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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 057 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 24 février 2015

[Enregistrement électronique]

(1305)

[Français]

    En ce 24 février 2015, je vous souhaite la bienvenue à la 57e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

     Mesdames et messieurs, la séance d'aujourd'hui est télédiffusée. Nous allons parler de l'évolution de la situation des minorités religieuses au Bangladesh.
    Nous n'avons qu'un témoin avec nous pour l'instant. Nous en attendons un deuxième, mais des problèmes de transport liés au train de Via Rail en provenance de Montréal l'ont retardé. Je me fie à mon collègue, M. Benskin, qui semble bien au fait de la situation. Nous espérons que notre témoin sera là avant la fin de la séance.
    Les choses ne se dérouleront peut-être pas comme d'habitude. En temps normal, nous aurions entendu nos deux témoins, puis nous serions passés aux questions. Il se peut bien que nous n'entendions qu'un témoin avant de passer aux questions, et que nous ayons à nous adapter pour la suite des choses. Selon ce qui arrivera, il nous faudra probablement improviser.
    Aujourd'hui, nous accueillons M. Roy, qui est président du Bangladesh Hindu Buddhist Christian Unity Council. M. Roy va commencer, puis, dépendant de l'arrivée ou non de notre autre témoin, nous passerons au deuxième témoignage ou à une période de questions.
    Monsieur Roy, nous vous écoutons.
     Je m'appelle Kirit Sinha Roy et je suis le directeur exécutif de la division ontarienne du Bangladesh Hindu Buddhist Christian Unity Council, ou BHBCUC. Je travaillais comme journaliste de la presse écrite avant de venir au Canada, en 1992, en tant que réfugié.
    Le conseil est un organisme laïc et non partisan qui a été fondé au Bangladesh, en 1988, par le major-général C. R. Dutta, un officier qui déserta l'armée pakistanaise pour se joindre aux forces de libération Mukti Bahini. Il est considéré comme l'un des héros de la lutte de libération du Bangladesh de 1971. Les deux coprésidents étaient Bodhipal Mohathero et M. T. D. Rosario. La division ontarienne de l'organisme est relativement jeune.
    Nous sommes reconnaissants envers le président du sous-comité des droits internationaux de la personne, M. Scott Reid, député du Parti conservateur, de nous avoir invités à faire cette présentation. Nous remercions de même le vice-président du comité, M. Wayne Marston, député et membre de l'opposition officielle, et son conseiller politique, M. Thomas Allen, de leur soutien actif et de leurs encouragements à notre égard.
    Ce n'est pas la première fois que nous venons faire une présentation devant un comité de la Chambre. En 2004, le député parfois libéral David Kilgour nous avait invités à comparaître devant ce comité. Or, j'ai le regret de dire que notre message d'aujourd'hui n'a pas beaucoup changé. En fait, les minorités ethniques et religieuses sont encore plus menacées maintenant qu'il y a une décennie.
     Le parti islamiste Jamaat-e-Islami qui siège au parlement existait déjà à ce moment-là, mais son emprise a été renforcée par la montée fulgurante de forces extraparlementaires obscures comme Hefajat-e-Islam, qui s'étend par le biais d'un énorme réseau de médersas non réglementées couvrant l'ensemble du pays, ces écoles dont les élèves et les anciens élèves peuvent être mobilisés grâce à une utilisation ingénieuse des médias sociaux et du réseau proprement dit.
    Nous avons préparé une présentation écrite et nous allons aussi faire une présentation confidentielle. Mais il y a certains éléments que nous souhaitons souligner. Premièrement, les droits des minorités et la constitution; deuxièmement, le déclin de la population de la minorité hindoue; troisièmement, les minorités comme citoyens de deuxième classe; et quatrièmement, la violence à l'endroit des minorités, comme l'accaparement des terres, les attaques sur les personnes et les propriétés et, ce qui est le plus préoccupant, l'enlèvement des filles et des femmes, les viols, les conversions et les mariages forcés.
    Tout d'abord, les droits des minorités sont un principe qui est contesté depuis la fondation du Bangladesh. L'article 41 de la constitution adoptée le 4 novembre 1972 enchâssait le principe du pluralisme religieux et de la liberté de religion. Cependant, en 1977, le dictateur militaire Ziaur Rahman a supprimé ce principe laïc de la constitution; ce que l'on a appelé le cinquième amendement. En 1988, un autre dictateur militaire, Hossain Mohammad Ershad, a déclaré que l'Islam était la religion d'État. Le nom officiel du pays reste néanmoins la République populaire du Bangladesh.
    Deuxièmement, les hindous sont maintenant une espèce en péril au Bangladesh, cette nation qui, même lorsqu'elle était le Pakistan oriental, comptait une majorité de musulmans. La population hindoue a commencé à diminuer sérieusement après la partition de 1947, puis encore davantage après la guerre d'indépendance de 1971. En 1975, les hindous représentaient 15,6 % de la population, mais seulement 9,5 % en 2010. Certains affirment qu'ils ne sont plus maintenant qu'un maigre 8 %. Selon le dernier recensement, les bouddhistes sont à 0,7 %, et les chrétiens arrivent au dernier rang, à 0,3 %.
