:
D'accord, merci. Il est utile de le savoir.
Merci beaucoup, monsieur le président et messieurs les membres du comité.
Dave Park est l'économiste émérite de la Chambre de commerce de Vancouver. Il a été son économiste principal pendant de longues années. Il a quitté sa retraite pour aider le groupe de travail sur la sécurité publique de la Chambre de commerce de Vancouver.
Depuis plus de 12 ans, nous luttons contre le crime organisé. Le crime est un problème au Canada, et c'est maintenant seulement que le public y attache toute l'attention que, selon nous, il mérite. Voilà pourquoi nous sommes très heureux de comparaître.
Je dirai d'abord que nous appuyons à fond le projet de loi C-14. Il devrait être adopté dans les meilleurs délais, et nous invitons les députés à faire en sorte qu'il le soit le plus rapidement possible.
Le crime organisé et les crimes de violence sont liés, bien sûr, et il y a un lien avec la récidive chronique. À Vancouver, une bonne partie de la criminalité est liée aux drogues, et nous savons que le trafic est contrôlé et dirigé par le crime organisé. Vancouver est aux prises avec les activités des récidivistes, allant de la mendicité et du vol jusqu'aux introductions par effraction, aux cambriolages de voitures, aux crimes violents et voies de fait et désormais, aux meurtres, puisque les gangs utilisent des armes à feu. Il y a là un continuum de criminalité en grande partie lié aux drogues.
Nous avons écrit au ministre de la Justice et discuté avec Statistique Canada, et la Chambre de commerce a défini une position. Notre politique sur la criminalité est de large portée. Selon nous, il faut s'attaquer aux causes profondes. Par exemple, nous préconisons le développement de la petite enfance. Nous avons créé un groupe de travail avec le YWCA. Si nous intervenons auprès des enfants de zéro à six ans, nous avons une bonne chance d'éviter qu'ils ne finissent par faire partie de gangs, commettent des crimes et, plus tard, participent au crime organisé. Tout s'enchaîne, et nous invitons tous les partis à appuyer les initiatives de développement.
Nous sommes favorables à un meilleur traitement de la toxicomanie et de la maladie mentale pour les détenus. Il y a un problème au Canada et en Colombie-Britannique, bien sûr, soit que la plupart des délinquants sont condamnés à des peines de deux ans moins un jour à purger en établissement provincial, où ces traitements ne sont à peu près pas offerts. Il y en a davantage au niveau fédéral, mais, là aussi, il faut faire mieux.
Notre association regroupe 6 000 membres du milieu des affaires et elle se donne pour mission de faire de Vancouver la meilleure ville au monde pour y vivre, travailler, jouer, investir et faire du tourisme. Cette réputation est menacée par la criminalité.
Chaque année, 2,7 millions de Canadiens sont victimes de crime, si on en croit la dernière enquête de Statistique Canada sur la victimisation. Les chiffres datent un peu. Une nouvelle enquête actuellement en cours donnera une mesure bien plus précise du niveau réel de la criminalité au Canada, une mesure de meilleure qualité que les données publiées chaque année par Statistique Canada, qui correspondent aux crimes déclarés à la police. Depuis 10 ans, nous pressons Statistique Canada de modifier cette méthode pour rendre compte avec plus d'exactitude du niveau réel de la criminalité.
La mesure actuelle, soit les crimes déclarés à la police, ne capte que le tiers des crimes. L'enquête sur la victimisation révèle que 34 p. 100 des crimes sont déclarés à la police et que les deux tiers ne le sont pas. Par exemple, 88 p. 100 des agressions sexuelles ne sont pas signalées. Nous croyons donc que la mesure actuelle du taux de criminalité est très approximative.
Jusque récemment, Statistique Canada définissait le taux national de criminalité en fonction des crimes déclarés à la police. Nous avons capté son attention lorsque nous avons rédigé un éditorial qui a paru dans le Vancouver Sun et le National Post. C'était en réponse à une manchette qui disait: « Taux de criminalité en baisse, d'après le nombre de crimes déclarés à la police ». Nous disions espérer que ce soit vrai, mais que nous ne le saurions pas tant que ne serait pas faite l'enquête de 2009 sur la victimisation. Après une déclaration semblable, en 2005, soit que le taux avait diminué, à en croire le nombre de crimes déclarés à la police, l'enquête de 2004 sur la victimisation a montré que le taux n'avait pas baissé, sauf dans une catégorie, celle des introductions par effraction. Dans les huit autres catégories, le taux était resté stable ou avait augmenté.
Cela a provoqué une réaction de Statistique Canada, et nous avons amorcé un dialogue. Jusque-là, nous n'avions eu qu'un échange de lettres, et nous ne progressions pas beaucoup.
Nous avons été très satisfaits de notre rencontre d'hier avec le statisticien en chef, M. Sheikh. Nous avons appris que l'organisme renonce à sa définition classique du taux de criminalité. Il parlera plutôt de crimes déclarés à la police. C'est une étude valable en soi, pourvu qu'on sache à quoi s'en tenir. Statistique Canada parlera donc des crimes déclarés à la police.
L'organisme prendra aussi la peine de bien signaler aux lecteurs qu'il existe une autre étude sur la victimisation qui donne une mesure différente du taux de criminalité si on utilise une certaine définition. L'enquête a porté sur huit grandes catégories, et on a procédé comme au recensement, avec une étude scientifique auprès de 20 000 Canadiens. Nous ne pensons pas que ce soit suffisant et nous avons demandé une étude plus étoffée.
