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Je déclare ouverte la 23
e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous sommes le mercredi 13 mai 2009. Avant toute chose, je tiens à féliciter l'un de nos collègues, M. Réal Ménard, à l'occasion de son 47
e anniversaire de naissance. Mes félicitations.
Des voix: Bravo!
Le président: Chers collègues, vous avez sous les yeux l'ordre du jour. Selon l'ordre de renvoi, nous poursuivons l'examen du projet de loi . Comme convenu, il s'agit de la dernière séance consacrée à l'audition des témoins.
Je vous informe à regret que deux de nos témoins ne comparaîtront pas. Nous avons été informés que le juge Craig fait partie du Tribunal des droits de la personne et que, pour cette raison, il ne conviendrait pas qu'il se prononce sur la politique du gouvernement fédéral. Par ailleurs, des difficultés techniques empêchent la vidéoconférence organisée par la greffière pour entendre M. Julian Roberts. Même après avoir changé de studio, ça ne marche pas. Malheureusement, nous ne pourrons pas l'entendre. J'ai demandé à la greffière de s'assurer que M. Roberts nous communique son mémoire, que nous verserons au compte rendu.
Nous recevons néanmoins un certain nombre d'organisations et de particuliers qui nous aideront dans notre examen du projet de loi C-15, à commencer par Mme Cathy Sabiston, Mme Jane Hazel et Mme Colleen Ryan du ministère de la Santé. Soyez les bienvenues. Nous accueillons également Chuck Doucette, du Drug Prevention Network of Canada. Bienvenue à vous. Nous avons également M. Greg Yost, du ministère de la Justice, qui comparaît à nouveau devant le comité pour discuter d'un point mineur relatif au texte. Enfin, nous recevrons mesdames Gaylene Schellenberg et Sarah Inness de l'Association du Barreau canadien. Vous êtes les bienvenus.
Je pense que vous connaissez l'usage ici. Vous disposez de dix minutes pour faire l'exposé de votre organisation, après quoi nous passerons aux questions.
Commençons donc par les représentants du ministère de la Santé. Commence qui voudra.
:
Merci, monsieur le président et merci aux membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de l'occasion qui m'est donnée de discuter avec vous de la Stratégie nationale antidrogue. Cette stratégie est la démarche que le Canada a choisie pour réduire l'offre et la demande de drogues illégales et lutter contre la criminalité qui en découle. Je suis ravie d'être ici.
Je crois savoir que lors de vos délibérations récentes sur le projet de loi C-15, qui impose des peines minimales obligatoires pour les infractions graves liées à la drogue, vous avez formulé le souhait d'en savoir davantage sur la stratégie. Le projet de loi C-15, loin d'être un élément législatif isolé, s'intègre à une démarche beaucoup plus vaste du gouvernement qui rassemble les ministères de la Sécurité publique, de la Justice et de la Santé et qui vise à rendre nos villes et villages plus sûrs et plus sains.
Lancée en 2007, la Stratégie nationale antidrogue énonce trois priorités: empêcher l'utilisation des drogues illégales chez les jeunes, traiter les personnes qui en sont dépendantes et combattre la production et la distribution de drogues grâce à des lois comme le projet de loi C-15. Y sont associés trois plans d'action: prévention, traitement et application de la loi. Chacun d'eux précise les mesures prises par le gouvernement pour atteindre ses objectifs.
Santé Canada est un partenaire à part entière de la mise en oeuvre de la stratégie. En particulier, notre ministère est responsable de la mise en oeuvre des plans d'action de prévention et de traitement et collabore au plan d'action d'application de la loi.
Je suis ici aujourd'hui pour discuter du rôle de Santé Canada dans la poursuite de cette stratégie. Il s'agit surtout d'aider les jeunes à faire des choix avisés vis-à-vis de la consommation de drogue, et de favoriser les méthodes novatrices de traitement et de réhabilitation des toxicomanes qui présentent un risque pour eux-mêmes et leurs collectivités.
[Français]
Je débuterai par le Plan d'action en matière de prévention. Comme le nom le laisse entendre, le Plan d'action en matière de prévention vise à dissuader les gens d'utiliser des drogues. En d'autres mots, il vise à éliminer le problème avant qu'il ne se produise. D'après les recherches effectuées, plus une personne tarde dans la vie à essayer une drogue, moins elle risque d'en abuser. Du même coup, la collectivité où elle vit aura moins à souffrir des conséquences négatives de l'utilisation des drogues. La clé réside dans l'intervention précoce.
[Traduction]
Il va sans dire que beaucoup d'entités ont un rôle à jouer en matière de prévention. Quant à lui, le gouvernement du Canada a investi 30 millions de dollars sur cinq ans dans une campagne médiatique ciblée dont le but est de sensibiliser les jeunes de 13 à 15 ans aux dangers de la drogue. La première de ce genre depuis 1993, cette campagne a commencé par un message aux parents: renforcez votre influence sur vos adolescents et discutez de la drogue avec eux. Les premiers signes montrent que la campagne atteint son objectif et que le message trouve un écho. De fait, le volet de la campagne destiné aux parents a suscité plus de 2 900 appels à notre centre d'information et plus de 280 000 visites sur notre site Web. En outre, plus de 123 000 exemplaires de la brochure destinée aux parents ont été commandés et des milliers d'autres ont été téléchargés à partir du site Web.
