue la sécurité au bas de la liste de priorités. Cette situation est inacceptable.
    Ensuite, j’aimerais suggérer au comité permanent des mesures concrètes qu’il pourrait prendre et qui permettraient d’améliorer immédiatement la sécurité ferroviaire. Il s’agit de dispositions législatives axées sur l’imposition de restrictions de vitesse aux trains lorsque des travailleurs d’entretien des voies se trouvent à proximité.
    Voici nos préoccupations générales:
    Premièrement, les accidents et les déraillements sont en hausse. Comme le comité permanent en a été avisé, 2005 a été une année particulièrement désastreuse, compte tenu de l’augmentation du nombre de déraillements et des conséquences catastrophiques sur l’environnement de quelques-uns des incidents les plus médiatisés. Ces incidents graves ont fait pencher la balance du point de vue de la sensibilisation du public, et ont incité la population à exercer des pressions croissantes sur les sociétés, notamment le CN, et sur les organismes gouvernementaux, dont le Comité permanent, pour qu’ils prennent des mesures afin de rétablir la sécurité ferroviaire au Canada.
     Deuxièmement, l’approche non interventionniste du gouvernement ne fonctionne pas. Transports Canada ne peut s’attendre à ce que le CN s’autoréglemente. Le CN est une société, et doit ainsi rendre des comptes à ses actionnaires. Il est clair que le résultat net constitue, aujourd’hui plus que jamais, constitue l’objectif principal du CN. Le revenu net de 2006 s’est élevé à tout juste un peu plus de deux milliards de dollars. Le CN réduit ses effectifs et accroît le ratio entre les dividendes et accroît le rendement par action. Les dividendes des actionnaires ont augmenté de 30 p. 100 l’an dernier. Le CN ne ménage aucun effort pour impressionner les investisseurs.
    Comme George l’a souligné, le patron du CN, M. Hunter Harrison, s’est accordé 7,3 millions de dollars en salaire et en primes en 2006; cependant, son revenu réel découle du fait qu’il est aussi un investisseur de l’entreprise. En 2005, l’année au cours de laquelle le CN a connu des déraillements tellement dramatiques, Hunter Harrison a exercé ses options sur actions et a ainsi porté son salaire réel à 46,6 millions de dollars en 2005 seulement. Il a un intérêt personnel profond à l’égard du prix de l’action du CN. Nous croyons que des pressions d’entreprise éloignent le CN du principe fondé sur la primauté de la sécurité. Transports Canada doit jouer un rôle actif et responsable pour veiller à ce que la sécurité passe avant tout.
     Troisièmement, les accidents ne surviennent pas sans raison. Notre syndicat l’affirme, mais le CN l’affirme également. La différence entre nos deux organismes a trait à la manière dont nous abordons la prévention des accidents.
    Les représentants du CN vous diront que la grande majorité des accidents découlent du comportement humain. Cela semble être leur formule à l’heure actuelle. Autrement dit, ils croient que les accidents sont imputables à de mauvais travailleurs. C’est faux. Si c’était vrai, le CN pourrait exercer une discipline de manière à assurer la sécurité. Nous croyons plutôt que l’on prévient les accidents en réglant la culture globale en matière de sécurité. Le problème, en ce qui concerne le CN, a trait au fait que la culture de l’entreprise accorde davantage d’importance à la productivité qu’à la sécurité. Ce point de vue est confirmé par la récente vérification de la sécurité de Transports Canada, au sujet de laquelle le Comité a déjà entendu des témoignages. Nous vous incitons à prendre cette vérification très au sérieux.
    Cette vérification a révélé que la plupart des employés du CN déclaraient que l’on accordait plus d’importance à la productivité qu’à la sécurité. La vérification de la sécurité a également confirmé ce que l’expérience nous a appris, c’est-à-dire que les superviseurs de première ligne subissent des pressions énormes pour réaliser le résultat net prévu. Les pressions axées sur la réalisation des objectifs comportent la mesure de la productivité, la charge de travail et la crainte de représailles. Toutes ces pressions orientent les activités quotidiennes des superviseurs de première ligne vers une direction différente de la position officielle de la haute direction, selon laquelle le CN accorde la priorité à la sécurité.
    Nos équipes de travail subissent des pressions qui les incitent à travailler plus rapidement et plus longtemps, en réduisant les pauses et les congés entre les quarts de travail. La fatigue, le stress et les pressions axées sur l’accélération, et non pas sur l’amélioration du travail, sapent la sécurité ferroviaire.
    Tous ces facteurs visent à illustrer la culture du CN, une culture qui contraint les travailleurs et les superviseurs de première ligne à sacrifier la sécurité au profit de l’amélioration de la productivité. C’est négligent. L’entreprise joue à la roulette russe avec les travailleurs, et sans avoir la courtoisie de laisser ces derniers tirer eux-mêmes. Nous demandons au gouvernement de retirer le pistolet.
     Quatrièmement, la sous-traitance réduit les normes de sécurité. Le CN fait souvent appel à des entrepreneurs plutôt qu’aux équipes chevronnées de l’entreprises, et ce, pour un certain nombre de raisons, dont aucune n’accroît la sécurité. Les entrepreneurs peuvent sembler coûter moins cher aux yeux du CN et peuvent réduire la responsabilité de l’entreprise en cas d’accident; toutefois, ils manquent souvent d’expérience comparativement aux effectifs du CN. Ils ont une connaissance moins approfondie des règlements, des directives et des consignes de sécurité. Leur équipement et leurs outils ne sont pas conformes à la norme. De plus, selon notre expérience, compte tenu de leurs conditions d’emploi plus précaires, les entrepreneurs sont plus susceptibles d’utiliser des raccourcis afin d’accomplir le travail plus rapidement et demeurer plus concurrentiels par rapport aux autres entrepreneurs qui convoitent les mêmes contrats.
    Les accidents qui mettent en cause des entrepreneurs sont déclarés séparément et sont camouflés plus facilement. Cependant, nous ne pouvons pas « camoufler » le fait que le 11 novembre 2006, un entrepreneur de 19 ans qui travaillait dans la subdivision de Kingston a perdu la vie lorsqu’il a été écrasé sous une plaque tournante d’une machine qui n’était pas convenablement verrouillée. Il n’avait pas reçu de formation appropriée relativement à la procédure de verrouillage utilisée par les employés du CN.
     Transports Canada doit jouer un rôle beaucoup plus actif sur les plans de la surveillance et de l’application de la formation appropriée, des procédures de sécurité et de la délivrance de brevets et certificats, et veiller à ce que tous les travailleurs, y compris les entrepreneurs, utilisent de l’équipement et des outils qui fonctionnent convenablement.
(1550)
     Cinquièmement, nous sommes préoccupés par l’absence de responsabilisation interne du CN auprès des comités de la santé et de la sécurité. Les structures internes du CN relatives aux réunions conjointes de la direction et des syndicats en matière de santé et de sécurité se situent quelque part entre l’état non fonctionnel et l’inexistence. Si la sécurité constituait de fait la priorité absolue du CN, l’entreprise utiliserait ces comités d’une manière beaucoup plus efficace. L’entreprise peut tenir les discours appropriés au sujet de la sécurité, mais il reste à savoir si elle peut mettre ses paroles en pratique. Notre expérience révèle qu’elle doit y être contrainte.
    En dernier lieu, j’aimerais offrir une suggestion précise: ralentissez les trains lorsque ceux-ci roulent à proximité d’équipes de travail qui travaillent sur des voies adjacentes, afin de réduire les risques et la possibilité d’un déraillement près de ces travailleurs.
     Nous espérons que votre organisme jugera qu’il vaut la peine d’exercer des pressions pour que cette mesure soit adoptée. Cette mesure ne coûterait rien au gouvernement ou à Transports Canada, et elle n’entraînerait pas de problèmes déraisonnables pour le CN. Elle accroîtrait considérablement la sécurité. À titre de simple analogie, lorsque des équipes travaillent sur les routes, les limites de vitesse imposées aux automobilistes sont réduites, et les amendes en cas de dépassement des limites augmentent. Les gouvernements provinciaux appliquent activement un accroissement approprié des mesures de sécurité lorsque des équipes de travailleurs sont présentes sur les routes. Le fondement de ces mesures devrait s’appliquer au transport ferroviaire, mais il n’en est pas ainsi.
    Il ne s’agit pas d’une question hypothétique. Les trains qui circulent entraînent la mort de travailleurs. Il n’y a même pas deux semaines, le jeudi 19 avril, un employé du CN, qui n’était pas membre de notre syndicat, a été happé mortellement, près de Cornwall, par un train qui circulait à toute vitesse sur une ligne principale double. Lorsque des travailleurs, qu’ils soient ou non membres de notre syndicat, travaillent sur une ligne principale, sur une voie d’évitement ou sur une voie à contresens située à proximité d’une autre ligne active, les trains devraient, tout du moins, réduire leur vitesse à 30 milles à l’heure lorsqu’ils croisent les équipes de travailleurs. Cette mesure permettrait d’accroître considérablement la sécurité sans imposer de fardeau déraisonnable sur le plan de la productivité du CN. Nous croyons qu’il s’agit d’une demande raisonnable, compte tenu du fait que le moyen le plus sûr d’effectuer des travaux sur les voies serait de veiller à ce qu’aucun train ne croise les travailleurs.
    À l’heure actuelle, lorsque les trains croisent une équipe, la présence de cette dernière n’a aucune incidence sur la limite de vitesse. Indépendamment de la présence ou de l’absence d’une équipe, seul l’état de la voie limite les mouvements. Les trains de marchandises peuvent maintenir leur vitesse à 65 milles à l’heure, et les trains de voyageurs, à 100 milles à l’heure, lorsqu’ils croisent une équipe. On ignore la présence des équipes de travail. Il en doit pas en être ainsi. Une distance de huit pieds seulement sépare les voies, de rail à rail; les équipes de travail se trouvent d’un côté, les trains, de l’autre. La puissance d’un train qui circule à 100 milles à l’heure peut arracher le casque de la tête d’un travailleur. Si les trains réduisaient leur vitesse, les ingénieurs et les équipes de travailleurs auraient plus de temps pour prendre conscience de la situation et y réagir. Les restrictions de vitesse sont plus sûres.
    Les sociétés ferroviaires sont tenues de réduire la vitesse des trains lorsque des marchandises dangereuses sont transportées dans des zones peuplées. Je crois que des dispositions à cet égard ont été promulguées dans la Loi sur la sécurité ferroviaire. Toutefois, des dispositions ne s’appliquent pas lorsque des marchandises dangereuses traversent des chantiers de travaux dans des zones non habitées. Les équipes de travail devraient bénéficier des mêmes égards et être avisées lorsque des marchandises dangereuses sont transportées dans les wagons qui croisent leurs chantiers. Ce type de mesures est logique du point de vue du droit de savoir des travailleurs et du point de vue d’une approche préventive conjointe de la direction et du syndicat à l’égard de la santé et de la sécurité.
    Les travailleurs ont souvent de la difficulté à dégager leur chantier au passage de trains, compte tenu des obstacles sur lesquels ils peuvent trébucher, des attaches, des rails, d’un cailloutage inégal, etc. En outre, les remblais élevés, les épaulements étroits, la neige profonde, les ponts, les débris soufflés par les trains et l’équipement tiré par ceux-ci accroissent les risques pour les travailleurs. Il ne faudrait surtout pas qu’un train déraille à côté d’une équipe de travail. Trois déraillements sont survenus dans la subdivision de Kingston au cours des six dernières semaines.
     Nous revendiquons des choses qui relèvent du simple bon sens. Toutes les personnes à qui j’ai expliqué ce point comprennent les raisons qui justifient la restriction de la vitesse. Seuls les représentants du CN ne les comprennent pas.
    Le 28 avril, j’ai assisté à la cérémonie annuelle de deuil, tenue à Sudbury, en Ontario, en mémoire des travailleurs tués dans l’exercice de leurs fonctions. J’ai mentionné la tragédie récente survenue à Cornwall, dans laquelle un travailleur du CN a perdu la vie. On m’a suggéré d’écrire aux responsables du CN pour leur demander que les drapeaux soient mis en berne lorsqu’un employé décède. J’ai répondu que j’avais écrit des dizaines de fois au CN pour demander que les trains ralentissent à proximité de travailleurs, afin que nous n’ayons plus à mettre les drapeaux en berne.
     Je vous remercie.
(1555)
     Merci beaucoup.
     Monsieur  Bell.
    Je vous remercie.
     Messieurs, je vous remercie de votre participation et de vos commentaires.
     Monsieur Chudnovsky, j’ai deux ou trois questions au sujet de votre exposé. Vous avez abordé un point qui me préoccupe. J’ai soulevé ce point auprès des responsables du CN, mais nous n’avons pas encore pu obtenir de réponse. Il s’agit de la question des freins dynamiques. Les locomotives de B.C. Rail étaient dotées de ce type de freins, mais j’ignore où sont passées ces locomotives. Je crois comprendre qu’elles ont été cédées ou déplacées. Les quelques locomotives qui étaient munies de freins dynamiques ont été désactivées ou, pour une raison quelconque, ont été retirées du service. On croit — du moins, M. Rhodes croit sûrement — que si la locomotive avait été équipée de freins dynamiques, ses deux collègues seraient sans doute toujours en vie.
     Il s’agit de la différence, à laquelle vous faisiez référence dans votre exposé, entre une voie ferrée à pentes douces naturelles et les voies ferrées de la Colombie-Britannique, compte tenu des rayons et des inclinaisons que nous avons. Je crois que le dernier accident mettait en cause une distance de 13 milles, et une pente de 2,5 p. 100, ce qui est considérable.
     La question qui me préoccupe a trait à certaines des autres pratiques mentionnées dans le rapport. Ces pratiques ne sont pas exclusives à la Colombie-Britannique; cependant, elles sont amplifiées dans cette province. Par exemple, les tournées de surveillance avaient été réduites. On nous a cité une situation dans laquelle une voie avait été atteinte par une pierre et désalignée. L’ingénieur, grâce à d’habiles manœuvres, a été en mesure de faire en sorte que 27 wagons franchissent la jonction avant qu’un léger déraillement ne survienne, et qu’il soit ainsi contraint de réduire la vitesse. Je suis donc préoccupé par les tournées de surveillance.
     Les avis et les ordres me préoccupent également. À l’époque de la rédaction du rapport, en novembre 2005, 99 ordres restaient à régler, dont 24 — je crois — dataient de 2000 ou d’avant. Je juge inconvenant que ces ordres n’aient pas été réglés, lorsqu’il s’agit de ce genre de question.
     Le mauvais ordre de fonctionnement constitue un autre problème. Je crois que 75 p. 100 des inspecteurs ont affirmé qu’il n’était pas rare que l’étiquette soit retirée et que les wagons soient remis en service.
     L’autre problème a trait à l’utilisation des normes des États-Unis à l’égard des locomotives et des wagons. Il semble que l’on ait privilégié la norme la plus pratique, en grande partie. Je comprends que dans le cas d’une opération entre les États-Unis et le Canada, il est parfois difficile de faire ce type de distinctions; cependant, les témoins — même les vice-présidents du CN qui ont témoigné — ont reconnu que les règlements de Transports Canada étaient, pour une bonne part, plus stricts. Ils ont affirmé que les règlements de certains États sont plus sévères, mais que les règlements de Transports Canada sont essentiellement plus stricts.
     En ce qui concerne les deux questions désignées comme étant les causes principales des accidents dans les rapports, l’une a trait à l’équipement et au matériel roulant et l’autre à l’état et à l’entretien des voies. J’ai entendu quelques suggestions à ce sujet.
     Évidemment, ma préoccupation a trait à la sécurité des travailleurs et à celle du public dans les zones touchées, en cas de déraillement ferroviaire. Il existe des exemples, aux États-Unis et en particulier ici, de déraillements mettant en cause des produits chimiques dangereux qui ont entraîné un risque pour le public. Un incident est survenu à Mississauga il y a des années, et d’autres se sont produits depuis, notamment à Hinton.
     L’autre question a trait à l’environnement, notamment le cas de la rivière Cheakamus, où les stocks de poissons pourraient être endommagés pendant 20 à 30 ans.
     Il y a ensuite le transport de marchandises et les services — les importations et les exportations dont notre pays dépend. Compte tenu de la porte d’entrée du Pacifique et de la croissance du marché de l’Asie et du Pacifique — la Chine et l’Inde en particulier— il importe que nous soyons en mesure de maintenir ces trains en circulation pour pouvoir desservir les ports, de même que l’industrie du transport routier afin d’assurer le rendement du système économique.
     Toute la question de la sécurité est donc extrêmement importante, ce qui explique que le comité ait entrepris cette enquête. Nous sommes intéressés par la sécurité du transport aérien, maritime et ferroviaire. Le transport ferroviaire constituait l’un des enjeux, compte tenu du nombre élevé d’incidents survenus en 2005, et, notamment, des incidents très médiatisés.
     Vous avez entendu quelques-uns des témoignages, et vous avez eu la possibilité d’examiner le témoignage des autres intervenants. Monsieur Cotie, vous avez formulé une suggestion au sujet de restrictions de vitesse obligatoires. Nous ne semblons pas avoir accès aux dossiers qui traitent des cas dans lesquels celles-ci étaient en cause. Vous avez entendu les autres.
     Monsieur Cotie, est-il possible, pour les travailleurs, de s’éloigner de la voie lorsqu’ils voient qu’un train s’approche, de manière à ce que celui-ci ne doive pas réduire autant sa vitesse?
(1600)
     Monsieur Kosinski, ou monsieur Chudnovsky, avez-vous des recommandations que le comité pourrait faire sur la manière de traiter les questions en termes de règlements et de lois? Je sais que l’une des suggestions suppose que nous renforcions la Loi sur la sécurité ferroviaire, en grande partie comme la Loi sur l’aéronautique, des points de vue de l’imputabilité et de la responsabilité.
     M. Cotie pourrait répondre, et nous reviendrons ensuite à M. Chudnovsky.
    La limite de 30 milles à l’heure découle de divers règlements. J’ai fait référence au transport de marchandises dangereuses dans les zones peuplées. Je crois que la limite est établie à 35 milles à l’heure. Un train qui nous croise ne doit pas nécessairement réduire sa vitesse à 35 milles, car ce pourrait être à l’extérieur des zones peuplées.
     Nous avons des voitures-logement, des logements mobiles, dans lesquels nous dormons — des voitures-couchettes — qui se trouvent à côté de la voie, à une distance de huit pieds, une distance équivalente à celle où se trouverait une équipe de travail; les instructions générales d’exploitation du CP comportent des règlements — vous les connaissez peut-être; ces instructions régissent l’exploitation de l’entreprise — qui stipulent que les trains doivent réduire leur vitesse à 30 milles à l’heure lorsqu’ils croisent un logement mobile — qui se trouve à l’intérieur de 30 pieds du centre de la voie, ce qui englobe la voie d’évitement et la voie à contresens. Nous luttons depuis les deux dernières années pour que le CN adopte des règlements semblables. Ils ont finalement imposé une restriction de la vitesse à 30 milles à l’heure lorsque les trains croisent ce type de logements mobiles. La limite de 30 milles à l’heure découle de cette ordonnance.
     Par équipes de travail, j’entends généralement les grandes équipes de pose de rails, les équipes de pose qui travaillent dans la subdivision de Kingston, qui est une voie principale double. La protection est assurée par le biais d’un système de signaleurs. On utilise deux signaleurs rouges. Les trains reçoivent l’ordre de communiquer avec une personne responsable de la zone, par le biais des signaleurs. Les employés sont avisés qu’un train s’approche, mais celui-ci ne réduit pas sa vitesse compte tenu de la présence d’un signaleur rouge. Les travailleurs sont donc avisés. À de nombreux endroits, ils ne peuvent pas dégager la voie, en raison de l’accotement — ou du moins dégager la voie d’une manière raisonnable. Je crois que la distance minimale est de 16 pieds de la voie la plus proche jusqu’à, peut-être, l’accotement. La distance est réduite lorsque la voie comporte des courbes et, la nuit, compte tenu de la visibilité réduite. Ils peuvent trébucher sur des obstacles, parce qu’ils remplacent des traverses, etc.
     Un employé syndiqué assure la protection en ce qui concerne les signaleurs rouges. Des suggestions en matière de sécurité ont été formulées, par le biais de séances d’information sur les emplois, afin que la vitesse soit réduite à 30 milles à l’heure. Ils ont pris des dispositions en ce sens. Les travailleurs, et d’autres représentants de la sécurité m’ont affirmé qu’ils étaient à l’aise avec la limite de 30 milles à l’heure, contrairement à la vitesse normale de 65 milles à l’heure, en ce qui concerne les trains de marchandises, ou de 100 milles à l’heure en ce qui concerne VIA.
     Les responsables de l’entreprise ont appris que l’on réduisait la vitesse dans les zones indiquées par des signaleurs rouges. Ils sont revenus et ont augmenté de nouveau la vitesse, affirmant que cela n’était pas nécessaire.
(1605)
     Monsieur Chudnovsky, aimeriez-vous formuler des commentaires?
    J’aimerais vous remercier de l’accès à l’information. Initialement, nous avons demandé ces rapports et nous ne pouvions pas les obtenir.
     J’aimerais souligner plusieurs points. Je serai le plus bref possible. Un des points a trait à cette question.
     Premièrement, en ce qui concerne les problèmes qui ont été définis, je tiens à préciser que dès que le déraillement de Cheakamus est survenu, et les autres incidents par la suite, j’ai reçu des dizaines d’appels de personnes qui travaillaient à bord des trains, et toutes ces personnes tenaient les mêmes propos. Elles mentionnaient sans cesse la longueur des trains, les freins dynamiques, la puissance distribuée, etc.
     Je crois que nous devons tirer des enseignements de ces personnes. Nous devons apprendre des personnes qui font le travail, et les prendre au sérieux. J’ai appris davantage au sujet de la rationalisation en deux semaines que je n’aurais jamais cru en apprendre. Tout le monde savait et comprenait… Je ne devrais pas dire « savait ». Les opinions des personnes qui exécutent les tâches ont été formulées à titre anonyme. Ces personnes ont décrit les raisons de cette « flambée » de déraillements. Elles ont toutes utilisé des descriptions semblables et décrit les mêmes raisons. Je crois que nous avons tous une leçon à tirer de ces personnes.
     Le deuxième point a trait aux normes. Vous avez formulé — à juste titre  un commentaire selon lequel les normes en matière de rapports, d’entretien et de sécurité sont moins strictes aux États-Unis que celles de Transports Canada; cependant, les normes de la Colombie-Britannique étaient encore plus rigoureuses. Il me semble, de toute évidence, que nous devons examiner la situation et les caractéristiques particulière de la Colombie-Britannique. Il vous incombe à vous, de même qu’au Parlement fédéral, de déterminer quelle devrait être la norme nationale; assurément, quelqu’un doit prendre en compte le caractère unique de la situation de la Colombie-Britannique.
     En troisième lieu, j’aimerais aborder très rapidement la question de la transparence. Il est inconcevable que nous devions passer par les dispositions d’accès à l’information pour obtenir ces renseignements. C’est notre bureau qui, il y a de nombreux mois, a présenté la demande d’accès à l’information qui a permis de rendre publics les résultats de la vérification. Comme je l’affirme à la page 2 de mon mémoire, trois autres points de la demande d’accès à l’information n’ont pas encore été réglés, et ces trois points déboucheraient sur des renseignements qui seraient utiles à tous les intervenants dans cette question.
     Enfin, le quatrième point que j’aimerais signaler, monsieur le président — je vous remercie de votre patience — concerne la question de l’autoréglementation. Si vous me demandez une recommandation, je crois que la question de l’autoréglementation est ridicule. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les entreprises, dont la responsabilité est axée sur leurs actionnaires et sur le bénéfice net, s’autoréglementent lorsqu’il s’agit d’une question aussi importante que la sécurité ferroviaire.

