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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 075 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 4 juin 2015

[Enregistrement électronique]

(1305)

[Français]

     Je vous souhaite la bienvenue à la 75e réunion du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Nous sommes aujourd'hui le 4 juin 2015, et notre séance est télévisée.

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, aujourd'hui, nous poursuivons notre examen de la situation des droits de la personne au Vietnam. Nous accueillons deux témoins en personne aujourd'hui: Khue-Tu Nguyen, commissaire des droits de la personne pour la Fédération canadienne des Vietnamiens, et Thang Nguyen, président et chef de la direction de Boat People SOS. De plus, par vidéoconférence, nous accueillons, de Los Angeles, Dieu Cay, blogueur.
    Si les témoins sont d'accord, nous vous entendrons dans l'ordre dans lequel vous apparaissez sur l'ordre du jour. Je suis sûr que notre greffier vous a informés que vous devriez livrer un bref exposé. Je sais que vous avez beaucoup de choses à dire, mais une fois que nous aurons entendu tous les exposés, nous répartirons le nombre de questions parmi les députés selon le temps qu'il nous reste.
    Nous entendrons donc d'abord Mme Nguyen, s'il vous plaît.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président, membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne, mesdames et messieurs.

[Traduction]

    Comme le président l'a demandé, nous aimerions d'abord entendre l'exposé de M. Nguyen Thang.
    Bonjour, monsieur le président et bonjour, distingués membres du sous-comité.
    L'an dernier, j'ai comparu devant le sous-comité pour parler de la traite des travailleurs vietnamiens dans quelque 40 pays, notamment la Malaisie, Taïwan, la Jordanie, la France, l'Angleterre, Chypre, et même les États-Unis, et l'Algérie, le Ghana, et de nombreux autres pays.
    Cette forme d'esclavage de l'ère moderne est ancrée dans le programme officiel d'exportation de main-d'oeuvre du gouvernement vietnamien. Aujourd'hui, j'aimerais parler de l'enjeu plus vaste des droits des travailleurs dans le contexte des négociations en cours dans le cadre du PTP, le Partenariat transpacifique, dans lequel le Canada est un partenaire de négociation.
    Au début de 2014, nous avons invité la mère de Do Thi Minh Hanh à comparaître devant le Congrès américain. Do Thi Minh Hanh est une organisatrice syndicale. Elle purgeait une peine d'emprisonnement pour sa participation à l'organisation de syndicats au Vietnam. Cette audience et les actions revendicatrices efficaces entreprises par les syndicats ont galvanisé près de 200 membres du Congrès américain à faire du droit des travailleurs vietnamiens de former des syndicats libres et indépendants un élément principal de l'accord du PTP.
    Le mois dernier, même le président Obama a affirmé publiquement qu'il s'agit d'une condition préalable à la participation du Vietnam au PTP. Le Vietnam est le seul partenaire de négociation du PTP qui interdit les syndicats libres et indépendants. Tous les organisateurs de syndicats indépendants au Vietnam ont été emprisonnés ou ont dû s'enfuir dans d'autres pays afin d'éviter l'arrestation.
    Il y a 12 mois, nous avons lancé une campagne pour faire de la liberté religieuse un objectif des négociations liées au PTP. Il y a quelques semaines, le 22 mai, le Sénat américain a adopté la trade promotion authority, une procédure accélérée, dont le libellé précise que la liberté religieuse est l'une des priorités des négociations commerciales.
    Nous prions la Chambre des représentants des États-Unis d'adopter immédiatement le même amendement. S'il est adopté, ce sera la première fois dans l'histoire des États-Unis que la liberté de religion représentera un objectif de négociation commerciale. C'est important, car le PTP ne sera pas seulement un autre accord commercial, comme son nom le suggère; il fera également savoir au reste du monde que ses membres considèrent les autres signataires comme étant des partenaires dignes de confiance.
    Ainsi, l'adhésion au PTP ne devrait pas être offerte aux gouvernements qui répriment brutalement l'expression de la religion. La répression de la religion se poursuit au Vietnam. Dans de nombreuses provinces, on force fréquemment les gens à renoncer à leur foi. Le catholicisme est pratiquement interdit dans les trois provinces nordiques de Dien Bien, Son La, et Lai Chau. Des dirigeants religieux et leurs disciples ont été agressés physiquement ou même torturés — et certains à mort.
    Nous estimons que de 150 à 200 personnes sont actuellement emprisonnées en raison de leur foi. L'assemblée nationale vietnamienne envisage d'adopter la première loi du pays sur la religion. L'ébauche actuelle stipule que toutes les activités menées par des groupes religieux, même dans des résidences privées, doivent être préalablement enregistrées et approuvées par le gouvernement.
    Il sera difficile pour le gouvernement américain, ou pour n'importe quel gouvernement dans le monde libre, de justifier l'établissement d'un partenariat avec un régime aussi répressif. C'est pourquoi je prie la Chambre des communes du Canada, par l'entremise de votre comité, d'appuyer nos efforts en vue d'utiliser les négociations commerciales en cours pour promouvoir les droits de la personne au Vietnam, surtout le droit des travailleurs de former des syndicats libres et indépendants, et le droit de tous les citoyens à la liberté de religion. Après tout, le commerce devrait contribuer à la formation d'un monde meilleur, et non à renforcer le pouvoir des tyrans.
    Merci.
(1310)
    Merci beaucoup.
     Madame Nguyen, aimeriez-vous livrer votre exposé maintenant?
    Oui.