Le sondage réalisé après coup a confirmé que les parents de notre auditoire cible étaient intervenus précisément à cause de la campagne. Les adultes ont obtenu la brochure d'information et ont discuté des dangers de la drogue avec leurs enfants. Il faudra toutefois du temps avant de pouvoir constater des résultats probants en matière de réduction de consommation de drogue chez les adolescents. C'est pourquoi, en plus des sommes consacrées à la prévention dans la Stratégie nationale antidrogue, Santé Canada consacre près de 40 millions de dollars à la promotion de la santé et à la prévention de la toxicomanie. Grâce au Fonds des initiatives communautaires de la stratégie antidrogue, Santé Canada contribuera à diminuer la toxicomanie chez les jeunes en finançant des initiatives locales qui permettront de recenser les besoins particuliers des jeunes de l'endroit et de répondre à leurs besoins.
Le ministère investit également 10 millions de dollars dans la Stratégie de prévention en toxicomanie chez les jeunes du Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies, une initiative qui permet de mobiliser les efforts de prévention et d'étoffer les politiques et les pratiques en matière de prévention, et qui favorise l'établissement de liens entre des associations sans but lucratif, le secteur privé et tous les ordres de gouvernement.
[Français]
Malheureusement, les mesures de prévention arrivent trop tard pour les personnes qui ont déjà pris des drogues et développé une dépendance à leur égard, et dont le bien-être social et la santé physique en souffrent. C'est pourquoi le gouvernement du Canada a aussi fait d'importants investissements pour mettre en oeuvre la deuxième composante de la Stratégie nationale antidrogue, soit le Plan d'action en matière de traitement.
[Traduction]
Conformément à ce plan, le gouvernement a débloqué 100 millions de dollars de plus sur cinq ans pour aider les toxicomanes et les alcooliques à obtenir le traitement dont ils ont besoin. Une part importante de ces fonds s'ajoutera aux investissements que le ministère consacre déjà au Programme de soutien au financement du traitement de la toxicomanie, une initiative dont le but est d'aider les gouvernements provinciaux et territoriaux à dispenser des services de qualité dans ce domaine. Santé Canada versera plus de 111 millions de dollars aux provinces et territoires pour les aider à offrir ces services, adopter des pratiques exemplaires, appliquer les découvertes de la recherche à la pratique clinique et mieux mesurer et évaluer l'efficacité des systèmes de traitement de la toxicomanie.
Outre ces investissements à l'échelle nationale, le gouvernement du Canada consacre des fonds à la réponse aux besoins des populations particulièrement vulnérables: les habitants du centre-est de Vancouver et les membres des collectivités inuites et des premières nations. Comme beaucoup d'entre vous le savent, le quartier centre-est de Vancouver regroupe une population extrêmement vulnérable, des personnes qui ont une dépendance à l'héroïne, à la cocaïne, au crack, à la méthamphétamine en cristaux et à d'autres drogues. Ces personnes ont besoin d'aide pour recouvrer la santé et l'espoir. Pour cette raison, Santé Canada affectera 10 millions de dollars de plus à la création d'une équipe communautaire de traitement actif qui travaillera en permanence dans le centre-est de Vancouver à offrir des services de psychiatrie, de médecine, de soins infirmiers, de thérapie et de réadaptation. Seront également créés 20 nouveaux lits de traitement destinés aux travailleuses du sexe toxicomanes et aux femmes qui ont besoin d'un milieu sûr et stable pour surmonter leur toxicomanie. Une somme supplémentaire de 2 millions de dollars servira à améliorer les services de toxicomanie à l'intention de la population autochtone qui habite le quartier.
[Français]
Le Plan d'action en matière de prévention du gouvernement du Canada est aussi axé sur les collectivités des premières nations et des Inuits, où, trop souvent, l'abus d'alcool et de drogues demeure problématique. Le gouvernement prend un certain nombre de mesures pour aider les collectivités à prendre en main ces sérieux problèmes.
[Traduction]
Chaque année, Santé Canada verse 59 millions de dollars dans le cadre du Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones afin de financer 54 centres de traitement, ainsi que des services de prévention de l'alcoolisme et de la toxicomanie dans plus de 500 collectivités des premières nations du pays. En vertu du plan d'action de traitement, Santé Canada a investi 30,5 millions de dollars sur cinq ans pour améliorer l'accès et la qualité des services de toxicomanie destinés aux jeunes et aux familles inuites et des premières nations du pays.
Monsieur le président, le troisième et dernier volet de la Stratégie nationale antidrogue est le plan d'action en matière d'application de la loi, qui représente un investissement global nouveau du gouvernement d'environ 102 millions de dollars sur cinq ans. En vertu de ce plan, Santé Canada rehausse la capacité du pays à assurer l'observation du Règlement sur les précurseurs et à réduire et prévenir le détournement de produits chimiques en augmentant le nombre d'inspecteurs et d'enquêteurs. De plus, le service d'analyse des drogues de Santé Canada reçoit des fonds qui lui permettent de réaliser avec rapidité et exactitude l'analyse de drogues illicites saisies par les forces policières canadiennes afin de venir en aide aux efforts d'application de la loi et de poursuites, et de prévenir les retards dans la présentation des pièces à conviction.
Si les plans d'action de prévention et de traitement diminuent la demande de drogue, le plan d'action en matière d'application de la loi, sous l'égide de Sécurité publique Canada et du ministère de la Justice, aborde le problème de la drogue au pays sous un autre angle. Sa vocation est de limiter l'offre de drogues, d'en freiner la production et la distribution.
Monsieur le président, comme beaucoup le savent, le projet de loi est l'un des nombreux éléments de la démarche globale et équilibrée du gouvernement du Canada dans la lutte contre la drogue au pays.
Pour terminer, la Stratégie nationale antidrogue mise sur la fermeté à l'endroit des producteurs et distributeurs de drogue, mais sur la compassion pour ceux qui souffrent de toxicomanie. Elle vise également à dissuader les jeunes de consommer de la drogue.