On a interrogé ces Canadiens sur leur expérience récente. Selon le Globe and Mail d'aujourd'hui, un député a dit qu'il ne lui semblait pas utile de se servir de mesures du crime fondées sur la perception. Mesdames et messieurs, ce sont les perceptions de vos électeurs qui ont été récemment touchés par le crime. C'est une mesure bien meilleure que le nombre de crimes déclarés à la police, car cette dernière mesure écarte toute possibilité de poser des questions pour aller un peu plus loin. C'est une enquête scientifique. Elle a ses faiblesses. Elle ne couvre pas tous les crimes et exclut par exemple la criminalité en col blanc. Elle couvre tout de même la plupart des crimes au Canada, et certainement les crimes violents qui inquiètent vos électeurs et nos membres.
Nous avons demandé que cette enquête soit annuelle et qu'elle prenne plus d'ampleur de façon à tenir compte des RMR, les régions métropolitaines de recensement, pour que les grandes villes comme Vancouver puissent évaluer leur situation en matière de criminalité. Elle s'améliore? Elle se dégrade? Notre politique d'intérêt public pourra alors être mieux adaptée que par le passé, lorsqu'elle reposait sur le nombre de crimes déclarés à la police. Nous sommes satisfaits. À Statistique Canada, on est prêt à se mettre à l'oeuvre
J'ai dit à M. Sheikh que ce serait un très bel encouragement si le gouvernement annonçait des fonds annuels pour produire le rapport. Sa réponse? Statistique Canada est prête à aller de l'avant. J'invite tous les partis à mettre leurs divergences en veilleuse pour inciter le gouvernement à financer l'étude. Comme celle de 2009 est déjà en cours, le financement débuterait en 2010 et serait maintenu tous les ans par la suite.
Je dois signaler aussi que M. Sheikh nous a appris que tous les autres pays de l'OCDE, ou tous les pays industrialisés, comme il a dit, produisent les rapports tous les ans ou tous les six mois. C'est plus fréquent que chez nous. Nous avons manqué à notre devoir en négligeant d'interroger nos membres qui sont victimes, et vos électeurs et les citoyens sur les expériences récentes qu'ils ont eu à vivre à cause du crime.
Je voudrais vous laisser sur un graphique. Nous vous proposons une présentation qui expose notre position. Le 7 octobre 1971, le ministre de la Justice a déclaré à la Chambre que, désormais, le gouvernement mettrait l'accent sur la réadaptation des personnes plutôt que sur la protection du public. Pas « aussi bien que », ni « en plus de », mais « plutôt que ».
Mesdames et messieurs, c'est ce que nous faisons depuis près de 40 ans. Cette politique a été excellente. Elle a été magnifique pour les criminels, mais pitoyable pour les victimes. La Chambre de commerce de Vancouver estime qu'il faut donner une chance aux victimes.
Que se passe-t-il à Vancouver? Ce qui suit est extrait d'un rapport que la police de Vancouver a publié l'an dernier au sujet de 379 récidivistes. Ils ont été condamnés plusieurs fois pour des crimes parfois mineurs, et parfois graves, mais c'est de la récidive chronique. La peine moyenne pour la première infraction est de 101 jours. La peine moyenne pour la 35e est de 25 jours. Cela ne tient pas debout. Selon des sondages publiés récemment, nos membres croient que nous sommes loin du type d'administration de la justice que le public attend.
Nous implorons le comité et les députés de laisser de côté leurs divergences politiques et personnelles. Le Canada a une crise sur les bras à cause du crime organisé sur la côte ouest, de la criminalité violente et de la récidive. Si nous faisons de bonnes enquêtes et mesurons correctement le niveau de criminalité, nous constaterons qu'il est inacceptable que, chaque année, 650 000 Canadiens soient blessés à cause de crimes violents et que, au cours de la dernière année, un Canadien sur quatre ait été victime d'un crime.
Nous ne pensons pas que ce soit acceptable, et nous espérons que vous partagez ce point de vue.
Merci beaucoup, monsieur le président.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Le Comité du crime organisé tente d'accroître la coopération entre les organismes d'application de la loi au Canada comme à l'étranger, de promouvoir des initiatives novatrices en matière d'application de la loi et de préconiser des modifications de la politique d'intérêt public et des lois. Au nom des services d'application de la loi, je vous remercie de nous donner l'occasion de présenter aujourd'hui un exposé.
Le comité m'a invité à parler de la menace que constitue actuellement le crime organisé au Canada et à décrire les défis de son éradication pour les services d'application de la loi.
Comme vous l'avez appris la semaine dernière, les services d'application de la loi ont identifié plus de 900 groupes de crime organisé qui sévissent dans les grandes villes et petites localités du Canada. Il s'agit d'un problème important qui continue à prendre de l'ampleur. J'espère vous communiquer aujourd'hui une information plus poussée sur la question pour que vous puissiez mieux comprendre les défis à relever, les interventions des forces de l'ordre et les lacunes législatives qui réclament notre attention commune.
Le crime organisé au Canada a beaucoup évolué au cours des cinq dernières années.
[Français]
Le trafic de la drogue demeure l'activité de prédilection des groupes de criminels organisés, mais leurs activités criminelles sont de plus en plus sophistiquées et diversifiées.
La plupart des groupes sont impliqués dans plus d'une activité criminelle, entre autres le crime lié à la drogue et le crime financier, notamment le vol d'identité, la fraude commerciale à grande échelle, le blanchiment d'argent et même le passage de clandestins, la traite de personnes, la contrefaçon de produits de consommation et de médicaments.