    Je vous remercie beaucoup de l'invitation à comparaître. Nous vous sommes certainement reconnaissants de pouvoir vous parler aujourd'hui. L'an dernier, nous avons eu l'occasion de comparaître avec trois anciens prisonniers d'opinion. Nous sommes très heureux d'avoir la chance de poursuivre ce dialogue aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Et je vous remercie, monsieur le président, d'avoir fait les présentations. Je peux maintenant aller droit au but.
    Tout d'abord, j'aimerais préciser que les mécanismes de répression utilisés par le gouvernement du Vietnam sont très sophistiqués, nombreux et variés. C'est également très décevant, car si le gouvernement mettait cette créativité et cette ingéniosité au service des progrès sociaux au lieu de réprimer l'opposition, le Vietnam ne serait pas la société dystopique qu'elle est pour un grand nombre de personnes aujourd'hui.
    J'ai le temps de parler de deux points. Comme nous l'avons dit, nous aimerions livrer un bref exposé, afin d'avoir plus de temps pour répondre aux questions et aux commentaires.
    En ce qui concerne ces deux points, j'aimerais commencer par vous donner les exemples les plus récents. Le premier concerne l'utilisation accrue et continue, par le gouvernement, d'hommes de main pour réprimer et maîtriser les dissidents. Récemment, en raison du très grand nombre de photos et de vidéos montrant des agents et agentes de police qui attaquent les dissidents, le gouvernement a commencé à embaucher davantage d'hommes de main pour se dissocier de ces actes de violence. Si ce ne sont pas de vrais hommes de main, ce sont des agents de police en vêtements civils.
    J'ai une photographie assez explicite. J'aimerais qu'elle soit montrée pendant quelques secondes, si vous êtes d'accord.
    Brièvement, l'homme à la gauche est Nguyen Chi Tuyen, et l'homme à droite — il y a deux photos de lui — est Dinh Quang Tuyen. Ils ont été sauvagement battus pour leur activisme pacifique. L'homme à droite a eu le crâne défoncé.
    Au moment où je suis entrée dans cette pièce, aujourd'hui, j'ai eu des nouvelles du pasteur Nguyen Hong Quang, à Saigon, qui datent de quelques heures, ou peut-être de la nuit dernière. Son visage ressemble maintenant à celui de l'homme à gauche. Vous pouvez donc voir l'utilisation croissante de la violence. On ne se contente plus de frapper les gens dans le dos, mais on les frappe à la tête.
    Merci. Il n'est pas nécessaire de regarder cette photo trop longtemps.
    Même si ce que vous voyez est horrible, je crois que nous pouvons faire valoir que le traitement des dissidents ne se compare pas au traitement cruel des citoyens qui ne sont pas dissidents, et qui ne sont donc pas sous les yeux du public et de la communauté internationale, ce qui pourrait leur offrir une certaine protection. Si vous me permettez d'être très honnête, chaque fois que j'apprends ce qu'on fait aux Vietnamiens, je constate de plus en plus que la police du pays accorde moins de valeur à la vie humaine qu'à celle d'une fourmi qu'on écrase et qu'on tue facilement. Je crois que l'une des raisons qui expliquent cela, c'est que l'évaluation du rendement des agents de police au Vietnam est fondée sur le nombre de personnes qu'ils déclarent coupables, ce qui mène à d'intenses séances d'interrogation et de torture, et à la mort de civils.
    En fait, il y a deux jours, j'ai appris que deux oncles avaient été condamnés à une peine d'emprisonnement de 15 mois pour avoir protesté contre l'assassinat sauvage de leur neveu de 14 ans par la police. Je crois que cela en dit long sur la conscience, ou plutôt le manque de conscience, d'un régime dans lequel deux personnes très malheureuses, qui ont protesté contre l'assassinat sauvage d'un jeune proche, ont été emprisonnées pour cette raison.
    L'élément important que j'aimerais rappeler à tous les diplomates, c'est que dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement vietnamien pour tromper la communauté internationale, afin de maintenir son image de gouvernement qui tente d'améliorer les choses, il a également créé de fausses sociétés civiles, aussi connues comme étant des organismes non gouvernementaux dirigés par le gouvernement, ce qui est amusant, d'une certaine façon. Je les appelle des « GONGOs ». Les membres de ces fausses sociétés civiles rencontrent les diplomates lorsque ces derniers visitent le pays, tout en attaquant les sociétés civiles authentiques et réelles du pays. Je dois dire que si ces gens n'avaient pas besoin de l'argent généré par le commerce ou le développement international, etc., ils ne s'efforceraient certainement pas de maintenir leur image internationale.
(1315)
    Je peux vous donner de nombreux autres exemples, mais je crois que je vais m'arrêter ici.
    Le point sur lequel j'aimerais insister est le suivant. Ce gouvernement totalitaire n'hésite pas à mentir effrontément à la communauté internationale. De plus, pendant qu'il prétend améliorer son bilan en matière de droits de la personne en libérant, par exemple, un petit nombre de dissidents bien connus, ce qu'il fait...
    En passant, j'aimerais préciser que le gouvernement libère de nombreux dissidents, car il sait que ces dissidents sont au seuil de la mort, étant donné qu'on leur a refusé les soins médicaux en prison. Donc, malgré tout cela, le gouvernement continue d'arrêter, d'emprisonner et de causer la mort « accidentelle » d'un grand nombre d'autres dissidents pour prouver qu'il ne faut pas remettre en question le régime.
    Je crois que je vais terminer mon exposé ici.
    Comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, nous pouvons entendre maintenant M. Nguyen Van Hai, par vidéoconférence. C'est un ancien prisonnier d'opinion qui a purgé une peine d'emprisonnement de 12 ans pour son activisme pacifique. Merci beaucoup.
