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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 054 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 février 2015

[Enregistrement électronique]

(1310)

[Français]

     Chers collègues, en ce 5 février 2015, c'est la 54e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

     Nous sommes télédiffusés aujourd'hui. Nous poursuivons les audiences que nous avons tenues périodiquement sur la question de la détention arbitraire de figures de l'opposition politique au Venezuela.
    Sont avec nous aujourd'hui trois distingués témoins que je présenterai en ordre alphabétique: Diana Lopez, Carlos Vecchio et Orlando Viera-Blanco.
    Je n'ai pas eu la chance de leur demander dans quel ordre ils souhaitent livrer leurs témoignages. Dites-moi dans quel ordre il vous convient de procéder et nous nous en tiendrons à cela.
    Je tiens cependant à vous signaler que, malheureusement, ce comité ne dispose que d'une heure. Alors, le temps que vous prendrez pour vos exposés déterminera le temps qu'il restera pour poser des questions.
    J'attendrai que vous ayez tous fini de nous livrer vos commentaires préliminaires avant d'indiquer combien de minutes nous aurons pour permettre aux six membres du comité de vous poser des questions et vous d'y répondre.
    Mme Lopez passera la première. Je serai deuxième et M. Carlos Vecchio suivra.
    Merci beaucoup.
    Commencez quand vous voulez, madame Lopez.
     Merci beaucoup de nous recevoir afin d'entendre les commentaires que nous souhaitons faire au sujet de ce que nous avons vécu au Venezuela, et surtout en ce qui a trait à ce qui s'est passé l'an dernier.
    Je suis citoyenne vénézuélienne. Je suis une mère et une artiste professionnelle, et je suis la soeur de Leopoldo Lopez. Leopoldo, mon frère, est persécuté par le régime depuis 10 ans. Il a subi plus de 20 procès. S'étant vu refuser la possibilité de se présenter en tant que maire aux élections municipales de 2008, il a intenté une poursuite, poursuite qu'il a gagnée à la Cour internationale de justice, en 2013.
    Le gouvernement du Venezuela et les hauts placés ont tenté à maintes reprises de l'empêcher de se présenter, de lui refuser ses droits politiques. L'an dernier, une manifestation étudiante a été déclenchée le 12 février de l'an dernier, manifestation qui a été suivie par plusieurs leaders politiques, dont Maria Corina Machado, législatrice, le maire Antonio Ledezma et mon frère, Leopoldo Lopez. La manifestation s'est rendue jusqu'aux bureaux du procureur. C'était une manifestation ordinaire, non violente et pacifique qui cherchait à faire valoir les revendications des étudiants et des citoyens en général. Nous voulons que les droits de la personne soient respectés pour tous les citoyens. Nous aspirons au droit de vivre, au droit de vivre en sécurité, au droit d'avoir un système de santé, au droit à l'éducation, aux droits de la personne et à la liberté d'expression pour tous.
    Lorsque la manifestation s'est terminée et que les gens ont quitté les lieux, un incident s'est produit. Mon frère avait disparu, et leaders politiques avec lui... Il y a eu deux meurtres. L'une des victimes était un jeune étudiant, Basil Da Costa, et l'autre était Juan Montoya. Le gouvernement a tout de suite affirmé que mon frère était l'auteur de ces meurtres et il a lancé un mandat d'arrêt contre lui. Leopoldo n'était pas à cet endroit à ce moment-là, et de nombreuses vidéos avaient été captées à cette occasion.
    Deux jours plus tard, alors que mon frère s'était caché, les vidéos ont été rendues publiques par le journal Ultimas Noticias. Nous avons pu voir que les deux auteurs des meurtres appartenaient à la SEBIN, la police nationale. Ce sont eux qui ont tué ces deux hommes. Malgré cela, le procureur général a affirmé que mon frère était coupable. Il ne l'a pas accusé de meurtre, mais lui et les siens ont rassemblé d'autres accusations, dont quatre contre Leopoldo.
    Pouvez-vous nous les énumérer, Carlos?
(1315)
     Oui. Incendie criminel, destruction de bureaux gouvernementaux, association dans le but de...
    ... de commettre des crimes.
    ... de commettre un crime. Et le dernier...
    Bref, voilà les quatre crimes qu'on lui reproche.
    Mon frère n'était pas caché, mais il a décidé de ne pas fuir le pays. C'est ce que le gouvernement voulait qu'il fasse. En lieu et place, il s'est livré aux autorités. En clair, il a décidé de faire face à un système judiciaire qui, nous le savions tous, n'allait pas lui donner un procès juste et équitable. Mais il a dit qu'il n'avait pas de droits et qu'il n'allait pas quitter le pays. Il est donc resté. Il s'est livré à la justice le 18 février, et cet injuste procès a commencé.
    Le procès a été entaché de nombreuses irrégularités, dont l'absence de diligence raisonnable, sa détention dans une prison militaire, son isolement carcéral. Il ne peut pas recevoir de visiteurs en dehors de sa famille, c'est-à-dire ses parents, sa femme, ses soeurs et ses deux jeunes enfants âgés de cinq et deux ans. Lorsque son avocat lui rend visite, il ne peut pas le voir en privé; il y a toujours quelqu'un d'autre dans la pièce, ce qui signifie que son droit à la confidentialité est bafoué. On l'empêche également de recevoir de la correspondance privée. Leopoldo s'est aussi vu privé de sa liberté de culto, sa liberté de pratiquer sa religion. C'est un croyant. Il veut aller à la messe et il veut être en mesure de rencontrer un prêtre. Mais on le lui interdit.
    La liste des droits de la personne qui lui ont été refusés est très longue. C'est toujours une grande source de tristesse pour nous que d'aller dans cette prison et de constater le sort qu'on lui réserve, à lui et aux autres prisonniers politiques. Je veux dire des choses qui sont difficiles à dire, et qu'il me fait de la peine de rapporter dans ce pays. Je crois qu'aucun citoyen ne veut parler des choses terribles qui se passent dans son pays, mais je n'ai chez moi aucune tribune pour en parler. C'est la raison qui m'amène chez vous, pour que je puisse en parler.
