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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 066 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 28 avril 2015

[Enregistrement électronique]

(1305)

[Français]

    Chers collègues, nous sommes le Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Aujourd'hui, le 28 avril 2015, c'est notre 66e séance.

[Traduction]

    Notre séance est télévisée.
    Mesdames et messieurs, sachez que nos témoins d'aujourd'hui s'exprimeront en espagnol, puisqu'ils ne parlent aucune des deux langues officielles du Canada. Cela n'aura aucune influence sur la manière dont vous entendrez leurs témoignages, car vous pourrez écouter l'interprétation dans la langue que vous préférez. Les témoins utiliseront pour leur part des écouteurs qu'ils ont apportés pour l'occasion afin de pouvoir tout entendre en espagnol.
    Je tiens à indiquer à tout le monde ici présent que si vous voulez écouter la séance en espagnol — je me rends compte que ce n'est pas utile si vous ne comprenez pas déjà l'anglais, langue dans laquelle je m'exprime maintenant —, il y a des écouteurs supplémentaires.
    Permettez-moi maintenant de présenter nos témoins. Trois personnes comparaissent aujourd'hui: Jorge Clemente Balbuena, leader étudiant du Comité étudiant Ayotzinapa Teachers' School, qui témoigne à titre personnel; Hilda Legideno Vargas, parent d'un étudiant disparu, qui vient également de l'Ayotzinapa Teachers' School; et enfin Isidoro Vicario Aguilar, qui témoigne au nom du Centre des droits de l'homme de la montagne Tlachinollan.
    Mesdames et messieurs, bienvenue devant notre comité. Nous sommes ravis de vous compter parmi nous. Je vais vous expliquer brièvement comment le comité procède. Nous vous invitons à faire un exposé, après quoi chaque membre vous posera des questions. Six d'entre eux vous interrogeront. C'est la durée de vos exposés qui déterminera le temps dont nous disposerons pour la période de questions.
    Nous encourageons normalement nos témoins à faire des exposés aussi brefs que possible, pas parce que ce que vous avez à dire n'est pas important — tout au contraire —, mais parce que les questions que vos propos auront inspirées aux députés sont souvent essentielles pour trouver les meilleures manières dont le Canada peut contribuer à résoudre les problèmes sur lesquels vous attirez notre attention.
    Cela dit, je ne suis pas certain de la manière dont vous avez l'intention de vous partager le temps dont vous disposez. Est-ce que l'un d'entre vous souhaiterait parler en premier?
    Sentez-vous libre de commencer.
(1310)
    Bon après-midi.
    Je m'appelle Hilda Vargas et je suis la mère de Jorge Antonio Tizapa Legideno, un étudiant disparu.
    Nous avons cherché nos enfants, parcourant Iguala et les villes avoisinantes en long et en large.
    Cela fait plus de sept mois, et à titre de parents, nous sommes désespérés parce que nous voulons trouver nos enfants. Nous n'acceptons pas les affirmations du gouvernement, parce qu'il ment depuis le tout début. Il a commencé par dire que nos enfants se trouvaient dans des tombes, puis qu'ils reposaient dans la rivière San Juan, et il affirme maintenant qu'ils ont été brûlés.
    Nous ne croyons pas cette version, parce qu'il nous ment depuis le début et il continue de le faire.
    À titre de parents, nous vous demandons d'être solidaires avec nous et de demander au gouvernement du Mexique de vraiment chercher nos enfants.
    Malheureusement, le gouvernement n'a fait que nous attaquer à ce sujet. Il s'en est pris aux étudiants et les a battus.
    Nous, les parents, n'acceptons pas la version du gouvernement, parce que, comme je l'ai souligné, il nous a menti. Sa version des faits repose sur les affirmations de gens qui connaîtraient les faits, mais aucune preuve scientifique n'indique que c'est ce qui s'est passé.
    Des experts argentins ont indiqué que nos enfants ne sont pas dans les tombes. Selon des scientifiques de l'UNAM, il est impossible que les choses se soient passées ainsi, car pour brûler autant de corps, il aurait fallu beaucoup plus de matériel.
    Nous cherchons nos enfants vivants depuis sept mois, parce que nous pensons qu'ils sont encore en vie. Nous ne croyons pas la version du gouvernement. Malheureusement, il s'attaque maintenant à nous, et nous sommes désespérés. Nous voulons voir comment vous pouvez prendre une décision et communiquer avec le gouvernement du Mexique pour résoudre cette affaire.
    Nous vivons dans l'État du Guerrero et nous savons comment le gouvernement opère. C'est le crime organisé qui dirige dans cet État. Comme le gouvernement entretient des rapports avec le crime organisé, nous pensons que c'est lui qui...
    J'aimerais simplement étoffer l'information fournie par Mme Hilda.
    Hilda est la mère d'un des 43 étudiants disparus au cours de l'incident malheureux qui s'est produit dans l'État du Guerrero, au Mexique, les 26 et 27 septembre 2014. Sachez qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé, mais d'une violation systématique des droits de la personne à laquelle l'État mexicain est confronté.
    J'aimerais enfin demander ce qui suit à l'honorable Parlement. Nous demandons premièrement que cet honorable Parlement et le Canada rayent le Mexique de la liste des pays sécuritaires en raison de la situation dénoncée par Hilda. Les conditions n'y sont pas sécuritaires.