    Merci.
    D'après ce que je comprends, nous profiterons du service d'interprétation. Est-ce exact?
    D'accord. Tout le monde devrait installer son écouteur.
    Je vous remercie de votre patience. Nous vous invitons à livrer votre exposé.
    Merci de me donner l'honneur de m'adresser aux membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne au sujet de la situation actuelle des droits de la personne au Vietnam.
    Le jour où j'ai quitté le Vietnam, le 21 octobre 2014, lorsque l'avion a décollé, j'ai jeté un regard à mon propre pays, où j'avais passé un si grand nombre de jours difficiles dans une prison communiste et où un grand nombre de mes amis poursuivaient leur quête de liberté. Je savais que je devais poursuivre la lutte pendant de nombreuses années, afin de pouvoir un jour retourner à ma terre natale et qu'elle soit libre et démocratique.
    Ce jour-là, je me suis rendu compte que je ne le ferais plus pour moi, mais pour mes compatriotes prisonniers. Je dois les aider à dire au monde comment les droits des citoyens vietnamiens, surtout ceux des prisonniers, sont violés. Je dois lutter pour que tous les habitants de ma terre natale puissent jouir des droits de la personne énoncés dans un si grand nombre de conventions et d'ententes internationales dont le Vietnam est signataire.
    Au cours des six derniers mois, j'ai rencontré de nombreux représentants américains, du Département d'État des États-Unis au sénateur Durbin, en passant par des membres de la Chambre des représentants, du Comité pour la protection des journalistes, de la Human Rights Watch et d'Amnistie Internationale, et des représentants des médias pour leur demander de m'aider à libérer mes amis et pour faire savoir au reste du monde comment les droits de la personne sont violés au Vietnam.
    Récemment, dans le cadre de la Journée mondiale de la liberté de la presse, j'ai eu l'honneur de rencontrer le président Obama, et je lui ai adressé mon souhait d'obtenir la liberté de presse au Vietnam. Je l'ai également prié de demander au Vietnam de libérer tous les prisonniers d'opinion et d'abroger les lois ambiguës que le pays utilise pour supprimer le droit à la liberté des Vietnamiens.
    Mesdames et messieurs, aujourd'hui, j'aimerais présenter trois enjeux liés à la situation des droits de la personne au Vietnam. Premièrement, la liberté de la presse et la liberté d'expression, deuxièmement, les prisonniers d'opinion et troisièmement, les syndicats et la liberté d'association au Vietnam.
(1320)
    Dans une dictature totalitaire comme le Vietnam, toutes les communications municipales sont contrôlées par les autorités communistes. Les gens n'osent pas exprimer leurs opinions politiques, car ils craignent d'être arrêtés sans procès, comme dans le cas de Nhan Van Giai Pham, les révisionnistes antiparti, et de nombreux autres, ce qui mène à un nombre toujours plus élevé de victimes condamnées illégalement.
    En ce qui concerne le cas du Club des journalistes libres du Vietnam, dans lequel je suis un témoin, nous avons seulement exprimé notre opinion de façon modérée sur Internet et pourtant, on nous a arrêtés et condamnés à des peines d'emprisonnement de plus de 10 ans.
    Les autorités vietnamiennes ont signé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, mais le pays ne l'a jamais mis en oeuvre. Le Vietnam a adopté des lois contenant des articles ambigus, notamment l'article 258, l'article 88 et l'article 79 et a mis en oeuvre le décret 72 pour condamner les dissidents et les gens qui défendent les droits de la personne, ce qui représente une violation flagrante de l'article 19 du PIDCP.
    Une dictature de l'État gouvernée par des groupes d'intérêt intéressés aux gains individuels, et corrompue à l'extrême, affaiblit l'économie et cause le mécontentement chez les gens et pourtant, lorsque les gens expriment ce mécontentement, l'État utilise toutes sortes de moyens violents pour les réduire au silence.
    Ce sont ces articles ambigus que les autorités ont utilisés pour arrêter quiconque exprime des opinions dissidentes et pour protéger l'existence de la dictature. C'est seulement lorsque les gens peuvent exprimer librement leur avis, sans craindre l'élimination et l'emprisonnement, que l'on peut avoir une société dans laquelle une vie libre et heureuse est garantie pour tous.
    Le Vietnam tente de s'intégrer sur la scène mondiale. La première chose qu'il doit faire, c'est d'abroger ces articles ambigus et redonner aux gens leurs droits de liberté d'expression et de liberté de presse. C'est seulement à ce moment-là que le Vietnam pourra avoir une vraie démocratie.
(1325)
    J'aimerais maintenant parler du deuxième enjeu, c'est-à-dire les prisonniers d'opinion. Dans tous les endroits où se trouve un pouvoir, il est nécessaire de prévoir un mécanisme pour le superviser, mais un tel mécanisme n'existe pas au Vietnam. Autrement dit, le Vietnam est réellement un État policier.
    En effet, la police effectue des arrestations, gère les centres de détention, mène des enquêtes, évalue les preuves, et gère les prisons. C'est l'absence de supervision qui donne à la police la liberté de prononcer de fausses condamnations, de forcer des confessions, d'utiliser des moyens de torture inhumains, barbares et violents pendant leurs enquêtes, ce qui tue des centaines de personnes. Les policiers disent généralement à la victime que son décès leur coûte seulement une feuille de papier. Cela démontre le pouvoir de vie et de mort qu'ils ont sur les victimes, car c'est également la police qui mène l'enquête à cet égard, et la conclusion de l'enquête est toujours qu'il s'agit d'un suicide. En effet, cela leur coûte seulement une feuille de papier.
