NDDN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la défense nationale
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 11 décembre 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Nous poursuivons notre étude sur les soins offerts aux membres malades et blessés des Forces canadiennes.
Nous accueillons aujourd'hui le Commodore Hans Jung, médecin-chef des Forces canadiennes, maintenant à la retraite. Né en Corée, il est devenu médecin-chef en 2009 et il a pris sa retraite en juillet dernier, après avoir servi 31 ans dans les Forces canadiennes. Au cours de son mandat, il a été le principal promoteur du programme d'adjoints au médecin et de l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, que nous connaissons bien et qui est un réseau de chercheurs universitaires s'intéressant aux questions qui touchent les militaires et les anciens combattants.
Commodore, si vous voulez faire votre déclaration préliminaire, nous sommes désireux de l'entendre.
Tout d'abord, comme je suis à la retraite et que je ne représente aucune organisation, je n'ai vraiment pas de déclaration préliminaire à faire. J'ai pensé vous donner plus de temps pour poser les questions que vous jugez nécessaires.
Mais avant, laissez-moi remercier le comité et ses membres de continuer à poser la question du soin des malades et des blessés, parce que ce problème ne s'en ira pas tout seul. Un effet de retard fera qu'il nous taraudera pendant encore quelque temps.
[Français]
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
[Traduction]
Les membres du comité disposent, en exclusivité, d'une heure et demie avec le commodore.
Monsieur Harris, les sept premières minutes sont à vous.
Merci, monsieur le président.
Merci, commodore, d'être ici. Maintenant que vous êtes à la retraite, vous pouvez peut-être vous exprimer un peu plus librement sur ce qui vous préoccupait depuis 2009, pendant votre mandat de médecin-chef.
Nous avons examiné un certain nombre d'études, notamment au sujet de la santé mentale. Je fais allusion aux rapports de l'ombudsman, de 2002 à 2008, du rapport de notre propre comité, en 2009, et des rapports de Petawawa, qui étaient très troublants. Le dénominateur commun semble l'identification des problèmes en fonction de la capacité de fournir des services dans des programmes destinés aux soldats. Actuellement, je pense particulièrement aux services de santé mentale. On constate notamment que, malgré le bon vouloir, la capacité réelle de mettre les programmes sur pied manque.
Je remarque, et peut-être pourrez-vous en parler, que vous avez soulevé d'importants motifs d'inquiétude, le printemps dernier, après que les directives budgétaires ont été connues. Vous pensiez que les compressions budgétaires se feraient au détriment des services de santé mentale. Aviez-vous des craintes semblables sur la disponibilité des ressources qui permettraient de donner suite aux recommandations formulées sur les services supplémentaires de soutien?
J'enchaîne avec cette autre question: mais aviez-vous des craintes semblables pendant votre mandat de médecin-chef, de 2009 jusqu'à votre départ à la retraite en juillet?
Eh bien je pense que, pendant mon mandat, j'ai officiellement déclaré que le problème n'a jamais été les ressources. En fait, chaque année nous devions restituer une partie de l'argent que nous n'arrivions pas à dépenser.
Au niveau du ministère, évidemment, mais, à celui des services de santé, il y avait une foule de raisons pour cela. D'abord, comme vous l'avez souvent entendu, une organisation ne peut pas compter, au Canada, sur un gros bassin de fournisseurs de services de santé mentale. Pour qui veut obtenir un surcroît de services, le marché est déjà saturé. Il n'est pas facile de les attirer à la Défense ou dans l'armée. Les désoeuvrés qui cherchent du travail sont des oiseaux rares.
En plus, bien sûr, dans la fonction publique ou les organismes de l'État, il n'existe pas de bassin de professionnels qu'on pourrait réaffecter ou réclamer à la faveur d'un concours interne. Beaucoup sont des civils, qui ne font pas partie des Forces canadiennes. Presque tous sont à l'extérieur de la fonction publique. Il faut en fait les dénicher dans le civil.
Il faut passer par une foule de pratiques d'embauche de la fonction publique, par exemple des échéanciers et des classifications. Une longue période s'écoule donc entre la découverte d'un candidat et le moment de l'embauche effective. Dix mois, plus parfois. Bien sûr, un professionnel de la santé en quête de travail n'est pas près d'attendre quelques mois, encore moins dix après une éventuelle offre d'emploi.
Nous étions entravés par ces règles de la bureaucratie gouvernementale.
Je dois vous interrompre, parce que nous disposons de peu de temps.
Nous l'avons entendu à de nombreuses reprises, mais quand les praticiens ont parlé, par exemple, à Petawawa, en 2012, ils ont notamment dit que les salaires ne se comparent pas à ceux de postes semblables à l'extérieur de l'armée. C'est pourquoi les praticiens ne veulent pas y travailler. Le travail dans une ville militaire a peu d'attraits. Il est difficile de garder son personnel. Rien ne permet d'utiliser avec souplesse les travailleurs à temps partiel, ceux à temps plein, les horaires variables, la semaine de travail comprimée. Le roulement du personnel est élevé.
Si un psychiatre diagnostique une maladie mentale et a besoin de référer le patient, la durée d'attente est excessive, et le praticien finit par utiliser une psychothérapie de soutien, qui cause le gaspillage de précieuses ressources. Il semble y avoir des obstacles. Pas seulement pour trouver le personnel, mais, aussi, pour organiser le travail ou pour mobiliser les gens qui sont prêts à faire le travail si les conditions sont réunies. Est-ce le constat que vous avez fait dans votre organisation?
Oui, en effet. Pour l'embauche de civils on s'adresse à la fonction publique ou à des entrepreneurs. Il faut distinguer. Avec la fonction publique, nous avions les mains liées, parce que la grille salariale n'est pas déterminée par la Défense nationale.
Vous avez absolument raison. On ne trouve qu'une poignée de médecins dans la fonction publique, au sein des Forces canadiennes ou à la Défense, parce que les honoraires de la fonction publique ne sont tout simplement pas concurrentiels. Nous avons dû souvent embaucher ces gens par l'entremise de Calian, l'entrepreneur privé, pour leur verser un salaire concurrentiel.
Si l'argent ne faisait pas défaut, comment se fait-il que, soudainement, le ministre débloque 11,4 millions de dollars, au moment même où vous vous plaigniez? On nous répond que, pour la première fois, il se trouve à Petawawa quatre psychiatres. Comment l'expliquer, si l'argent ne faisait pas défaut?
Les quatre psychiatres ont toujours été là. Mais ce sont des êtres humains aussi, qui ont besoin de congés de maternité, qui tombent malades, ainsi de suite. On ne peut pas toujours prévoir qu'il y aura toujours quatre équivalents temps plein.
Je le répète, le problème n'a jamais été un manque de ressources; c'était plutôt mon incapacité de les dépenser, à cause d'obstacles qui échappaient à ma volonté. Il y avait les pratiques d'embauche. Par exemple, à chaque exercice, dans ses directives, le ministère annonçait un gel de l'embauche à cause de la situation financière incertaine. Il y avait les examens internes. Tous ces obstacles retardent de plusieurs mois les offres d'emploi à des civils qui pourraient être intéressés.
Eh bien, on a approuvé une soixantaine de postes pour les ressources en santé mentale. Elles étaient censées atteindre 440 personnes. Nous n'avons jamais été capables de combler la différence de 60 à 80 personnes. Il subsistait des obstacles internes, même si les postes avaient été approuvés et financés.
Une solution serait de simplement accorder le pouvoir de combler ces postes sans devoir franchir les milliers d'étapes d'autorisations. Chaque poste doit faire l'objet d'une dotation et d'une analyse et doit être approuvé à divers niveaux de la hiérarchie du ministère avant d'être comblé. Actuellement, si je comprends bien, il y a, en quelque sorte, un gel de l'embauche de fonctionnaires.
Merci, monsieur le président, et merci à vous aussi, commodore, de vous être déplacé pour nous.
Je dois d'abord vous remercier pour vos 31 années de service. Pendant cette longue période, vous avez dû en voir. D'après votre expérience, dans quelle direction aimeriez-vous que le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes orientent désormais les programmes de santé? Quel avenir voyez-vous pour ces programmes? Dans un monde idéal, quels types de programmes de réadaptation mentale et physique aimeriez-vous qu'on offre et qu'on intègre dans le régime de soins de santé des Forces canadiennes?
Il faut comprendre que, à partir de 2000, le projet Rx2000 visait à renouveler les services de santé des Forces canadiennes. Vous avez entendu parler de la décennie de noirceur. Pour moi, ç'a toujours été la décennie de profonde noirceur. Le projet Rx2000 visait à revenir à la norme à laquelle nous devions nous situer. Il faut aussi se rappeler que lorsque le projet Rx2000 a été préparé et autorisé, l'Afghanistan ne figurait dans les plans de personne. Tout ce que nous avons fait avant l'Afghanistan se fondait sur ce que nous pensions être plus ou moins des besoins de temps de paix, en matière de soins de santé. Par la suite, à cause de l'Afghanistan, nous avons fourni un appui supplémentaire. Nous avons étoffé le volet de la santé mentale. Nous avons recréé le programme de réadaptation auquel on avait mis fin dans les années 1990. Nous avons renouvelé la plus grande partie des services offerts.