[Traduction]
Bien que de nombreux facteurs contribuent à accélérer l'activité du crime organisé chez nous, le résultat final et que, aujourd'hui, le Canada est un pays source pour les drogues synthétiques et un pays de transit pour la cocaïne acheminée d'Amérique du Nord en Asie. Fait plus inquiétant et qui constitue une menace immédiate pour la sécurité publique, les groupes du crime organisé ont de plus en plus recours à la violence pour s'approprier et défendre un territoire et une part des très lucratifs marchés illicites. Ces groupes tentent également de corrompre des fonctionnaires et utilisent la violence contre leurs rivaux, les éventuels témoins, les forces de l'ordre et les membres de l'appareil judiciaire.
Bon nombre d'organisations sont plus averties. Elles compartimentent leurs opérations et les étendent à un certain nombre de pays. Elles utilisent les technologies modernes pour communiquer et se mettre encore mieux à l'abri de la justice.
Bien que les défis soient nombreux, les exemples d'enquêtes fructueuses des opérations policières conjuguées ne manquent pas. Ainsi, les unités de lutte contre les bandes de motards, l'Integrated Gang Task Force et les unités mixtes des forces spéciales, regroupant des organismes d'application de la loi de tous les niveaux, font des enquêtes intégrées de façon à cibler des groupes prioritaires.
La coordination entre organismes est renforcée grâce à des groupes comme le Comité de coordination nationale de la lutte au crime organisé, le Comité du crime organisé de l'ACCP, que je représente ici, et le Comité des modifications des lois de l'ACCP.
Un groupe relativement nouveau semble très prometteur. Il s'agit de la Réponse intégrée au crime organisé, ou RICO, qui s'appelait jusque récemment Conseil de la sécurité publique. Nous avons créé la RICO pour accroître la coopération interprovinciale entre les forces de l'ordre pour les opérations lancées contre le crime organisé. La coordination des efforts est nécessaire si on veut faire une utilisation maximale de ressources et d'actifs qui sont limités, et déceler et combattre les menaces émergentes afin de prévenir la croissance du crime organisé. La RICO est encore relativement récente, mais elle pourrait avoir un retentissement énorme.
Nous avons eu beaucoup de succès et fait de grands progrès, mais, compte tenu des nouvelles réalités dont j'ai parlé, les forces de l'ordre au Canada ont des moyens d'enquête limités. Comme pour tout problème complexe, il faut une approche composée d'éléments multiples. Un échange constant et rapide de renseignements facilite l'application efficace et proactive des programmes et guide le déploiement judicieux des ressources pour le déroulement des opérations tactiques.
Il faut étudier la possibilité d'améliorer les lois et examiner le fonctionnement et les résultats du système judiciaire afin de donner suite efficacement aux mesures d'application de la loi. Face aux défis du crime organisé, l'ACCP estime que les organismes d'exécution de la loi doivent avoir les pouvoirs et les outils voulus pour ne pas se laisser distancer.
Je voudrais aborder trois problèmes particuliers. Premièrement, l'impact que les obligations actuelles de divulgation ont sur les enquêtes criminelles. En 1991, dans l'affaire R. c. Stinchcombe, la Cour suprême du Canada a ordonné aux procureurs de communiquer à l'intimé tous les renseignements pertinents. Un renseignement est considéré comme pertinent s'il y a une possibilité raisonnable qu'il soit utilisé pour étayer la cause du ministère public, faire valoir une défense ou prendre une décision susceptible d'influencer la conduite de la défense. Au Canada, la communication de renseignements est devenue un élément important dans les affaires pénales, et des problèmes de cet ordre surgissent dans la plupart des grandes causes. Ils peuvent avoir un impact notable sur les coûts et les résultats des enquêtes et des poursuites.
[Français]
Chaque tribunal, chaque procureur de la Couronne, chaque avocat de la défense, chaque policier définit le terme « renseignement pertinent » à sa façon. Les interprétations successives dans notre système judiciaire ont fait en sorte qu'aujourd'hui, le seuil de pertinence est vraiment très bas. À mesure que les enquêtes sur le crime organisé se complexifient, la divulgation pose un problème de plus en plus accaparant, au point où la police peine à entamer de nouvelles enquêtes.
Voici un exemple. Il y a quelques années, la police canadienne enquêtait sur une grande organisation criminelle. Elle a intercepté 1,7 million de communications, et elle en a fait transcrire 27 000. Finalement, elle n'en a retenu que 200, qu'elle jugeait suffisamment pertinentes, pour les utiliser en cour.
[Traduction]
Les enquêtes peuvent produire un volume extraordinaire de documentation et d'abondantes ressources policières sont affectées à cette tâche, ce qui les détourne du travail policier de première ligne.
De plus, à cause du volume des documents à communiquer, la police et les procureurs sont moins en mesure de s'attaquer au crime organisé comme infraction en soi. Dans bien des cas, on préfère entamer des poursuites pour des infractions substantielles plutôt que de porter des accusations pour criminalité organisée. Il faut que le cadre et les pratiques juridiques évoluent et tirent parti de l'efficacité des nouvelles techniques et méthodes comme celles de l'électronique. Et surtout, il faut définir clairement et avec cohérence le seuil de la pertinence. On pourrait le faire en légiférant sur les exigences et procédures en matière de divulgation.
Deuxième problème: il faut progresser sur le plan de l'interception. La technologie des communications a beaucoup évolué et les criminels savent s'en servir, mais le droit canadien n'a pas évolué aussi rapidement. De plus en plus, des technologies complexes présentent des difficultés pour l'application des méthodes classiques d'interception des communications. Les fournisseurs de services de communication ne sont pas tenus de fournir les moyens d'interception. Les forces de l'ordre demandent simplement que les fournisseurs intègrent la capacité d'interception aux réseaux existants ou nouveaux et donnent l'accès à des renseignements importants comme le nom et l'adresse du client.
