:
Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous les membres du comité pour l'excellent travail que vous faites au Comité de la justice. Je sais que vous êtes occupés depuis un moment et que vous allez continuer à l'être. Nous avons un programme d'activités très chargé, comme vous le savez, et, comme tous les Canadiens, me semble-t-il, j'apprécie votre excellent travail dans ce domaine.
Je suis heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de répondre à vos questions au sujet du Budget principal des dépenses.
Monsieur le président, comme vous le savez, nous avons la grande chance d'avoir un patrimoine juridique remarquable au Canada, puisque nous possédons l'un des meilleurs systèmes judiciaires du monde. Le ministère de la Justice est chargé d'appuyer ce système et de prendre des mesures pour le rendre plus juste, plus accessible et aussi efficace que possible. C'est un défi de taille à tout moment, mais d'autant plus à l'heure actuelle, vu l'insécurité qui caractérise la situation de nos jours à plusieurs égards.
Bien entendu, vous êtes au courant de la crise financière mondiale à laquelle nous n'avons pas échappé. Plus récemment, nous avons été témoins de craintes grandissantes face à une autre menace internationale, soit une pandémie du virus grippal H1N1. Bien que ni l'un ni l'autre de ces deux événements ne soit directement lié à la justice, tous les deux ont obligatoirement une incidence sur une vaste gamme de questions juridiques. Ce qui me semble encore plus important, c'est que des événements de ce genre peuvent gravement saper la confiance de la population en nos institutions et notre sentiment de vivre dans une société où priment le maintien de l'ordre et la sécurité, ce qui a nécessairement des conséquences pour le gouvernement, dont la grande priorité est de créer une société sûre et sécuritaire pour tous les Canadiens.
Ces événements nous rappellent également le contexte plus vaste du monde dans lequel nous vivons. Je suis convaincu que, si le Canada exerce son leadership avec calme et cohérence, il réussira à surmonter ces difficultés et d'autres encore tout en maintenant l'intégrité de nos valeurs et de nos institutions juridiques, mais il faudra pour cela un engagement réaliste et sérieux de notre part.
[Français]
Le gouvernement est résolu à demeurer responsable.
[Traduction]
Le gouvernement a insisté à maintes reprises sur sa détermination à protéger les familles et les collectivités canadiennes d'un bout à l'autre du pays. Le ministère de la Justice soutient cet engagement de par le rôle unique qu'il joue en tant que conseiller juridique du gouvernement, ce qui l'amène également à élaborer des politiques et, bien entendu, à rédiger et à réformer les textes de loi.
Monsieur le président, au cours de la dernière année, notre gouvernement a continué à faire des progrès par rapport à la création de collectivités plus sécuritaires en s'attaquant à la criminalité avec toutes les ressources qu'il possède. Au cours de la prochaine année, le ministère de la Justice appuiera cet effort aussi efficacement que possible, par l'entremise de ses propres activités, et aussi en travaillant en étroite collaboration avec d'autres ministères et organismes fédéraux, nos partenaires provinciaux et territoriaux et les organisations non gouvernementales. Ces derniers sont également très importants.
Un récent exemple de cet effort remonte à la semaine dernière. La 4e Semaine nationale de sensibilisation aux victimes d'actes criminels a permis de rassembler un grand nombre de personnes et d'organismes qui travaillent ensemble en vue de garantir que les victimes d'actes criminels aient voix au chapitre au Canada et puissent plus facilement accéder aux services.
Voilà maintenant deux ans que notre gouvernement a nommé le premier ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels. Ce dernier continuera à s'assurer que des mesures appropriées sont prises pour répondre aux besoins et aux préoccupations des victimes.
Les victimes d'actes criminels continueront d'être une priorité pour notre gouvernement et pour le ministère de la Justice, cette année et dans l'avenir. Le Budget principal des dépenses comprend un engagement de 52 millions de dollars sur quatre ans — à partir du 1er avril 2007 — pour des programmes et services et le financement d'initiatives fédérales, provinciales et territoriales visant à répondre aux divers besoins des victimes d'actes criminels.
Les progrès que nous avons réalisés dans ce domaine au cours des dernières années sont encourageants. Je suis fier du rôle qu'a joué mon ministère à ce chapitre-là. Le point de vue et les expériences des victimes d'actes criminels nous éclairent et nous inspirent dans nos efforts collectifs pour garantir que la société canadienne demeure sûre et sécuritaire.
