C'est la 13e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous sommes aujourd'hui le mercredi 1er avril 2009.
Vous avez devant vous l'ordre du jour. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel (crime organisé et protection des personnes associées au système judiciaire).
Veuillez noter que nous allons siéger à huis clos pendant une dizaine de minutes à la fin de la séance pour aborder un certain nombre de questions reliées au voyage que nous voulons faire à Vancouver pour notre étude sur le crime organisé.
Pour nous assister dans notre examen du projet de loi C-14, nous allons entendre un certain nombre de témoins qui représentent divers groupes d'intéressés faisant partie du système judiciaire.
Tout d'abord, nous allons entendre le sergent d'état-major Christopher Renwick, membre de l'unité des armes à feu et des bandes, du Service des enquêtes criminelles ainsi que le sergent d'état-major Bernie Ladouceur, de l'unité des renseignements criminels du Service des enquêtes criminelles, tous les deux du Service de police d'Ottawa. Nous allons également entendre le surintendant principal Todd Shean de la GRC, qui est directeur général des Drogues et du crime organisé, ainsi que le surintendant Michel Aubin, directeur, Immigration et passeports.
Nous allons également entendre d'Halifax, par téléconférence, le chef de police d'Halifax, M. Frank Beazley. Bienvenue.
Nous allons également entendre plus tard M. William Trudell, le président du Conseil canadien des avocats de la défense.
Messieurs, vous connaissez la formule, chacun de vos organismes dispose de 10 minutes pour présenter un exposé et ensuite, lorsque vous aurez terminé, les membres du comité vont vous poser des questions.
Nous pouvons commencer par M. Ladouceur ou par M. Renwick.
Monsieur Renwick, allez-y.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous de nous donner la possibilité de comparaître devant votre comité pour vous parler aujourd'hui au nom de l'unité des armes à feu et des bandes du Service de police d'Ottawa.
Je suis accompagné aujourd'hui par le sergent d'état-major Bernie Ladouceur, sergent d'état-major de notre unité des renseignements criminels ainsi que par le sergent Dave Lockhart, également des renseignements criminels, et par Mme Tammy Quinn, notre excellente analyste des crimes. Le sergent d'état-major Ladouceur répondra aux questions qui touchent précisément le crime organisé.
L'unité des armes à feu et des bandes du Service de police d'Ottawa a été mise sur pied en 2006 à partir de la section d'intervention auprès des jeunes pour lutter contre un fait nouveau, la formation de gangs de rue dans notre ville qui exerçaient leurs activités dans le domaine du commerce illégal ou illicite du crack et de la prostitution de jeunes femmes vulnérables. Le personnel actuel de la section des armes à feu et des bandes comprend 11 enquêteurs, qui travaillent principalement dans deux secteurs: les enquêtes criminelles concernant les membres de gangs de rue connus et leurs associés et les enquêtes criminelles sur la possession, l'utilisation et le trafic des armes à feu.
Une équipe d'intervention directe (direct action response team ou DART en anglais) en uniforme a été constituée en octobre 2007 pour compléter l'unité des armes à feu et des bandes, et chargée spécialement de surveiller les activités des gangs, tout en assurant une présence policière active et très visible dans les collectivités touchées.
J'ai assisté au quartier général du Service de police d'Ottawa, avec le chef Vern White et le solliciteur général et procureur général de la Colombie-Britannique, à l'annonce par le ministre de la Justice fédéral, M. Nicholson, de la présentation du projet de loi C-14. Dans ses remarques qui ont suivi l'annonce, le chef White a déclaré que ce projet de loi était utile parce qu'il renforçait la répression des crimes commis dans nos rues.
Il comporte un aspect qui intéresse particulièrement nos enquêtes sur les gangs de rue, à savoir l'introduction d'une peine minimale de cinq ans d'emprisonnement pour les fusillades concernant des armes à feu à autorisation restreinte ou prohibées reliées à une organisation criminelle. Cette mesure, accompagnée du renforcement des peines associées aux armes à feu introduites il y a quelques années, constitue un changement efficace et satisfaisant.
En 2008, l'unité des armes à feu et des gangs et notre équipe d'intervention directe ont saisi 66 armes à feu qui étaient en circulation. Nous constatons une augmentation du nombre des criminels qui portent des armes à feu à Ottawa à des fins d'intimidation ainsi que pour défendre leur territoire et protéger leur marché du crack.
Les fusillades dans les lieux publics sont de plus en plus fréquentes. Nous avons eu deux fusillades dans la rue ces dernières semaines, au cours desquelles des personnes ont été blessées par balles et qui étaient toutes deux reliées à des gangs de rue et au commerce du crack. Ce matin encore, nous avons récupéré un pistolet de calibre .45 qui a été utilisé, pensons-nous, dans une de ces fusillades et nous avons arrêté un membre de gang connu. Le projet de loi C-14 s'applique directement aux enquêtes de ce genre.
La qualification automatique des homicides en meurtre au premier degré et les dispositions relatives à la peine minimale de cinq ans en cas de fusillade exigent toutes deux que l'infraction ait été commise au profit ou sous la direction d'une organisation criminelle ou en association avec elle. Cet élément impose un fardeau supplémentaire aux enquêteurs de la police qui doivent établir que l'accusé était membre d'une organisation criminelle et j'ai très hâte de voir comment les tribunaux interpréteront ces dispositions. J'espère que nous allons réussir à utiliser cette procédure, étant donné que récemment un de nos enquêteurs a obtenu le statut de témoin expert au cours d'une audience de détermination de la peine concernant un vol qualifié. Nous avons également obtenu le statut de témoin expert récemment dans une audience de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié concernant une mesure d'expulsion.