    Après 6 ans, 6 mois et 11 jours dans une prison communiste, je me suis rendu compte que la violence communiste est encore plus horrible que je le pensais. Pour punir les prisonniers d'opinion, on utilise tous les moyens, notamment la diffamation publique, des cellules de prison munie d'une fente de seulement 30 cm pour la ventilation, et des cellules d'isolement avec des barres de fer et des toits de tôle ondulée exposés au soleil brûlant. Cette cellule mesure seulement 1,8 mètre par 2 mètres, incluant la toilette. Pendant les journées très chaudes, nous devions couvrir nos visages avec des serviettes mouillées pour survivre à la chaleur.
    J'ai appris que plus nous obéissions à leurs ordres, plus ils nous rendaient la vie difficile. Tous les droits des prisonniers énoncés dans le droit criminel sont mis de côté, surtout le droit à un avocat et le droit d'interjeter appel. Lorsque nous souhaitons interjeter appel au bureau du procureur, nous devons le faire par l'entremise des gardiens de prison, qui ne transmettent naturellement jamais cette demande. Les prisonniers sont complètement à la merci des gardiens.
(1330)
    Ces droits sont refusés simplement par l'entremise de la directive 37 par le ministère de la Sécurité publique, dont personne ne connaît le contenu. Par l'entremise de cette directive, le ministère de la Sécurité du Vietnam crée ouvertement des prisons au sein des prisons pour les prisonniers d'opinion et leur impose l'isolement sans contact extérieur.
    Cela a poussé de nombreux prisonniers à protester par des grèves de la faim. J'ai fait deux grèves de la faim, une de 28 jours dans le camp B34 et une autre de 33 jours dans le camp numéro six du ministère de la Sécurité publique. C'est le système de prison le plus violent au Vietnam.
    Je viens de recevoir des nouvelles au sujet de l'une de mes amies qui a été emprisonnée dans le camp numéro cinq, à Thanh Hoa. Elle fait une grève de la faim depuis 31 jours, et sa santé se détériore très rapidement.
    Les autorités du Vietnam doivent immédiatement abolir la directive 37 du ministère de la Sécurité publique et modifier la loi de mise en oeuvre pour qu'elle corresponde au pacte international dont le Vietnam est signataire.
    En ce qui concerne la question des syndicats et de la liberté d'association au Vietnam, mon ami Thang Nguyen vient de livrer un très bon exposé, et je n'ai donc pas besoin d'approfondir le sujet. Tout ce que j'aimerais dire pour le moment, c'est que nous demandons aux députés et aux syndicats de partout dans le monde d'exprimer leurs préoccupations à cet égard, afin que les travailleurs au Vietnam puissent former des syndicats pour protéger leurs intérêts.
    Nous vous demandons d'exiger que les autorités vietnamiennes abolissent les articles 258, 88 et 79, car ils sont ambigus, ainsi que le décret 72, et la directive 37, conformément au pacte international, et qu'elles libèrent tous les prisonniers d'opinion au Vietnam.
(1335)
    Je veux vous présenter une liste des prisonniers d'opinion qui ont besoin d'une aide urgente. Le premier nom sur la liste, c'est celui de Mme Ta Phong Tan, la dame dont j'ai parlé il y a quelques minutes, qui fait une grève de la faim et qui n'est pas en bonne santé. Voici les noms des autres personnes qui font partie de la liste: Tran Huynh Duy Thuc, Nguyen Huu Vinh, Bui Thi Minh Hang, Tran Vu Anh Binh, Vo Minh Tri, Nguyen Dang Minh Man, Ho Thi Bich Khuong, Doan Van Vuon, Doan Dinh Nam, Doan Huy Chuong et Nguyen Hoang Quoc Hung.
    Je vous remercie beaucoup de votre attention. Merci de vous préoccuper de la situation des droits de la personne au Vietnam. Je vous offre mes plus sincères voeux de santé.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, compte tenu du temps qu'il nous reste — comme vous pouvez le voir sur l'horloge qui est au mur —, les interventions dureront quatre minutes
    Je propose que vous adressiez vos questions à l'un des témoins. De cette façon, vous aurez plus de chances d'obtenir une réponse et de pouvoir poser une autre question.
    Monsieur Sweet, vous pouvez commencer.
    Je voulais également demander aux analystes si nous pourrions obtenir un exemplaire des articles et des résolutions dont M. Dieu Cay a parlé avant que nous fassions quelque déclaration que ce soit, de sorte que nous comprenions la situation des gens dont il parle.
    Il y aura un suivi.
    Merci beaucoup.
    Ma première question s'adresse à la commissaire des droits de la personne pour le Canada de la Fédération canadienne des Vietnamiens.
    L'un de vos mandats consiste à assurer l'harmonie entre les associations au Canada. Combien y en a-t-il et combien d'entre elles sont axées sur les droits de la personne?
    Parlez-vous des organismes que regroupe la Fédération canadienne des Vietnamiens?
    Oui.
    Nous avons 11 organismes membres.
(1340)
    Combien sont centrés sur les droits de la personne?
    Ils sont tous très en faveur du respect des droits de la personne, et je crois que ce sont tous des défenseurs des droits de la personne.
    Et il vous incombe de vous assurer qu'ils mènent leurs activités efficacement et de maintenir l'harmonie entre eux.
    C'est mon travail, surtout pour les droits de la personne au Vietnam. Ce qu'ils font dans leur section, c'est leur travail. Je peux leur fournir de l'aide.
    D'accord.