[Français]
Merci.
Je me ferai un plaisir de répondre à toutes vos questions, avec l'aide de mes collègues.
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Tout d'abord, merci de m'écouter et de me permettre de comparaître par vidéoconférence, étant donné que je ne pouvais pas me rendre à Ottawa pour vous parler en personne. Je représente le Drug Prevention Network of Canada. Je suis actuellement vice-président de l'organisation et membre du International Task Force on Strategic Drug Policy.
Le Drug Prevention Network of Canada a été créé en 2005 pour servir la population canadienne à l'échelle nationale. Nous nous sommes engagés à travailler avec des organisations et des individus ayant des opinions semblables aux nôtres pour faire la promotion d'un traitement contre l'abus de drogues et d'alcool fondé sur l'abstinence, ainsi que de programmes de réhabilitation visant à favoriser un mode de vie sain, sans drogue. Nous nous sommes également engagés à nous opposer à la légalisation des drogues au Canada. Nous participons de façon très active au nouveau programme national de prévention de la toxicomanie chez les jeunes. Je suis coprésident du comité consultatif national.
Le International Task Force est un réseau de professionnels et de leaders communautaires de partout dans le monde qui appuient les principes de réduction de la demande de drogues et en font la promotion, et qui s'efforcent de faire avancer la communication et la collaboration parmi les organisations non gouvernementales qui travaillent à l'éradication de l'usage de drogues et à la promotion d'une bonne politique en matière de drogues partout dans le monde. Ces deux organisations croient qu'il faut, en matière de drogues, une politique complète qui couvrirait la prévention, le traitement et l'application de la loi.
J'ai pris ma retraite de la Gendarmerie royale du Canada en 2007, après plus de 35 ans de service. Pendant plus de 30 de ces 35 années, j'ai travaillé dans différentes sections au sein de la Sous-direction de la police des drogues, toujours dans la région de Vancouver. Entre autres, j'ai travaillé comme agent d'infiltration, j'ai participé à des enquêtes à long terme portant sur des complots, j'ai travaillé aux renseignements antidrogue et j'ai fait de la prévention en toxicomanie. Au cours des 12 dernières années, j'ai été en charge du programme de sensibilisation aux drogues de la Colombie-Britannique. En tant que tel, j'ai participé à de nombreuses discussions au sujet des répercussions de l'abus de drogues sur la société et des stratégies visant à réduire la demande et l'offre de drogues. Au fil des années, j'ai représenté la GRC au sein de nombreux comités de portée communautaire, provinciale et nationale.
Je ne me prétends pas spécialiste de l'efficacité des peines minimales obligatoires pour ce qui est de réduire l'abus de drogues. Toutefois, je peux vous dire ce que j'ai appris de mon expérience. Les choses ont changé depuis mes débuts dans le domaine de l'application de la loi sur les drogues, en 1977. Au cours de ces 30 années, j'ai vu les peines visant les infractions touchant les drogues s'affaiblir progressivement. En même temps, j'ai vu les problèmes liés à l'abus de drogues s'aggraver. J'ai également vu le commerce de la drogue prendre de l'ampleur au centre-ville de Vancouver, en même temps que les efforts d'application de la loi dans ce quartier diminuaient. D'après mon expérience, je ne vois pas comment on peut prendre les 30 dernières années et soutenir que des peines moins sévères mènent à des conséquences sociales moins dommageables. D'après mon expérience, plus nous devenons cléments et plus nous avons des problèmes. Je pense également que d'autres pays ont connu la même expérience, et j'aimerais établir une comparaison.
Je me suis rendu aux Pays-Bas, en Allemagne et en Suède pour observer la situation dans ces pays. Selon moi, nous devrions prendre pour modèle la politique efficace de lutte contre les drogues de la Suède. Les problèmes touchant les abus de drogues sont moindres en Suède, par rapport aux Pays-Bas, à l'Allemagne ou au Canada. Pourtant, certains nous ont incités à suivre les politiques adoptées par les Pays-Bas et l'Allemagne, plutôt que celles de la Suède.
En Suède, après une période de relâchement des politiques relatives aux drogues et d'augmentation de l'usage des drogues, on a réussi à ralentir l'usage des drogues en resserrant les politiques. En même temps, on a accru les efforts de prévention et de traitement. La clef du succès là-bas a été l'effort déployé pour rétablir un équilibre entre la prévention et le traitement, et le maintien d'une application ferme de la loi. En Suède, lorsque quelqu'un est arrêté pour avoir commis une infraction liée aux drogues, on lui présente une personne responsable du traitement de la toxicomanie avant sa libération. Ce n'est pas très courant, mais si on le juge nécessaire pour la santé de la personne, on peut la forcer à suivre un traitement contre la toxicomanie. Il est essentiel de faire suivre un traitement aux personnes dépendantes des drogues pour atténuer les problèmes connexes dans notre société.
On peut le faire de différentes façons. On peut avoir recours aux tribunaux de traitement de la toxicomanie. S'il est important d'envoyer les trafiquants de drogue en prison pendant une période suffisante, il est tout aussi important d'envoyer les toxicomanes suivre un traitement. Je n'ai pas réalisé d'études pour déterminer l'efficacité des tribunaux de traitement de la toxicomanie, mais j'ai parlé à des toxicomanes qui ont suivi un programme judiciaire de traitement de la toxicomanie. Selon eux, s'ils ont pu pratiquer l'abstinence grâce au système judiciaire de traitement de la toxicomanie alors qu'ils avaient échoué auparavant, c'est parce que l'agent chargé de leur cas les suivait constamment. L'agent les suit pour les aider à se relever et les remettre sur la bonne voie lorsqu'ils s'écartent. Ce n'est pas ainsi que ça se passe dans le système de soins de santé régulier. Je pense que le système judiciaire de traitement de la toxicomanie est une bonne façon de faire suivre un traitement aux toxicomanes qui enfreignent la loi.