[Français]

    Monsieur Laframboise.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Chudnovsky, je vais poursuivre avec ce que vous disiez sur les systèmes de gestion de la sécurité.
    Le comité se penche sur cette question et fait face à Transports Canada, qui essaie de nous vanter les mérites du Système de gestion de la sécurité. Il essaie de nous faire comprendre que ce système force les entreprises à ajouter un degré supplémentaire de sécurité. Or, on constate qu'il y a moins d'inspecteurs à Transports Canada pour faire les inspections visuelles qu'on faisait auparavant. C'est la situation à laquelle nous faisons face.
    On veut implanter les systèmes de gestion de la sécurité dans le transport aérien, et nous sommes en pleine discussion à ce sujet. Vous avez dit que le fait de confier la gestion de la sécurité à l'entreprise privée sans exercer de surveillance posait un problème, et je le comprends bien.
    Par contre, j'ai un peu de difficulté par rapport à la position du gouvernement de la Colombie-Britannique. Vous avez dit que le milieu pouvait intervenir. La semaine dernière, le maire de Montmagny est venu nous dire qu'il s'était produit plusieurs accidents répétitifs sur un certain tronçon de la voie dans sa municipalité. Il voulait une réduction de la vitesse. Le comité a décidé à l'unanimité de se pencher sur la question et de recommander à Transports Canada de réduire la vitesse dans un certain secteur.
    Cependant, le territoire de la Colombie-Britannique est vaste. Il faudrait que l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique nous confie un mandat. Si le gouvernement de la Colombie-Britannique se sent actuellement à l'aise face à la vitesse, on aura beaucoup de difficulté à légiférer dans cette juridiction. La modification de la vitesse peut avoir un impact économique sur le transport de marchandises, de passagers ou de quoi que ce soit d'autre. Comme il s'agit d'un vaste territoire, je serais d'accord pour vous appuyer, en autant que l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique demande une réglementation particulière.
    Pourquoi ne le fait-elle pas? Sinon, essayez de me convaincre de passer par-dessus le gouvernement de la Colombie-Britannique, qui a justement des normes plus sévères. Jusqu'à maintenant et d'après ce que vous avez dit et ce que j'ai lu, le gouvernement de la Colombie-Britannique n'a jamais demandé au gouvernement fédéral de modifier la réglementation de cette province.
(1610)

[Traduction]

    Tout d’abord, je vous remercie de votre question. Je ne peux qu’appuyer votre sentiment de frustration à l’égard du gouvernement de la Colombie-Britannique. C’est un sentiment que j’éprouve en permanence.
     Permettez-moi d’expliquer ma perception de la position du gouvernement de la Colombie-Britannique — je ne la partage pas — et ensuite ma position personnelle à l’égard des propos de ses représentants.
     L’ancienne société B.C. Rail, qui était une société d’État de la Colombie-Britannique, a été vendue au CN. La transaction a été conclue en 2004. La position du ministre provincial des Transports, et donc du gouvernement de la Colombie-Britannique, est axée sur le fait que comme la société ferroviaire a été vendue au CN, une compagnie ferroviaire interprovinciale nationale, il s’agit désormais d’une entité sous réglementation fédérale.
     Lorsque j’ai questionné le ministre, à maintes reprises et de façon affirmative, en public et au sein de l’Assemblée législative, il m’a répondu: « Cette question relève du fédéral. Allez voir les responsables d’Ottawa ». Alors me voici.
     En ce qui concerne sa position, je crois que, d’une certaine manière, il ait officiellement raison, il incombe néanmoins au gouvernement de la Colombie-Britannique de défendre les intérêts de la population de la province. Lorsque les résidents de la Colombie-Britannique, ainsi que l’environnement sont exposés à un risque — comme nous croyons qu’ils le sont depuis plusieurs années — la responsabilité relève du ministre provincial. Même si ce dernier croit qu’il s’agit d’une entité sous réglementation fédérale et qu’il ne dispose d’aucune autorité officielle, il lui incombe de venir témoigner devant vous, de communiquer avec son homologue fédéral et de défendre publiquement la sécurité et la sûreté de la population et de l’environnement de la Colombie-Britannique.
     Personnellement, je n’accepte pas la position du gouvernement de la Colombie-Britannique. Je sais que nous toucherons peut-être une question d’ordre constitutionnel sur ce point, et je ne suis pas sûr de vouloir toucher cette question; cependant, je n’accepte pas leur position. Je crois qu’ils devraient avoir une attitude beaucoup plus ferme et énergique. Leur excuse pour ne pas adopter ce type d’attitude — et je crois qu’il s’agit simplement d’une excuse, cela n’est pas justifié — a trait au fait que le CN est un organisme sous réglementation fédérale.