    En fait, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'aimerais dire que nous avons quatre recommandations. Si vous n'avez pas assez de temps, je comprends, mais si vous voulez connaître nos recommandations, je serai ravie de vous les donner. C'est à vous de décider.
    J'ai seulement une question à poser à M. Dieu Cay auparavant, compte tenu du temps limité dont je dispose.
    Oui. D'accord.
    Nous allons nous assurer que vous ne partirez pas d'ici sans avoir donné vos quatre recommandations. Ce sera peut-être seulement à la fin de la séance, mais vous pourrez le faire.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Dieu Cay, j'ai trouvé fascinant que vous nous ayez souhaité une bonne santé. Je ne peux m'imaginer les difficultés que vous avez vécues pendant votre incarcération.
    En tant que personne qui a confronté le gouvernement publiquement, pourquoi vous a-t-on libéré et permis de voyager à votre avis?
M. Dieu Cay [Traduction de l'interprétation]:
    Je crois que c'est principalement en raison de la réussite de la campagne, des campagnes mondiales, des députés et des organisations internationales qui luttent pour la liberté des prisonniers. Je pense que si nous continuons, même si nous n'obtenons pas de résultats immédiats, la parole et la sollicitude donnent plus de force aux gens qui sont toujours en prison. Nous espérons pouvoir continuer à intensifier la campagne de sorte qu'elle finisse par mener à de meilleurs résultats.
    Monsieur le président, me reste-t-il du temps?
    Malheureusement, non.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Marston.
    Je remercie nos invités d'aujourd'hui, car il s'agit d'un sujet très important.
    J'aimerais soulever un point au président. Nous avons deux possibilités: rapport ou déclaration. Notre demande concernant la liste de personnes qui sont incarcérées et en danger pourrait être traitée séparément, plutôt que dans le cadre d'un rapport. Nous pourrions agir un peu plus tôt, si c'est ce que les gens veulent. Ce n'est qu'une idée.
    Nous l'avons fait auparavant, bien sûr, pour d'autres pays.
    Je crois qu'il est assez important de prendre des mesures à cet égard le plus vite possible. Veuillez m'excuser de ne pas poser de questions pour l'instant.
    Il y a une multitude de sujets dont on peut discuter, mais ce que j'ai remarqué entre autres — et c'est le cas de deux ou trois d'entre nous —, c'est que parmi les personnes blessées qui sont sur les photos qu'il a montrées, l'une d'entre elles n'est-elle pas le pasteur qui a déjà comparu devant le comité, le pasteur Hung?
    Non, ce sont d'autres personnes.
    Oh, non? Bien. Nous éprouvons un sentiment de soulagement, car nous nous posions la question.
    Tant de personnes ont ce visage, un visage ensanglanté. Je ne vous blâme pas de prendre cette personne pour une autre.
    L'autre chose, c'est que plusieurs des observations portaient sur les droits du travail. J'ai été dirigeant syndical pendant 28 ans, et je suis ravi de dire qu'au Canada, nous avons le droit d'exprimer des doutes. Je crois que c'est un moyen très raisonnable. Il a été utilisé en Afrique du Sud dans une large mesure également.
    De plus, vous avez parlé de l'utilisation du PTP et des accords commerciaux pour atteindre cet objectif. Nous avons signé des accords avec le Honduras et la Colombie, qui comprennent des accords parallèles sur les droits de la personne et les droits du travail. Ne convenez-vous pas qu'il est crucial qu'ils soient codifiés dans l'accord?
(1345)
    Oui. C'est très important, car premièrement, le Vietnam a plus besoin du PTP que le Canada ou les États-Unis ont besoin du Vietnam.
    Deuxièmement, des mécanismes exécutoires devraient être intégrés dans le PTP pour la surveillance et l'exécution des engagements du Vietnam. Nous savons qu'à bon nombre de reprises auparavant, le Vietnam a fait des promesses, mais ne les a pas tenues.
    À l'heure actuelle, le PTP comprend un accord sur les droits du travail. C'est ce qu'on nous a dit. Nous n'avons pas encore pu le lire. Qui a pu le faire? Toutefois, nous avons su également qu'il n'inclut aucun mécanisme d'exécution ou de surveillance assurant que le Vietnam respecte ses engagements. Voilà pourquoi nous travaillons très fort présentement pour qu'un tel mécanisme soit intégré dans le PTP, et je considère que c'est notre dernière chance d'améliorer les conditions des travailleurs au Vietnam de façon significative.
M. Wayne Marston [Interprétation]:
    Je veux poser une question à notre témoin qui comparaît par vidéoconférence. Avez-vous pu consulter votre avocat lorsque vous étiez en prison?
M. Dieu Cay [Traduction de l'interprétation]:
    Pendant mon incarcération, à deux reprises, et en litige, on m'a imposé beaucoup d'obstacles m'empêchant de consulter mon avocat. Même pendant le procès, je ne pouvais même pas demander l'aide de mon avocat.
    Je crois que mon temps est écoulé
    Oui, malheureusement.
    C'est maintenant au tour de Mme Grewal. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je remercie les témoins d'être venus comparaître et de nous avoir présenté leurs exposés.
    Le gouvernement vietnamien continue de violer un grand nombre de droits de la personne. Le Canada compte environ 220 000 citoyens d'origine vietnamienne. Selon le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, le Canada et le Vietnam entretiennent de bonnes relations bilatérales. Or, ces témoignages selon lesquels le Vietnam viole les droits de la personne de ses citoyens sont vraiment effrayants.
    À votre avis, dans quelle mesure le problème au Vietnam peut-il être attribuable à la corruption?