Maintenant que le programme Rx2000 est terminé, nous avons, dans mon esprit, un système de soins de santé que je qualifierais d'optimal. Je ne dirais pas qu'il est parfait. Aucun système ne le sera jamais, visiblement. On y avait bien réfléchi et on l'avait exécuté méthodiquement. Comme vous savez, nous possédons le seul système pancanadien de dossiers de santé électroniques au Canada. Les Forces canadiennes sont un chef de file et un modèle de soins à un certain nombre d'autres titres.
Je ne me soucie pas autant de savoir en quoi nous devons faire plus que de ne pas gaspiller une douzaine d'années pour nous retrouver au même endroit qu'aujourd'hui. Pour des raisons évidentes, la situation financière du pays et l'apparition d'un certain nombre d'autres causes de stress depuis la fin des combats en Afghanistan, je crains qu'on oublie le soin des malades et des blessés. Le système que nous nous sommes tant efforcés de mettre au point menace aujourd'hui de reculer. Je sais que la vie est une succession de cycles. Ce qui monte retombe pour remonter encore. Je n'ose imaginer qu'un système aussi perfectionné que celui d'aujourd'hui, que nous avons mis au point au prix de tant d'efforts et avec le concours de tant de personnes de qualité, sera lentement sacrifié au fil du temps. C'est pourquoi je pense que le travail de votre comité est très important, pour que nous conservions nos acquis.
Ces trois dernières années, comme je l'ai dit, nous n'avions pas besoin de plus d'argent. Nous disposons d'une quantité raisonnable de ressources. Mais nous avons besoin de souplesse pour adapter nos ressources à nos besoins, rapidement, pour que notre faculté d'adaptation rapide nous permette de rester ce que nous sommes. Par exemple, actuellement, les exigences en matière de soins de santé, notamment dans les forces terrestres, fluctuent en fonction du roulement. Dans la fonction publique, si on embauche trop de monde dans un secteur qui, après un certain temps, devient moins urgent, il est presque impossible de déplacer ces fonctionnaires dans un secteur différent. Il s'agit d'être mobile, de pouvoir adapter les ressources aux besoins, aux sursauts de la demande, de le faire vivement, tout en conservant, à peu près inchangée, l'enveloppe totale.
Si nous pouvons le faire, nous possédons un excellent système de santé. Je sais que mes confrères de l'OTAN sont très envieux du système canadien.
Comment garder les médecins militaires dans l'armée? Par exemple, à Meaford et dans d'autres bases, j'ai vu des médecins civils, embauchés à contrat, et ainsi de suite. Comme vous avez dit, on peut déplacer, par exemple de Petawawa à Edmonton, les médecins militaires, etc. Ils abordent leurs patients d'une manière différente. Ils comprennent probablement un peu mieux le stress et les problèmes du service militaire. Qu'en dites-vous? Je sais que c'était une incitation pour les médecins de s'engager. L'argent n'est pas en cause. C'est plutôt les motifs de s'engager.
C'est une excellente question. Encore une fois, cette difficulté n'est pas particulière au Canada; tous les pays de l'OTAN qui sont allés en Afghanistan l'ont éprouvée.
Les médecins, les infirmières, les pharmaciens, les professionnels des soins de la santé ne s'engagent pas seulement pour donner des soins quotidiens, ce qu'ils peuvent faire dans le civil tout en étant mieux rémunérés et avec une meilleure maîtrise de leur vie. Ils le font en raison du service exceptionnel qu'ils fournissent dans les Forces canadiennes, du climat des opérations, de l'expérience particulière qu'ils acquièrent. Soyons francs, l'Afghanistan a été un aimant puissant. Il a permis à des gens de se dire qu'ils pouvaient, à bien y penser, servir le Canada, faire quelque chose d'exceptionnel, vivre une expérience inoubliable, la chance de leur vie. Ils avaient l'impression de pouvoir changer quelque chose en dehors du traintrain quotidien.
La difficulté est la suivante et c'est là aussi que le général Devlin est en désaccord avec l'armée: comment entraîner les soldats de manière à les exciter, à les stimuler. Comment maintenir cette excitation particulière, cette culture militaire particulière, ce sens de l'aventure, si vous voulez? Nous devons entraîner notre personnel de manière innovante, dans le contexte de l'avenir, de manière beaucoup plus intéressante, pour les préparer, avec réalisme, aux combats à venir. Au fil du temps, nous devons être capables d'une plus grande interopérabilité avec nos alliés pour pouvoir nous entraîner ensemble afin de réduire les coûts au minimum et d'augmenter la synergie.
En fin de compte, il faut stimuler. Ils se côtoient dans un bureau, dans une clinique au Canada, et l'individu en uniforme, en parlant de l'autre, habillé en civil, dans le bureau voisin, constate: « Il est mieux rémunéré que moi. Il n'a pas de fonctions à remplir, il n'est pas responsable de tout. Qu'est-ce qui rend mon travail si excitant que je veuille être ici? » Voilà ce dont il faut tenir compte. Ça veut dire favoriser l'esprit militaire, la médecine opérationnelle et donner l'occasion de la pratiquer.
Merci, monsieur le président.
Merci, docteur Jung, de vous être déplacé et, comme mes collègues, je vous remercie pour vos années de service.
La semaine dernière, nous avons accueilli des soldats qui semblaient au seuil de la folie et qui avaient quelques tentatives de suicide derrière eux. La discussion a alors pris un visage humain. La plupart du temps, nous parlons d'argent, nous planifions, ce genre de choses. Il est difficile de s'imaginer à quel point certains peuvent être amochés.
La conversation, jusqu'à maintenant, particulièrement avec les témoins qui ont subi des blessures, concerne les thérapies alternatives. La position de l'armée consiste le plus souvent à affirmer qu'on lui en propose une nouvelle chaque jour; qu'il est impossible de tout parrainer et que, en plus, elles ne se fondent sur aucune donnée empirique. Les soldats disent que c'est ce qui leur a sauvé la vie. « Ce chien m'a sauvé la vie. Ce cheval me fait un grand bien », ce genre d'affirmations.
Vous fournissez maintenant des services médicaux directs aux anciens combattants. Quelle est votre opinion?
Je pense qu'il faut prendre bien soin de distinguer d'abord l'anecdotique du systémique et, aussi, désir et besoins.
Si, pour vous, la réussite se mesure par la satisfaction des besoins de tous et par le bonheur de l'obtenir, je pense que le Canada n'aura jamais assez d'argent pour cela. D'un côté, nous sommes soumis à des contraintes budgétaires et à des pressions pour non seulement améliorer notre efficacité mais, peut-être, effectuer des compressions. De l'autre, vous parlez de satisfaire les désirs personnels de tous.
Il faut faire attention. Ce qui procure un bonheur subjectif n'est pas, objectivement, ce qu'il faut à long terme. Par exemple, est-il légitime de demander qu'on finance un voyage annuel aux Bahamas, qui chasserait la dépression, etc. et procurerait vraiment du bonheur au demandeur. Il y a la thérapie par les chevaux. C'est la raison pour laquelle, dans le secteur civil, prolifèrent toutes ces organisations bénévoles telles que la Fondation des maladies du coeur du Canada et la Société canadienne du cancer. Elles peuvent s'occuper de ce genre de thérapie dans une population relativement petite.
Voici quel était son raisonnement: comme l'aveugle a besoin d'un chien, sa blessure faisait qu'il avait besoin aussi d'un chien. À bien y penser, ce raisonnement, qui ne visait pas à obtenir plus de confort, de douceur ou de bonheur, concernait un aspect du syndrome de stress post-traumatique dont souffrait l'individu. Est-il concevable qu'un médecin comme vous prescrirait la zoothérapie au moyen d'un chien?
Je n'ai jamais dit que je la prescrirais. Je dirais, en ma qualité de praticien privé, que si vous pouvez trouver un organisme de charité prêt à lui fournir ce genre de service, eh bien oui, certainement, allez-y! Je sais que le RAMO, le Régime d'assurance-maladie de l'Ontario, ne rembourse rien de ce genre de dépenses. Je suis sûr qu'il ne rembourse rien pour les chiens non plus. L'Institut national canadien pour les aveugles et d'autres organisations le font. Il y a une différence entre ce que le public et le contribuable devraient payer, parce que le problème constitue un précédent et il faut savoir à quel endroit tirer la ligne. Si un cheval fait du bien à l'un, peut-être qu'un lion a le même effet chez l'autre et un voyage chez une troisième. On ne peut pas appliquer une politique...
Je comprends l'argument. Je comprends votre idée. Je pense que votre analogie pour la fourniture de chiens par l'Institut pour les aveugles est bonne. Ce qui me trouble, c'est une certaine rigidité, et, corrigez-moi si j'ai tort, ce qui concerne la recherche de preuves empiriques pour ce genre de thérapies alternatives. Je sais que les médecins qui exercent ont probablement les idées les plus conservatrices qui soient et ils sont souvent conditionnés par ce qu'ils ont appris à la faculté de médecine alors que, depuis, le monde a évolué. Je n'en dis pas plus.
