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La séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne est ouverte. La séance d'aujourd'hui, le mercredi 11 février 2009, est notre troisième réunion.
L'ordre du jour vous a été distribué. Veuillez noter que nous garderons environ 30 minutes à la fin de la réunion pour discuter du plan de travail du Comité et d'autres questions à traiter.
Conformément à l'ordre de renvoi du 4 février 2009, nous accueillons aujourd'hui le directeur des poursuites pénales par intérim, M. Brian J. Saunders. M. Saunders est le candidat qui a été proposé pour le poste de directeur des poursuites pénales, et il pourra répondre à vos questions concernant ses qualifications.
Monsieur Saunders, bienvenue parmi nous. Vous disposez de 10 minutes pour vous présenter à notre comité. Les membres pourront ensuite vous poser des questions.
Je demanderais aux membres du Comité de poser uniquement des questions concernant les qualifications de M. Saunders pour le poste de directeur des poursuites pénales.
M. Murphy invoque le Règlement.
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Merci, monsieur le président.
C'est un honneur pour moi d'avoir été choisi pour le poste de directeur des poursuites pénales, et je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour discuter de ma nomination.
Ce poste important et exigeant a été créé en décembre 2006, avec l'entrée en vigueur de la Loi sur le directeur des poursuites pénales, qui forme la partie 3 de la Loi fédérale sur la responsabilité. La Loi sur le directeur des poursuites pénales assure la transparence du principe de l'indépendance de la fonction de poursuivant.
J'assume ces fonctions, à titre intérimaire, depuis décembre 2006, et, au cours des deux dernières années, j'ai pu constater le dévouement et le professionnalisme des poursuivants et des employés au Service des poursuites pénales du Canada.
Vous avez en main mon curriculum vitae. J'aimerais mentionner quelques détails qui ne s'y trouvent pas, et étoffer certains points.
[Français]
Je suis né à Brandon, au Manitoba. Mon père était militaire, et comme la plupart des familles de militaires, nous avons déménagé fréquemment. J'ai vécu dans cinq provinces avant que ma famille s'établisse finalement à Edmonton, en Alberta, où j'ai fait mes études secondaires. J'ai reçu un baccalauréat ès Arts et un baccalauréat en droit à l'Université de l'Alberta, puis j'ai passé deux années à l'Université de Cambridge, en Angleterre, où j'ai obtenu une maîtrise en droit et un diplôme en études juridiques.
Par la suite, je suis retourné à Edmonton en tant que stagiaire au ministère fédéral de la Justice. J'ai été admis au barreau en 1978 et j'ai travaillé au ministère pendant 28 ans: de 1978 à 1985, j'ai travaillé au bureau régional d'Edmonton, et de 1985 jusqu'à 2006, j'ai travaillé à Ottawa. Je me suis joint au SPPC en décembre 2006.
À Edmonton, j'étais à la fois poursuivant et avocat plaidant au civil.
[Traduction]
Après mon transfert à Ottawa en septembre 1985, je me suis joint à la Division du contentieux des affaires civiles, où je me suis concentré principalement sur les droits de la personne, la Charte canadienne des droits et libertés et le droit public. Les poursuites ne relevaient pas de mes fonctions, mais je travaillais parfois à des affaires qui me mettaient en contact avec le droit criminel. Par exemple, certaines des causes dont je me suis occupé concernaient l'article 8 de la Charte, qui garantit la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
En 2000, j'ai été promu directeur général de la section du contentieux des affaires civiles à Ottawa. Cette section employait environ 35 avocats, dont beaucoup s'occupaient d'affaires partout au pays. J'ai continué de travailler comme plaideur pendant cette période, et j'ai également siégé au comité national du contentieux du ministère, qui a le mandat, notamment, d'étudier tous les mémoires relatifs aux appels en matière criminelle et civile soumis à la Cour suprême du Canada.
En février 2006, j'ai été nommé sous-procureur général adjoint chargé du portefeuille de la Citoyenneté, de l'Immigration et de la Sécurité publique. J'étais directement responsable des avocats du ministère de la Justice affectés à la Section des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, de même que de ceux des services juridiques de la GRC, du SCRS, de l'Agence des services frontaliers du Canada, de l'Immigration, du Service correctionnel, de la Commission nationale des libérations conditionnelles et de la Sécurité publique. J'assumais également la responsabilité fonctionnelle des avocats du ministère qui s'occupaient du contentieux en immigration pour le compte du gouvernement, partout au Canada.
