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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 052 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 7 décembre 2009

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Il s'agit de la 152e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous sommes aujourd'hui le lundi 7 décembre 2009.
    Vous avez entre les mains l'ordre du jour d'aujourd'hui. Nous étudions le projet de loi C-52, Loi modifiant la Code criminel (peines pour fraude).
    Nous avons divisé la séance d'aujourd'hui en deux portions. Tout d'abord, nous recevons des témoins de la GRC. C'est la troisième fois qu'ils essaient de comparaître au sujet de ce projet de loi. Nous nous excusons de tout inconvénient que nous avons pu leur causer.
    Je sais que vous vous êtes efforcés d'être ici à temps, mais en raison de circonstances imprévues, nous n'avons pas été en mesure d'entendre vos témoignages. Nous sommes impatients de le faire aujourd'hui, alors nous vous remercions d'être ici.
    Au cours de la deuxième heure, nous entendrons d'autres témoins au sujet de ce projet de loi C-52.
    S'il nous reste du temps à la fin de la séance, nous pourrons discuter de questions relatives aux travaux du comité que les députés pourraient soulever. Nous devons notamment étudié un budget de déplacement.
    Je tiens à souligner que cette séance est télévisée, je vous demanderais donc d'éteindre votre BlackBerry et de sortir de la salle pour répondre au téléphone.
    Merci.
    Et qui, parmi les représentants de la GRC, commencera?
    Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Merci d'avoir invité la GRC à participer au débat d'aujourd'hui. Je suis heureux d'être ici pour vous parler des efforts déployés par la GRC pour lutter contre la criminalité financière au Canada.
    La criminalité en col blanc sévit à la fois à l'échelle locale et à l'échelle mondiale et se présente sous diverses formes. Par exemple, il y a la fraude en marketing de masse et la fraude par carte de paiement ainsi que l'usurpation d'identité et la fraude d'identité. Il y a aussi la fraude sur les marchés financiers, ce qui comprend les combines à la Ponzi et le délit d'initié, de même que le blanchiment d'argent. Qu'elle soit de portée locale ou mondiale, la criminalité en col blanc a des effets dévastateurs tant sur les particuliers que sur les collectivités. Lorsque les entreprises et des particuliers sont victimes de fraude, cela donne lieu à une hausse du nombre de faillites personnelles et d'entreprises. La perte d'investissements, de domiciles et des économies de toute une vie peut entraîner de graves préjudices sociaux et ébranler la confiance des gens dans la société.
    Beaucoup de crimes financiers sont complexes et difficiles à déceler. Les enquêtes et les poursuites qui s'imposent sont coûteuses en temps et exigeantes en main-d'oeuvre. Par exemple, deux enquêtes récentes ont nécessité entre 50 000 et 70 000 heures-personnes ainsi que la collecte de millions de documents. Elles ont coûté plusieurs millions de dollars seulement en frais d'expertise judiciaire.
    Le fait est que bon nombre de ces enquêtes sont longues, complexes et coûteuses. Bien que l'environnement externe dans lequel les services de police exercent leurs activités continue de poser des difficultés, en tant qu'organisation nationale, la GRC a l'expérience et l'expertise nécessaires pour mener de telles enquêtes. Il est aussi important de souligner que l'application des dispositions relatives à la fraude prévue par le Code criminel du Canada, y compris la fraude sur les marchés financiers, est un mandat que la GRC partage avec tous les services de police au Canada.

[Français]

    De toute évidence, nos partenariats avec les organismes de réglementation et les divers organismes d'application de la loi, au Canada et à l'étranger, renforcent notre capacité à nous acquitter de la tâche. Les efforts que nous déployons pour lutter contre la criminalité des cols blancs résident dans les trois programmes de la Direction de la criminalité financière de la GRC, à savoir le Programme de délits commerciaux, les Programmes intégrés des produits de la criminalité et du blanchiment de l'argent et le Programme des équipes intégrées de la police des marchés financiers.
    J'aimerais maintenant parler de la façon dont chacun des programmes intervient dans la lutte contre la criminalité financière.

[Traduction]

    Le Programme des délits commerciaux de la GRC a pour mission de détecter et prévenir toute menace envers l’économie canadienne et d'aider à assurer l’intégrité des institutions canadiennes. Les enquêteurs des délits commerciaux se chargent principalement des cas de fraude, des infractions visant le gouvernement du Canada et des affaires relatives à la corruption d'agents publics, à la procédure d'insolvabilité ou à la contrefaçon de monnaie.
    La GRC compte 26 sections des délits commerciaux situées à des endroits stratégiques à l'échelle du pays. Ces sections sont dotées d'enquêteurs et d’employés chevronnés souvent appuyés dans leur travail par des experts dans différents domaines comme la juricomptabilité et le droit criminel.
(1535)

[Français]

    En ce qui concerne les tendances de la criminalité financière, la GRC constate une augmentation de la fréquence, de l'échelle et de la complexité des fraudes en marketing de masse et des vols d'identité. Les fraudes par cartes de paiement, légitimes ou contrefaites, ont également connu une hausse substantielle.

[Traduction]

    Ces dernières années, le Centre d'appel antifraude du Canada a documenté une progression du nombre total de cas signalés de fraude en marketing de masse dans presque toutes les provinces. Cette forme de fraude demeure aussi un important problème de criminalité transfrontalière entre le Canada et les États-Unis.
    Pour la combattre, la GRC a mis sur pied plusieurs équipes spécialisées. Les équipes du Projet Emptor, à Vancouver, et du Projet COLT, à Montréal, regroupent des partenaires des forces de l'ordre du Canada et des États-Unis, tandis que nos enquêteurs à Toronto font partie de l'Alliance stratégique de Toronto, constituée de divers organismes d'application de la loi du Grand Toronto.
    D'après le sondage Global Economic Crime Survey 2009 mené récemment par PricewaterhouseCoopers et publié la semaine dernière, 56 p. 100 des entreprises canadiennes sondées disent avoir été victimes d'un délit économique au cours des 12 derniers mois, ce qui représente une augmentation de 4 p. 100 par rapport à 2007. Sur ces entreprises, 24 p. 100 estiment les pertes directement attribuables aux fraudes à plus de 500 000 $. Environ 59 p. 100 ont indiqué que les fraudeurs étaient des personnes étrangères à l'entreprise.
    Pour la personne qui en est victime, le vol d'identité peut causer bien des ravages: non seulement des pertes financières, mais aussi des centaines d'heures passées à essayer de rétablir son identité et sa cote de solvabilité. En 2008, le Centre d'appel antifraude du Canada a reçu des plaintes de fraude d'identité de la part de plus de 11 000 victimes canadiennes, dont les pertes collectives dépassaient les 9,6 millions de dollars. Bien que ce chiffre indique une hausse de plus de 48 p. 100 par rapport aux pertes signalées l'année précédente, on estime que les plaintes déposées auprès du centre d'appel ne représentent que la pointe de l'iceberg.
    Une étude récente menée par l'Université McMaster a révélé que, en 2008, 1,7 million de victimes canadiennes de vol d'identité avaient consacré 20 millions d'heures et 150 millions de dollars à faire valoir leur innocence. Toujours selon cette étude, seulement 19 p. 100 des fraudes d'identité sont signalées à la police ou aux agences d'évaluation du crédit. Puisque la vaste majorité, soit environ 81 p. 100, des fraudes d'identité ne sont pas signalées, les pertes réelles sont sans doute astronomiques.
    Aussi la GRC travaille-t-elle, en consultation avec des intervenants clés et avec d'autres organismes d'application de la loi, à élaborer une stratégie de lutte contre la fraude d'identité qui misera sur la collecte et l'analyse de renseignements criminels, sur la prévention par l'éducation et la sensibilisation, sur la perturbation et la répression des activités de fraude d'identité ainsi que sur l'engagement de poursuites judiciaires connexes.

[Français]

    Nous dirigeons également la mise sur pied d'un groupe de travail international sur la fraude d'identité qui aura pour objectif de faire un survol des stratégies d'autres pays en la matière, de discuter des priorités communes et d'élaborer une stratégie de répression internationale.

[Traduction]

    En 2004, le Canada affichait le taux de contrefaçon de monnaie le plus élevé de tous les pays du G10. En 2005, la GRC a élaboré, en liaison avec la Banque du Canada, la Stratégie nationale de lutte contre la contrefaçon, qui vise à réprimer la contrefaçon en mettant l'accent sur trois activités clés à l'échelle nationale, à savoir l'application de la loi, l'engagement de poursuites judiciaires et la prévention. Grâce à des ressources existantes et nouvelles, la GRC a établi des équipes intégrées de lutte contre la contrefaçon à Toronto, Montréal et Vancouver.
    Je suis heureux d'annoncer que cette mesure a fait chuter de façon marquée les activités de contrefaçon au Canada. Selon les statistiques du Bureau national de lutte contre la contrefaçon, depuis 2004, la contrefaçon de monnaie a diminué d'environ 80 p. 100, passant de plus de 500 000 billets contrefaits en 2004 à seulement 107 000 en 2008. On prévoit des chiffres encore plus bas pour 2009.
    Quand on élimine l'aspect lucratif d'une activité criminelle, on supprime du même coup l'incitatif qui donne envie de la pratiquer. L'objectif principal de l'Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité consiste donc à dépister, à bloquer et à confisquer tous les gains illicites et non déclarés qui ont été accumulés au moyen d'activités criminelles. D'un bout à l'autre du pays, la GRC travaille en partenariat avec d'autres organismes gouvernementaux et policiers au sein de 13 unités mixtes des produits de la criminalité. Depuis 2003, ces unités ont obtenu la confiscation d'espèces et de biens totalisant plus de 64 millions de dollars, sans compter les actifs de l'ordre de 142 millions de dollars qu'elles ont saisis et dont la disposition n'a pas encore été déterminée.
(1540)

[Français]

    Le Programme contre le blanchiment d'argent de la GRC a pour mandat de mettre en oeuvre des mesures précises pour dépister et décourager les activités de blanchiment d'argent, ainsi que de faciliter les enquêtes. Il participe aux échanges de renseignements entre les partenaires qui collaborent à l'initiative, c'est à dire le CANAFE et l'Agence des services frontaliers du Canada. Il assure également l'analyse des renseignements sur le blanchiment d'argent et la surveillance des tendances nationales et internationales.