    Nous demandons aussi à cet honorable Parlement de prendre une décision au sujet d'Ayotzinapa et d'insister auprès du gouvernement du Mexique pour qu'il fasse preuve de transparence dans le cadre des enquêtes menées à Ayotzinapa.
    Nous voudrions également que cet honorable Parlement pousse l'État mexicain à garantir le travail des experts de la Commission interaméricaine des droits de l'homme et du groupe d'anthropologues argentins, qui est constitué d'experts médicolégaux qui nous aident dans cette affaire à Ayotzinapa.
    De plus, nous demandons à cet honorable Parlement d'inciter l'État mexicain à offrir des garanties de sécurité aux parents des 43 étudiants, qui insistent aujourd'hui pour dire que leurs enfants sont encore vivants, ainsi qu'aux étudiants de l'école normale, à leurs représentants et aux autres organisations qui accompagnent le mouvement des parents.
    Ce dernier point est extrêmement important pour les parents et leurs représentants. Nous avons constaté que dans le cadre de cette quête de justice et de cette lutte pour retrouver les étudiants vivants, le gouvernement s'en est pris aux parents et aux organisations dernièrement. Nous avons vu un exemple clair de ce comportement tout récemment quand la police fédérale a tué un professeur en le battant alors que des étudiants réclamaient un dialogue avec les fonctionnaires fédéraux. Les autorités mexicaines sont loin d'éclaircir les faits et d'indiquer qui devrait découvrir l'endroit où se trouvent les 43 étudiants. Malheureusement, le Mexique est encore le théâtre d'événements déplorables.
    Sur ce, nous pouvons répondre aux questions ou aux préoccupations que le Parlement pourrait avoir.
    Merci.
(1315)
    Merci.
    Chers collègues, le temps nous permet d'effectuer des tours de questions de sept minutes.
    En passant, je confirmerais simplement que je pense que nous utiliserons la procédure habituelle, selon laquelle quiconque doit partir tôt... Pouvez-vous discuter entre vous pour que ceux qui peuvent rester plus longtemps posent les dernières questions?
    Nous commencerons par Mme Grewal.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de comparaître aujourd'hui et de nous accorder une partie de leur précieux temps pour témoigner devant le comité.
    Selon Human Rights Watch, les problèmes de disparitions forcées, d'exécutions extrajudiciaires et, bien entendu, de torture sont courants au Mexique. La nouvelle procureure générale de ce pays, Mme Gomez Gonzalez, s'est engagée, quand elle est entrée en poste en mars, à faire enquête sur les violations, y compris les disparitions et la torture, et à accorder la priorité à la collaboration avec les observateurs nationaux et internationaux des droits de la personne.
    Considérez-vous que Mme Gonzalez peut veiller à ce que les violations des droits de la personne fassent l'objet d'enquêtes efficaces et soient punies?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    C'est ce que les Mexicains réclament et ce que le peuple du Mexique demande. Ils veulent que les autorités responsables de l'enquête sur ces événements malheureux soient capables de travailler efficacement. Nous n'avons malheureusement pas eu de résultat jusqu'à présent.
     Le procureur général précédent a tenté par tous les moyens de clore l'enquête sur l'affaire d'Ayotzinapa, sachant que la seule hypothèse envisagée par les autorités mexicaines était que les 43 étudiants avaient été tués et brûlés dans une décharge d'Iguala.
    Cependant, les enquêtes menées par les anthropologues argentins indiquent le contraire de ce que disent les décrets ou l'information issus de source officielle. Avec l'arrivée de la procureure générale, les représentants et les parents demandent qu'un travail efficace soit réalisé pour pouvoir découvrir où se trouvent les 43 étudiants.
    Nous nous désolons qu'après tout ce temps — cela a fait sept mois avant-hier —, il n'y ait encore aucune indication de l'endroit où ils se trouvent.
(1320)
    Je crois comprendre que l'impunité et la corruption généralisées constituent un très grave problème, particulièrement dans les États, à l'échelle locale, au sein des forces de sécurité et dans le secteur judiciaire.
    Selon vous, que peut faire le gouvernement national pour mettre fin à ces sévices?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Le Mexique est le théâtre d'une grave crise de violations des droits de la personne, qui sont perpétrées par les fonctionnaires ou les autorités sans que des enquêtes appropriées ne soient menées, sans que les responsables ne soient détenus, sans que des processus ne soient entamés, sans que des sanctions ne soient imposées et sans que les responsables ne soient punis. C'est ce qui permet aux fonctionnaires et aux gestionnaires du gouvernement de continuer de favoriser ces violations. Il s'agit de violations systématiques.
    Nous avons parlé de l'affaire d'Ayotzinapa, mais ce n'est pas le seul cas. Au Mexique, les chiffres officiels indiquent malheureusement que plus de 26 000 personnes ont disparu en sept ans. Autrement dit, c'est le nombre de disparus de 2007 à 2014. C'est un chiffre alarmant. Dans les faits, il y a de la torture.
    Des débats et des discussions extrajudiciaires ont lieu, et nous n'avons toujours pas vu l'État mexicain sanctionner les responsables.
    Dans quelle mesure les problèmes qu'éprouve le Mexique sont-ils attribués aux organisations criminelles transnationales et nationales?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    En fait, l'affaire d'Ayotzinapa pourrait servir d'exemple pour illustrer tous les autres cas. La police a participé aux événements du 26 ou du 27 septembre, mais le crime organisé est aussi intervenu directement, ce qui trahit une collusion importante entre les fonctionnaires et le crime organisé. Malheureusement, dans le cas d'Ayotzinapa, non seulement les fonctionnaires locaux ont une responsabilité dans ce qui s'est passé, mais les fonctionnaires de l'État du Guerrero ont participé directement et indirectement aux événements.
