SDIR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 30 octobre 2014
[Enregistrement électronique]
[Français]
À l'ordre, s'il vous plaît.
Je vous souhaite la bienvenue à la 41e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, en ce jeudi 30 octobre 2014. La séance d'aujourd'hui est télévisée.
[Traduction]
Nous accueillons aujourd’hui M. Ahmed Shaheed, reporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans la République islamique d’Iran. Nous sommes très heureux de vous avoir parmi nous.
J’aimerais souligner que nous sommes un peu en retard. Par conséquent, nous devrons prolonger la séance au-delà de l'heure prévue pour permettre à tous les membres d’intervenir, si cela vous convient. Si vous devez partir plus tôt, en vertu de l’article 31 du Règlement, par exemple, et que vous désirez devancer votre intervention, dites-le-moi et nous tenterons de nous ajuster en conséquence.
Cela dit, monsieur Shaheed, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président et membres du comité. Je suis très heureux d’être ici afin de vous parler de mon travail pour les Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en Iran.
Comme vous le savez peut-être, je reviens tout juste de New York où j’ai présenté au troisième comité de l’assemblée mon rapport sur la dernière année. Celui-ci souligne plusieurs de mes inquiétudes sur la détérioration des droits de la personne en Iran. Dans mon rapport, je souligne des éléments pour appuyer mes conclusions, notamment la forte augmentation du nombre d’exécutions au pays au cours des 12 derniers mois. Depuis le mois de juin, l’an dernier, 852 personnes ont été exécutées, dont 800 au cours des 12 mois précédant la présentation de ce rapport.
Mais, ce qu’il y a d’inquiétant et d’alarmant, c’est qu’il semble y avoir de plus en plus de crimes passibles de la peine capitale. Cet été, un prisonnier politique a été exécuté. Une autre personne a été mise à mort simplement pour avoir fait un don à une agence de presse étrangère.
J’ai également remarqué que les crimes économiques sont maintenant passibles de la peine capitale, eux aussi.
Ce qui inquiète le plus, c’est que huit journalistes ont été exécutés au cours des 12 derniers mois. Il s’agit d’une augmentation massive comparativement aux années passées où il y en avait environ un au deux ans. L'utilisation de la peine capitale contre les journalistes s'est beaucoup intensifiée.
Je souligne également dans mon rapport mon inquiétude grandissante en ce qui concerne les libertés civiles en Iran. La liberté des journalistes est très limitée; actuellement, 35 sont en prison, et cela ne tient pas compte de tous ceux qui sont arrêtés, mis en garde, puis relâchés en vertu de la politique actuelle. La liberté de presse est très limitée.
Je mentionne aussi ma grande inquiétude quant au refoulement des droits de la personne au pays, notamment en éducation, un secteur dans lequel l’Iran avait fait des progrès. L’adoption d’une politique limitant l’accès aux universités en fonction du sexe a entraîné une baisse du nombre d’inscriptions chez les femmes; le taux d’inscription est passé de 60 % à 48 % en l’espace de seulement deux ans.
Cela s’ajoute aux autres obstacles que doivent surmonter les Iraniennes, y compris leur participation au marché du travail — elles n’occupent que 16 % du marché — et l’écart entre les sexes en matière de revenu est le plus élevé de toute la région de l’Asie du Pacifique. De plus, celles qui terminent leurs études ont trois fois plus de difficulté à obtenir un emploi. Un projet de loi visant à renforcer les familles a été présenté au parlement, mais une des dispositions de cette mesure législative risque de miner davantage les droits des femmes. Actuellement, on demande aux employeurs d'accorder la priorité aux hommes et aux femmes mariés au moment de l'embauche. Ce projet de loi ne propose aucune disposition semblable concernant les femmes célibataires.
J’ai remarqué également un nombre croissant et alarmant de mariages précoces et forcés. Depuis mars 2013, environ 48 000 filles âgées de 10 à 15 ans ont été mariées. Le mariage des filles de moins de 10 ans est également permis avec l’autorisation des tribunaux. Dans la très grande majorité des cas, environ 99 %, ces filles ont des enfants avant même d’avoir atteint l’âge de 15 ans. Il s’agit d’une tendance très inquiétante pour les Iraniennes.
Une autre chose qui inquiète, c’est la persécution grandissante des minorités religieuses. Au moment de présenter mon rapport au mois d’août, 300 fidèles étaient emprisonnés, y compris 126 adeptes du baha’is, eux qui semblent être les plus visés, dont des chefs de cette foi. On compte aussi environ 49 personnes s’étant converties au christianisme, ainsi que des adeptes d’autres religions minoritaires, comme le Dervishi et le Yarsan et des adeptes de nouvelles fois.
Ce qu’il y a d’inquiétant, c’est que la liberté de religion n’est pas tolérée en Iran.
En ce qui a trait aux droits du travail, 27 activistes ont été emprisonnés pour diverses raisons, notamment pour avoir demandé à être rémunérés sans retard, pour avoir demandé une augmentation salariale ou simplement pour avoir organisé une réunion entre syndicalistes.
Mais, il y a aussi des éléments positifs. Au cours des 12 derniers mois, on semble vouloir respecter les promesses électorales du président Rouhani. En septembre dernier, on a annoncé la création d’une charte des droits des peuples, mais rien n’a encore été fait. Ce qui m’inquiète, c’est que cette charte n’apporte rien d’important aux droits reconnus actuellement au pays et dont j’ai souligné les limites plus tôt.