[Traduction]

    En 2003, des équipes intégrées de la police des marchés financiers, ou EIPMF, ont été créées à Toronto, Montréal, Vancouver et Calgary. Ces équipes sont composées d'enquêteurs de la GRC, d'avocats du Service des poursuites pénales du Canada, de juricomptables et, dans certains cas, de représentants d'organismes de réglementation des valeurs mobilières et de services de police locaux. Elles enquêtent sur les fraudes graves liées aux marchés financiers, visées par des dispositions du Code criminel et qui menacent la confiance des investisseurs ou la stabilité économique du Canada.
    En 2007, M. Nick Le Pan, ancien surintendant des institutions financières, a été nommé en tant qu'expert-conseil principal auprès de la GRC afin de formuler des recommandations sur l'amélioration des EIPMF et d'en guider la mise en oeuvre. Dans le rapport qu'il a présenté en octobre 2007, M. Le Pan a fait diverses recommandations centrées sur la nécessité de doter les EIPMF des outils et des ressources dont elles ont besoin pour réussir dans leur environnement de travail.
    Depuis le dépôt de ce rapport, la GRC a mis en oeuvre les recommandations de M. Le Pan. Aujourd'hui, le programme des EIPMF produit des résultats et fonctionne efficacement. Au cours de la dernière année, les EIPMF ont déposé des accusations criminelles dans le cadre de plusieurs enquêtes de grande envergure, et d'autres enquêtes se poursuivent.
    Comme je l'ai mentionné au tout début, la criminalité en col blanc est omniprésente et de plus en plus complexe. Cependant, nous avons l'expérience, l'expertise et les partenariats nécessaires pour obtenir des résultats. En tant que force de police nationale du Canada, la GRC continuera de jouer un rôle important dans la lutte contre la criminalité économique et dans la protection de l'intégrité économique du Canada.
    Merci. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur White.
    J'ai omis de présenter les deux personnes qui vous accompagnent, Stephen Foster et le surintendant Dean Buzza.
    Nous vous souhaitons la bienvenue.
    Je laisse la parole à Mme Jennings, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre exposé.
    Je l'ai écouté attentivement, en plus de l'avoir déjà lu. Or, nulle part dans votre allocution vous n'exprimez votre position à l'égard du projet de loi C-52, qu'elle soit positive, négative ou neutre.
    Que pense la GRC du projet de loi C-52?
    En gros, nous appuyons la mesure législative. Elle ne soulève aucune inquiétude majeure.
    Je crois que les peines obligatoires constituent un moyen dissuasif utile contre les activités criminelles. Les criminels en puissance sauront avec certitude que les activités frauduleuses de plus de un million de dollars seront passibles d'une peine minimale obligatoire.
    C'est pourquoi nous appuyons cette mesure législative.
    Merci.
    Ensuite, à la page 7 de votre exposé, lorsque vous avez parlé des EIPMF, les équipes intégrées de la police des marchés financiers, vous avez dit, et je cite la toute dernière phrase de ce paragraphe:
    Elles enquêtent sur les fraudes graves liées aux marchés financiers qui sont visées par des dispositions du Code criminel et qui menacent la confiance des investisseurs ou la stabilité économique du Canada.
    De quel type de fraudes liées aux marchés financiers parlez-vous exactement?
    Les fraudes qu'on rencontre le plus souvent sont celles qui font la une des journaux et qu'on connaît aujourd'hui comme les combines à la Ponzi. On constate ce qu'on appelle des stratagèmes « pump and dump », par lesquels les gens inondent d'actions le marché, attendent que les prix montent, puis encaissent les profits. On note aussi l'envoi de faux prospectus et la manipulation des états financiers d'entreprises.
    Ce sont les principaux types de fraudes qu'on rencontre.
    Merci beaucoup. Je présume que vous avez lu le projet de loi C-52 et que vous avez par conséquent remarqué que l'amendement proposant une peine minimale obligatoire ne s'applique pas à certaines fraudes connexes, comme la fraude influençant le marché, les manipulations frauduleuses d'opérations boursières, le délit d'initié ou l'infraction relative aux faux prospectus.
    Étant donné ce que vous venez de nous dire, ne pensez-vous pas que ces infractions, si elles dépassent le million de dollars, devraient être passibles d'une peine obligatoire minimale?
(1545)
    Oui. Je pense qu'il serait logique d'inclure ce type d'infraction si l'infraction en question constitue une activité frauduleuse majeure qui vaut plus d'un million de dollars.
    Merci.
    Ma prochaine question a trait au paragraphe qui suit à la page 6 de votre rapport. Vous y parlez de la reformulation des EIPMF. Vous donnez une brève description du fait que M. Nick Le Pan a été nommé conseiller principal expert pour la GRC dans le but de vous aider à « élaborer et orienter » la mise en oeuvre des recommandations visant à l'amélioration des EIPMF.
    Apparemment, l'un des problèmes décelés dans ses recommandations, c'est qu'il faut équiper les EIPMF des outils et des ressources nécessaires pour mener à bien leurs activités dans le contexte où elles s'exercent. Quels sont les outils et les ressources dont vous avez besoin et dont vous ne disposez pas en quantité suffisante à l'heure actuelle?
    Je présume que le projet de loi C-52 s'appliquera si nous arrivons en fait à convaincre le gouvernement d'apporter cet amendement afin que des crimes liés à la fraude sur les marchés de capitaux soient passibles de peines minimums obligatoires, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle. Vous avez besoin d'autres ressources et outils. De quoi avez-vous besoin exactement?
    Dans son rapport, M. Le Pan a formulé des recommandations dont bon nombre étaient en lien avec l'ajout de nouvelles ressources pour nous aider à accélérer certaines de nos enquêtes.
    Comme je l'ai dit un peu plus tôt, ces enquêtes sont longues et donnent lieu à beaucoup de formalités. Un certain nombre de recommandations avaient trait à l'ajout de ressources additionnelles pour des choses comme la transcription de documents et pour la gestion générale de dossiers majeurs.
    En outre, elles étaient en lien avec des ressources additionnelles pour nos unités de lutte contre le crime technologique. Dans le domaine des EIPMF et du crime financier, nombre de nos activités ont un aspect technique. On a réorganisé la structure de RH et des EIPMF pour nous aider à maintenir en poste nos employés aux fins du programme. Il existe une multitude de nouvelles ressources. J'emploie le terme « ressources », mais j'aimerais les considérer en même temps comme des outils.
    D'après votre description, vous avez manifestement besoin de fonds additionnels pour avoir ces nouvelles ressources. Ou allez-vous dire aux membres de ce comité — et il se peut fort bien que ce soit le cas — que le budget d'exploitation actuel des EIPMF est plus que suffisant pour couvrir le coût de ces nouvelles ressources?
    Si ce n'est pas le cas, votre budget a-t-il été augmenté? Quel est-il à l'heure actuelle? Quelle est l'ampleur de l'augmentation budgétaire dont vous avez besoin ou que vous avez reçue pour mettre en oeuvre ces recommandations au sujet des nouvelles ressources?
    Oui. Des fonds additionnels nous ont été versés au moment de la mise en oeuvre de ces recommandations.
    Ces fonds se chiffraient à combien?
    Nous avons reçu 10 millions de dollars additionnels.
    Très bien. Et ces sommes s'appliquaient à quelle période de temps? Sont-elles récurrentes?
    Si j'ai bien compris, il s'agit d'un financement continu. Oui.
    Très bien. Merci.
    Je n'ai pas d'autre question pour l'instant.
    Merci beaucoup de nous avoir fourni ces réponses. Elles étaient claires et très succinctes. Je vous en suis très reconnaissante.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Ménard. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Vous parlez dans votre mémoire, que j'ai lu, de la collaboration que vous avez avec des juricomptables. Pourriez-vous nous dire dans quel contexte travaillent les juricomptables? Travaillent-ils dans le contexte d'escouades comme celles que vous avez déjà au Canada ou est-ce que vous leur demandez plutôt des conseils occasionnels?
(1550)
    La plupart des juricomptables sont avec nous en permanence, avec les équipes actuelles.

[Traduction]

    Il y a définitivement un expert comptable judiciaire employé à temps plein dans chacune des EIPMF de Vancouver, Calgary, Montréal et Toronto. Si nous avons besoin de plus d'experts comptables judiciaires, nous allons obtenir l'aide d'autres experts comptables judiciaires.

[Français]

    Ces gens-là ont-ils une formation universitaire identique à celle des CA?

[Traduction]

    Oui. Si j'ai bien compris, ce sont tous des comptables généraux ou agréés, mais ils sont tous des comptables.

[Français]

    Sont-ils des membres civils de la GRC?

[Traduction]

    Non, la plupart d'entre eux nous proviennent d'un groupe d'experts comptables judiciaires à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada.

[Français]

    Ils sont au ministère des Travaux publics, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Quel avantage cette loi vous donne-t-elle dans la poursuite des fraudes actuelles?

[Traduction]

    Je ne peux pas m'exprimer au sujet des poursuites; je peux seulement vous parler des enquêtes. Pour ce qui est des poursuites, ce serait assurément le Service des poursuites pénales du Canada ou les procureurs provinciaux qui en parleraient, mais ce projet de loi vise les condamnations si j'ai bien compris, donc il n'aurait aucune incidence sur les enquêtes.
    Comme je l'ai dit au début, j'espère que ce genre de loi, du moins dans certains cas, constitue un élément dissuasif pour les individus qui cherchent à se lancer dans des activités frauduleuses majeures. Dans ce sens, le projet de loi présente des avantages potentiels pour les enquêteurs. Mais je ne peux pas vous parler des poursuites.

[Français]

    À part cette loi, les lois actuelles sont-elles suffisantes pour lutter contre les fraudes dont vous avez connaissance?

[Traduction]

    Je devrais dire oui. La loi actuelle n'ajoute aucune nouvelle infraction et les principales infractions auxquelles nous devons faire face, qu'elles soient commises sur les marchés de capitaux ou qu'il s'agisse d'un autre type de fraude, ont toujours trait aux dispositions liées à la fraude contenues dans le Code criminel du Canada qui, évidemment, vise une vaste gammes d'activités frauduleuses.

[Français]

    Les dispositions du Code criminel sur la complicité sont assez vastes. Dans le cas d'une grande fraude, accusez-vous toutes les personnes qui, peut-être, savaient que l'organisation pour laquelle elles travaillaient commettait une fraude?

[Traduction]

    Bien sûr, nous espérons disposer de preuves suffisantes à l'encontre de toute personne participant à des activités frauduleuses. Encore une fois, il est difficile d'aborder ces questions sans parler d'un dossier précis. Dans chacune de nos enquêtes, nous essayons, dans la mesure du possible, d'identifier le plus grand nombre d'individus s'adonnant à des activités frauduleuses et d'acquérir des preuves pour pouvoir en fin de compte accuser et poursuivre autant de personnes que possible. Je ne peux pas affirmer que nous avons été à même de le faire dans tous les cas; toutefois, c'est notre objectif.

[Français]

    Dans la mesure où ces personnes savent que l'entreprise est en train de frauder la population ou des gens, qu'il s'agisse d'un comptable, d'un président, d'une secrétaire ou d'une téléphoniste, et que vous obtenez la preuve de leur participation, vous êtes prêts à les poursuivre, n'est-ce pas?
(1555)

[Traduction]

    Si nous avons des preuves de leur participation, assurément nous... Il s'agit de l'élément clé de notre enquête maintenant, à savoir si oui ou non, l'individu sait que quelque chose se trame. Peut-être le sait-il. Peut-être n'a-t-il joué aucun rôle et n'a-t-il pas participé à l'activité criminelle, mais en raison de son rôle au sein de l'entreprise ou de l'organisation, il a peut-être appris que quelque chose se tramait. Dans ce cas, il deviendrait un témoin. Nous espérons évidemment que si cette personne est identifiée, elle nous serve de témoin ou qu'elle accepte de collaborer avec les forces de l'ordre lorsque cela lui est proposé.

[Français]

    Mais leur direz-vous qu'elles pourraient être accusées?

[Traduction]

    Encore une fois, cela dépend de leur participation potentielle ou réelle à des activités criminelles ou frauduleuses. Tout dépend des particularités de chaque affaire. Nous examinerions le dossier et les preuves avec les procureurs. Ils auraient assurément un rôle à jouer dans l'examen des preuves et contribueraient à déterminer si les preuves sont suffisantes pour pouvoir accuser l'individu en question au criminel.

[Français]

    Ces derniers temps, nous avons tous entendu parler dans les journaux de plusieurs fraudes qui dépassaient plusieurs millions de dollars. En fait, vous souvenez-vous d'une personne condamnée pour une fraude de plus d'un million de dollars qui aurait écopé d'une peine d'emprisonnement de moins de deux ans?