    Un soir, à trois heures du matin, huit hommes cagoulés et sans insignes particuliers ont fait irruption dans sa cellule. Ils ont jeté tous ses livres par terre, se sont emparés de toutes les notes qu'il avait préparées pour son procès et l'ont malmené. D'après ce que je peux comprendre, il s'agit là d'une forme de torture. Ma famille et moi avons eu tout un choc en apprenant ce qui s'était passé.
    Une autre fois, le directeur de la prison, Homero Miranda, a ordonné à quelques soldats de grimper sur le toit et de lancer des excréments par les fenêtres de la cellule de Leopoldo, et des cellules de Daniel Ceballos — un autre prisonnier politique —, d'Enzo Scarano et de Salvatore Lucchese. Une fois leur méfait accompli, ils ont coupé l'éclairage et l'alimentation en eau afin que les prisonniers ne puissent pas nettoyer les dégâts. Voilà une autre forme de torture.
    Comme vous pouvez voir, mon frère a été victime de plusieurs actes de torture. Et je suis très triste de reconnaître que ces traitements ne se limitent pas à mon frère. J'aimerais parler maintenant des autres prisonniers.
     On compte à l'heure actuelle plus de 63 prisonniers politiques au Venezuela. Je ne sais pas si vous étiez au courant de cela. Je pense que d'importants progrès ont été réalisés sur notre continent — les Amériques — à l'égard de ces violations. Je crois que ce n'est qu'au Venezuela qu'on trouve autant de prisonniers politiques.
    Parlons de quelques-uns de ces cas. L'un des plus regrettables est sans doute celui de Marcelo Crovato. C'est un avocat. Il fait partie d'une ONG appelée Foro Penal. Il est en prison pour avoir défendu des étudiants qui avaient pris part à une manifestation. Sa détention dure depuis plusieurs mois. Sa santé est très précaire. Il est le père de deux enfants. En décembre, il a tenté de se suicider. Le gouvernement ne lui a jamais donné de réponse, ni à lui ni à sa famille.
(1320)
    Un autre cas est celui de Christian Holdack. Christian Holdack est un jeune photographe étudiant qui est en prison depuis maintenant un an pour avoir pris des photos lors de la manifestation du 12 février. Ils ont essayé de forger des liens entre Leopoldo et lui, et ont affirmé que les deux étaient associés dans cette affaire. Christian Holdack n'a jamais rencontré Leopoldo. Il ne fait partie d'aucun parti politique. C'est tout simplement un étudiant qui a pris des photos pendant une manifestation.
    La liste est très longue. Je peux parler de Rosmit Mantilla, un défenseur des droits des homosexuels qui est aussi en prison. Son procès a été suspendu 11 fois. Je peux parler de Daniel Ceballos, un jeune leader politique qui rêve d'un avenir meilleur pour son pays, et qui a été mis en prison pour cette raison, lui aussi dans une prison militaire, à Ramo Verde. C'était un maire dûment élu. Il a été élu en décembre 2013 et, dès avril 2014, il était derrière les barreaux.
    Nombreux sont ceux qui ont été emprisonnés et dont les droits ont été violés.
    Je crois vous avoir donné une idée de ce qui se passe à l'heure actuelle dans mon pays.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Monsieur Viera-Blanco, c'est à vous.
     À mon tour de vous remercier de votre invitation.
    Je m'appelle Orlando Viera-Blanco. Je suis avocat au Venezuela, j'enseigne la culture de mon pays et je suis aussi un conseiller en matière de politiques.
    Certains d'entre vous se souviendront peut-être de moi, car j'ai comparu devant ce comité en compagnie de Maria Corina Machado, il y a environ six mois, pour vous faire part de ce qui s'est passé au Venezuela durant les protestations de février 2014.
    À l'heure actuelle, les choses vont de mal en pis. Voici notre constitution. Elle contient 350 articles. Je peux vous dire que c'est peut-être l'une des meilleures du continent et que l'on y faisait abondamment référence en 1998, au Venezuela. Mais je peux aussi vous affirmer sans me tromper que le gouvernement a transgressé la plupart des dispositions qu'elle contient.
    Penchons-nous un instant sur l'un de ces articles. L'article 43 porte sur le droit à la vie, qualifié d'inaliénable. Au Venezuela, environ 250 000 personnes sont mortes dans des situations criminelles, mais cela ne constitue pas une situation criminelle. C'est peut-être l'une des causes de la détérioration de la démocratie. Lorsque vous avez un gouvernement qui vient de congédier environ 65 000 policiers appartenant à des polices municipales et à la police d'État sous prétexte qu'ils étaient contre lui, disons que cela ne crée pas un climat propice à la sécurité. D'où la mort de 250 000 personnes.
    Il faut aussi préciser que 97 % de ces crimes restent impunis. Personne n'était responsable ou coupable. Environ 95 % des personnes qui sont mortes étaient des pauvres. Ce n'étaient pas des gens de la classe moyenne. C'étaient des gens pauvres, et la plupart d'entre eux avaient un lien avec les trafiquants de drogues. La violence est en grande partie liée, bien sûr, à des viols, et le phénomène de la criminalité est largement attribuable à la détérioration de la qualité de vie au Venezuela.
    Ma question est la suivante: pourquoi n'y a-t-il pas de politique en matière de criminalité au Venezuela? Pourquoi n'y en a-t-il pas? S'agit-il d'une politique d'État? Est-ce seulement une façon de neutraliser le peuple? Il y a environ 2 000 enlèvements par année. Les enlèvements sont une véritable industrie au Venezuela, une industrie qui génère beaucoup d'argent tout en échappant à quelque forme de justice que ce soit. Dans 97 % de ces crimes, ils ne sont ni responsables ni coupables.