[Français]
Et enfin, comme je l’ai mentionné au début, je suis devenu directeur des poursuites pénales par intérim le 12 décembre 2006. Le même jour, la majorité des employés de l'ancien Service fédéral des poursuites du ministère de la Justice ont été mutés au Service des poursuites pénales du Canada. Cela a représenté un changement de taille, car un grand nombre d’entre eux avaient passé toute leur carrière au ministère, et certains mettaient en doute la nécessité de la mutation. Cette hésitation s’est rapidement dissipée.
[Traduction]
Les employés reconnaissent la valeur de la création du Service des poursuites pénales. Ils font maintenant partie d'une organisation qui est entièrement vouée au travail de poursuite et qui, surtout, rend transparent le principe au centre même de ce travail, soit l'indépendance des poursuivants.
Au cours des deux dernières années, le Service des poursuites pénales a réalisé une transition, passant de composante du ministère de la Justice à une organisation gouvernementale indépendante. Nous avons mis sur pied une structure de gouvernance, nous nous sommes dotés de moyens d'action dans des domaines comme les communications, les services ministériels, l'accès à l'information, la protection de la vie privée et la planification stratégique.
Les poursuivants jouent un rôle clé au sein de notre système de justice pénale. Ce système fait en sorte qu'ils ont de lourdes responsabilités à assumer. Ils doivent, pour chaque dossier qu'on leur confie, décider si l'individu doit être poursuivi et exposé ainsi à une amende ou à une peine d'emprisonnement. Ils représentent l'intérêt public au sein de la collectivité, et doivent donc agir avec justice et fermeté, guidés uniquement par les principes et la loi. Le SPPC a été créé pour que leurs décisions soient libres de toute influence inappropriée.
Si ma nomination est confirmée, je veillerai à ce que le principe constitutionnel d'indépendance soit respecté, à ce que les poursuivants jouissent du soutien dont ils ont besoin pour remplir leurs tâches si importantes, et à ce que nous soyons redevables de notre travail et de l'utilisation des ressources qui nous sont allouées.
Je vous remercie. Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir.
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Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue à M.Saunders, que nous avons déjà eu le plaisir de rencontrer.
Je suis assez favorable à l'idée qu'il y ait un service des poursuites pénales relativement autonome. En effet, le Québec a connu beaucoup de succès avec cette façon de faire. Il y a en même temps l'idée de réconcilier l'intérêt public par l'entremise des mécanismes d'élection que l'on retrouve dans les parlements.
J'aimerais que vous me donniez des explications claires sur ce qui suit. Comme vous l'avez mentionné déjà, vous avez l'obligation d'informer le ministre des cas importants d'intérêt public. On peut penser, par exemple, que la question du crime organisé en est une d'importance, mais j'aimerais savoir ce qui se produirait si jamais il y avait divergence.
Je vous donne un exemple fictif. Toute assimilation à quelque chose de réel serait le fruit d'une imagination que je ne possède pas. Supposons qu'un ancien premier ministre fasse l'objet d'une poursuite et qu'en vous fondant sur votre expertise, vous estimiez devoir recommander une poursuite de cette nature, mais que le ne soit pas d'accord. Dans de telles circonstances, comment le mécanisme d'arbitrage s'établirait-il et à qui la décision finale incomberait-elle?
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Nous vous remercions beaucoup, monsieur Saunders, d'être parmi nous aujourd'hui.
Je vais poursuivre dans la même voie que M. Comartin, mais de façon beaucoup plus générale. La raison pour laquelle je vais vous poser cette question est très simple. Pour les gens d'Ottawa qui sont habitués à travailler dans un tel contexte, cela peut paraître assez facile, mais pour le commun des mortels, il en est autrement. Lorsque votre poste a été proposé — et cela touche certaines des questions que M. Comartin a posées — les gens à qui j'ai parlé croyaient qu'il s'agissait d'un procureur spécial et du bureau d'un procureur spécial, un peu comme ce qui existe aux États-Unis. Bien sûr, le travail du responsable des poursuites pénales au Canada, c'est-à-dire le poste que vous occupez, est différent, du moins d'après ce que j'en sais.
Ma question servira à éclairer les gens qui suivront les délibérations au petit écran; je veux qu'ils comprennent exactement la nature de votre travail et, surtout, en quoi il concerne leur collectivité. En fait, cela revient à parler des procureurs de la Couronne. Quelle est donc la nature de votre travail? En quoi est-il différent?