Les autorités disent vouloir mettre fin à la discrimination, notamment, mais jusqu’à maintenant, je n’ai rien remarqué de concret en ce sens, même en ce qui concerne les défenseurs des droits de la personne en Iran. Nasrin Sotoudeh a été libérée de prison l’an dernier dans le cadre des mesures de réformes adoptées par le nouveau gouvernement, mais, la semaine dernière, on lui a retiré la licence lui permettant de pratiquer le droit. La situation perdure pour les défenseurs des droits de la personne. Habituellement, ceux qui coopèrent avec des organismes de défense des droits de la personne, qui prétendent avoir fourni des renseignements à de tels organismes ou qui ont fourni des renseignements concernant le pays font face à de sérieuses accusations. Ils sont souvent accusés d’avoir compromis la sécurité nationale de l’Iran.
Bien que le portrait semble peu réjouissant et que certains souhaitent s’attaquer aux problèmes de réforme, de façon générale, les gestes posés ne reflètent pas cette volonté. Les récentes attaques à l’acide démontrent la précarité du sort réservé aux femmes et le caractère limité du discours sur les droits de la personne. Les gestes posés par le gouvernement à cet égard sont d’autant plus décourageants qu’ils semblent viser ceux qui publient ces attaques plutôt que les agresseurs. Le gouvernement semble se préoccuper davantage que les citoyens soient mis au courant de ces attaques que des attaques elles-mêmes, et cela m’inquiète.
En terminant, je tiens à souligner que les tentatives du gouvernement iranien à vouloir coopérer avec moi, non pas en ce qui concerne une visite possible au pays, mais en discutant davantage avec moi à Genève, m’encouragent. Toutefois, la violation accrue des droits de la personne au pays, notamment les exécutions, et des droits des femmes, ainsi que le discours de plus en plus diffamatoire à l’égard des minorités religieuses m’inquiètent.
Je n’irai pas plus loin. Je serai très heureux de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup.
Je tiens à vous féliciter, car vous avez été très concis et beaucoup plus respectueux du temps qui vous était alloué que d’autres témoins qui sont déjà passés devant le comité. Par conséquent, nous avons rattrapé notre retard, ce qui signifie que les membres disposeront de six minutes chacun pour leurs interventions.
Monsieur Sweet, vous avez la parole.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Shaheed, merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation.
Je suis désolé que vous ayez été retardé à la sécurité. Nous avons eu une semaine très mouvementée avec l’attaque contre le Parlement. J’imagine que les agents font le nécessaire pour assurer notre sécurité.
Cela dit, j’aimerais confirmer une chose que vous avez dite dans votre exposé. Vous n'êtes pas allé en Iran, n’est-ce pas?
Est-ce parce que vous avez fait une demande auprès des autorités iraniennes et que celle-ci a été refusée?
Vous dites qu’il y a actuellement 35 journalistes en prison et que vous avez des éléments d’information qui vous laissent croire que de nombreux autres ont été arrêtés et questionnés. J’imagine que les autres journalistes au pays s’autocensurent pour se protéger.
Je suis d’accord avec vous. Ceux qui franchissent certaines lignes font l’objet de représailles. La loi sur la presse impose déjà de nombreuses restrictions sur ce qui peut être publié au pays, y compris tout rapport ou écrit critique à l’endroit du gouvernement ou de personnalités religieuses ou jugé indécent de quelque façon que ce soit par le gouvernement. La loi elle-même est très restrictive. Ceux qui écrivent librement ce qu’ils pensent ou qui publient des faits ou des opinions font l’objet de représailles.
Avez-vous découvert d’autres éléments d’information? Vous en avez souligné beaucoup, et je vous remercie pour la rigueur de vos enquêtes. Avez-vous trouvé quelque chose concernant la Garde révolutionnaire ou les Basij qui terrorisent ceux qui manifestent publiquement?
Je ne veux pas parler du protectorat en ce sens, mais, oui, certains rapports font état d'interventions irrégulières de la part des autorités par rapport à diverses actes de liberté. On entend qu’un groupe réuni dans une maison pour faire ses dévotions n’a pas fait l’objet de harcèlement, alors qu’à un autre moment et à un autre endroit, le même groupe se fait harceler. Les autorités agissent de façon irrégulière.
De façon générale, les gens craignent de se rassembler et de s’exprimer librement. Ils ont plusieurs craintes. La dissidence sous toutes ses formes — comportement, discours ou autre — est atténuée par ce climat de peur.
Les raisons évoquées pour les exécutions et le nombre d’exécutions ont toujours été très troublants. On apprend maintenant que c’est pire que c'était. Est-ce que certains… non, je ne devrais pas avancer des hypothèses. Avez-vous des éléments d’information qui permettraient d’expliquer cette augmentation du nombre d’exécutions?
Non, je n’en ai pas, mais certaines choses pourraient nous éclairer.
D'abord, il y a les modifications apportées au code pénal, dont certaines sont positives, comme l’élimination de l’apostasie, de l’hérésie et de la sorcellerie comme étant des crimes passibles de la peine capitale.