[Français]

    Il est difficile pour nous de cibler la vitesse, si la communauté est représentée par son gouvernement. Lorsque le maire de la ville de Montmagny, au Québec, où il se produit plusieurs accidents, nous demande une réduction de la vitesse, on le comprend et on fait une recommandation. Par contre, la géographie de la Colombie-Britannique est telle que la vitesse dans les montagnes devrait probablement être réduite.
    Les montagnes du Québec sont différentes des vôtres. Si votre géographie est différente et qu'elle nécessite une réglementation différente, il faut la demander. Si vous ne la demandez jamais, vous devrez composer avec les accidents qui se produisent présentement. C'est le message qu'il faut transmettre au gouvernement de la Colombie-Britannique.
    Faire une recommandation ciblée sur un territoire donné, sans le consentement de la province, est déjà assez difficile. On voudrait s'entendre avec les élus avant de faire des recommandations.
    Je vais poser la question à M. Kosinski et à M. Cotie, qui ont ciblé la vitesse. Croyez-vous que le fait de modifier la réglementation sur la vitesse dans un territoire comme celui de la Colombie-Britannique serait la solution? Je sais qu'il y a autre chose, mais est-ce que ce serait une solution importante, si on devait y apporter des modifications réglementaires?
(1615)

[Traduction]