Troisième et dernière question que je voudrais aborder: la nécessité d'accroître la capacité d'échanger de l'information entre les organismes gouvernementaux au Canada et à l'étranger afin d'éliminer les refuges où les organisations criminelles peuvent prospérer. Dans le contexte actuel, on craint d'échanger de l'information, soit à cause de restrictions législatives, soit par souci des droits de la personne. Certes, il est essentiel de choisir judicieusement les renseignements à communiquer et de tenir compte du contexte de la communication ou de l'échange de ces renseignements, mais il peut y avoir là un obstacle qui gêne gravement les enquêtes sur le crime organisé.
Le crime organisé a adopté une perspective internationale. On peut même établir que les organisations criminelles tirent parti de l'infrastructure et des lois de certains pays et s'organisent pour mieux se mettre à l'abri. Par exemple, certaines organisations se sont installées en Inde et en Chine afin d'acheminer les précurseurs chimiques. D'autres ont trouvé refuge dans des pays des Antilles, alors que d'autres encore s'infiltrent maintenant dans des pays africains pour les utiliser comme points de transbordement.
Pour conclure, monsieur le président, je dirai que la police canadienne est déterminée à combattre le crime organisé, mais elle a besoin pour cela d'une nouvelle conception du processus judiciaire et de nouvelles politiques et lignes directrices qui soutiendront ses efforts.
Le Comité du crime organisé de l'ACCP et moi sommes persuadés qu'il est possible de combattre une criminalité dont les moyens sont de plus en plus perfectionnés et de trouver un juste équilibre dans nos structures juridiques et législatives.
Je tiens également à féliciter le comité de ses plans de déplacement. Dans un proche avenir, il doit se rendre dans plusieurs villes canadiennes pour discuter des problèmes relatifs au crime organisé. L'Association canadienne des chefs de police appuie fermement cette initiative qui permettra au comité d'obtenir une information de première main auprès de ceux qui sont en première ligne dans la lutte contre le crime organisé. L'ACCP est prête à épauler le comité sans aucune réserve dans ce travail important. Nous entretiendrons une étroite collaboration avec la greffière du comité pour faciliter les consultations.
Encore une fois, merci de m'avoir invité. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions après le dernier exposé.
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Merci de cette question.
Monsieur le président, le graphique que j'ai montré porte sur les récidivistes. On m'excusera si je n'ai pas assez insisté. Le but principal de notre mission est de mettre en lumière le problème de la récidive chronique, et nous demandons des peines progressivement plus lourdes.
Nous n'avons pas de modalités précises à proposer. Quant aux peines minimums, il appartient aux parlementaires d'en discuter et de proposer une formule qui, d'après l'expérience, peut donner des résultats. Nous serons heureux d'étudier la question, mais nous disons que, si un prévenu qui a déjà été condamné 30 fois comparaît encore devant un juge pour une infraction semblable ou peut-être plus grave, un crime violent, il devrait être obligatoire d'augmenter la peine. Et c'est le criminel qui devrait avoir à montrer pourquoi on ne devrait pas lui infliger une peine plus lourde.
En Colombie-Britannique, les juges nous disent que cela ne sert à rien. En remontant à la politique de 1971, ils disent qu'il ne sert à rien de mettre les gens en prison parce qu'ils en sortent voleurs ou criminels, s'attaquent à des gens, conservent un comportement criminel, et cela est souvent lié à un problème de toxicomanie ou de maladie mentale. Il s'agit donc d'un problème médical, qu'ils refusent de traiter comme un problème judiciaire.
Le seul problème, c'est qu'il y aura une foule de victimes à cause de cette décision. Sur le plan de la responsabilisation, on ne semble pas faire de lien entre la décision et ce qui se produit après. Et nos membres et leurs familles commencent à en avoir plein le dos.
Dave pourrait peut-être donner un peu plus de détails sur la façon de s'y prendre.
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Nous savons que, en Italie et ailleurs dans le monde, des mesures efficaces ont été prises. Nous pourrions nous en inspirer.
Quant aux détenus qui se retrouvent au niveau provincial, compte tenu de ce qui se passe sur la côte ouest — il y a eu aussi des problèmes de gangs et de crimes violents au Québec —, un financement d'urgence s'impose. Il faudrait traiter le problème comme un tsunami, un feu de forêt, un ouragan ou les inondations de Winnipeg, peu importe. Faisons ce qu'il faut pour régler le problème.
Réglons le problème en commençant par le haut de la pyramide. Il faut s'en prendre aux pires éléments du crime organisé, etc. Mais il faut aborder le problème des deux côtés. Il faudra des politiques que le gouvernement actuel n'a pas beaucoup appuyées par le passé, comme le développement de l'enfance, l'éducation, l'alphabétisation dans les prisons. Toutes ces mesures donnent des résultats, la preuve est faite. Il faut commencer de ce côté, et le faire sans tarder. C'est pourquoi nous sommes enchantés de l'annonce d'aujourd'hui: nous allons nous attaquer au problème sur les deux fronts. Nous sommes tout à fait d'accord.
Je le répète: mettez vos divergences en veilleuse. Mettons ces mesures en place pour aider la police à présenter des preuves aux juges, donner à chacun ce à quoi il a droit, mettre les mauvais garnements derrière les barreaux ou les faire traiter. Et nous autres, nous pourrons mener notre vie sans être harcelés par des criminels, par les experts de l'introduction par effraction, sans être attaqués.