Il faut seulement veiller à ce qu'il y ait suffisamment de tribunaux de traitement de la toxicomanie disponibles au besoin, et à ce que suffisamment d'établissements de traitement soient disponibles pour répondre aux besoins. C'est très important, et je pense qu'il doit y avoir des traitements aussi pour les toxicomanes qui ne sont pas dans le système judiciaire de traitement de la toxicomanie, puisqu'il ne faudrait pas que des gens soient tentés de commettre une infraction simplement pour pouvoir suivre un traitement.
Au Canada, nous avons été influencés par le mouvement international de réduction des méfaits, qui nous portait à croire que les lois visant à lutter contre les drogues peuvent causer plus de dommages que les drogues elles-mêmes. Cette influence semble avoir atteint les juges, dont les peines sont devenues de plus en plus clémentes. On a facilement l'impression qu'ils se préoccupent davantage du toxicomane que des dommages causés à la société ou aux membres de la famille.
Les enfants en danger en raison des drogues constituent une préoccupation réelle à laquelle nous commençons à peine à nous attaquer dans notre pays. S'il peut sembler tragique d'arracher un parent toxicomane à son enfant, il faut tenir compte des dommages causés quand on laisse l'enfant dans une situation où il est négligé ou mis en danger en raison de graves abus de drogues.
Je suis d'accord pour dire qu'un toxicomane a besoin de traitement. Toutefois, ce traitement pourrait devoir s'accompagner d'une peine d'emprisonnement, au besoin. Je suis d'accord pour dire qu'envoyer un toxicomane en prison sans traitement constitue une erreur, mais il s'agit également d'une erreur que de ne pas prévoir de peine considérable pour ceux qui gagnent leur vie en contribuant à la misère des autres.
C'est tout spécialement vrai lorsqu'il s'agit de membres de gangs criminels organisés. Les membres des gangs, qui ne sont pas toxicomanes, connaissent très bien les risques et les conséquences du trafic de drogues un peu partout au pays, tout comme ils savent que les peines sont moins sévères au Canada qu'aux États-Unis. Ils savent également que les peines sont moins sévères à Vancouver qu'ailleurs au Canada.
L'une des raisons pour lesquelles les gangs sont si nombreux à s'adonner à la culture du cannabis dans la région de Vancouver, c'est que les sentences imposées pour le trafic sont plus légères ici qu'ailleurs, de même que pour le trafic de cocaïne et d'héroïne. Le rapport risques-richesse est beaucoup plus avantageux. Les petites amendes qu'ils devaient payer faisaient simplement partie de leurs frais généraux.
Il est également facile pour les chefs de gangs de convaincre les gens d'aider à l'entretien ou de surveiller les récoltes si le risque d'emprisonnement est peu élevé. Même si les lois adoptées récemment permettent de récupérer plus facilement une partie de leurs profits, nous avons tout de même besoin de mesures dissuasives plus fortes. Il faut que ces personnes craignent de croupir longtemps en prison. Ce projet de loi veille à ce que ce message soit bien clair.
On peut dire la même chose de l'utilisation d'armes durant la perpétration d'un crime. Peu importe l'intention initiale du délinquant, une fois qu'une arme est sortie, les risques de blessures graves ou de décès sont immenses. Les délinquants qui utilisent des armes constituent clairement une plus grande menace pour la société et devraient subir une conséquence proportionnelle à leur geste. La meilleure façon d'atténuer ce risque pour la société est d'en retirer le délinquant. Plus le délinquant reste à l'écart de la société longtemps, et plus la société est libre de cette menace longtemps.
Sachant que la grande majorité des infractions sont commises par un petit nombre de délinquants, on peut facilement conclure que des peines plus longues devraient permettre de diminuer le nombre de crimes. Peu importe la raison pour laquelle les peines sont devenues plus clémentes, le fait est que c'est bien le cas. Selon moi, il faut renverser cette tendance. Je pense que le projet de loi peut y arriver, et c'est pourquoi je l'appuie.
Merci.
Je suis Gaylene Schellenberg, avocate, Législation et réforme du droit, à l'Association du Barreau canadien. Merci de nous avoir invités aujourd'hui pour présenter le point de vue de l'ABC au sujet du projet de loi .
L'Association du Barreau canadien est une organisation nationale regroupant 38 000 avocats, étudiants en droit, notaires et professeurs de droit de partout au pays. L'un des aspects importants du mandat de l'ABC consiste à chercher à améliorer le droit et l'administration de la justice. C'est dans cette optique que nous comparaissons devant vous aujourd'hui.
Je suis accompagnée de Sarah Inness, qui est membre de l'exécutif de la section nationale du droit pénal de l'ABC. La section représente des avocats de la couronne et de la défense de toutes les régions du pays, et Mme Inness est avocate de la défense en matière pénale et vient de Winnipeg.
Je lui céderai la parole, pour qu'elle puisse vous présenter les principaux points de notre mémoire.
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Monsieur le président, membres du comité, merci de cette occasion de vous présenter la perspective de la Section nationale du droit pénal de l'Association du Barreau canadien relativement au projet de loi
Nous savons que le comité a déjà entendu de nombreux exposés sur le projet de loi de la part de divers groupes ayant des domaines de compétences variés. Nous croyons que nous pouvons apporter au comité une perspective unique, c'est-à-dire axée sur l'incidence du projet de loi sur l'administration de la justice.