    Il y a aussi l'article 68, qui interdit à l'État d'utiliser des produits chimiques et des substances toxiques lors de manifestations. Mais il y a maintenant une nouvelle résolution au Venezuela, la résolution 008610 qu'a récemment proposée le ministre de la Défense. Ladite résolution permet aux forces de l'ordre du Venezuela d'avoir recours à des armes pour mater les manifestants, et d'utiliser des produits chimiques et toxiques pour empêcher les manifestations. C'est une loi.
    À mon sens, il s'agit de formaliser la criminalisation d'un processus. L'article 335 se contente d'évoquer la sécurité civile, la police civile et la sécurité des citoyens afin d'empêcher les manifestations. Une loi comme la résolution 008610 ne fait aucune distinction entre des manifestants pacifiques et des manifestants violents.
(1325)
    C’est curieux, car ils ont ajouté un genre de règlement qui tente d’expliquer la façon dont les forces de sécurité, c’est-à-dire l’armée vénézuélienne, se comporteront pendant des manifestations. Premièrement, elles essaieront d’employer la persuasion. Deuxièmement, elles provoqueront la douleur. Troisièmement, elles auront recours à la force et, quatrièmement, elles utiliseront une arme meurtrière. Comment un soldat pourrait-il vraiment faire un choix entre l’emploi de la persuasion et l’emploi d’une arme meurtrière au cours d’une situation tendue? Soit dit en passant, l’emploi d’une arme meurtrière est interdit par la Constitution. La Constitution la réserve à la protection de l’intégrité et de la souveraineté du pays par des forces nationales. En ce qui concerne les interventions visant à rétablir l’ordre à l’intérieur du pays, les forces doivent agir comme un genre de police civile nationale.
    Les articles 61 et 57 traitent de la liberté d’expression. Comment se porte en ce moment la liberté d’expression au Venezuela? Deux cents cinquante stations de radio et une chaîne de télévision ont été fermées par ordre du gouvernement — 250 stations de radio. La seule qui a survécu a réussi cet exploit en adoptant une position neutre ou favorable à l’égard du gouvernement. Un chroniqueur au service de l’un des principaux journaux du Venezuela, El Universal... Le journal a été acheté récemment par des gens qui représentent apparemment le gouvernement ou qui l’appuient. Je peux vous décrire la façon dont la position du journal a changé. Nous parlons en ce moment d’empêcher de nombreux groupes économiques, qui ont gagné beaucoup d’argent peut-être en tirant parti de la corruption, d’utiliser l’argent du Venezuela pour acheter, entre autres, les médias, les autres journaux et des chaînes de télévision qui avaient l’habitude de s’en prendre au gouvernement.
    Parlons, par exemple, de l’article 46 qui concerne le droit de ne pas être soumis à la torture. Je tiens à vous citer le rapport des épreuves traversées par un étudiant du Venezuela:
    Daniel Quintero, un étudiant du Venezuela âgé de 21 ans, n’avait jamais imaginé qu’il finirait par être torturé pour avoir participé à une manifestation antigouvernementale… Daniel a été arrêté par des membres de la garde nationale du Venezuela qui lui ont asséné des coups de pied et des coups de poing dans les côtes et au visage avant de lui frapper le front avec la crosse de leur fusil.
On l’a forcé à se déshabiller en ne conservant que ses sous-vêtements, on l’a menotté et obligé à passer neuf heures plié en deux de manière à toucher des mains ses chevilles. Chaque fois qu’il bougeait, les soldats le battaient. À un moment donné, le commandant a dit à Daniel qu’ils allaient le brûler vif.
    Voilà l’un des nombreux témoignages apportés par les personnes qui ont été victimes de torture. Nous en avons déjà envoyé 45 qui décrivent clairement ce qui se passe au Venezuela au chapitre des arrestations, des menaces de détention et de la torture.
    Qu’en est-il de l’article concernant la tenue d’élections libres? Au Venezuela, trois millions de citoyens travaillent pour l’État. Lorsque, dans le cadre des élections, on met en oeuvre un mécanisme d’enregistrement des empreintes digitales pour procéder à un genre d’évaluation préalable des électeurs, les gens s’inquiètent. Ceux qui sont à l’emploi du gouvernement craignent qu’il y ait anguille sous roche et que le vote ne soit pas secret. En leur donnant l’impression qu’ils seront licenciés s’ils ne votent pas pour le gouvernement, on trouve en quelque sorte un moyen de contraindre et de menacer les gens qui travaillent pour le gouvernement.
(1330)
    Par ailleurs, il est tout à fait habituel que des personnes que nous appelons patrullas, soit des patrouilleurs qui collaborent avec le gouvernement du Venezuela, se rendent au domicile des gens le jour des élections afin de les forcer à voter pour le gouvernement. Pour remporter les élections, le gouvernement n’hésite nullement à employer, entre autres choses, des stations de radio, des ressources, des deniers publics et de la propagande, en dépit du fait que nos lois contre la corruption interdisent ces pratiques.
    Parlons, par exemple, de la justice. C’est une question qui touche un point sensible chez moi. Comme je vous l’ai indiqué, 250 personnes ont été tuées au Venezuela, et 97 % de ces crimes ont été commis en toute impunité. Il est très curieux qu’en quelques heures, le procureur général ait reçu, de la part du président Chavez à l’époque et du président Maduro maintenant, l’ordre d’emprisonner M. Leopoldo Lopez, alors que, dans 97 % des cas d’homicide, personne n’est tenu responsable.
    À l’heure actuelle, 50 000 personnes sont derrière les barreaux au Venezuela, et 40 000 d’entre elles n’ont pas été condamnées à une peine d’emprisonnement. Ces détenus sont incarcérés dans des établissements conçus pour loger seulement 14 000 personnes. Qu’advient-il de la justice?
    Vous êtes déjà au courant de la situation de Maria Corina Machado. Nous avons demandé la tenue d’une enquête au président actuel de l’assemblée, mais notre demande a été rejetée par l’assemblée quelques heures plus tard.