(1310)
     Ce déclin s'explique de deux façons. Tout d'abord, il y a la loi sur les biens ennemis de 1965, rebaptisée ultérieurement Loi sur les biens dévolus. Ensuite, il y a la menace constante de violence que font planer les islamistes à leur endroit, qu'ils soient riches ou pauvres, ainsi qu'à l'endroit de leurs familles, de leurs institutions et de leurs lieux de culte, menace qui devient souvent insoutenable. Ceux qui peuvent se le permettre déménagent en Inde ou à l'étranger. Les autres restent au pays et continuent de vivre dans la peur.
    Troisièmement, les minorités sont, au mieux, des citoyens de deuxième classe. Lorsqu'il s'agit de l'accès à l'éducation supérieure ou de l'embauche dans la fonction publique, les minorités religieuses et ethniques sont désavantagées. Les gouvernements successifs ont refusé de donner des statistiques sur le nombre de fonctionnaires provenant de minorités, mais nous croyons qu'ils sont très peu nombreux. L'armée et les services de sécurité n'accueillent personne des minorités dans leurs rangs. Les seuls débouchés pour les membres éduqués des minorités sont les professions libérales.
    En janvier dernier, M. Surendra Kumar Sinha, un hindou, a été nommé juge en chef, ce qui est un très petit pas — mais tout de même important — dans la bonne direction. Des 350 députés qui siègent actuellement au Parlement du Bangladesh, moins de 20 appartiennent à des minorités ethniques ou religieuses. Et, nous sommes navrés de le dire, les minorités passent inaperçues pour les ONG, celles-là mêmes qui reçoivent le soutien de donateurs et de gouvernements étrangers.
    En dernier lieu, il faut signaler que la violence à l'endroit des minorités est très répandue. Tant les médias anglais que les médias en langue vernaculaire rapportent presque chaque jour au moins un incident violent contre un membre d'un groupe minoritaire. Une ONG bangladaise, le Hotline Human Rights Trust, croit que ces incidents sont souvent sous-représentés dans les médias. La pire forme de violence est le déni de justice.
    Un économiste du nom d'Abul Barkat estime que les hindous ont perdu 220 000 acres de terres et de propriétés entre 2001 et 2006. Les temples ont un effet d'attraction particulier pour la violence collective qu'attisent les islamistes. Les images des temples hindous sont ornées d'or, une matière très recherchée en Asie du Sud. L'art et les objets associés au bouddhisme se vendent aussi à fort prix sur les marchés d'art de monde entier. Les pogroms les plus affreux et les plus destructeurs à l'endroit des hindous et des bouddhistes se sont produits en 2012 et 2013, à Hathazari, près de Chittagong. Selon de nombreux musulmans de l'endroit qui ont assisté à ces émeutes, des membres de Hefajat-e-Islam, le Shibir, et Jamaat-e-Islami ont incité les émeutiers musulmans à attaquer des résidences, des temples et d'autres propriétés appartenant à des hindous et à des bouddhistes. D'anciens temples bouddhistes et hindous ont été pillés et réduits en cendres.
    Je mentionne cet incident parce qu'il a un lien direct avec la montée de Hefajat-e-Islam. Selon le journal bangladais Daily Star, qui en a fait sa une, l'incident d'Hathazari est à l'origine du terrorisme religieux qu'exerce le Jamaat depuis ces dernières années.
(1315)
    L'une des tactiques préférées des islamistes est de faire courir le bruit qu'un hindou aurait insulté le Prophète ou le Coran dans Facebook, ce qui a pour effet de pousser les émeutiers à bloquer des routes et la circulation, et à se lancer dans une orgie pyromane s'accompagnant d'actes de pillage et d'agressions.
    Pour terminer, je veux vous parler du problème très particulier des enlèvements et des viols qui mènent à des conversions et des mariages forcés. Les femmes et les filles des minorités sont les plus vulnérables de toutes parce qu'elles jouissent d'une plus grande liberté de mouvement. Quelle que soit la communauté, les agressions sexuelles et les viols sont encore considérés comme une grande honte en Asie du Sud, et les victimes qui les signalent à la police n'obtiennent pas beaucoup de soutien. Les forces de l'ordre sont corrompues et on ne peut pas leur faire confiance; il se peut très bien qu'elles maltraitent la victime.
    Les enlèvements de femmes ou d'adolescentes mineures se soldent souvent par des conversions et des mariages forcés, et il n'y a pas de loi précise pour interdire ces unions.
    De façon générale, les enlèvements ne sont pas pris au sérieux par la police locale. Les journaux en langue vernaculaire contiennent souvent des avis pour annoncer quelque chose comme « Moi, AB de XY et fille de CD, me suis convertie de l'hindouisme à l'islam. Mon nouveau nom est EF. Je suis maintenant l'épouse de GH. » C'est une indication on ne peut plus claire qu'il y a eu conversion et mariage forcés. Malheureusement, il n'existe aucune statistique à ce sujet.
    Nous sommes heureux d'annoncer que la violence systémique contre les minorités s'est atténuée depuis la fin de la dernière année. Il semble que les minorités des régions des basses terres connaissent un certain répit, mais les Adivasis ou les peuples autochtones continuent à souffrir.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Roy.
    Je vois que notre deuxième témoin, M. Aditya Dewan, est arrivé.
    Soyez le bienvenu.