Nous appliquons les six critères du Service de renseignements criminels du Canada pour qualifier une personne de membre d'un gang. Ces critères ont été élaborés en 1991 de façon à uniformiser les décisions dans ce domaine sur le plan national. L'expression « organisation criminelle » est définie à l'article 467.1(1). Par contre, les critères que nous utilisons actuellement ne le sont pas.
Nous avons appris dès le début qu'une stratégie antigang efficace devait être principalement fondée sur les renseignements criminels si l'on voulait optimiser l'utilisation des ressources que le Service de police d'Ottawa consacrait à l'unité des armes à feu et des gangs. Les enquêtes sont fondées sur des renseignements criminels, la plupart de ces renseignements provenant de quatre sources: les renseignements fournis par la collectivité grâce à Crime Stoppers, les vérifications d'identité dans la rue et les rapports d'incident préparés par nos agents de première ligne, le recrutement d'informateurs codés par les enquêteurs de l'unité des armes à feu et des gangs et bien sûr, la communication d'information et de renseignements criminels provenant de partenaires externes. C'est la raison pour laquelle nous accordons autant d'importance à l'analyse des crimes et nous estimons que nous serons en mesure d'établir le lien entre les infractions et le crime organisé que les tribunaux vont exiger pour imposer des peines minimales obligatoires.
La création de deux nouvelles infractions concernant l'agression armée contre les policiers et les agents de la paix est une mesure encourageante; nous estimons toutefois que ces dispositions ne vont pas jusqu'à réprimer l'intimidation des agents des tribunaux et des représentants de la justice.
Nous connaissons régulièrement des problèmes avec les gangs qui intimident les témoins, ce qui nous empêche de déposer des accusations ou nous oblige à retirer des accusations portées contre des membres de gang. Nous avons vu des membres de gang assister aux audiences concernant d'autres membres de leur gang et il faut reconnaître que cela a un effet sur nos témoins. À Ottawa, il n'y a pas encore eu de cas d'intimidation d'un fonctionnaire judiciaire mais il y a toujours le risque que cela se produise.
Pour ce qui est de la dernière modification proposée qui touche l'article 810, les engagements de ne pas troubler l'ordre public, cette mesure vise à rassurer les membres de la collectivité en donnant au juge de la cour provinciale la possibilité d'imposer d'autres conditions lorsqu'il fait signer un engagement à l'accusé. La plupart des personnes liées aux gangs de rue qui comparaissent devant le juge de la cour provinciale le font non pas en qualité de défendeur dans une audience relative à un engagement mais plutôt en qualité d'accusé d'infractions pénales.
Si le tribunal estime approprié de les libérer en attendant leur procès, il peut leur imposer des conditions en leur faisant signer un engagement ou une promesse. Les conditions imposées sont très faciles à faire respecter et c'est là qu'entre en jeu notre équipe d'intervention directe qui vérifie périodiquement si les engagements et les conditions dont ils sont assortis sont respectés. Si ce n'est pas le cas, les accusés sont arrêtés et ramenés devant les tribunaux où nous présentons des arguments visant à les garder en détention en attendant leur procès. Il serait très utile pour un enquêteur et il y aurait moins d'intimidation de témoins si l'on renforçait les conditions d'octroi de la libération sous cautionnement.
À la suite de la présentation du projet de loi C-14 le 26 février par le ministre de la Justice Nicholson, le chef White a également fait remarquer que c'était un bon début, mais seulement un début, et qu'il fallait faire davantage pour nettoyer les rues. La clé est la réforme de la notion d'accès légal, accès légal étant le terme utilisé pour décrire le processus légal qui autorise la police à intercepter des communications privées. Il faut remplacer ces dispositions législatives désuètes qui remontent à 1974, et nous donner la capacité d'intercepter des messages envoyés grâce aux nouveaux systèmes de communication qu'offrent au public les fournisseurs de service. Nous aimerions également renforcer les règles et règlements concernant notre capacité d'obtenir des renseignements au sujet des abonnés. Au niveau des enquêtes, le sergent d'état-major Ladouceur et moi connaissons trop bien les restrictions qui sont placées sur les enquêtes et les projets en cours, sans parler des coûts prohibitifs.
J'ai beaucoup parlé d'application de la loi et peu de prévention et de déjudiciarisation. Le Service de police d'Ottawa s'est engagé à mettre en oeuvre une stratégie de lutte contre les gangs fondée sur les quatre piliers que sont l'éducation de la collectivité, l'intervention, la déjudiciarisation, l'application de la loi et la réduction des cibles. Cependant, lorsque l'on a affaire à des organisations criminelles qui participent au commerce illégal des drogues et dont les membres sont de plus en plus disposés à porter et à utiliser des armes à feu, il faut être très ferme.
À mon avis, le projet de loi C-14 répond aux objectifs de dénonciation et de dissuasion à l'égard des crimes violents reliés au crime organisé et aux gangs de rue.
Merci.
Permettez-moi de parler tout d'abord de l'impact financier.
Le résultat des crimes de nature financière sur les Canadiens, même s'il n'est pas toujours visible, est dévastateur et peut contribuer à miner l'intégrité économique du pays. La monnaie contrefaite en est un exemple. Nous avons tous vu dans les magasins des messages indiquant à la clientèle qu'ils n'acceptent plus de billets de 100 $. La valeur et la stabilité de la monnaie canadienne sont indispensables à la vitalité de l'économie, et la monnaie contrefaite amoindrit la confiance qu'ont les Canadiens en leurs billets de banque.
Les fraudes en marketing de masse sont considérées comme un acte criminel à faible risque et à profits élevés. En 2008, les pertes imputées à ce type de fraude se sont élevées à 66,4 millions de dollars. Il est important de signaler que 95 p. 100 des victimes de cette forme de fraude ne la signalent pas. De nombreux groupes criminels ciblent les citoyens les plus vulnérables, comme nos aînés.