    La corruption fait partie du problème; c'est le problème majeur auquel est confronté le Vietnam, car il n'y a pas de société civile. Il n'y a pas d'organismes de surveillance.
    En fait, tout récemment, un journaliste — il s'agit en fait de l'éditeur en chef d'une revue appartenant à l'État — a dénoncé la corruption, et il subit maintenant un procès pour avoir révélé des renseignements touchant la sécurité nationale. Il n'est pas le seul. De nombreux autres journalistes ont été condamnés à des peines d'emprisonnement pour avoir dénoncé la corruption gouvernementale.
    Des allégations ont été formulées selon lesquelles le Vietnam restreint la liberté des protestataires pacifiques et les torture, comme nous le constatons sur les photos que vous nous avez montrées. Le gouvernement cible-t-il des types particuliers de protestataires et y a-t-il une raison pour laquelle il le fait?
    Comme bien des régimes totalitaires et dictatoriaux, il consacre son énergie principalement à cibler des figures de proue en vue et la source d'inspiration pour les gens, car ces personnes sont capables d'amener le peuple à se soulever et à exprimer son point de vue.
    Toutefois, il ne cible pas uniquement les sources d'inspiration, mais également les gens qui ne sont pas connus du tout du public, des agriculteurs, des gens des régions rurales. Ce qui est malheureux, c'est que peu de gens les connaissent et c'est pourquoi nous essayons d'amener beaucoup de personnes à soutenir non seulement des blogueurs et des journalistes, qui sont peut-être plus connus de la communauté internationale parce qu'ils écrivent en ligne et sont plus accessibles, mais aussi ces gens, qui ont très peu de moyens de communiquer avec le monde extérieur.
    J'espère avoir répondu à votre question.
(1350)
    Oui. Merci beaucoup. Vous y avez répondu.
    Puis-je répondre brièvement?
    Oui.
    Trois libertés fondamentales constituent la pierre angulaire de la société civile. Le gouvernement vietnamien voit la société civile comme une menace potentielle à son monopole du pouvoir.
    La première, c'est la liberté d'expression. Si l'on peut répandre la nouvelle, communiquer ses idées, cela peut être contagieux. La seconde, c'est la liberté de faire des réunions pacifiques. La troisième, c'est la liberté d'association, car en nous réunissant, nous devenons une force et une influence.
    Donc, des gens qui ont essayé d'exercer ces trois libertés ont été torturés et condamnés à mort.
    Le Canada participe aux négociations sur le Partenariat transpacifique, qui inclut également le Vietnam.
    Madame Nguyen, que serait pour vous une condition des droits de la personne acceptable sur laquelle le Canada et le Vietnam devraient s'entendre?
    Je crois qu'il s'agirait d'abord et avant tout de la libération inconditionnelle de tous les prisonniers d'opinion. Nous devons les faire sortir de prison.
    Une autre condition importante, c'est l'élimination de tous les articles vagues du code pénal du Vietnam qui criminalisent la dissidence pacifique, car on utilise ces articles pour dire que des gens sont des criminels alors que ce n'est pas vrai.
    Je pense qu'il y en a une troisième dont M. Nguyen voudra peut-être parler.
    Oui, et il s'agit des droits des travailleurs, de tous les travailleurs du Vietnam, de former leur propre syndicat libre et indépendant.
    Croyez-vous que...
    Je déteste faire cela, mais je dois vous interrompre. Vous avez dépassé les quatre minutes.
    C'est correct.
    J'en suis désolé.
    Je voudrais seulement une précision. Lorsque vous dites « société civile », vous parlez des organisations non gouvernementales. Est-ce exact?
    C'est exact. Je parle du regroupement de citoyens et d'individus honnêtes de la société qui s'attaquent à leurs propres difficultés et problèmes et qui changent les règles sociales qui régissent la société. Or, c'est interdit au Vietnam.
    Seules les ONGG sont autorisées au Vietnam. Elles sont créées par le gouvernement pour faire croire au monde qu'il y a une société civile, ce qui n'existe pas au Vietnam.
    Je vous remercie de cette précision.
    Monsieur Cotler, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux également féliciter les témoins de leur témoignage éclairé et saisissant sur des questions relatives aux violations des libertés fondamentales et du droit de se syndiquer, et non seulement sur les prisonniers politiques, mais aussi sur le sort pénible réservé aux prisonniers politiques: torture, aveux forcés, etc.
    Comme on l'a mentionné également, vous avez décrit le gouvernement vietnamien comme un gouvernement totalitaire, et vous avez parlé d'un régime dictatorial, ce qui m'amène à poser ma question. Comment des pressions internationales peuvent-elles être utilisées de façon efficace contre un régime totalitaire, par exemple, pour la question des libertés fondamentales dont vous parliez: liberté d'expression, de presse, de réunion et d'association?
    J'ai une question pour M. Dieu Cay. Comment cela peut-il être utile pour la libération de votre collègue, Mme Ta Phong Tan, qui est en train de faire une grève de la faim, comme vous l'avez mentionné? Voilà mes deux questions.
    Pour répondre à la première question, je dirais qu'aujourd'hui, le Vietnam n'est plus celui qu'il était dans les années 1970. Il s'est ouvert au monde, car il doit survivre sur le plan économique. Depuis l'an dernier, lorsque la Chine a construit une installation de forage pétrolier dans la mer de Chine méridionale — qui fait partie des eaux territoriales vietnamiennes —, le Vietnam est isolé sur le plan politique parce que la Chine était son unique alliée jusqu'alors.