J'ignore si vous vous en souvenez, mais à Vancouver, il est arrivé qu'un type entre dans une chambre d'hôpital, arrache une bague à une femme de 92 ans et s'en tire avec une peine minime. C'est un crime horrible, et l'impact s'est fait sentir non seulement sur cette femme, mais aussi sur toute sa famille, et l'hôpital, où ne se sentait plus en sécurité. Donnez-nous une chance.
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Merci, monsieur le président.
J'ai quatre brèves questions, trois pour M. Cabana et une pour Mme Sutton, que j'assure quand même de mon amitié. Cela ne vous vise pas personnellement, mais on souhaite que vous mettiez un peu de contenu dans tout cela.
Monsieur Cabana, d'abord, parlez-nous davantage du RICO. Je veux comprendre ce qu'est l'innovation par rapport à ce qui existait antérieurement, ce que ça amènera.
Deuxièmement, je n'ai pas bien compris votre deuxième recommandation. Dans le cadre du précédent comité, on nous avait parlé de mandats qui n'avaient qu'une durée de trois mois et qu'on voulait poursuivre pour un an. On nous avait dit que c'était utile pour les enquêtes de filature. Est-ce ce à quoi vous référez? Dites nous clairement ce que vous souhaitez.
Troisièmement, si on a ajoutait au Code criminel une nouvelle infraction consistant à interdire le port de symboles qui relient des individus à des organisations qui ont été réputées criminelles par la Cour en vertu de l'article 467, croyez-vous que ça pourrait vous être utile?
Quand vous aurez répondu, je vais demander à Mme Sutton si elle peut nous dire s'il est vrai que le Service correctionnel du Canada a une politique relative aux gangs de rue dans les pénitenciers. Qu'est-ce qu'elle peut nous dire à ce sujet, à ce moment-ci?
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Merci beaucoup aux témoins d'être là.
Compte tenu de mes antécédents, je pourrais, pour certaines de mes questions, présenter une foule de faits empiriques, d'anecdotes ou de références. Je vais parler d'un juge en particulier, car il me semble qu'il a eu raison, alors que, malheureusement, les juges d'autres administrations se trompent.
Juste en amont de la rivière, à Pembroke, en Ontario, j'ai eu l'honneur de travailler avec le juge Russell Merredew. Il a fait une étude sur le nombre des divers types d'inculpation présentés à son tribunal. Les manquements aux conditions de probation étaient les plus nombreux. Le juge disait que les tribunaux n'ont qu'un pouvoir, celui de rendre des ordonnances. C'est tout. Si les ordonnances ne sont pas respectées, c'est l'anarchie. À la deuxième inculpation pour manquement aux conditions de probation, il imposait une certaine peine de prison, et tous les avocats de la défense le savaient. À la troisième, la durée était différente. À la quatrième aussi. Que s'est-il produit? Le nombre de ces inculpations a nettement diminué.
Dans d'autres tribunaux où j'ai eu l'honneur de travailler, avec l'accord du judiciaire, les manquements aux conditions de probation, après négociation entre les avocats du ministère public et de la défense, étaient les premières inculpations liquidées. Le juge Merredew ne l'acceptait pas. Je me permets de donner son nom. Il est sans doute à la retraite, maintenant. Je tenais à signaler cette façon de faire.
Ce graphique a de quoi troubler n'importe quel Canadien. Je ne travaille plus dans cet autre domaine, où je pouvais dire certaines choses et m'en tirer ou presque. Il y a des choses que je ne peux pas dire ici parce que mes adversaires politiques me cloueraient au pilori. Je vais tout de même dire ceci et vous demander ce que vous en pensez. Il est évident, messieurs — et je songe ici plus particulièrement à MM. Park et Rezac —, que vous avez bien préparé votre comparution. Vous avez fait valoir vos points de vue, et ce graphique fait ressortir un problème grave.
Lorsque le gouvernement a commencé à essayer de nommer à la magistrature des gens qui lui semblaient représenter le mieux...
Lorsque nous sommes devenus policiers, on nous a dit pendant nos cours d'orientation que le modèle de base est la common law et qu'une personne moyenne, l'homme ou la femme ordinaire dans notre société, doit être capable non seulement de comprendre la loi qui nous régit, mais aussi de comprendre, d'accepter l'application de la loi, du point de vue de son exécution et de l'administration de la justice, et de donner son assentiment.
À votre humble opinion, les Canadiens comprennent-ils la loi telle qu'elle existe et le raisonnement des juges et de la magistrature, qui sont payés pour représenter l'homme ordinaire et rendre des décisions à l'encontre de gens qui ont eu un comportement antisocial? Je choisis mes mots avec soin.
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Merci de votre intervention.
Monsieur le président, le courant ne passe pas. Nous avons discuté avec des juges, et je crois qu'il y a un problème clivage dans la perception des juges et l'argumentaire de leurs décisions. Ils s'en remettent à la loi, aux précédents, à la jurisprudence, etc.
Les Canadiens attendent autre chose. Selon nous et d'après une étude récente dont Dave pourra peut-être parler, 74 p. 100 des Britanno-Colombiens — je me trompe peut-être de deux ou trois points — ne pensent pas que les peines correspondent aux opinions des Canadiens. D'après le sondage non scientifique que nous avons fait sur notre site Web, www.boardoftrade.com, environ 77 p. 100 des répondants estiment que les peines ne correspondent jamais ou presque jamais à ce que pense le Canadien moyen.