Les membres de notre organisation travaillent quotidiennement au sein du système de justice, y compris dans les tribunaux criminels. Nous vous avons remis à l'avance notre mémoire écrit, et j'aimerais aujourd'hui mettre en évidence nos principales préoccupations relativement au projet de loi.
D'emblée, j'aimerais signaler que l'ABC s'oppose à l'imposition de peines minimales obligatoires, car elles ne facilitent pas la réalisation de l'objectif de dissuasion; elles ne visent pas les délinquants les plus notoires, qui sont déjà assujettis à des peines très strictes; elles s'adressent plutôt aux délinquants moins coupables, qui sont alors assujettis à des peines d'emprisonnement d'une très longue durée; elles ont une incidence disproportionnée sur les groupes minoritaires, qui sont déjà désavantagés; elles vont à l'encontre d'importants aspects du régime d'imposition des peines, y compris les principes de proportionnalité et d'individualisation.
Notons que plusieurs des circonstances prévues dans le projet de loi qui déclenchent des peines minimales obligatoires sont déjà considérées comme des circonstances aggravantes dans la LRCDAS et dans le Code criminel, et doivent être prises en compte par le juge chargé d'imposer la peine. Certains des facteurs qui déclenchent une peine minimale obligatoire constituent déjà des infractions criminelles distinctes. Par exemple, proférer des menaces, faire partie d'une organisation criminelle, utiliser une arme à feu, et cetera. Certaines de ces infractions impliquent déjà des peines d'emprisonnement consécutives obligatoires, comme l'infraction relative à l'organisation criminelle, et impliquent déjà des peines minimales obligatoires, comme la possession d'une arme prohibée ou d'une arme à autorisation restreinte. On ne dit pas dans le projet de loi comment ces dispositions qui se chevauchent vont s'appliquer.
Il semble également y avoir dans le projet de loi une certaine ambigüité ou confusion relativement à l'interprétation du nouvel alinéa 5(2) du paragraphe 10(5), qui stipule que les peines minimales obligatoires ne seront pas appliquées lorsqu'un contrevenant termine avec succès un « programme judiciaire de traitement de la toxicomanie ». Le projet de loi sous sa forme actuelle permet aux personnes de participer à un « programme de traitement ». Cependant, on dit que la peine minimale obligatoire s'applique si une personne termine avec succès un « programme de traitement », mais pas si une personne termine avec succès un « programme judiciaire de traitement de la toxicomanie ». Il semble y avoir une certaine confusion au sujet de la distinction entre ces deux programmes, car ils doivent tous deux être surveillés par les tribunaux.
Nous nous inquiétons du fait qu'en vertu du projet de loi , une peine minimale obligatoire s'applique même lorsque les circonstances de l'infraction et les degrés de responsabilité sont très différents. Les pénalités établies dans le projet de loi sont également fondées sur des facteurs arbitraires qui ne tiennent pas suffisamment compte des différents niveaux de culpabilité. Voici quelques exemples.
Un jeune adulte qui fume de la marijuana à l'occasion et qui cultive dix plants pour son utilisation personnelle et celle de certains de ses amis devrait purger une PMO de six mois. Nous considérons que cette peine va à l'encontre du principe de proportionnalité et ne tient pas compte de l'importance de la réadaptation.
Une personne qui produit des petites quantités de résines de cannabis pour son utilisation personnelle et celle de ses amis devrait purger une PMO d'un an, et de 18 mois s'il a commis cette infraction dans une maison louée. Le projet de loi ne semble pas envisager le cas de figure où le propriétaire est conscient de cette production et complice de l'utilisation du bien immeuble dans cette infraction.
Le projet de loi impose également des niveaux d'incarcération de plus en plus élevés selon le nombre de plants qu'une personne cultive à des fins de trafic. Par exemple, en vertu du projet de loi, on impose une PMO de six mois pour 200 plants, mais de 12 mois pour 201 plants. Or, il va à l'encontre du sens commun et des principes de détermination de la peine bien établie d'imposer à une personne de purger deux fois la peine pour un plant de plus.
Si le projet de loi est adopté, nous estimons que son incidence sur l'administration de la justice sera considérable. Il réduira le nombre de plaidoyers de culpabilité, car les gens préféreront contester les accusations plutôt que de risquer des PMO en plaidant coupables. Le projet de loi retardera les audiences, augmentera le nombre de procès et, inévitablement, nécessitera des ressources supplémentaires pour les tribunaux. Compte tenu des peines d'emprisonnement importantes proposées dans le projet de loi , la Couronne devra être tenue de prouver hors de tout doute raisonnable les circonstances susceptibles d'entraîner l'imposition de PMO ainsi que la mens rea si elles constituent un élément de ladite circonstance, par exemple, la connaissance nécessaire du nombre de plants, ou du fait que l'offense a été commise dans une école, un lieu habituellement fréquenté par des personnes de moins de 18 ans, ou à proximité d'une école ou d'un tel lieu.
Nous aimerions signaler le manque de définition des expressions « près du terrain d'une école » et « lieu public normalement fréquenté par des personnes de moins de 18 ans ». Nous faisons valoir que la Couronne devrait être tenue de prouver non seulement la mens rea de l'infraction, mais également les circonstances aggravantes qui déclencheraient une peine minimale obligatoire.