    Nous venons tout juste d'entendre notre premier témoin. Nous aimerions entendre votre témoignage. Ensuite, nous passerons aux questions des membres du comité. Je vous demanderais toutefois de garder vos commentaires préliminaires aussi courts que possible afin de laisser suffisamment de temps pour la période de questions.
    Merci.
(1320)
    Monsieur le président, messieurs les vice-présidents, distingués membres du sous-comité, mesdames et messieurs, je serai très bref. J'ai déjà soumis ma présentation par écrit il y a trois ou quatre jours, et j'espère que vous en tenez tous une copie.
    Pour commencer, permettez-moi de me présenter rapidement. Je m'appelle Aditya Kumar Dewan. J'enseigne l'anthropologie à l'Université Concordia. J'ai fait mon doctorat à McGill, et M. Cotler ici présent était mon professeur durant cette période. C'est le gouverneur général qui m'a remis mon diplôme lors de la collation des grades de McGill, en 1990. Je m'estime chanceux d'avoir rencontré ces deux éminentes personnalités canadiennes. J'enseigne depuis ce temps à l'Université Concordia.
    Je suis ici avant tout pour Conseil international pour les peuples autochtones des Chittagong Hill Tracts. C'est cet organisme qui représente tous les peuples autochtones d'outre-mer du monde entier: en Australie, en Amérique, ici et ailleurs. J'en suis le président.
     J'ai fondé cet organisme pour mener des campagnes sur les droits de la personne pour les peuples autochtones de la région des monts Chittagong. Depuis la proclamation de l'indépendance du Bangladesh, cette région a été le théâtre d'incessantes violations des droits de la personne. Nous savons que les violations des droits de la personne y sont innombrables. C'est un fait qui est facilement vérifiable auprès d'Amnistie internationale et d'autres organismes des droits de la personne. Ils ont tous des rapports à ce sujet.
     Aujourd'hui, j'ai aussi reçu le rapport du 18 février d'Amnistie internationale. L'organisme y va d'un compte-rendu accablant au sujet de mesures prises pour réduire au silence les peuples autochtones de cette région. Le ministre des Affaires intérieures du Bangladesh a fait circuler une note de service indiquant que les peuples autochtones n'avaient pas le droit de parler aux étrangers, et que l'entrée à la région des monts Chittagong était interdite aux étrangers. L'accès y est aussi interdit aux Bangladais et aux organismes bangladais qui n'en ont pas obtenu la permission de l'armée et des militaires.
    Il existe des preuves bien documentées sur les actes de pillage et les agressions fréquentes à l'endroit des peuples autochtones de cette région. Chaque année, on rapporte deux ou trois attaques perpétrées par l'armée et les colons bengalis. C'est la raison qui nous a incités à organiser une campagne pour demander aux gouvernements étrangers d'intervenir. Comment pouvons-nous empêcher ces violations graves et innombrables des droits de la personne de se produire? Il y en a sur tous les fronts. Je ne vais pas les citer toutes.
    Notre objectif premier est de vous informer de ce qui se passe là-bas. Je me raccrocherai à cette citation qu'a eue Rousseau durant la Révolution française: « L'homme est né libre, et partout il est dans les fers. » Voici à quoi cela peut se comparer: dans la région des monts Chittagong, nous n'avons ni le droit ni la possibilité de circuler librement.
     Il y a deux incidents dont je tiens à vous parler aujourd'hui. L'un d'eux est le massacre de Bhusanchara. Mon village a été complètement envahi et 400 personnes ont été tuées. Les colons bengalis l'occupent toujours. L'autre incident s'est produit en 1980. C'est le massacre de Kaukhali. L'armée avait convoqué une réunion dans un temple, et lorsque tous les gens ont été réunis, les militaires ont fusillé 400 personnes. La famille de ma soeur et d'autres villageois ont été criblés de balles. Une fois la fusillade terminée, les colons ont envahi la ville, ils ont mis le feu un peu partout et se sont livrés à des actes de pillages. Il n'y a rien qu'ils n'ont pas fait. Ce sont deux des incidents graves qui se sont produits. Je ne vais pas pousser plus loin mes allusions à ces incidents.
(1325)
     Je n'ai pas le temps de faire la liste de toutes les violations perpétrées, mais l'une d'elles est le refus de reconnaître l'identité ethnique des peuples autochtones. Le gouvernement du Bangladesh dit qu'il n'y a pas de peuple autochtone dans la région des monts Chittagong. Bien entendu, lorsque nous nous sommes présentés devant l'Instance permanente des Nations unies sur les questions autochtones, les autorités du Bangladesh ont envoyé un représentant pour faire savoir au forum qu'il n'avait aucun droit de dire qu'il y avait des peuples autochtones dans ce pays. Je veux aussi mentionner que lorsque la première ministre Sheikh Hasina est venue s'adresser aux Nations unies, Ban Ki-moon lui a demandé ce qui se passait avec son peuple autochtone. Sa réponse a été: « Non, nous n'avons pas de peuple autochtone: nous sommes le peuple autochtone. » Ce qui a fait rigoler Ban Ki-moon, qui lui a rétorqué, à la blague: « C'est une bien bonne chose que nous ayons des peuples autochtones comme vous aux Nations unies. »
    Ceci est une chose. Depuis, nous essayons de nous faire entendre sur d'autres tribunes.