Toutefois, en vertu d'une de ces modifications, lorsqu’un mineur est accusé d’une infraction passible de la peine capitale, le juge doit demander à un médecin d’évaluer la capacité de l’accusé et de déterminer s’il était conscient qu’il commettait un crime. Cette modification a été bien accueillie, et avec raison, mais les habitudes personnelles de ceux qui sont inaptes à subir un procès parce qu'ils ne comprennent pas ce qui se passe ne sont pas protégées.
Cette modification pourrait expliquer, en partie, l’augmentation du nombre d’exécutions chez les jeunes, mais je ne dirais pas qu’il y a là un lien direct.
La communauté des gais et des lesbiennes, dont vous n’avez pas parlé — et c’est peut-être simplement parce que vous avez beaucoup d’informations à nous transmettre —, est souvent harcelée. Les membres de cette communauté font-ils l’objet de détentions arbitraires? Aussi, sont-ils nombreux à avoir été exécutés?
Une tendance s’est développée au cours des dernières années; le public est moins tolérant envers ceux qui sont différents, et cela touche beaucoup de groupes, dont la communauté des LGBT. Selon les rapports que j’ai recueillis, les membres de cette communauté font régulièrement l’objet de harcèlement, de diffamation ou d’autres violations des droits de la personne. Je n’ai entendu parler d’aucune exécution récemment d’un membre de cette communauté, certainement pas de quelqu’un qu’on aurait accusé d’une infraction sexuelle reconnue en vertu du code pénal.
Ce qui m’inquiète, ce sont les autres formes de harcèlement dont ils sont victimes, comme se faire refuser des services essentiels, la discrimination dans le cadre de diverses activités et, dans certains cas, une chirurgie forcée de changement de sexe, une chirurgie qui se fait très brutalement. Cette communauté est sévèrement marginalisée, exclue, dénigrée et, par conséquent, persécutée.
Comme les autres membres du comité, j’espérais des nouvelles plus réjouissantes, mais nous pouvons toujours compter sur vous pour avoir l’heure juste. Nous avons accueilli des témoins iraniens par le passé, dont une dame dont j’oublie le nom qui est venue à deux reprises… Elle est en exil, mais nous y reviendrons.
Peu importe. Pendant une courte période après l'élection de M. Rouhani, les gens s’attendaient à des changements. D’ailleurs, c’est ce que les autorités ont laissé paraître, à tout le moins dans les médias. La position de l'Iran concernant la promotion du terrorisme dans diverses régions du globe inquiète de nombreuses personnes. Avez-vous relevé des éléments d’information qui pourraient laisser croire à un changement à cet égard?
Je dois travailler très fort pour trouver des aspects positifs en Iran. Mon objectif est de trouver les gens qui font des choses positives et de faire rapport sur ces activités. Dans le rapport, j'ai fait état des dispositions que le président a prises concernant l'augmentation de la liberté de presse, la discrimination et les droits des femmes.
Le changement positif, si je peux m'exprimer ainsi, c'est l'assouplissement de l'approche à certains égards. Par exemple, la liberté universitaire demeure gravement restreinte, mais j'ai constaté que certains professeurs qui avaient été démis de leurs fonctions au cours des dernières années ont été réintégrés. Ce n'est pas une réintégration complète, mais on leur a permis jusqu'à un certain point de reprendre ces activités professionnelles ou de retourner dans les universités. Beaucoup d'étudiants qui ont été expulsés au cours des trois de nos années ont été autorisés à reprendre leurs cours. Il y a eu un assouplissement à cet égard et le gouvernement tient un discours plus conciliant sur bien des aspects.
J'ai observé que cette année, le président a parfois tenu un discours différent auprès du leader suprême d'Iran concernant les droits des femmes. Il y a peut-être une légère nuance, mais en fin de compte, ce n'est pas assez fort pour changer les choses dans le pays. J'ai tendance à documenter ces déclarations et à en souligner l'importance afin d'encourager la tenue d'un tel discours à l'avenir.
En ce qui concerne le projet de loi sur le renforcement des droits des femmes, la version préliminaire contenait une disposition qui aurait entraîné la marginalisation des femmes célibataires. Or, on rapporte que cela pourrait être révisé. Je n'ai pas vu la version définitive et il n'a pas été adopté par le Parlement. J'espère qu'il sera adopté, sans cette disposition.
D'un autre côté, le gouvernement iranien a retiré il y a un an et demi un projet de loi — que l'on appelle le projet de loi sur la profession d'avocat — qui vise selon moi à accroître le contrôle des autorités sur l'association du barreau. Le projet de loi a été retiré vers la fin du printemps de l'an dernier, mais il a depuis été réintégré dans le processus parlementaire.
Il y a eu peu de progrès par rapport à ce qui peut être fait, puis il y a eu un recul, encore une fois.
Le retrait du projet de loi a probablement eu lieu peu de temps après que Rohani a pris le pouvoir; on pourrait presque dire que l'on cherchait à impressionner la communauté internationale, du moins sur le plan de la rhétorique.
J'ai trouvé intéressant d'entendre que l'on ne vous ait pas répondu, et ce, à six occasions. Ces gens pourront à tout le moins dire qu'ils ne vous ont pas refusé l'accès.
En ce qui a trait à la communauté bahá’ie, dont vous avez parlé dans votre exposé, y a-t-il là des aspects positifs? D'après ce que nous savons, il y en a peut-être eu pendant un certain temps, mais on pourrait dire qu'il y a eu un recul.