[Français]
Les marchandises contrefaites sont également considérées comme une activité à faibles risques.
Les groupes criminels organisés s'intéressent de plus en plus aux profits élevés que peuvent rapporter les marchandises contrefaites: des vêtements ou des accessoires, même des pièces d'automobile, des produits électriques, des produits pharmaceutiques, des piles, du dentifrice et des disjoncteurs, et ce ne sont là que quelques exemples. En fin de compte, la contrefaçon occasionne des pertes aux entreprises légitimes ainsi qu'à l'économie, mais présente également des risques considérables sur le plan de la santé et de la sécurité.
[Traduction]
La contrebande de tabac est un autre marché illicite, qui contribue à une économie clandestine représentant des centaines de millions de dollars. Habituellement perçu comme un crime sans victime, le trafic de tabac est aujourd'hui considéré comme une importante source de revenus pour tous les niveaux du crime organisé, qui réinvestissent les profits considérables réalisés dans d'autres activités criminelles. Il en résulte une perte de recettes fédérales et provinciales, qu'il aurait été possible d'affecter aux soins de santé ainsi qu'à d'autres programmes sociaux.
L'an dernier, la GRC a saisi en tout plus d'un million de cartouches de tabac illicites. La disponibilité de produits de contrebande a atteint un sommet historique. Le niveau de nos saisies surpasse de 137 p. 100 le niveau de référence de 1994, une époque où l'on considérait que le marché noir échappait à tout contrôle.
L'impact social n'est pas moins préoccupant. Les tactiques qu'emploie le crime organisé, comme la corruption, les conspirations internes et l'intimidation, minent la confiance des Canadiens dans notre système de transport, dans notre système judiciaire ainsi que dans la sécurité de nos points d'entrée. Quand des secteurs clés de l'économie et des institutions du Canada sont ciblés, quand des fonctionnaires et des employés sont corrompus par le crime organisé, les Canadiens ne se sentent pas en sécurité.
Les groupes criminels organisés tenteront d'exploiter des employés travaillant dans des aéroports, par exemple, en corrompant des employés déjà en place ou en intégrant des complices au personnel d'un aéroport.
[Français]
Le Projet Colisée, une enquête menée par l'Unité mixte d'enquête sur le crime organisé, a mis au jour une série de conspirations visant à importer de la cocaïne au Canada à partir de divers pays par l'intermédiaire de l'Aéroport international de Montréal.
Plus de 90 personnes ont été arrêtées. L'organisation criminelle qui avait planifié l'opération avait réussi à corrompre deux responsables à l'aéroport, et l'un avait été soudoyé en vue d'aider à faciliter l'importation de drogue dans des conteneurs.
[Traduction]
Les groupes criminels organisés ont également intensifié leur recours à la violence dans la lutte qu'ils se livrent pour s'emparer de territoires et de parts dans ce qui sont devenus des marchés illicites fort lucratifs. C'est ainsi qu'un certain nombre de membres de bande ont commencé à porter des cuirasses souples et des gilets pare-balles et qu'ils ont modifié leurs véhicules en les blindant. Il est alarmant de constater qu'ils commettent des actes aussi violents et que les membres de bandes s'y préparent. Quand ces bandes se font la guerre dans les rues du Canada, ce sont des innocents qui en sont victimes, et un grand nombre d'entre eux ont perdu la vie.
Le crime organisé réussit également à exploiter et à victimiser les gens, en détournant des entreprises légitimes et en corrompant des éléments de nos systèmes politiques et judiciaire. Les groupes qui se fient aujourd'hui à la corruption de fonctionnaires usent aussi de violence et de tactiques d'intimidation contre tous ceux qui entravent leur route, et cela inclut les témoins potentiels, les juges, et même les services de police.
Que ce soit par crainte de représailles ou adhésion au code non écrit des criminels, les témoins refusent souvent de témoigner quand ils entrent dans la boîte des témoins, comme cela a été le cas récemment en Colombie-Britannique au cours du procès de deux membres de la direction du gang des Independent Soldiers. Les témoins ont été réticents à fournir des détails sur l'incident, l'un d'eux indiquant au procureur de la Couronne qu'il ne fournirait pas de détails parce qu'il voulait se protéger.
Ce sont là certaines réalités actuelles du crime organisé. Nous sommes d'avis que la connaissance et la prévoyance résident au coeur de n'importe quelle stratégie efficace destinée à combattre le crime organisé. Il est nécessaire d'obtenir des renseignements criminels pour évaluer avec exactitude les menaces et faire enquête en priorité sur les groupes clés.
Consciente de cette nécessité, la GRC a adopté, il y a plusieurs années de cela, une approche axée sur l'obtention de renseignements. Grâce à son travail d'obtention de renseignements criminels stratégiques et tactiques, la GRC, de pair avec d'autres services de police du Canada, évalue les menaces croissantes que pose le crime organisé. Des priorités ont été fixées sur le plan de l'application de la loi en vue de s'attaquer aux problèmes les plus pressants, et des enquêtes ont été menées. Il est toutefois évident que les menaces que pose aujourd'hui le crime organisé sont complexes, généralisées et, maintenant, dans de nombreuses collectivités du pays tout entier, solidement ancrées.
Pour s'attaquer à l'évolution rapide des menaces que pose le crime organisé, un certain nombre d'initiatives précises concernant l'obtention de renseignements criminels ont été mises en place au cours des trois dernières années. Ces initiatives, entreprises à l'échelon local, provincial, national et international, visent expressément à lutter contre le crime organisé.