Je voulais aussi parler, au sujet de la thérapie directe aux soldats et aux anciens combattants, de votre position, qui se distingue de toutes les autres, notamment de votre niveau de compréhension de vos patients qu'aucun médecin civil ne pourra égaler. Qu'est-ce qui fait que dans la mentalité du guerrier, si vous me passez l'expression, quand il est blessé, il a besoin d'une thérapie qui lui est propre, ce genre de choses?
L'une des choses qui m'ont paru très évidentes, quand je portais l'uniforme, c'était la difficulté, pour les anciens combattants, de se trouver un médecin de famille après leur retraite. Ils ne pouvaient trouver personne, en raison de ce qu'ils pensaient être une pénurie. C'était souvent leur plus grande difficulté. On me demandait souvent ce que je pouvais faire pour eux et leur famille. Je répondais que j'étais presque impuissant, à cause de mon mandat très limité de médecin-chef.
En me préparant à la retraite, je me suis interrogé sur ma deuxième carrière. La réponse évidente était d'offrir aux anciens combattants la possibilité de voir un médecin qui connaîtrait leurs antécédents. Certains de mes patients ont déjà un médecin de famille. Je leur demande pourquoi ils changent. C'est parce qu'ils ne pouvaient pas communiquer avec lui, tandis que moi je les comprends. Leur grade, leur GPM, le groupe professionnel militaire, me disent tout. Nous avons en commun la même expérience opérationnelle.
Ce n'est pas que nous parlions un anglais ou un français différents. C'est tout simplement que nous avons en commun une certaine culture. Ils se sentent à l'aise parce que nous avons connu les opérations. Souvent, les explications sont inutiles. Quelques mots suffisent pour que je comprenne tout. Même leurs silences m'informent sur le traitement à appliquer.
C'est aussi simple que de comprendre le fonctionnement du système de demandes à Anciens Combattants Canada, ce que ça signifie, ce qu'est le formulaire CF-98. Ça, aucun civil ne pourra jamais le savoir. Ce sont les notions, les mots à employer dans le formulaire d'ACC, pour que le ministère comprenne. Souvent quand ils se présentent chez le médecin muni du formulaire, il refuse simplement de les prendre comme patients.
Ça ne me dérange pas de faire tout cela, parce que ça fait partie de mon service permanent aux anciens combattants et au Canada. La transition s'est opérée naturellement. Nous avons la même culture; je comprends leurs antécédents. Quand ils me parlent de certaines choses, je comprends intuitivement, pas nécessairement les seuls mots qu'ils prononcent.
Votre temps est écoulé. Nous passons maintenant à la série de questions de cinq minutes par intervenant.
Madame Gallant, vous avez la parole.
Merci, monsieur le président.
Depuis le premier départ de nos troupes pour l'Afghanistan, en 2001, jusqu'à maintenant, nous avons assisté à un virage à 180 degrés de l'opinion de l'armée sur les traumatismes liés au stress opérationnel. Au début, il fallait encaisser et faire comme si ça n'existait pas, tout à l'opposé d'aujourd'hui, quand on est censé reconnaître par ses propres réactions le moment où il faut obtenir de l'aide. En cours de route, nous avons mis sur pied la période de décompression, parce que les familles nous disaient que les soldats revenaient trop tôt à la maison, qu'ils avaient besoin d'un peu de temps avant de réintégrer la famille et la communauté. Il y avait encore un autre pas à franchir: c'était d'observer tous les problèmes potentiels sur le théâtre des opérations et pendant les opérations. Pouvez-vous dire quelles mesures sont prises quand un peloton est dans une opération et que quelqu'un subit un traumatisme lié au stress opérationnel ou en présente les signes?
Je ne suis pas sûr de ce que nous avons fait de nouveau. La présence d'infirmiers militaires, d'adjoints au médecin et d'un médecin de bataillon est implicite dans la composition du peloton, des compagnies et des bataillons, pendant leur déploiement. Bien sûr, les gradés et les soldats sont eux-mêmes mieux formés pour comprendre un plus grand nombre de problèmes sociaux et psychologiques et y être sensibilisés. Quand un problème survient, l'infirmier ou l'adjoint au médecin suit un processus pour déterminer s'il est de son ressort. Il existe un protocole. Sinon, tout naturellement, l'individu est confié au médecin.
Bien sûr, comme vous le savez, nous n'essayons pas, encore une fois, de stigmatiser les problèmes de santé mentale sur le champ de bataille en envoyant les soldats touchés en arrière, puis directement à la maison. La conduite à tenir a été bien déterminée pendant les deux dernières guerres mondiales. Il faut traiter les individus le plus près du front possible. Si on les ramène à la maison, leur retour au front devient considérablement moins probable. Il s'agit de fournir une thérapie le plus près du front possible, et, à cause de cela, comme vous savez, nous déployons une équipe de santé mentale, un travailleur social et une infirmière spécialiste de la santé mentale ainsi qu'un psychiatre sur le théâtre des opérations pour que, si des soins de haut niveau sont nécessaires, on peut les prodiguer sur place. Ensuite les soldats réintègrent leur bataillon et deviennent aptes au combat. Cette procédure se trouvait, dès le début, dans les procédures normalisées et nous l'y avons laissée.
Bien sûr, si quelqu'un éprouve un problème, on attire l'attention sur son dossier, et, à son retour, il fait l'objet d'un suivi. D'après les statistiques, le nombre de personnes rapatriées depuis le théâtre d'une opération, pour ces motifs, est minime.
Très bien.
Un autre problème est le taux de roulement dans l'armée. Il n'y a pas longtemps, on a appris, dans les nouvelles, que de 2006 à 2011, cela représentait plus de 98 000 soldats. Le comité n'a pas vérifié ce chiffre, mais cela semble beaucoup de roulement pour cette période. On a investi dans ces soldats des montants non négligeables, et ils ont reçu beaucoup d'entraînement. Quel est le pourcentage annuel de soldats qu'on libère pour des raisons médicales?
Je n'ai pas le chiffre. Cela fait un certain temps et je n'ai pas gardé trace de cela. Au cours des deux ou trois dernières années, je ne peux pas me rappeler le nombre de ces libérations. Franchement, je l'ignore.
Très bien.
Dernièrement, nous avons accueilli deux soldats avec leurs chiens d'assistance. Ils nous ont dit qu'ils étaient à la veille d'être libérés pour des raisons médicales. Ils ignoraient si c'était dans 30 jours, trois mois ou six mois. Ils voulaient rester dans l'armée. C'est à leur grande consternation qu'ils étaient libérés. Ils voulaient se rétablir. Quand, dans l'armée, décide-t-on qu'ils doivent partir? Est-ce à cause des compressions à faire dans le personnel, de leur grade peu élevé ou d'autres critères?
Il y a deux volets à la réponse.
D'abord, après une longue période d'évaluation médicale, notre travail est d'attribuer une cote temporaire ou une cote permanente.
La cote temporaire est pour une personne encore en transition, dont l'état ne s'est pas stabilisé. Quand il s'est stabilisé, c'est-à-dire que la personne est complètement rétablie ou qu'elle a atteint un plateau, un niveau dont nous avons la certitude qu'il ne changera fondamentalement pas, nous lui attribuons une cote permanente: elle a besoin de soins spéciaux réguliers ou d'une certaine quantité ou type de sommeil. Il y a, comme vous le savez, des restrictions fondées sur des exigences médicales.
Voilà ce que nous faisons. Une fois la décision prise, le dossier atterrit chez le directeur de l'administration (carrières militaires), le DACM, qui détermine si le grade, le GPM et les conditions sont compatibles avec la poursuite du service dans ce GPM ou dans un autre où la personne peut se recycler. Si elle le peut, elle reçoit la formation. Sinon, elle viole le principe de l'universalité du service, et la seule option est sa libération.
À cet égard, cela pose un problème d'autant plus important et d'autant plus urgent que les effectifs baissent. Le personnel qui n'est plus apte pour des raisons médicales occupe des postes militaires dans lesquels aucune promotion n'est possible et qu'on ne peut pas combler par recrutement.
Tant qu'on maintient ces personnes en poste et qu'on leur verse une solde, le reste de l'effectif demeure relativement moins nombreux. On alourdit la charge de ceux qui restent, en ce qui concerne le rythme opérationnel et leur rythme personnel. Cela conduira à leur épuisement, qui est plus susceptible d'entraîner d'autres départs.
Merci. Je dois vous interrompre ici. Nous avons amplement écoulé notre temps.
[Français]
Madame Moore, vous avez la parole.
Merci beaucoup.
J'aimerais revenir sur les libérations pour raisons médicales. Le délai, dans ces cas, est vraiment inconnu: il varie entre 30 jours et 3 ans. J'ai été témoin de cas où des gens qui n'avaient été en service que 10 semaines ont dû attendre 3 ans avant d'être libérés.
Or durant cette période, on ne sait jamais ce qui se passe et quand on sera libéré. Ça cause un stress; on est incapable de reprendre sa vie en main. Comment ces personnes peuvent-elles conserver leur motivation au travail en sachant que, de toute façon, elles seront libérées? J'ai vu des cas de troubles d'adaptation et de troubles dépressifs circonstanciels reliés à l'attente de la libération.