[Traduction]

    Je ne pense pas qu'il y ait eu une quelconque affaire récemment dans le cadre de laquelle le suspect principal serait soupçonné d'avoir commis une fraude de plus de 1 million de dollars et aurait reçu une peine de moins de deux ans.
    Je céderai la parole à mes collègues qui savent peut-être si cette situation s'est produite récemment.
    Steve.
    À ce que je sache, il y a eu quelques affaires dans le cadre desquelles la fraude dépassait 1 million de dollars et la peine imposée était inférieure à deux ans.
    Mais ces affaires ne sont pas courantes. Si je me rappelle bien, le ministre avait dit qu'elles étaient au nombre de 12, en fait.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Comartin. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'être venus ici aujourd'hui.
    J'ai du mal à me faire une idée de la fréquence et du volume concernés.
    Manifestement, l'étude de Pricewaterhouse était une étude internationale. Avez-vous effectué des analyses pour déterminer si la méthodologie employée était adéquate? Avons-nous un portrait juste de la situation? Il y a peu de données sur le Canada, mais avons-nous un portrait juste de la situation à l'échelle internationale?
    Je ne peux pas vous parler de leur méthodologie. Malheureusement, il n'existe pas beaucoup d'études qui mesurent précisément l'ampleur de la fraude. Je ne connais pas vraiment leur méthodologie et je ne pourrais pas vous répondre.
    Ils disent à plusieurs reprises que la fraude a lieu dans quatre domaines principaux. Est-ce également vrai au Canada?
    Pouvez-vous nous rappeler rapidement ces quatre facteurs?
    Bien sûr... mais j'ai perdu ma page.
    Il s'agissait de l'assurance, les services financiers, la technologie et... J'essaie de retrouver le quatrième domaine. Je crois qu'ils faisaient une distinction entre le secteur financier — les marchés boursiers, etc., — et le secteur banquier. Je crois que c'était le quatrième domaine.
    Savez-vous si c'est la même chose au Canada?
    Sans entrer dans trop de détails, je vous dirais qu'il existe différents types de crimes. Certains de ces crimes concernent les banques. D'autres, les institutions financières. Les crimes « technologiques » impliqueront des fraudes sur Internet, par exemple.
    Ce sont des domaines où l'on observe en effet une activité considérable, mais je ne sais pas si je serais d'accord pour les catégoriser comme elles le sont dans le rapport.
(1600)
    Y a-t-il un domaine qui serait prioritaire, aujourd'hui, disons entre 2007 et 2009? Je parle de la fréquence des crimes et de l'argent impliqué.
    En ce qui concerne la fraude, dans le domaine des crimes commerciaux, nous observons un nombre important d'activités frauduleuses avec les chèques contrefaits et les fraudes pour marketing de masse.
    Dans ce contexte, si le projet de loi est adopté, les contrevenants seront condamnés à la peine minimale obligatoire si la fraude est de plus de 1 million de dollars. Je sais que les membres du comité s'interrogent là-dessus également. J'aimerais savoir combien de cas il existe. Au cours de la fin de semaine, le bureau du ministre nous en a envoyé quelques-uns.
    Savez-vous si ce chiffre est approprié? Devrait-il être moins élevé? Je ne vous demande pas tellement votre avis. J'aimerais savoir s'il existe des preuves qui nous permettraient de choisir un chiffre approprié?
    Je ne crois pas qu'on ait des preuves claires qui indiqueraient le montant approprié. Je crois que l'on peut dire que beaucoup d'activités frauduleuses, collectivement, dépasseraient le million de dollars.
    Comme le surintendant Foster l'a dit au sujet de la fraude pour marketing de masse, par exemple, ces activités sont disséminées partout au pays. Dans beaucoup de petites villes et collectivités au Canada, il n'y aura peut-être que quelques victimes d'une activité criminelle en particulier, mais si vous multipliez le nombre de victimes par le nombre de petites collectivités au Canada, vous verrez que l'organisation criminelle a touché beaucoup de gens et collectivement, il y aurait beaucoup plus d'un million de dollars en jeu.
    Je ne peux pas vous dire combien de cas nous avons vus récemment qui impliquaient une fraude d'un peu plus d'un million de dollars, mais je vous dirais qu'en effet, il y en a beaucoup.
    Dans vos déclarations et à l'écrit, vous avez dit tous les deux que le nombre d'incidents sur lesquels vous enquêtez a augmenté. Pouvez-vous nous dire si à votre avis, cette augmentation est liée à l'augmentation du nombre de policiers qui travaillent sur le terrain, ou si elle découle réellement d'une augmentation de la fréquence des cas?
    Je vous dirais que c'est un peu des deux, mais il y a sans conteste davantage de cas de fraude. Avec l'amélioration de la technologie, c'est très facile et très lucratif aujourd'hui de mener des activités frauduleuses. Prenez les fraudes de marketing de masse, par exemple. Auparavant, une vaste fraude de télémarketing exigeait plusieurs personnes, mais aujourd'hui, une seule personne assise devant son ordinateur peut en très peu de temps frauder des centaines de milliers de personnes.
    La GRC a-t-elle des recommandations en matière de prévention? Y a-t-il des outils technologiques que nous pourrions déployer pour éviter ce genre de fraude? Existe-t-il des règlements, en vertu de nos lois sur la protection du consommateur, par exemple, qui pourraient nous aider à prévenir ce genre de situation?
    Il est évident que le projet de loi — sauf pour la partie qui porte sur l'interdiction — est une façon de reconnaître notre échec, et de s'attaquer aux sanctions. Est-ce que la GRC a des recommandations en ce qui concerne la prévention?
    Je crois qu'en ce qui concerne les outils nécessaires, nous avons largement ce dont nous avons besoin. Actuellement, nous essayons d'insister sur l'éducation et la prévention. L'application de la loi coûte très cher. Mieux nous pouvons éduquer et sensibiliser la population pour éviter ces crimes, mieux les Canadiens se porteront.
    Je vais vous parler d'une chose que nous faisons en ce moment. Étant donné que beaucoup des victimes ciblées sont dispersées à travers le pays et que dans une région donnée, il peut n'y avoir que quelques victimes, à l'échelle locale, on ne dirait pas qu'il y a des activités criminelles importantes. Cependant, si vous reportez ce phénomène à l'échelle du pays, plutôt que d'avoir une dizaine de victimes dans le Nord de la Colombie-Britannique, vous en avez plutôt plusieurs milliers au pays, et tout ça à cause d'une seule organisation. Nous essayons vraiment d'obtenir tous les renseignements en temps réel, autant que possible, et de rassembler toute l'information pour pouvoir déterminer très rapidement, aux premières étapes si c'est une fraude à petite échelle ou une large fraude qui implique beaucoup de victimes au pays. Le plus rapidement nous arrivons à voir ce qu'il en est, le plus rapidement nous pouvons en avertir les Canadiens, éviter la fraude, éduquer la population et l'informer de ce type d'activité afin que, lorsqu'elle atteint leur collectivité ou que les gens reçoivent des appels téléphoniques ou des messages par Internet, ils sauront ce que signifient ces appels et ces messages. C'est vraiment la clé de la prévention, et c'est un défi.
(1605)
    Merci.
    Passons à M. Woodworth, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'être venus aujourd'hui. Je voudrais m'excuser de nouveau des problèmes que nous avons eus pour vous faire comparaître. Nous vous remercions de votre patience.
    J'aimerais revenir sur un élément de votre exposé, surintendant White.
    On entend souvent dire que la criminalité diminue au Canada et si la criminalité diminue, pourquoi le gouvernement essaie-t-il donc de rafistoler notre système de justice?
    Je n'ai jamais compris cette logique. Si seulement 1 000 personnes sont victimes de fraude au lieu de 2 000, le gouvernement devrait quand même essayer d'améliorer notre système de justice.
    Votre témoignage aujourd'hui est très important et je vais en répéter quelques parties. En ce qui concerne les tendances de la criminalité financière, vous dites que la GRC constate une augmentation de la fréquence et de la complexité des fraudes en marketing de masse et des vols d'identité. Les fraudes par carte de paiement légitime ou contrefaite ont également connu une hausse substantielle. Vous dites que l'on observe une augmentation du nombre de combines à la Ponzi. Ces dernières années, le Centre d'appel antifraude du Canada a documenté une progression du nombre total de cas signalés de fraudes en marketing de masse dans presque toutes les provinces.
    Je suis heureux que nous ayons pu entendre votre témoignage. Cela nous permet d'étayer l'approche de notre gouvernement qui consiste, à mon avis, à apporter les changements nécessaires à la loi en ce qui a trait à la détermination de la peine et à la fraude.
    Outre cela, comme vous le savez, surintendant White, notre comité entreprend actuellement une étude sur le crime organisé. Si je ne m'abuse, vous avez comparu au comité dans ce contexte. Pouvez-vous me dire comment les criminels organisés sont impliqués dans le type de fraudes dont je viens de parler? Quelle part jouent les groupes criminels organisés au niveaux de la fraude en marketing de masse, du vol d'identité, de la fraude par carte de paiement ou de la contrefaçon de carte de paiement?
    Je ne peux pas vous le dire exactement. J'imagine que je peux dire, cependant avec certitude qu'en effet, le crime organisé est impliqué dans ce genre d'activité. Nous n'avons pas encore étudié dans quelle mesure, exactement.
    Je crois que cela revient à ce que je disais plus tôt. Les crimes en col blanc, aujourd'hui, peuvent être effectués beaucoup plus rapidement et beaucoup plus facilement que par le passé et ils sont très lucratifs. Compte tenu de ces deux éléments combinés, j'imagine que les groupes criminels organisés vont largement se tourner vers ce genre d'activité.
    Est-ce que nous avons vu certains groupes criminels organisés impliqués dans ce type d'activité? Oui, certainement.
    Du point de vue d'un profane, il semble que certaines de ces combines soient si sophistiquées que, par définition ou par nature, elles exigent énormément d'organisation. Pour ce qui est de cette tendance, du moins, je ne serais pas étonné.
    L'autre chose qui m'intéresse, c'est ce que vous avez dit, c'est-à-dire que ces crimes sont très lucratifs. Évidemment, lorsqu'on parle de fraude, nous savons qu'il s'agit de faire rapidement de l'argent et parfois il semble que les responsables de ces activités voient tout simplement la peine comme le prix à payer pour leur travail.
    Ce sont des infractions non violentes. Les auteurs sont naturellement doués pour charmer les gens. Par conséquent, lorsqu'ils arrivent au tribunal, il n'est pas surprenant qu'ils arrivent à faire une prestation très convaincante et à justifier une peine d'emprisonnement avec sursis, ou une peine réduite. Donc, nous réfléchissons à l'idée selon laquelle une fraude d'un million de dollars représente un crime grave, qui engendrera automatiquement une peine de deux ans, qu'il y ait, ou non d'autres facteurs aggravants.
    Nous voulons rétablir la confiance des gens dans le système de justice. Nous voulons que les gens sachent qu'un contrevenant n'a aucune chance de recevoir une peine de moins de deux ans pour ce type de crime. Nous pensons que cela permettrait d'améliorer grandement la confiance du public en notre système de justice.
    Je me demande si vous pouvez nous donner votre avis là-dessus. Êtes-vous d'accord? Avez-vous une idée de la façon dont les victimes de ces crimes vont réagir à cette peine minimale obligatoire?
(1610)
    J'imagine que leur réaction sera positive. La peine minimale obligatoire peut être une bonne mesure dissuasive pour les auteurs de crimes. En outre, les victimes s'attendent à ce que les conséquences minimales pour des activités frauduleuses de cette ampleur soient cohérentes. De ce point de vue, si l'on parle d'une activité d'un million de dollars ou plus, je pense que c'est une mesure significative qui sera, je crois, bien accueillie par les victimes.
    Ce sera intéressant de voir si certaines des fraudes en marketing de masse engendrent des peines minimales obligatoires, du moins pour ceux qui organisent les fraudes. Je pense que le public, sachant que nous adoptons une peine minimale obligatoire, aura davantage confiance au travail de la loi.
    Ma dernière question découle d'une de vos observations. Vous avez dit que lorsqu'on élimine l'aspect lucratif d'une activité criminelle, on supprime l'incitatif qui donne envie d'exercer cette activité. Vous avez parlé d'une Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité qui consiste à dépister et à confisquer tous les gains illicites et non déclarés qui ont été accumulés au moyen d'activités criminelles. Vous avez signalé que depuis 2003, vous aviez confisqué plus de 64 millions de dollars en espèces et en biens, outre les 142 millions de dollars saisis dont la disposition n'a pas encore été déterminée.
    Vous connaissez les dispositions en matière de restitution de la nouvelle loi, en vertu desquelles les juges sont tenus d'envisager des ordonnances de restitution et d'expliquer leur décision, s'ils décident de ne pas délivrer d'ordonnance. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure cette disposition soutient l'Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité , dont vous avez parlé?
    Brièvement.
    Brièvement, je crois que nous arriverons mieux à dépister et à confisquer les gains illicites. En vertu du régime actuel, les gains confisqués sont remis au gouvernement. Je ne sais pas trop comment ce mécanisme de restitution fonctionnera. Mais en ce qui concerne les produits de la criminalité, plus on peut les dépister, les bloquer et les confisquer, mieux c'est. Il faudra étudier en détail la façon dont cela pourrait être intégré à un régime d'aide aux victimes.
    Merci.
    Monsieur Murphy.
    Merci, monsieur le président.
    Je signale à nos témoins que la plupart de mes questions portent sur les équipes intégrées de la police des marchés financiers, ou EIPMF.
    Vous avez couvert beaucoup de terrain dans votre déclaration et je crois qu'il faut revenir sur le travail qu'ont effectué les EIPMF depuis 2003. Plus précisément, puisque nous essayons de déterminer si les délits commerciaux ont augmenté — et je crois que c'est le cas — il serait utile que vous nous décriviez davantage le rôle des EIPMF.
    Je crois comprendre qu'elles ont été créées en 2003 à Toronto, Montréal, Vancouver et Calgary. Avez-vous l'intention d'en créer d'autres ailleurs? Ces équipes coopèrent-elles efficacement avec les services des poursuites, les experts comptables judiciaires et les conseillers financiers? Avez-vous des statistiques sur le nombre de délits repérés et traduits en justice par les EIPMF? Ce projet de loi a-t-il une incidence sur les EIPMF? Avez-vous suffisamment de ressources pour faire votre travail?
    Quelles étaient les recommandations de Nick Le Pan? Il a déposé un rapport en 2007, je crois. Il parle d'outils et de ressources. Vous dites que vous essayez de satisfaire à ces besoins. Y arrivez-vous? Je me demande si les outils qu'il avait demandés dans son rapport de 2007 se retrouvent dans le projet de loi C-52. J'imagine que le rapport parlait davantage de ressources, d'éliminer les barrières entre le secteur financier, les unités des délits commerciaux et les services des poursuites, et d'encourager la coopération et le partage d'information électronique.
    Nous sommes tout à fait favorables aux EIPMF. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'elles ont fait depuis 2003 et ce que vous voudriez faire à l'avenir?
(1615)
    Certainement. Je suis très heureux de le faire.
    Je vais vous faire un historique en 30 secondes. Les équipes ont été créées en 2003. Il y avait beaucoup de défis à relever, comme c'est le cas chaque fois qu'une nouvelle unité est créée. Il faut trouver les membres du personnel, trouver les locaux, créer des équipes d'enquête et les rendre opérationnelles. Même si le concept est né en 2003, il y a eu une période de transition, qui a pris un certain temps.
    Nous savons que les EIPMF ont fait l'objet de critiques ces dernières années, relativement à la durée de leurs enquêtes, mais à mon avis, du point de vue de l'application de la loi, la progression de ces enquêtes est conforme à toute autre enquête importante de la police.
    Donc, depuis 2005-2006, les équipes sont vraiment opérationnelles et ont commencé leur étape d'enquête. Elles ont réalisé un grand nombre de ce type d'enquêtes. Comme je l'ai dit plus tôt, la majorité des enquêtes durent plusieurs années, souvent deux ou trois ans. En 2009, pour beaucoup, l'étape de l'enquête était terminée et nous avons pu porter des accusations criminelles.
    Ces dernières années, dans les quatre villes du Canada, sur les 18 enquêtes d'envergure en cours, neuf ont été conclues et ont mené à des accusations criminelles et les procès sont en cours. Nous espérons pouvoir conclure plusieurs autres enquêtes très prochainement et nous en avons plusieurs autres en cours.
    Je crois que les résultats récents montrent que les EIPMF seront efficaces et qu'elles portent fruit, comme je l'ai dit, dans plusieurs enquêtes d'envergure.
    En ce qui concerne Nick Le Pan, je crois qu'il a fait un peu plus de 30 recommandations au total donc il y en avait beaucoup. Beaucoup portaient, comme je l'ai dit plus tôt, sur les nouvelles ressources nécessaires pour les nouvelles composantes, les composantes des enquêtes qui exigent beaucoup de ressources. Ce que nous ne voulions pas faire, par exemple, c'est de la gestion de cas, de la transcription, obtenir la communication des faits importants, etc., pour les enquêtes. Nous ne voulions pas que nos enquêteurs policiers de première ligne se retrouvent dans un bureau à faire ce genre de travail, c'est pourquoi le personnel de soutien supplémentaire a joué un rôle crucial. Nous avons ajouté du personnel de soutien, ce qui a libéré nos enquêteurs, qui ont pu se concentrer sur les enquêtes d'envergure.
    C'est un sujet très vaste dont je pourrais vous parler longtemps. Je pourrais vous en dire beaucoup plus, mais je sais que le temps est limité.
    Merci.
    Monsieur Lemay, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre troisième visite. La troisième aura été la bonne, et très intéressante, soit dit en passant.
    Je vais continuer dans le sens de ce que M. Murphy posait comme question. J'aimerais savoir si les équipes intégrées de la police des marchés financiers sont uniquement destinées à suivre l'évolution des marchés, la fraude qui se commettrait à l'égard des marchés à Vancouver, à Toronto ou à Montréal. Est-ce bien ce dont on parle, ou bien si leur mandat est plus large que cela?
(1620)