En bref, des équipes de recherche de renseignements criminels, qui mettent au point des renseignements tactiques pour appuyer les opérations policières menées contre les groupes criminels organisés, y compris les gangs de rue, ont été mises sur pied dans plusieurs provinces. La GRC s'est en outre associée à d'importants organismes de police étrangers afin de faciliter la circulation des renseignements sur le crime organisé et mieux comprendre les menaces criminelles communes.
Par ailleurs, un certain nombre de comités nationaux et internationaux d'application de la loi favorisent la collaboration inter-organismes au Canada; ces comités contribuent tous à suivre une orientation et un but stratégiques communs: perturber le crime organisé. Ces groupes comprennent les suivants: le Comité national de coordination sur le crime organisé, le Comité sur le crime organisé de l'Association canadienne des chefs de police, le Comité sur les modifications législatives de l'Association canadienne des chefs de police et l'Association internationale des chefs de police.
Une initiative relativement nouvelle, la Réponse intégrée au crime organisé, ou RICO, représente l'ensemble des services de police du Canada tout entier, tant sur le plan opérationnel que sur celui du renseignement. La RICO s'efforce d'établir des stratégies opérationnelles qui prendront appui sur nos efforts collectifs.
La GRC continue de former des partenariats importants avec des organismes nationaux et internationaux en vue de créer des équipes d'intervention mixtes, qui font partie des mesures les plus efficaces qui soient pour perturber les groupes criminels. Par exemple, les unités mixtes d'enquête sur le crime organisé et les unités de la RICO sont des équipes intégrées d'agents de police et d'organismes gouvernementaux dont le mandat consiste à mettre au jour, analyser, poursuivre, démanteler et perturber les entreprises du secteur criminel organisé.
Nous disposons en outre d'équipes mixtes qui ciblent la criminalité transfrontalière, comme les équipes intégrées de la police des frontières. Ces dernières sont des groupes binationaux, axés sur le renseignement, qui échangent des informations et collaborent quotidiennement avec les organismes étatiques et provinciaux locaux au sujet de diverses questions, telles que la sécurité nationale, le crime organisé et les autres crimes transfrontaliers.
Sur le plan international, nos agents de liaison en poste à l'étranger sont situés à des endroits stratégiques, aux quatre coins du globe, en vue de soutenir nos enquêtes sur le crime organisé et de répondre non seulement aux besoins de la GRC, mais aussi à ceux de l'ensemble de la collectivité policière du Canada. Une saisie qui a été effectuée en 2006 est une excellente illustration de la mondialisation du crime organisé et des partenariats que nous avons développés nationalement et internationalement.
Conjointement avec le ministère de la Défense nationale, la GRC a saisi 22,5 tonnes de haschich sur la côte d'Afrique qui était destiné au Canada. Notre succès est dû en grande partie à la capacité des officiers de liaison de la GRC, postés dans huit pays différents, de fournir un soutien à l'enquête concernant ce projet.
Pour terminer, monsieur le président, la GRC déploie beaucoup d’efforts pour s'attaquer aux activités du crime organisé au XXIe siècle. Peut-on faire davantage? Oui. Pouvons-nous supprimer le crime au Canada? Non. Mais nous pouvons déranger ses activités, cibler ses revenus et dissuader les groupes criminels d'exploiter et de menacer l'intégrité financière et la sécurité frontalière du Canada.
Grâce à la notion de service de police axé sur les renseignements criminels et en travaillant en étroite collaboration avec les partenaires clés, au Canada et dans le monde entier, qui font face à des problèmes et à des difficultés semblables, nous contribuons à assurer la sécurité de nos foyers et de nos collectivités, tant au Canada qu'à l'étranger.
J'aimerais vous remercier de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre aux questions une fois présentés les différents exposés.
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Je remercie monsieur le président et les membres du comité.
Excusez-moi d'être en retard. Les autorités de l'aéroport de Toronto ont dû décider si l'avion allait décoller. Il était en retard. Je me suis adressé à un représentant et je lui ai dit: « Si je ne pars pas, est-ce que je vais avoir deux pour un pour mon billet? » Il m'a répondu « Non ». Je suis venu quand même.
Le Conseil canadien des avocats de la défense est très heureux d'avoir la possibilité de comparaître et de vous aider. Cela fait maintenant près de 17 ans que nous comparaissons. Nous considérons que notre rôle ne consiste pas à choisir un côté ou un autre mais à examiner le projet de loi et à offrir notre aide sur la question de savoir si ce projet de loi comble des lacunes, si nous pouvons offrir des conseils sur les changements possibles et même dans certains cas, indiquer que nous ne pensons pas que le projet de loi est nécessaire.
Dans ce cas précis, notre position est la suivante. Nous reconnaissons que le crime organisé au Canada constitue un problème, comme il l'est dans le monde entier, mais nous voulons être très prudents lorsqu'il s'agit d'étiquetter les organisations criminelles. La définition qui a été adoptée il y a quelques années en est encore presque au stade de l'enfance. Il n'y a eu qu'une affaire vraiment importante — je crois que c'est l'affaire Bonner de l'Ontario — dans laquelle le tribunal a défini ce qu'est une organisation criminelle. Nous nous trouvons donc dans une étape de mise en place, d'après nous, et c'est pourquoi nous vous invitons simplement à être prudent lorsqu'il s'agit d'ajouter au Code criminel des articles qui font appel à cette notion d'organisation criminelle. D'après nous, ce projet a pour effet de rendre plus complexes les poursuites et l'infraction.