    Il n'a pas d'alliés présentement. C'est pourquoi il se tourne vers l'Occident, surtout les États-Unis et le Canada, et d'autres pays. C'est pourquoi il veut tellement faire partie du PTP. Et c'est là qu'on a une certaine marge de manoeuvre. Le Vietnam a besoin du PTP, du commerce, de sécurité, et il lui faut conclure des partenariats avec d'autres pays. Il va prendre des engagements et faire des promesses qu'il n'a pas vraiment l'intention de respecter ou de mettre en oeuvre, mais c'est la deuxième étape. C'est pourquoi il nous faut bâtir une société civile qui peut forcer le gouvernement à respecter ses engagements dans le cadre de traités et de pactes internationaux. Voilà les deux étapes qui doivent aller de pair.
    Il y a eu des améliorations chaque fois que nous avons essayé cette approche à deux volets.
(1355)
    Monsieur, je pense que nous demanderions que le gouvernement adopte une résolution exigeant la libération de tous les prisonniers d'opinion, particulièrement Mme Ta Phong Tan. Son cas est particulier parce qu'elle a milité à mes côtés et nous avons posé des gestes semblables. Elle est en prison depuis longtemps, et sa mère s'est même suicidée en s'immolant en guise de protestation. Je pense que si le gouvernement du Canada adoptait une résolution, en faisait une affaire médiatisée et amenait d'autres communautés à se rallier à la cause, ce serait une mesure très efficace pour remédier à la situation.
    En outre, il serait bon que le Canada, les États-Unis et les pays d'Europe dressent une liste de tous les gardiens de prison qui ont commis des brutalités et des atrocités, la rendent publique et considèrent chacun d'entre eux comme persona non grata en les empêchant d'entrer dans leurs pays.
    Merci.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à notre prochain intervenant, M. Hillyer.
    Madame Nguyen, vous avez dit qu'en plus des blogueurs, des journalistes et des écrivains, le gouvernement vietnamien s'en prenait aux agriculteurs et aux habitants des régions rurales. Pourquoi?
    Cela fait partie de sa campagne d'expropriation des terres. Le gouvernement dépossède les propriétaires de leurs terres. J'ai parlé des blogueurs, des journalistes, des agriculteurs et des habitants des régions rurales, mais le gouvernement vise également les chefs religieux — non seulement les chefs, mais aussi les membres des organisations religieuses non autorisées par l'État. Cela va à l'encontre de la liberté de religion. Tout compte fait, le gouvernement s'en prend à quiconque exprime une opinion qui n'est pas celle du Parti communiste du Vietnam. Ce ne sont pas que les agriculteurs et les blogueurs; c'est tout le monde.
(1400)
    D'accord. Dans L'Archipel du Goulag, le régime ciblait n'importe qui pour créer un climat de terreur, de sorte que les gens n'avaient confiance en personne et n'osaient même pas s'associer secrètement. Est-ce que cela décrit bien la situation actuelle?
    Oui, très bien. C'est très décevant de voir que cela se passe encore au XXIe siècle dans un endroit comme le Vietnam. Personnellement, j'ai beaucoup appris dans mes cours sur les sociétés dystopiques, et nous avons lu bon nombre de ces ouvrages, qui sont évidemment fictifs. Toutefois, quand on les lit, on peut facilement faire un parallèle avec la situation au Vietnam et son régime totalitaire. C'est incroyable. On dirait un ouvrage de fiction, mais malheureusement, c'est la réalité.
    Vous avez également parlé des organisations religieuses non autorisées par l'État. Y a-t-il des organisations qui sont autorisées par l'État?
    Ce sont des organisations qui sont contrôlées par l'État; elles ne sont pas indépendantes.
    J'ajouterais qu'au Vietnam, à l'heure actuelle, toutes les activités ou organisations religieuses doivent être enregistrées auprès du gouvernement et approuvées par le gouvernement, et ce, pour deux raisons. Tout d'abord, le gouvernement veut étouffer et neutraliser... En fait, il a interdit de nombreuses églises, y compris la religion la plus importante au Vietnam, le bouddhisme unifié. Cette religion demeure interdite encore à ce jour.
    Au lieu de cela, le gouvernement autorise des églises qu'il a créées et, dans bien des cas, il nomme des cadres communistes à la tête de ces églises pour mieux les contrôler. Ensuite, il saisit les terres, les propriétés, les temples et les églises des religions interdites et les transfère aux organisations contrôlées par l'État. Cela donne donc l'impression qu'il y a des églises et des religions, mais en fait, toutes les activités religieuses sont contrôlées par l'État.
    Les gens ont-ils foi en ces églises? Y a-t-il des gens qui les fréquentent?
    Beaucoup de gens choisissent de ne pas fréquenter ces églises, d'où le mouvement des maisons-églises au Vietnam. Ces églises clandestines sont brutalement réprimées. Par exemple, entre 2001 et 2004, plus de 4 000 maisons-églises appartenant aux montagnards protestants, une minorité ethnique, ont été incendiées, détruites ou fermées, et très peu d'entre elles ont rouvert leurs portes, seulement celles autorisées et dirigées par le gouvernement. Un certain nombre de montagnards ont tenté de poursuivre leurs activités, mais compte tenu de la nouvelle loi, ce n'est plus possible puisqu'ils doivent désormais s'enregistrer auprès du gouvernement.
    Le gouvernement essaie de montrer qu'il s'améliore par l'intermédiaire du nouveau décret 92, entre autres, dans lequel il affirme que les organisations religieuses interdites peuvent maintenant s'enregistrer si elles le désirent. Cependant, pour pouvoir le faire, elles doivent déjà avoir été approuvées par le gouvernement pendant 10 ou 20 ans. Par conséquent, les organisations religieuses non autorisées par l'État se retrouvent dans une impasse, et le décret 92 n'aura servi à rien.