    Le système de justice est utilisé à des fins politiques, et il est clair qu’il sert d’outil au gouvernement. Le même rôle a été réservé à l’ombudsman et au procureur général du Venezuela. Malgré cela, ces fonctionnaires ont été réélus, ce qui va à l’encontre de la Constitution. Le procureur général et les services publics du pouvoir électoral national ne peuvent être en fonction que pendant sept ans, mais ils ont été réélus sans d’ailleurs avoir obtenu la majorité qu’exige la Constitution.
    Cela vous donne quelques exemples de la détérioration de la conjoncture au Venezuela. En ce moment, la situation est très délicate là-bas. Après 50 ans, nous disposons non pas de 1,8 milliard de dollars, mais de 1,8 million de dollars, et nous n’avons plus de nourriture. Je vous invite à examiner ce qu’une somme pareille achète dans les Émirats ou en Norvège. L’Arabie saoudite a une réserve de 800 milliards de dollars, alors que celle de la Norvège est la plus élevée de toute son histoire. Pendant ce temps, il n’y a plus de lait, de poulet et d’aliments, en général, à consommer au Venezuela.
    C’est trop. Il est clair que le Venezuela n’est pas une démocratie, mais plutôt un nouveau modèle de conception très perverse qui imprègne toutes les institutions, qui prive les Vénézuéliens de tous leurs droits civils et qui détruit l’économie et la citoyenneté de notre pays.
    Merci beaucoup.
(1335)
    Merci.
    Monsieur Vecchio, la parole est à vous.
    Merci.
    Je tiens à commencer par dire que, lorsque je suis arrivé dans la salle, j’ai été frappé par la situation. Je veux dire qu’il est difficile pour moi d’admettre que j’en suis réduit à témoigner à l’étranger dans une institution qui n’appartient pas au Venezuela. Je n’ai pas eu l’occasion de le faire dans mon pays. Personne au Venezuela n’a communiqué avec moi pour entendre mon témoignage. En soi, cet état de choses en dit long sur ce qui se passe là-bas et vous rappelle qu’un Vénézuélien est forcé de se rendre dans un pays étranger afin d’être entendu par une institution étrangère. Vous savez quoi? Ce témoignage devrait se dérouler au Venezuela. C’est la première fois que je comparais devant une institution indépendante qui entendra ce que j’ai à dire et qui traitera mon témoignage d’une façon équitable. Je ne jouis pas de ce privilège au Venezuela, à l’instar de tous les Vénézuéliens.
    Je suis ici en tant que victime de la répression au Venezuela. Je suis le coordonnateur politique national du parti Voluntad Popular, qui veut dire volonté populaire. Voluntad Popular est un parti politique de l’opposition, le même parti auquel Leopoldo Lopez adhère. Leopoldo Lopez est le chef de mon parti politique, et je viens après lui. Je présume que vous vous demandez pourquoi je suis ici, alors que Leopoldo est en prison. Eh bien, j’ai été forcé de quitter mon pays l’année dernière, en raison des problèmes économiques et sociaux… Je ne sais pas si vous êtes au courant de notre contexte, mais l’inflation au Venezuela est la plus élevée du monde entier. Nous sommes aux prises avec d’énormes problèmes de pénurie. La pauvreté a augmenté au cours de l’année dernière, et elle va s’aggraver dans les mois qui viennent — je dis bien s’aggraver.
    L’année dernière, nous avons décidé d’exhorter les Vénézuéliens à manifester pacifiquement dans les rues afin de s’élever contre la violation de leurs droits. Le droit de manifester est protégé par notre Constitution. C’est un droit de la personne, et nous avons demandé aux Vénézuéliens de manifester pacifiquement, tel que l’autorise la Constitution, pour faire respecter leurs droits et pour obtenir un changement de gouvernement, parce que la situation au Venezuela nous déplaît. C’est le rôle que nous devons assumer, et c’est ce que nous faisons.
    Eh bien, le gouvernement a décidé d’emprisonner Leopoldo Lopez. C’est le premier ordre d’arrestation qui a été donné lorsque les manifestations ont commencé l’année dernière.
    Le deuxième ordre était dirigé contre moi, sans raison ou preuve, simplement parce que mes opinions politiques diffèrent de celles du gouvernement. C’est ce que j’ai fait de mal. J’ai dû résister à trois violentes tentatives d’arrestation dirigées contre moi. Ils se sont rendus au siège social de mon parti l’arme à la main, accompagnés de membres de la garde nationale et d’agents de police. Je dirais que 300 personnes armées essayaient de m’attraper. Ils se sont rendus à cet endroit sans s’être munis d’un mandat d’arrêt ou d’un allanamiento, c’est-à-dire un mandat de saisie. Ils sont allés là-bas les mains vides, ce qui était tout à fait illégal. J’avais une chance de m’en sortir, mais cela leur était égal. Pendant le déroulement des manifestations, je me suis caché au Venezuela durant 180 jours, tout en m’efforçant de gérer la situation.
    Par la suite, j’ai eu une conversation avec les membres de mon parti politique et, en un sens, avec Leopoldo par personnes interposées. Nous discutions de ce que je devrais faire. Les membres de mon parti politique ont estimé que je devais quitter mon pays pour jouer un rôle sur la scène internationale, faire entendre notre voix auprès de la communauté internationale et dénoncer ce qui se passe au Venezuela en ce moment.
(1340)
    Permettez-moi de vous dire que c’est la décision la plus difficile que j’aie jamais eu à prendre en tant qu’être humain. Je ne pouvais pas comprendre la raison pour laquelle, au milieu du XXIe siècle, je devais quitter mon pays pour des raisons politiques. Ce n’est pas le pays auquel j’aspire ni celui que nous ou notre région méritons. Nous ne pouvons ignorer ce qui se passe, car nous parlons de droits de la personne et de démocratie. Voilà les valeurs que nous devons préserver pour notre génération.