Un autre domaine où les activités ministérielles se sont intensifiées est celui de la lutte contre le crime organisé. Il s'agit là d'un problème grandissant au Canada dont les effets sur la criminalité en général sont vastes. Il a le potentiel non seulement de saper la sécurité publique et la primauté du droit, mais aussi de requérir l'investissement d'énormément de ressources en raison des longues enquêtes criminelles et des mégaprocès qui en découlent.
Bien que la charge de travail liée aux poursuites relève à présent du Service des poursuites publiques du Canada, et non du ministère de la Justice, comme l'indiquent nos prévisions budgétaires, mon ministère continue à jouer un rôle de premier plan, notamment sur le plan de la rédaction législative.
En février, nous avons déposé un nouveau projet de loi afin de doter le système judiciaire des outils qui lui permettront de lutter contre les bandes criminelles de rue et d'autres formes de crime organisé. Certaines dispositions du projet de loi visent à combattre les crimes graves, tels que les meurtres de membres de bandes criminelles, les fusillades au volant d'une voiture et les agressions contre des agents de la paix, et prévoient également que les membres de bandes criminelles signent un engagement de ne pas troubler l'ordre public. Ce projet ce loi, le , a été adopté en troisième lecture le 24 avril. Il a été déposé au Sénat le 28 avril. Je crois savoir qu'un sénateur libéral s'est prononcé hier sur la mesure proposée, et cette dernière a déjà été déposée par mon collègue, le sénateur Wallace.
Monsieur le président, je voudrais saisir l'occasion de vous remercier, ainsi que tous les membres du comité, d'avoir étudié ce projet de loi avec autant de diligence et de célérité. Il est certain qu'il représente un pas dans la bonne direction.
Environ au même moment, nous avons aussi redéposé un projet de loi visant à réprimer des crimes graves liés à la drogue, et ce pour atteindre les objectifs de notre Stratégie nationale antidrogue. Il est de notoriété publique que le commerce illégal des drogues constitue une importante source de revenus et d'influence pour les criminels organisés.
Comme je l'ai expliqué à l'époque, ce projet de loi se voulait une intervention proportionnelle et mesurée visant à perturber les activités criminelles en prévoyant que les producteurs et trafiquants qui menacent la sécurité de nos collectivités, voire même notre mode de vie au Canada, se voient infliger obligatoirement des peines d'emprisonnement minimales.
Ce projet de loi prévoyait notamment des peines d'emprisonnement obligatoires pour l'importation et l'exportation de drogues illicites, de même que des peines spéciales pour les infractions commises au profit de criminels organisés ou qui touchent les jeunes. Les personnes qui importent les drogues illégales au Canada font partie de l'appareil du crime organisé. C'est ce qu'on m'a maintes fois répété.
Il est indéniable que le fait de mettre en prison un membre du crime organisé, surtout s'il occupe un poste de direction au sein du groupe, a l'effet de perturber ou d'affaiblir ce dernier. En ce qui me concerne, c'est incontestable. Une organisation affaiblie ne peut pas mener ses activités illégales avec la même efficacité. J'espère que tout le monde sera d'accord sur ce point.
Plus récemment — c'est-à-dire il y a un peu plus de deux semaines — nous avons déposé un projet de loi en vue de réprimer les crimes contre les biens en général, et notamment l'infraction grave qu'est le vol d'automobiles. Il est reconnu à présent qu'il s'agit là d'une des principales activités des criminels organisés. Je suis très heureux de savoir que le devrait être adopté en deuxième lecture aujourd'hui même, et ce dernier sera évidemment renvoyé au comité. J'espère, monsieur le président, que vous pourrez également procéder à l'étude de ce projet de loi avec toute la célérité possible.
Je tiens à préciser également que ce projet de loi a l'appui de nombreux groupes, entre autres, le Bureau d'assurance du Canada dont les estimations établissent le coût global du vol d'automobiles à plus de 1 milliard de dollars par an, lorsqu'on tient compte des frais de justice et d'autres frais juridiques, de même que les soins de santé, les activités policières, etc. Encore une fois, cette mesure législative s'appuie sur le principe selon lequel la meilleure façon de combattre l'activité des bandes et des criminels organisés consiste à perturber les entreprises criminelles dont ils dépendent.
J'ai récemment rencontré les représentants de la Corporation des associations de détaillants d'automobiles. À cette occasion, un concessionnaire nous racontait qu'un soir, le cadenas de la clôture de sa concession a été coupé, et plusieurs véhicules de luxe, qui valaient plus de 300 000 $, ont été volés. Lorsqu'il a averti la police le lendemain, on lui a donné un numéro de dossier en lui conseillant d'appeler sa compagnie d'assurance, puisqu'il serait tout à fait impossible de retrouver et de récupérer ces véhicules. À leur avis, les véhicules en question auraient déjà été expédiés à l'étranger, ou encore démantelés et vendus sous forme de pièces détachées.