Le projet de loi ne permet pas une détermination de la peine juste et équitable pour les personnes toxicomanes et ne tient pas compte du besoin de traitement et de réadaptation. Les personnes qui vendent de la marijuana, même de petites quantités, parce qu'ils sont toxicomanes, devront purger une peine minimale obligatoire. Bien que le projet de loi prévoit des exemptions au PMO lorsque les personnes participent à des programmes judiciaires de traitement de la toxicomanie, nous estimons que la participation à un tel programme ne devrait pas être restreinte comme elle l'est en vertu de l'alinéa (2) du paragraphe 10(5). Il devrait être offert à tous les contrevenants susceptibles d'être réadaptés. Nous souhaitons faire remarquer que les programmes judiciaires de traitement de la toxicomanie ne sont pas offerts partout au Canada et que la participation à ces programmes est limitée selon la capacité de chaque tribunal.
Le projet de loi enlève aux juges leur pouvoir discrétionnaire. La Section de l'ABC estime que les juges canadiens ont un rôle critique à jouer dans le fonctionnement du système de justice pénal. Le pouvoir discrétionnaire des juges, que le projet de loi aurait pour effet d'éliminer, permet d'obtenir le meilleur équilibre entre tous les objectifs fondamentaux de la détermination de la peine et d'imposer des peines individuelles qui correspondent à des cas précis. Les juges sont bien outillés pour tenir compte des circonstances particulières de l'infraction et de la situation du délinquant et ils sont bien placés pour déterminer la peine qui répondra aux besoins de la collectivité où l'acte criminel a été commis.
D'après mon expérience d'avocat de la défense, souvent, l'avocat de la Couronne exposera aux juges, par des faits et des déclarations, toutes les circonstances aggravantes. L'avocat de la défense fera la même chose avec les circonstances atténuantes et ne demandera pas forcément à la Couronne de prouver ces circonstances aggravantes. Le juge qui détermine la peine est alors le mieux placé pour tenir compte de ces facteurs et principes et déterminer la peine appropriée. Les procureurs attirent l'attention du juge sur les faits qui exigent des peines d'emprisonnement longues et, selon notre expérience, les récidivistes et les narcotrafiquants importants se voient déjà imposer de longues peines qui peuvent même dépasser les peines proposées dans le projet de loi .
Le pouvoir discrétionnaire accordé aux juges garantit que les distinctions nécessaires sont faites au cours du processus de détermination de la peine et que les différents degrés de culpabilité sont pris en compte. Les juges peuvent imposer des peines qui mettent l'accent sur la réadaptation, lorsqu'elle est réaliste, et de longues périodes d'incarcération pour ceux qui doivent être dissuadés. Il peut y avoir un examen en appel lorsqu'une peine manifestement inappropriée a été imposée ou lorsqu'il y a erreur de droit.
Le projet de loi s'oppose aux principes de détermination de la peine bien établis. Le Code criminel établit les objectifs et les principes de la détermination de la peine qui régissent ce processus. Les principes codifiés existants exigent qu'un juge tienne compte de toutes les considérations en cause. L'incarcération est la sanction de dernier recours, surtout pour les délinquants autochtones, qui sont déjà surreprésentés dans les établissements pénal. L'article 718 du Code criminel exige que l'incarcération ne soit imposée que lorsqu'elle est nécessaire. Les peines imposées doivent être proportionnelles à l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant.
Nous savons que l'on accorde déjà beaucoup de poids à la dissuasion et à la dénonciation lors des audiences qui découlent des infractions à la LRCDAS. Les juges se fondent sur l'article 718 du Code criminel et sur la LRCDAS pour déterminer si une peine d'emprisonnement doit être imposée et pour établir la durée de cette peine. Le pouvoir judiciaire discrétionnaire employé pour équilibrer les principes de détermination de la peine existants est le meilleur mécanisme pour garantir que les personnes reçoivent un traitement juste et équitable dans notre système de justice.
Pour résumer, nous sommes d'avis que les outils législatifs existants assurent déjà la sécurité du public et garantissent une détermination de la peine juste, proportionnelle et responsable pour les délinquants qui commettent des infractions liées aux drogues.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Et merci à nos témoins. Monsieur Doucette, vous avez fait des observations très intéressantes au sujet des tribunaux judiciaires de traitement de la toxicomanie. Monsieur Yost, je sais que vous allez vouloir couper les cheveux en quatre au sujet des incidences de ce projet de loi. Je laisserai mes amis se charger de cette question.
J'aimerais m'adresser à l'ABC. Je suis membre de l'ABC depuis 1984. Je n'essaie pas de vous intimider. Je sais que nous avons la Journée du droit.
Pour moi, c'est une question de sensibilisation et d'information du public, parce qu'à mon avis, après notre voyage dans l'Ouest — nous avons tenu des audiences dans l'Ouest du pays — beaucoup de ces choses découlent d'un manque de compréhension du système judiciaire. C'est peut-être en partie de notre faute à nous, les avocats, et à cause du fait que l'on n'explique pas au public que les avocats défendent leurs intérêts et ne représentent pas toujours toute la communauté des avocats.
Honnêtement, cette atteinte au pouvoir judiciaire discrétionnaire est peut-être le symptôme d'un manque de respect envers l'organisation judiciaire. Nous avons certainement observé ce phénomène dans l'Ouest, à certains endroits, un manque de respect envers le système. On entend des choses comme « un genre d'avocat de la défense ». Ici en comité, on ne dit pas des choses comme « un genre de policier » ou « un genre de juge » — peut-être le faisons-nous parfois, mais...
Des gens qui ne sont pas avocats diront peut-être que la section de l'ABC est composée d'avocats de la défense, de procureurs et de professeurs de droit. Cela fait un certain temps que je dis que l'on entend pas beaucoup de procureurs. Nous savons que ce sont les Canadian Defence Lawyers. Ce sont eux, les gars de la défense. Or, en trois ans et demi, nous n'avons presque jamais convoqué l'association des procureurs, s'ils en ont une. Ils sont censés être représentés par vous.