    J’ai été forcé de quitter mon pays, et j’ai pleuré. J’ai pleuré, car il m’était impossible de comprendre cette situation. Mais, en même temps, cela m’a donné de la force et la foi nécessaire pour poursuivre ma lutte en vue d’obtenir le pays que nous désirons. J’ai pris cette décision et, maintenant, je me tiens ici, sur une tribune internationale, afin de dénoncer les violations des droits de la personne au Venezuela, le conflit social qui touche en particulier les pauvres, et le recul de la démocratie au Venezuela.
    Je dois également mentionner que mon parti politique fait l’objet d’attaques au Venezuela, comme jamais auparavant. Cinq membres de notre parti politique sont derrière les barreaux. L’un d’eux est Leopoldo Lopez, le principal dirigeant du parti. L’un des autres prisonniers est Daniel Ceballos, un maire qui a été élu à la suite d’un vote populaire, mais qui a été démis de ses fonctions au moyen d’une procédure illégale qui n’a duré que quatre heures. Il est maintenant incarcéré. Un de nos membres, un militant, a été emprisonné sans preuve à l’appui. Enfin, deux autres membres de mon parti politique sont en prison.
    De plus, deux mandats d’arrêt sont en souffrance: l’un a été émis contre moi, et l’autre contre un autre membre national de mon parti politique. Nous avons documenté plus de 200 menaces visant nos activités au Venezuela. Chaque jour, les médias publics et privés font paraître les déclarations que les principaux fonctionnaires du gouvernement prononcent contre Voluntad Popular, notre parti, contre son principal dirigeant et contre moi.
    Ils nous exposent quotidiennement à des attaques publiques, et nous n’avons pas la possibilité de répondre à ces déclarations, parce qu’il n’y a aucune liberté d’expression au Venezuela. Le gouvernement contrôle tous les médias vénézuéliens. Si je souhaite organiser une conférence de presse, le seul mécanisme à ma disposition est l’application Twitter.
    Voilà ce que nous affrontons directement, mais, en outre, le gouvernement a réagi aux manifestations avec plus de brutalité que jamais, en détenant plus de 3 000 personnes. À l’heure actuelle, 2 000 personnes, dont la plupart sont des étudiants, ont subi des procès criminels publics et ont vu leurs droits être restreints radicalement. Par exemple, elles n’ont pas le droit de parler de politique, même dans le contexte de leur cause. Elles ne sont pas autorisées à utiliser l’application Twitter ou à assister à des manifestations au Venezuela. Elles font l’objet de restrictions drastiques et pourraient être renvoyées en prison par une simple décision du gouvernement. De plus, nous avons documenté 150 cas de torture au Venezuela, au sujet desquels les Nations Unies ont publié un rapport.
    Il est également à noter qu’au cours des manifestations, 43 personnes ont été tuées. À ce jour, nous ignorons toujours ce qui s’est passé et qui les a tuées. L’impunité règne là-bas. Le gouvernement se sert du pouvoir judiciaire pour imposer la répression au Venezuela.
(1345)
    Dans le cas de Leopoldo, la principale preuve qu’ils ont recueillie contre lui est apparemment l’opinion d’un expert qui, après avoir écouté le discours de Leopoldo, a affirmé que ce dernier possédait des pouvoirs extraordinaires et la capacité de convaincre des gens de commettre des crimes. Voilà la principale preuve dont ils disposent, si l’on peut appeler cela une preuve.
    Leopoldo Lopez est en prison en raison de ses idées et de ses discours. Soit dit en passant, son discours respectait la Constitution. Il a indiqué très clairement que nous devions protester, mais que nous devions le faire d’une manière pacifique, qui respecte la Constitution. Voilà en quoi notre combat a consisté au cours de la dernière année et, par conséquent, voilà où nous en sommes à cet égard.
    En fin de compte, le Venezuela n’est pas un pays démocratique. Toutefois, je n’entamerai pas une discussion afin de déterminer s’il s’agit d’une dictature. J’ai mes propres convictions à ce sujet, mais il y a un aspect dont je ne doute pas et dont vous ne devriez pas douter non plus, à savoir que les droits de la personne sont clairement bafoués au Venezuela et que vous devez prêter attention à ces actes.
    Vous, les Canadiens, devez inciter votre gouvernement à surveiller le Venezuela, ainsi que la région, car ces problèmes risquent de déstabiliser la région. Vous devez sensibiliser les gens à la situation des Vénézuéliens. Il faut également que vous collaboriez avec des organisations multilatérales comme l’ONU et l’OEA afin de vous assurer qu’elles ajoutent le Venezuela à leurs programmes, en particulier en ce qui a trait aux violations des droits de la personne. Nous devons mettre un terme aux violations des droits de la personne et stopper les gens qui les commettent.
    Je comprends que seuls les Vénézuéliens peuvent résoudre le problème du Venezuela. Cela ne m’échappe pas, mais, pour rétablir la démocratie et la coexistence démocratique au Venezuela, nous devons obtenir la participation de la communauté internationale.
    Je pense qu’au XXIe siècle, la valeur de la démocratie et des droits de la personne sera préservée pour les générations futures, si la présente génération, c’est-à-dire les gens assis à cette table, prend des mesures en ce sens. Dans les années à venir, vos familles et vos fils seront fiers de ce que vous avez fait et de ce que nous avons réalisé ensemble.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, étant donné le temps qu'il nous reste, je propose d'accorder simplement une question à chaque membre du comité. Si quelqu'un doit partir plus tôt, faites-moi le savoir, et nous modifierons l'ordre des intervenants en conséquence.
    Monsieur Sweet.
    Nous sommes très fiers de ce que vous faites. Vous défendez avec courage les droits de la personne, et nous vous félicitons. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir témoigné devant nous. Nous avons beaucoup entendu parler du Venezuela. Nous avons déjà rédigé un rapport sur le sujet, et je suis heureux qu'on fasse le point sur cette situation qui ne cesse de s'aggraver.