Donc, en plus de créer une infraction distincte pour le vol d'automobiles, ce projet de loi prévoit l'exercice de pouvoirs douaniers, pour que les représentants de l'Agence des services frontaliers du Canada puissent identifier les biens volés et les empêcher de quitter le pays. Il s'agit d'un changement majeur mais tout à fait indispensable, pour que nos gardes-frontière puissent intercepter les biens liés à ce genre d'activité.
Le crime organisé constitue un problème grave, et aucun segment de notre société n'est à l'abri de ses effets. Il ne sera pas possible de l'enrayer du jour au lendemain, mais le gouvernement actuel est néanmoins résolu à agir pour atténuer les conséquences négatives de l'activité des bandes et des criminels organisés pour les familles et les collectivités.
Bien entendu, nous sommes toujours tout aussi résolus à viser l'équilibre au sein de notre système judiciaire. À l'heure actuelle, nous prenons des moyens législatifs pour modifier et actualiser le Code criminel afin que le Canada applique des peines efficaces et proportionnelles, tout en investissant des sommes importantes dans les stratégies et programmes de prévention.
En vertu de la Stratégie nationale antidrogue, nous avons accordé du financement au programme High on Life Challenge du St. Mary's Counselling Service à Kitchener, en Ontario. Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Nous avons également donné 400 000 $ au district scolaire de Lethbridge, en Alberta, pour son projet Teaming up for Addiction Free Youth, soit le projet Watson. Nous avons aidé financièrement le Centre d'accueil Ooknakane en Colombie-Britannique pour l'exécution de son projet de santé et de mieux-être à l'intention des jeunes; le plan de prévention et de mobilisation contre la drogue de la Community Alcohol and Drug Education Coalition à Brandon, au Manitoba; le projet de sensibilisation et de prévention de la toxicomanie de la Pre-Cam Community School à La Ronge, en Saskatchewan, et le programme Building Assets in Youth du YMCA à Moose Jaw, en Saskatchewan. Nous avons également donné 1 million de dollars de plus pour le programme d'appui, de traitement, de sensibilisation et de prévention ici à Ottawa, et 327 000 $ pour la région de Vermillion River. Monsieur le président, voilà le genre de projets dans lequel nous devons investir. Nous allons également accorder 10 millions de dollars pour deux nouvelles initiatives de traitement à Vancouver.
Je pourrais continuer à énumérer les projets et initiatives qui ont bénéficié d'une aide financière de la part de notre gouvernement en vertu du programme de prévention de la Stratégie nationale antidrogue, monsieur le président. Voilà le genre de mesures qu'il faut prendre pour nous assurer de maintenir une approche équilibrée — nous en sommes tout à fait conscients — qui va permettre d'aider les gens, et notamment les jeunes à risque.
En terminant, je voudrais simplement mentionner qu'en tant qu'organisme central, le ministère de la Justice appuie presque la totalité du travail réalisé par le gouvernement d'une façon ou d'une autre, ce qui veut dire que l'étendue de ses activités est considérable. Le ministère est en interaction constante avec le système judiciaire et ses nombreux acteurs, y compris les membres de la magistrature, d'autres paliers de gouvernement, les associations professionnelles et une vaste gamme d'organisations non gouvernementales agissant à tous les échelons, du niveau communautaire au niveau national.
La série d'annonces de financement en vertu du Programme de partenariat et d'innovation du ministère de la Justice le 7 avril est un bon exemple de ce genre de travail. Ce programme, administré par le ministère de la Justice appuie diverses activités visant à intervenir face à l'évolution de certains aspects de la société qui influent sur la politique canadienne en matière de justice. Parmi les intervenants, nommons le Conseil national antiraciste du Canada, la Law Courts Education Society of British Columbia et le Congrès canadien de justice pénale de l'Association canadienne de justice pénale.
[Français]
Pour conclure, monsieur le président, j'aimerais vous faire part, à vous et aux membres de votre comité, de mon appréciation et vous remercier pour tout le travail important que vous accomplissez.
[Traduction]
Le ministère de la Justice joue un rôle critique dans l'ensemble du travail que réalise le gouvernement en vue de répondre aux besoins des Canadiens. Comme vous le savez, nous allons continuer à insister sur l'approche équilibrée qu'exige le traitement de toutes ces questions, car c'est ce que mérite le Canada.