    De plus, l'armée a mis sur pied de nombreux groupes armés parmi les autochtones. Ils se battent entre eux. L'armée ne les arrête pas et ne les poursuit pas devant les tribunaux. L'armée et les colons jouissent d'une complète impunité pour ce qu'ils font. Une culture d'impunité s'est développée. Ils n'ont aucun compte à rendre à qui que ce soit. La région des monts Chittagong vit une occupation en bonne et due forme, comme n'importe quel endroit qui serait occupé par l'armée.
    Pourquoi en est-il ainsi? Nous sommes en temps de paix. Nous ne faisons rien. Nous ne protestons pas. Il ne se passe rien. Alors pourquoi un tel secret? Cherchent-ils à cacher des crimes en empêchant les étrangers d'écouter? Le risque est sûrement qu'en cas d'acte répréhensible, la nouvelle pourrait se propager, alors que le gouvernement du Bangladesh a très peur de la publicité. Au même moment, ils craignent d'avoir des problèmes avec l'aide étrangère.
    Une autre raison pour un tel secret — au point d'interdire aux gens de l'extérieur d'aller dans cette région — est la possibilité qu'on y entraîne des terroristes islamistes. Chittagong Hill Tracts est l'une des régions montagneuses du pays; on y trouve beaucoup de collines et de montagnes. Je n'ai pas de preuves, mais certaines rumeurs circulent selon lesquelles la région serait un lieu d'entraînement, car elle attire des gens de la Birmanie, du conflit Rohingya et d'autres groupes. L'argent déferle depuis le Moyen-Orient. Un nombre grandissant de madrasas — ces écoles religieuses — y sont établies. Lorsqu'il y a des émeutes ou des incidents, ils embauchent des gens qui ne sont pas de la région et s'en servent comme hommes de main.
    Pour aller à l'essentiel, je devrai intituler de texte « Le génocide à la bangladaise ». Je veux dire par là que ce n'est pas comme ce qui s'est passé au Rwanda ou en Bosnie, ce n'est pas le même type de tuerie. Il s'agit plutôt de la disparition lente des peuples autochtones, de la prise de contrôle progressive de nos terres. On veille en cela à ce que les gens de l'extérieur n'en sachent rien. L'armée use allègrement de ce stratagème pour se protéger. Nous nous sommes rendus au Département des opérations de maintien de la paix des Nations unies. La force de maintien de la paix a engagé 10 000 membres des Forces armées bangladaises. Nous leur avons dit que ces gardiens de la paix bangladais violaient les droits de la personne lorsqu'ils revenaient dans leur pays, dans notre région, qu'ils commettaient des viols, des assassinats et toutes sortes de choses.
    Ce qui m'amène à la question de l'intention. Mesdames et messieurs les députés, vous savez tous que la définition de génocide que les Nations unies donnent à l'article II est d'actes délibérés commis dans l'intention de détruire en tout ou en partie.
(1330)
    C'est exactement ce qu'il se passe. Ils tentent intentionnellement de camoufler toutes ces violations des droits de la personne. Concurremment, un accord de paix a été signé le 2 décembre 1997. Au cours des 17 années qui se sont écoulées depuis, le gouvernement n'a même pas mis en oeuvre la paix convenue avec les insurgés en 1997. Soixante mille personnes réfugiées en Inde ont été rapatriées et n'ont toujours pas récupéré leurs terres occupées par les colons bengalis.
    Je n'ai fort probablement plus de temps. Je répondrai aux questions que vous pourriez avoir. Merci beaucoup. C'est une chance incroyable pour moi que d'avoir pu témoigner ici pour raconter ce qu'il se passe là-bas. J'ai demandé le statut de réfugié au Canada en 1984 et le gouvernement du Canada m'a donné refuge ici. Je n'ai pu retourner là-bas parce que je faisais ma thèse de doctorat à l'Université McGill sur la région des monts de Chittagong.
    Je vous ai déjà fait part de ma conclusion et de ma recommandation. Le gouvernement canadien fournit énormément d'aide étrangère au Bangladesh. Je ne dis pas qu'il faut utiliser ce soutien comme une arme ou une aide liée; mais si vous voulez favoriser les droits de la personne et la démocratie dans un pays en développement comme le Bangladesh, ces démarches doivent aller de pair avec l'intégration et le respect des droits des minorités religieuses, où que ce soit. Le gouvernement canadien peut avoir beaucoup de pouvoir et l'influence sur celui du Bangladesh. C'est un pays souverain et les autorités le feront valoir, mais vous disposez d'une marge de manoeuvre suffisante pour favoriser la démocratie et les droits de la personne dans les régions où vous offrez de l'aide étrangère.
    Essentiellement, je vous remercie tous. Je suis terriblement chanceux d'avoir pu comparaître. Nous sommes peu nombreux et nous ne pouvons joindre les gens et envoyer des nouvelles à l'extérieur. Au Bangladesh, si un traversier chavire ou que quelqu'un se fait mordre par un serpent, cela attire l'attention des grands médias d'information, mais il se passe là-bas quelque chose dont CBC, CTV ou d'autres médias ne parlent jamais. Nous sommes complètement oubliés parce que le gouvernement du Bangladesh dispose de nombreux moyens pour exercer son influence à bien des égards. Mais nous sommes incapables d'en faire autant.