Des mesures ont-elles été prises pour stabiliser l'état des gens qui attendent leur libération et faire en sorte de ne pas créer un syndrome psychologique dans le cas de gens qui demandent la libération pour des raisons physiques?
C'est vraiment une bonne question. Si vous le permettez, je vais vous répondre en anglais, de façon à pouvoir communiquer clairement et faire toutes les nuances nécessaires.
[Traduction]
Il y a deux types de libération pour raisons médicales, si vous voulez. La première est pour des motifs physiques, bien précis, par exemple le cas d'un fantassin qui a subi une blessure grave au dos et qui sait qu'il ne peut pas transporter de roches et qu'il ne peut pas marcher. Il ne peut plus être dans l'infanterie. C'est très net. C'est très évident. Ça se voit aux rayons X, dans ses performances. Habituellement, en moins de six mois à une année, nous sommes fixés sur son état définitif. Nous lui attribuons donc une cote permanente. Il sait qu'il ne peut plus être soldat en raison de ses handicaps physiques, et, psychologiquement, il sait qu'il doit passer à autre chose.
Cela fait partie des cas faciles. Les cas mentaux présentent le plus de difficultés, énormément plus. D'abord, le diagnostic est souvent retardé, pour un certain nombre de raisons. La personne ignorait qu'elle avait des problèmes et continuait à vaquer à ses tâches, mais, finalement, quand le diagnostic tombe, il faut commencer le traitement.
Encore une fois, les soins mentaux, ce n'est pas comme la chirurgie. Pour une fracture de la jambe, le traitement est très évident: plâtre ou, au besoin, opération. On sait que dans six semaines à trois mois, environ, ce sera guéri. Il y aura six mois de physio. Une évolution naturelle bien connue. Nous savons ce qui arrivera, l'individu aussi.
En santé mentale, ce n'est pas si simple. C'est très complexe. L'individu peut voir sa situation s'améliorer un temps ou empirer. Beaucoup de facteurs jouent. On peut devoir prendre jusqu'à trois ans pour déterminer si l'état de la personne s'améliorera et à quel point elle se rétablira. Est-ce qu'elle se rétablira complètement ou en partie? Cela prend de nombreuses années.
En même temps, comme vous le savez, beaucoup de soldats veulent rester dans l'armée. Ils le veulent vraiment. Certains viennent à savoir, à un moment donné, qu'ils ne reviendront pas à un niveau qui leur permettra de continuer. On finit par leur attribuer une cote permanente. Cela peut prendre, comme je l'ai dit, trois ans.
D'après la nouvelle politique, une fois le diagnostic prononcé, ce qui peut prendre trois années ou plus, on attribue la cote permanente, et les cas sont qualifiés de complexes. Le système accorde trois autres années à l'individu pour se préparer psychologiquement, professionnellement, au passage à la société civile. C'est un long processus. Je sais que certains disent que c'est trop long, qu'ils veulent qu'on les laisse partir. D'autres veulent rester le plus longtemps possible pour conserver l'espoir qu'ils finiront par guérir.
Malheureusement, il n'y a pas de réponse simple à votre question. Chacun est différent de son voisin. C'est extrêmement complexe. Il faut examiner chaque cas individuellement.
En fin de compte, une fois la situation de la personne stabilisée, et nous essayons de la stabiliser le plus possible, nous nous demandons si elle a atteint le niveau où elle peut devenir fonctionnelle. Si elle ne l'a pas atteint, la politique en vigueur consiste soit à la libérer, soit, je pense, à emprunter une voie différente où elle peut rester en uniforme, mais pas celui des Forces canadiennes.
[Français]
Dans le cas de quelqu'un qui se blesse gravement au genou, il est évident qu'il ne sera plus capable d'exercer le métier de soldat, même s'il avait des tâches qui ne l'obligeaient pas à combattre. Si ce soldat se blesse au genou, par exemple, lors de la quatrième semaine de son cours de recrue et qu'il s'écoule un an avant qu'il puisse retourner à la vie civile, considérez-vous qu'il s'agit d'une situation normale?
[Traduction]
Je ne sais pas trop si la situation est normale, mais nous ne tenons pas à retourner personne à la vie civile pendant qu'il est en transition, en raison de la complexité des soins médicaux qui s'ajoutent à cette situation. Nous essayons de le faire parvenir à un niveau d'équilibre qui permet de le confier au secteur civil des soins de santé. Si on le confiait pendant la transition, alors qu'il souffre de maux physiques ou mentaux, cela rendrait très difficile le maintien de la continuité des soins.
Commodore, merci beaucoup pour votre dévouement pendant vos 31 années de service. Ce que vous faites depuis votre sortie des forces militaires est également très important pour les troupes. Comme vous l'avez indiqué, les militaires sont conscients des liens de fraternité qui vous unissent à eux; ils peuvent vous parler en étant assurés que vous saurez intuitivement de quoi il est question. Certaines choses sont parfois très difficiles à expliquer à un médecin civil.
Nous avons reçu deux soldats la semaine dernière, et un jeune bombardier nous disait... Vous venez tout juste de nous décrire le système et le processus de transition de trois ans, notamment, mais arrive-t-il parfois que cela ne produise pas les résultats escomptés? Ce jeune bombardier nous a dit qu'il avait l'impression d'avoir une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête parce qu'il ne savait pas s'il allait être libéré dans trois mois ou dans trois ans.
Est-ce que le système peut comporter sa part d'incertitudes?
Si le système est mis en oeuvre comme il se doit, cela ne devrait pas se produire. Selon la complexité de votre état, on vous indiquera si la période de transition sera de trois ans ou de six mois.
D'accord. Nous n'avions pas de détails sur l'état de santé du bombardier en question.
Nous parlons beaucoup de stress post-traumatique et de traumatismes crâniens et mentaux, mais qu'en est-il des blessures physiques? De nombreux amputés reprennent tout de même du service. Pourriez-vous nous parler davantage de ce programme?
Pour que les choses soient bien claires, je n'ai jamais entendu parler du retour en service, surtout dans les armes de combat, d'un militaire amputé au-dessus du genou. Ceux qui reprennent du service ont subi une amputation tibiale. Même si l'on parle beaucoup des amputés, ce qui est tout à fait normal, ils sont relativement peu nombreux. Reste quand même que c'est bien évidemment une situation épouvantable pour la personne touchée.
En collaboration avec des centres civils de réadaptation, nous avons mis en place un système visant à offrir aux amputés les meilleurs soins possible. Je crois que nous avons établi de tels partenariats avec neuf centres. Les amputés y reçoivent non seulement les meilleurs soins possible dans la province ou le territoire en question, mais aussi ce qui se fait de mieux pour un combattant. Les besoins d'un amputé du pied à la suite d'un diabète grave sont très différents de ceux d'un athlète ou d'un soldat amputé qui est très motivé à redevenir actif. Nous offrons à nos militaires des services de réadaptation qui ne sont pas disponibles dans la même mesure dans le civil. De fait, je crois que les intervenants civils ont pu s'en inspirer pour améliorer leurs méthodes de réadaptation des jeunes victimes d'accident. Nous leur donnons également accès à une technologie nouvelle, notamment dans le cadre du système CAREN. Nous essayons de faire en sorte que nos militaires puissent compter sur les technologies les plus récentes et les plus performantes de manière à optimiser leurs chances de réadaptation.
Je sais que vous croyez beaucoup à l'aspect éducatif, non seulement pour nos militaires, mais également pour les civils. Pensez-vous que l'éducation est toujours l'élément crucial pour la sensibilisation aux problèmes de santé mentale et les traitements à prodiguer en la matière, autant dans les Forces canadiennes qu'à l'extérieur?
Tout à fait. L'ignorance mène au mépris, aux préjugés et à différents autres résultats non souhaitables. Je crois que l'éducation, c'est ce qu'il y a de plus important.
Il y a une trentaine d'années, il suffisait de dire qu'on avait un cancer pour être considéré comme un paria. Les gens pensaient que vous étiez contagieux et s'éloignaient de vous. C'était peut-être il y a 30 ou 40 ans, mais grâce à l'éducation qui s'est faite au fil du temps, les choses ont évolué. Les gens s'assurent maintenant de subir des tests de dépistage pour le cancer. J'estime qu'il en va de même pour la santé mentale. Je crois qu'il a été démontré, et je sais que mes collègues civils abonderaient dans le même sens, que les Forces canadiennes ont tracé la voie à l'ensemble du pays lorsqu'il s'agit de mieux comprendre la maladie mentale, en la voyant non pas comme un stigmate ou quelque chose de honteux, mais bien comme un problème de santé que nous devons nous efforcer de combattre.
Je crois vous avoir entendu dire que nos alliés vouent une grande admiration à notre système qu'ils considèrent comme un modèle à suivre.
Toujours dans le domaine de l'éducation, nous avons l'entraînement préalable au déploiement, l'exécution de la mission, puis l'entraînement après le déploiement et la période de décompression. Quel est selon vous le meilleur moment pour débuter les traitements? Je suis persuadé que cela peut varier d'un patient à un autre, mais à partir du moment où les symptômes apparaissent, quand devons-nous intervenir? Faut-il le faire par exemple avant le déploiement?