Permettez-moi de dire ceci. Malgré le respect que j'éprouve pour vous et pour mes collègues assis à ma droite, ainsi que pour ceux qui travaillent sur le terrain, il ne sert à rien de qualifier de meurtre au premier degré tout meurtre commis en association avec une organisation criminelle. Un meurtre est un meurtre. Un meurtre au premier degré est un meurtre au premier degré. Cette mesure contribue par contre à embouteiller le système de justice pénale alors qu'on souhaiterait qu'il fonctionne plus rapidement. Existe-t-il une lacune dans les textes législatifs? Ce projet ajoute-t-il quelque chose? Nous vous invitons respectueusement à examiner si c'est bien le cas.
Il est bien sûr possible de commenter ce projet à des fins politiques. C'est votre travail. Vous présentez un projet de loi et c'est la raison pour laquelle vous avez été élus au Parlement. Mais est-il nécessaire? Ce projet vient-il combler une lacune? D'après nous, ce n'est pas ce que fait la qualification de meurtre au premier degré attribuée au meurtre commis au profit d'une organisation criminelle ou en association avec elle. Le meurtre d'un agent de police est, par exemple, réputé constituer un meurtre au premier degré. Vous n'avez pas à vous inquiéter de la définition de ce meurtre. Nous l'acceptons. Cela figure dans le Code criminel. Mais lorsque vous présentez ce genre de mesures, vous ouvrez la porte à toutes sortes de contestations et cela complique les règles; cela n'apporte rien au système de justice pénale si ce projet ne comble pas de lacunes. C'est ce que nous dirions pour commencer.
Deuxièmement, il y a un autre article qui impose des peines minimales obligatoires pour certaines nouvelles infractions. Existe-t-il vraiment une lacune qu'il conviendrait de combler par la création de nouvelles infractions comme le propose le projet de loi C-14? Nous pensons respectueusement que ce n'est pas le cas. Nous continuons d'ajouter des dispositions au Code criminel alors que nous sommes encore en train de nous demander ce que veulent dire certains articles. Par ailleurs, la police dispose d'outils pour inculper les gens d'infractions reliées aux armes à feu. Si l'on veut adopter une position au sujet des peines minimales obligatoires et que l'on crée de nouvelles infractions, il faut se demander si cela va combler une lacune à long terme ou s'il s'agit simplement de faire passer un message? Nous vous invitons à examiner cet aspect.
Nous, les avocats de la défense du Canada, vous demandons de limiter le plus possible l'imposition de peines minimales obligatoires. Je peux vous dire que ce genre de mesure n'envoie pas le bon message aux juges. Les juges prennent très au sérieux ces infractions. L'objectif de dénonciation joue un rôle très important dans nos collectivités lorsqu'il s'agit d'armes à feu et de violence et les juges ont besoin, à mon avis, de disposer d'un pouvoir discrétionnaire de façon à pouvoir adapter la peine au crime et au contrevenant.
Il y a un autre article du projet de loi C-14 qui étend le recours à l'article 810, les dispositions relatives à l'engagement de ne pas troubler l'ordre public ainsi que le recours aux engagements. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt les commentaires que le ministre a formulés lorsqu'il a présenté ce projet de loi. Il a parlé de donner aux juges la possibilité d'adapter les conditions d'un engagement pour que le processus ne soit pas automatique. Ce sont les mots qu'il a utilisés. À mon avis, cela va tout à fait à l'encontre des peines minimales obligatoires.
Nous pensons, et nous le constatons tous les jours, que les tribunaux sont sévères pour les infractions graves et qu'ils sont sévères pour les crimes de violence. Je pense que le législateur a fait son travail, que les services de police font leur travail, parce qu'ensemble ils font savoir que les actes criminels graves donneront lieu à des poursuites et seront traités avec beaucoup de sévérité et que c'est ce qui se passe.
Si vous le permettez, j'aimerais faire une comparaison pendant un instant.
Nos soldats sont en guerre en Afghanistan. Nous ne sommes pas seulement en guerre; nous n'avons pas seulement des troupes de combat dans ce pays. L'idée qui est répandue dans le monde entier et l'idée que veut concrétiser l'armée canadienne est que nous devons construire et renforcer les institutions démocratiques de ce pays pour donner à la population le sentiment que la façon de faire d'al-Qaeda, si je peux utiliser cette expression, n'est pas la bonne. Si l'on transpose cela à la lutte contre les activités criminelles, il faut alors non seulement déployer des efforts pour créer de nouvelles infractions mais déployer beaucoup d'efforts pour renforcer les services de police, les enquêtes, la participation communautaire, parce que les gens qui s'associent aux gangs, qu'il s'agisse d'organisations criminelles au sens de cette définition ou de simples organisations, ne sont pas socialisées. Ce sont des anormaux. Ils ne sont pas adaptés. Ils ont une culture différente.
Et pourquoi? C'est parce qu'ils estiment que cette culture convient mieux à leur style de vie. Nous n'allons pas faire disparaître les gangs. Ce qu'il faut faire, c'est déployer beaucoup d'efforts pour essayer de montrer certaines choses, intégrer ces personnes et essayer de les éduquer.
Je ne dis pas qu'il faut les dorloter. Ce n'est pas ce que je dis.
J'habite à Toronto et pas très loin de l'endroit où j'habite il y a un quartier de Toronto où le taux de criminalité est élevé. L'autre soir, je rentrais chez moi avec mes enfants et ma femme et nous avons vu trois policiers qui marchaient dans la rue dans ce quartier. Mon fils m'a dit: « C'est vraiment bien. » Je suis sûr que cela coûte très cher de faire patrouiller ce secteur par trois policiers mais cette présence envoie un message clair.
Si je voulais être membre d'un gang, je ne m'inquièterais pas des peines minimales. Je ne me demanderais pas si cette peine est obligatoire. Je ne me demanderais pas non plus si ces actes vont me faire commettre un meurtre au premier degré... Je ne pense pas du tout de cette façon. Je cherche uniquement une satisfaction immédiate.