[Traduction]

    Elles sont chargées de toutes les enquêtes sur les fraudes liées au marché financier, donc cela pourrait concerner les bourses situées dans ces villes. Beaucoup des activités de ce genre peuvent se produire principalement dans ces quatre villes, c'est pourquoi nous avons créé ces équipes à ces endroits-là. Si une fraude liée aux marchés financiers a lieu ailleurs au Canada, nous avons ce que l'on appelle une capacité d'intervention rapide qui nous permet d'envoyer plusieurs membres de notre équipe du quartier général d'Ottawa, sans doute quelques enquêteurs des équipes existantes sur le terrain et de démarrer l'enquête en question.
    Encore une fois, cet exercice se ferait en partenariat avec nos unités des délits commerciaux, qui sont situées dans 26 endroits différents du Canada. Même si les EIPMF sont les équipes principales chargées de ce genre d'enquête, nos unités des délits commerciaux s'occupent également de plusieurs enquêtes liées aux marchés financiers.

[Français]

    Merci.
    Concernant le blanchiment d'argent, on en voit beaucoup actuellement dans le crime organisé. Certains prennent le contrôle d'entreprises pour blanchir des sommes d'argent, et bien souvent, ces entreprises sont légales.
    Ce programme fonctionne-t-il bien actuellement? De plus, êtes-vous capables de suivre la trace de l'argent, non seulement au Québec en particulier, mais aussi au Canada et également à l'extérieur du Canada, à savoir dans certains paradis fiscaux? Êtes-vous actuellement en mesure de suivre la trace de l'argent?

[Traduction]

    En bref, oui, nous pouvons suivre la trace de l'argent. Évidemment, le nombre de cas dont nous pouvons nous occuper est limité, compte tenu des ressources dont nous disposons. Cependant, vous mettez le doigt sur une composante clé du blanchiment d'argent, qui consiste à créer une entreprise légale et à intégrer vos gains illicites dans les revenus licites de votre entreprise. C'est une façon très courante de blanchir de l'argent. En effet, beaucoup des fonds sont blanchis à l'étranger avant de revenir au Canada.
    Encore une fois, le succès que l'on pourrait avoir à suivre l'argent à l'extérieur du Canada dépend des partenariats dont nous disposons avec les autres pays. À l'échelle internationale, nous avons des partenariats assez bien établis pour ce genre de travail. Lorsque nous en avons l'occasion, nous réussissons très bien à suivre la trace de l'argent à l'extérieur du Canada.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Passons à M. Petit.

[Français]

    J'ai une question pour vous. Un peu plus tôt, au début de votre présentation, vous avez parlé de peines minimales. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que je viens du Québec, où l'affaire Lacroix est devenue très importante.
    Lacroix était un courtier qui avait une compagnie qui avait été vendue légalement par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Il avait tous les permis du Québec et il a quand même, grâce à un système bien particulier, fraudé 9 200 personnes. Earl Jones, quant à lui, n'avait pas de permis, mais il faisait affaire avec une banque dans laquelle il avait des comptes en fiducie. Ils ont, semble-t-il, travaillé sur la fiducie. Le troisième cas est celui de M. Lafleur, qui était lié aux commandites. Il avait des biens qu'on a réussi à retrouver à Belize, où il demeurait dans une grosse résidence. Ensuite, nous avons eu le cas de M. Coffin qui a été condamné à moins de deux ans de prison alors qu'il avait réalisé des fraudes de plus d'un million de dollars. Il a remis un million de dollars au gouvernement, mais il n'est pas allé en prison.
    Je voudrais savoir à quoi servent les peines minimales. Comme vous le voyez, dans tout ce que je mentionne, il y a des questions légales et de grosses sommes d'argent en jeu. Pensez-vous qu'une peine minimale de deux ans deviendrait importante? Comment ferez-vous pour suivre la trace des biens? Dans le cas de Lafleur, on sait où sont ses biens, mais on a de la difficulté à aller les chercher. Comment agiriez-vous dans ce cas?
(1625)

[Traduction]

    D'abord, comme je l'ai dit plus tôt, la peine minimale obligatoire de deux ans aura sans doute, dans certains cas, un effet dissuasif important sur certaines personnes. Pour d'autres, qui sont réellement impliquées dans des fraudes à grande échelle, ils commettront sans doute la fraude, qu'il y ait des peines minimales ou non. Je crois fermement que dans plusieurs cas, cette mesure peut avoir un effet dissuasif. Comme je l'ai dit, le suivi de l'argent à l'extérieur du Canada dépend de nos partenariats et de la coopération avec les gouvernements étrangers. Ça n'est plus notre champ d'application. Nous n'avons pas autorité à l'étranger.
    Nous disposons de plusieurs mécanismes pour nous aider dans nos enquêtes. Par exemple, la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle est un mécanisme en vertu duquel nous réalisons la majorité de notre travail d'enquête bilatérale auprès des pays étrangers. Encore une fois, cela dépend toujours des pays. Cela dépend du type de cas. Il n'existe pas deux enquêtes à l'étranger semblables.
    Je le répète, sans vous parler d'enquêtes précises, je peux vous dire que je crois que nous réussissons assez bien à localiser l'argent. Cela dépend de l'engagement du pays étranger à coopérer avec nous et à travailler étroitement avec nous.
    Merci.
    Avant de vous laisser partir, j'aimerais avoir des précisions sur la question de Mme Jennings au sujet des dispositions du Code criminel relatives à toute la question de la manipulation des marchés boursiers et des délits d'initiés. Je crois qu'il s'agit du paragraphe 380(2).
    Je crois comprendre que le paragraphe 380(1) porte en réalité sur la fraude, de façon générale. Si certains éléments de l'infraction figurent au paragraphe 380(2), soit les dispositions sur les marchés financiers, le paragraphe 380(1) s'applique quand même. Dans le cas de cette infraction, la peine minimale obligatoire s'appliquerait également.
    Est-ce que c'est votre avis?
    Oui, ça n'est pas clair. Il faudrait préciser si c'est seulement l'article 380, ou plutôt...
    Pour l'instant, je présume que c'est seulement l'article 380...
    Cela couvre le paragraphe 380(1).
    ... la disposition générale sur la fraude.
    Mais je présume qu'à des fins de cohérence dans l'application, pour toute fraude de plus de 1 million de dollars, cela vaudrait la peine de l'envisager.
    Et je présume que lorsque vous inculpez un contrevenant, vous invoqueriez non seulement les dispositions sur les marchés financiers, mais aussi les dispositions générales. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact. Dans presque tous les cas, il y aurait également une accusation en vertu de l'article 380. Cela couvrirait les deux paragraphes.
    Très bien. Je vous remercie de cette précision.
    Je vous remercie tous les trois de votre témoignage. Il nous a été très utile et il nous aidera considérablement lors de l'examen article par article de ce projet de loi.
    Merci.