    Il y a aussi une responsabilité directe et indirecte des fonctionnaires du gouvernement du Mexique. Des gens à l'extérieur du pays ont tenté de minimiser l'affaire d'Ayotzinapa, mais les Mexicains sont confrontés à une réalité extrêmement compliquée, car ces crimes ne font l'objet d'aucun processus, comme ils le devraient quand des fonctionnaires locaux, de l'État et du gouvernement fédéral, sont impliqués. Certains crimes ont été traités comme des homicides, mais normalement, quand des autorités ou des fonctionnaires sont impliqués, il faudrait les considérer comme des exécutions extrajudiciaires.
    Voilà pourquoi nous déplorons le fait qu'aujourd'hui, plus de sept mois après les faits, l'État mexicain n'a pas déployé tous les efforts nécessaires pour punir les responsables, pour nous permettre de retrouver les 43 étudiants de l'école normale et pour porter une attention adéquate aux étudiants blessés. Après plus de sept mois, un étudiant est dans un état grave, car il se trouve dans le coma après que la police municipale l'a blessé avec une arme à feu.
(1325)
    Monsieur Marston, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Vargas, je veux vous offrir mes sincères sympathies pour la situation dans laquelle vous vous trouvez au sujet de votre fils. Pour avoir parlé avec des membres de votre délégation avant la séance du comité, je sais à quel point il importe que les députés voient la photo de votre fils. Avec votre permission, quelqu'un fera passer cette photo pour que les députés la voient directement.
    N'entendez-vous pas l'interprétation? Nous allons essayer de nouveau.
    J'ignore si vous m'entendiez avant, mais je veux vous offrir mes sincères sympathies pour la situation dans laquelle vous vous trouvez au sujet de votre fils.
    Madame Vargas, il est clair, dans votre témoignage, que vous ne croyez pas la version du gouvernement du Mexique. Mais pourquoi?
Mme Hilda Legideno Vargas (Traduction de l'interprétation):
    C'est parce que, comme je l'ai indiqué au début, après les événements survenus le 26 septembre, le gouvernement du Mexique a diffusé un communiqué indiquant que les étudiants étaient dans des tombes. Il en a ensuite publié un autre où il affirmait qu'ils avaient été jetés dans la rivière San Juan. Et il s'avère maintenant qu'ils auraient été brûlés. Le gouvernement a menti encore et encore; comment pourrions-nous le croire?
    Malheureusement, le gouvernement du Mexique a utilisé la police. Bien des gens ont disparu ou sont morts. Nous voyons dans la presse le nombre de personnes qui sont mortes dans l'État du Guerrero, et c'est pourquoi nous ne croyons pas le gouvernement du Mexique. Nous ne croyons pas sa version et nous cherchons nos enfants vivants.
    Bien entendu.
    Je m'adresserai maintenant à M. Vicario Aguilar. J'espère que j'ai relativement bien prononcé votre nom.
    Nous avons écouté votre témoignage, au cours duquel vous avez indiqué que 26 000 Mexicains ont disparu du Mexique depuis 2007. À titre d'avocat, considérez-vous que l'affaire d'Ayotzinapa est unique ou qu'elle montre que le pays est en proie, au chapitre des droits de la personne, à une crise plus importante que l'on ne pourrait le croire actuellement?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Nous considérons, bien entendu, que l'affaire d'Ayotzinapa n'est pas un cas isolé ou unique. Ce qui s'est passé à Ayotzinapa montre qu'au Mexique, nous ne pouvons découvrir la vérité en cas de disparition forcée, car les autorités ne travaillent pas efficacement.
    L'affaire d'Ayotzinapa n'est qu'un exemple. C'est pourquoi nous avons dit que 26 000 personnes ont disparu selon les chiffres officiels. Avant les événements du 26 septembre, nous n'avons malheureusement pas pu aller hors des frontières du pays. Mais grâce à la bravoure des parents des enfants, qui exigent maintenant la réapparition de leurs enfants vivants, on a pu démontrer qu'une grave crise en matière de droits de la personne sévit en fait au Mexique. Dans les États du Guerrero, d'Oaxaca et du Chiapas, où la population est principalement composée d'Autochtones, la situation est la même. Malheureusement, les membres de la famille des victimes directes n'ont pas pu faire la lumière sur les événements de cette nature.
    En disant que quelque chose de mal se passe au Mexique et en ayant le courage de se plaindre auprès des autorités mexicaines du Guerrero, on risque d'être la prochaine victime. Un autre membre de la famille pourrait ainsi disparaître.
    Voilà pourquoi la situation est complexe. Pour porter plainte, il faut élever sa voix dans l'État du Guerrero, où s'est passé l'événement. C'est pourquoi nous avons indiqué que l'affaire d'Ayotzinapa constitue un exemple. C'est un exemple de bravoure, qui a aussi incité les autres familles, qui doivent aujourd'hui composer avec la douleur qu'éprouvent les parents, à se faire entendre.
(1330)
    Mes collègues du Parlement ici présents aujourd'hui reconnaissent la bravoure dont votre groupe a fait preuve en comparaissant ici et en se faisant entendre partout dans le monde.
    Ce qui me frappe au sujet des 43 étudiants disparus, c'est qu'il semble s'agir d'une attaque ciblée.