Le traitement doit débuter dès que possible. Tout dépend bien évidemment du moment où l'individu nous fait part de ce qui l'ennuie. C'est ce qui peut être problématique. Si vous vous cassez une jambe, il est impossible de le cacher, mais si vous souffrez d'un problème de santé mentale, vous pouvez toujours le dissimuler. Si le militaire ne se manifeste pas, nous ne pouvons rien pour lui.
Merci, monsieur le président, et merci à vous, commodore, pour votre témoignage d'aujourd'hui.
Compte tenu de vos longs états de service et du rôle que vous avez joué, je me demandais si vous suiviez les délibérations de notre comité.
Je suppose que ce ne serait pas vraiment la retraite si vous le faisiez.
Quoi qu'il en soit, je vous dirais que l'un de nos premiers témoins a parlé du taux de maladie mentale et de traumatismes crâniens parmi nos militaires qui ont servi en Afghanistan, comparativement à ceux des autres pays qui ont participé à ces opérations, le Royaume-Uni et les États-Unis. Si ma mémoire est fidèle, nous nous situions à peu près à mi-chemin entre ces deux pays avec quelque 40 p. 100 de nos soldats qui entrent au Canada avec une forme quelconque de traumatisme mental. Je crois qu'il s'agissait de troubles de stress post-traumatique dans 20 p. 100 des cas, et de dépression pour un autre 20 p. 100.
On nous a également dit, et je pense que vous l'avez confirmé dans votre témoignage d'aujourd'hui, à quel point le traitement et la guérison peuvent être imprévisibles, si je puis m'exprimer ainsi, car non seulement est-il difficile de se débarrasser de ces symptômes au départ, mais ils risquent également de réapparaître des années plus tard.
Par ailleurs, j'aimerais savoir ce que vous pensez du témoignage du contre-amiral Andrew-Smith. Il a traité comme vous de l'universalité du service, mais il a aussi parlé en ces termes de la santé et du bien-être des membres des Forces canadiennes:
Cela comprend l'adoption d'une démarche pangouvernementale destinée à faire en sorte que ceux et celles qui servent leur pays et qui sont appelés à le faire en assumant une responsabilité illimitée reçoivent les soins et le soutien dont eux et leur famille ont besoin si jamais ils tombent malades ou sont blessés. C'est là le contrat social.
J'ai vraiment de la difficulté à comprendre ce témoignage dans le contexte des normes d'universalité du service des Forces canadiennes pour ce qui est des soins et des traitements à dispenser à nos militaires. Pour dire les choses bien franchement, je trouve outrageant que l'on applique cette norme à nos soldats qui rentrent au pays avec des blessures après qu'on leur ait demandé d'intervenir dans des circonstances aussi horrifiantes que terrifiantes. C'est ce que nous avons pu constater avec nos deux témoins de la semaine dernière.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je crois que vous avez essayé aujourd'hui de donner une explication du point de vue financier, mais il ne s'agit pas selon moi d'un contrat social. Si c'en est un, il est extrêmement biaisé lorsqu'on pense aux expériences horribles vécues par ces militaires devant assumer une responsabilité illimitée et aux traumatismes qu'ils ont subis.
C'est une question très complexe. Franchement, je ne crois pas qu'il s'agisse vraiment... Cela nous amène à nous interroger sur les visées fondamentales des Forces canadiennes. Les Canadiens veulent-ils d'abord que leurs Forces soient aptes au combat, ou souhaitent-ils également qu'elles deviennent un filet de sécurité sociale pour les anciens militaires? À mon avis, ce sont les militaires qui pourraient vous répondre à ce sujet.
Si l'on veut garder ces gens dans les rangs, si c'est ce que souhaitent le gouvernement et les Canadiens, il faudra alors changer toute la structure des Forces canadiennes. Tout un éventail de questions juridiques entreront en jeu parce que les Forces canadiennes doivent composer avec la Charte des droits et libertés, ce qui n'est généralement pas le cas des autres pays même s'ils ne sont pas totalement exemptés de dispositions semblables.
D'après ce que je sais des Forces canadiennes, elles ont pour mandat d'être aptes au combat, ce qui justifie l'universalité du service, alors qu'Anciens Combattants Canada est là pour s'occuper des militaires ne pouvant plus servir au sein des Forces.
C'est ainsi que les choses sont censées fonctionner, et c'est comme ça que ça se passe aux États-Unis.
Je travaillais auparavant dans le secteur privé. Je me suis notamment occupé pendant de nombreuses années des mesures d'adaptation pour les employés malades ou handicapés. Bien évidemment, tous les employeurs ont leur propre idée de la raison d'être de leur entreprise qui consiste souvent en un service efficient et productif, mais cela ne les décharge pas de leur responsabilité d'offrir les mesures d'adaptation nécessaires à leurs travailleurs handicapés ou blessés, ce qui est considéré comme un droit de la personne au Canada — tout au moins à l'extérieur du cadre militaire.
Je ne pense pas qu'il s'agirait d'une exigence excessive dans le contexte des Forces canadiennes. Celles-ci ne deviendraient pas un filet de sécurité sociale du seul fait qu'elles assureraient aux militaires blessés ou traumatisés au retour du combat que l'on va s'occuper d'eux et de leur famille aussi longtemps que nécessaire.
Est-ce qu'on irait trop loin en s'engageant de la sorte?
Il s'agit encore là de déterminer s'il y a de la place pour tous ces gens au sein des Forces canadiennes. En effet, chaque militaire ne pouvant être déployé et bénéficiant de mesures d'adaptation occupe non seulement un poste, mais aussi un rang qui devient inaccessible pour ceux qui visent une promotion. En outre, les militaires du même rang que la personne non déployable doivent assumer sa part du travail sur le terrain, ce qui leur impose un fardeau additionnel.
Comme les Forces canadiennes ont des effectifs limités en termes absolus, plus grande est la proportion...
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie notre témoin de sa présence aujourd'hui.
Mme Aiken nous a parlé des recherches menées concernant les traumatismes cérébraux légers, les commotions cérébrales et les symptômes de stress post-traumatique. Avez-vous pu observer un peu la même chose dans le cadre de votre travail et quels seraient selon vous les principaux facteurs contribuant au développement de troubles de stress post-traumatique?
C'est l'un des champs de recherche dans lesquels on a encore beaucoup à apprendre. Le traumatisme crânien léger est un autre exemple d'une problématique de santé mentale qui s'inscrit dans la pensée collective des Canadiens après avoir d'abord été mise au jour par les militaires. Avant la reconnaissance du phénomène par les militaires, personne ne parlait des commotions cérébrales subies par les hockeyeurs et les footballeurs. Nous avons exposé le problème et tous ont pu apprendre de nos expériences.
Il y a une différence fondamentale entre une commotion cérébrale subie par un civil et une dont un militaire est victime. Lorsqu'un hockeyeur est frappé, c'est dans le contexte d'une partie; il faut espérer que l'autre n'essayait pas de le tuer. Au contraire, pour les militaires, l'élément même à l'origine de la commotion — qu'il s'agisse d'une bombe ou d'un engin explosif improvisé — visait de par sa nature à compromettre l'intégrité mentale et physique du soldat. Le même incident pouvant causer un traumatisme crânien léger est aussi celui qui peut déclencher un trouble de stress post-traumatique. Il faut se demander lequel vient en premier ou si les deux agissent simultanément?
J'aurais une petite mise en garde à ce sujet. Même au sein du corps médical, je crois que la stigmatisation a un rôle à jouer. Certains essaient désespérément de trouver une raison biologique expliquant les troubles de stress post-traumatique. Il s'agit selon moi d'une forme de stigmatisation potentielle par les professionnels de la santé eux-mêmes qui essaient de faire valoir que des facteurs psychologiques ne sauraient être, d'une manière ou d'une autre, à l'origine de symptômes découlant d'un événement extrêmement traumatisant et hors norme pour le commun des mortels — quelqu'un essaie de vous tuer de façon tout à fait horrible. On allègue plutôt que la victime aurait déjà souffert d'une commotion cérébrale non détectée ou d'un autre traumatisme pouvant être attribuable, par exemple, à un manque d'air... C'est chose possible, mais je pense que nous devrions éviter de nous diriger trop radicalement dans cette direction, sans quoi nous pourrions involontairement stigmatiser encore davantage les victimes.
Vous nous dites essentiellement que les troubles de stress post-traumatique peuvent sans doute avoir différentes causes et qu'il ne s'agit ici que de l'une d'elles.
Ce pourrait être l'un ou l'autre, ou une combinaison des deux. Je pense que des recherches plus approfondies s'imposent.
Je viens du secteur paramilitaire. Comparativement à ce qui se faisait il y a 30 ans, le processus d'embauche est désormais assorti d'une composante psychologique beaucoup plus rigoureuse. On souhaite ainsi bien sûr repérer dès le départ les candidats souffrant du syndrome de Wyatt Earp pour les écarter au profit d'individus moins excessifs.
Peut-on observer une telle composante psychologique au sein des Forces canadiennes? Lors de l'embauche, essaie-t-on de déterminer, au moyen de questions d'ordre psychologique, si la personne est prête à absorber les facteurs de stress inhérents à la vie militaire?