Madame Innes, vous êtes avocat de la défense. Vous avez brillamment présenté la position du barreau de la défense.
Madame Schellenberg, l'ABC est une association très vaste. Dans un système adversatif, vous ne pouvez pas représenter tous les points de vue, mais à mon avis, lorsque l'ABC présente des mémoires, elle a tendance à représenter en quelque sorte les avocats de la défense de la section. Si cela était précisé, alors tout le monde comprendrait qu'il s'agit en réalité de la position de la section des avocats de la défense de l'ABC.
J'aimerais avoir votre avis sur la question.
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Je suis convaincu que ces répercussions ne sont pas aussi vastes qu'une réunion ordinaire du caucus du Parti conservateur.
Des voix: Oh, oh!
M. Brian Murphy: « Vaste » serait un compliment.
Combien de temps nous reste-t-il? J'ai probablement utilisé du temps pour faire ce commentaire.
Le dernier aspect est le respect, ou la reddition de comptes. Appelons cela la responsabilité judiciaire. Il a été question de Darryl Plecas, qui a témoigné devant ce comité, et des statistiques, surtout en Colombie-Britannique, qui montrent que des peines légères sont imposées aux récidivistes. On a aussi parlé des entités à qui les juges sont comptables.
Il y a le Conseil canadien de la magistrature. L'ABC est aussi censée représenter le respect du système, ou l'apparence de respect du système. À votre avis, comment ces deux éléments permettent-ils de tenir les juges responsables, s'ils le sont, du moins?
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Merci, monsieur le président.
Je remercie aussi tous mes collègues de leurs bons voeux. Je vais d'abord poser une question à M. Yost, du ministère de la Justice.
Vous savez, monsieur Yost, combien j'adore interagir avec vous. C'est un plaisir dont j'aimerais ne plus jamais être privé.
En fin de compte, ma question est simple. Nous avons, bien sûr, des inquiétudes concernant la définition même du mot « trafic ». Or, pour dissiper toute ambiguïté, j'aimerais savoir à partir de quel moment le trafic impliquant la marijuana, par exemple, va faire l'objet d'une ordonnance de peine minimale obligatoire en vertu de ce projet de loi, dans sa forme actuelle.
Une des choses que je fais, une de mes responsabilités en tant qu'homme politique, c'est de parler à mes électeurs et de les sonder au sujet de la situation du monde politique, et dans ce cas précis, évidemment, les Canadiens ordinaires s'inquiètent tous de la prolifération des drogues. Je réfléchis sur ma place ici et sur le genre de loi que l'on peut proposer, et pas simplement les lois, mais aussi les traitements, etc.
Et ensuite je réfléchis sur le témoignage des associations du barreau, des représentants du lobby juridique, parce c'est de cela que vous faites partie. Les associations du secteur manufacturier viennent me voir. Elles font partie d'un groupe de pression — cela me rappelle mes débuts en tant qu'agent de police — et ils m'expliquent comment notre système juridique a commencé. Il est fondé sur la common law britannique et, pour simplifier, les lois doivent être écrites et appliquées de sorte que le citoyen moyen puisse non seulement les comprendre et les respecter, mais aussi les apprécier. Et je dois dire que la plupart des gens avec qui je parle considèrent que les infractions les plus graves sont celles qui nuisent à leurs enfants. En d'autres mots, vendre de la drogue dans les écoles ou vendre de la drogue à leurs enfants, quel que soit leur âge...
Vous pouvez en parler et me dire à quel point je me trompe — mais je ne crois pas que ces gens-là veuillent un système de tribunaux et un système de lois qui ne tiennent pas compte d'une infraction qu'ils estiment très grave.
Et je n'appelle pas cela attaquer les juges. Est-ce que faire appel, c'est attaquer les juges? Lorsqu'un avocat ou lorsque la Couronne en appelle d'une cause, il n'attaque pas le juge. Avec respect — et personne n'a plus de respect envers les lois et la magistrature que moi... Les juges n'ont pas d'autre pouvoir que leurs ordonnances. C'est là leur pouvoir. Je le respecte et le respecterai toujours, jusqu'à la fin de mes jours.
Après 30 ans de carrière et deux affectations en tant que gendarme de la cour, où j'ai pu voir le fonctionnement des tribunaux, je peux vous dire que les peines sont devenues de moins en moins sévères. Une pléthore d'études en font état. Peut-être que notre société change, peut-être que nous sommes moins efficaces.
Le dernier rapport de Statistique Canada montre que... Je sais que vous allez me répondre que les crimes liés aux drogues augmentent parce que la police inculpe davantage de gens. Peut-être que ce n'est pas une mauvaise chose. Peut-être que si.
Je vais essayer de faire des analogies. Il y a toutes sortes de gens qui sont venus ici l'autre jour nous dire que nous devrions légaliser absolument toutes les drogues — le crack, la cocaïne, tout — parce que notre système actuel ne fonctionne pas. Une femme a commencé à parler de la Colombie-Britannique où, comme en Ontario, il y a des magasins d'alcools où l'alcool est rangé dans des placards et vous écrivez votre commande. Dans ma tête, j'imaginais quelqu'un entrer et demander à acheter de la cocaïne. « Est-ce que vous voulez de la cocaïne extra-forte, de la légère? » Une personne ordinaire qui entend une idée comme celle-ci tomberait de sa chaise.
Je sais que nous vivons dans une société où il y a des divergences d'opinion, mais je vois l'Association du Barreau et je suis très inquiet parce que — malgré ce que certains pensent, j'ai beaucoup de respect pour la magistrature — si la magistrature et le droit deviennent si compliqués et que les arguments deviennent si...