Pour répondre à ces bons citoyens qui suivent la procédure parlementaire, en quoi votre travail d'enquête diffère-t-il de celui des procureurs locaux? Nous suivons tous CSI au petit écran et d'autres émissions semblables; nous pouvons voir pendant ces épisodes combien les procureurs locaux ont un rôle important à jouer dans les enquêtes. Comme j'ai fait carrière dans le domaine de l'application de la loi, je sais que l'État n'a pas un rôle aussi important à jouer dans notre pays. Alors, parlez-nous de la nature de votre travail et dites-nous en quoi vos fonctions peuvent concerner les gens ordinaires, le citoyen moyen, qui suivront nos délibérations au petit écran. Pourriez-vous ensuite nous dire en quoi certaines choses qui se font aux États-Unis sont différentes de ce qui se passe au Canada? Pourriez-vous nous parler des éléments qui ont une influence sur nous et qui, parfois, peuvent porter à confusion?
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J'aimerais commencer en vous parlant du rôle des procureurs au Canada. Il existe 11 services des poursuites dans notre pays et je crois qu'ils ont tous le même rôle. Nous engageons des poursuites après que les enquêtes ont été menées par les corps policiers. Nous leur donnons des conseils avant la mise en accusation. Mais dans notre pays, il existe un principe en vertu duquel les corps policiers mènent leur enquête de manière indépendante. Les conseils avant la mise en accusation qui sont donnés aux corps policiers sont nécessaires, parce que la loi est compliquée et que les corps policiers ne veulent pas consacrer beaucoup de temps à enquêter sur une affaire si, en recueillant les éléments de preuve, ils ont transgressé la loi. Rappelez-vous ceci: le corps policier décide sur qui il faut enquêter, comment le faire, et quelles accusations il convient de porter.
Le rôle du procureur prend toute son importance après que les accusations ont été portées. À cette étape, le service des poursuites décide de la pertinence d'entamer une poursuite. Cela permet d'éviter les dérives. Nous laissons les corps policiers mener leur enquête, et puis ils peuvent porter des accusations s'ils ont des motifs raisonnables de croire qu'il y a eu infraction à la loi. Le procureur entre alors en jeu et mène un examen objectif et indépendant des éléments de preuve. Nous tenons compte des compétences et de la crédibilité des témoins. Nous tentons de déterminer s'il y a eu violation de la Charte. Nous décidons si une poursuite doit être engagée; il s'agit d'une étape importante de vérification dans le système. La responsabilité du procureur est lourde. On accuse souvent les corps policiers de porter des œillères, alors nous demandons à nos procureurs de garder un esprit ouvert et d'évaluer tous les éléments de preuve de façon objective.
Aux États-Unis, comme on peut le voir à la télé lorsqu'il est question, parfois, de procureurs spéciaux, les procureurs interviennent surtout pendant le déroulement de l'enquête. Là n'était certainement pas l'intention de la Loi sur le directeur des poursuites pénales, et cela ne s'applique pas dans les provinces et les territoires du Canada. Dans la loi de la Colombie-Britannique, il existe une disposition concernant un procureur spécial. Elle permet au procureur général de nommer un agent, un avocat du secteur privé, pour examiner une affaire et pour décider si la poursuite doit être engagée. Cet exemple diffère de ce qui se passe aux États-Unis, où le procureur spécial prend également en charge l'enquête.
J'aimerais maintenant vous parler du mandat que nous avons vis-à-vis des Canadiens. Avant notre création, il existait au ministère de la Justice ce qu'on appelait le Service fédéral des poursuites. Nous avons hérité de son mandat. Nous avons un mandat différent dans chacune des provinces et dans chacun des territoires. Dans les territoires du Nord, nous prenons en charge toutes les poursuites qui sont intentées en vertu du Code criminel et en vertu des lois fédérales. Dans les provinces, nous engageons des poursuites en vertu du Code criminel, par exemple dans les cas de terrorisme. Nous partageons certains pouvoirs avec les provinces. Nous sommes responsables de certaines poursuites contre le crime organisé, surtout les crimes liés aux drogues. Cependant, nos activités portent principalement sur les poursuites engagées dans les cas d'infraction à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. La plupart des Canadiens le savent. Mais les exceptions sont monnaie courante au Canada. Par exemple, au Nouveau-Brunswick et au Québec, nous engageons des poursuites seulement lorsque les enquêtes sont menées par la GRC. Ailleurs au Canada, nous intentons pratiquement toutes les poursuites dans les affaires de drogues.