Je vous remercie.
Pour ce qui est des mégaprocès, l'une des préoccupations dont on m'a fait part n'est pas tellement le coût des mégaprocès, mais plutôt le déroulement et la rapidité du processus qui les entoure. Les ministres et ministères fédéraux et provinciaux travaillent actuellement à l'amélioration du droit pénal du point de vue de son efficacité. Nous avons déjà eu le projet de loi . Comme vous le savez, monsieur Ménard, il est très difficile de faire adopter ces projets de loi car, quand on propose de réformer le régime, il y a toujours un organisme quelque part — en général, les organismes choisissent les éléments qu'ils aiment ou qu'ils n'aiment pas — qui dira que telle proposition est peut-être problématique.
Mais, je suis tout à fait résolu à faire progresser ce dossier. Nous avons réussi à faire adopter le projet de loi . Il s'agissait de la quatrième tentative en 10 ans pour faire adopter ces mesures. Je tiens également à faire des progrès en ce qui concerne l'efficacité du régime actuel et, bien entendu, je cherche toujours de nouveaux moyens d'y parvenir. Par contre, beaucoup d'efforts sont déployés en ce sens à l'heure actuelle au niveau fédéral-provincial, et je suis très heureux qu'il en soit ainsi.
S'agissant maintenant de l'interface entre le crime organisé et les entreprises légales, je pense que nous réalisons des progrès à ce chapitre-là. En ce qui concerne les mesures de répression du crime organisé, si nous avons voulu nous attaquer au problème du vol d'identité, c'est pour cette raison, entre autres — c'est le message qu'on m'a communiqué en termes très énergiques il y a quelque temps lorsque j'étais à Montréal — c'est-à-dire, la collecte et la communication d'information, à l'aide d'ordinateurs, parfois en vue d'envoyer cette information à l'étranger et de s'en servir en fin de compte pour des activités illégales. Mais, quelle que soit la façon d'obtenir cette information, on m'a très clairement fait comprendre qu'il y a actuellement des lacunes dans le Code criminel et, à mon avis, quand vous aurez examiné ce projet de loi, après l'avoir reçu du Sénat, vous comprendrez que la solution proposée est efficace.
Je pourrais vous parler d'autres modifications que vous allez y voir — entre autres, le fait d'accorder certains pouvoirs aux gardes-frontières de l'Agence des services frontaliers du Canada, pour que ces derniers puissent intercepter des biens qui entrent au Canada ou qui en sortent et qui peuvent être liés dès le départ à des activités illégales ou finir par être liés à des activités illégales. Pour moi, toutes ces mesures nous permettent de progresser, et je suis toujours à la recherche de nouveaux moyens d'améliorer nos lois.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je voudrais, tout d'abord, vous remercier ainsi que vos collaborateurs de votre présence parmi nous cet après-midi.
Encore une fois, j'aimerais vous féliciter pour les projets de loi que vous avez déposés à la Chambre, le projet de loi , le projet de loi , le projet de loi et le projet de loi C-26, de même que celui sur le vol d'identité, dont le numéro m'échappe; je crois qu'il est actuellement au Sénat.
Monsieur le ministre, comme vous le savez, le comité était à Vancouver la semaine dernière. À Vancouver, et encore lundi lorsque nous examinions le projet de loi , j'ai eu l'occasion d'interroger M. Kirk Tousaw, qui parlait au nom de la British Columbia Civil Liberties Association ainsi qu'une association anti-interdiction, dont le nom m'échappe. Il a également été candidat néo-démocrate dans la circonscription électorale de Vancouver—Quadra.
Il vous intéressera peut-être de savoir — et peut-être le savez-vous déjà, car je sais que vous et votre personnel suivez de près nos délibérations — que M. Tousaw a dit un certain nombre de choses que j'ai trouvé pour le moins déconcertantes.
D'abord, selon lui, les drogues dites dures, y compris des substances chimiques telles que la méthamphétamine, la cocaïne épurée, qu'on appelle le crack, et même l'héroïne, devraient être légalisées. En fait, il m'a même dit que, à son avis, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances devrait être abrogée.