    Je vous remercie une fois de plus. Je terminerai ici mon exposé.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Chers collègues, par le passé, quand nous recevions deux témoins et que j'accordais une période précise pour les questions, la deuxième réponse nous faisait souvent dépasser de beaucoup notre temps. La dernière fois, nous avons terminé environ 20 minutes plus tard que prévu. Pour garder la maîtrise de la situation, je vais demander à chacun de poser une question. Nous verrons alors si nous avons une ou deux réponses à la question.
    Nous commencerons par vous, monsieur Sweet.
    Monsieur Roy et monsieur Dewan, merci beaucoup de témoigner.
    Monsieur Roy, êtes-vous également un réfugié du Bangladesh?
    Oui, j'ai obtenu le statut de réfugié en 1984.
    Oui, je le sais, monsieur Dewan, mais est-ce le cas de M. Roy?
    Oui, je suis arrivé à titre de réfugié en 1992.
    Je vois. Vous êtes tous deux réfugiés. Pouvez-vous tous nous aider à comprendre? Vous parlez des minorités autochtones: les bouddhistes, les chrétiens, les ahmadis...
    Une voix: Les hindous.
    M. David Sweet: Les hindous, mais je pense que les musulmans ahmadis font également partie des minorités religieuses persécutées. Tout cela se produit dans le contexte du grave conflit politique qui fait actuellement rage; il s'agit donc d'une véritable polarisation.
    Je crois comprendre que le gouvernement alterne entre la Ligue Awami et le BNP. Quand ils sont au pouvoir, est-ce que ces deux partis agissent de la même manière à l'égard des peuples autochtones et des minorités chrétiennes, ou est-ce que la situation diffère selon que l'un d'eux est au pouvoir ou non?
(1335)
    Pour autant que je sache, pour les minorités comme les hindous, les bouddhistes et les chrétiens, le BNP et ses alliés — je parle ici de ses alliés islamistes, comme le Jamaat-e-Islami, l'Hefejet-e-Islam et tous ces partis — sont ce qu'il y a de pire. En 2001, environ 200 femmes ont été violées en plein jour pendant le règne du gouvernement du BNP, et ces exactions n'ont pas cessé. Quand un incident se produit, le gouvernement prend maintenant l'initiative d'arrêter les coupables ou d'intervenir, mais seulement après les faits. Il ne protège pas les minorités; ce n'est qu'après qu'un incident est survenu dans un village, une subdivision ou un sous-district que la police intervient pour arrêter deux ou trois personnes. Mais aucun agresseur n'est traduit devant la justice.
    Voilà l'ironie dans le pays qu'est le Bangladesh.
    Puis-je dire quelque chose?
    M. David Sweet: Oui.
    M. Aditya Dewan: En ce qui concerne les peuples autochtones et les minorités religieuses, je pense que les deux partis ont indiqué qu'il n'y avait pas de différence entre eux. J'ai l'impression que dans les faits, le Bangladesh est un État en déroute. J'entends par là que les partis politiques qui se succèdent en sont arrivés à dépendre complètement de l'armée.
    En 2009, quand il y a eu des élections, un gouvernement de transition devait superviser le processus électoral. Le Département des opérations de maintien de la paix des Nations Unies a menacé l'armée de ne pas affecter la force de maintien de la paix si l'armée n'appuyait pas le gouvernement de transition. L'armée a alors obtempéré, les élections ont eu lieu et la première ministre Sheikh Hasina a été portée au pouvoir.
    Je suppose que les partis politiques sont très faibles. Ils dépendent beaucoup de l'armée et des bureaucrates. Ils leur sont essentiellement subordonnés et doivent les écouter. En ce qui concerne la question des peuples autochtones, l'armée a expliqué à Sheikh Hasina qu'avec la Déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies, le fait de qualifier les Autochtones d'Autochtones aurait des répercussions néfastes. Le gouvernement a donc banni l'utilisation du terme « autochtone ». Pourtant, il avait employé ce terme dans de nombreux documents et partout, mais après avoir subi les pressions de l'armée, il en a interdit l'utilisation. Il a effacé le terme « autochtone » de tous ses documents.
    C'est exactement ce qui fait que l'armée est la plus forte à l'intérieur du pays. Je pense qu'elle ne peut pas être contrôlée, car les partis sont toujours assoiffés de pouvoir. À titre d'observateur universitaire, je présume que c'est ce qu'il se passe là-bas.
    Merci.
    Monsieur Marston, vous avez la parole.
    Monsieur le président, avant de poser ma question, je tiens à indiquer aux fins du compte rendu que Matthew Kellway, député de Beaches—East York, et Dan Harris, député de Scarborough—Sud—Ouest, sont ici pour observer le débat. J'ai pensé qu'il serait bien de l'indiquer au compte rendu.
    Messieurs, merci beaucoup de témoigner.
    Monsieur Dewan, chaque fois que des gens sont évincés de leurs terres, avec le genre de meurtres dont les Autochtones sont victimes là-bas, on tente souvent de faire passer ces actes pour de l'activité religieuse, alors qu'en fait, on déplace ces gens pour faire main basse sur la terre ou les minéraux qui s'y trouvent. Est-ce le cas?
    Ce n'est pas exactement pour les minéraux ou d'autres choses; je pense que l'armée a un intérêt collectif. Elle est très active dans la région. J'ai tous les documents et toutes les recherches publiés sur le sujet. Dans la région des monts de Chittagong, il y a 60 personnes par membre de l'armée, alors qu'ailleurs au Bangladesh, il y en a 17 000 par membre de l'armée.