Oui, je parle du processus de recrutement. Autrement dit, appliquez-vous un filtre à l'embauche ou un processus vous permettant de mettre en garde les candidats relativement à ce qui pourrait leur arriver? À la télé, on nous montre souvent le côté glorieux de la vie militaire, mais pas les aspects plus horribles où l'on voit ses camarades être blessés ou...
Lors du recrutement, nous procédons à un relevé des antécédents en santé mentale. Si l'on repère quoi que ce soit pouvant indiquer un problème, on obtient des renseignements additionnels avant de compléter le dossier. Si celui-ci n'indique rien ou si la personne n'a jamais demandé d'aide pour quoi que ce soit et n'est donc pas au courant d'un éventuel problème ou s'emploie à la dissimuler, elle passera entre les mailles du filet.
Merci.
Vous avez consacré 31 années de votre vie aux Forces canadiennes et je vous remercie pour vos bons services.
Je vous invite à comparer la situation entre le moment de votre entrée en service et celui de votre départ. Réfléchissez tout particulièrement à la période pendant laquelle vous avez assumé les responsabilités de médecin-chef. Pensez-vous que notre pays a fait des progrès quant aux soins à dispenser aux blessés et traumatisés? Avez-vous des indications chiffrées en ce sens? Pouvez-vous comparer notre situation à celle de nos alliés qui ont des forces militaires, une portée d'intervention et une expérience similaires?
Si je compare à la situation lors de mon entrée en service il y a 31 ans, je dirais que tout le système des soins de santé tout comme la vie en général sont devenus beaucoup plus complexes compte tenu des connaissances à notre disposition, des progrès technologiques et des percées de la recherche. On dit notamment que 50 p. 100 de nos connaissances médicales deviennent désuètes au bout de cinq ans pour laisser la place à de nouvelles avancées. Il y a assurément eu amélioration, surtout dans le secteur de la santé mentale. Les progrès à ce chapitre ont été énormes au cours des dernières années.
Il existe un certain nombre d'indicateurs en ce sens, y compris un sondage sur la satisfaction. Il y a Agrément Canada qui accrédite les normes de soins pour les organismes de services de santé. Bon nombre des pays de l'OTAN voudraient s'inspirer de nos modèles d'intervention. Plusieurs n'y parviennent pas et me disent simplement qu'ils nous envient.
Merci, monsieur le président.
J'ai trouvé intéressant ce que vous avez dit au début, à savoir que vous n'avez pas eu de problème de ressources financières, mais de ressources humaines. On peut en déduire qu'il n'y a pas suffisamment de médecins et qu'il est difficile de les retenir.
Tout d'abord, pouvez-vous nous confirmer que les Forces canadiennes ne forment pas leurs propres médecins?
[Traduction]
Les forces militaires forment leurs propres médecins. Nous ne formons d'ailleurs pas seulement des médecins. Tous les professionnels de la santé que nous formons et qui portent l'uniforme sont là parce qu'ils ont un rôle opérationnel à jouer. Si ce n'était pas le cas, ils ne feraient pas partie des forces militaires.
[Français]
Je vais préciser ma question. Je parlais de formation initiale. Recrute-t-on des étudiants dès la fin de leurs études secondaires pour leur donner la formation nécessaire pour devenir médecin dans les Forces canadiennes ou sont-il formés dans des universités civiles?
[Traduction]
Notre recrutement se fait à différentes étapes. Nous accueillons des étudiants en médecine. Il va de soi que nous ne recrutons pas les élèves du secondaire. Nous prenons tous ceux qui sont acceptés en faculté de médecine, peu importe où ils en sont rendus dans leur formation. Les étudiants en faculté de médecine qui souhaitent joindre nos rangs doivent passer un examen physique pour être recrutés. Nous payons alors pour le reste de leur éducation. Certains se joignent à nous une fois leur formation terminée, d'autres pendant qu'ils sont encore étudiants.
[Français]
Que pensez-vous des pays — parce qu'il faut aussi se comparer à d'autres pays — qui ont fait le choix de s'occuper de la formation de leurs médecins dès le début et de leur faire signer un contrat avant qu'ils ne s'inscrivent à l'école? Au moment où ils réussissent l'examen d'entrée à l'école, ils signent un contrat qui les oblige à rester un certain nombre d'années au service des forces armées. Par exemple, en France — c'est de la paresse de ma part, car c'est plus facile pour moi de lire dans ma langue —, les médecins militaires généralistes doivent rester 12 ans au service des forces armées, et les médecins spécialistes hospitaliers, de 14 à 18 ans, selon leur spécialité.
Que pensez-vous de ce genre de contrat qui obligerait non pas des médecins, mais des étudiants qui veulent devenir médecins militaires à s'engager, avant de commencer leurs études, à rester un certain nombre d'années au service de Forces canadiennes, une fois diplômés? Cela pourrait-il répondre au problème que vous avez soulevé au début?
[Traduction]
Je ne crois pas que le nombre de médecins en uniforme soit problématique. Nous avons tous les médecins militaires dont nous avons besoin actuellement. Ce sont les médecins civils dans nos cliniques qui sont en nombre insuffisant. Nous faisons exactement ce que vous venez de décrire. Le système d'éducation et les paramètres d'accès à une faculté de médecine au Canada sont fondamentalement différents de ceux de la France. Les forces militaires françaises ont une envergure telle qu'elles ont leurs propres facultés de médecine. Ce n'est pas notre cas. La comparaison est donc un peu boiteuse, mais nous n'avons pas actuellement de difficulté à recruter suffisamment de professionnels de la santé.
[Français]
Vous dites que la quantité de médecins militaires ne pose pas problème, mais qu'il manque de médecins civils. S'il y avait plus de médecins militaires, le recours à la sous-traitance civile serait moins nécessaire. Ne serait-ce pas une façon de résoudre le problème? Il s'agit ici du principe des vases communicants. S'il y a suffisamment de médecins militaires, mais qu'il faut faire appel à des ressources civiles qui, elles, sont insuffisantes, la solution n'est-elle pas de recourir à un plus grand nombre de médecins militaires?
[Traduction]
C'est bien évidemment une option. Cependant, compte tenu de la structure des Forces canadiennes et du nombre de postes militaires disponibles, si nous augmentons le nombre de professionnels de la santé en uniforme, il faudra procéder à des réductions quelque part ailleurs, car le gouvernement ne nous autorise qu'un nombre total fixe de militaires en uniforme. Le nombre de professionnels de la santé en uniforme est donc dicté par nos besoins opérationnels. C'est à ce nombre que nous devons nous limiter. Pour tous les autres services, nous faisons appel à des civils.
Merci, monsieur le président.
À l'issue de cette étude, nous allons sans doute vouloir formuler des recommandations à l'intention du gouvernement.
Vous avez notamment fait valoir que la flexibilité est essentielle pour réagir aux augmentations subites de la demande. Pourriez-vous nous dire quels sont les goulets d'étranglement qui entravent cette flexibilité? Quelles mesures concrètes pourriez-vous suggérer de telle sorte que les Forces canadiennes puissent répondre rapidement aux besoins urgents en matière de santé?
Eh bien, je peux vous parler seulement des besoins touchant les soins de santé, bien sûr. Au sein du MDN et des FC, je pense que toute l'expertise en matière de gestion, d'orientation et d'organisation des soins se trouve au sein des services de santé.
Dans un monde idéal, ce serait formidable si les dirigeants me disaient voici les objectifs que nous voulons atteindre, voici le niveau de service que les services de santé doivent offrir aux membres des Forces canadiennes, au pays et en mission, et voici le budget pour y arriver. Il faudra discuter de tout cela, naturellement, mais une fois que la décision est prise, ils peuvent simplement me dire de mettre cela en oeuvre et me demander, à titre de médecin-chef, de rendre des comptes. Une fois que cela est fait, c'est à moi de m'occuper de l'embauche.
Revenons à la santé mentale. Quelque 440 postes ont été approuvés et budgétés. Logiquement, si ces postes sont approuvés et budgétés, je devrais pouvoir embaucher les gens pour pourvoir ces postes. Toutefois, même si ces postes sont approuvés et budgétés, il faut que chacun d'eux soit approuvé par la fonction publique, par le chef du personnel militaire, le CPM, et par le sous-ministre, le SM. Il y a plusieurs niveaux d'approbation où l'on peut accepter ou refuser une candidature, et cela prend du temps. C'est un peu illogique. Une fois que les postes sont approuvés et budgétés, pourquoi ne me laisse-t-on pas, en tant que médecin-chef, embaucher les personnes requises avec un minimum de paperasse, en me demandant de rendre des comptes au sujet des objectifs que je devais atteindre?
Les objectifs sont clairs. Du côté du CEMD et du ministre, il n'y a jamais eu d'ambiguïté. Ils me donnaient des objectifs clairs: voici ce que vous devez accomplir.
Puis, chaque année, je me rendais au Conseil de gestion du programme, le CGP, et je leur faisais part des objectifs, de mes besoins et de ce qu'il fallait faire, et le CGP me répondait invariablement: « voici les ressources dont vous avez demandées ». Puis je me tournais vers l'appareil gouvernemental pour embaucher ces gens, et tout s'arrêtait. La fin de l'année financière arrivait, et je n'avais pas été en mesure de dépenser mon budget.