Comme vous le savez peut-être — si vous avez entendu à la Chambre aujourd'hui la déclaration que j'ai faite en vertu de l'article 31 du Règlement — une jeune fille d'Edmonton, la ville que je représente, âgée de 14 ans est décédée tragiquement par suite d'une surdose de la drogue ecstasy, qu'elle avait achetée au West Edmonton Mall, un centre commercial fréquenté, entre autres, par des enfants et des jeunes. Étant donné cet événement tragique, je me demandais si vous êtes d'avis que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances devrait effectivement être abrogée et que les drogues dites dures ne devraient plus être interdites.
:
C'est intéressant, monsieur LeBlanc.
Quand je suis devenu député pour la première fois, il existait à l'époque un poste budgétaire pour les transferts aux provinces, et j'aimais bien l'idée qu'il existe un poste budgétaire pour l'aide juridique civile. Or, en 1995-1996, il a été décidé d'incorporer cela dans le Transfert canadien en matière de programmes sociaux.
Je ne suis pas ministre des Finances, mais je m'intéresse de très près à la situation dès qu'il est question de préparer un budget. À cet égard, j'ai été très impressionné par les augmentations accordées à chaque province en vertu du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. La décision a été prise — elle n'a pas été prise par mon gouvernement, comme vous le savez; elle a été prise par un autre gouvernement auquel vous avez été intimement lié — d'incorporer ces montants pour n'en faire qu'un seul transfert. Autant que je sache, les provinces ne revendiquent pas le rétablissement d'un poste budgétaire distinct pour cela. C'est une suggestion qui m'a été faite par certains, mais une fois que la décision est prise…
Je sais que vous surveillez de près les budgets. M. Flaherty en a déjà déposé quatre. Je les examine toujours de près pour voir quelle somme est affectée à chaque province, et je dois vous dire que j'ai été très impressionnée par les augmentations accordées à chacune des provinces dans les quatre budgets déposés par M. Flaherty. Donc, l'aide juridique civile est maintenant incluse dans ce transfert, et pour moi, ce sont des mesures positives.
Vous parliez du droit de la famille et du droit civil, et les mégaprocès constituent un aspect important de cette question. D'ailleurs, nous sommes en train d'examiner la situation. Nous étudions également le rapport Code-LeSage. Bon nombre des recommandations de ce dernier concernent les gouvernements provinciaux. Par contre, si je devais déposer un projet de loi visant à améliorer l'efficacité du régime, etc., j'ose espérer que les députés accepteraient de l'adopter rapidement. Comme je vous l'ai déjà dit, il a fallu 10 ans pour faire adopter le dernier projet de loi. Quand on dépose un projet de loi pour améliorer l'efficacité du système de justice pénale, on n'en parle peut-être pas beaucoup, mais c'est tout de même une mesure très importante.
Merci, monsieur le président.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis heureux d'avoir de nouveau l'occasion de faire un exposé devant le comité, cette fois-ci sur le projet de loi .
Comme vous le savez, le gouvernement a promis de limiter le crédit accordé lors du prononcé de la peine pour la détention avant le procès de personnes à qui on a refusé la mise en liberté sous caution en raison de leur casier judiciaire ou du non-respect d'une condition de la mise en liberté sous caution. À l'heure actuelle, le paragraphe 719(3) du Code criminel permet au tribunal de tenir compte de la durée de la période de détention d'un accusé qui attend son procès en déterminant la peine qu'il convient de lui infliger au moment de la condamnation. Par contre, le Code ne prévoit pas l'application d'une formule mathématique particulière lorsqu'il s'agit de tenir compte de la période de détention. Parfois, le crédit accordé correspond à trois jours pour chaque jour de détention mais, depuis plusieurs années, les cours donnent systématiquement un crédit correspondant à deux jours pour chaque jour de détention provisoire.
Cette pratique a d'ailleurs été reconnue dans l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire La Reine c. Wust en 2000, où cette dernière statuait que, même s'il n'existe pas de formule mécanique pour le calcul du crédit à attribuer pour la détention provisoire, un rapport de 2 à 1 était approprié en l'espèce afin de tenir compte des conditions imposées à cette personne. Par contre, la Cour suprême a déclaré qu'il serait tout aussi possible d'appliquer un autre rapport pour le calcul du crédit, selon les circonstances de la détention.
Or, la pratique actuelle consistant à accorder un crédit de deux jours pour chaque jour passé en détention provisoire pose problème. Par exemple, dans certains cas, elle peut encourager certains accusés à abuser de la procédure judiciaire en choisissant délibérément de rester en détention provisoire, en espérant obtenir une peine d'emprisonnement plus courte après qu'on ait tenu compte de la durée de leur détention provisoire. De plus, la population des établissements de détention provisoire dépasse à présent le nombre de détenus condamnés se trouvant actuellement dans les prisons provinciales et territoriales du Canada. C'est pour cette raison que les procureurs généraux et les ministres chargés du service correctionnel sont vivement en faveur de la restriction du crédit accordé pour la détention sous garde car ils y voient, entre autres, une façon de ralentir l'accroissement de la population des établissements de détention provisoire.