    Mais des projets de développement international sont en cours. Les Australiens ont des projets de construction de route et les Japonais mettent également des projets en oeuvre. Des projets d'aide étrangère de grande envergure sont en cours, le tout sous la supervision de l'armée.
(1340)
    Il semble donc que cela entre, au moins en partie, en ligne de compte.
    Oui, l'armée gère tout.
    Me reste-il encore du temps, monsieur le président?
    Dans les circonstances, oui.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Roy, selon vous, existe-t-il un lien entre le fait que les bouddhistes soient pris pour cible et la situation des Rohingyas en Birmanie?
    D'après ce que je sais, les Rohingyas sont un peu malmenés par l'armée. Le gouvernement du Bangladesh s'est fait menacer par le Japon, qui lui a indiqué que si les bouddhistes étaient attaqués, il aurait de gros problèmes, car le Japon ne l'aiderait pas. Les Rohingyas savent maintenant exactement ce que... L'armée est présente dans la région des monts de Chittagong, et les islamistes règnent dans l'autre partie de la région. Ils y ont non seulement des madrasahs, mais aussi des camps d'entraînement, d'où ils exportent des islamistes dans d'autres régions du Bangladesh.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Grewal.
    Je remercie nos témoins d'avoir pris le temps de témoigner et de faire des exposés.
    Selon le recensement de 2011, la population est constituée à 90 % de musulmans sunnites et à 9,5 % d'hindous. Le reste de la population est composée de chrétiens et de bouddhistes theravâda.
    D'après le Bangladesh Hindu Buddhist Christian Unity Council, un certain nombre d'islamistes participent aux attaques contre les communautés minoritaires, particulièrement les hindous. Depuis le début de 2015, au moins six hindous ont été tués et trois ont été violés. En outre, 7 temples, 54 maisons et 84 idoles hindoues ont été attaqués et vandalisés.
    Qu'est-ce qui motive ces attaques? Veut-on chasser les minorités du pays ou, comme le gouvernement et d'autres observateurs l'affirment, est-ce pour des motifs qui ont peu à voir avec les croyances ou les appartenances religieuses?
    Je pense que vous avez misé dans le mille: c'est pour chasser les minorités de cette région.
    Je peux vous raconter une histoire. Notre mosquée nationale se trouve à Baitul Mukarram. Le grand prêtre de la mosquée a déjà dit que les pays musulmans ne devraient être habités que par des musulmans, que ceux qui adhèrent à d'autres religions devraient se convertir à l'islam et que leurs adhérents iront faire valoir leurs droits dans les pays démocratiques.
    Naturellement, les jamaats ou les autres partis islamiques ont pour objectif de... je vais vous dire quelque chose. Si dans une famille, une fille est violée, toute la communauté s'en tiendra loin. Cette famille n'a alors pas d'autre choix que de quitter le pays. Les islamistes gardent donc deux choses à l'esprit: l'accaparement des terres et les filles de groupes minoritaires.
    Monsieur Dewan, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
     En ce qui concerne les minorités en général, si on regarde les chiffres de 1947, quand l'Inde a été divisée en deux parties, le Pakistan et l'Inde, on constate qu'un pourcentage important des minorités, environ 32 %, étaient des hindous et d'autres confessions. À l'heure actuelle, ce pourcentage a presque atteint 8 %. Ce chiffre éloquent montre à quel point les minorités font l'objet de persécutions.
    Les islamistes ont diverses méthodes pour faire de fausses acquisitions et d'autres choses. Ils affirment que les gens provoquent des émeutes. Quand des émeutes éclatent, les gens sont attaqués, tous leurs biens sont brûlés et les hindous s'en vont en Inde. Les islamistes s'approprient ensuite leurs terres. C'est une méthode.
    Dans la région des monts de Chittagong, c'est la même chose. Nos peuples autochtones ont fui à Mizoram, en Inde, et à Tripura. De plus, environ 100 000 Autochtones se trouvent à Arunachal, en Inde, où se trouve ce qu'on appelle l'agence de la frontière nord-est. Ils y sont depuis de nombreuses années et n'ont toujours pas obtenu la citoyenneté. Ils sont arrivés là en 1964. Quand les terres ont été inondées par la centrale hydroélectrique, 100 000 personnes ont été déplacées et 50 % des meilleures terres agricoles se sont retrouvées sous l'eau. Après cela, il ne nous reste plus de terre. Où aurons-nous des terres? Où s'installeront les nouveaux colons?
     Nous ne cherchons pas querelle aux autres Bengalis. Nous avons vécu côte à côte sans problème pendant des siècles. Les ennuis ont commencé quand le Bangladesh est devenu indépendant et que les Arabes, sous de faux prétextes, se sont approprié la terre dans des régions voisines. La terreur règne dans la région. Nous ne pouvons obtenir justice. Nous ne faisons appel à aucune instance, puisque nous ne pouvons obtenir justice. Comme vous le savez, le système judiciaire n'est pas comme celui du Canada. Cela signifie que, comme je l'ai souligné, il n'y a pas de primauté du droit.
    Or, la primauté du droit est la cheville qui garde le pays ensemble. Tout le monde peut obtenir justice ici, que ce soit grâce aux médias, au système judiciaire ou à autre chose. Mais il n'y a pas de primauté du droit au Bangladesh. Voilà ce que je veux faire comprendre. Tout est motivé par la politique et la religion afin de détruire des communautés entières. C'est ce qu'il se passe au Bangladesh. C'est très triste.