    Avez-vous une idée de la raison pour laquelle ils auraient pu être pris pour cibles? Savez-vous si d'autres collèges d'enseignement, étudiants ou professeurs ont été ainsi ciblés? Existe-t-il des preuves pouvant expliquer la raison de cette attaque?
    Nous sommes des étudiants, pas des terroristes ou des criminels. Nous ne portons pas d'arme à feu, et nous nous sommes demandés à maintes reprises: pourquoi nous? Pourquoi des étudiants, particulièrement des étudiants qui se destinent à l'enseignement et à l'éducation?
    Nous voulons comprendre ce qui s'est passé. Avons-nous été ciblés ou avons-nous été choisis par hasard? Je l'ignore, mais quel mal avons-nous fait pour mériter une telle boucherie et pour qu'un étudiant soit défiguré?
    À ce jour, nous ne comprenons toujours pas pourquoi le gouvernement du Mexique... Quarante-trois personnes ont disparu et 16 ont été assassinées lors de ces événements. À notre défense, il faut dire que nous sommes tous des étudiants avec très peu de ressources. Nous vivons donc dans la région et le gouvernement du Mexique ne nous a offert aucune réponse jusqu'à maintenant.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Sweet.
    À l'instar de mon collègue, je vous offrirais mes plus sincères sympathies pour ce que vous avez vécu. Nous ne pouvons comprendre toute la profondeur de votre douleur. Nous vous exprimons nos plus sincères condoléances pour la perte que vous avez subie et nous espérons sincèrement qu'en dépit du peu d'espoir que vous avez, l'enquête portera fruit.
    Nous avons reçu une lettre de l'ambassadeur, et je voudrais vous poser des questions directes à ce propos. J'aimerais avoir votre réponse. Dans sa lettre, il indique que « Jusqu'à présent les autorités fédérales ont procédé à l'arrestation de plus de 100 personnes, y compris le maire d'lguala et son épouse, les cerveaux des crimes, de même que des membres de la police locale et d'autres personnes qui ont avoué des crimes tels que des homicides et des enlèvements. » Cette déclaration est-elle exacte?
(1335)
M. Isidoro Vicario Aguilar(Traduction de l'interprétation):
    Ce que nous disons, c'est que nous regrettons les efforts que cet État du Mexique a déployés pour appliquer la justice. Il existe un lien avec les personnes arrêtées et détenues, mais nous regrettons qu'en dépit de toutes les arrestations alléguées au sein du crime organisé, cela n'aide en rien à savoir où se trouvent les étudiants. Voilà pourquoi nous regrettons que les autorités mexicaines n'aient pas le civisme de faire les choses correctement.
    Voici pourquoi je dis cela. Le maire d'Iguala, qui est l'autorité locale, est traduit devant les tribunaux non pas pour l'affaire d'Ayotzinapa, mais pour l'homicide, il y a quelques années, d'un travailleur social du nom d'Arturo Cardona, qui était fonctionnaire à Iguala. José Luis Abarca est aussi accusé de blanchiment d'argent, mais pas de la mort des étudiants les 26 et 27 septembre derniers. Il ne fait l'objet d'aucune accusation au sujet de l'élimination forcée des 43 étudiants. C'est pourquoi nous regrettons qu'on cache ce type d'information au Mexique.
    Nous demandons à votre honorable Parlement d'inciter, dans la mesure du possible, les autorités mexicaines à faire preuve de transparence dans l'affaire d'Ayotzinapa. C'est une affaire exemplaire qui est de la plus haute importance dans l'État du Guerrero. C'est une affaire véritablement douloureuse pour les parents, les mères et les pères de ces étudiants, non seulement ceux qui ont été exécutés par des fonctionnaires, mais aussi ceux qui ont disparu.
    Merci.
    Pour que tout soit clair, le maire et son épouse ont jusqu'à présent été incarcérés, mais n'ont pas été accusés dans cette affaire?
M. Isidoro Vicario Aguilar(Traduction de l'interprétation):
    Précisément.
    La lettre se poursuit comme suit: « Les avocats des familles des victimes ont eu un accès direct aux 85 volumes et aux 13 annexes du dossier d'enquête. » Est-ce le cas?
M. Isidoro Vicario Aguilar(Traduction de l'interprétation):
    Malheureusement, il nous a été très difficile, à titre de représentants des pères et des mères, d'avoir accès à ces documents ou même de demander une rencontre officielle avec le président du Mexique pour y avoir accès.
    Grâce à la supposée bonne volonté du président du Mexique, une entente a été signée pour que les représentants puissent avoir accès à l'information afin de faciliter la collecte de renseignements supplémentaires sur l'endroit où pourraient se trouver les étudiants, mais malheureusement, en réalité, cela s'est avéré extrêmement difficile. Une bonne partie de l'information détenue par le procureur général n'a pu être consultée par d'autres personnes. En outre, les experts indépendants interdisciplinaires de la Commission interaméricaine des droits de l'homme de l'Organisation des États américains ont éprouvé beaucoup de difficultés à accéder à toute l'information sur l'enquête.
(1340)
    Êtes-vous un tant soit peu encouragés par l'intervention de la Commission interaméricaine des droits de l'homme?
M. Isidoro Vicario Aguilar(Traduction de l'interprétation):
    Ce groupe d'experts a conclu une entente avec le Mexique et les parents de toutes les familles. Il a été très difficile pour les autorités mexicaines d'accepter l'intervention de ces experts indépendants. Dernièrement, ils ont publié un deuxième rapport d'experts, et nous, les pères et les mères, sommes tout à fait convaincus que nous pouvons aider l'enquête dans cette affaire.