On observe que sur une période de 30 ans, il y a eu une série d'avancées et de reculs et que les tendances, le discours et les actions varient au fil du temps. J'ai constaté qu'il y a eu récemment un durcissement du discours contre la communauté bahá’ie. Il convient de souligner que la communauté fait l'objet de dénigrement dans la société et qu'elle se sent menacée.
En même temps, le discours que tient le gouvernement sur cette question dans les diverses tribunes de l'ONU indique qu'il y a encore une fois un changement de ton. On y recourt dans le cas... Le gouvernement dénigre le bahaïsme, affirme qu'il s'agit d'un culte et, par conséquent, ne le reconnaît pas en tant que confession. Bien qu'il n'ait pas pris de mesures en ce sens, le gouvernement qualifie maintenant ces gens de citoyens et parle de leurs droits à l'égalité en tant que citoyens, tant qu'ils ne divulguent pas qu'ils font partie de la communauté bahá’ie, évidemment. Donc, d'une certaine façon, rien n'a changé.
L'autre chose que nous avons observée précédemment, c'est la rhétorique qui incitait les Iraniens à confronter les gens de la communauté bahá’ie, ce qui a entraîné de la violence. Vous n'avez pas constaté de relâchement à cet égard et le discours qui pourrait mener à ce genre de problème sévit toujours. Est-ce exact?
Nous entendons les déclarations, et il semble que le système judiciaire fonctionne quelque peu. Les tribunaux ont-ils la possibilité d'intervenir pour empêcher une exécution? Une jeune femme a été exécutée la semaine dernière. Si elle avait été reconnue coupable de ce soi-disant acte criminel au Canada, l'accusation la plus grave aurait été l'homicide involontaire coupable. Les tribunaux ont-ils la possibilité d'intervenir, ou sont-ils simplement écartés après le prononcé de la peine?
Je pense qu'en ce qui concerne la promotion des droits de la personne en Iran, un des aspects importants serait d'examiner le fonctionnement du système judiciaire afin de connaître les lacunes relativement aux normes en matière de droits de la personne. Or, les lacunes ont souvent été soulignées, tant dans les examens périodiques universels menés il y a quatre ans que dans les examens de l'organisme créé en vertu d'un traité dans le cadre de [Note de la rédaction: difficultés techniques.] droits politiques et beaucoup d'autres aspects. Ils sont principalement axés sur les lacunes en matière de procédure dans le cadre du déroulement des procès.
Il y a aussi la question de la qisa — la loi islamique de la justice rétributive — et par conséquent, celle de la capacité de l'État de faire preuve de clémence en vertu du droit international. Dans ce cas précis, dans le cadre de mon travail, beaucoup d'enjeux ont été soulevés auprès du gouvernement et on m'a répondu que l'État ne peut intervenir lorsque l'affaire est liée à la qisa. On a tenté de persuader la famille de pardonner plutôt que de demander l'application de la loi du talion en vertu de la qisa. Or, par rapport à cette affaire précise, le seul problème que j'ai constaté était lié à l'équité du procès. Les irrégularités relatives aux droits en matière d'équité procédurale, la possibilité pour la victime de se défendre et de s'assurer que toutes les preuves sont entendues et le fait que son témoignage a été livré sous la contrainte... Et, bien entendu, l'absence d'un mobile. L'État n'a jamais pu établir de mobiles, du moins selon la réponse que j'ai obtenue. Donc, il y a dans cette affaire précise divers problèmes qui dépassent peut-être la question globale de la qisa.
Merci, monsieur le président. Monsieur Shaheed, merci d'être venu au comité pour parler des enjeux liés aux violations des droits de la personne dans la République d'Iran, où des communautés précises d'Iran ont été touchées par de très nombreuses violations des droits de la personne, en particulier à l'égard des femmes.
J'aimerais revenir sur les questions de M. Marston. Vous avez indiqué que les femmes qui souhaitent se libérer d'un mariage marqué par la violence doivent prouver qu'elles sont exposées à un risque important de préjudice corporel. Dans ce cas, pouvez-vous nous en dire plus sur le cas de Mme Reyhaneh Jabbari, la jeune femme qui a été exécutée dimanche dernier pour avoir tué l'homme qui l'aurait violée?
Dans les deux cas qui ont été mentionnés, c'était lié au statut de citoyen de deuxième classe des femmes dans la société. Je ne pense pas que les deux cas sont directement liés, mais le fait demeure qu'il y a manifestement dans la société une hiérarchie fondée sur le sexe et sans doute aussi sur le mariage. Certaines des lois visent à en assurer l'application. Toutefois, je pense que dans l'affaire de Mme Jabbari, la hiérarchie n'était pas en cause. C'était plutôt attribuable à une série d'échecs: la procédure judiciaire établie n'a pas été respectée; on n'a pas veillé à ce que la défenderesse puisse faire respecter tous ses droits; les preuves n'ont pas été entendues adéquatement et, par conséquent, elle n'a pas eu droit à un procès équitable. Sans cela, même avec l'égalité entre les sexes, le résultat aurait toujours été injuste.
En somme, les lois maintiennent le statut de citoyen de deuxième classe des femmes. Par exemple, une femme ne peut travailler si son mari s'y oppose. D'après ce que l'on me dit, ce qui suscite le plus de plaintes, c'est une loi semblable qui permet à une femme de porter plainte et de demander que son mari demeure à la maison, mais dans un tel cas, le juge doit déterminer si cela nuit au bien-être des enfants, etc.