Il y a des gens qui deviennent membres de ces gangs parce qu'ils s'en trouvent valorisés. Je ne dis pas qu'il ne faut pas punir ces gangs mais si nous les punissons et nous leur attribuons une certaine crédibilité en les ciblant, alors je ne pense pas que nous ayons résolu quoi que ce soit.
Ce projet de loi constitue un ensemble hétéroclite. Nous pensons que la présentation d'un ensemble hétéroclite de projets de loi de nature pénale va détruire le Code criminel.
Il faut tenir compte de l'ensemble du Code criminel mais nous ajoutons constamment de nouvelles dispositions. Si vous constatez, après avoir étudié ces projets de loi, qu'il y a un besoin, qu'il y a une lacune, qu'il y a un manque et non pas un simple sentiment répandu dans la collectivité, alors il faut les adopter. Mais vous devez d'abord décider s'il y a une lacune. Vous devez d'abord décider s'il y a un besoin. Et vous devez donc décider quel sera l'effet de ce projet.
Dans notre pays tout entier — du ministère de la Justice à Ottawa jusque dans les provinces, y compris les services de police, les avocats de la défense, les sous-procureurs de la Couronne et les juges — tout le monde aimerait avoir un système de justice pénale plus efficace.
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Bonjour, monsieur le président, et je vous remercie d'avoir tenu compte de mon horaire pour aujourd'hui. C'est un plaisir de vous parler du projet de loi C-14.
Comme vous le savez, ces dernières années le problème de la violence et de la criminalité juvénile n'a fait que s'aggraver dans la plupart des villes canadiennes. Halifax ne fait pas exception. Halifax a depuis longtemps une sous-culture de drogue, qui a amené avec elle d'autres comportements criminels et d'autres violences. Ce problème a été aggravé ces dernières années par l'apparition d'une culture de gang et de la violence qui l'accompagne. Halifax est depuis dix ans une des villes les plus violentes du Canada.
En 2005, nous avons mis en oeuvre une stratégie de réduction de la criminalité qui ciblait les zones à forte criminalité et les récidivistes. Ces mesures ont entraîné une diminution progressive des crimes violents. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour réduire ces crimes.
La criminalité a diminué pendant quatre années consécutives mais ce sont les incidents violents qui inquiètent nos citoyens, en particulier les incidents reliés aux armes à feu. Mes officiers supérieurs et moi recevons presque tous les jours des commentaires de citoyens qui déclarent avoir peur de venir à Halifax à cause de la violence qui y règne. C'est quelque chose qu'aucun d'entre nous ne veut voir dans sa collectivité.
Même si la plupart des crimes de violence sont commis par et contre des personnes exerçant des activités criminelles, les infractions violentes, en particulier celles qui sont reliées aux armes à feu, donnent l'image d'une ville peu sûre.
Mais ce n'est pas une simple question de perception. Il y a eu en 2008 une augmentation de plus de 10 p. 100 par rapport à 2007 du nombre des armes à feu saisies par la HRP. L'année dernière, nous avons saisi 135 armes à feu dans la ville d'Halifax. Au cours des deux premiers mois de 2009, il y a eu 18 cas de crimes violents reliés à une arme à feu et 23 autres concernant des couteaux. Au moment où je vous parle, mes unités se trouvent dans un quartier de la ville où vient d'avoir lieu une fusillade à partir d'une voiture et il y a également des policiers sur les lieux d'un autre meurtre.
En août 2008, une fusillade a rendue plus visible la violence associée à des groupes criminels qui se faisaient la guerre. La violence a continué de façon sporadique jusqu'au début du mois de novembre, au moment où un criminel important a été libéré. Il semble qu'il y avait des incidents violents tous les jours. Malgré une réponse policière sans précédent, malgré le fait d'avoir ciblé ces deux groupes criminels, la violence a continué, et a débouché sur deux fusillades dans des lieux très publics. La première a eu lieu dans le stationnement d'une pizzeria locale et la seconde dans le stationnement de l'hôpital pour enfants IWK d'Halifax. Ces fusillades ont ébranlé la population et ont amené les services de police à intensifier leurs efforts. Un déploiement de ressources important et des efforts très ciblés ont entraîné l'arrestation de 14 personnes, la saisie de drogues et d'armes illégales, des accusations reliées aux drogues, des accusations graves reliées au Code criminel, y compris un complot en vue de commettre un meurtre et une tentative de meurtre.
En août 2008 également, s'est produite une série de vols qualifiés violents dans des commerces, ce qui a gravement inquiété la population. Plusieurs personnes avaient été soupçonnées d'avoir commis ces vols auparavant, des accusations ont été portées, mais les vols qualifiés ont continué. Les vols étaient bien préparés, avec des itinéraires de dégagement pour éviter d'être intercepté. Ce groupe criminel a obligé le service de police à lui consacrer des ressources importantes et à faire à des compétences et à un équipement spécialisés pour effectuer les enquêtes.
Ce ne sont là que quelques exemples des fusillades qui ont eu lieu dans des endroits très publics et sont devenues beaucoup trop fréquentes ces dernières années. Au cours de mes 39 années de service dans la police, rien ne m'a dérangé autant que le mépris total pour la sécurité des spectateurs innocents dont font preuve les auteurs de ces fusillades.
Je suis heureux que les modifications proposées au Code criminel visent le danger de plus en plus grave que posent les fusillades en pleine ville. Le projet de loi C-14 fait clairement comprendre que notre société n'accepte pas que les criminels se livrent à des fusillades à partir d'une voiture, le fait de décharger dangereusement des armes à feu dans des endroits publics et l'utilisation des armes à feu pour intimider. Cela fait longtemps que cela aurait dû être fait.