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Ce sera peut-être plus un commentaire qu'une question. Dans mon autre vie, j'ai été avocat, procureur général, et bien d'autres choses encore. Et je crois qu'il s'agit bien en partie d'une façon de dénigrer les juges. Je vais vous expliquer pourquoi.
Que les législateurs changent les lois pour rendre obligatoires certaines peines, c'est une chose. Que les procureurs et les procureurs généraux fassent appel des peines imposées, c'est une chose, mais que des politiciens élus de partout au pays se lèvent de temps en temps pour dire que les juges sont coupés de la réalité, c'en est une autre. Ça, c'est bien une manière de dénigrer les juges. Il faut bien faire la distinction, parce que les juges font de leur mieux, forts de leur sagesse et de leur expérience, et en tant qu'ancien procureur général et avocat, je crois que ce qui arrive, c'est que personne ne se porte à la défense des juges.
Les juges vous diront, si vous leur demandez: « Allez-y, changez la loi. Dites-nous ce que vous voulez que nous fassions ». Mais ne dites pas que les juges sont coupés de la réalité, parce qu'ils font de leur mieux. C'est vrai: à part les avocats et l'Association du Barreau canadien et les autres barreaux du pays, très peu de gens défendent les juges. Selon notre système, qui est fondé sur le droit, les juges ne sont pas censés participer à l'arène politique. Par conséquent, nous devrions éviter de dire des choses comme « les juges sont coupés de la réalité ». Dites plutôt « les peines doivent être réexaminées », ou « la loi doit être changée ». La différence est très subtile. Cela me dérange, parce que si l'on veut que les juges participent à l'arène politique, alors nous aurons des juges élus, et c'est tout un autre débat.
Merci.
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Merci, et merci à nos témoins.
Au sujet du rapport de Statistique Canada dont on a parlé à cette réunion du comité, j'ai entendu plusieurs personnes dire que cela ne marchera pas d'avoir une approche plus sévère de la justice criminelle, des drogues, du trafic, de l'exploitation de cultures et de laboratoires de méthamphétamine. Bien sûr, nous avons également entendu la position inverse. Certains nous ont dit que c'est précisément l'approche que nous devrions adopter. M. Doucette a soulevé un bon argument qu'on ne devrait pas oublier en écoutant ceux qui veulent que l'on adopte une approche facile et indulgente. Il nous a rappelé que, même si les cigarettes sont vendues dans les dépanneurs, il existe quand même un trafic de cigarettes illicites et de cigarettes plus fortes. C'est absolument ridicule de penser que d'être encore plus laxiste en matière de drogues permettrait d'éliminer le commerce de drogues illicites.
Ce que le rapport de Statistique Canada me dit, c'est qu'un système de justice laxiste en matière de lutte contre la criminalité, un système de va-et-vient qui punit les propriétaires de laboratoires de méthamphétamine et les cultivateurs de marijuana en leur tapant sur les doigts, ça ne fonctionne pas. L'approche que nous avions jusqu'ici est un échec. Elle ne fonctionne pas. Il faut améliorer le système, et c'est exactement ce que permet de faire le projet de loi. Dans notre débat, nous nous sommes concentrés sur la possession, sur quelqu'un qui passe un joint à un de ses amis, et ce genre de choses. Or, l'objectif principal du projet de loi, c'est d'imposer des peines plus pertinentes à ceux qui exploitent ces cultures et laboratoires.
Monsieur Yost, pouvez-vous nous parler des aspects du projet de loi qui couvrent les laboratoires de métamphétamine et les cultures? En quoi ce projet de loi nous aidera-t-il à sévir contre ceux qui produisent des substances illégales? En quoi cela nous aidera-t-il à atteindre notre but principal, soit d'interrompre leurs activités criminelles? C'est en cela que consiste le projet de loi. Il s'agit d'interrompre les activités criminelles et de nous assurer que les gens qui s'attaquent aux Canadiens innocents ne puissent plus nuire.
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D'abord, en ce qui concerne la méthamphétamine, évidemment, il y a le fait d'inscrire cette substance à l'annexe III plutôt qu'à l'annexe I, ce qui augmente considérablement les pénalités. Cela figure à l'article 6. Les circonstances aggravantes portent sur le commerce — je crois que c'est la meilleure façon de le dire. J'emploie ce terme, car c'est de cela qu'il s'agit, et maintenant, ces circonstances déclenchent des peines minimales obligatoires. On parle dans le projet de loi d'une infraction au profit d'une organisation criminelle, de l'utilisation d'une arme et de la menace de recours à la violence.
Ensuite, d'autres dispositions portent davantage sur le problème social et sur les efforts déployés pour éloigner les jeunes des drogues. On parle de la proximité d'une école, également, et des personnes de moins de 18 ans. Ce sont les facteurs déclencheurs et, d'après ce que nous disent les gens qui travaillent sur le terrain, ces facteurs portent sur des questions très graves relativement à la façon dont les trafiquants de drogues organisent leurs activités, si je peux m'exprimer ainsi.
Encore une fois, certains ont parlé d'élimination du pouvoir judiciaire discrétionnaire. Ce n'est pas le cas, évidemment. Il s'agit ici d'établir une peine minimale. Le juge dispose toujours de son pouvoir discrétionnaire et l'on présume qu'il s'en servira, dans un cadre donné. Par exemple, selon le casier judiciaire d'une personne, le caractère violent de l'infraction, selon la présence de plus d'un facteur aggravant, le juge peut ordonner une peine allant de deux ans d'emprisonnement à l'emprisonnement à perpétuité. On peut présumer que le contrevenant purgera une peine supérieure au strict minimum. C'est un peu l'approche de ce projet de loi.