    Le groupe d'experts doit obtenir des détails sur les démarches entreprises par les autorités mexicaines pour avoir une idée de l'endroit où pourraient se trouver les 43 étudiants. C'est pourquoi les parents des familles touchées ont indiqué publiquement qu'elles respectent ces experts et demandent à ce qu'ils reçoivent des garanties dans le cadre de l'enquête entreprise dans l'affaire d'Ayotzinapa.
    Nous demandons aussi au gouvernement du Mexique d'accepter toutes les recommandations formulées par ces experts indépendants.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Cotler, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je joins ma voix à celles de mes collègues pour vous présenter nos condoléances et vous dire que nous comprenons votre peine et votre douleur.
    Lors de votre témoignage devant nous aujourd'hui, vous avez formulé un certain nombre de recommandations, proposant notamment que nous retirions le Mexique de la liste des pays désignés, encouragions la transparence dans le cadre des enquêtes, garantissions le travail des experts et assurions la sécurité des parents des 43 enfants.
    Dans la lettre à laquelle mon collègue, M. Sweet, a fait référence, l'ambassadeur indique que le gouvernement du Mexique condamne les crimes atroces qui ont été perpétrés, réitère son engagement à traduire les responsables en justice, puis fait une affirmation à laquelle je voudrais que vous répondiez. Il affirme ce qui suit: « Le gouvernement du Mexique a mené une enquête d'une portée et d'une transparence sans précédent. »
    Que répondriez-vous à cette affirmation que l'ambassadeur a faite dans la lettre qu'il nous a adressée?
M. Isidoro Vicario Aguilar(Traduction de l'interprétation):
     Nous constatons que les autorités mexicaines ont l'intention de minimiser ce qui s'est passé à Ayotzinapa et dans l'État du Guerrero, et d'indiquer à l'étranger que cette affaire est un cas isolé. C'est ce que nous regrettons. Dans l'État du Guerrero, au Mexique, la réalité est tout autre. Voilà pourquoi nous soulignons ces points concrets pour dire que nous sommes témoins du fait que ces garanties n'existent pas. Nous avons entendu directement de la bouche d'Hilda, la mère d'un des étudiants, que les autorités mexicaines ont trompé les parents à un certain nombre d'occasions. Environ sept jours après les faits, elles les ont informés que leurs enfants avaient été assassinés. Vingt-huit corps avaient été trouvés dans une fosse commune dans l'État du Guerrero. Mais l'expertise médicolégale de l'Argentine a permis de prouver scientifiquement que ces 28 corps n'appartiennent pas à nos étudiants.
    Hilda a aussi fait savoir que les autorités fédérales ont affirmé, dans leurs déclarations sur les personnes arrêtées et détenues, que ces dernières avaient adhéré à un pacte et avaient été jetées dans une rivière près de la ville d'Iguala. Les autorités ont ensuite changé leur version et affirmé que ce n'est pas ce qui s'était produit et que les corps trouvés dans la fosse commune étaient ceux des étudiants. Mais les étudiants ont été pendus, traînés et démembrés avant d'être jetés dans la rivière. Les autorités mexicaines ont déclaré qu'ils avaient été tués et brûlés dans une décharge près de la ville d'Iguala.
    Nous ne pouvons accorder la moindre crédibilité aux propos des autorités mexicaines. Des groupes indépendants nous ont informés que rien ne montre que c'est ce qui s'est produit dans la décharge de Cocula, comme les autorités mexicaines l'affirment et le maintiennent. Autrement dit, l'enquête des autorités mexicaines dans l'affaire d'Ayotzinapa comporte des lacunes substantielles.
(1345)
    Je ferai référence à votre témoignage et à la lettre de l'ambassadeur. Vous parliez d'Iguala. Voici ce que l'ambassadeur a déclaré dans sa lettre:
À l'instar du Canada, le Mexique est régi par un système fédéral comptant trois ordres de gouvernement, soit un gouvernement fédéral, des gouvernements d'État et des gouvernements locaux. Les crimes d'lguala ont été perpétrés par la police locale avec la complicité de membres du crime organisé. Il faut préciser que c'est un gang criminalisé, et non pas le gouvernement fédéral, l'armée ou la police fédérale, qui a commis les violations des droits de la personne, de connivence avec le maire de l'endroit, lequel est membre d'un autre parti que celui du président.
    L'ambassadeur tente de dire que les autorités fédérales n'ont aucune responsabilité ou ne sont pas intervenues dans cette affaire. Tout s'est passé à l'échelle locale, la police locale étant de mèche avec des membres du crime organisé. Que répondriez-vous à ces propos?
M. Jorge Luis Balbuena(Traduction de l'interprétation):
    Nous voudrions indiquer clairement, monsieur le président, que le respect n'a jamais existé. Le gouvernement fédéral, les gouvernements d'État et les gouvernements locaux du Mexique n'en ont pas et n'en auront jamais à l'égard du citoyen moyen. C'est mon premier point. Il n'y a aucun respect, aucune transparence. Les violations des droits de la personne persistent et la violence dont nous faisons l'objet s'accroît quotidiennement.