(1635)
    Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne reprend ses travaux.
     Nous accueillons à présent plusieurs autres témoins au sujet du projet de loi C-52. Je vais les nommer aux fins du procès-verbal.
    D'abord, au nom du gouvernement du Nouveau-Brunswick, le procureur général et ministre de la Justice, l'honorable Michael B. Murphy.
    Bienvenue parmi nous.
    Nous recevons également l'Association du Barreau canadien, représentée par Susan Costom et Gaylene Schellenberg.
    Bon retour parmi nous.
    Du ministère des Finances, nous accueillons David Murchison, Manuel Dussault et Joan Monohan.
    Bienvenue à nous trois.
    Par vidéoconférence de Toronto, M. Al Rosen représente la Accountability Research Corporation.
    Bienvenue à vous également.
    Commençons par l'honorable Michael Murphy.
    Chaque groupe dispose de 10 minutes pour faire son exposé. Ensuite, les membres du comité vous poseront des questions.
    Monsieur Murphy, s'il vous plaît.
    Je suis heureux de pouvoir parler en faveur du projet de loi C-52 et de fournir au comité de l'information relativement à position de notre gouvernement.
    Avant de parler du projet de loi C-52, j'aimerais vous parler de la position de notre gouvernement sur ces questions et de ce qui nous amène ici aujourd'hui.

[Français]

    À titre de procureur général du Nouveau-Brunswick, il est de mon devoir d'appuyer les efforts déployés pour accroître l'efficacité du système de justice pénale et de promouvoir les réformes qui inspirent un bon seuil de confiance dans ce système. Je crois fermement que tous les citoyens respectueux des lois ont le droit de vivre dans une collectivité sûre et sécuritaire. Ils doivent pouvoir compter sur un système de justice pénale qui les protège contre les préjudices et la crainte des préjudices. Il est essentiel de maintenir la confiance du public dans notre système judiciaire. Les gens doivent être acquis à l'idée que le système protège les citoyens contre les préjudices, et leur permet de vivre sans crainte d'être victimes d'un crime. Ils doivent avoir confiance et croire que le système s'occupera, comme il se doit, des contrevenants à la loi.

[Traduction]

    Depuis que je suis devenu procureur général en juin dernier — après trois merveilleuses années à titre de ministre de la Santé — j'ai appuyé nombreuses des mesures présentées par le ministre de la Justice Nicholson ici à Ottawa. Notre système de justice pénale doit prévoir des conséquences importantes et proportionnelles pour les contrevenants. Des crimes violents très graves sont commis, mais aussi des crimes très graves qui ne sont pas de nature violente et qui perturbent complètement certaines vies. Souvent ces crimes sont commis contre les personnes les plus vulnérables.
    À ce jour, le Nouveau-Brunswick a appuyé le projet de loi C-25 qui élimine le compte double du temps passé en détention provisoire. Nous croyons qu'il n'y a plus de justification pour compter le temps passé en détention provisoire comme double.
    Nous avons appuyé le projet de loi C-15, qui prévoit des peines minimales obligatoires pour la production ou le trafic de drogues, parce que cela sert à protéger les plus vulnérables, nos enfants et ceux qui utilisent les drogues. J'ai vu ces situations de près en tant que ministre de la Santé. C'est une situation très triste partout au pays.
    Bien sûr, nous sommes également satisfaits du projet de loi C-36, à propos de la clause de la dernière chance, et du progrès parcouru vers l'adoption.
    Le Nouveau-Brunswick tente de rendre ses collectivités plus sûres. La semaines dernière, nous avons décidé d'appuyer le défenseur des enfants et de la jeunesse dans le cadre de sa demande qu'il y ait une loi au Nouveau-Brunswick pour la protection des consommateurs. Cela découle d'un rapport disant qu'il devrait y avoir une loi protégeant la vie privée des enfants au XXIe siècle. Nous collaborons avec eux au sein d'un groupe de travail qui comprend le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse et le ministère de la Justice. Un député de l'opposition participe également à ce groupe de travail, car nous ne croyons pas — et je suis certain que les membres de votre comité seront d'accord — que cela soit une question partisane d'une quelconque façon.
    Le groupe de travail proposera un projet de loi au printemps de 2010. Nous espérons le déposer au Parlement à l'automne prochain. Nous croyons qu'il complétera le projet de loi C-58, qui, comme vous le savez, est la loi fédérale qui exigera des fournisseurs d'accès à Internet qu'ils fassent rapport de la pornographie juvénile.
(1640)

[Français]

    Pour cette raison, j’ai demandé à des fonctionnaires de mon ministère de former un groupe de travail avec des représentants du Bureau de l'ombudsman et du défenseur des enfants et de la jeunesse pour étudier les modifications possibles aux dispositions législatives provinciales qui permettraient d'atteindre ces objectifs. Le groupe de travail me présentera un rapport au printemps 2010.

[Traduction]

    En ce qui concerne le projet de loi étudié aujourd'hui, le projet de loi C-52, nous sommes ravis qu'il s'attaque aux criminels en col blanc, parce que les crimes qu'ils commettent le sont souvent aux dépens des économies des plus vulnérables. Les victimes sont souvent des personnes âgées, qui ne sont pas toujours en mesure de voir les signaux d'alarme, et nous savons une chose: toutes les victimes sont des gens qui ont travaillé toute leur vie pour faire ces économies. Il s'agit peut-être de 15 000 $, 50 000 $, 300 000 $ ou peut-être 1 million de dollars, mais c'est tout ce que ces gens ont, et je veux donc présenter trois points concernant le projet de loi C-52.
    Premièrement, la Commission des valeurs mobilières du Nouveau-Brunswick, a pris des mesures pour protéger les investisseurs contre les pratiques injustes, inopportunes et frauduleuses, et je suis sûr que le projet de loi C-52 complétera le travail de la Commission des valeurs mobilières du Nouveau-Brunswick en prévoyant une peine minimale de deux ans pour une fraude ou une série de fraudes qui totalisent plus de 1 million de dollars. Cela enverra un message très clair à ceux qui croient qu'ils peuvent commettre de tels crimes.
    Toutefois, sur ce premier point, j'aimerais dire que bien que l'on prévoie des facteurs aggravants additionnels qui puissent être utilisés lors de la détermination de la peine, j'exhorte le comité à songer à un chiffre de moins de 1 million de dollars, et je vais vous donner un exemple. Il est clair que 20 000 $, 30 000 $ ou 50 000 $ signifie tout pour une personne qui a travaillé toute sa vie. Cette somme économisée, une personne qui atteint l'âge de 65 ans planifie l'utiliser frugalement jusqu'à 85 ans pour joindre les deux bouts. Si la personne perd cet argent à cause d'une fraude, c'est aussi dévastateur pour elle que la perte de plusieurs centaines de milliers de dollars ou d'un million de dollars.
    Le deuxième point que je voulais soulever à propos du projet de loi, c'est qu'il demandera aux juges d'envisager la restitution. Au Nouveau-Brunswick, nous avons une unité provinciale de produits de la criminalité qui a connu beaucoup de succès, mais nous allons aussi déposer un régime civil de confiscation en janvier qui complétera le projet de loi C-52 et notre unité des produits de la criminalité. Le régime civil de confiscation permettra au ministère de la Justice, par l'entremise de ses avocats, de poursuivre les gens qui ont utilisé leurs biens — que ce soit leur bureau à domicile, leur ordinateur, leur petit immeuble à bureau, leur grand immeuble à bureau, ou autre — principalement comme outil criminel. Nous pourrons saisir ces biens.
    Nous avons vu trop souvent, au Canada et au Nouveau-Brunswick, des gens qui avaient reçu une peine de six mois, ou d'un an et demi, ou même de deux ans et demi, et qui retournent dans leurs très grandes maisons ou leurs édifices à bureaux qu'ils avaient utilisés pour perpétrer les crimes. Le régime civil de confiscation sera semblable au régime civil de confiscation qui a été déclaré valide par la Cour suprême du Canada. Les régimes civils de confiscation de l'Ontario et de la Colombie-Britannique ont connu beaucoup de succès; 99 p. 100 du temps les accusés laissent tomber parce qu'ils ne veulent pas signer un affidavit stipulant qu'ils reçoivent 20 000 $ en revenus et qu'ils ont un million de dollars en biens. Je pense qu'on avait donné au régime de l'Ontario trois ans pour être autosuffisant, et le régime y est arrivé en 18 mois. Comme vous le savez, c'est selon la prépondérance des probabilités, ce qui est un peu plus facile dans ce cas qu'un fardeau « au-delà de tout doute raisonnable ».
(1645)

[Français]

    Enfin, je tiens à souligner qu’il est primordial de pouvoir compter sur des ressources adéquates pour fournir l’expertise nécessaire dans les domaines complexes des enquêtes et de la détection, en vue de connaître du succès dans la lutte contre la fraude en matière de valeurs mobilières. Les administrations canadiennes ont indiqué que l'aide du gouvernement fédéral était essentielle afin d’accroître leur capacité en matière de détection et d’application de la loi, et je souscris à leur propos. Une probabilité de détection accrue serait un très important moyen de dissuasion des actes criminels.

[Traduction]

    Eh bien, 10 minutes ce n'est pas beaucoup. C'est le temps qu'il faut généralement à l'un des Murphys seulement pour s'éclaircir la voix.
    Évidemment, 1 million de dollars n'est pas un chiffre magique. Je crois que le projet de loi C-52 est un très bon projet de loi, et je félicite le gouvernement de l'avoir présenté. Mais il ne faut pas oublier que 30 crimes commis contre des gens qui ont perdu en moyenne 30 000 $ peuvent faire autant de mal à cette famille ou ces familles qu'une balle aurait pu le faire.
    Nous examinons depuis longtemps le droit des accusés. Nous prenons en compte et nous respectons la Charte, et nous respectons les principes du Code criminel du Canada, mais rien ne nous empêche d'inclure dans les lois fédérales et provinciales, les droits des victimes. Je crois que toutes les lois — fédérale et provinciale — devraient les inclure.

[Français]

    C'est parce qu'on veut remettre les pendules à l'heure.