(1345)
    Merci, madame Grewal.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Cotler.
    Je tiens à remercier nos témoins de comparaître.
    Je veux vous saluer de nouveau, monsieur Dewan. Je vous remercie de témoigner.
    J'ai en fait deux questions, qui font suite à vos propos.
    Vous avez indiqué que le gouvernement du Canada fournit une aide considérable au Bangladesh, ce qui signifie qu'il devrait être en mesure d'influencer le gouvernement de ce pays.
    Vous avez également souligné le fait plutôt désolant que les difficultés des peuples autochtones du Bangladesh échappent à l'attention de la communauté internationale. On ne lit ou n'entend rien à ce sujet. Voilà qui contribue à favoriser la culture d'impunité et, franchement, encourage les violations de la primauté du droit, parce que non seulement personne ne surveille ce qui se passe, mais la situation passe inaperçue.
    Comment le gouvernement du Canada ou le Parlement peuvent-ils influencer le gouvernement du Bangladesh, étant donné que nous lui offrons de l'aide? Comment l'influencer pour protéger les populations autochtones, assurer le respect de la primauté du droit, mettre fin à la culture d'impunité et faire respecter l'accord de paix et tout ce dont vous avez parlé? C'est ma première question.
    La seconde, qui n'a pas de lien avec la première, est la suivante: comment pouvons-nous porter cette affaire à l'attention du public — voire interpeller l'opinion publique ici, au Canada —, étant donné qu'un groupe de violations en annule un autre? Dans un monde où tout le monde parle du groupe armé État islamique et de Boko Haram, comment pouvons-nous faire connaître votre situation particulièrement pénible?
    Merci, monsieur.
    D'après ce que je comprends, des sommes importantes sont évidemment versées au Bangladesh par l'entremise de l'ACDI. Je n'ai pas de chiffres sur les montants investis ou sur l'aide financière accordée à la région des monts de Chittagong, ayant été incapable d'obtenir l'information.
    Bien entendu, comme il dépend des donateurs, le Bangladesh craint avant tout la publicité. En deuxième lieu, il craint que le donateur ait une influence quelconque.
    C'est notre responsabilité à titre de Canadiens. Je suis aussi très fier actuellement, en ma qualité de citoyen canadien, que nous ayons la responsabilité morale et éthique de promouvoir les droits de la personne à un égard: nous devons indiquer que la démocratie et les droits de la personne sont indissociables de l'aide apportée. Nous devons faire la promotion des droits de la personne. Les peuples autochtones et les minorités religieuses devraient être respectés, comme c'est le cas pour quiconque ici.
    Voilà ce que je veux vraiment que le gouvernement du Canada indique aux gens. Je ne dis pas qu'il faille cesser d'apporter de l'aide, car c'est un pays très pauvre, l'un des plus pauvres du monde, avec une population de 150 millions de personnes dans une région de 55 000 miles carrés. Mais grâce à notre capacité et à notre aide financière, nous pouvons évidemment y avoir de l'influence.
    Vous m'avez également demandé comment nous pouvons favoriser la couverture médiatique. C'est quelque chose que nous sommes essentiellement incapables d'assurer là-bas parce que les médias sont très menacés. Ici, les médias ne peuvent ou ne veulent pas le faire, car nous sommes très peu nombreux. Je constate que les gens ne voient pas pourquoi ils se soucieraient du problème. Nous sommes ici tout le temps, mais, en fait, tous nos mouvements sont occultés par les actions du groupe armé État islamique ou le terrorisme islamique. Nous avons attendu ce moment, qui a été reporté à maintes reprises. Je dois une fière chandelle à Mme Bose, qui a tenté d'organiser cette rencontre pour nous.
    Vous vous souviendrez que je vous ai donné un exemple. J'ai participé à l'Instance permanente sur les questions autochtones des Nations Unies en 2011, à l'occasion de laquelle j'ai participé à une conférence de presse. Les médias étaient présents. Nous avons témoigné. La couverture médiatique était considérable. Nous avons également pris part à des discours et à des rassemblements devant l'édifice des Nations Unies. Nous avons donc bénéficié d'une certaine couverture médiatique.
    Un jour, une femme bengalie est venue me voir. Elle étant membre local de la Ligue Awami à New York. Elle m'a demandé pourquoi je faisais tout cela et voulait en parler, indiquant que son groupe ne voulait pas de publicité. Elle m'a invité à rencontrer l'ambassadeur du Bangladesh aux Nations Unies. Elle m'a dit qu'elle allait organiser un souper ou quelque chose à mon intention, et j'ai compris qu'ils avaient très peur de la publicité. C'est probablement l'une des deux choses qui incitent le gouvernement du Bangladesh à écouter quand on lui indique ce qu'il faut faire.
(1350)
    Le problème que je constate, comme je l'ai dit, c'est que l'armée est très puissante et ne va rien faire. Elle sait très bien que si elle perpètre des saccages ou des massacres à plus grande échelle, ses gestes feront la manchette des journaux et d'autres médias. Elle commet donc tout doucement un génocide sournois. J'ai ici le rapport du International Work Group for Indigenous Affairs, qui s'intitule Bangladesh: Militarization in the Chittagong Hill Tracts — The Slow Demise of the Region’s Indigenous People. Si le document vous intéresse, je peux vous en faire parvenir une version électronique. J'en ai aussi 15 copies en main, si vous voulez. Vous pouvez les prendre. La plupart des documents sont là.