Récemment, j'ai discuté quelques minutes avec le juge en chef de la Colombie-Britannique, Hugh Stanfield, à l'émission The Bill Good Show de CKNW. Je lui ai demandé pourquoi les peines, dans notre province, étaient beaucoup moins sévères que dans le reste du Canada. Deuxième question: comment justifier des peines qui vont en diminuant pour les récidivistes à Vancouver, vu le graphique dont je viens de parler. Sa réponse? Il s'est reporté à un rapport commandé récemment par la province à Doob et Webster. Ce rapport montre que, dans l'ensemble, les peines moyennes en Colombie-Britannique sont à peu près semblables à ce qu'on observe dans le reste du Canada. Mon impression, c'est que la plupart des Canadiens estiment que les peines constituent un problème. Cela mis à part, il a répondu que c'était une erreur de perception courante que de croire que les peines sont moindres, qu'elles sont moins sévères en Colombie-Britannique. Est-ce qu'il s'appuyait sur le rapport Doob et Webster? Il a dit oui. Je l'ai renvoyé à la page 64 — je crois qu'elle se trouve dans la documentation —, où on dit que 21 p. 100 des narcotrafiquants ont une peine de prison de plus de six mois dans la province, contre 58 p. 100 dans le reste du Canada.
Dans l'ensemble, nos peines sont peut-être semblables à celles du reste du pays, selon Doob et Webster, mais pour les méchants, les narcotrafiquants, nous sommes beaucoup plus conciliants. Et le graphique le montre.
Que le juge aille dire à la radio que nous ne sommes pas différents des autres — ce qui est un mythe —, défende le système et défende certaines de ces peines clémentes, voilà qui nous semble choquant. Ce peut être trompeur pour le public également. Nous avons donc contesté son point de vue. Vous devez avoir une discussion plus approfondie avec lui à ce sujet. Ce n'était qu'une courte séquence à la radio.
Nous ne laissons pas tomber le dossier. Ce clivage entre les juges et les attentes du public est un problème grave au Canada.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux témoins et je les remercie pour leurs commentaires.
J'aimerais poser une question au commissaire adjoint Cabana. Vous avez abordé la question de la divulgation et de l'obligation en vertu de l'arrêt Stinchcombe. Le procureur général de la Colombie-Britannique nous a dit partager votre opinion à ce sujet: il faut trouver une façon non pas de restreindre, mais de simplifier ou d'expédier l'obligation.
[Traduction]
Le commissaire adjoint pourrait-il nous dire comment, selon lui, nous pourrions assouplir ou améliorer les exigences relatives à la divulgation sans porter atteinte aux droits garantis par la Charte, étant donné l'arrêt Stinchcombe? Vous ne proposez certainement pas de cacher à l'accusé des preuves retenues contre lui. Vous cherchez certainement un moyen d'alléger la tâche de l'administration de la justice, d'utiliser moins de temps et de ressources, ce qui abrégerait les délais.
En dehors des documents numériques, par exemple, y a-t-il des moyens de simplifier la communication des documents sans, selon vous, violer les droits de l'accusé garantis par la Charte?
Je me demande aussi, monsieur Cabana, si une grande partie du problème ne tient pas au manque de ressources dans certaines administrations plutôt qu'à la normalisation. Certains ont la technologie et d'autres non. Le problème pourrait se régler en grande partie, n'est-ce pas, si le gouvernement du Canada, en partenariat avec les procureurs généraux des provinces, trouvait le moyen de mieux répartir le fardeau que ces décisions imposent à l'administration de la justice.
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Merci, monsieur LeBlanc et monsieur le président.
Merci de cette question très intéressante. Je peux penser à un certain nombre d'approches différentes, mais il faudrait les examiner de plus près. Comme vous le savez sûrement, il y a bien des gens, aux quatre coins du Canada et à divers niveaux des forces de l'ordre et du judiciaire, qui étudient maintenant certaines de ces questions.
Vous avez mentionné quelques éléments, comme la normalisation de l'approche de la divulgation, mais il y a aussi la définition de la pertinence. Il y a des différences appréciables d'une administration à l'autre lorsqu'il s'agit d'évaluer la pertinence de l'information. Si nous pouvions nous entendre sur ce qui est pertinent pour la défense de façon à respecter les critères de l'arrêt Stinchcombe, cela permettrait de régler beaucoup de problèmes que nous éprouvons maintenant.
On reconnaît dans l'arrêt Stinchcombe que la divulgation est un processus continu. Dans la majorité des administrations, on a créé une attente, soit que la divulgation devrait se faire lorsque les accusations sont portées. Vers la fin d'une enquête, la situation devient critique parce qu'il faut beaucoup de ressources pour préparer et présenter tous les documents, s'assurer que rien n'est oublié, que tous les documents sont communiqués. Il faudrait admettre qu'il s'agit d'un processus continu qui débute au moment de l'inculpation et peut se prolonger un certain temps.
Comme M. Comartin l'a dit, il existe différentes technologies. La plupart des organismes d'exécution de la loi au Canada s'en servent. Il serait très avantageux de normaliser l'utilisation de la technologie. Au fil des ans, il s'est manifesté une certaine réticence de la part du judiciaire. Cela se produit chaque fois qu'il y a du neuf. Lorsque les policiers et les procureurs ont commencé à utiliser les moyens électroniques pour communiquer les documents, on ne s'y est pas très bien pris. Il faut apprendre.
Pour l'essentiel, au cours des dix dernières années, nous avons fait un apprentissage, et il serait très bénéfique de normaliser les modalités de divulgation électronique, la façon dont le judiciaire et la défense doivent s'attendre à recevoir les documents.
Cela peut être perçu comme une demande de ressources supplémentaires, mais il faut reconnaître que ni les services policiers, ni le ministère public n'ont jamais reçu de ressources supplémentaires pour faciliter la divulgation. Je suis dans les services policiers depuis près de 30 ans, et la divulgation se faisait fort différemment il y a 20 ans. Mais il n'y a jamais eu de ressources supplémentaires pour faciliter les choses.