Donc, dans une société dans laquelle les femmes n'ont pas droit à une véritable égalité, une égalité officielle de ce genre ne donne pas vraiment de résultats.
Monsieur Shaheed, au cours de la dernière décennie, nous avons vu une augmentation incroyable du nombre avéré d'exécutions de femmes, qui est passé de 25 entre 2001 et 2009 à 58 entre 2010 et 2014. Pouvez-vous nous parler de cette augmentation?
Pourriez-vous répéter la question, s'il vous plaît? S'agit-il des chiffres concernant les femmes ou...
Pour être honnête, je n'ai pas étudié la question des exécutions en fonction des sexes. Je ne peux vous expliquer pourquoi les chiffres augmentent dans un groupe donné. Dans l'ensemble, le nombre d'exécutions a fait un bond considérable au cours des cinq dernières années. En 2004, le nombre total se situait en deçà de 100 et il est passé à près de 800 cette année. Ce sont les chiffres globaux. La plupart concernent des infractions liées aux drogues, dans une proportion de 70 à 80 %. Il y a d'autres catégories.
Selon mes observations, la peine capitale n'est pas utilisée pour restreindre les droits des femmes. Je n'ai pu établir cette corrélation. Toutefois, j'ai observé que la peine capitale est clairement utilisée pour combattre le trafic de drogue, et cela ne fonctionne pas. D'après mes observations, les gens issus de minorités ethniques ne sont pas condamnés à la peine capitale dans une plus grande proportion que les délinquants des autres catégories.
Que peut faire le Canada pour réduire la persécution dont les minorités religieuses — comme la communauté bahá’ie et les groupes chrétiens — font l'objet en Iran? Pouvons-nous contrer cette situation de plus en plus violente de l'extérieur, ou devons-nous le faire de l'intérieur du pays?
C'est un enjeu pour lequel il faut des approches multiples, dont certaines doivent cibler les communautés que vous venez de mentionner. D'autres seraient avantageuses pour la situation des droits de la personne en général. J'estime que les Nations Unies et les États membres de l'ONU doivent continuer d'attirer l'attention sur les violations des droits au pays, les documenter et parler des difficultés connexes. La marche à suivre est claire.
Les Iraniens eux-mêmes ne peuvent le faire à l'intérieur du pays en raison des restrictions en matière de liberté de parole et des peines encourues par les personnes qui font la promotion des droits de la personne. Concernant certaines communautés précises, il faut d'abord diffuser les informations, maintenir les liens et leur donner une voix pour attirer l'attention des gens sur ces questions. Il est souvent arrivé que l'on signale des problèmes par rapport à certaines personnes. L'État a fait marche arrière et a réexaminé les dossiers. Il faut garder à l'esprit que cela fait partie de notre interaction avec l'Iran. C'est ainsi que j'oeuvre au sein de l'ONU; l'idée est de souligner les problèmes et de favoriser la discussion à cet égard afin que l'Iran ait la possibilité et la motivation de prendre des mesures pour régler les problèmes liés à ces droits.
J'aimerais souligner que la communauté bahá’ie est particulièrement vulnérable. Je pense qu'il faut le reconnaître et que nos actions doivent en témoigner.
En ce qui concerne les autres minorités, dont les minorités chrétiennes, le fait que l'on cible particulièrement les nouveaux convertis devrait être gardé à l'esprit et discuté pour que les gens soient au courant. Si davantage de pays prennent connaissance de cette persécution, ils seront plus nombreux à discuter de cet enjeu avec l'Iran, en privé ou publiquement, ce qui l'incitera à régler les problèmes.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Shaheed, au nom du comité, je tiens à vous remercier de comparaître aujourd'hui. Vos rapports et vos témoignages ont toujours été complets et exemplaires, et ils méritent la reconnaissance qui leur a été accordée. Cela m'amène directement à ma question.
Demain, à Genève, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies procédera à son examen périodique universel du bilan de l'Iran en matière de droits de la personne. Après le premier examen périodique universel, en 2010, l'Iran a accepté 123 des 188 recommandations du conseil. Le pays s'est engagé à respecter ses obligations internationales en matière de droits de la personne, notamment celles liées à des enjeux comme le libre exercice de la religion, les droits des détenus, la protection contre la torture, etc.
Maintenant, quatre ans plus tard, dans quelle mesure l'Iran a-t-il respecté ses propres engagements de 2010, et comment le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies peut-il exiger que l'Iran rende des comptes pour le non-respect de ses propres engagements?
Comme je l'ai indiqué dans mon rapport, l'Iran a tenté de respecter ses promesses dans certains domaines, notamment la révision du code de procédure pénale et du code pénal. Il y a eu des progrès par rapport au code pénal, comme l'abolition de la peine capitale pour apostasie, hérésie et sorcellerie, mais il comporte d'autres éléments régressifs, comme l'élargissement de la portée de la peine capitale.
Les résultats sont plus positifs dans le cas du code de procédure pénale. Il comporte beaucoup de mesures qui, à mon avis, renforceront la capacité du pouvoir judiciaire d'exercer ses principales fonctions judiciaires, mais il faudra attendre pour savoir si cela se transposera dans la réalité. Plus de procès pourront avoir lieu devant plusieurs juges, comparativement à ce que l'on voit actuellement.