Nous intentons également des poursuites dans les cas d'infraction à toutes les autres lois fédérales. Ainsi, si des accusations sont portées en application de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, nos avocats s'occuperont de l'affaire. Par exemple, vous avez peut-être lu dans le journal, il y a quelques jours, que des accusations ont été portées contre Syncrude. Si des poursuites sont engagées en vertu de la Loi sur les pêches ou en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ce serait encore une fois nos avocats qui se chargeraient de l'affaire. Il existe environ 50 lois fédérales en vertu desquelles nous engageons des poursuites. Et j'ai oublié de mentionner la plus importante d'entre elles, soit la Loi de l'impôt sur le revenu.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Saunders, de vous être déplacé jusqu'ici. Je siégeais au comité sur la responsabilité lorsque cette question a été débattue dans le passé. Le sentiment, à l'époque comme à l'heure actuelle, c'est que le directeur des poursuites pénales agit en toute indépendance. Je crois que c'est là l'essentiel des dispositions prévues à cet égard en matière de responsabilité.
Lorsque je vous entends dire — la loi stipule la même chose — que vous rendez des comptes au procureur général et ministre de la Justice, cela me porte à croire qu'il vous faudra, au cours de votre premier mandat en tant que DPP, vous pencher d'une part sur la question de la responsabilité ministérielle, et d'autre part sur celle de la préservation du pouvoir discrétionnaire de poursuivre.
Jusqu'ici, vous avez dit rendre à l'occasion des comptes au procureur général dans des causes d'intérêt général, peut-être plus fréquemment dans certaines situations. Il n'est pas clair pour moi aujourd'hui, pour le public, que vos fonctions fassent de vous autre chose en réalité que le procureur général, à moins que votre réponse ne m'indique que vous communiquez fréquemment avec le , que vous l'informez souvent de causes qui nous intéressent, qu'il exerce une surveillance à cet égard et qu'il s'acquitte de ses fonctions de procureur général. Soit vous lui rendez des comptes et l'informez pleinement de ce qui se passe en ce qui a trait aux poursuites intentées au pays, soit vous êtes celui qui prenez toutes les décisions et, comme on dit, qui en portez tout le fardeau. Vous seriez la personne vers qui nous nous tournerions tous, par exemple, s'il était question ou non de mettre en cause un titulaire de charge publique, selon que la préférence politique va davantage dans un sens que de l'autre.
Pouvez-vous nous préciser la mesure dans laquelle vous rendez des comptes au , et nous indiquer, par exemple, s'il vous a déjà précisément demandé de le rencontrer à propos d'un dossier de poursuite en particulier?
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Merci, monsieur le président. Je vais continuer dans la même veine.
Bonjour, monsieur Saunders. Cela me fait plaisir de vous voir témoigner. Nous attendions votre témoignage depuis environ huit mois. Entre-temps, quelques incidents sont survenus.
J'aimerais aborder la question suivante, que je vais tenter de résumer brièvement. Je viens de la province de Québec. Comme vous l'avez dit, l'administration du Code criminel présente parfois des différences. Par exemple, la police fait enquête au Québec, mais c'est le procureur du dossier qui autorise la poursuite. En Ontario, c'est un peu différent.
En ce qui concerne la drogue, le gouvernement fédéral a délégué des pouvoirs aux provinces. Dans certains cas, ce sont des procureurs privés qui mènent les poursuites en matière de drogue. Dans certaines provinces, ce n'est pas le cas, ce sont les avocats du gouvernement provincial qui le font.
Ma question est très pointue et je vous demande d'y répondre seulement si vous le pouvez. Vos procureurs sont censés accompagner les nôtres ou encore les personnes qui administrent le Code criminel dans le cas de crimes économiques. Par exemple, vous savez ce qui s'est passé dans le cas de Vincent Lacroix. Au Québec, il s'agit d'un grave crime économique.
Comment vos avocats font-ils pour intervenir et pour conseiller? Le crime peut s'étendre à plusieurs provinces. Êtes-vous en mesure de m'expliquer votre rôle? J'ai l'impression qu'il n'y a pas eu d'intervention du Service des poursuites pénales dans ce dossier.
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Très bien, je ne comprenais pas.
J'aimerais aborder un dernier point, s'il me reste du temps, et j'aimerais que vous puissiez me répondre rapidement.