    Monsieur Cotie.
    Je ne peux parler beaucoup de la Colombie-Britannique, car je viens de l’Ontario et je ne connais pas grand-chose à la situation en région montagneuse. Mais nos équipes pourraient réduire la vitesse, en particulier dans les villes — je sais que cette position a été parfois défendue par le Québec. Le CN affirme que cela représenterait un fardeau économique, mais j’habite à Capreol, en Ontario, qui était auparavant un carrefour ferroviaire. L’activité est maintenant réduite, mais il y a encore une cour de triage. J’ai vu des trains transportant des millions de dollars de marchandises rester immobiles sur la voie pendant une heure ou deux, parfois trois, en attente d’une équipe de train, etc. Alors, on ne peut pas dire que le délai causé par la réduction de la vitesse constituerait un problème important, si cela permettait d’améliorer la sécurité quand des matières dangereuses sont transportées ou de réduire le risque de déraillement.
    Le CN ne ferait pas rouler intentionnellement un train à 60 milles à l’heure sur des rails défectueux. Ils réduisent la vitesse à 30 ou à 25 et ce, jusqu'à ce que le problème soit corrigé. Ils mettent ces trains qui ne sont pas aussi bien inspectés qu’ils voudraient nous laisser croire, en particulier pendant les quarts de nuit quand ces personnes travaillent, à la vitesse maximum que la voie ferrée peut supporter en tout temps, sans même prendre cela en considération. Et des trains, comme je l'ai dit, restent immobilisés dans les cours et cela entraîne aussi des retards dont personne ne veut parler.
    Monsieur Kosinski, avez-vous un commentaire?
    Je crois que ce que Todd disait au sujet de la réduction des limites de vitesse autour des équipes de travail devrait certainement être examiné. Dans l’ensemble, je connais à peu près toutes les voies ferrées de l’Ouest canadien, à l’exception de la voie qu’on appelait auparavant la « B.C. Rail », et j'ai eu l'impression que les limites de vitesse ont été dans l'ensemble fixées assez judicieusement. Je n’en ai pas vu qui étaient excessives. Il y a certains secteurs où il semblait que la limite de vitesse était peut-être un peu plus basse qu’elle pourrait être, mais dans l’ensemble elles me semblent très correctes. Bien entendu, il faut avoir des voies ferrées sécuritaires, le bon équipement, des freins qui fonctionnent bien, des wagons avec des roues rondes et non des roues carrées, et ainsi de suite. Bien entendu, toutes ces considérations nous ramènent à l’état réel de l'équipement et de la voie utilisée.
    Monsieur Julian.
    Je vous remercie tous d’avoir pris la parole aujourd’hui. L’information que vous nous transmettez est importante pour nous.
     Je vais commencer par vous, M. Chudnovsky. Je suis désolé que le ministre Falcon ne soit pas ici. Il devrait y être. Cela fait partie de ses responsabilités.
    Vous auriez aimé l’entendre, j’en suis sûr.
    Je suis stupéfait de constater que le gouvernement de la Colombie-Britannique ne fait absolument rien. Il y a certainement des mesures qu’ils pourraient prendre. Ils pourraient s’entretenir avec le gouvernement fédéral. Mais ils ne font rien. Alors je dois demander pourquoi le gouvernement de la Colombie-Britannique ne fait rien pour la population de sa province?
     Deuxièmement, j’aimerais revenir sur la question du CN. Leurs dirigeants sont venus témoigner devant le comité cette semaine et ils ont commencé par dire qu’il n’y avait pas de problèmes, qu'ils avaient corrigé les problèmes. Quand on leur a fait remarquer que l’on avait en fait assisté à une hausse vertigineuse des déraillements au début de 2007, ils se sont employés à jeter le blâme sur tout le monde sauf eux-mêmes.
    Alors, voici ma question: les dirigeants du CN ont-ils encore une quelconque crédibilité en matière de sécurité, étant donné qu’ils refusent tout simplement d'admettre qu’il y a des problèmes?
    Je crois que l’inaction du gouvernement de la Colombie-Britannique sur ces questions au cours des dernières années relève principalement de l’idéologie. Ils ont choisi, selon moi pour des raisons idéologiques, de privatiser B.C. Rail. Les problèmes sont souvent, sinon en majeure partie, survenus sur les vieilles voies de B.C. Rail.
    Comme vous le savez — M. Julian le sait, d’autres députés le savent peut-être et M. Bell le sait certainement — la privatisation de B.C. Rail a soulevé beaucoup de controverse à l’époque. Cela allait à l’encontre d’un engagement qu’avait pris le premier ministre. Ce dossier est encore controversé aujourd'hui et l’affaire — un dossier chaud — est actuellement devant les tribunaux.
(1620)
    Je fais un rappel au Règlement, monsieur le président. Je dois élever une objection, car depuis quelques minutes nous voyons M. Julian et sans aucun doute M. Chudnovsky aborder des sujets qui sont actuellement devant les tribunaux et quand une question est devant les tribunaux, notre comité a l’habitude de ne pas la commenter. La règle de la chose jugée, que nous avons examinée à cette table au moins deux fois depuis que je suis membre, indique clairement que les questions qui sont devant les tribunaux ne devraient pas être discutées à cette table.
     Je remarque que M. Julian tente encore de transformer les travaux en débat sur la politique provinciale en Colombie-Britannique. Il est question de sécurité ici et j’aimerais que l’on revienne à la sécurité, plutôt qu’aux machinations politiques que M. Julian et M. Chudnovsky veulent nous concocter.
    J'aimerais avoir votre décision à ce sujet.
    Monsieur le président...
    M. Julian, sur le rappel au Règlement.
    Comme M. Fast le sait, cela fait partie de la dynamique et de la discussion au sujet de la sécurité. Je vous demande donc, monsieur le président, de le calmer afin qu’il n’intervienne pas et n’essaie pas d’interrompre le travail du comité, qui est d'examiner les questions de sécurité. C’est un sujet qui appartient au domaine public et à la sécurité publique et c’est très important - il le sait bien, vu qu’il vient de la Colombie-Britannique.
    Merci, monsieur Julian.
     Ce n’est pas un rappel au Règlement. Je demande que la discussion continue. S’il vous plaît, monsieur Chudnovsky…
    Merci, monsieur le président.
     À maintes reprises, le ministre provincial a choisi — et c’est son droit, bien entendu — de ne pas prendre position sur les problèmes auxquels le CN se heurte depuis quelques années en Colombie-Britannique. Je crois qu’il a pris là une décision de nature idéologique; d’autres personnes peuvent voir les choses différemment.
     En ce qui concerne la crédibilité du CN, je crois qu’il s’agit d’une question très importante que nous devons prendre au sérieux et que j’invite le CN à prendre au sérieux. Je crois que l’on peut affirmer que le CN a très peu de crédibilité en matière de sécurité en Colombie-Britannique, car, alors que les déraillements se multipliaient et que le malheur frappait Wabamun, Cheakamus, Lillooet et d’autres localités, le CN a continué à répondre qu'il ne s'agissait pas d'un gros problème, que des améliorations étaient apportées, qu’il fallait être patients, que tout irait bien, que l’on exagérait, que c’étaient des accidents, non des incidents. On a entendu toutes sortes de dénégations.
     Aussi semble-t-il que cette grande société qu’est le CN se retrouve maintenant avec bien peu de crédibilité alors qu’ils expliquent leurs décisions au législateur et au public. Il y a là un problème et je crois que nous devrions encourager le CN à faire d’autres choix en ce qui concerne leur participation au débat.
    Je vous remercie de votre commentaire.
     J’aimerais maintenant lire un commentaire de M. Gordon Rhodes, qui a paru devant notre comité il y a environ deux semaines. Voici ce qu’il disait: « Il y a un problème au niveau de l’exécution. Je crois que Transports Canada a failli à sa mission. Je ne pointe pas des individus en particulier. C’est le système. »
     Nous avons mis en place un système de gestion de la sécurité dans l’industrie du chemin de fer. Le gouvernement essaie de réaliser la même chose dans l’industrie du transport aérien. Je crois que notre inquiétude est que le SGS contribue en fait au problème de la sécurité des chemins de fer.
     N’est-ce pas, comme vous l’avez signalé, monsieur Cotie, une façon de récompenser les dirigeants pour un comportement répréhensible, que de mettre en place un SGS qui leur permet essentiellement de rogner sur la sécurité pour augmenter leurs bénéfices?
     Je vous pose à tous trois cette question au sujet de la SGS et de la sécurité.
    Et la SGS est...?
    Une voix: De l'autorégulation.
    Oui.
    Le boni qu’ils reçoivent est-il…? OK, voici comment je vois la question de la réduction de la vitesse des trains.
     Je reviens du comité des politiques. Il s’agit d’une initiative mixte patronale-syndicale qui se penche sur les problèmes. La société voyait d’un mauvais œil que je présente la question à la table, affirmant que celle-ci n’avait pas remonté tous les échelons de la filière hiérarchique. Elle n’a pas remonté la filière hiérarchique parce qu’elle a été laissée de côté. Elle a été soulevée à la base par les travailleurs. La question se perd ensuite dans « la boue du milieu » dont parle Hunter Harrison, tandis que le superviseur de première ligne subit une pression énorme pour produire. La sécurité devient secondaire. La question posée à la base ne remonte pas vers le haut.
     Un phénomène semblable est survenu avec un défibrillateur. Quelques-uns de nos employés sont décédés d’arrêt cardiaque dans des régions isolées du nord de l’Ontario. Nous croyions qu’il serait avisé d'avoir un défibrillateur dans ces endroits isolés où le premier hôpital est à deux heures de déplacement. On nous a dit qu’il fallait 300 personnes dans la région pour justifier un défibrillateur. Nous avions 20 ou 30 personnes en plein milieu de nulle part qui risquaient de mourir avant d’arriver à l’hôpital, mais nous ne pouvions leur fournir un défibrillateur parce que la question n’avait pas remonté la filière hiérarchique.
(1625)
    Quand Transports Canada ne peut plus faire son travail parce que le nombre d’inspecteurs a été coupé et que l’on laisse tout simplement la sécurité aux soins de l’entreprise, estimez-vous qu’il s’agit d’une évolution dangereuse?
    Absolument, car ils ont des motifs cachés à tous les points de vue. Même les superviseurs sur le terrain ont un système de bonification qui peut être ou ne pas être basé sur les blessures, les accidents, etc. Leur préoccupation, c’est bien clair — vous pouvez demander à toutes les personnes que je représente — est toujours la production. La sécurité est mise de côté autant que possible.
    Monsieur Kosinski.
    Certaines personnes ici ont peut-être entendu parler d’une récente enquête sur la brutalité policière menée par la Gendarmerie royale et mettant en cause le service de police de Vancouver. La Gendarmerie royale est arrivée à la conclusion qu’il y avait eu des incidents graves de brutalité policière. Jamie Graham, le chef du service de police de Vancouver, a décidé de mener sa propre enquête interne, qui a absous toutes les personnes impliquées par la Gendarmerie royale. Je crois qu’il s’agit là d’un bon exemple en ce qui concerne l’efficacité de l’autorégulation.
     Au risque de passer pour un cynique, je crois qu’essentiellement la politique derrière l’autorégulation des procédures de sécurité pourrait être décrite comme suit: lentement vers le haut, rapidement vers le bas, le tonnage en premier, la sécurité en dernier.
    Monsieur Fast.
    Merci, monsieur le président.
     Je tiens à vous remercier tous trois de votre présence.
     J’aimerais parler des commentaires de M. Cotie.
     Monsieur Jean, vous vouliez faire un rapide commentaire, je crois. Mes excuses.
    Je voulais confirmer que cet été, j’ai eu l’occasion de m’entretenir, directement et indirectement, avec le ministre de Colombie-Britannique et plusieurs députés de Colombie-Britannique, dont M. Thorpe de Kelowna, et que nos discussions ont porté notamment sur les chemins de fer et d’autres sujets liés à la sécurité. Je veux simplement clarifier le commentaire fait par M. Julian et informer le comité que nous avons eu des discussions avec eux et qu’ils se soucient de la sécurité des chemins de fer et d’autres questions.
    Je vous remercie.
    Monsieur le président, je m’efforcerai d’être concis. J’essaie d’être constructif. J’ai l’impression que certains, autour de cette table, cherchent à défendre des intérêts politiques et que cela ne contribue pas vraiment à la cause de la sécurité. Nous essayons tous de travailler ensemble pour améliorer la sécurité de nos transports ferroviaires. Tous les députés présents, je crois, ont exprimé de sérieuses réserves au sujet de la situation actuelle de la sécurité ferroviaire au Canada.
    Je vous remercie encore une fois, monsieur Cotie, d’être venu au comité. Vous avez dit dans votre exposé préliminaire et vous venez de répéter, une fois de plus, que la culture du CN tend à faire passer la productivité avant la sécurité. J’aimerais vous lire un extrait de ce que le CN lui-même dit à ce sujet. J’ai ici des citations tirées du mémoire que le CN a présenté au Comité d’examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire.
    Le CN affirme donc: « ... nous considérons que la sécurité est la responsabilité de chaque membre du personnel et nous nous efforçons avec diligence d’instaurer et de promouvoir une culture axée sur la sensibilisation à la sécurité et les pratiques sécuritaires. » Un peu plus loin, on trouve ceci: « ... le CN a toujours accordé la plus grande priorité à la sécurité. La sécurité est l’une des cinq valeurs fondamentales de la Compagnie ».
    C’est à peu près le contraire de ce que vous avez dit. En toute franchise, je n’ai pas été très satisfait de la réponse que nous avons obtenue du CN. Permettez-moi d’ailleurs de citer un passage de ce que nous a dit le représentant de la compagnie, M. Creel. Ce texte est tiré de la transcription de notre dernière séance. M. Creel a affirmé, et je cite: « Au CN nous appliquons la norme plus exigeante. Étant donné que certains de nos trains franchissent la frontière, sur bien des points ce n’est pas la norme la plus souple que nous appliquons mais bien la plus exigeante. »
C’était la réponse à une question que je lui ai posée. Je lui avais demandé si les normes applicables étaient différentes aux États-Unis et au Canada, et peut-être même en Colombie-Britannique. J’ai cru comprendre, d’après sa réponse, que le CN applique la norme la plus stricte, quelle qu’elle soit.
    Je lui ai posé des questions précises sur toute la question des wagons avariés sur lesquels on affiche un avis que les superviseurs arrachent par la suite, de sorte que les wagons sont réparés en fonction de la norme la moins stricte. Je ne pense pas qu’il ait donné une réponse satisfaisante à cette question. Il a simplement soutenu que le CN applique les normes de sécurité les plus élevées.
    Je voudrais vous demander de nous parler de toute cette affaire. Avez-vous connaissance de wagons avariés sur lesquels on a arraché l’avis exigeant des réparations selon la norme la plus stricte? Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?
(1630)
    Non, je suis travailleur d’entretien. Je ne m’occupe pas du transport en soi.
    Je peux cependant vous parler de cette question de la norme la plus stricte... La raison pour laquelle nous avons exercé des pressions pour que les convois ralentissent à 30 milles à l’heure lorsqu’ils passent à côté des voitures-logements, c’est que le CP appliquait une norme plus stricte. Il a fallu deux ou trois ans... Cette norme a toujours existé. Nous avons simplement été informés que le CP avait cette limite de 30 milles à l’heure. Nous avons demandé qu’on réduise la vitesse des convois à proximité des voitures-logements, où les travailleurs dorment le long de la voie. Nous avons finalement obtenu la limite de 30 milles à l’heure, mais nous avons dû beaucoup insister pour cela. Une autre compagnie ferroviaire avait cette limite.
    Elle n’est pas imposée par le règlement. C’est une décision que le CP a prise de sa propre initiative. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais je suis sûr que c’est à la suite d’un incident quelconque. Notre comité a dû se battre pendant deux ou trois ans pour y arriver.
    Pour ce qui est des wagons avariés, je ne sais vraiment pas.
    Monsieur Kosinski, disposez-vous d’autres renseignements à ce sujet? Est-ce que cela s’est produit du temps où vous étiez mécanicien de train?
    Cela a bien pu se produire, mais le personnel roulant ne serait pas au courant de ce genre d’information. Les employés des services de la circulation sont simplement assis dans... l’équivalent actuel du wagon de queue, en attendant de quitter la gare de triage. Ils ne savent pas vraiment ce que font les employés du service des wagons au sujet du matériel avarié.
    Il est donc possible que cela se soit produit assez couramment à notre insu. Qui sait? C’est peut-être la cause de quelques déraillements... des wagons avariés qui n’auraient jamais dû être en service.
    Vous avez tous trois concentré vos observations sur le CN. Pouvons-nous croire que le CP et quelques-uns des autres transporteurs privés du Canada ont de meilleures normes de sécurité ou de meilleurs antécédents à ce chapitre, ou encore qu’ils appliquent mieux le Système de gestion de la sécurité?
    Mon impression, fondée sur ce que j’ai lu dans les journaux, est que le CN a plus de déraillements que le CP. Toutefois... Je crois que M. Rhodes était mécanicien au CP. Non?
    Il travaillait pour le CN.
    Quoi qu’il en soit, lorsque l’accident s’est produit à Trail, je me suis en fait demandé si le CP se soucie plus de sécurité que la direction du CN...
    Cet accident s’est produit la semaine dernière.
    Oui. Si ce convoi avait été mieux contrôlé, si la locomotive avait été équipée de freins dynamiques, non seulement le déraillement n’aurait pas eu lieu, mais une vie aurait été sauvée.
    Je n’ai pas encore pu établir si cette locomotive était équipée ou non de freins dynamiques. Si ce n’est pas le cas, ce serait certainement la preuve d’une négligence irresponsable de la direction en ce qui concerne la sécurité.
    Monsieur Cotie, avez-vous des membres qui travaillent pour le CP et le CN, ou travaillent-ils tous pour le CN?
    Nos membres travaillent tous actuellement pour le CN.
    Seulement le CN. Vous n’avez donc pas de renseignements de première main sur...
    Non, pas sur le CP. Tout était très semblable lorsque nous partagions tous le même syndicat, mais ce n’est plus le cas. Je ne connais plus très bien le CP.
    D’accord.
    Monsieur Chudnovsky, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Je voudrais juste mentionner un détail lié à votre question.
    Je n’ai rien de particulier à reprocher au CN ou au CP, mais j’ai eu l’occasion, ces deux dernières années, d’examiner les déclarations, les rapports et les communiqués produits par les deux compagnies à la suite d’incidents. J’ai trouvé cela très instructif. J’encourage les membres du comité à le faire. Les textes du CN et du CP sont très différents. Ils témoignent d’une attitude différente et sont rédigés sur un ton différent.
    D’après ce que j’ai vu — je tiens à préciser que mon examen n’était pas exhaustif —, les textes du CP témoignent d’un plus grand engagement envers la collectivité et ont un ton moins défensif. Ils ne se limitent pas à rejeter la faute sur quelqu’un d’autre. Je le répète, je n’ai pas fait un examen scientifique, mais j’ai vu un certain nombre de cas survenus en Colombie-Britannique.
(1635)
    Je dois vous interrompre parce que je veux poser une dernière question.
    Il y a eu un échange tout à l’heure entre M. Chudnovsky et M. Julian au sujet de ce qui se passe en Colombie-Britannique. D’après le témoignage de M. Rhodes et de M. Holliday, qui sont tous deux des employés du CN, je crois, la province a en fait les normes les plus strictes. Ces normes s’appliquaient à BC Rail avant que cette entreprise ne soit prise en charge par le CN. Les deux déploraient le fait que BC Rail n’avait plus à se conformer aux normes de la Colombie-Britannique.
    Est-ce que j’ai bien compris?
    Oui.
    Pourtant, je vous ai entendu vous plaindre de ce qui se passe en Colombie-Britannique. Vous avez parlé d’une situation fâcheuse. Je crois que nous pouvons au moins considérer les normes de la Colombie-Britannique comme un modèle qui gagnerait à être repris ailleurs dans le pays pour améliorer la sécurité du secteur ferroviaire.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Volpe.
    Il s’agissait des normes du NPD... [Note de la rédaction: Inaudible]
    Peter, il est arrivé à l’occasion que des gens soient tentés de vous accuser d’avoir du talent, mais je ne crois pas que vous en ayez suffisamment encore pour vous substituer à M. Volpe. Laissez donc M. Volpe répondre lui-même.
    Trêve de plaisanteries, je tiens à dire que nous ne faisons pas de politique ici.
    J’ai été très intrigué par votre exposé, monsieur Chudnovsky, et par ceux des autres témoins aussi.
    La semaine dernière, les représentants du CN ont fait ici quelques observations sur lesquelles j’aimerais avoir votre avis. Ils ont dit d’abord que le mauvais temps a contribué à cette augmentation du nombre des accidents. Ils ont ajouté que la culture de la sécurité n’avait pas eu autant d’influence sur les employés que le CN l’aurait voulu. J’espère que je n’ai pas déformé leurs arguments, mais j’ai bien l’impression que leurs explications étaient centrées sur ces deux thèmes.
    En principe, je n’ai rien contre les discussions idéologiques, mais je ne crois pas qu’elles aient leur place ici. Vous avez semblé dire que BC Rail observait, à l’égard de ses employés et des pratiques de gestion de la sécurité, des normes très sensiblement supérieures à celles du CN. On nous présente donc des arguments complètement opposés.
    Qu’avez-vous à dire à ce sujet? Dites-moi si je me trompe en pensant qu’il est important pour nous d’avoir un point de vue objectif sur les normes appliquées, de façon à pouvoir prendre une décision sur cette base. Faudrait-il plutôt juger ce que vous avez dit et ce que le CN a dit comme des arguments présentés dans le cadre d’une discussion idéologique?
    Je vais répondre à la seconde question d’abord.
    Depuis l’accident de Cheakamus, qui remonte à près de deux ans, je crois, des dizaines et des dizaines de cheminots de l’ancienne voie de BC Rail, qui appartient maintenant au CN, ont pris contact avec moi. Je ne suis pas allé moi-même les chercher. Ils ont eux-mêmes pris l’initiative parce qu’en Colombie-Britannique, je suis le porte-parole de l’opposition officielle en matière de transports. Ils ont tous dit, sans exception, que les normes de sécurité ont baissé depuis que le CN a repris le chemin de fer. Voilà ce que j’ai à vous dire. Je peux vous présenter des détails si vous le croyez utile.
    De toute évidence, le CN n’est pas de cet avis.
    Y en a-t-il, parmi ces gens, qui attribuent une grande part de responsabilité au mauvais temps?
    Si vous ne pouvez pas répondre à cette question, peut-être M. Cotie pourra-t-il le faire.
    Non, aucun d’entre eux ne l’a fait. La seule question liée au mauvais temps qui ait été mentionnée portait sur les voitures d’inspection des voies. M. Rhodes vous en a parlé. Ces messieurs aussi.
    Indépendamment de tout cela, quelques personnes qui ont travaillé pour le CN ou qui avaient travaillé pour BC Rail m’ont dit que le nombre et la fréquence du recours aux voitures d’inspection des voies, qui précèdent les locomotives par mauvais temps, avaient diminué. Je peux vous affirmer qu’on me l’a dit.
    Si vous le permettez, j’ai un commentaire général à formuler à ce sujet. Il faut comprendre au départ que l’exploitation d’un chemin de fer est difficile et que le mauvais temps peut accentuer cette difficulté. Toutefois, j’espère bien que le CN n’est pas en train de nous dire que, par mauvais temps, il est normal d’avoir des accidents.
(1640)
    Je ne suis pas sûr que les représentants du CN ont dit cela.
    Lorsqu’ils ont entendu parler de mauvais temps, mes collaborateurs ont pris la peine de vérifier les rapports météorologiques des 10 dernières années. Ils m’ont dit: « Monsieur Volpe, vous auriez peut-être intérêt à comprendre la météorologie. » J’ai donc examiné le résultat de leur dur labeur, mais j’ai peine à comprendre que les responsables d’une entreprise fassent des observations de ce genre, compte tenu des fluctuations du temps dans les 10 dernières années. Avons-nous omis quelque élément important? Avez-vous un point de vue différent? Il me semble que les conditions météorologiques constituent un facteur dont on tient compte dans un système de gestion adéquat en prenant les mesures techniques appropriées.
    Qu’en pensez-vous sur la base de votre expérience, monsieur Cotie?
    Je répète encore que je ne m’occupe pas des convois et que je ne connais donc pas bien le sujet. À titre d’observateur extérieur, je sais que lorsque les températures sont extrêmes, à -30 degrés par exemple, des règles différentes s’appliquent. Les convois ne peuvent pas avoir la même longueur et le même poids à -30 ou -40 degrés à cause des systèmes pneumatiques. C’est d’ailleurs la même chose à +30 ou +40 degrés. Je parle ici de la température des rails. À de telles températures, les rails ont tendance à se déformer. Il y a donc des règles spéciales que les convois doivent observer dans ces cas. Il est même possible que la vitesse doive être réduite à cause de cette possibilité de déformation des rails et des défaillances possibles des systèmes pneumatiques.
    Toutefois, je ne suis pas conducteur de train. Je ne peux pas parler en expert.