    Étonnamment — et j'en suis très heureux —, nous avons reçu le 18 février dernier des documents d'Amnistie internationale sur le musellement du peuple autochtone au Bangladesh. Ces gens n'ont pas le droit de s'adresser aux étrangers, ni même aux organisations et aux habitants du Bangladesh. C'est très...
    Ça suffit. Voilà ce que j'ai à dire.
    Merci, monsieur.
(1355)
    Vous pourriez laisser les documents au greffier à la fin de la séance. Il veillera à ce que les membres du comité puissent les consulter. Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Hillyer.
    Le Bangladesh ne veut pas attirer l'attention et aime le fait qu'on ne s'en préoccupe pas. Mis à part exercer des pressions au moyen de notre aide extérieure et ce genre de choses, croyez-vous que la visite de parlementaires pourrait améliorer la situation?
    Certainement. Ce serait encore plus efficace et percutant si les parlementaires soulevaient la question devant la Chambre des communes. Toute mention aiderait énormément. C'est mon avis.
    Une fois que la situation serait connue, le gouvernement bangladais se dirait qu'il ne peut plus réduire le peuple au silence. Si certaines des mesures prises contre le peuple autochtone étaient mises au jour et parvenaient aux oreilles de bien des hauts lieux, le gouvernement y réfléchirait. Je crois que cela aurait une grande incidence.
    Merci.
    Vous pouvez poser plus d'une question lorsque la réponse est aussi brève.
    Non, j'ai terminé.
    Dans ce cas, nous allons écouter M. Benskin.
    Je vous remercie d'être avec nous, messieurs.
    Siéger au comité permet souvent d'apprendre des choses. Pour commencer, je vous prie d'excuser mon ignorance quant au sort du peuple autochtone au Bangladesh. J'imagine que je souffre du manque d'ouverture occidental en pensant que les seuls problèmes au monde sont ceux que nous voyons. Je vous remercie d'avoir porté votre situation à notre attention, et je suis ravi que le comité ait pu organiser la séance.
    Ma question fait en quelque sorte suite à celle de M. Cotler. Je suis particulièrement préoccupé et fasciné dans une certaine mesure par ce que vous avez dit, à savoir que le gouvernement supprime l'expression « peuple autochtone » de tous les documents, comme si ces personnes allaient cesser d'exister par le fait même.
    Comment votre peuple est-il appelé lorsqu'il est question de votre existence au Bangladesh? Pourriez-vous nous parler des travaux que vous réalisez afin de sensibiliser la population à votre existence et aux épreuves et tribulations que votre peuple endure là-bas?
    En 2011, j'ai envoyé un mémoire au premier ministre du Bangladesh à propos des travaux de modification constitutionnelle en cours. Il s'agissait de la 16e modification à la constitution du pays. Nous demandions que le peuple autochtone et son identité soient enchâssés dans la constitution du pays, une requête que le gouvernement bangladais a rejetée catégoriquement. En fait, le gouvernement Hasina peut agir ainsi aux termes de la constitution puisqu'il est majoritaire, avec plus de deux tiers des sièges. Il peut faire ce qu'il veut pour l'instant en raison de sa majorité.
    Permettez-moi de vous donner un exemple. Il y avait plusieurs affiches à l'aéroport montrant des femmes autochtones souriantes. Plus tard, lorsque la question des peuples autochtones a été soulevée aux Nations unies, le gouvernement a retiré ces affiches. Les femmes autochtones ont disparu. Par la suite, le gouvernement a donné l'ordre à tous les organismes d'aide étrangers et organismes gouvernementaux de ne pas parler du peuple autochtone. Les fonctionnaires ont reçu l'ordre de supprimer le mot « autochtone » de tous les documents d'État, alors qu'auparavant...
    Le gouvernement disait donc un jour une chose et autre chose le lendemain. Il a complètement changé du jour au lendemain parce qu'un groupe quelconque favorable à l'armée a dit au premier ministre que s'il reconnaissait le peuple autochtone, le pays allait devoir lui donner ses terres, et ainsi de suite. Comme je l'ai dit, le Bangladesh figurait parmi les pays signataires de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Même les conventions no 107 et 169 de l'Organisation internationale du travail admettent que le Bangladesh est un pays signataire.
    Si le gouvernement reconnaît que le peuple autochtone est tout simplement sur son territoire, il aura un énorme problème en raison de l'argent et d'autres privilèges qu'il reçoit de l'UNESCO, des Nations unies et de la Banque mondiale. Voilà pourquoi il refuse de reconnaître la présence des Autochtones... Il dit que nous sommes autochtones.
    C'est ce que j'ai cru comprendre.
(1400)
    Je remercie nos témoins. Je sais que vous avez eu des problèmes de transport pour vous rendre jusqu'ici. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pu venir faire la lumière sur ce sujet des plus important. Nous vous sommes extrêmement reconnaissants de votre présence.
    Si vous avez des documents à nous laisser, je vous invite à les remettre au greffier avant de retourner chez vous.
    Chers collègues, merci beaucoup.
    La séance est levée.
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