    J'ai beaucoup de questions à poser, mais je ne peux en poser qu'une seule. Maduro a d'abord prétendu que les États-Unis mèneraient un coup d'État et maintenant il cherche à négocier avec ce pays.
    Est-ce que les sanctions imposées au Venezuela par les États-Unis ont eu l'effet voulu?
(1350)
    Lorsqu'il y a eu violation des droits de la personne, il faut prêter attention à une telle situation. Il n'y a pas de frontière quand il est question des droits de la personne. Il n'y a pas non plus de nationalité. Quant à la décision des États-Unis d'imposer des sanctions contre des violateurs des droits de la personne, je crois que nous en verrons les effets bientôt.
    Je sais que bien des officiers ont peur. Ils ont particulièrement peur de voyager à l'étranger, car ils risquent d'être arrêtés à l'extérieur du Venezuela. Ce qui est important de savoir, c'est que les sanctions ne visent pas le pays, le Venezuela, mais bien des officiers ou des personnes qui ont violé les droits de la personne. Je crois que les effets se feront bientôt sentir.
    Maintenant, ils craignent d'avoir à assumer la responsabilité de leurs actes, à l'instar de leurs supérieurs. Je crois qu'à certains égards, cela permettra d'éviter la répression que nous subissons en ce moment.
    Je vous remercie, monsieur Vecchio.
    J'aimerais ajouter quelque chose. Nous savons que certaines personnes qui étaient très près de Chavez ont demandé à faire partie du programme de protection des témoins aux États-Unis, et elles ont commencé à parler.
    Je vous remercie pour votre témoignage.
    Je compte parmi les personnes qui avaient de l'espoir lorsque la révolution a eu lieu. Au fil de notre étude, nous avons reçu certaines personnes au comité qui nous ont décrit à quel point les gens étaient fiers de tenir la constitution entre leurs mains. Nous avions ici un sentiment d'optimisme.
    Je tiens à vous dire d'abord, monsieur Vecchio, qu'en 1996, j'ai dirigé une manifestation au Canada. À l'époque, il s'agissait de la plus importante manifestation civile, car 100 000 personnes y ont participé. Je n'avais pas à me soucier du tout de la police. Il n'y a eu aucun blessé et aucune arrestation. Je comprends très bien la position dans laquelle vous êtes, car lorsqu'on dirige une manifestation de cette ampleur, on ne sait jamais ce qui peut arriver ni qui pourrait causer des perturbations, alors on pense aux problèmes qui pourraient survenir. Cependant, même dans mes pires cauchemars, je n'aurais jamais pu envisager ce que vous avez vécu.
    Un des témoins nous a expliqué que les gens ne faisaient pas confiance aux policiers avant qu'ils soient mis à pied, mais qu'ils faisaient confiance aux forces armées. Il me semble qu'il doit y avoir un énorme sentiment de trahison étant donné que les policiers auxquels la population ne faisait pas confiance ont été mis à pied et que maintenant, les forces armées agissent en bonne partie de la même façon que les policiers. Je crois que vous avez clairement expliqué ce que vous attendez de nous, alors je ne vais pas vous poser cette question.
    Il semble que les forces armées soient hors de tout contrôle et que peut-être certaines personnes exercent sur elles une plus grande influence qu'elles ne le devraient, et il ne s'agit pas nécessairement des dirigeants politiques.
    Existe-t-il une séparation entre les dirigeants politiques et les forces armées?
    Au Venezuela, il est clair que les forces armées ne protègent pas l'État. Chavez en a fait des protecteurs du régime. Il y a de nombreuses preuves à cet égard. Même lors des fêtes et des célébrations nationales, elles clament ouvertement « Vive Chavez. Vive la révolution. » Bien entendu, c'est une réserve dans les forces armées qui n'est pas d'accord. C'est la situation actuelle.
    Ce qui a été très néfaste au cours des 15 dernières années, c'est l'intention claire du gouvernement d'intégrer les forces armées à l'appareil politique. Nous devons refuser cela. Selon notre constitution, les forces armées ont le mandat de protéger uniquement la constitution et ne peuvent pas participer à la politique. C'est une situation qui doit changer. Il faut agir. Mais le gouvernement, et c'est ce que Chavez voulait, souhaite que les forces armées participent à la politique.
    Je dois préciser que les membres des forces armées sont des Vénézuéliens. Leurs sentiments sont les mêmes. Ils sont touchés par le même problème. Ils ont des familles, des enfants. C'est ce qui est ressorti des discussions que j'ai eues avec bon nombre d'entre eux. La majorité veulent vivre dans une démocratie. La majorité de la population réclame en ce moment un changement. Je sens que les forces armées souhaitent préserver la démocratie et la constitution et veulent éviter l'ingérence politique dans les affaires de notre parti politique.
(1355)
    Je vous remercie.
    Madame Grewal.
    Je vous remercie, monsieur Vecchio, monsieur Viera-Blanco et madame Lopez d'être venus aujourd'hui vous entretenir avec nous.
    Les violations des droits de la personne commises par les autorités vénézuéliennes sont inacceptables. Le comité a déclaré appuyer M. Lopez et il a condamné sa détention illégale ainsi que la violation de ses libertés fondamentales et de son droit à un procès équitable.
    La semaine dernière, trois anciens présidents de pays d'Amérique latine se sont rendus au Venezuela. Ils ont par la suite condamné les violations systématiques des droits de la personne par le gouvernement et ont réclamé la libération de M. Lopez. L'ancien président de la Colombie, Andrés Pastrana, a affirmé qu'un changement démocratique est en voie de se produire. Observez-vous des signes d'un changement démocratique imminent au Venezuela?