Comme je l'ai dit et ne cesse de le répéter, j'espère que ces fonds additionnels seront dépensés, mais je ne suis pas entièrement convaincu que ce sera le cas.
Je trouve cela déconcertant. En réponse à une autre question, vous avez mentionné que l'argent n'a jamais été un problème, etc., mais dans le dossier que nous avons reçu, on mentionne que vous avez exprimé vos inquiétudes au sujet des compressions budgétaires au vice-chef d'état-major de la défense, le vice-amiral Donaldson en ces termes: « Avant d'agir selon les instructions, je veux m'assurer que vous... comprenez toutes les implications... », etc.
Pourriez-vous concilier ces deux déclarations pour moi, à savoir que l'argent n'était pas un problème, mais que les compressions budgétaires annoncées vous inquiétaient beaucoup? Que s'est-il passé en fin de compte? Les compressions ont-elles été aussi problématiques comme vous le craigniez?
Les ressources que j'avais étaient adéquates avant les éventuelles compressions. Le problème n'était pas tant les compressions elles-mêmes que le peu de temps que nous avions pour soumettre des propositions, ce qui limitait, par le fait même, ma capacité de déterminer où les compressions seraient les moins douloureuses.
Le processus était mené de façon telle que j'avais les mains liées et que cela aurait donné lieu à des compressions qui, à mon avis, étaient totalement inacceptables. Tout allait très vite et j'ai senti que je n'avais d'autre choix — je me devais cela à moi-même plus qu'à quiconque — que de veiller à ce que la direction soit informée que le train s'engageait sur une voie, et qu'à défaut de corriger le tir, si on n'y prenait garde, il allait dérailler. Quand le train commence à prendre de la vitesse, il est difficile de l'arrêter. C'est pourquoi j'ai tenu à en informer le vice-chef, comme vous le savez, car je le répète, ses objectifs étaient clairs à mes yeux. Je suis allé le voir, et comme vous le savez, le train a été arrêté. Il n'a pas emprunté la voie prévue, et j'en suis heureux. Je pense que maintenant le processus se déroule de façon un peu plus méthodique et qu'on s'efforce d'établir les priorités. Mais soyons francs. Quand on coupe, cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de répercussions. Cela veut simplement dire qu'il faut décider où.
À cet égard, je dois dire que les expressions « trop d'effectifs surnuméraires » et « trop d'arrières », notamment, m'inquiètent, car les soins de santé ne font partie ni de l'un, ni de l'autre. Si vous réduisez la taille de l'administration, cela paraît simple, mais la plupart des gens qui y travaillent ne sont pas là pour offrir des soins, mais bien pour répondre aux demandes du Parlement, pour répondre aux questions des journalistes, etc. Si vous supprimez ces postes administratifs, il faudra quand même que quelqu'un réponde aux demandes. Je ne peux pas vous dire: « Si vous supprimez ces postes, ne venez pas me poser de questions ». Si vous supprimez ces postes, il faudra que quelqu'un d'autre fasse le travail, et cela veut dire qu'un clinicien devra s'en occuper et qu'il aura ainsi moins de temps à consacrer à ses patients, savoir combien d'entre eux ont été soignés pour telle ou telle maladie. Les compressions auront des répercussions.
Merci beaucoup, commodore Jung.
Je vous remercie, encore une fois, pour vos années de service et votre dynamisme, et je vous félicite pour le prix que l'OTAN a remis à l'équipe qui commandait l'unité médicale de rôle 3 à Kandahar. Cela témoigne de la qualité du commandement que nous avions lorsque vous étiez médecin-chef.
Pourrais-je vous poser une question très élémentaire à propos des soins accordés aux cas les plus graves? Je parle ici des blessures visibles, des blessés qui reviennent d'Afghanistan, de Panjwai. Nos soldats ont été la cible des insurgés. Donnez-nous un exemple. Un peloton effectue une patrouille et un de nos soldats pose le pied sur une mine antipersonnel ou piégée. Il perd une jambe. Il est loin de son véhicule et risque de mourir. Que se passe-t-il? Racontez-nous comment cela se passe, brièvement.
De plus, comment le Canada s'est-il distingué en Afghanistan dans ce genre de situation pour mériter l'admiration de ses pairs? Que pourrions-nous améliorer? Que devrions-nous améliorer avant de repartir pour une autre mission de combat?
L'un des éléments les plus importants, je pense, est la formation que nous avons donnée à notre personnel médical et nos soldats pour que dans les 10 minutes qui suivent une blessure — une période déterminante — ils s'assurent que le blessé ne perd pas tout son sang. La première cause de mort évitable sur le champ de bataille est encore aujourd'hui l'exsanguination.
Notre personnel médical et nos soldats ont donc été formés pour utiliser la technologie, des agents de coagulation sanguine, des techniques spéciales et des bandages spéciaux pour nous aider à sauver des vies sur les lieux mêmes de l'accident.
Nous devons ensuite une fière chandelle aux Américains qui ont mis en place le système MEDEVAC, qui envoie rapidement un hélicoptère sur place pour transporter le blessé à l'hôpital.
C'est aussi la formation que nous avons donnée à nos médecins, nos infirmières, et tous les gens sur place qui nous a permis d'obtenir le taux de survie le plus élevé en temps de guerre. À l'unité médicale de rôle 3, les soldats de la coalition avaient un taux de survie de 97 p. 100, le plus élevé en Afghanistan et en Irak.
Ensuite, encore une fois avec l'aide des Américains, le blessé pouvait être transféré à Landstuhl, où on stabilisait vraiment sa condition. On pouvait aussi collaborer avec un hôpital civil de soins tertiaires, habituellement un hôpital d'enseignement.
Le système dans son ensemble a été merveilleusement bien pensé. Je ne crois pas que l'on aurait pu faire mieux que 97 p. 100.
Dans le monde militaire, on parle souvent des soi-disant leçons apprises. Je n'utilise pas cette expression parce que trop souvent, malheureusement, on ne retient pas la leçon. On répertorie beaucoup de leçons.
Par définition, si on a appris une leçon, on ne devrait pas refaire la même erreur. Nous répertorions beaucoup de leçons, mais nous les reléguons ensuite parfois aux oubliettes pour mieux les répertorier à nouveau plus tard.
Nous avons eu une campagne extraordinaire. Le défi consiste maintenant à faire en sorte que ces leçons ne sombrent pas dans l'oubli, mais qu'elles restent bien ancrées dans nos mémoires, malgré la perte d'actualité éventuelle du conflit en Afghanistan et les compressions budgétaires.
Voici ma dernière question.
Parlez-nous des préjugés, car de toute évidence, en dépit des gestes concrets posés pour remédier à ce problème au sein des Forces canadiennes, il est loin d'être réglé. Il faut prendre conscience que certaines personnes souffrent et il faut aussi leur fournir toute la gamme de soins dont ils ont besoin.
Parlez-nous de la résilience. Devrions-nous nous concentrer sur le renforcement de la résilience dans un effort pour réduire, à l'autre bout, le TSPT et les autres BSO?
Comme je l'ai mentionné, je crois que les préjugés sont beaucoup moins nombreux. Les militaires ont même joué un rôle de premier plan dans les efforts visant à réduire les préjugés dans la société canadienne en général. Le général Hillier, le général Natynczyk, les commandants de l'armée, de la marine et des forces aériennes, et bien d'autres ont accompli un travail incroyable à cet égard et il faut les en féliciter.
Pour répondre à votre question au sujet de la résilience, personne ne sait. Personne ne sait si on peut, en fait, instiller la résilience. Nous pensons d'instinct que cela peut se faire, mais il n'y a pas de recherche qui indique que d'accroître la résilience peut aider les gens d'une façon ou d'une autre. C'est pourquoi le travail de l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans est indispensable pour s'assurer que nous allons dans la bonne direction.
J'aimerais soulever un point encore une fois. À mon sens, il se peut que le comité aggrave les préjugés. Des militaires continuent de souffrir des conséquences graves du TSPT, et c'est tragique. Toutefois, le fait que le problème soit toujours présent n'est pas l'indice d'une faille dans le système.
N'oublions pas que même dans les meilleurs hôpitaux au Canada, il y a encore des gens qui meurent du cancer et de maladies du coeur. Cela ne veut pas dire que ces hôpitaux sont incompétents pour autant. On utilise la meilleure technologie qui soit.
Certaines personnes, et c'est malheureux, ne guériront pas du TSPT. Nous savons maintenant qu'un tiers des gens qui en souffrent n'en guériront jamais. Même si nous utilisons la meilleure technologie, les meilleures données scientifiques et les meilleures ressources dont nous disposons actuellement, ils ne se rétabliront pas vraiment. Un tiers en guériront complètement toutefois. Le dernier tiers auront des rechutes, mais ils s'en tireront. Tout ne sera pas rose, mais ils reprendront leur vie en main. Un tiers des patients, donc, en souffriront toute leur vie. Ils peuvent venir ici vous raconter leur histoire qui est tragique, et ils vous disent la vérité, mais cela ne veut pas dire que le système les a laissé tomber.
Nous avons le temps pour un dernier tour, mais je vais limiter le tout à trois ou quatre minutes par parti.