[Français]

    Monsieur Carrier.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais poser ma première question à M. Cotie. J'aimerais que vous m'expliquiez exactement la fonction que vous occupez au CN.

[Traduction]

    Je suis coordonnateur pour la santé et la sécurité. Je représente le syndicat. Il s’agit d’un effort conjoint, mais je suis rémunéré par le CN. Je fais la liaison et je siège au comité de santé et de sécurité au travail, où je n’arrive pas à faire entendre raison à la partie patronale parce que les questions importantes se perdent dans la jungle administrative de la compagnie.
    Voilà donc ce que je fais au CN.

[Français]

    Donc, vous ne travaillez pas aux opérations régulières de fonctionnement des trains comme un surintendant ou un superviseur. Vous travaillez plutôt au sein d'un comité de sécurité.

[Traduction]

    Oui, depuis 12 ans. Auparavant, je me suis occupé d’entretien, j’ai été opérateur de machines, j’ai été chargé de déneiger les voies et de faire partie d’équipes de pose de crampons et d’entretien. Je faisais cela il n’y a pas très longtemps.

[Français]

    Très bien.
    Je veux revenir sur le Système de gestion de la sécurité dont certains, comme mon collègue, ont parlé plus tôt. Ce système a été imposé par Transports Canada en 2000, je crois, et est en application au CN depuis cinq ans. On nous fait la démonstration d'un système qui améliore la sécurité et qui est implanté en collaboration avec Transports Canada pour s'assurer que l'entreprise a un bon système de gestion de sa sécurité. On nous dit aussi que des inspections sont quand même faites par les inspecteurs de Transports Canada.
    Est-ce là ce que vous avez perçu dans votre entreprise?

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr de la fréquence des inspections. J’ai travaillé dans des secteurs locaux où les inspecteurs examinaient les voies tous les deux jours ou tous les jours par mauvais temps.
    J’estime qu’il faut ralentir les trains. La nuit, par exemple, il y a moins d’inspections, ce qui peut causer des accidents. À -40 degrés, un rail peut facilement casser. Les voies ne sont pas tout le temps inspectées. Elles le sont peut-être une ou deux fois par jour, mais pas tout le temps.
(1645)

[Français]

    Ça va pour les inspections. Le Système de gestion est fondé sur l'autorégulation, comme M. Chudnovsky l'a dit. C'est l'entreprise qui gère sa sécurité.
    Avez-vous vu l'application du système dans les entreprises? Avez-vous constaté toutes les améliorations que ce système apportait, en plus des inspections?

[Traduction]

    Je ne peux pas dire que le fait de laisser le CN gérer sa propre sécurité a donné de bons résultats. Le recours à des contractuels permet à la compagnie de se laver les mains de sa responsabilité. Elle gère peut-être les employés syndiqués, mais pas les contractuels. Je pense à un cas où l’un de nos employés a été renvoyé parce qu’il ne s’était pas conformé à la politique du CN en matière d’alcool et de drogue. Comme il ne travaillait pas d’une façon sûre, il a été congédié. Il est cependant revenu au travail à titre de contractuel. Il a pu travailler ainsi pendant — je ne sais pas — six mois peut-être avant que quelqu’un s’en rende compte. Il n’était pas assez bon pour être employé, alors, on l’a caché dans le système des contrats.
    Ainsi, le CN peut s’en laver les mains.

[Français]

    Merci. Ce n'est pas rassurant par rapport à l'évaluation qu'on doit faire d'un système de gestion de la sécurité. En plus, on parle de l'implanter dans le domaine du transport aérien.
    Je voudrais revenir aux propos de M. Chudnovsky concernant la vente de BC Rail. Vous avez donné des exemples qui démontrent qu'en vendant BC Rail au CN, plusieurs normes de sécurité avaient été réduites, comme les freins dynamiques, que le ministère a dû imposer par la suite. On arrive pratiquement à la conclusion que les exigences de Transports Canada en matière de sécurité, ministère sur lequel les parlementaires doivent se fier pour appliquer ces normes de sécurité... Il semble que le fait de vendre l'entreprise à CN ait eu pour conséquence de réduire de beaucoup la sécurité, ce que Transports Canada semble tolérer actuellement.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    Je crois que c’est exact. C’est ce que m’ont dit les travailleurs de ma province.

[Français]