    Je sens que la société vénézuélienne est en train de changer. En fait, ce changement a commencé il y a quelques années. Il est en train de se produire. Habituellement, on veut un changement immédiat, mais il faut comprendre que la société a besoin de temps pour assimiler les changements. Je n'ai aucun doute, je suis entièrement certain que nous sommes en train de vivre un changement en ce moment. En tant que dirigeants politiques, nous sommes en train de forcer un changement au Venezuela en ayant recours à un des mécanismes que prévoit notre constitution. Nous avons un régime présidentiel, qui est très rigide et complexe, mais nous disposons de certains mécanismes auxquels nous voulons avoir recours en vue de trouver une façon démocratique de nous sortir de la crise. Quand cela se produira-t-il? Nous ne le savons pas, mais je n'ai aucun doute que nous sommes en train de vivre un changement. La majorité des Vénézuéliens, à l'heure actuelle, souhaitent que la situation soit différente.
    L'économie du Venezuela, comme vous l'avez dit, est confrontée à des enjeux de plus en plus importants...
    Madame Grewal, le manque de temps nous oblige à permettre une seule question par personne. Nous approchons déjà de la fin de la séance.
    Monsieur Cotler, allez-y.
    Je vais reprendre là où Carlos Vecchio a terminé, et lui demander comment le Canada peut contribuer à la démocratie et à la protection des droits de la personne au Venezuela. Que pouvons-nous faire pour aider la population du Venezuela sur le plan de la démocratie?
    Je dirais qu'il faut d'abord condamner clairement les violations des droits de la personne au Venezuela. Il faut mettre le Venezuela à l'ordre du jour du gouvernement canadien. C'est ce que peut faire le Parlement, et particulièrement le comité. Si vous attirez l'attention sur le Venezuela, le déclin de sa démocratie et les violations des droits de la personne, que vous devez condamner, il s'agira d'un pas dans la bonne direction.
    Deuxièmement, le Canada devrait jouer un rôle clé au sein d'organismes multilatéraux, comme l'ONU et l'Organisation des États américains, pour que le Venezuela soit mis à l'ordre du jour, particulièrement les cas de violation des droits de la personne. Selon nous, c'est très important.
    En troisième lieu, le Canada devrait préconiser la libération des prisonniers politiques, pas seulement Leopoldo, mais tous les prisonniers politiques. Je crois que vous pouvez vous faire entendre clairement dans la région.
    Quatrièmement, le Canada doit créer des alliances dans la région. Il vaudrait mieux qu'il s'occupe de tous ces dossiers en collaboration avec différents pays, particulièrement des partenaires d'Amérique latine. Je crois que vous pouvez travailler sur ces relations.
    En dernier lieu, le Canada devrait collaborer aussi avec l'Union européenne et les États-Unis, qui sont en train de négocier avec Cuba. Comme vous le savez, Cuba est très près du gouvernement vénézuélien. Puisqu'il est question de démocratie à Cuba, je crois que le moment est opportun pour examiner la question de la démocratie au Venezuela et des violations des droits de la personne. Cela pourrait faire l'objet de discussions. Je sais que le Canada a joué un rôle important en coulisses au cours des négociations entre les États-Unis et Cuba. M. Kerry a mentionné récemment que les États-Unis souhaitent que le Mexique et le Canada soient présents à la table des négociations. On pourrait probablement profiter de l'occasion pour aborder la question des violations des droits de la personne au Venezuela.
(1400)
    Je vous remercie.
    Oui, allez-y.
    Le rôle important que joue votre comité a déjà donné des résultats. Je peux vous dire que Maria Corina Machado est libre aujourd'hui probablement grâce à votre protection, au travail effectué par le Parlement et à la position qu'il a prise. Le gouvernement vénézuélien respecte le Parlement du Canada. Lorsque Maria Corina Machado est venue ici — je veux dire, si elle n'était pas venue, elle serait en prison.
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose.
    Si l'un d'entre vous, ou un représentant du Parlement, se rendait au Venezuela pour vérifier nos déclarations, cela permettrait de faire avancer les choses. Il faudrait aussi inciter l'ONU à envoyer des représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme.
    Vos propositions sont très utiles.
    Madame Lopez, allez-y.
    Il y a un document important que je vous invite à lire, qui a été publié par l'ONU. Il porte sur la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il a été publié le 28 novembre 2014 et décrit en détail les cas de torture qui ont eu lieu dans notre pays ces dernières années.
    Je vais également vous remettre un document qui vous sera probablement utile.
    Vous pourrez le remettre au greffier à la fin de la réunion, et il s'occupera de le distribuer à tous les membres du comité.
    Je vous remercie.
    Monsieur Hillyer.
    La plupart des régimes qui sont coupables de violations des droits de la personne ne souhaitent pas vraiment faire parler d'eux. Lorsque vous retournerez dans votre pays, serez-vous confrontés à des problèmes en raison de votre visite ici aujourd'hui? Est-ce qu'on vous accueillera à bras ouverts? Quelles seront les conséquences de votre comparution devant nous?
    Aussi, vous avez proposé que des représentants du Canada se rendent au Venezuela. Quel accueil le gouvernement vénézuélien réserverait-il à ces représentants?
    Je peux répondre à cette question. Pour ce qui est de Carlos, il vit actuellement en exil. Orlando, quant à lui, fait partie de la diaspora. Pour ma part, je dois retourner dans mon pays, et ce n'est pas une situation facile à vivre. Il n'est pas facile de se rendre dans un autre pays pour dénoncer son gouvernement comme nous venons de le faire. Vivre en exil n'est pas facile non plus, tout comme faire partie de la diaspora. C'est très difficile, mais nous n'avons pas le choix. Nous devons parler.
    Dénoncer comporte un grand risque, mais c'est la seule option qui s'offre à nous.
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose à mon sujet. Je crois que le gouvernement est maintenant surveillé par Interpol, qui en sait maintenant davantage au sujet du Venezuela. Cet organisme sait que notre gouvernement utilise le pouvoir judiciaire pour arrêter des personnes pour des motifs d'ordre politique. Interpol s'occupe maintenant de cette situation, mais je dois rester prudent.
    Par ailleurs, si je me rends dans un pays qui est très proche du gouvernement vénézuélien, je pourrais probablement me faire arrêter là-bas. Je dois choisir judicieusement les endroits où je me rends.