Le recours à la violence et à l'intimidation par le crime organisé pour atteindre ses objectifs criminels n'est pas un phénomène nouveau mais mon expérience m'indique que ce niveau de violence gratuite et extrême est quelque chose de nouveau. À mon avis, la plupart des citoyens ne se demandent pas si les homicides découlant des activités de ces organisations criminelles devraient être passibles de peines très sévères mais pourquoi ces peines ne s'appliquent pas à l'heure actuelle.
Nous avons clairement indiqué à tous que la violence reliée aux gangs ne sera pas tolérée. Indiquer qu'un meurtre est automatiquement un meurtre au premier degré lorsqu'il est commis en rapport avec une organisation criminelle est un pas important dans la bonne direction.
Je suis également heureux de constater que ce projet de loi crée deux nouvelles infractions qui ont pour but de protéger les agents de la paix et les autres fonctionnaires judiciaires. De nos jours, les policiers sont confrontés de plus en plus souvent aux armes et à la violence. Nous devons veiller à ce que nos lois répriment cette violence et ces dispositions reflètent le niveau de violence et d'intimidation auquel la police fait face de nos jours. Le nombre des agressions qu'ont subi les policiers d'Halifax cette année a augmenté de plus de 40 p. 100 par rapport à l'année dernière.
On risquerait de me reprocher de ne pas ajouter ma voix à ceux qui demandent que l'on modifie la partie VI du Code criminel, le régime applicable à l'interception des communications privées par des policiers.
J'ai passé une bonne partie de ma carrière à faire des enquêtes sur le crime organisé et à faire de l'écoute électronique et je peux vous dire que, sans la capacité d'intercepter légalement les communications privées, il y a beaucoup d'enquêtes réussies qui auraient échoué. Cette capacité a été compromise par l'évolution de la technologie et par le fait que le droit n'a pas suivi cette évolution. En dix ans, la complexité des enquêtes criminelles et de l'information nécessaire à ces enquêtes a été décuplée. Il faut que les outils utilisés pour lutter contre le crime se modernisent également. Je sais que d'autres témoins vous ont parlé de la notion d'accès légal, je ne vais donc pas m'appesantir sur ce sujet, si ce n'est pour dire que nous aurions déjà dû agir pour moderniser la partie VI du Code criminel. Nous avons besoin de ces moyens, nous en avons besoin maintenant, si nous voulons pouvoir lutter contre le problème de plus en plus complexe que constitue la lutte contre le crime organisé et la violence.
Pour terminer, je ne peux pas vous affirmer aujourd'hui que ce projet de loi, ou n'importe quel autre projet de loi, réglera toutes les questions liées au crime et à la violence. En fait, ces problèmes ne peuvent être réglés que par une approche sociale très large qui s'attaque aux causes sous-jacentes de la criminalité, comme la pauvreté, le racisme et toutes les autres questions de développement social. Cela ne veut pas dire que le droit pénal n'a pas un rôle à jouer. Le projet de loi constitue un pas dans la bonne direction pour ce qui est de lutter contre les gangs criminels et la violence. C'est un projet ciblé qui vise certains problèmes auxquels font face les collectivités et je vous invite tous à appuyer ce projet de loi.
Merci, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président et merci aux témoins.
Le Parti libéral est favorable à ce projet de loi. Néanmoins, il est très utile pour nous d'entendre les agents d'application de la loi et dans ce cas-ci, également ce qu'a à dire M. Trudell.
Nous avons parlé aujourd'hui d'un certain nombre de thèmes communs. Le premier est que nous voulons tous renforcer la sécurité dans notre société. Nous reconnaissons tous que le crime organisé est vraiment organisé et qu'il l'est de plus en plus. Nous admettons tous que le Code criminel est un mélange d'ajouts, d'améliorations, de lacunes et d'irrégularités, et que nous ne faisons qu'ajouter à cet ensemble hétéroclite. Nous le reconnaissons tous. Par contre, nous voulons tous, en faisant rapidement adopter ce projet de loi, donner aux agents d'application de la loi quelques outils supplémentaires — mais nous le faisons sans changer, je le précise, avec tout le respect que je dois à M. Trudell, aucune de nos règles fondamentales en matière de droits et de libertés.
J'aimerais poser quelques questions précises qui découlent des commentaires qui ont été faits. Les premières touchent le témoignage que vous avez donné, surintendant principal Shean, au nom de la GRC, au sujet de la corruption, de l'infiltration et de l'intimidation. C'est ma première série de questions.
La série suivante concerne l'utilisation de l'écoute électronique, ou l'interception de renseignements, dont ont parlé le sergent d'état-major Renwick et le chef Beazley.
Premièrement, au sujet de la corruption, je dirais que vous, surintendant chef Shean, avez fait une affirmation assez troublante lorsque vous avez déclaré que le crime organisé « devient également efficace pour ce qui est d'exploiter et victimiser les gens » — ce que je crois que les gens comprennent — et « en détournant les entreprises légitimes et en corrompant des éléments de notre système politique et de notre système judiciaire ». Vous a ensuite parlé d'intimidation. Je pense que nous lisons tous les jours des choses au sujet de l'intimidation et je crois que nous comprenons cet aspect.
Ma question est en réalité double. Quels sont les cas de corruption de fonctionnaires dont nous parlons, et à quel niveau cela se passe-t-il? Dans l'ensemble, que pouvons-nous faire de plus pour lutter contre la corruption, l'intimidation et l'infiltration?
J'ai trois questions à vous poser.
Premièrement, on m'a beaucoup parlé d'une des facettes du crime organisé qui n'est peut-être pas nouvelle, mais dont on prend de plus en plus conscience. Il s'agit de toute la question des compagnies à numéro. Au cours des derniers jours, on a diffusé deux reportages sur l'industrie de la construction au Québec. Certains médias écrits ont même nommé certains secteurs précis de cette industrie, par exemple les grues.