    J'ai survécu cette nuit-là. Je peux vous dire que la police municipale a participé aux événements. La lettre ne précise pas que nous avons été pourchassés par l'armée mexicaine et qu'après la fusillade, elle nous a sortis de l'hôpital où nous nous trouvions, y compris la personne dont la bouche avait été réduite en bouillie par une balle. Les militaires nous ont sortis, nous ont battus et ont menacé de nous faire disparaître.
    Il existe une collusion entre tous les ordres de gouvernement, de l'échelle municipale à l'échelle fédérale, car l'un ne peut exister sans l'autre. C'est évident, et nous le savons depuis un bon bout de temps. Il existera toujours de la collusion entre eux. Le gouvernement fédéral a donc participé directement à la disparition de mes 43 confrères étudiants.
(1350)
    Votre temps est écoulé, monsieur Cotler.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Hillyer.
    Je vous remercie de témoigner aujourd'hui.
    Dans votre dernière réponse, Jorge, vous avez indiqué que certains d'entre vous avaient été sortis de l'hôpital. Ainsi, après l'attaque initiale, certains étudiants qui se trouvaient à l'hôpital s'en sont fait sortir et ont été battus et menacés. Avez-vous affirmé que ce sont des membres de l'armée qui ont agi ainsi? Est-ce exact?
M. Jorge Luis Balbuena(Traduction de l'interprétation):
    Ils ont sorti mon ami qui avait reçu une balle dans la bouche. Cela a été la réaction initiale. À l'hôpital, quelqu'un se disait major, ainsi qu'un certain nombre de militaires qui nous avaient suivis là-bas, nous ont menacés. Je suis extrêmement chanceux qu'ils ne nous aient pas sortis de la salle d'attente de l'hôpital, car qui sait ce qu'il serait advenu de nous. S'ils nous avaient amenés ailleurs, je ne serais pas ici. Mais je peux vous dire que des patrouilles de l'armée sillonnaient les rues pour trouver mes confrères qui avaient pris la fuite pour sauver leur peau.
    Merci.
    Vous étiez présent lors de l'attaque initiale, ainsi qu'à l'hôpital. Il y a 43 personnes qui manquent encore à l'appel. Comme il y avait 100 personnes au début de cette affaire, une cinquantaine ont survécu à l'attaque. Est-ce exact?
M. Jorge Luis Balbuena(Traduction de l'interprétation):
    Un peu moins de 50 personnes ont survécu, car nous étions une centaine d'étudiants. Les survivants ont pu fuir, alors que ceux qui étaient restés derrière ont été regroupés et amenés par la police. Certains de ceux qui se sont rendus à l'hôpital sont restés là avec nous, alors que les autres ont fui dans toutes les directions.
    Avez-vous une idée de la raison pour laquelle la police en a laissé partir certains, mais pas d'autres, ou de ce qui a fait que certains ont été amenés et d'autres pas?
(1355)
M. Jorge Luis Balbuena(Traduction de l'interprétation):
    Comme je l'ai indiqué il y a quelques instants, ils ont amené ceux qu'ils avaient attrapés et qui avaient été blessés par balle. Au cours de la fusillade, ils ont fait feu en direction des autobus scolaires où nous nous trouvions. Ce sont ceux qu'ils ont pu arrêter ou attraper qu'ils ont arrêtés.
    Après la fusillade initiale, la plupart des étudiants ont pris leurs jambes à leur cou, mais ils les ont regroupés et leur ont de nouveau tiré dessus, et ils ont ainsi pu en attraper d'autres. J'ai moi aussi pris la fuite. Ceux qui ont pu fuir ont pu s'en sortir, mais les autres n'ont pas eu cette chance.
    Je pose ces questions seulement parce que c'est une grave accusation que de laisser entendre que le gouvernement fédéral était impliqué, sinon dans l'attaque comme telle, au moins dans les efforts déployés depuis pour camoufler l'affaire.
    Pour que nous puissions accepter cette accusation, je suppose qu'il faudrait poser la question suivante. Avez-vous une idée de la motivation du gouvernement fédéral? Pourquoi voudrait-il agir ainsi? A-t-il pris part à l'attaque initiale ou a-t-il simplement tenté de protéger ses amis? Pourquoi s'en prendrait-il à un autobus plein d'étudiants? Qu'y gagnerait-il?
M. Jorge Luis Balbuena(Traduction de l'interprétation):
    Au Mexique, nous savons que l'armée est une institution de haut niveau des plus respectée, que personne n'a osé accuser. À l'évidence, le gouvernement fédéral n'acceptera jamais que l'armée ait participé aux événements des 26 et 27 septembre, car toutes les institutions responsables de notre sécurité ne seraient plus dignes de respect.
    La police locale a agi à un moment donné, puis l'armée est intervenue. Nous ignorons qui a donné les ordres, pourquoi on nous a attaqués ou si c'était parce que nous étions des étudiants d'Ayotzipana qu'ils ont agi de la sorte. Le gouvernement fédéral n'acceptera évidemment jamais cela, car cela équivaudrait à signer son propre arrêt de mort.
    L'autre question qui me préoccupe vraiment, c'est le fait qu'on ait découvert une fosse commune où reposent les restes de 23 ou 28 personnes qui n'étaient pas vos confrères étudiants morts au cours de cette attaque. Cela signifie qu'au moins 28 personnes ont été tuées récemment à proximité de là.
    Avez-vous eu vent de la disparition d'un groupe important de personnes qui auraient disparu dans la même région? Avez-vous une idée de l'identité de ces gens?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    En fait, ce que nous disons, c'est que l'affaire d'Ayotzinapa est extrêmement importante. On s'y attaque avec tout le sérieux possible, en raison de la souffrance des parents, des mères. En fait, ce n'est pas un jeu; après sept mois, les gens souffrent toujours.