    D'accord. Merci.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Watson.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d’être venus au comité.
    Où commencer? Bien sûr, nous avons eu des représentants du CN au comité la semaine dernière. Je n’ai pas trouvé leur témoignage particulièrement utile.
    Monsieur Cotie, vous avez dit que, pour le CN, les accidents sont attribuables à des erreurs individuelles. De son côté, le syndicat estime que des changements doivent se produire au sommet en matière de culture de sécurité. Personnellement, je suis enclin à vous croire après avoir entendu le témoignage du CN, la semaine dernière.
    La compagnie a procédé à ce qu’elle a appelé une vérification de l’efficacité. Le fait qu’on ait évité de parler plutôt de vérification de sécurité m’a mis la puce à l’oreille. À mon avis, cela donne une idée du genre de culture qu’il y a au CN. J’espère que nous sommes tous alarmés que la compagnie parle d’une vérification de l’efficacité plutôt que d’une vérification de la sécurité.
    Il semble que le degré de non-conformité parmi les travailleurs soit extrêmement élevé. Les représentants du CN en étaient eux-mêmes inquiets. Je leur ai dit qu’en présence d’un tel constat d’échec, il faut soupçonner un problème systémique, qui se situe plutôt dans la hiérarchie, parmi ceux qui supervisent le travail des employés.
    Je ne sais pas si l’un d’entre vous peut nous éclairer à ce sujet. Le syndicat connaît peut-être bien le domaine. Si vous ne représentez pas le bon syndicat, il y aurait peut-être lieu de s’adresser à un syndicat de l’Ouest.
    J’ai demandé combien de travailleurs ont fait l’objet de mesures disciplinaires pour des questions de sécurité. J’ai aussi demandé combien de cadres intermédiaires et supérieurs ont fait l’objet de mesures disciplinaires pour les mêmes raisons. Le CN n’a pas fourni des renseignements de ce genre au comité. Pouvez-vous le faire? J’aimerais savoir qui paie les pots cassés à cause de la culture de sécurité qui règne au CN.
    La compagnie ne dit pas nécessairement qu’elle prend des mesures disciplinaires pour violation des... En fait, même si un travailleur se blesse, on trouve moyen de lui imposer des mesures disciplinaires en disant que c’est de sa faute. « Comportement humain », voilà l’expression qui revient sans cesse aujourd’hui. C’est toujours attribuable au comportement humain.
    Avant que les vice-présidents ne viennent témoigner ici, on m’a dit, au comité de la santé et de la sécurité, que si l’employée qui s’est tuée à Cornwall avait bien inspecté son convoi — elle n’avait donc pas suivi les règles —, elle serait vivante aujourd’hui. On écope de mesures disciplinaires si on ne fait pas cette inspection. Mais voilà, elle est morte.
    Ils auraient parlé 5 ou 10 minutes de cette affaire, mais elle n’a même pas été évoquée... J’en ai parlé moi-même. J’ai dit: « Pourquoi travaillait-elle seule? » S’il y avait eu quelqu’un d’autre, elle serait probablement vivante. L’inspection aurait été faite. Avec plus d’une paire d’yeux... Mais c’est toujours ce qu’ils disent: C’est notre faute.
    Quant à la règle 42 dont j’ai parlé, le système de signalisation, ce système fait porter tout le fardeau à l’employé, qui doit s’écarter. Sur le plan opérationnel, il n’y a rien. Voilà pourquoi nous demandons que les trains ralentissent. Après tout, des employés peuvent être tués s’ils ne s’écartent pas assez rapidement.
(1650)
    Est-ce que le syndicat peut nous transmettre certains de ces chiffres?
    Très volontiers.
    Je vous en serais reconnaissant.
    J’avais posé à M. Creel une question au sujet des instructions générales d’exploitation du CN. M. Rhodes avait dit au comité que la sécurité venait en premier quand on ouvrait le recueil des instructions générales d’exploitation, mais qu’elle est maintenant passée en quatrième place.
    J’ai posé la question à M. Creel. Il a par la suite envoyé un courriel au comité. Monsieur le président, je crois que vous l’avez reçu. Il y dit: « Comme M. Watson l’a demandé... », après quoi il cite une disposition des instructions générales d’exploitation, comme si c’était la réponse à ma question. Ce n’était pas ce que j’avais demandé. Je voulais savoir ce qu’on voit dans ces instructions.
    Je suppose que le CN ne collaborera pas si je demande à nouveau un exemplaire du recueil. Est-ce que le syndicat peut nous montrer ce qu’on y trouve? Où se situe vraiment la sécurité? Je voudrais que les membres du comité puissent le voir de leurs propres yeux...
    Dans les instructions générales d’exploitation?
    Oui. Serait-il possible de déposer ce document au comité, à un moment donné, dans les deux langues officielles, pour que nous puissions en disposer?
    Je l’ai ici. Voilà un cahier. C’est essentiellement la demande concernant le ralentissement des trains.
    Je trouve beaucoup de choses dans le recueil des instructions. Il insiste beaucoup sur la sécurité. L’employé est responsable. Le superviseur est responsable. On trouve les mêmes dispositions dans le Code canadien du travail. Vous le verrez dans ces instructions.
    En fait, si vous le souhaitez, je crois que j’en ai un exemplaire dans ce sac. Je peux donc répondre facilement à votre demande.
    Je crois qu’il serait utile pour le comité d’avoir ce volume parce que nous voulons déterminer qui, de M. Rhodes ou du CN, dit la vérité. J’aimerais beaucoup que le comité puisse le confirmer.
    J’ai enfin demandé aux responsables du CN s’ils reconnaissaient que la compagnie avait trahi la confiance des Canadiens. La réponse de M. Creel a été très intéressante. Il a dit: « Je reconnais que certains ont effectivement l’impression qu’il en est ainsi. » Après un tel aveu, peu de gens au CN pourront croire que la compagnie a vraiment une culture de sécurité.
    La Loi sur la sécurité ferroviaire fait actuellement l’objet d’un examen. Qu’est-ce que les membres du comité devraient savoir à ce sujet? Avez-vous des recommandations? Si vous le préférez, vous pouvez les faire parvenir au comité plus tard. Nous aimerions beaucoup avoir votre point de vue dans le cadre de cet examen.
    C’est tout, monsieur le président. Je vous remercie.
    Merci, monsieur Watson.
    M. Bélanger est le suivant. Il a cédé son temps de parole à M. Bell.
    Je vous remercie.
    Nous avons un rapport venant d’un travailleur des chemins de fer. Il s’agit d’un chef de train de Vancouver-Nord qui nous a fourni quelques renseignements. Certaines des questions dont il parle ont trait à BC Rail. Vous les mentionnez vous-même dans l’un de vos rapports, monsieur Chudnovsky. Il dit que BC Rail avait un groupe de travail conjoint pour la prévention des déraillements, dont faisaient partie des membres de la haute direction, des représentants syndicaux et des représentants des organismes de réglementation gouvernementaux. Le groupe se réunissait tous les trimestres pour discuter des stratégies de prévention des déraillements et examiner les rapports d’incidents. Il dit que le CN a dissous ce groupe de travail.
    Cela m’a inquiété à cause des différences de topographie et de l’application d’instructions générales d’exploitation conçues essentiellement pour des voies ferrées à faible pente ou en terrain plus ou moins plat, suivant le cours des rivières de la Colombie-Britannique.
    Ce qui m’a inquiété encore plus, c’est qu’après l'augmentation du nombre d’accidents, surtout dans l’Ouest, le CN n’a pas semblé réagir assez rapidement. Il a réagi, mais, à mon avis, il ne l’a pas fait à temps, et les mesures prises n’étaient pas ciblées.
    Le rapport de la seconde vérification établit que des systèmes adéquats étaient en place... Je ne sais pas si le mot « adéquats » a été utilisé, mais le rapport laissait entendre qu’il y avait un bon système pour signaler les problèmes. C’est cependant la suite donnée aux problèmes signalés qui importe.
    Je ne sais pas si M. Kosinski ou M. Cotie savent quelque chose ou ont des observations à formuler. Je suppose que vous ne pouvez pas parler de la Colombie-Britannique, mais lorsqu’on entend parler des autres déraillements, comme celui d’hier en Ontario et d’autres, on peut croire que le CN n’est pas le seul en cause. Bien sûr, nous avons beaucoup entendu parler du CN. De plus, il y a le rapport de vérification.
    La dernière question, monsieur Chudnovsky, est la suivante. Vous avez mentionné que vous avez demandé quatre ensembles de documents et que vous en avez obtenu un. Nous avons trouvé cela frustrant parce que ces vérifications avaient été commandées du temps où M. Lapierre était ministre fédéral des Transports et qu’il était prévu de rendre les rapports publics. Les rapports n’ont pas été publiés, pour différentes raisons, je suppose. Peut-être est-ce à cause de la Loi sur la sécurité ferroviaire, en vertu de laquelle il semble que la compagnie doit consentir à la publication. C’est vraiment frustrant. Je ne sais pas si vous avez des commentaires à ce sujet.
(1655)
    Au sujet de la publication du rapport de vérification, on nous avait dit que oui, il paraîtrait fin 2005. Nous avons ensuite eu une campagne électorale fédérale.
    Je vous rapporte ici ce que nos analystes ont appris de Transports Canada ou du Bureau de la sécurité des transports.
    On nous a dit que les vérifications étaient en retard, mais qu’elles avaient été terminées en décembre 2005. Quelqu’un avait alors pris la décision d’en reporter la publication à cause des élections fédérales et de la possibilité que les rapports aient des incidences politiques.
    Après les élections, en janvier, je crois, mes collaborateurs allaient aux nouvelles presque toutes les semaines. On leur a enfin dit que le ministre devait être informé des résultats de la vérification avant que le rapport soit publié. Par la suite, on nous a dit qu’il ne serait pas rendu public. C’est à ce moment que nous avons présenté notre demande d’accès à l’information, qui a permis de rendre la vérification publique cette année.
    Ces messieurs ont-ils des commentaires à formuler au sujet du groupe de travail conjoint sur la prévention des déraillements? Avez-vous connaissance de ce qui se dit en Colombie-Britannique sur cette question?
    Je ne sais rien de cela.
    Moi non plus, mais je peux dire – je viens juste d’y penser — qu’avant le passage de BC Rail au CN, il me semble que je n’ai jamais entendu parler de déraillements de trains de BC Rail. S’il y en a eu, ils étaient très rares.
    Diriez-vous, messieurs, que le Système de gestion de la sécurité, dont parle le rapport de vérification, peut constituer, s’il est mis en œuvre d’une façon adéquate, un moyen efficace d’assurer la sécurité ferroviaire? Diriez-vous que le problème se situe au niveau de la mise en œuvre de ce système?
    C’est possible, mais il faudrait encore que les responsables aient la motivation voulue pour le mettre en œuvre, une motivation qui ne peut venir, à mon avis, que d’une source extérieure.
    ... comme une mesure législative ou la Loi sur la sécurité ferroviaire. Une certaine responsabilité, quoi.
    Monsieur Jean.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins d’être venus au comité aujourd’hui.
    Monsieur Chudnovsky, j’ai lu le rapport que vous nous avez fourni. Je dois dire que je l’ai apprécié. J’ai remarqué que plusieurs de vos arguments, et un en particulier, traitent des freins dynamiques. Vous avez en fait dit dans votre témoignage, comme dans ce rapport, que l’absence de freins dynamiques ou leur dépose a concrètement contribué à quelques accidents.
    Est-ce bien le cas?
    J’ai dit que beaucoup de travailleurs ferroviaires m’ont dit qu’à leur avis, c’était là le problème.
(1700)
    Vous savez que Transports Canada a imposé au CN d’utiliser ces freins dans certains secteurs à pente raide. À votre avis, le problème est-il maintenant réglé?
    Je sais qu’il y a eu une ordonnance. C’est une bonne chose.
    Il en va de même pour la longueur des convois. Vous avez dit que certains des problèmes sont attribuables à la longueur des trains, qui peuvent avoir 144 wagons dans certains secteurs. Croyez-vous encore que c’est un élément du problème ou que c’était le cas dans le passé?
    Comme je l’ai déjà dit, c’est ce que m’ont dit ceux qui... Je ne prétends pas être un expert en matière ferroviaire, mais, à cause de mes fonctions, beaucoup de travailleurs ont pris contact avec moi pour me dire très directement que c’était un problème.
    Bien sûr, ces questions ont fait l’objet de deux des 76 ordonnances ou mesures prises par notre gouvernement l’année dernière. Ces deux mesures favorisent donc assez considérablement la sécurité, à votre avis.
    Eh bien, les ordonnances ont été prises. C’est sûr.
    Et c’est une bonne chose pour le secteur ferroviaire et pour la sécurité des gens en Colombie-Britannique?
    Le fait que ces ordonnances aient été prises? Oui, absolument.
    Excellent.
    Vous avez parlé d’autres normes de sécurité relatives aux dépôts ferroviaires. Vous dites dans votre rapport que vous avez parlé à des centaines d’anciens employés. Pour vous, quels sont les problèmes les plus importants liés à la sécurité dans ces dépôts?
    En toute franchise, je ne peux pas vous dire quels sont les problèmes les plus importants. Tout ce que je peux affirmer, c’est que les problèmes énumérés nous ont été signalés par plus d’une personne. Nous avons eu des contacts avec un certain nombre d’employés des chemins de fer. Les questions énumérées sont celles qui sont revenues le plus souvent.
    Dans mes fonctions antérieures, j’avais l’habitude de faire des contre-interrogatoires, mais il ne m’appartient pas d'en faire ici. Je veux simplement déterminer ce qui constitue, à votre avis, les bonnes et les mauvaises choses qui se produisent d’une façon régulière.
    Vous avez mentionné, parmi les bonnes choses, certaines des ordonnances prises par notre gouvernement.
    Oui.
    Que pensez-vous de l’examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire par un comité indépendant?
    Je crois que c’est une très bonne idée.
    Permettez-moi de dire, monsieur le président, que l’étude de votre comité est, pour moi, l’une des meilleures choses qui se soient produites. Je tiens à le dire tout de suite. Pour répondre à certains commentaires formulés au sujet de mon rôle ici, je veux préciser qu’après avoir appris que votre comité avait décidé par un vote unanime de tenir ces audiences, j’ai immédiatement écrit, comme le président et le greffier le savent, pour vous féliciter tous. Indépendamment de notre désaccord sur quelques petits détails sans conséquence, je trouve qu’il est extraordinaire de la part du comité d’avoir pris l’initiative de tenir ces audiences. Je tiens à féliciter personnellement chacun d’entre vous de l’avoir fait.
    Oui, un examen de la loi est une bonne chose. Nous verrons bien à quoi il aboutira.
    Ainsi, vous félicitez le ministre d’avoir ordonné cet examen indépendant. C’est bien cela que vous dites?
    Je dis que l’examen est une excellente idée...
    Très bien.
    ... et que c’est au fruit qu’on juge l’arbre.
    Comme toujours.
    Vous avez également mentionné la fatigue comme problème signalé par un certain nombre d’employés. J’aimerais en savoir plus à ce sujet. Les heures de travail sont passées de 10 à 12. Je crois savoir que d’autres facteurs, comme la vitesse des convois qui passent à côté de voitures-logements, peuvent contribuer à la fatigue générale.
    Un certain nombre d’employés des chemins de fer ont dit que la prolongation des heures constitue un problème, et que les gens sont hors de chez eux. Nous avons également entendu parler du problème que M. Cotie a mentionné concernant l’état des installations dans lesquelles les gens dorment. On nous a signalé beaucoup d’autres problèmes qui contribuent aux préoccupations des employés.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Cotie, pouvez-vous nous dire très rapidement ce que vous pensez de l’examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire et des 76 mesures d’exécution prise par notre gouvernement?
    Je félicite le comité parce que cela fait des années qu’on nous ignore et que personne ne parle de nous. Personne ne s’intéresse vraiment aux chemins de fer à moins qu’il n’y ait un déraillement à Cobourg, dans la cour de quelqu’un. On ne voit pas de déraillement dans le nord du Québec ou de l’Ontario. Dans ces régions, on ne voit pas de travailleurs qui vont réparer les rails et doivent rester debout pendant 24 heures pour remédier à une situation d’urgence. Nos travailleurs n’ont pas vraiment accès à des soins médicaux. Ils sont fatigués et en ont assez. Ils travaillent 10 jours hors de chez eux, puis rentrent pour quatre jours.
    Beaucoup de choses peuvent être faites. Je crois que le simple fait d’être ici est un pas dans la bonne direction.
(1705)
    Monsieur Cotie, je dois dire, pour être clair, que le ministre est le seul qui ait pris ces mesures d’exécution ou qui a agi, par l’entremise du ministère, pour qu’elles soient prises. C’est lui qui a ordonné un examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire. Que pensez-vous des décisions qu’il a ainsi prises?
    Je ne suis pas très au courant de l’examen, mais je sais que c’est un pas dans la bonne direction. Plus il y aura d’enquêtes, plus il y aura de règlements et de recommandations de cette nature à l’intention des chemins de fer, mieux les choses iront pour nous.
    Merci beaucoup.
    M. Zed a généreusement cédé son temps de parole à M. Volpe.
    Merci, monsieur le président.
    Je note que, chaque fois que vous me donnez la parole, vous précisez que c’est parce que quelqu’un d’autre a voulu être aimable envers moi. J’ose croire que cette amabilité relève davantage des travaux du comité que d’autre chose.
    Monsieur Cotie, j’ai noté la réponse que vous avez faite à la question de M. Jean. Je suppose que vous avez été enthousiasmé lorsque le gouvernement précédent et le ministre des Transports ont demandé exactement la même chose. Malheureusement, le rapport n’a pas été rendu public, ce qui a dû créer une certaine confusion chez vous. Si vous êtes heureux du déclenchement d’une autre enquête, sans que le rapport de la première ou de la deuxième n’ait été publié, vous devez être en train de retenir votre souffle depuis un certain temps déjà.
    Tandis que vous cherchez une réponse, je voudrais demander ceci à M. Kosinski parce qu’il n’a pas eu le temps de répondre à ma question au dernier tour de table.
    Quand on considère les causes, je sais que tout le monde a concentré son attention sur la Colombie-Britannique, ce qui est normal. Toutefois, le comité essaie d’avoir une vue d’ensemble de la sécurité ferroviaire et des systèmes de gestion de la sécurité. On peut se demander pourquoi le Canadien Pacifique et VIA Rail n’ont pas le même taux d’accidents.
    C’est facile à comprendre dans le cas de VIA Rail. Le matériel est beaucoup plus léger et les convois, beaucoup plus courts. C’est la principale raison du nombre moindre d’accidents des trains de VIA Rail. Bien sûr, plus le train est long, plus il est lourd et plus il est susceptible d’avoir un accident.
    Quant au motif, si vous laissez entendre que le CN a beaucoup plus de déraillements que le CP, je ne peux qu’émettre des hypothèses. Il est possible que, pour une raison ou une autre, le CP se soucie davantage de maintenir une marge de sécurité suffisante dans l’exploitation des trains. Je ne peux que conjecturer à cet égard.
    Je crois aussi qu’il y a quelques points importants à considérer au sujet des procédures de discipline.
    Pendant que M. Watson parlait à M. Cotie, je me suis souvenu d’avoir moi-même fait l’objet de mesures disciplinaires à un moment donné parce qu’il faisait tellement froid que j’avais dû donner un coup de pied dans un levier de manœuvre pour ouvrir un aiguillage. Quand les températures tombent à -30 ou -40 degrés, il arrive bien souvent que la seule façon d’actionner un aiguillage consiste à donner un coup de pied dans le levier. Je le faisais très couramment, comme tout le monde d’ailleurs. Si nous ne l’avions pas fait, les trains n’auraient pas roulé par temps très froid.
    Cette fois-là, je m’étais blessé. J’ai déclaré ma blessure parce que, sur le moment, je pensais avoir une côte fêlée. J’ai donc rempli un formulaire pour le cas où j’aurais eu à m’absenter. En fait, j’ai pu continuer à travailler. J’ai cependant été convoqué pour une enquête et on m'a attribué des mauvais points pour m’être blessé en donnant un coup de pieds dans un levier d’aiguillage.
    Cela ne se passerait pas ainsi aujourd’hui?
    Je n’en ai pas la moindre idée. Je n’ai pas travaillé depuis 1989.
    Mais je travaillais à ce moment-là. Et, à cette époque, si on m’appelait pour un voyage et que je ne voulais pas le faire parce que je ne me sentais pas en forme, ce n’était pas un grand problème. Je travaillais beaucoup. J’ai toujours répondu aux appels quand j’étais en forme, c’est-à-dire la plupart du temps. L’établissement des postes de travail n’est pas une science exacte. On s’attend à avoir une affectation à une certaine heure, mais, le plus souvent, on est appelé beaucoup plus tôt ou beaucoup plus tard. À ce rythme, on n’a pas toujours le temps de prendre suffisamment de repos. Par conséquent, si je refusais une affectation parce que je ne me sentais pas en forme, il n’y avait pas de conséquences.
    Des camarades qui travaillent encore au CN m’ont dit cependant que des mesures disciplinaires assez sévères sont imposées à quiconque refuse un voyage lorsque c’est son tour. Si c’est bien le cas, ce simple fait compromet sérieusement la sécurité puisqu’on force des employés à travailler, même quand ils ne se sentent pas bien.
(1710)
    Cela soulève pour moi une autre question.
    Je veux bien féliciter ceux qui le méritent, mais je ne veux pas blâmer des personnes qui pourraient ne pas être responsables. Je crois que l’un de mes collègues, autour de la table, a dit qu’il y avait peut-être un certain degré de... je ne dirais pas d’indifférence, mais peut-être de tolérance de la part de la direction du CN à l’égard des règlements de Transports Canada. En effet, le CN ne veut plus qu’on l’appelle le Canadien National puisque l’essentiel de sa structure administrative se trouve maintenant aux États-Unis. Son principal souci est de respecter la réglementation américaine. Par conséquent, certaines des pratiques de sécurité de BC Rail, par exemple, ont pu être négligées – je suppose que M. Chudnovsky en conviendra avec moi – maintenant que la compagnie a une direction qui ne se considère plus canadienne.
    Je me rends compte que nous versons un peu dans le domaine de la conjecture, de l’idéologie ou de l’intérêt national, mais j’aimerais connaître votre avis. Vous avez parlé à des gens qui avaient travaillé pour d’autres employeurs auparavant.
    Merci, monsieur le président. J’ai juste deux petites observations à formuler en réponse à la question de M. Volpe.
    Tout d’abord, au sujet de l’établissement des postes de travail, je dois signaler que les propos de M. Kosinski m’ont été confirmés par mes interlocuteurs. On m’a dit la même chose au sujet des gens qui sont fatigués et des mesures disciplinaires prises contre eux.
    Quant au motif de la situation actuelle, je ne peux que conjecturer. Je ne sais certainement pas ce qu’il y a dans la tête des cadres supérieurs du CN. Cela étant dit, nous avions une situation dans laquelle la population de la Colombie-Britannique possédait et exploitait un chemin de fer, qui appartient maintenant à quelqu’un d’autre. Les choses ont changé. Il faut donc essayer de tirer certaines conclusions des changements qui se sont produits.
    Monsieur Storseth, vous pouvez poser la dernière question.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie aussi nos témoins d’être venus et de mettre à notre disposition de précieux renseignements.
    Je voudrais en savoir un peu plus sur la longueur des convois. Il est établi que la vitesse joue un rôle. Considérez-vous que la longueur des trains et le poids des wagons constituent aussi des facteurs importants? Si c’est le cas, quel est l’ordre d’importance des différents facteurs? Y en a-t-il certains qui soient plus importants que d’autres sur le plan de la sécurité?
    Je ne crois pas que le poids des wagons constitue un facteur important pourvu que la voie soit en bon état. Bien sûr, si un rail a un défaut, il est plus susceptible de causer un accident si les wagons sont très lourds.
    À part cette considération, je dirais que la longueur du train est de loin le problème le plus sérieux et ce, pour deux raisons précises. Il y a d’abord le problème du profilage, qui est apparemment mentionné dans votre rapport: dans un virage, le train exerce des pressions qui tendent à redresser les rails. Et plus le train est long, plus cet effet est accentué et plus un déraillement a des chances de se produire.
    La longueur des trains est à l’origine d’un autre problème lié dans une certaine mesure au freinage dynamique. C’est un fait que de nombreux trains sont mal ordonnancés. Strictement pour des raisons de sécurité, l’idéal, pour un train mixte, est de placer les wagons chargés à l’avant et les vides à l’arrière. C’est la meilleure façon de minimiser le mouvement d’accordéon. Il faut noter qu’un mouvement excessif d’accordéon constitue en soi un danger. Dans le cas d’un train mixte, plus le convoi est long, plus il est difficile de contrôler les réactions dans les attelages. Bien sûr, la solution la plus simple est d’insister pour qu’à la sortie d’une grande gare, tous les trains aient les wagons chargés à l’avant et les vides, à l’arrière.
    Pour ce qui est du mouvement excessif d’accordéon dans les attelages, le freinage dynamique est un moyen extrêmement précieux de contrôler la vitesse du train, mais il a aussi l’avantage supplémentaire de réduire le mouvement d’accordéon. En effet, en descendant une pente, si on peut contrôler la vitesse du train au moyen du freinage dynamique, en réduisant au minimum l’utilisation des frais ordinaires, le convoi restera groupé et il n’y aura presque pas de mouvements d’accordéon. Toutefois, en l’absence de freinage dynamique, il faut s’efforcer, avant d’appliquer les freins, de tendre au maximum les attelages. Ainsi, lors de l’application des freins, on évitera de graves mouvements d’accordéon pouvant causer le déraillement. Une fois les freins appliqués, l’intensité du mouvement s’atténue progressivement.
    S’il faut augmenter le freinage... Bien sûr, dès qu’on relâche les freins, le mouvement d’accordéon reprend, sauf peut-être dans le cas des trains-blocs. Les freins de certains wagons peuvent se desserrer plus rapidement que d’autres, ce qui provoque ce mouvement dans les attelages. Bref, le freinage dynamique aide considérablement à contrôler ce mouvement.
(1715)
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, messieurs, pour vos exposés et vos réponses. Comme on l’a dit, le comité s’intéresse à la sécurité. Nous vous sommes donc très reconnaissants de vos observations. Merci encore.
    Membres du comité, nous allons maintenant prendre une pause de deux minutes pendant que nos témoins partent. À notre retour, nous nous occuperons des motions de M. Fast.
(1715)