[Traduction]

    Il faut ramener le balancier pour que tous les citoyens sachent que ces lois sont conçues pour les protéger grâce à des mesures dissuasives et des punitions, et la restitution. Le projet de loi C-52 peut s'occuper en partie de l'aspect restitution, mais cet aspect peut être considérablement amélioré par des régimes civils de confiscation qui sont présentés dans toutes les provinces.
    Je demande au comité à songer à un chiffre de moins de 1 million de dollars. La peine minimale de deux ans me va, mais ce n'est pas un chiffre magique. De très nombreuses personnes peuvent vous raconter comment leur vie et celle de leur famille ont été ruinées par des pertes de 30 000, 40 000 ou 100 000 $.
    Je conclurai par ce qui suit. Un homme s'est présenté à mon bureau il y a deux mois, et il avait été victime d'une fraude d'une somme beaucoup moins importante que 1 million de dollars. Il était gêné. Il avait 75 ans. Il pleurait. Il ne savait pas quoi faire, et tout ce que je pouvais lui dire, c'est que la Commission des valeurs mobilières allait faire enquête sur les pratiques frauduleuses et que les procureurs allaient s'occuper du dossier et examiner la loi. J'aurais voulu dire à cette personne qu'il y avait une peine minimale de deux ans pour un tel crime, mais je ne pouvais pas. J'aurais voulu lui dire qu'il y aurait une peine minimale de deux ans pour la somme qu'on lui avait prise frauduleusement, ce qui avait causé autant de dommages à sa famille que si une balle en avait tué l'un des membres.
    Parfois il faut voir le visage de la victime et connaître son histoire avant de pouvoir mesurer la gravité d'un crime. Le Code criminel du Canada s'occupe des crimes violents, mais les conséquences des crimes en col blanc contre les plus vulnérables peuvent être aussi dévastatrices qu'un crime violent.
    Merci.
(1650)
    Merci beaucoup.
    En passant, nous allons recevoir des victimes lors de notre prochaine séance, mercredi.
    Nous allons passer à l'Association du Barreau canadien.
    Madame Schellenberg, allez-vous faire l'exposé?
    Merci d'avoir invité l'Association du Barreau canadien à présenter son point de vue sur le projet de loi C-52. Je m'appelle Gaylene Schellenberg, et je suis une avocate de la section de la législation et de la réforme du droit de l'ABC. L'ABC est une association nationale comprenant plus de 37 000 membres, dont des étudiants en droit, des avocats, des notaires et des professeurs de droit. Un aspect important de notre travail consiste à l'amélioration du droit et de l'administration de la justice. C'est de ce point de vue que nous nous adressons à vous aujourd'hui.
    Je suis accompagnée de Suzanne Costom, une membre de l'exécutif de la section nationale du droit pénal de l'ABC. La section représente des procureurs de la Couronne et des avocats de la défense de toutes les régions du pays. Mme Costom est une avocate de la défense de Montréal qui pratique également lors de certaines poursuites.
    Je vais lui céder la parole pour qu'elle présente la substance de notre mémoire.
    Comme Gaylene vient de le faire, je veux remercier le président et le comité de permettre à l'Association du Barreau canadien de faire connaître son point de vue sur le projet de loi C-52.
    Je débuterai en disant que l'Association du Barreau canadien comprend très bien et appuie la logique et les préoccupations sous-jacentes à ce projet de loi. L'Association du Barreau canadien appuie évidemment tout ce qui pourrait dissuader des criminels en col blanc de faire d'autres victimes.
    En tant que Montréalaise, j'ai eu l'expérience récente d'entendre dans le hall d'entrée de l'édifice où je travaille un homme dire à un autre près des ascenseurs qu'il avait été une victime de Earl Jones. Il avait absolument tout perdu. Il croyait pouvoir prendre sa retraite, mais sa situation n'était plus très bonne. Je peux vous dire, en tant que membre de ce comité et à titre individuel, qu'entendre de telles choses nous brisent le coeur.
    L'Association du Barreau canadien appuie évidemment également la notion de réparation pour les victimes. Il serait phénoménal que notre système de justice pénale puisse offrir aux victimes une restitution.
    Nous apprécions les lois qui s'adaptent aux caractéristiques de chaque victime et qui permettent à chaque victime d'être entendue de façon différente, selon la nature du crime et du contrevenant. Ce sont là de bonnes préoccupations, que nous voyons également dans ce projet de loi.
    Cela dit, vous avez reçu notre mémoire, vous ne serez donc pas surpris de m'entendre dire que l'Association du Barreau canadien ne croit pas que ce projet de loi devrait être adopté. Je vais vous expliquer pourquoi. Ce n'est pas parce que nous ne comprenons pas les préoccupations à l'origine de la rédaction du projet de loi. C'est parce que nous croyons que les outils sont déjà présents dans le Code criminel.
    Le projet de loi ne fait que rendre encore plus complexe un système de justice pénale déjà très complexe, et nous croyons que cela présente un risque pour l'administration de la justice et son efficacité à une époque où nos ressources sont telles que nous devons essayer d'améliorer l'efficacité de la justice et non pas la diminuer.
    Une autre chose qui ne surprendra pas ceux qui ont déjà entendu les témoignages de l'Association du Barreau canadien par le passé, c'est que nous n'appuyons pas les lois qui lieraient les mains des juges. En tant qu'avocats, qu'avocats de la défense, que procureurs de la Couronne et que professeurs de droit qui siègent au comité, nous faisons énormément confiance aux juges qui rendent la justice quotidiennement dans les divers tribunaux du pays. La proportionnalité et la personnalisation des peines est la marque du système pénal canadien. Lorsque nous imposons des peines minimales obligatoires comme celles proposées dans ce projet de loi, nous nous éloignons par définition de ces principes, et c'est quelque chose qu'a toujours rejeté l'Association du Barreau canadien.
    Permettez-moi d'être plus précise et pratique en ce qui concerne les problèmes que pose ce projet de loi à l'administration de la justice. Une expression nous a frappés, celle dans l'article 2 qui créerait une nouvelle peine minimale obligatoire de deux ans d’emprisonnement pour une fraude quand la valeur totale de l’objet des infractions en cause est supérieure à 1 million de dollars. Nous nous inquiétons de l'étendue et de la portée de ce qu'est l'objet des infractions, et aussi de la capacité même de vraiment le définir.
    Je sais que vous le savez déjà, mais je vous rappellerai quand même que la Cour suprême du Canada a dit depuis 1978, dans l'affaire Olan, qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait une perte économique pour qu'il y ait fraude. Alors il pourrait y avoir une situation où l'objet des infractions est de 1 million de dollars, sans qu'il y ait eu de perte économique pour une personne ou une collectivité. Étant donné les motivations ayant mené à la rédaction de ce projet de loi, il nous semble que nous nous éloignons fortement de son objectif.
    Encore une fois, étant donné que l'objet des infractions constitue l'élément déclencheur, et étant donné l'importance que prendra cet élément, surtout pour les accusés qui pourraient être soumis à une peine minimale obligatoire de deux ans d'emprisonnement, nous prévoyons, dans le cadre de l'efficacité de la justice, que les audiences de détermination de la peine deviendront beaucoup plus compliquées et complexes.
(1655)
    Il n'y aura plus d'acception de ce que sera l’objet des infractions en cause. Chacune des victimes devra être présente aux audiences de détermination de la peine pour que les procureurs de la Couronne puissent prouver quel était le montant exact de la fraude, qu'il s'agisse d'un risque possible, d'une perte éventuelle ou d'une perte réelle.
    Vous répondrez peut-être que le Code criminel prévoit déjà qu'une fraude atteignant 1 million de dollars constitue un facteur aggravant, ce qui est vrai. Une telle disposition existe déjà dans le code. Dans les faits toutefois, je peux vous assurer que la disposition servait à faire comprendre aux procureurs, aux avocats de la défense et aux juges que plus le montant de la fraude était élevée, plus la peine serait lourde.
    En optant pour un seuil de 1 million de dollars, les législateurs soulignaient clairement le caractère aggravant du montant. Cela signifiait de manière concrète que si la fraude totalisait 900 000 $ ou 1,1 million de dollars, elle était jugée considérable et devenait un facteur aggravant, mais il n'importait pas nécessairement de préciser le montant. Mais, du fait qu'un coupable pourra s'attendre à une peine d'incarcération de deux ans si la fraude atteint le seuil de 1 million de dollars, dorénavant, il faudra qu'on quantifie de façon très précise les sommes en cause. Par conséquent, nous craignons que cela ne nuise à l'efficacité de la justice en créant toutes sortes de blocages.
    Entre parenthèses, en dépit du fait que nous sommes carrément contre ces peines minimales obligatoires ou contre l'élément déclencheur de 1 million de dollars, j'estime que si le projet de loi est adopté tel quel, le comité devrait au moins envisager d'y ajouter l'obligation pour le procureur d'aviser l'accusé que la valeur totale de l’objet de l'infraction en cause est estimé à plus de 1 million de dollars et qu'on demandera donc la peine minimale obligatoire. Cette disposition me paraît conforme aux principes fondamentaux de la justice et susceptible de rendre la loi plus équitable. C'est pourquoi nous vous demandons d'envisager son adoption.
    Pour ce qui est de l'administration d'autres questions ayant trait à la justice réparatrice, bien que nous soyons favorables au dédommagement, nous sommes préoccupés par le fait que des mécanismes en ce sens sont déjà inscrits dans le Code criminel. Ainsi par exemple, il est connu qu'une telle option figure déjà dans les dispositions de détermination de la peine du Code criminel. En tant qu'avocate de la défense, je suis bien placée pour vous dire que lorsque nos clients peuvent faire des restitutions, nous l'acceptons, car nous savons que les juges verront cela d'un très bon oeil et que la peine imposée en sera allégée.
    Croyez-le ou non, mais parmi les criminalistes de l'Association du Barreau canadien, ce sont les procureurs de la Couronne qui se sont montrés préoccupés par l'option du dédommagement, craignant que les victimes les voient dorénavant comme leurs propres avocats plutôt que comme les défenseurs de l'intérêt public. Ils pensaient en effet que les victimes allaient se tourner vers eux en s'attendant à ce qu'ils s'occupent de leur obtenir le dédommagement en question. Le projet de loi insiste certainement plus qu'avant sur le dédommagement, en précisant que le tribunal « est tenu de s'enquérir auprès du poursuivant » et que le poursuivant « est tenu de s'enquérir auprès de la victime ». En fait, cette pratique est courante, mais le fait qu'on l'ait explicité dans un texte législatif fait craindre à nos procureurs de se retrouver dans une position plutôt épineuse.
    Fort de mon expérience quotidienne du système de justice pénale, je suis aussi en mesure de vous dire que lorsque les victimes de crime et de fraude déposent une plainte à la police, les agents leur répondent fréquemment que s'ils cherchent à recouvrer leur argent, ils se trompent d'adresse car tel n'est pas le but du système de justice pénale. Encore une fois, si le comité est préoccupé par cela, entre autres choses, c'est qu'on craint qu'en raison de l'importance accordée au dédommagement et de la quasi-présomption de dédommagement ainsi créée, qu'on en vienne à voir le système de justice pénale comme une espèce d'agence de recouvrement.
    Ma dernière remarque, qui découle de ce qui précède, porte sur le titre abrégé du projet de loi. Le comité de la justice pénale de l'Association du Barreau canadien a remarqué qu'on a cessé de privilégier des titres abrégés neutres dans les projets de loi pour leur préférer des titres comme celui-ci, où il est question du « châtiment » au nom des victimes de crimes. Nous estimons respectueusement qu'il y aurait peut-être lieu d'envisager de revenir à des titres abrégés plus neutres.
    Je vous remercie de votre attention.
(1700)
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre les représentants du ministère des Finances, M. Murchison, M. Dussault et Mme Monahan.
    Madame, messieurs, je vous en prie, la parole est à vous.
    Nous vous avons fourni trois documents: une déclaration, un bref exposé sur les services d'exécution actuels et le rapport d'un groupe d'experts. Je pourrais peut-être lire quelques extraits de la déclaration plutôt que les textes en entier. Ainsi, mes propos seront relativement brefs.
    Je dirai d'abord que la présence à mes côtés de trois personnes illustre bien le fait que notre travail n'a pas grand rapport avec le Code criminel, tout au moins dans ma division. Toutefois, cela va peut-être changer.
    D'entrée de jeu, je dirai que renforcer l'intégrité des marchés financiers du Canada est une priorité absolue pour le gouvernement et le ministère des Finances. Il s'agit d'un point crucial si l'on veut à la fois protéger les investisseurs et promouvoir la vigueur des marchés financiers. Tel sera notre point de vue sur la question.
    Il est bien connu que l'intégrité des marchés financiers nécessite une réglementation efficace, une saine gouvernance et une application rigoureuse de la loi. Dans cette optique, il importe de faire une distinction entre les mesures qui visent à améliorer l'exécution des procédures pénales et celles qui sont destinées à améliorer l'application de la réglementation.
    Vous venez d'entendre les représentants de la GRC, qui abordent la question par rapport au droit pénal.
    L'application de la réglementation est pour sa part exécutée à l'heure actuelle par les 13 organismes provinciaux et territoriaux de réglementation des valeurs mobilières, soutenus par un certain nombre d'organismes d'autoréglementation. Je parlerai brièvement de l'esprit réglementaire, pour souligner le fait que le gouvernement prend des mesures de poids à cet égard. La principale initiative à mentionner a trait à la mise sur pied d'un organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières, en collaboration avec les provinces et les territoires souhaitant participer à cette initiative.
    Le rapport final publié en janvier 2009 par le Groupe d'experts sur la réglementation des valeurs mobilières au Canada déclarait qu'un organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières contribuerait à l'amélioration des activités d'exécution de la manière suivante:

[Français]

en regroupant dans un même organisme les ressources et compétences en matière d'exécution de 13 provinces et territoires; en éliminant les fonctions faisant double emploi et les chevauchements inutiles; en assurant une plus grande uniformité au chapitre de la protection des investisseurs à l'échelle du pays, et en garantissant une meilleure coopération avec les autorités canadiennes et internationales d'exécution des lois criminelles.