    Or, ce que nous disons également, c'est qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé. Des milliers d'événements semblables se sont produits. Malheureusement, un très grand nombre de familles n'ont pas pu rendre l'information publique parce que les mesures de sécurité sont inexistantes, en ce sens qu'elles ne peuvent pas s'adresser aux autorités pour dire qu'un membre de leur famille a été enlevé, que des fonctionnaires l'ont exécuté.
    Au Guerrero, la situation est extrêmement complexe. Au départ, à Iguala, 28 corps ont été trouvés dans une seule tombe clandestine. En raison de cela, nous avons trouvé plus de 57 corps dans des tombes clandestines près de l'endroit où les événements ont eu lieu. Jusqu'à maintenant, seulement une partie des membres des familles ont eu le courage de dénoncer ces faits. Nous pouvons comprendre parfaitement bien qu'aucune mesure ne permet aux gens de dénoncer ce type d'événement. C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Nous demandons au Parlement de tenir compte de ces demandes, c'est-à-dire qu'il raye le Mexique de la liste des pays sécuritaires.
    Tout récemment, au cours des deux dernières semaines, durant la saison des vacances à Acapulco, dans le Guerrero, plus de 47 personnes ont été exécutées. Ces données proviennent de rapports officiels. Dans cet État, la situation est grave: les droits de la personne sont violés. Chaque jour, des gens sont exécutés, kidnappés. Par conséquent, la demande présentée à l'honorable Parlement aujourd'hui est faite avec tout le sérieux que cette affaire mérite, car nous voulons indiquer également qu'en raison de cela, les parents, les représentants et les étudiants de l'école ont entrepris la tâche de signaler cette situation grave à l'extérieur du Mexique. La situation actuelle est très inquiétante, non seulement dans le Guerrero, mais dans plusieurs autres États également. Autrement dit, le gouvernement mexicain est confronté à une grave situation des droits de la personne.
    Au Mexique, les autorités commettent des violations. Des autorités des États et de la fédération sont de mèche avec des membres du crime organisé.
    Merci.
(1400)
    Monsieur Benskin, comme c'est habituellement le cas, vous allez clore la séance.
    Je vous souhaite à tous les trois la bienvenue. Je vous offre, moi aussi, mes sympathies. Mes prières accompagnent ces étudiants toujours actifs qui font ce qu'ils croient le mieux pour le pays, ainsi que leurs parents et leurs familles.
    Je vous remercie de votre indulgence envers le comité. Nous essayons d'examiner tous les éléments et de mieux comprendre la situation.
    À un moment donné, vous avez dit qu'entre 2007 et 2014, environ 26 000 personnes ont disparu ou ont été assassinées. J'aimerais mieux comprendre. Pour quelle raison? S'agit-il d'actes commis pour des motifs politiques? Sont-ils complètement liés aux cartels? Qu'est-ce qui explique principalement la disparition ou le meurtre de ces étudiants et des 26 000 personnes?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Le nombre alarmant, 26 000 personnes, provient de données officielles. Elles ne proviennent pas d'un organisme précis du Guerrero. Ce sont les données officielles du gouvernement mexicain, et c'est pourquoi nous déplorons le fait que les autorités n'agissent pas de façon efficace, car nous ne pouvons pas expliquer pourquoi ce nombre est aussi élevé et alarmant.
    Nous voulons que vous compreniez qu'en fait, les autorités ne font pas leur travail. Elles ne mènent pas d'enquêtes. On n'obtient pas justice. Il n'y a pas de bonne administration. Nous croyons que pour cette raison, de tels actes continuent d'être commis en toute impunité. C'est pourquoi nous déplorons le fait de cette affaire malheureuse d'Ayotzinapa, qui a été rendue publique concernant les crimes qui ont été commis au Mexique.
    En ce qui concerne les 26 000 personnes disparues, il s'agit de disparitions forcées, et ce n'est pas à cause d'organisations sociales et civiles qui luttent pour les droits de la personne. Des familles vivent ce problème. En fait, il s'agit d'une situation très grave qui implique le crime organisé à l'échelle locale, étatique et fédérale.
    Tous ces problèmes auxquels est confronté le gouvernement mexicain débouchent sur ces chiffres, mais au-delà de dire qui commet ces actes, pour les nombreuses familles qui font face à ce problème, c'est une situation très grave au Mexique. Au cours des deux dernières années, dans l'État du Guerrero seulement, il y a eu 12 cas d'exécutions extrajudiciaires de combattants sociaux. La plupart étaient membres de collectivités autochtones. Il s'agit des deux dernières années seulement.
    Merci.
(1405)
    Je veux m'assurer de bien comprendre. Ces événements sont liés à la fois à des activités criminelles et à des activités politiques?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Nous ne jugeons pas important de faire cette distinction. Il y a un grave problème, à savoir que les chiffres sont très élevés au Mexique. On peut le comprendre de cette façon, mais en fait, ce qui nous préoccupe, c'est que dans l'affaire d'Ayotzinapa, un plus grand nombre de cas restent impunis.
    Toutefois, dire cela à partir de la disparition de plus de 26 000 Mexicains... C'est un nombre vraiment alarmant, et c'est pourquoi nous ne pouvons pas vraiment expliquer quel travail d'enquête est effectué par les autorités. Nous croyons comprendre que les autorités mexicaines ne veulent pas le faire pour régler la situation. Au fil des jours, le nombre augmente.