M. Lemay a soulevé une question qui m'intéresse. Vous semblez être le dernier intervenant à l'échelle de la Cour suprême. Par exemple, une cause se développe dans une province, que ce soit en Colombie-Britannique, au Québec ou ailleurs, et chemine dans les différents paliers tels que la Cour supérieure ou la Cour suprême, selon les appellations que leur donnent les différentes provinces, la Cour d'appel et, enfin, la Cour suprême. Vous avez dit à mon collègue que c'est effectivement à ce moment que vous intervenez, c'est-à-dire à la Cour suprême, et que vous décidez de reprendre les intérêts de la Couronne provinciale par rapport aux intérêts de la Couronne fédérale.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Saunders, d'être venu aujourd'hui. Je crois que vous étiez prêt à comparaître devant notre comité à l'occasion d'une réunion précédente, mais que la réunion s'est terminée d'une façon étrange et que vous n'avez pas été en mesure de comparaître. Nous sommes donc heureux de vous voir ici aujourd'hui.
Monsieur le président, je pourrais peut-être revenir sur les questions que mon collègue Brian Murphy voulait poser, et qui n'étaient peut-être pas claires.
Monsieur Saunders, je crois que ce que Brian vous demandait, ce n'était pas combien de fois votre bureau aurait envoyé au ministre une note d'information en vertu de l'article 13 ni combien de fois vous auriez rencontré le ministre ou son personnel face à face pour discuter de ces notes d'information, probablement, ou des notes que vous lui envoyez. Combien de fois le ministre ou son personnel, de manière spontanée — en d'autres termes, non pas à la suite d'un avis ou d'une note de service envoyée par vous — vous aurait demandé de l'information sur une poursuite en particulier?
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Je crois que mon curriculum vitae contient certains de ces renseignements, mais d'entrée de jeu, j'ai indiqué que j'avais fait des études à l'Université de Cambridge. J'ai obtenu une maîtrise en droit et j'ai aussi rédigé un mémoire de maîtrise qui m'a permis d'obtenir un deuxième diplôme, un diplôme en études anglaises.
J'ai ensuite commencé à travailler pour le ministère de la Justice. Je crois que j'étais en Alberta au cours de la période pendant laquelle l'économie se développait à un rythme semblable au rythme actuel. Un grand nombre de mes amis considéraient que ce n'était pas un endroit où aller pour gagner de l'argent, mais j'estime que c'était avantageux sur le plan professionnel. Au fil des années, je me suis occupé de certaines des causes les plus intéressantes qui soient. Je peux vous en parler. Dans le domaine des droits de la personne, deux causes étaient liées aux droits de la femme, et je suis particulièrement fier de mon travail à ce chapitre. Une des causes cherchait à savoir si les femmes pouvaient participer aux combats dans l'armée. L'autre cause était liée à la question de savoir si les femmes pouvaient devenir gardiennes de sécurité dans des pénitenciers pour hommes. Cette dernière cause a été portée devant la Cour suprême du Canada. Je crois que je l'ai indiqué dans mon curriculum vitae, et je voudrais préciser que les articles 8 et 15 concernant les droits à l'égalité étaient visés.
Pendant les 28 années où j'ai travaillé dans le domaine du contentieux, j'ai œuvré dans tous les domaines allant du droit de l'environnement aux droits de la personne, c'est-à-dire la charte. Au cours des années, j'ai travaillé dans la plupart des domaines liés au contentieux au sein de la fonction publique fédérale. J'ai aussi essayé de garder un lien avec le volet académique. Je publie un recueil annuel des décisions de la Cour fédérale, et je commence à me demander si l'obtention de ce poste m'obligerait à abandonner cette publication. Depuis un certain temps, je suis d'un peu plus loin les décisions de la Cour fédérale. Je pensais rédiger un autre livre sur la Loi sur la responsabilité de l'État, mais je pense que je vais abandonner cette idée et que je vais plutôt me consacrer à un travail davantage lié au domaine du droit criminel.
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Je vais premièrement aborder la seconde partie de votre question.
Nous avons de très bonnes relations avec les services des poursuites provinciaux. Il y a un comité appelé le Comité fédéral-provincial-territorial des Chefs des poursuites pénales, qui est coprésidé par le directeur du service des poursuites pénales. Nous nous rencontrons deux fois l'an. Nous travaillons dans un contexte empreint de beaucoup de collaboration. Notre travail est très axé sur les résultats, et nous essayons d'aborder nos problèmes communs. Nous concluons des ententes avec les services des poursuites provinciaux que nous appelons accords « relatifs aux infractions majeures et moindres ». En vertu de ces accords, si une personne est accusée d'une infraction qui relève de notre compétence et d'une infraction qui relève de la compétence des provinces, nous décidons quel service des poursuites intentera la poursuite.