[Traduction]

    Avant de conclure, j'aimerais soulever quelques autres points.
    Le Bureau de transition canadien en valeurs mobilières, dont la création a été annoncée en juin dernier, assure l'orientation et la gestion de la transition vers un organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières. Conformément au mandat que lui a confié le gouvernement, le bureau de transition travaille à faire en sorte que l'organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières dispose des pouvoirs juridiques et de la structure organisationnelle qu'il lui faut pour assurer le respect du régime de réglementation des valeurs mobilières.
    Le bureau de transition élabore actuellement la Loi canadienne sur les valeurs mobilières, qui devrait être prête au printemps de 2010, ainsi qu'un plan de transition, en consultation avec le comité consultatif des provinces et des territoires participants. Le comité consultatif est composé de représentants de chacune des 10 administrations publiques provinciales et territoriales participantes. Les travaux du bureau de transition devraient aboutir à l'établissement de cet organisme en 2012.
    Voilà qui conclut ma déclaration préliminaire, monsieur le président.
    Je vous remercie. Je vous remercie aussi d'avoir su être bref.
    Nous allons entendre un dernier témoin. Nous accueillons donc M. Al Rosen, qui se joint à nous depuis Toronto par téléconférence.
    Monsieur Rosen, vous disposez d'un maximum de 10 minutes pour faire votre exposé.
(1705)
    J'ai participé aux enquêtes sur nombre des fraudes à grande échelle perpétrées au Canada. Si vous en parcouriez la liste, vous constateriez que nous sommes intervenus dans à peu près les deux tiers d'entre elles.
    Je ne suis pas indifférent aux observations du ministre du Nouveau-Brunswick, mais je pense qu'il faut faire preuve de réalisme quant aux mesures qui devront être prises pour prévenir bon nombre des combines à la Ponzi et des opérations pyramidales, entre autres.
    J'ai un document à distribuer. Pour tout vous dire, j'aborde la question sous deux angles. Premièrement, Accountability Research représente la recherche menée pour les investisseurs, lesquels sont abonnés à notre bulletin, et ainsi de suite. Deuxièmement, j'ai témoigné devant les tribunaux à plus d'une centaine de reprises dans le cadre de différentes affaires, et je peux vous dire que les propos tenus par les trois intervenants précédents ne reflètent pas la réalité canadienne.
    Permettez-moi de vous donner un peu de contexte. Si on se reporte aux combines à la Ponzi des années 1910 et 1920, et si on suit l'évolution du marché boursier au cours des années 1920 jusqu'au crash boursier de 1929, on constate que les États-Unis ont réagi en adoptant des mesures législatives plutôt intéressantes et strictes à l'époque, soit en 1933, en 1934, et en 1935. Toutefois, si l'on compare avec ce que le Canada a fait au cours des 80 dernières années, ça se résume à peu — c'est le moins qu'on puisse dire.
    Permettez-moi de vous expliquer brièvement ce qui, selon moi, doit absolument être mis en oeuvre si nous voulons protéger le Canadien moyen.
    Tout d'abord, il faut créer un organisme indépendant, l'équivalent canadien de la SEC. Ce doit obligatoirement être plus qu'un organisme national de réglementation, afin qu'il puisse entamer des poursuites, lancer des enquêtes, et ainsi de suite. Nous n'avons rien de ce genre au Canada pour l'instant, il ne faut pas se le cacher. Je ne mâche pas mes mots.
    Il y a environ deux ou trois ans, nous avons envoyé d'importants dossiers un peu partout au Canada afin de mettre en lumière les problèmes. Nous avons obtenu très peu de réactions. Même si c'était à nos frais, nous n'avons pas baissé les bras. J'écris depuis plus d'une dizaine d'années, surtout dans le magazine Canadian Business, mais j'ai également rédigé des dizaines d'autres articles. J'ai donc participé à ces affaires, et je vois les choses sous un angle bien différent des témoins de cet après-midi.
    Les Normes internationales d'information financière, ou IFRS, forment un parfait exemple du problème que nous avons au Canada. Celles-ci ont été adoptées au Canada sans que les assemblées législatives ne puissent en débattre. Ces mesures ont été présentées par les vérificateurs du Canada.
    Je suis abasourdi que cela soit rendu si loin. Et pourtant, malgré tous les documens rédigés à cet égard et les allocutions prononcées à ce sujet, nous y voilà. Les IFRS comportent de nombreuses lacunes qui vont rendre la réglementation des valeurs mobilières au Canada à peu près impossible, parce que la gestion a le choix. Ces règles ont été rédigées pour un autre pays que le Canada. Nous les avons adoptées même si les États-Unis ont adopté une approche bien à eux, ce qui force les entreprises américaines à avoir recours aux méthodes de comptabilité et de reddition de comptes canadiennes.
    Nous avons rencontré de nombreux problèmes au fil des années. J'ai publié une longue liste des cas canadiens où des poursuites n'ont pas été intentées — souvent au civil — et où les dédommagements sont à peu près nuls. Je pense qu'il faut recueillir des données suffisantes — et elles sont disponibles — avant d'en conclure que le Canada est sûr.
    Maintenant, l'absence d'un organisme indépendant pour évaluer certaines des mesures législatives adoptées — le projet de loi 198 en Ontario, par exemple, ou les IFRS — a des répercussions dévastatrices. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi.
(1710)
    En décembre 1996, la Cour suprême du Canada a été saisie de l'affaire Hercules Management. L'Institut canadien des comptables agréés et les grands cabinets de vérificateurs qui faisaient l'objet de poursuites dans cette affaire ont invoqué comme arguments que les états financiers annuels vérifiés ne devaient pas servir à la prise de décisions en matière d'investissements.
    Alors, on se dit: « Un instant. Cela va à l'encontre des lois sur les compagnies et des lois sur les valeurs mobilières. À quoi bon publier des états financiers, alors? »
    La Cour suprême a tranché en leur faveur. J'ai tout de suite pensé que toutes les provinces du pays proposeraient alors des mesures législatives pour corriger la situation; or, ce ne fut pas le cas.
    Ce n'est là qu'un des nombreux problèmes. Toutefois, contrairement au reste du monde ou presque, le Canada a permis aux vérificateurs d'établir eux-mêmes les règles en matière de comptabilité et de vérification. Ils ont déclaré qu'ils n'agissaient pas au nom des actionnaires. La notion de vérificateurs des actionnaires n'existe plus.
    On se retrouve donc avec un certain nombre d'affaires... et je pourrais vous en montrer des pages et des pages. Si on se contente d'examiner la dernière décennie, notons Bre-X, Nortel et bien des centaines de fiducies de revenus qui ne représentaient pas des problèmes fiscaux avant tout, mais des combines à la Ponzi. Or, il y a eu très peu de poursuites judiciaires dans ces cas. Il y a eu le papier commercial adossé à des actifs, et maintenant les IFRS.
    Nous ne nous attaquons pas véritablement à ce qui fait perdre de l'argent aux Canadiens. Dans ce cas, comment peut-on envisager la déréglementation, ce qui se produit avec les IFRS? Les États-Unis ont rejeté cette option, et nous sommes pourtant leurs voisins. Si nous voulons véritablement protéger les investisseurs partout au Canada, il nous faut refondre l'ensemble du système, et ne pas nous contenter de le retoucher par l'entremise d'un petit projet de loi.
    Permettez-moi d'aborder certains des aspects les plus importants.
    L'arrêt Hercules a porté un coup terrible — et je pèse mes mots — aux avocats des plaignants partout au Canada, parce qu'ils ne vont plus entamer ce genre de poursuite judiciaire dans les cas où on trouve un directeur, un dirigeant, un vérificateur, un défendeur. Si vous voulez que je cite des noms, ce ne sont pas les exemples qui manquent.
    Les coûts des recours collectifs constituent également un problème important. Le projet de loi 198, en Ontario, ainsi que les changements apportés à la Loi sur les valeurs mobilières les ont fait grimper à 5, 10, et même 40 millions de dollars. On a tout simplement perdu contact avec la réalité.
    Toronto est aux prises avec une affaire où des montants importants sont en jeu. C'est également le cas à Montréal, avec l'affaire Castor Holdings. Cela traîne depuis 20 ans.
    Nous avons perdu le respect de la communauté internationale.
    Voilà ce que j'avais à dire. J'imagine que ce n'est pas ce que vous vouliez entendre, mais c'est la réalité. Il faut cesser de faire l'autruche et voir les choses en face.
    Merci, monsieur Rosen.
    Il vous reste une minute. Avez-vous terminé?
    Ça va.
    Vous avez terminé? D'accord.
    Je pensais que vous vous apprêtiez à m'arrêter.
    Non, non.
    Nous passons maintenant aux questions.
    Je pense que c'est M. Murphy — l'autre M. Murphy — qui commencera.
    Me voici, l'autre M. Murphy.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Rosen, je pense que nous comprenons tous ce que vous nous dites. Vous illustrez que nous travaillons un peu en vase clos. Il s'agit du comité de la justice, mais nombre des points que vous avez soulevés devraient probablement être étudiés par le comité de l'industrie. Vient le moment où il faut abattre ces murs et adopter des normes internationales.
    J'en sais long sur les affaires Hercules Management et Castor Holdings. En ce qui concerne l'arrête Hercules, s'il y avait eu action dérivée, je pense qu'une certaine forme de dédommagement aurait été possible. Il n'en demeure pas moins que vous avez raison, nous n'avons pas réussi à moderniser la réglementation des valeurs mobilières.
    J'aimerais maintenant m'adresser aux représentants de l'Association du Barreau canadien, que je remercie d'être ici. Nous avons débattu des peines minimales obligatoires. Nous pourrions en discuter — cela fait trois ou quatre ans que le débat fait rage —, mais ce n'est pas vraiment l'essentiel du projet de loi.
    Je ne peux que vous reprocher, madame Costom, d'avoir dit que les gens qui se tournent vers le système de justice pénale pour obtenir des dédommagements pour leur perte financière cherchent au mauvais endroit; je pense qu'il faut faire en sorte que ce soit le bon.
    Vous avez dit que le fait de réécrire certains principes de dédommagement déjà prévus par le code pourrait donner aux gens l'impression fausse qu'on veut insister sur le dédommagement. Or, je crois que rien dans ce projet de loi ne contribue à nourrir les attentes à cet égard. La mesure législative prévoit qu'un juge est « tenu » d'envisager la possibilité de rendre une ordonnance de dédommagement . Cependant, je ne connais aucun juge qui n'envisagerait pas cette possibilité dans les cas les plus graves. Je pense donc que c'est superflu. Cela donne la mauvaise impression, et il faudra peut-être apporter des amendements en comité.
    J'aimerais poser à mon cousin, et ancien associé en exercice du droit pendant 14 ans, une question difficile. Vous n'étiez pas ici pour complimenter le gouvernement au sujet de tous ces projets de loi. Je vous ai demandé de comparaître pour nous parler du dédommagement, de la confiscation des biens au civil, parce que je pense que les gens qui se tournent vers le système de justice pénale pour obtenir dédommagement sont induits en erreur par ce projet de loi. Rien dans celui-ci ne favorise le dédommagement.
    J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de ce que font le Nouveau-Brunswick, la Colombie-Britannique et l'Ontario pour aider les gens à récupérer une part de leurs énormes pertes financières, que vous avez décrites d'une façon très spectaculaire. Ces mesures de dédommagement ne servent à rien — elles sont impuissantes. Selon vous, que devrions-nous incorporer dans le projet de loi pour aider les gens à récupérer une partie de leur perte? Diriez-vous que les gens ne se tournent pas vers le système de justice pénale pour obtenir des dédommagements financiers, et qu'ils ne devraient pas le considérer comme une agence de recouvrement?
(1715)
    Merci, Brian, de cette question très difficile; je l'apprécie — surtout sa longueur.
    Écoutez, le Code criminel du Canada n'est évidemment pas un mécanisme équivalent à une agence de recouvrement. Intégrer le dédommagement dans le projet de loi pourrait bien être redondant, puisque des dispositions à cet effet sont déjà prévues dans le Code criminel, et les juges peuvent y avoir recours. Toutefois, cela ne fait pas de tort de le proposer comme solution que le juge peut envisager. Je n'ai pas le point de vue d'un universitaire, et je ne défends pas les positions détaillées et bien documentées de l'Association du Barreau canadien. J'essaie d'adopter le point de vue des droits des victimes dans la législation fédérale et le Code criminel.
    Bien que nous ne procédions pas à la refonte complète du Code criminel, toutes nos lois — le projet de loi C-52, le Code criminel et ses nombreux amendements — représentent la codification de nos valeurs communautaires. Il faudrait peut-être procéder au coup par coup, en l'absence d'un remaniement de fond du Code criminel, et mettre l'accent sur les droits des victimes.
    En l'ajoutant, on vient préciser ce dont doit tenir compte le juge au moment de déterminer la peine. Selon mon collègue du Barreau canadien, si un juge peut garantir un dédommagement, il le fera. Le fait de le préciser ici pourrait donc bien influencer la décision du juge.
    Je pense que le projet de loi C-52 est un bon point de départ, mais je crois également qu'il tend la main aux provinces. La loi sur la confiscation des biens au civil que le Nouveau-Brunswick envisage d'adopter nous permettra, contrairement au projet de loi C-52, de nous attaquer aux outils de la criminalité. Parfois, il s'agit d'une demeure, parfois, d'un bien immobilier plus imposant, comme un édifice à bureaux. Cela comprend également les mécanismes employés, même les comptes bancaires. Tous les fonds disponibles pourraient être considérés comme des outils de la criminalité.
    Il s'agit donc d'un partenariat, et je pense qu'il s'agit d'un bon point de départ. Ce n'est pas parfait, cependant, puisqu'on procède de façon fragmentaire.
(1720)
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Ménard. Il faudra se limiter à trois minutes, parce que nous essayons de donner à chaque parti l'occasion de poser une question.