Je suis d'accord avec vous: le problème tient en partie à un manque de ressources pour faciliter le travail et l'accomplir dans les meilleurs délais.
Il faudrait aussi définir le rôle du ministère public et de la police: qui doit assumer, et dans quelle mesure, les coûts de la communication des documents? Là aussi, il y a des disparités d'une région à l'autre.
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D'entrée de jeu, je remercie nos invités pour leur présence.
Je ne suis pas d'accord sur la position de Vancouver, qui est une ville magnifique. Que vous nommiez un juge plutôt qu'un autre parce qu'il promet de donner des peines plus lourdes n'a aucun sens.
Cela dit, avez-vous déjà fait une étude? J'ai lu votre étude qui parle des récidivistes, mais vous êtes-vous déjà attardés au service des libérations conditionnelles? Ce n'est pas l'entrée en prison qui pose problème, mais la sortie. Avez-vous remarqué que les détenus sortent trop vite, qu'ils ne purgent pas leur peine? Il n'est pas normal qu'un détenu sorte de prison au bout de trois mois alors qu'un juge lui a imposé une peine de 22 mois d'emprisonnement.
Arrêtez de demander des sentences plus lourdes, le problème n'est pas là. Arrêtez de demander des directives au juge. Demandez au gouvernement de changer la loi sur la libération conditionnelle. Les détenus sortent trop vite. Si vous n'admettez pas cela, on part bien mal, surtout pour ce qui est du crime organisé.
Les criminels en col blanc ou les leaders sortent de prison. On ne les voit jamais. Ce n'est pas eux qui donnent les coups de batte de baseball; ils chargent quelqu'un d'autre de le faire à leur place. Quand ils entrent en prison, ce sont des gentlemen et ils en sortent rapidement.
Madame Sutton, vous allez sûrement revenir au comité. J'aimerais obtenir des détails sur les libérations conditionnelles. Que signifie un tiers de la peine? Doit-on acquérir certaines aptitudes pour pouvoir bénéficier du tiers, de la moitié ou du quart de la peine? On est arrivé à un point où on libère n'importe qui après le sixième de sa peine. Je le sais, j'ai été criminaliste pendant 30 ans. Mes clients qui étaient condamnés à 32 mois d'emprisonnement s'en fichaient, car quatre mois plus tard, ils étaient sortis. Dans notre jargon, on désigne une première peine par le terme « bit », ce qui signifie que ce n'est pas grave.
J'aimerais que la Commission nationale des libérations conditionnelles nous présente une étude sur ce sujet, ce qui répondrait à nos amis de Vancouver et, probablement, à nos amis de l'autre coté. Sur quels critères vous fondez-vous pour établir qu'une personne doit être remise en liberté? Par exemple, si un individu doit purger une peine de 40 mois d'emprisonnement, comment allez-vous évaluer sa remise en liberté?
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Il y a deux façons dont un délinquant peut quitter la prison ou obtenir la libération conditionnelle après avoir purgé le tiers de sa peine.
D'abord, si c'est un délinquant de ressort fédéral qui en est à sa première condamnation et s'il est non violent, c'est-à-dire s'il ne purge pas une peine pour une infraction prévue à l'annexe I — qui regroupe plutôt des infractions contre la personne —, et s'il n'a pas été condamné pour une infraction grave liée aux drogues — là encore, il y a une définition —, on peut envisager de lui accorder la libération conditionnelle. À moins que la commission ne puisse établir la probabilité qu'il commettra un crime violent avant la fin de sa peine, nous devons l'accorder. La loi nous laisse peu de latitude dans ces cas.
Les autres modalités s'appliquent à ceux qui ont purgé plusieurs peines ou qui purgent une première peine clairement liée à la violence ou à une infraction grave liée aux drogues. Les critères ordinaires de libération conditionnelle s'appliquent à ces personnes. Et le premier critère, c'est la protection du public.
Nous tenons compte d'un certain nombre d'éléments pour évaluer la protection du public, dont la probabilité de récidive. Nous considérons les causes de l'incarcération, les interventions qui ont été faites et le plan de mise en liberté. Parmi les éléments considérés dans chaque cas, la question qui nous intéresse aujourd'hui est le crime organisé. Le crime organisé, ou les gangs, si on préfère, entre en ligne de compte pour tous les aspects. Au préalable, nous considérons les éléments de preuve. Il est très clair que la commission, qui est un tribunal administratif, n'a pas besoin d'obtenir une condamnation. S'il y a des éléments de preuve ou des renseignements qui permettent de dire que la personne a été mêlée au crime organisé, nous pouvons en tenir compte dans notre décision, à la différence des tribunaux.
Quant à la période d'incarcération, nous considérons aussi l'information venant des Services correctionnels ou de la police, au sujet de liens maintenus avec le même milieu. Et lorsque le délinquant partira, avec qui se tiendra-t-il? Où ira-t-il? Y a-t-il d'autres membres du même gang qui seront dans le même quartier ou dans la même maison de transition? Il est clair, d'après des recherches fondées sur des éléments probants, que les compagnons sont un facteur majeur à considérer lorsqu'on examine les risques de récidive et lorsque la commission prend sa décision.
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Merci, monsieur Murphy.
Absolument. Tout effort de rationalisation de l'application de cette disposition, l'article 467.1, qui définit le crime organisé, serait le bienvenu. Malheureusement, dans tout le Canada, on répugne, tant dans les services policiers que dans le système de justice, à appliquer ou à utiliser les dispositions de cette loi.