(1720)
    La séance reprend.
    Comme vous le savez, nous avions discuté à la fin de notre dernière réunion d’une motion de M. Fast. Je sais que d’autres discussions ont eu lieu entre les membres.
    Je crois que vous êtes tous au courant de la motion dont nous sommes saisis. La connaissez-vous tous assez, ou bien faut-il que j’en donne lecture?
    Je sais que M. Volpe avait quelque chose à dire. Nous passerons ensuite à M. Julian.
    À vous, monsieur Volpe.
    Monsieur le président, je ne voudrais pas prendre trop du temps du comité.
    Le titre que je vois ici, Avis de motion, pourrait susciter des questions. En fait, il s’agit d’un amendement... J’espère qu’il sera considéré comme un amendement amical de la motion dont M. Fast a saisi le comité. Mon but est d’attirer l’attention sur le fait qu’indépendamment de l’opinion exprimée par le comité, le ministre doit faire une chose précise, qui est exigée par la procédure parlementaire et par la loi.
    La disposition B de mon amendement clarifie ce que veut M. Fast. L’amendement propose ensuite de donner une directive à la Société canadienne des postes. Entre-temps, la disposition D protège tout le monde jusqu’à ce que l’affaire soit réglée.
    Il y a des gens qui ont des entreprises, qui ont elles-mêmes des employés. Il y a aussi la Société canadienne des postes et ceux qui en dépendent. Indépendamment de ce que la Société fera ou ne fera pas, elle a le pouvoir de priver beaucoup de gens de leur gagne-pain. La disposition D l’empêchera de le faire tant que toute la question n’est pas réglée.
(1725)
    Monsieur Julian.
    Monsieur le président, je crois que c’est là une raison de plus pour ne pas prendre de décision aujourd’hui.
    La motion de M. Fast a été proposée un certain nombre de fois. Les membres du comité ont clairement dit qu’ils préfèrent avoir plus de renseignements avant de se prononcer. Ils s’inquiètent des effets sur la livraison du courrier dans les régions rurales. Nous avons exposé notre position. M. Fast continue à présenter sa motion. De toute évidence, il ne nous a pas entendus.
    L’amendement de M. Volpe pourrait être utile, mais j’ai besoin d’un certain temps pour l’examiner car il est très détaillé. Je suis sûr que M. Volpe a fait les recherches nécessaires. J’aimerais avoir du temps pour en faire de même.
    J’espère donc que nous n’examinerons ni la motion ni l’amendement aujourd’hui et que nous donnerons plutôt aux membres du comité le temps d’étudier l’amendement et ses effets avant de se prononcer.

[Français]

    Monsieur Laframboise.
    Pour ce qui est de l'amendement de M. Volpe, c'est un avis de 48 heures. On aura besoin de temps pour en discuter. Concernant la motion de M. Fast, je demeure toujours sur ma position. Si vous faites comparaître des gens du repostage et Postes Canada, il me fera plaisir de discuter de cette motion. Si on vote sur cette motion aujourd'hui, compte tenu que je n'ai pas pu poser les questions nécessaires au représentant des gens qui font du repostage et à Postes Canada, je devrai voter contre cette motion, mais je ne ferai pas d'obstruction.

[Traduction]