Mon travail est lié aux engagements pris par l'Iran dans la foulée de l'examen périodique universel; l'objectif est de savoir dans quelle mesure le pays les a respectés. Je suis très déçu de la tournure des événements.
Quant aux mesures que l'ONU peut prendre, je pense que l'ONU devrait dénoncer sans réserve les pratiques de l'Iran qui ne respectent pas ses obligations en vertu du droit international. L'ONU doit se faire le champion des droits de la personne et, par conséquent, respecter son engagement de protéger les droits de la personne en tant que norme universelle. Je pense que la plupart des États devraient exprimer leurs préoccupations à l'égard de la situation des droits de la personne en Iran.
L'examen périodique universel de demain sera, encore une fois, une occasion de faire le point sur ce qui s'est passé, de souligner nos préoccupations persistantes, puis de collaborer avec l'Iran afin d'établir la marche à suivre pour régler ces problèmes.
Dans le cas présent, l'important est de maintenir ce dialogue avec l'Iran en prêtant une attention particulière aux violations et aux mesures qui doivent être prises. Évidemment, comme c'est le cas habituellement, il faudra beaucoup de temps pour améliorer la situation en matière de droits de la personne, mais nous devons poursuivre résolument nos efforts en ce sens.
Merci, monsieur.
Il y a trois semaines, plusieurs d'entre nous, des députés de tous les partis, ont tenu une conférence de presse pour prévenir les gens des menaces d'exécution de trois prisonniers. L'un d'entre eux est l'ayatollah Boroujerdi qui, depuis huit ans, dépérit dans la tristement célèbre prison d'Evin sous de fausses accusations. On l'appelle le Mandela de l'Iran. C'est un exemple frappant et scandaleux de la situation des prisonniers politiques.
Le deuxième s'appelle Omid Kokabee, un physicien renommé qui a été emprisonné également à la suite de fausses accusations et qu'on menace d'exécuter.
La troisième personne dont nous avons parlé à la conférence de presse est Reyhanah Jabbari qui, malheureusement, a été exécutée depuis.
Avez-vous de l'information à nous donner sur la situation de l'ayatollah Boroujerdi ou d'Omid Kokabee ou sur le sort des prisonniers politiques en Iran?
J'ai exprimé mes préoccupations au sujet de l'ayatollah Boroujerdi et d'Omid Kokabee dans mes communications avec eux et mes rapports.
Dans le cas de l'ayatollah Boroujerdi, son état de santé m'inquiétait et il avait besoin d'obtenir des soins médicaux appropriés.
Dans l'autre cas, j'ai indiqué mes préoccupations au sujet de l'équité du procès et des accusations portées contre lui, et je me suis demandé dans quelle mesure cela respectait les engagements de l'Iran, ses dispositions sur la primauté du droit et ses engagements en matière de droits de la personne.
Je n'ai rien de nouveau à signaler au sujet de ces deux cas. On a mentionné des dommages dans mon rapport.
Pour ce qui est de Reyhanah Jabbari, j'ai moi aussi été consterné d'apprendre qu'elle avait été exécutée. Bon nombre de gens on essayé de faire quelque chose et se sont exprimés à ce sujet, et j'ai écrit au gouvernement à plusieurs reprises pour lui faire part de mes inquiétudes.
Nous avons communiqué avec le gouvernement pour lui demander de suspendre l'exécution et de nous permette d'examiner les enjeux. Malheureusement, je n'ai vraiment rien à ajouter à part que j'ai été consterné d'apprendre que l'exécution avait eu lieu.
Concernant les prisonniers politiques, la situation s'améliore-t-elle en général? Vous avez dit qu'il y a environ 800 prisonniers politiques en Iran, je crois? Il y a peut-être d'autres cas que nous ne connaissons pas, mais la situation s'améliore-t-elle ou, comme je crois comprendre, elle ne s'améliore pas?
À certains égards, la situation ne s'améliore pas. J'ai parlé plus tôt de l'exécution d'une personne qui a fait un don à une organisation médiatique. De toute évidence, on a exécuté un prisonnier politique. Dans d'autres cas, selon l'information que j'ai, il se peut que des défenseurs de la culture font également face à la peine de mort ou ont été exécutés. Bien entendu, l'Iran et moi n'avons pas la même opinion dans certaines situations, mais le problème, c'est qu'à moins de garantir un procès juste à ces gens, il est possible que des militants politiques soient exécutés. Je n'ai constaté aucune amélioration quant au sort des prisonniers politiques dans le pays.
Je vous remercie beaucoup de votre exposé, monsieur Shaheed.
Vous avez dit que le reste du monde devrait parler à l'Iran des droits de la personne. Je ne crois pas que l'Iran aime que l'Occident lui dise quoi faire. À votre avis, quels pays devraient ou pourraient convaincre l'Iran?
Tout le monde devrait essayer de le convaincre. Je crois que les droits de la personne sont universels. Tout le monde devrait soulever la question. Pour ce qui est de savoir qui le ferait, c'est une autre question. Je regarderais du côté des pays qui appuient la résolution de New York, qui ont coparrainé la résolution, pour demander aux gens qui pourrait se faire entendre.