De même, la pratique consistant à accorder un crédit trop généreux pour la détention provisoire peut déconsidérer l'administration de la justice en créant l'impression que les délinquants bénéficient de peines d'emprisonnement moins lourdes que celles qu'ils méritent de purger. Le public comprend mal l'adéquation de la peine infligée et de la gravité du crime. Pour toutes ces raisons, la pratique actuelle consistant à accorder systématiquement un crédit double doit être restreinte.
Dans certains cas, les tribunaux ont décidé par le passé d'accorder un crédit inférieur — c'est-à-dire, de ne pas appliquer le rapport de 2 à 1 — et les motifs qu'ils ont donnés pour justifier leurs décisions militent en faveur des dispositions que propose le projet de loi C-25. Dans ces cas-là, le crédit accordé était justifié parce que les délinquants étaient peu susceptibles d'obtenir la libération conditionnelle anticipée en raison de leurs casiers judiciaires, ou parce que le temps passé en détention provisoire résultait d'une violation d'une des conditions de leur mise en liberté sous caution. C'est pour toutes ces raisons que le projet de loi C-25 propose d'établir, comme règle générale, que les tribunaux appliquent un rapport de 1 à 1 comme crédit de détention provisoire. Toutefois, lorsque les circonstances le justifient, les tribunaux pourront appliquer éventuellement un rapport de 1 à 1,5 pour chaque jour passé en détention provisoire. Dans de tels cas, les tribunaux seront tenus de fournir une explication des circonstances qui justifient une telle décision.
Ces circonstances ne sont pas définies dans le projet de loi. Ainsi le tribunal pourra exercer son pouvoir discrétionnaire en déterminant, au cas par cas, s'il y a lieu d'accorder un crédit pour détention provisoire supérieur à celui que prévoit la règle générale, soit l'application d'un rapport de 1 à 1. Nous nous attendons à ce que l'on applique un rapport de 1,5 à 1 dans une situation où, pour diverses raisons, les conditions de la détention étaient extrêmement difficiles, ou encore lorsque le procès a été retardé indûment en raison de facteurs qu'on ne peut attribuer à l'accusé.
Par contre, lorsqu'un accusé est mis en détention provisoire du fait d'avoir violé une des conditions de sa mise en liberté sous caution ou en raison de son casier judiciaire, le rapport qui s'appliquera pour le calcul du crédit à lui accorder sera d'un jour pour chaque jour passé en détention provisoire. Par suite de cette initiative, un plus grand nombre de délinquants devront désormais purger une peine fédérale de deux ans et plus, si bien qu'il y aura davantage de détenus purgeant une peine dans un établissement correctionnel fédéral.
À ce moment-là, le système fédéral offrira aux détenus l'occasion de profiter de programmes de plus longue durée qui peuvent avoir une incidence positive sur leur comportement. Il ne faut pas perdre de vue cet élément-là — c'est-à-dire la possibilité de fournir aux détenus l'aide dont ils ont besoin. Au tribunal, le juge donne normalement ses motifs lors du prononcé de la peine; cependant, les juges ne sont pas strictement tenus d'expliquer sur quoi se fondent leurs décisions d'attribuer un crédit de détention provisoire. En conséquence, ils ne le font pas systématiquement, ce qui prive le public de renseignements pertinents sur les raisons pour lesquelles on a jugé bon dans tel cas d'accorder un crédit de détention provisoire. À ce moment-là, le public ne peut comprendre, faute d'information, pourquoi une période de détention provisoire permet à un criminel reconnu de bénéficier d'une peine d'emprisonnement réduite.
C'est pour cela que le projet de loi C-25 propose d'exiger des tribunaux qu'ils indiquent la peine qui aurait été infligée en l'absence du crédit, ce en quoi a consisté le crédit, de même que la peine réellement infligée. Cette exigence donnerait lieu à plus de certitude et de cohérence, tout en rehaussant la confiance du public en l'administration de la justice. Il s'agit d'importants objectifs d'intérêt public.
[Français]
Il est difficile pour les Canadiens de comprendre comment ces courtes peines, qui sont le résultat de l'application d'un ratio de deux pour un pour le temps passé en détention avant le procès, peuvent dénoncer les comportements illégaux, dissuader les délinquants de commettre des infractions et protéger la société.