    Je veux dire, pour la gouverne du comité, que nous sommes saisis de la motion à la demande d’un membre. Dans ces conditions, l’avis de 48 heures n’est pas nécessaire. Il s’agit ici d’un amendement à une motion dont nous sommes déjà saisis.
    Je tiens à le dire pour que ce soit clair.
    Monsieur Jean.
    Monsieur le président, on nous a télécopié une lettre de la Société canadienne des postes concernant cet avis de motion particulier. Je me demande si tous les membres ont reçu la télécopie.
    Je pense qu’ils ne l’ont pas reçue. Je l’ai reçue moi-même, et je l’ai envoyée à la traduction pour être en mesure de la déposer au comité.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Fast, puis à M. Bélanger.
    Monsieur le président, je crois que la question comporte deux aspects. En premier, il faut que le comité soit saisi de la motion pour pouvoir en discuter. Ensuite, le comité peut étudier la motion et tout amendement que M. Volpe ou d’autres membres voudront proposer.
    Je propose donc simplement que le comité reprenne l’examen de la motion mercredi, à notre prochaine réunion. Je ne parle pas de l’amendement, oublions-le pour le moment. Je parle seulement de ma motion, parce qu’elle n’est pas actuellement en discussion et que le comité doit en être saisi à nouveau.
    Vous vous souviendrez qu’à la dernière réunion, nous avions demandé que la motion soit examinée tout de suite, mais la majorité des membres du comité préféraient en reporter l’étude. Je propose de reprendre l’examen de la motion mercredi. Bien entendu, le comité pourra alors examiner en même temps cet amendement et tout autre que les membres souhaiteraient proposer. Je crois que ce serait une façon raisonnable de procéder, conforme à ce que vous et moi avons dit.
    J’aimerais donc que le comité soit à nouveau saisi de la motion.
    Propose-t-il de déposer une motion?
    Non, seulement d’en reprendre l’étude.
    Je ne croyais pas que le président pouvait en saisir le comité sans qu’une motion soit proposée.
    Je crois pouvoir éclaircir la situation. La motion a été rappelée aujourd’hui. Elle est donc en discussion. Le comité en est officiellement saisi et peut donc débattre aussi bien la motion que l’amendement proposé.
    Je vous remercie de ces précisions, monsieur le président. J’avais mal compris. Je propose donc de reporter l’examen de la motion à mercredi pour que nous ayons la possibilité d’étudier l’amendement proposé par M. Volpe.
(1730)
    Je vais entendre M. Bélanger, puis M. Julian.
    Monsieur le président, j’ai déjà pris la parole une première fois, mais je ne sais pas pendant combien de temps vous avez l’intention de poursuivre cette réunion parce que j’ai un assez long exposé à présenter. Ce n’est pas de l’obstruction. Je crois avoir de bons arguments à avancer. J’ai eu le temps de faire un examen complet de cette affaire. J’ai lu le jugement de la cour d’appel ainsi que le jugement rendu dans une autre affaire de même nature. J’ai lu un certain nombre de discours et la correspondance échangée. Je crois qu’il est important d'établir un certain nombre de points.
    S’il est question de reprendre l’examen de cette motion, je crois qu’il serait préférable d’attendre une réponse du ministre avant de le faire. Le ministre avait promis à la Chambre, il y a environ un an, de donner une réponse concernant le repostage. Il est clair que le gouvernement n’a pas répondu et n’a pas précisé sa position. Si vous envisagez d’accepter une motion prévoyant de reprendre l’étude de la question, je proposerai de la modifier pour que l’étude soit reportée « jusqu’à ce que le ministre présente son rapport sur le dossier du repostage ».
    Monsieur Julian.
    Monsieur le président, j’appuie la motion de M. Bélanger. Nous ne cessons pas d’en revenir au même point: nous avons besoin de plus de renseignements.
    Nous allons faire cela. Nous devrons probablement nous occuper d’abord de la motion de M. Fast, telle qu’elle a été présentée. Nous passerons ensuite à l’amendement de M. Bélanger... Je m’excuse... Apparemment, M. Bélanger peut proposer son amendement, qui est appuyé par M. Julian.
    Monsieur Bell.
    Je ne suis pas sûr que le moment soit bien choisi, après la comparution au comité des représentants de la Société canadienne des postes. M. Bélanger a parlé des décisions judiciaires rendues et des mesures prises par Postes Canada contre les entreprises de repostage. Pour être en mesure de tenir un débat complet sur la question, il faudrait que nous puissions amener la Société à suspendre toutes les mesures prises contre les entreprises de repostage. Je ne sais pas ce que le gouvernement et le ministre peuvent faire à cet égard pour éviter que des décisions soient prises pendant que nous discutons. Je crois qu’il est de l’intérêt...
    En fait, je ne veux vraiment pas que ces entreprises disparaissent pendant que nous discutons de l’affaire, parce qu’il serait alors vain que le comité présente des recommandations et que le gouvernement prenne une décision finale. À titre de secrétaire parlementaire, M. Jean pourrait peut-être nous dire si le ministre est disposé à demander à Postes Canada de suspendre son action pour nous donner la possibilité de nous familiariser avec les faits mentionnés par M. Bélanger et d’en discuter. J’aimerais bien comprendre les décisions rendues par les tribunaux. Je voudrais aussi avoir la possibilité d’examiner la lettre de Postes Canada concernant la proposition de M. Volpe et donner à nos amis du Bloc le temps dont ils veulent disposer pour faire le point sur l’affaire.
    Monsieur Fast.
    Il me semble que nous discutons déjà du fond de la motion.
    Les représentants de l’opposition, y compris les membres libéraux du comité, disent qu’ils veulent avoir plus de temps pour discuter de l’affaire, alors que tout ce que nous demandons, c’est le maintien du statu quo.
    Tout cela serait parfait si nous avions le temps de discuter du changement du statu quo et du maintien du privilège exclusif de la Société canadienne des postes. Toutefois, des milliers d’emplois sont actuellement en jeu.
    J’invoque le Règlement, monsieur le président.
    M. Bélanger invoque le Règlement.
    Monsieur le président, il est clair que la motion de renvoi est susceptible d’amendement, mais je voudrais savoir si elle peut faire l’objet d’un débat.
    Une motion de renvoi peut faire l’objet d’un débat, tout comme une motion tendant à saisir le comité d’une question.
    Ce débat porterait-il alors sur la motion elle-même ou sur son objet?
    Je crois qu’il porterait sur la motion elle-même.
    Merci, monsieur le président.
    À vous, monsieur Fast.
    Monsieur le président, je voudrais dire, pour préciser la situation, que nous discutons actuellement de la motion de report de l’examen, qui vient d’être amendée. Le problème, c’est que l’opposition cherche à gagner du temps, à faire plus de recherches, à tenir un débat complet au comité et peut-être même à convoquer des témoins.
    En fait, je suis vraiment perplexe. En l’absence de renseignements supplémentaires, le chef des libéraux a déjà déclaré que son parti a l’intention d’appuyer le maintien des entreprises de repostage international au Canada. S’il a pu faire cette déclaration, c’est qu’il disposait de renseignements suffisants. Bien sûr, chacun des membres du comité est indépendant et peut prendre ses propres décisions. Il n’en reste pas moins que le Parti libéral a officiellement décidé d’appuyer le maintien des entreprises de repostage. Nous avons la même position, de ce côté-ci de la table. Je crois aussi que le ministre a laissé entendre qu’il la partageait. Nous n’arrivons néanmoins pas à nous entendre, du moins avec les libéraux, pour avancer assez rapidement dans cette affaire. Je trouve donc la situation assez curieuse.
    Réglons donc cette affaire mercredi. Protégeons au moins les Canadiens qui ont besoin de ces emplois en nous mettant d’accord rapidement pour maintenir le statu quo. Nous pourrons ensuite discuter des avantages et inconvénients d’un changement du statu quo.
(1735)
    Je voudrais informer le comité que nous avons déjà dépassé la durée prévue de la séance. Je vais accepter trois autres interventions, après quoi je prendrai une décision.
    Je vais entendre M. Volpe, M. Bélanger et M. Jean.
    À vous, monsieur Volpe.
    Je crois que tous les membres du comité cherchent à défendre les intérêts de tous les Canadiens.
    La motion de M. Fast dit ceci: « Que le Comité recommande que le gouvernement modifie les versions française et anglaise de l’article 14 de la Loi sur la Société canadienne des postes afin de les clarifier en supprimant le privilège exclusif de Postes Canada de distribuer des lettres à des destinations à l’extérieur du Canada... » M. Fast représente le gouvernement. Il n’a pas besoin de l’avis du comité sur l’orientation qu’il convient de prendre. De son côté, le ministre peut aller de l’avant, s’il le souhaite.
    Conformément au principe général que je viens d’énoncer, nous avons tous à cœur l’intérêt public. J’ai proposé un amendement à sa motion pour mieux préciser ce que le ministre est censé faire. Le ministre devrait user du pouvoir que lui confère la loi. Pour donner une directive à Postes Canada, il doit agir d’une certaine façon afin d’exercer son pouvoir en vertu de la loi. Mon amendement précise cette façon de procéder.
    J’espérais donc qu’il jugerait mon amendement amical. Il nous donne la possibilité d’aborder le fond de sa propre motion. Si le ministre est disposé à accepter l’avis du comité exprimé d'une façon générale, comme dans la motion que M. Fast a présentée, je suis sûr qu’il acceptera aussi un énoncé plus précis, inspiré de l’expérience de personnes qui ont déjà fait partie du gouvernement et qui tentent de comprendre la situation dans laquelle le ministre se trouve, sans exprimer une opinion partisane sur ce que le ministre a promis ou n’a pas promis à la Chambre de faire et sur ce qu’il a fait ou n’a pas fait en conséquence.
    Ayant proposé cet amendement, je suis surpris que M. Fast veuille reporter l’examen de l’affaire à mercredi, alors qu’il nous est possible de disposer de la motion aujourd’hui même.
    La parole est à M. Bélanger.
    Monsieur le président, nous devons être très prudents pour plusieurs raisons.
    Tout d’abord, la motion initiale, dont M. Fast demande à reporter l’examen à mercredi, souffre d’un vice sérieux. Elle propose au comité de recommander au gouvernement de modifier une disposition de la loi. Il appartient au Parlement de recommander la modification des lois. La motion parle en outre de supprimer « le privilège exclusif de Postes Canada de distribuer des lettres ». Or j’ai cru comprendre que le problème du repostage se situe au niveau de la collecte et non de la livraison du courrier.
    De plus, M. Fast parle de la lettre de mon chef, M. Dion, comme si nous contredisions ce qu’il a dit. Ce n’est pas du tout le cas.
    En même temps, il a parfaitement raison de dire que nous sommes habilités à dire ce que nous pensons. Je ne peux pas me faire le porte-parole d’autre membre du comité, mais s’il examinait soigneusement le contenu de cette lettre, il se rendrait compte que le chef du parti n’a jamais parlé d’affaiblir le privilège exclusif de Postes Canada. Monsieur le président, la Société canadienne des postes, tout en gardant son privilège exclusif, se fait aider par des entreprises privées pour livrer le courrier dans les régions rurales, par exemple. Rien n’empêche les entreprises de repostage de continuer à faire ce qu’elles font, sans toucher le moins du monde au privilège de la Société, comme M. Jean l’aurait dit, il y a un an, à la Chambre des communes.
    Nous devons prendre en considération un certain nombre de facteurs. Si M. Fast souhaite citer des lettres de notre chef, il a incontestablement le droit de le faire, mais il doit alors être disposé à nous entendre citer les propos tenus par quelques-uns de ses collègues ici même, au comité. Je ne pensais pas que nous discuterions du fond de cette affaire. Mais il n’a qu’à nous dire à quel moment il sera prêt à le faire. Nous serons prêts, nous aussi. Les députés de tous les partis ont déjà compris, tout comme les tribunaux, le lien qui existe entre le privilège exclusif et l’obligation universelle d’assurer le service. Nous devons nous garder de toucher à ce lien.
    Or, c’est ce que M. Fast nous demande de faire. Je ne crois pas qu’il soit indiqué de reporter cet examen sans connaître la réponse du ministre. Laissons le ministre donner sa réponse. Il avait promis, il y a un an, de répondre en quelques jours, mais nous n’avons pas encore vu cette réponse. J’aimerais savoir ce que le gouvernement a fait à ce sujet au cours de la dernière année avant de lui donner carte blanche. Je n’ai pas l’habitude de signer des chèques en blanc, monsieur le président.
(1740)
    À vous, monsieur Jean.
    Je suis d’accord sur tout ce que M. Fast a dit. Je crois que nous devrions remettre l’examen à mercredi pour pouvoir y consacrer 30 minutes et disposer non seulement de la motion de M. Fast, mais aussi de l’amendement proposé par le Parti libéral, que nous n’avons pas eu la possibilité d’étudier. Je vois d’ailleurs la possibilité d’y apporter un ou deux amendements amicaux.
    Je crois que c’est la meilleure chose à faire, monsieur le président.
    Je suis bien sûr à la disposition du comité, mais je vois trois choix possibles. Nous pouvons nous entendre pour poursuivre cette discussion mercredi. Nous pouvons aussi continuer le débat d’aujourd’hui et tenir un vote, ou bien encore débattre la motion de M. Fast et l’amendement de M. Bélanger pour en disposer.
    Si vous me permettez de formuler une recommandation, je dirais que je suis disposé, comme je l’ai fait aujourd’hui, à réserver 15 minutes mercredi — car nous avons un calendrier bien rempli ce jour-là — pour poursuivre cette discussion et trouver une solution, après que les membres auront eu la possibilité d’examiner l’information présentée. Si cela ne vous convient pas, je suis prêt à agir selon la volonté du comité.
    Allez-y, monsieur Julian.
    Monsieur le président, j’invoque le Règlement. Le comité est saisi d’une motion, et un amendement a été proposé et appuyé. M. Bélanger l’a proposé, et je l’ai appuyé. Voilà ce que le comité a à examiner.
    En fait, le comité est saisi de la motion de M. Fast. L’amendement de M. Bélanger en fait partie. Si nous décidons de disposer de l’amendement et de la motion aujourd’hui, nous pouvons continuer à siéger jusqu’à ce que ce soit fait. Nous n’interromprons la séance ni pour un appel au vote ni pour autre chose. Le comité peut poursuivre la réunion et prendre une décision.
    Encore une fois, j’ai offert trois solutions possibles. Pour ma part, je recommande que le comité s’entende pour que je réserve 15 minutes à la fin de la réunion de mercredi afin que les membres discutent de l’affaire et reviennent peut-être avec une solution sur laquelle nous pouvons tous nous entendre. C’est ce que je recommande au comité. Si les membres ne sont pas d’accord, nous pouvons poursuivre le débat jusqu’à ce qu’il se termine.
    Monsieur Bélanger.
    Pourquoi ne pas passer au vote et disposer tout de suite des motions?
    Nous pouvons le faire, mais il faut attendre la fin du débat. Nous ne pouvons pas exiger...
    Nous pouvons bien sûr reporter le débat. Nous n’avons pas à prendre une décision aujourd’hui. La motion de report de l’examen à mercredi revient au même que la motion de report de l’examen jusqu’à ce que nous ayons un rapport du ministre. D’une façon ou d’une autre, nous tiendrons un débat à un moment donné.
    Oui, mais la motion de M. Fast propose de reporter l’examen à mercredi. De votre côté, vous avez proposé de le reporter jusqu’à ce que nous ayons eu la réponse du ministre. Si vous voulez accepter la motion initiale de M. Fast visant à reporter l’examen à mercredi, nous pouvons procéder ainsi.
    Monsieur Julian.
(1745)
    Monsieur le président, un amendement à la motion a été proposé. Par conséquent, M. Bélanger a raison de dire que c’est de cet amendement que nous discutons actuellement. Que nous décidions ou non de poursuivre mercredi, la question actuellement à l’étude, c’est la motion visant à reporter l’examen jusqu’à ce que le ministre ait déposé son rapport. Que nous ayons un vote maintenant ou mercredi, c’est sur cette question qu’il doit porter.
    C’est exact. Je disais cependant que le comité doit convenir que le débat est terminé avant que nous puissions voter sur l’amendement. Une fois le débat commencé, nous ne pourrons pas l’interrompre, à moins de nous entendre pour procéder autrement.
    Monsieur le président, je propose alors que le débat soit ajourné maintenant.
    Le comité est saisi d’une motion de M. Julian proposant d’ajourner le débat. La motion ne peut pas faire l’objet d’un débat. Je demande donc à tous ceux qui sont en faveur de la motion de lever la main.
    Je vais répéter ce que je viens de dire pour être vraiment sûr. J’ai vu qu’il y avait trois voix pour et trois voix contre. Je veux être sûr que c’est bien le cas.
    Monsieur le président, je voudrais obtenir une précision, s’il vous plaît.
    Je m’excuse d’avoir manqué une partie de la conversation. Si le débat est ajourné maintenant, le comité reprendra-t-il l’examen de la motion mercredi?
    Si nous ajournons le débat maintenant, l’examen de la motion reprend à la demande d’un membre ou sur décision du président. Il ne reprend pas automatiquement.
    Si je demande que l’examen reprenne à la prochaine réunion, il reprendra automatiquement, non?
    Il appartiendra au président ou au sous-comité de réinscrire la motion à l’ordre du jour.
    La décision ne peut être prise que par le comité ou le sous-comité?
    Le président ou le sous-comité.
    Nous allons maintenant voter sur la motion d’ajournement de M. Julian.
     (La motion est adoptée.)
    La séance est levée.