Il y a aussi d'autres pays qui n'appuient peut-être pas la résolution, mais qui croient que, du moins dans certains cas, leur conscience leur dicte de s'exprimer sur l'Iran, comme ses partenaires de l'OCI, l'Organisation de la conférence islamique, et du Mouvement des pays non alignés. À mon avis, certains dirigeants de ce mouvement pourraient et devraient être encouragés à parler à l'Iran de ces questions, soit publiquement ou en privé. Je pense que bon nombre se sentent obligés de s'exprimer davantage sur certains sujets que sur d'autres. Certains peuvent sentir le besoin de se faire entendre sur la situation des bahá'ís. D'autres pourraient vouloir défendre la liberté de presse. Il existe toutes sortes de pays qui n'ont pas les mêmes priorités, mais ils peuvent tous servir d'intermédiaires pour communiquer avec l'Iran.
Le Canada pourrait-il influencer une partie des gens? Est-ce que certains de ces pays qui pourraient influer sur ce qui se passe en Iran, sont plus facilement influençables? Connaissons-nous des groupes que nous pourrions cibler qui pourraient essayer de convaincre l'Iran de mieux respecter les droits de la personne?
Je parlerais de pays qui sont préoccupés par ce qui se passe dans le pays, des pays qui, par conséquent, se feraient entendre. Je crois que le Canada et d'autres États qui défendent habituellement les droits de la personne peuvent — et devraient à mon avis — inciter ces pays à favoriser davantage la communication avec l'Iran. Je crois que cela fonctionnerait, car l'Iran se présente à des élections de l'ONU et cherche un engagement plus vaste. L'Iran se soucie de sa réputation. Il sera beaucoup plus difficile de ne pas prendre au sérieux les critiques de certaines régions que peut-être celles des pays occidentaux qui ont toujours critiqué l'Iran.
L'instabilité croissante dans la région a-t-elle des répercussions sur les tentatives de l'Ouest de convaincre l'Iran de changer son comportement sur le plan des droits fondamentaux de la personne?
Je dois dire tout d'abord que je me concentre sur l'Iran et la situation des droits de la personne dans le pays, ce qui fait que de façon générale, je suis un spécialiste du contexte stratégique plus large. Or, j'examine les répercussions que la situation dans la région pourrait avoir sur les droits de la personne en Iran à certains égards. Au bout du compte, nous devons tous garder à l'esprit que les droits de la personne font partie des enjeux de sécurité, et qu'à moins que les gens se sentent en sécurité, ils diront que le programme de sécurité n'a pas vraiment été respecté. Il serait important de miser sur la sécurité des personnes dans la conception plus générale de la sécurité.
Je sais que votre rapport a été présenté il y a quelque temps, mais hier soir ou plus tôt aujourd'hui, on annonçait à la télévision que des chrétiens sont en train de quitter l'Irak et de se rendre en Iran pour des raisons de sécurité. Cela me semble étrange compte tenu de la façon dont les minorités religieuses sont traitées en Iran d'après ce que nous avons entendu. Puisque nous savons que des minorités religieuses sont persécutées dans des pays dominés par l'islam, pourriez-vous nous donner votre opinion? Je sais que vous vous concentrez sur l'Iran, mais je présume que la situation d'autres pays doit être encore plus terrible que celle de l'Iran.
Je n'ai pas les renseignements dont vous parlez, mais cela ne me surprendrait pas, car la persécution en Iran, puisque j'ai présenté des renseignements à ce sujet, semble viser en particulier les musulmans qui se convertissent au christianisme.
À mon avis, en Iran — et je parle d'une situation de paix — les collectivités traditionnellement chrétiennes sont dans une meilleure situation que les nouveaux convertis. Je ne dis pas qu'elles jouissent d'une égalité de statut, car une gradation a été établie dans la constitution. Cependant, je crois qu'en Iran, ce sont surtout les nouveaux convertis au christianisme qui sont persécutés. Ils ne sont pas définis par leur nom musulman et sont victimes de harcèlement, de persécution, etc.
Si des collectivités traditionnellement chrétiennes vont en Iran, cela peut se produire et ce n'est pas exceptionnel.
Nous nous sommes déjà rencontrés à quelques reprises. Nos rencontres me fascinent toujours et m'apprennent beaucoup de choses grâce à toute l'information que vous nous fournissez.
Comme mes collègues, je suis on ne peut plus consterné par votre rapport, en ce sens que lorsque Rohani a été élu, on avait le sentiment qu'un changement positif était possible en Iran. D'après ce que vous dites aujourd'hui, cela ne se concrétise pas vraiment, et en fait, il se peut même que les choses s'aggravent.
Je me demande s'il y a une division dans le gouvernement, car il y a plusieurs niveaux. Y a-t-il une division entre ce que Rohani et toute autre personne progressiste essaient de faire, et ce que la classe dirigeante essaie de maintenir? Ou bien Rohani commence-t-il à vouloir pencher vers une mentalité plus conservatrice — sans vouloir vous offenser — vers les vieilles habitudes.
J'estime que, comme dans la plupart des pays, l'Iran n'est pas monolithique. Un certain nombre de groupes s'opposent et jouent des coudes pour exercer leur influence dans la société.
Nous voyons diverses voix, qui reflètent des points de vue très différents de ces orientations. D'une part, il y a ceux qui sont disposés à être plus ouverts et à adopter un discours réformiste. Jusqu'où peuvent-ils aller ou sont-ils prêts à aller? C'est une autre question.