[Traduction]
Les Canadiens nous ont fait savoir sans ambages qu'ils sont favorables à une meilleure adéquation de la peine et du crime, qui passe par l'élimination de la pratique consistant à accorder un crédit double pour la détention provisoire.
Monsieur le président, nous sommes à l'écoute de leurs préoccupations. J'apprécie aussi l'appui de nos partenaires provinciaux et territoriaux à l'égard de cette modification législative, qui devrait permettre d'améliorer l'adéquation de la peine et du crime. C'est l'une des raisons pour lesquelles je demande à tous les membres du comité d'appuyer ce projet de loi.
Je vous remercie, monsieur le président.
:
Merci beaucoup, monsieur le ministre ainsi que vos collaborateurs, de votre présence cet après-midi, et surtout de nous présenter ce projet de loi, qui revêt une très grande importance pour mes électeurs.
C'est tellement vrai, d'ailleurs, que lors d'une récente tribune téléphonique à la radio, un monsieur qui a participé… J'avoue ne pas me souvenir de son nom, mais il a de grandes connaissances en la matière. Je pense qu'il s'agit d'un avocat, et plus précisément un avocat qui représente les victimes d'actes criminels. Il expliquait aux auditeurs, bien entendu, que non seulement le crédit accordé est de deux jours pour un jour de détention, mais dans certains cas, il peut être de trois jours pour un jour de détention, ce qui inquiète la plupart des gens.
Ensuite, nous avons fait des recherches, bien entendu, et nous avons examiné les dispositions du projet de loi C-25 en sollicitant l'opinion de vos homologues et de nos homologues provinciaux et de toute autre personne intéressée. Je voudrais donc citer les propos de deux personnes, aborder un ou deux autres points et vous demander ensuite de réagir.
Je voudrais commencer par citer les propos du Dr Matt Logan, qui est un expert dans le domaine des infractions sexuelles au sein de la GRC. Voilà ce qu'il a dit devant le comité le 30 avril:
J'ai pris deux années de ma carrière pour aller travailler dans les prisons comme psychologue pour le Service correctionnel du Canada, et je peux vous dire que le crédit double est une escroquerie. Les gens qui combinent pour avoir le crédit double sont en train d'engorger le système judiciaire et d'en augmenter encore l'arriéré. Cela me fait donc très plaisir de voir disparaître le crédit double pour la détermination d'une peine.
Ensuite, je vous propose le commentaire de l'honorable Cecil Clarke, ministre de la Justice de la Nouvelle-Écosse, qui a dit ceci:
Cette modification empêchera les criminels de tenter de manipuler le système judiciaire en faisant prolonger la période de détention provisoire. Elle garantira en fin de compte qu'une personne se voit infliger une peine d'emprisonnement dans un établissement correctionnel correspondant au crime qu'elle a commis.
Monsieur le ministre, je sais que vous savez que la majorité des Canadiens appuient vivement ce projet de loi. Mais, je vous invite à nous parler de vos discussions avec d'autres ministres de la Justice au Canada et, plus précisément, avec les personnes qui comptent le plus, soit les personnes qui nous ont envoyés ici, qui nous ont élus pour les représenter ici au Parlement, et notamment, les victimes d'actes criminels.
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Merci beaucoup, monsieur Moore, et permettez-moi aussi de vous remercier pour tout ce que vous faites vous et mon autre secrétaire parlementaire. Vous et nous avez beaucoup aidés à faire avancer nos priorités en matière de justice.
Je suis également content que vous ayez cité les propos de Cecil Clarke, procureur général de la Nouvelle-Écosse. Il nous a été bien utile et a beaucoup appuyé les mesures que nous avons annoncées en vue de réprimer la criminalité. Allison Redford de l'Alberta, nous a également beaucoup appuyés. Et, s'ils font cela, c'est pour les bonnes raisons. Ils souhaitent que le système marche bien.
Les gens veulent pouvoir faire confiance au système de justice pénale. Si vous essayez d'analyser et de disséquer les divers éléments d'une société prospère ou d'un pays prospère, vous comprendrez qu'il s'agit de savoir si les institutions parlementaires fonctionnent bien. Or, nos institutions parlementaires fonctionnent bien au Canada. Mais, en même temps, les gens veulent être sûrs que leur système judiciaire fonctionne bien également. À ce chapitre, il n'existe pas de meilleur système judiciaire que celui que nous possédons au Canada, mais il faut être vigilant en permanence, afin de maintenir la confiance du public en ce système. Et cette mesure fait partie de ce travail.