Habituellement, si l'infraction la plus grave relève de la compétence fédérale, nous intenterons les poursuites qui relèvent du niveau fédéral ainsi que du niveau provincial. Inversement, si la poursuite ou l'infraction au niveau provincial est plus grave, la province intentera les poursuites pour les deux infractions, tant au niveau fédéral que provincial.
Cela étant dit, nous concluons également des accords avec les provinces au moment d'intenter des poursuites conjointes. J'ai parlé de l'affaire Norbourg au Québec. Récemment, notre bureau du Manitoba a intenté des poursuites importantes contre les Hells Angels de concert avec le service des poursuites du Manitoba. Nos procureurs ont mené les poursuites et ont reçu l'aide d'avocats. Cette méthode vise à aborder précisément le problème que vous avez relevé, c'est-à-dire que les causes deviennent de plus en plus longues et de plus en plus exigeantes sur le plan des ressources. Nous estimons que nous administrons environ de 1,5 à 2 p. 100 de nos causes à l'interne. Pour vous donner une idée des exigences auxquelles doit faire face notre service, nos avocats consacrent environ de 21 à 22 p. 100 de leur temps de travail à ces causes plus importantes.
La première partie de votre question portait sur notre façon de planifier le travail. Nous avons des bureaux dans la plupart des provinces, et nous encourageons les chefs de nos bureaux régionaux, que nous appelons les procureurs en chef fédéraux, à rencontrer leurs homologues provinciaux ainsi que les représentants des forces de police municipales et provinciales. Notez que dans la plupart des cas, à l'exception du Québec et de l'Ontario, la GRC constitue le service de police à contrat. Ainsi, nous pouvons planifier dans une certaine mesure le travail auquel nous croyons que notre service devra répondre dans l'avenir en raison de l'évolution des priorités.
Cela étant dit, ça peut être difficile, car parfois un service de police municipal peut modifier ses priorités, et nous ne recevons pas de ressources supplémentaires. Par exemple, si la ville de Vancouver, de Calgary ou de Montréal décide de prendre des mesures sévères contre les armes et les gangs, compte tenu du fait que les gangs sont habituellement impliqués dans la vente de drogues, les policiers municipaux peuvent décider de sévir à cet égard, ce qui pourrait entraîner encore plus de poursuites. Parfois, nous ne recevons pas les ressources nécessaires assez rapidement. La décision d'affecter un plus grand nombre de ressources à ces cas relève des gouvernements provinciaux et des administrations municipales. Toutefois, ils ne nous fournissent pas de ressources pour nous permettre d'intenter les poursuites. Nous devons donc nous adapter en conséquence.
Dans notre cycle de planification, nous essayons de prendre en considération les pressions futures auxquelles s'attend notre organisation, tout en tenant compte des expériences passées et des renseignements qui peuvent être recueillis par les procureurs en chef fédéraux dans les régions et qui portent sur leurs prévisions pour l'année à venir.
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Ce n'est pas une situation unique; elle se retrouve également au Québec. C'est une situation dont nous avons hérité. Elle vient de la définition donnée à procureur général dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le procureur général étant défini comme le procureur général du Canada ou le procureur général d'une province si c'est la province qui se charge de la poursuite ou qui entame le processus de poursuite.
Cette pratique est apparue, je crois, au Québec et au Nouveau-Brunswick, où les services de police municipaux — ou la Sûreté du Québec au Québec — se tourneraient vers les services provinciaux de poursuite pénale pour engager des poursuites relativement à des affaires de trafic de drogue sur lesquelles ils ont fait enquête. La GRC s'adresserait, quant à elle, au service fédéral des poursuites et, maintenant, à nous.
Je pourrais ajouter que, au Nouveau-Brunswick, j'ai eu des discussions avec M. Abbott, qui est le chef du service de poursuite pénale du Nouveau-Brunswick. Nous avons décidé de nous pencher sur la situation même que vous avez soulevée. Nous essaierons d'en arriver à une entente sur la division des responsabilités entre les deux organisations de manière à ce qu'elle soit claire pour les services d'application de la loi concernés.