En revanche, il y a ceux qui pensent qu'il y a une erreur, que les choses doivent rester comme elles sont et qu'ils devraient peut-être même renforcer davantage leurs engagements fondamentaux.
Concernant ceux qui font ces déclarations, certains éléments sont identifiables, et ils viennent du gouvernement, qui est disposé à se montrer plus ouvert. Le secteur de l'éducation est un exemple, de même que la liberté d'enseignement.
Or, du côté du système judiciaire, dans les déclarations, le discours est traditionnel et conservateur. On dit par exemple que l'Iran ne se sent pas obligé de respecter le droit national au détriment de la charia. On indique que la charia est différente de certaines de ses interprétations qui s'appliquent dans d'autres pays.
Il y a donc un attachement à un ensemble d'idéaux qui ne correspondent pas aux droits de la personne dans certaines zones. Nous constatons, de par la compétition entre les deux groupes, en quelque sorte, que certains ministres font face à la destitution. Tout cela montre qu'on ne s'entend vraiment pas sur la voie à suivre.
Nous l'avons constaté même il y a quelques années, sous le règne d'Ahmadinejad alors qu'il y avait des problèmes concernant la confirmation du cabinet, les nominations de ministres, qui représentent tous différents groupes.
Merci.
Concernant les persécutions pour des motifs religieux, vous avez dit que la communauté baha'ie est probablement la communauté la plus persécutée.
À un certain nombre de reprises, des gens de foi baha'ie de ma circonscription ont communiqué avec moi, et ils essayaient de faire sortir leur conjoint et avaient des difficultés.
Pourquoi attaque-t-on autant la communauté baha'ie, à votre avis? Qu'est-ce qui, dans la religion en tant que telle, menace le bloc conservateur en Iran?
En examinant la constitution, on se rend compte qu'elle ne protège pas les baha'is. Le libellé indique peut-être l'origine de cela. On donne aux musulmans chiites un statut privilégié et on tolère les musulmans sunnites.
Si l'on donne cette protection aux ahl al-kitab — les communautés juives, chrétiennes et zoroastriennes — on abandonne alors les autres communautés. Il semble que les baha'is sont exclus parce qu'ils ne sont pas considérés comme des gens du Livre. Je n'en ai pas entendu parler publiquement, mais on prétend que le baha'isme est une secte, qu'il ne s'agit pas d'une véritable croyance et il y a un problème quant aux mesures prises concernant la foi baha'ie. C'est donc une opposition à la foi baha'ie fondée sur la religion qui est à l'origine des politiques à l'égard des baha'is.
Cela dit, vous parliez de la persécution des nouveaux convertis au christianisme. Ne les persécute-t-on pas parce qu'ils rejettent l'islam et qu'ils deviennent chrétiens plutôt que parce qu'ils sont chrétiens?
Oui, je crois que ce qui est au coeur de la question de la conversion, c'est que la protection donnée au système islamique — et c'est inscrit dans la constitution — est minée par l'abandon de l'islam pour une autre religion, car il s'agit d'une religion qui n'est pas reconnue dans le cadre islamique.
Pour revenir à ce dont je parlais tout à l'heure au sujet de ce qui entraîne peut-être cette augmentation, vous disiez qu'au cours des 12 mois précédant la présentation de votre rapport, il y a eu 852 exécutions. À-t-on l'impression que l'Iran est en train de — et je déteste utiliser cette expression — faire le ménage? Se débarrasser des dissidents politiques? Se débarrasser de ceux qui s'expriment très librement... qu'il s'agisse de l'éducation, des sciences, de la religion ou de la politique?
Si l'on examine les déclarations qui ont été faites il y a environ deux ans, à la suite de la période ultérieure aux violences post-électorales d'il y a cinq ans, on a exprimé clairement l'idée qu'il fallait être plus rigoureux en ce qui concerne l'attachement aux idéaux et aux valeurs de la révolution. C'est l'un des discours actuels.
Je ne dis pas qu'il y a un lien, mais à l'époque, c'était lié à la façon dont le secteur de l'éducation avait été modifié par les politiques d'admission pour en exclure les femmes. La façon dont on a traité la liberté économique et la façon dont certains éléments du programme ont été éliminés ou révisés constituent un discours.
Toutefois, pour ce qui est des exécutions, la plupart des Iraniens avec lesquels je discute me parlent de l'équilibre entre les réformistes et ceux qui s'opposent aux réformes. Ainsi, comme tactique visant peut-être à décourager le président actuel et ses déclarations pour la réforme l'an dernier, c'est l'un des éléments. L'autre chose, c'est que les réformes du code pénal peuvent avoir permis un processus rapide d'exécution par certaines questions de procédure. Je ne suis pas sûr de savoir exactement ce qui se cache derrière cela, mais c'est le pouvoir judiciaire qui conduit à cette tendance, et les réformes sont liées à ce domaine. C'est par le dialogue, par la responsabilisation, par exemple, que les gens pourront régler le problème.
Monsieur Shaheed, je vous remercie beaucoup de votre présence. Vous nous avez appris beaucoup de choses et nous vous en sommes très reconnaissants.
Chers collègues, nous devrons discuter d'un autre sujet avant de partir. Vous avez tous reçu l'information sur deux postes budgétaires. Je dois avoir le consentement pour les approuver.
Notre témoin peut disposer. Mes excuses. Nous vous exprimons notre gratitude.
Merci beaucoup.
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