Quand j'étais en Colombie-Britannique il y a environ un mois, le procureur général de la province m'a parlé d'un type qui ne voulait pas qu'il y ait d'enquête sur le cautionnement, car il voulait justement obtenir un crédit double pour le temps passé en détention provisoire. Pour ma part, j'ai exercé le droit criminel au début des années 1980, et je dois admettre que je n'avais jamais entendu parler d'une telle chose. À cette époque, on allait voir son client, et la grande priorité pour lui était d'être libéré après l'enquête sur le cautionnement. Or, ce procureur général me disait que l'individu en question préférait passer outre. Il disait qu'il ne voulait pas du tout d'enquête sur le cautionnement. Il préférait rester là où il était. Donc, on peut supposer que, s'il est condamné, on va lui accorder un crédit double lors du prononcé de la peine.
Sachez que ce n'est pas du tout ce qu'il faut au Canada. Cela n'a aucun sens. Nous voulons que les gens obtiennent justice en temps opportun. Nous voulons également que les gens soient traités équitablement, sans donner d'incitation à quiconque de profiter des retards qui peuvent se produire.
S'agissant du Budget principal des dépenses, nous avons déjà parlé des défis que sont l'accès à la justice et le bon fonctionnement de l'organisation judiciaire. Eh bien, cette mesure représente un progrès important pour ce qui est de s'assurer que personne n'est incité à ralentir le système de justice pénale. Or, la pratique actuelle a pour résultat de ralentir ce dernier, et c'est pour cela que nous devons aller de l'avant.
Encore une fois, je vous remercie, et je tiens à vous faire savoir à quel point j'apprécie votre appui et vos observations sur la question.
Encore une fois, la discussion de cet après-midi cadre plus ou moins avec ce que nous avons entendu dans l'Ouest, à savoir le rapport entre la notion générale de l'indépendance de la magistrature et la responsabilisation. Ce sont les deux éléments du dilemme auquel nous sommes confrontés, et je pense que tout le monde serait prêt à reconnaître qu'il est important que notre magistrature soit indépendante. Il n'y a pas de doute à ce sujet. Mais, certains témoins dans l'Ouest, et parfois ici, nous ont dit qu'il n'existe pas de mécanisme permettant de responsabiliser les juges. Vous vous demandez peut-être, en regardant le plafond, en quoi mon propos est pertinent. Ce que je veux dire par là, monsieur le ministre, c'est que ce projet de loi permet de… non pas réduire, mais au moins mieux définir l'ampleur du pouvoir discrétionnaire des juges en déterminant le crédit à attribuer pour le temps passé en détention provisoire.
Par contre, je trouvais que vos observations étaient tout à fait appropriées et encourageantes — exactement le genre d'observations auxquelles on pourrait s'attendre de la part d'un ministre de la Justice pour ce qui est du droit des juges d'interpréter les lois, telles qu'elles ont été rédigées par le Parlement, et c'est ce que j'ai dit dans l'Ouest. Le fait est que la Chambre des communes est chargée d'élaborer les lois et, si ces dernières posent problème, c'est peut-être la faute des parlementaires — nous, les législateurs — et même davantage celle du ministre de la Justice, qui propose certaines mesures aux législateurs.
Plusieurs personnes nous ont dit que le problème se situe au niveau des juges. Je crois que c'est en Colombie-Britannique qu'on nous a fait cette remarque, là où des études ont été menées au sujet d'une approche laxiste et ce genre de choses.
La question générale que j'aimerais vous poser est celle-ci: vous discutez avec les procureurs généraux. Je sais que le procureur général de ma province, T.J. Burke, le premier procureur général autochtone du Canada, discute avec les juges en chef aux niveaux provincial et fédéral de la gestion du temps des tribunaux, et de ce genre de choses. Je sais également qu'il existe le Conseil canadien de la magistrature, dont le rôle consiste, entre autres, à régler les cas de comportement non approprié. D'abord, monsieur le ministre, êtes-vous convaincu que notre magistrature est vraiment indépendante — pour moi, c'est clair — et aussi qu'elle est suffisamment responsabilisée? À votre avis, d'autres changements seront-ils nécessaires, à part d'éventuelles modifications législatives touchant leur pouvoir discrétionnaire? Si l'on en croit certaines personnes, comme Daryl Plecas — voilà, je l'ai nommé — les juges sont à l'origine de ce problème.