[Français]

    Je vois que beaucoup de gens accordent de l'importance à la peine minimale de deux ans. Quelqu'un ici connaît-il des études faites au Canada sur l'efficacité des peines minimales pour réduire la criminalité?
    Au Nouveau-Brunswick, nous n'avons pas d'étude. Toutefois, nous avons fait une réflexion sur les peines minimales pour les infractions et les fraudes qui sont parfois de l'ordre de centaines de milliers de dollars. Ce n'est pas une étude, mais notre conclusion est que nous trouvons que les peines sont trop courtes. Nous n'avons pas d'étude disponible.
    Donc, vous ne le savez pas. Le ministère fédéral de la Justice, lui, a voulu le savoir, et il en a commandée une. Je lis:
 Même si des peines d'emprisonnement obligatoires ont été introduites dans bon nombre de pays occidentaux, peu d'instances ont évalué les répercussions de ces lois sur les populations carcérales ou sur les taux de criminalité. Les études qui se sont penchées sur l'incidence de ces lois ont rapporté des effets variables sur les populations carcérales et aucun effet discernable sur les taux de criminalité. 
    J'aimerais que les avocats qui sont ici me répondent à ce sujet. Je donne l'exemple d'une expérience frappante que nous avons vécue. Un peine minimale de sept ans a été prononcée pour importation de marijuana. C'est à ce moment que la consommation de marijuana a augmenté le plus au pays.
    Ne croyez-vous pas que nous devrions plutôt nous diriger, si nous voulons faire quelque chose d'efficace, vers les solutions que proposait M. Rosen? Plutôt que de penser à une petite loi comme celle-ci pour justifier une espèce de principe selon lequel plus nous incluons de peines minimales dans les lois, plus nous sommes populaires, mieux nous servons la justice, nous ferions mieux de nous orienter vers une réglementation plus stricte qui convaincrait les gens qui sont prêts à commettre des grandes fraudes que s'ils essaient, ils seront pris.
    Permettez-moi d'intervenir.
    Vous avez demandé s'il y avait des experts parmi nous qui avaient déjà fait des études sur l'efficacité des peines minimales obligatoires. Je pourrais vous dire qu'au sein de l'ABC, l'Association du Barreau canadien, on a étudié ces questions à plusieurs reprises. Je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais on est arrivés plus ou moins à la même conclusion que celle exprimée par l'honorable M. Ménard selon laquelle les peines minimales d'emprisonnement ne préviennent pas le crime. Cela enlève de la discrétion au juge, qui est un acteur tellement indépendant dans notre système.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Comartin, vous avez trois minutes.
    J'ai deux questions à vous poser, rapidement.
    Monsieur Rosen, de toute évidence, vous n'appuyez pas vraiment le modèle américain. Y a-t-il donc un autre modèle, ailleurs dans le monde, duquel nous devrions nous inspirer pour assurer la réglementation?
    Monsieur le ministre, proposez-vous de faire en sorte que les produits de la confiscation des biens au civil servent à une utilisation bien précise, ou seront-ils versés dans les recettes générales?
    Je crois que, dans les autres provinces, le tout est versé dans les recettes générales, mais rien ne nous empêche de créer un fonds spécial à cet effet. Nous sommes en train de rédiger le tout. Nous envisageons cette possibilité. Le document devra être approuvé par le Cabinet, même si pour l'instant les discussions sont toujours en cours. Toutefois, elles devraient aboutir.
    Monsieur Rosen.
    Je crois qu'une combinaison des systèmes britannique et américain pourrait fonctionner au Canada. Ce qui préoccupe énormément les investisseurs, et qui en incitera probablement beaucoup à se retirer du marché canadien, c'est qu'il n'y a personne à qui vraiment raconter ces déboires, aucune façon de faire déboucher les choses. Aux États-Unis, on peut y arriver dans une certaine mesure avec la SEC, comme c'est le cas au Royaume-Uni. Il est possible qu'on puisse également emprunter certains éléments de systèmes européens — je ne suis pas à jour. L'Australie est un autre des exemples qui me vient à l'esprit.
    Je pense que si on composait un modèle canadien à partir des meilleurs éléments des autres systèmes, ce serait bien mieux que de n'avoir rien du tout, ce qui est le cas pour l'instant. Nous sommes dotés d'organisations d'autoréglementation, mais cela n'aide en rien.
(1725)
    C'est ce qui s'est passé avec Madoff aux États-Unis et avec la Commission de change là-bas. Toute cette affaire n'inspire pas confiance: malgré les dénonciateurs et les preuves irréfutables, il a fallu 10 ans.
    Pourquoi croire alors que le modèle américain fonctionnerait ici?
    Je pense que le modèle américain pouvait fonctionner. Pour être honnête avec vous, l'administration Bush, vers la fin, a exercé des pressions sur la SEC. On a vu un certain nombre de catastrophes au cours de son dernier mandat. Si on retourne en arrière dans l'histoire américaine, on constate...
    Je sais pertinemment que certaines fraudes sont détectées aux États-Unis — nous y avons travaillé —, des fraudes qui ne font pas l'objet de poursuites au Canada. Aussi imparfait que peut être le modèle américain, le Canada traîne toujours loin derrière, et je n'exagère même pas. J'ai une trop vaste expérience et j'ai vu de trop nombreux cas pour prétendre le contraire.
    Merci.
    Monsieur Rathgeber, vous pouvez poser une dernière question.
    Tout ce débat sur les peines minimales obligatoires pique ma curiosité.
    Madame Costom, vous avez dit que les principes de détermination de la peine se basent sur la proportionnalité et l'individualisation, et que, de l'avis de l'Association du Barreau canadien, les juges sont les mieux placés pour le déterminer.
    J'ai deux questions. Quel est le rôle du Parlement dans l'élaboration des lignes directrices sur la détermination de la peine, puisque nous vivons dans une démocratie, et non pas sous la dictature des juges? Ensuite, pourquoi l'Association du Barreau canadien prêche-t-elle systématiquement contre les peines minimales obligatoires, mais pas contre les peines maximales, comme les 14 années en cas de fraude? Pourquoi l'Association du Barreau canadien ne s'oppose-t-elle qu'aux peines minimales?
    Le Code criminel a toujours été fondé sur le modèle d'un système de peine maximale, non pas de peine minimale. L'Association du Barreau canadien ne conteste généralement pas ce modèle, car déterminer la peine maximale par rapport à un crime en particulier est une façon pour le Parlement d'exprimer son point de vue sur la gravité d'une infraction. Il peut s'agir d'une peine de 6 mois, de 18 mois de 2 ans, de 5 ans, de 10 ans ou de 14 ans. La peine maximale est une façon pour le Parlement d'indiquer quel niveau de culpabilité morale est généralement associé à cette infraction, au niveau le plus élevé. Cela ne lie pas les mains des juges du tout, mais cela envoie le message dont vous avez parlé aux représentants du système judiciaire, et c'est là un message que le Parlement doit certainement envoyer, car il lui incombe de le faire.
    Convenez-vous avec moi que si vous étiez vraiment en faveur de ne pas limiter le pouvoir discrétionnaire judiciaire, vous seriez contre les peines maximales? Vous laisseriez le soin aux juges d'individualiser les peines et de déterminer une peine qui serait proportionnelle.
    Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de choisir tout ou rien entre la démocratie parlementaire et la judéocratie. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de choisir l'un ou l'autre. Je pense que le juste équilibre consiste à établir des peines maximales et que le Parlement devrait le faire et continuer de le faire. Au cours des dernières années, nous avons certainement vu des projets de loi, par exemple, même en ce qui concerne les dispositions sur la fraude, qui ont fait augmenter la peine maximale de 10 à 14 ans. C'est ainsi que le Parlement doit transmettre un message, et l'Association du Barreau canadien ne conteste habituellement pas cela, car nous appuyons le rôle du Parlement, ce qui n'est pas incompatible avec le fait que l'on puisse permettre aux juges d'exercer dans une large mesure leur pouvoir discrétionnaire en même temps.
    C'est parce que vous favorisez l'indulgence.
    Merci.
    Merci à tous nos témoins. Nous vous remercions de...
    J'invoque le Règlement. Elle devrait avoir l'occasion de répondre oui ou non à ce commentaire. Ce n'était pas une question, c'était une remarque désobligeante.
    Eh bien elle a dit merci, alors...
    Avant de lever la séance, je voudrais remercier nos témoins de leur comparution.
    Chacun d'entre vous a apporté une contribution importante à notre discussion sur ce projet de loi. Je suis certain que ce sera pris en compte et que nous réexaminerons le projet de loi pour voir quels autres éléments nous pouvons y ajouter afin de le renforcer.
    Merci à vous tous.
    La séance est levée.
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