    De plus, ce que nous disions, c'est que ces données sont les données officielles, mais n'oublions pas qu'il y a beaucoup de cas similaires où les gens décident de ne pas dénoncer la situation en raison des risques et de la répression menée tant par le crime organisé que par les autorités.
    Nous ne pouvons pas établir une différence lorsqu'il s'agit d'un acte commis par le crime organisé, car ce que nous disions, c'est que l'affaire d'Ayotzinapa ressemble à bon nombre d'affaires similaires. Des fonctionnaires et des membres du crime organisé participent directement. C'est à l'échelle locale. Le même scénario se répète à l'échelle gouvernementale. À l'échelle fédérale, il se produit la même chose. C'est pourquoi nous n'avons pas de réponse quant aux données alarmantes provenant du gouvernement mexicain.
    Merci.
    Je comprends ce que vous dites. Si j'ai posé la question, c'est que je veux mieux comprendre la situation. Vous avez parlé de collusion. J'essaie de comprendre si ce que vous dites, c'est qu'il s'agit de collusion entre les différents ordres de gouvernement ou bien entre les fonctionnaires — municipaux, fédéraux — et le crime organisé. S'agit-il d'actes d'intimidation commis par le crime organisé, ou d'actes pour réprimer la dissension à l'égard d'activités gouvernementales? Si je pose la question, c'est pour essayer de comprendre la différence.
    Je comprends que la mort de vos enfants reste la mort de vos enfants. Ce que je veux dire — si vous voulez intervenir —, c'est que vous voulez obtenir des réponses. Vous voulez qu'une enquête soit menée et qu'elle révèle clairement ce qui est arrivé à vos enfants et, avec un peu de chance, les raisons pour lesquelles c'est arrivé. Est-ce exact?
(1410)
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Nous disions que de l'information provient du groupe d'experts, tout d'abord, qui ne répète pas l'information fournie par le gouvernement mexicain. Autrement dit, nous ne pouvons pas clore l'enquête. Dans son premier rapport, le groupe d'experts a recommandé entre autres que les autorités mexicaines effectuent des recherches immédiatement pour trouver les étudiants vivants.
    Il y a de la collusion à tous les points de vue. Comme le disait le parlementaire, il y a de la collusion au sein du crime organisé avec le gouvernement, le gouvernement local, mais ce scénario se répète. Tout comme la collusion existe à l'échelle locale, étatique et fédérale, elle existe dans la fonction publique avec des autorités locales, étatiques et fédérales.
    Voilà pourquoi nous disions que jusqu'à maintenant, aucun fonctionnaire de l'État ne s'occupe d'un processus ou d'une cause devant la justice pour l'affaire d'Ayotzinapa, car le gouvernement ne veut pas lancer ces enquêtes. Les étudiants, les survivants des événements des 26 et 27 septembre, ont témoigné durant les enquêtes dans un cadre officiel, de sorte qu'il est possible qu'on ouvre un nouveau dossier d'enquête axé sur les fonctionnaires principalement aux niveaux intermédiaire et élevé.
    De plus, nous avons demandé qu'un autre dossier d'enquête soit ouvert concernant l'armée mexicaine, car il y a de vrais aspects liés aux enquêtes, aux déclarations dans le dossier, de sorte que ces nouvelles avenues d'enquête puissent être ouvertes. Malheureusement, pour des raisons que nous ne pouvons pas comprendre, la fédération ne veut pas ouvrir ces nouveaux dossiers d'enquête. C'est pourquoi nous soutenons que la collusion existe des deux côtés: autorités ou fonctionnaires et crime organisé.
    Malheureusement, c'est ici que nous devons nous arrêter. Nous avons dépassé d'environ 15 minutes le temps qui nous était alloué afin de continuer d'entendre — je crois que nous en convenons tous — des témoignages très utiles et informatifs.
    Je veux remercier tous les témoins de leur présence. Vous faites preuve d'un grand courage. Les éléments que vous avez portés à notre attention sont à la fois tragiques et importants. Nous vous remercions beaucoup d'avoir comparu devant nous aujourd'hui. Merci énormément.
    Je crois que M. Balbuena veut dire quelque chose.
M. Jorge Luis Balbuena (Traduction de l'interprétation):
    Avant de retourner au Mexique, j'aimerais dire qu'à ce moment-ci, nous craignons beaucoup pour notre propre sécurité, pour la sécurité de nos parents, des membres de notre famille, de nos étudiants, des organisations sociales et des enseignants, mais principalement des parents et des familles qui sont demeurés au Mexique. Je voulais seulement ajouter cette information, car le gouvernement mexicain n'a jamais garanti la sécurité de qui que ce soit. C'est un régime très répressif.
    Nous craignons de plus grandes répercussions. Nous voulons que vous le gardiez à l'esprit, car les grandes organisations responsables des droits de la personne ont fait des recommandations, que le gouvernement mexicain ne respecte pas.
(1415)
    Merci beaucoup.
    Avant de lever la séance, est-ce que nos deux autres intervenants veulent dire quelque chose? Est-ce que les témoins veulent dire quelque chose?
M. Isidoro Vicario Aguilar (Traduction de l'interprétation):
    Nous voulons tout simplement vous remercier de nous avoir accueillis, et nous espérons que vous tiendrez compte de la demande de notre commission.
    Merci.
    Je vous remercie tous les trois.
    La séance est levée.
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