    Le président de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le Congrès du Venezuela, s'adresse à la population par l'entremise des médias publics au Venezuela. Une fois par semaine, il parle de moi. Il montrera probablement la semaine prochaine une photo de ma visite au Canada. On parle de moi toutes les semaines dans les médias d'une manière négative, et je n'ai aucunement le droit de me défendre au Venezuela
    Si je me rends, par exemple, au Nicaragua, le gouvernement vénézuélien pourrait probablement m'enlever là-bas, en raison de ses liens avec le gouvernement du Nicaragua, et me ramener sur-le-champ au Venezuela. En tant qu'exilé, je dois bien choisir les pays dans lesquels je me rends.
(1405)
    J'ai obtenu le statut de résident permanent au Canada, mais je prévois me rendre au Venezuela d'ici avril. Il est important pour moi de garder contact avec vous pour voir ce qui va se passer.
    Est-ce que le gouvernement serait disposé à nous accueillir?
    Je ne pense pas, mais vous devriez essayer.
    Vous pourriez vous-même vous y rendre. Vous êtes censé avoir le droit de vous rendre au Venezuela simplement pour visiter le pays.
    Récemment, nous avons eu la visite de deux anciens présidents de pays d'Amérique latine, à savoir l'ancien président de la Colombie et l'ancien président du Chili. Ils se sont rendus au Venezuela et ils ont essayé de rencontrer Leopoldo Lopez. Le gouvernement ne les a pas autorisés à le rencontrer et ils ont été très mal traités. Les services de renseignement les surveillaient en tout temps. L'expérience a été difficile pour eux.
    Les Vénézuéliens ont besoin de ce genre de visite. Par la suite, les gouvernements colombiens et chiliens ont été forcés de s'exprimer et de publier des déclarations sur ce qui s'était passé. C'est important pour nous. C'est pourquoi nous vous invitons à vous rendre au Venezuela.
    Je vous remercie.
    Monsieur Brahmi, allez-y.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Madame Lopez, en 2012, en tant que parlementaire, j'ai eu l'occasion de visiter un de mes concitoyens qui était incarcéré dans une prison militaire à l'étranger. J'ai deux questions à vous poser par rapport à cela.
    Premièrement, quelle justification le gouvernement donne-t-il pour que votre frère soit incarcéré dans une prison militaire et non dans une prison civile? À priori, il n'est pas un militaire.
    Veuillez poser une seule question, s'il vous plaît.
    D'accord, c'était ma question. Quelle est la justification donnée par le gouvernement?

[Traduction]

    Selon le gouvernement, c'est pour assurer sa sécurité, pour le protéger. C'est ce qu'il affirme. C'est tout à fait absurde, mais il demeure qu'il est détenu dans une prison militaire.
    On ne nous explique pas pourquoi il ne peut pas recevoir de visiteurs.
    Le président Pastrana de la Colombie et l'ancien président Piñera du Chili se sont rendus à Ramo Verde un dimanche, qui est la journée où il peut recevoir des visites, mais ils n'ont pas été en mesure de le rencontrer. Beaucoup d'autres personnes ont essayé de rencontrer mon frère: María Corina Machado, Antonio Ledezma et David Smolansky. De nombreux dirigeants et amis ont essayé de lui rendre visite, mais toujours en vain.
(1410)
    Je vous remercie.
    M. Sweet m'a fait savoir qu'il a quelque chose à demander au comité.
    Oui, monsieur le président, j'aimerais savoir si mes collègues sont tous d'accord pour que nous fassions parvenir une lettre au secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, en prenant soin d'en envoyer une copie au premier ministre, pour lui demander d'étudier pour nous les sanctions imposées par les États-Unis contre certaines personnes au Venezuela afin de déterminer si le Canada pourrait lui aussi imposer de telles sanctions en vue de démontrer clairement que notre pays est très préoccupé par la situation des droits de la personne au Venezuela.
    Chers collègues, d'après les témoignages que nous avons entendus, nous savons qu'au moins trois élus sont détenus en ce moment: deux députés de l'Assemblée législative et un maire. La situation générale est terrible, et je crois que cela ne fait que l'empirer.
    Vous avez parlé en dernier lieu de la défense des droits et au début, vous avez décrit l'objet de la lettre que j'écrirais au nom du comité à l'intention des personnes que vous avez nommées.
    Y a-t-il un problème?
    Monsieur Brahmi.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Afin de pouvoir donner mon accord, il faudrait que cette lettre soit révisée par un des deux membres permanents néo-démocrates de ce comité.

[Traduction]

    Ce que je vais faire, c'est rédiger une ébauche de la lettre puis la distribuer à tout le monde, et, si elle est satisfaisante, nous l'approuverons à la prochaine réunion et nous l'enverrons.
    Monsieur Cotler.
    Monsieur le président, il ne faudrait pas penser que je suis présomptueux, mais je dois dire que, lors d'une assemblée publique hier soir à la faculté de droit de l'Université McGill, j'ai exhorté le Canada à imposer des sanctions contre des violateurs des droits de la personne au Venezuela — non pas contre le Venezuela, mais bien contre les violateurs des droits de la personne — similaires, comme M. Sweet l'a proposé, à celles imposées par les États-Unis. C'est ce que nous devrions envisager de faire maintenant.
    Je vais demander au greffier de communiquer avec votre bureau en vue d'obtenir un texte détaillé au sujet de ce que vous avez préconisé, et nous essayerons d'inclure cela dans la lettre.
    Je n'ai rien dit de plus que ce que je viens de vous dire. C'est tout ce que j'ai dit.
    D'accord, c'est noté.
    Premièrement, je tiens à remercier les témoins d'avoir comparu devant nous. Nous admirons tous votre courage et celui de vos compatriotes dans votre pays. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps de venir discuter avec nous.
    Chers collègues, je vous suis reconnaissant également d'avoir su composer avec le temps restreint.
    Je vous remercie.
    La séance est levée.
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