Il y a un certain nombre de facteurs, mais c'est surtout à cause de la charge de la preuve, des exigences du fardeau de la preuve à satisfaire pour montrer que l'organisation visée par l'enquête correspond aux paramètres qui définissent l'organisation criminelle. Il serait avantageux de réexaminer la question.
Dans cet examen, on devrait aussi s'interroger sur la nécessité d'éviter le double emploi. Pour le moment, si, dans des poursuites à un certain endroit, on cherche à désigner un groupe comme organisation criminelle, et s'il y a d'autres poursuites du même ordre, ailleurs au Canada ou dans la même administration, il faut appliquer de nouveau le même mécanisme, même si le groupe a déjà été reconnu comme organisation criminelle. Il faut reprendre toute la démarche, ce qui, à mon humble avis, n'est rien d'autre que du double emploi.
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Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins moi aussi. Vos témoignages m'ont plu.
M. Rezac a parlé quelquefois des victimes, et je l'en remercie. Très souvent, au fil des ans, nous avons négligé les victimes lorsque nous avons discuté du système de justice pénale. Vous avez donc parlé des victimes et aussi de la victimisation dans les collectivités.
L'un des principaux sujets d'inquiétude dont nous entendons parler, ce sont les récidivistes, et nous abordons aujourd'hui le sujet dans le contexte du crime organisé. Au cours de la dernière législature, nous avons proposé des mesures visant à perturber les entreprises criminelles. Il y a notamment des peines obligatoires pour l'utilisation d'une arme à feu pour perpétrer une infraction. Ces peines seraient progressivement plus lourdes. Si un délinquant commet une infraction en utilisant une arme à feu, il sera passible d'une peine minimum. S'il recommence, est arrêté et de nouveau condamné, la peine minimum sera plus lourde. Bien des Canadiens trouvent que c'est logique non seulement pour protéger les Canadiens contre des délinquants, mais aussi pour désorganiser les entreprises criminelles.
Comme vous le savez, nous avons présenté deux projets de loi, l'un sur la violence des gangs et l'autre sur la narcocriminalité. Comme le ministre de la Justice l'a dit, ce ne sont pas des panacées, mais ce sont des étapes dans la bonne direction. En les franchissant, nous cherchons à aller plus loin grâce à de nouvelles mesures.
Je voudrais connaître le point de vue de MM. Rezac et Cabana sur deux points. D'abord, la détermination. L'an dernier, le problème n'était pas aussi grave que cette année. Lorsque nous avons proposé des projets de loi sur la justice pénale, l'an passé, il a été très difficile de faire adopter quelque mesure que ce soit à la Chambre. J'ai parlé des peines minimums obligatoires pour les crimes commis avec des armes à feu. Il y a aussi les peines avec sursis pour des crimes graves qui permettent à l'auteur d'un crime grave de purger sa peine dans le confort de son foyer.
Vous avez raison de dire que, si vous faisiez un sondage maintenant, à Vancouver, cette question serait au premier plan des préoccupations. Dans quelle mesure est-il important que les législateurs restent déterminés, alors que le problème ne fait pas la manchette tous les jours? Dans quelle mesure est-ce important non seulement pour sévir contre les criminels, mais aussi pour désorganiser les entreprises criminelles?
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Merci, monsieur le président.
La question s'adresse peut-être à M. Cabana. Je ferai une petite entrée en matière et j'aimerais entendre votre opinion. Vous en avez déjà parlé et vous avez survolé le problème en répondant aux questions de mes différents collègues, y compris ceux de l'opposition.
Je vis dans la province de Québec. Depuis deux ans, il y a eu beaucoup de problèmes liés à de la drogue qui entre par les ports nationaux et par les aéroports, qui sont des domaines de compétence fédérale puisque nos agents sont censés être là. J'ai cru comprendre, en parcourant certains journaux, qu'il y a un commerce à Montréal, une plaque tournante de la drogue de l'ordre de 2 milliards de dollars bruts par année.
Je suis d'accord avec M. Rezac au sujet des statistiques, et vous en avez parlé vous-même tout à l'heure, durant votre témoignage. Les statistiques montrent toujours ce que l'on est capable de voir. On est comme Saint-Thomas: si on l'a vu, on l'inscrit dans les statistiques. Des drogues d'une valeur de 2 milliards de dollars sont entrées au pays, mais on n'a pas pu constater que des actes criminels équivalant à 2 milliards de dollars ont été commis dans l'ensemble du Canada. Donc, nos statistiques ne nous montrent pas nécessairement ce qui se passe.
Toutefois, des citoyens comme M. Rezac, qui est de Vancouver et qui est un civil, et vous, qui êtes plutôt un officier de police alors que madame s'occupe de relations avec les policiers, viennent nous voir. Cela veut dire qu'il y a une crainte. Si M. Rezac a pris la peine de partir de Vancouver pour venir nous voir, c'est parce qu'il y a une crainte. Même si nous ne sommes pas d'accord sur l'ensemble de son message, il nous transmet une émotion et une crainte. Cette crainte, je l'ai aussi retrouvée dans ma circonscription, exprimée par des personnes âgées.
La question que je voudrais surtout vous poser, monsieur Cabana, est la suivante. J'ai lu votre document dans lequel vous parlez de corruption de fonctionnaires, à la page 4, et je vous cite: « Les criminels organisés comptent également sur la corruption de fonctionnaires [...] »
Nous avons un bon projet de loi qui protégera les bons policiers, les bons juges et les bons témoins. De quoi parlez-vous lorsque vous parlez de corruption de fonctionnaires? Cela m'intrigue.