    Merci, monsieur Hillyer.
    Monsieur Benskin, allez-y, je vous prie.
    Merci, et permettez-moi de vous souhaiter de nouveau la bienvenue.
    Merci, monsieur Dieu Cay, pour votre témoignage très émouvant. Ma question s'adresse à vous. Plusieurs témoins nous ont parlé des grèves de la faim qui ont lieu actuellement dans les prisons ou qui ont déjà été menées, comme dans votre cas et celui d'un autre témoin, ainsi que votre amie qui en fait une au moment où l'on se parle. À moins que des gens comme vous dénoncent la situation, ce n'est pas quelque chose dont on entend beaucoup parler.
    J'imagine que c'est là où les blogueurs entrent en jeu. Sait-on combien de blogueurs se consacrent à la défense des droits de la personne au Vietnam et combien d'entre eux se trouvent en fait au Vietnam à l'heure actuelle?
(1405)
M. Dieu Cay: (Interprétation)
    Monsieur, comme nous l'avons dit, le système de communication et d'information est entièrement sous le contrôle du gouvernement, alors il est impossible de publier ou de distribuer des nouvelles qui ne sont pas approuvées par le gouvernement.
    Nous devons donc compter uniquement sur ce que nous appelons les réseaux sociaux et virtuels. Par exemple, dans mon cas, lorsque je faisais une grève de la fin, on m'a complètement isolé au sein de la prison. Personne n'était au courant. C'est seulement lorsqu'un membre de ma famille m'a rendu visite que la nouvelle s'est répandue et que d'autres blogueurs ont commencé à en parler.
    De plus, dans le cas de mon amie qui est emprisonnée à Thanh Hoa, à 5 heures ce matin, un blogueur a annoncé que son frère lui avait rendu visite et qu'il avait découvert que son état de santé s'était détérioré en raison de sa grève de la faim. Les blogueurs peuvent donc diffuser ces nouvelles à la population.
(1410)
    À l'heure actuelle, au Vietnam, on compte environ 6 millions de blogueurs, alors si seulement 1 % de ces blogueurs diffusait ces renseignements et défendait la liberté d'expression et d'association, il y aurait 60 000 blogueurs pour répandre ces nouvelles.
    En outre, il y a plus de 25 millions de gens qui utilisent Facebook au Vietnam. Si seulement 1 % d'entre eux se servait de cette plateforme pour diffuser l'information, on en serait à 250 000 personnes. C'est pourquoi, comme je l'ai dit dans mon exposé, et j'aimerais encore une fois insister là-dessus, nous exhortons le Parlement du Canada et les autres organismes internationaux à faire de la liberté de la presse un des éléments fondamentaux de leurs efforts visant à mettre fin aux violations des droits de la personne au Vietnam.
    Merci beaucoup.
    C'est ce qui met fin à notre période de questions, mais avant de lever la séance, je vais laisser à Mme Nguyen la possibilité de formuler ses quatre recommandations.
    Madame Nguyen.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je serai très brève et je ne ferai qu'énumérer mes quatre recommandations. Merci beaucoup de m'accorder ce temps.
    Ma première recommandation concerne l'adoption d'un prisonnier d'opinion. Nous recommanderions au sous-comité de demander aux parlementaires s'ils seraient disposés à participer à un projet visant à adopter un prisonnier d'opinion. Par « adopter », je veux dire surveiller de près la situation d'un militant emprisonné et s'assurer qu'il est traité de façon décente en prison. En premier lieu, on assure sa protection pendant son séjour en prison, et plus tard, on réclame sa libération inconditionnelle.
    En gros, c'est ce qu'on peut faire. Nous pourrions vous fournir une liste de ces prisonniers d'opinion et soustraire ceux qui ont déjà été « adoptés » par vos homologues aux États-Unis, en Allemagne et en Australie. Ce processus est déjà en cours.
    Deuxièmement, le sous-comité devrait exiger un rapport du bureau de l'ambassadeur du Canada pour la liberté de religion, M. Andrew Bennett, que MM. Nguyen et Le ainsi que moi-même avons eu le privilège de rencontrer hier, afin de faire le point sur la situation des libertés religieuses au Vietnam.
    Troisièmement, nous réclamons des réformes juridiques au Vietnam, comme on l'a déjà indiqué à maintes reprises, afin de supprimer les articles ambigus du code pénal vietnamien qui sont invoqués pour criminaliser les dissidents pacifiques.
    Notre dernière recommandation concerne le PTP, dont M. Nguyen a parlé en détail.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Je vous inviterais donc à transmettre la liste des noms à notre greffier. Toutefois, n'enlevez pas le nom des prisonniers qui ont été jumelés à des législateurs d'autres pays, mais donnez-nous plutôt toute l'information qui s'y rattache. Ce serait très utile.
(1415)
    Absolument.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Je tiens à remercier tous nos témoins, ceux qui ont comparu en personne et notre témoin qui a témoigné depuis Los Angeles. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir été des nôtres aujourd'hui, en tant que membres de la communauté.
    Je crains de ne pas savoir le nom de l'interprète, mais quoi qu'il en soit, je vous remercie. Nous avons des interprètes de divers niveaux de compétence, mais sachez que vous avez été excellent. Nous vous remercions de votre aide.
    Enfin, M. Dewar, le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires étrangères est également ici.
    Merci beaucoup à vous tous.
    Cela dit, la séance est levée.
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