Quelles informations supplémentaires pourriez-vous nous donner sur l'interface entre le crime organisé et les compagnies à numéro? Pourriez-vous même déposer des documents devant ce comité?
Dans un deuxième temps, à ma première lecture du projet de loi — que nous allons appuyer, cela ne fait aucun doute —, j'ai eu un peu la même réaction que Me Trudel. Je me suis dit qu'une personne qui commettait un homicide pour le compte d'une organisation criminelle risquait d'être emprisonnée à vie. J'essayais de voir ce que le projet de loi ajoutait de nouveau. J'ai déduit des indications fournies par le ministre que, finalement, il y a peut-être certaines situations où des gens qui commettent des crimes ou des homicides pour le crime organisé plaident l'homicide involontaire, c'est-à-dire le meurtre sans préméditation.
Êtes-vous d'accord pour dire que la question du meurtre au premier degré constitue véritablement la nouveauté qu'apporte ce projet de loi? Quel genre d'accusations cela vous permettra-t-il de porter? J'aimerais comprendre en quoi cela vous fournit un outil nouveau.
Je commence par vous poser ces deux questions, et si le président m'est indulgent, je poserai ma troisième question par la suite.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins.
Nous avons eu une discussion très intéressante qui a touché un grand nombre de sujets. Je vous remercie pour les commentaires que vous avez faits sur ces sujets jusqu'ici.
Pour ce qui est de l'approche qu'a adoptée actuellement le gouvernement, il a été dit que c'était un pas dans la bonne direction mais pas une panacée. Ce n'est certainement pas ce que nous prétendons. Notre méthode consiste à faire progresser les choses avec chacun de nos projets de loi. Au cours de la dernière législature, cela a voulu dire adopter des peines minimales obligatoires pour les crimes liés aux armes à feu, renverser le fardeau de la preuve pour la libération sous cautionnement pour les crimes reliés aux armes à feu, modifier les conditions de la détention à domicile, relever l'âge du consentement et présenter un projet de loi sur la conduite avec les facultés affaiblies. Au cours de cette session, nous avons présenté ce projet de loi ainsi que d'autres traitant des drogues illicites, du crédit accumulé en fonction de la durée de la détention préalable au procès et plus récemment, du vol d'identité.
Nous avons donc adopté une approche qui consiste à examiner chaque problème particulier et à essayer de faire évoluer notre système judiciaire dans la bonne direction, en tenant compte des préoccupations des policiers de première ligne, des victimes du crime et des autres acteurs du système de justice.
Nous avons ici des représentants d'Halifax, de la GRC, ainsi que d'Ottawa. Halifax et Ottawa sont des villes très étendues qui comportent des secteurs ruraux et urbains. Nous étudions aujourd'hui le crime organisé. Ce phénomène est souvent perçu — comme nous pouvons le voir aux nouvelles — comme un problème de centre-ville. Mais ce problème se pose également dans les régions rurales.
Est-ce un problème qui sévit uniquement dans les secteurs urbains ou devrions-nous tous nous y intéresser, que nous vivions dans les zones urbaines ou rurales, à titre de députés ou de Canadiens?
Je laisse à tous ceux que j'ai mentionné la possibilité de répondre à cette question.
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Merci beaucoup. Je dispose de cinq minutes? Ça va être très court. Je vais peut-être partager le temps qui m'est alloué avec un de mes collègues, si jamais je n'ai pas besoin de cinq minutes.
La question s'adressera à M. Todd ou peut-être à M. Michel Aubin. Je vais répéter à peu près les termes que M. Ménard a utilisés plus tôt en donnant un exemple. Dernièrement, il est question de l'industrie de la construction, qui semble être infiltrée par le crime organisé. Si des membres du crime organisé infiltrent l'industrie de la construction, c'est qu'ils veulent blanchir de l'argent qui vient de la prostitution, du vol, de la drogue, des cigarettes, etc. Donc, ils ont besoin d'un véhicule pour pouvoir entrer dans un groupe et blanchir leur argent.
On a aussi appris qu'ils infiltrent non seulement de gros groupes, mais que ces groupes sont parfois constitués de patrons, de responsables syndicaux, parfois même de gens qui contribuent à la démocratie au Canada sous différentes formes. On voit le crime organisé qui entre tout doucement par la porte arrière et se glisse vers le haut. Cela peut même parfois engendrer des problèmes beaucoup plus graves. Comme quelqu'un l'a dit plus tôt — je ne sais pas si c'était le représentant de la police d'Ottawa —, il y a des problèmes d'intimidation. Quelqu'un peut avoir peur; même un politicien peut avoir peur. Nous avons vu ce qui s'est passé en Italie. Tout a commencé dans le secteur de la construction et à la suite de l'opération Mains propres, l'affaire est remontée jusqu'au juge de la Cour suprême d'Italie, qui était impliqué dans toutes sortes d'événements. Il n'était pas le seul, certains juges étaient impliqués.
Il y a dans le projet de loi C-14 une protection pour les politiciens, les policiers ou les gens qui devront agir pour lutter contre le crime organisé, etc. Cette protection vous semble-t-elle suffisante aujourd'hui? J'ai un doute, même si on propose la loi. En 1975, on a fait une enquête sur la construction. On avait dit que cela ne se reproduirait plus jamais. Maintenant, nous sommes en 2009, 33 ans plus tard, une génération plus tard, et le crime organisé est encore présent dans la construction. C'est pourquoi je vous demande si le projet de loi qu'on essaie de vous présenter vous satisfait ou si c'est juste une petite partie de ce qu'on peut faire.