Monsieur Harris, vous pouvez commencer.
Merci.
Commodore, j'ai oublié, je pense, de vous remercier pour vos années de service au sein des forces armées. C'est une période remarquable.
Je passe donc à ma question. Personne ne s'attend à des miracles, bien sûr, et tous les gens qui tombent malades ne peuvent être guéris. Ce que nous voulons toutefois, c'est que tous ceux qui peuvent l'être le soient.
Nous avons entendu un témoignage troublant jeudi dernier, celui d'un bombardier, qui nous a raconté avoir reçu un diagnostic de TSPT pendant qu'il se trouvait en Afghanistan. On l'a renvoyé au pays à bord d'un vol civil, seul, sans période de décompression et sans accompagnateur. Cela semble tout à fait contraire à ce que l'on entend dire à propos des soldats qui reviennent d'Afghanistan, quelle que soit la raison, même lorsqu'ils sont en parfaite santé. Ils ont une période pour décompresser. Ils reviennent dans leurs habits de soldat. Ils ne reviennent pas à bord d'un avion civil, seul, sans soutien.
Cela vous semble-t-il plausible? Comment une telle situation peut-elle se produire?
Encore une fois, il ne faut pas juger trop vite l'expérience d'une seule personne. Je suis convaincu que, de son point de vue, c'est ce qui s'est passé. Je crois toutefois qu'il faut creuser un peu plus la question, ce qu'on ne peut pas faire, bien sûr, pour des raisons de confidentialité. Il faut aller à la source pour connaître les vrais problèmes et le vrai diagnostic. De quoi souffrait la personne? Quels étaient les enjeux tactiques à ce moment qui ont donné lieu à cette décision?
Il s'agit d'une situation quelque peu inhabituelle, mais sans douter de la véracité des propos de cette personne, je dirais qu'il est difficile de se prononcer sans avoir un portrait global de la situation. Ce que je peux dire, c'est que...
Dans le monde, si vous voulez que je réponde par oui ou non, je présume que tout est possible. Si une personne est renvoyée au pays sans accompagnateur, c'est qu'il a été décidé, sur le terrain, qu'il n'y avait aucun problème pour que cette personne rentre au pays à bord d'un vol civil. Dans le cas contraire, elle aurait été accompagnée.
Je vais vous poser une autre question.
Nous avons abordé la question des rechutes, et c'est un sujet dont nous avons discuté jeudi dernier également. Un des témoins nous a dit que les commandants ou les officiers supérieurs leur avaient mentionné qu'en cas de rechute, ils seraient démobilisés pour des raisons médicales. L'idée était de taire leurs symptômes pour éviter d'en arriver là. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
De plus, l'ombudsman mentionne dans une section de son rapport « La ténacité dans l'adversité » que les personnes qui sont affectées à l'Unité interarmées de soutien du personnel perçoivent cela comme un adieu à leur carrière. Il précise que cette perception est un obstacle aux soins.
Pourriez-vous aborder ces deux éléments d'information sous l'angle des améliorations qui peuvent ou qui doivent être apportées?
En ce qui a trait à l'Unité interarmées de soutien du personnel, je ne suis pas certain qu'il y ait une réponse. Certaines personnes qui sont passées par là disent que c'est ce qui leur est arrivé de mieux et que cela a transformé leur vie. D'autres disent que dès qu'elles y ont mis le pied, le glas a sonné pour eux. Cela provient en grande partie de l'idée qu'ils en ont et probablement aussi de la micro-culture au sein de l'unité dont ils proviennent.
N'oubliez pas que j'ai mentionné que nous avons fait de grands progrès pour éliminer les préjugés du côté des hauts dirigeants. Je crois que nous avons encore des progrès importants à faire du côté des subalternes.
Je vais soulever un point, que j'ai souvent soulevé auprès des hauts dirigeants, à propos de ce que j'appelle l'autopréjugé. Souvent, les soldats sont prêts à passer l'éponge pour les autres, mais ils ont des préjugés profonds pour eux-mêmes parce qu'ils ne sont plus en mesure de fonctionner comme avant. Les préjugés viennent de l'extérieur et de l'intérieur. Il faut savoir d'où ils proviennent. Proviennent-ils de leurs pairs? Proviennent-ils du commandement de leur unité? Proviennent-ils en partie d'eux-mêmes? Il se peut que ce soit une combinaison de tout cela, selon la micro-culture de leur milieu.
Comme je l'ai dit, certains aiment l'Unité interarmées de soutien du personnel, et d'autres la détestent. Tout ce que je peux vous dire, c'est que l'unité répond à tous les besoins.
Pour poursuivre dans la même veine, on nous a aussi dit que lorsque quelqu'un va voir le psy, on indique sur le tableau « untel est chez le psy ». Certaines personnes n'aiment pas cela. J'ai même été surpris de constater que les militaires font ce genre de choses. Y a-t-il une raison à cela?
Je ne peux vraiment pas vous donner d'explication. Je sais qu'au sein des unités, on doit savoir où se trouvent les gens. Les superviseurs doivent savoir si quelqu'un va à la clinique, mais il serait déplacé qu'on indique que telle personne est allée voir un spécialiste en santé mentale, ou un psy, ou peu importe.
Tous les gens de l'unité savaient qu'il s'absentait trois heures pour voir un psychiatre. Je vois mal comment cela aide à la réintégration dans l'unité, et cela n'aide pas à la culture militaire.
Ce qu'a dit M. Kellway m'intéresse parce que c'est presque, si vous voulez, une question philosophique sur ce que l'on veut de nos forces militaires. On peut se demander ce qu'on entend par mesures d'adaptation.
Il me semble que d'un côté, le niveau d'adaptation doit être plus élevé pour les soldats malades et blessés que pour les civils. C'est que ces gens risquent leur vie. Il y a le concept de responsabilité illimitée, et le corollaire de ce contrat social c'est que c'est presque un contrat à vie. J'exagère à peine. C'est un contrat à vie parce qu'on sait trop bien que si la personne se retrouve sur le théâtre des opérations, elle risque fort bien d'en revenir malade ou blessée.
D'un autre côté, je sais qu'on veut des forces militaires de haut calibre et que chaque fois qu'un soldat tombe malade ou se blesse, quelqu'un d'autre doit prendre le relais d'une façon ou d'une autre.
Je comprends la raison, mais je ne suis pas sûr de comprendre à quoi on s'en prend. Je vous écoute depuis la dernière heure et demie, et il me semble qu'à certains égards, vous vous attendez à ce que des pressions soient exercées sur les médecins pour que des malades et des blessés soient envoyés dans la vie civile ou dans un centre de soins de santé pour anciens combattants.
Je ne sais pas. Je ne crois pas qu'on exerce ce genre de pressions sur le système de soins de santé. Je l'ai dit très clairement: des décisions médicales sont prises en fonction des antécédents médicaux. Ils sont très clairs à ce sujet. Nous n'abandonnons personne; en fait, il y a des gens dans les deux camps. Certains disent que c'est trop long, qu'ils veulent sortir, et d'autres disent que les décisions sont prises trop rapidement et voudraient qu'on étire le processus. Puisque nous sommes critiqués par les deux camps, nous sommes probablement sur la bonne voie.
Je reviens sur la question du contrat social. C'est une question que vous devriez poser au JAG. Cela fait partie du mandat des Forces canadiennes. Cela a été déterminé par la Cour suprême, je crois; la question de savoir dans quelle mesure les FC doivent offrir des mesures d'adaptation, et dans quelle mesure c'est un poids déraisonnable pour les Forces canadiennes, compte tenu de son mandat unique. À mon avis, c'est davantage une question d'ordre juridique, et cela devient ensuite une question politique d'importance, et comme je l'ai dit, c'est presque une question sociale, pour ce qui est de ce que l'on veut de nos Forces canadiennes.
En tant que fournisseur de soins de santé, je suis là pour les patients.
Merci beaucoup.
Vous avez parlé de la décennie de profonde noirceur et de l'état lamentable dans lequel se trouvait le système de soins de santé des militaires. Pouvez-vous nous donner les deux ou trois mesures les plus importantes qui ont été prises entre 1999 et 2010 pour remettre le système de soins de santé en bon état à l'aide du projet Rx2000?
Je pense que la mesure la plus importante a été le projet Rx2000. Il a été réalisé par les dirigeants, et si vous vous en souvenez bien, on a mis presque 11 ans à le terminer. C'était un long projet.
Pendant cette période, différents chefs d'état-major de la Défense et gouvernements sont passés, et il y a eu un appui constant, tout au long du processus, pour terminer le projet, et nous avons réussi. Nous l'avons terminé à temps, en fonction du moment fixé par Rx2000, et je pense que les coûts ont été inférieurs au budget prévu dans ce cas. C'est le fruit du soutien continu, durant toutes ces années, de différents gouvernements, de différents chefs d'état-major de la Défense, de différents dirigeants, qui disaient qu'il nous fallait ramener les choses au niveau voulu. Dieu merci, nous l'avons fait, car sinon, nous aurions été terriblement en retard en Afghanistan.
Ensemble, nous avons été suffisamment perspicaces pour suivre cette voie assez tôt, de sorte que nous étions prêts à répondre aux besoins de l'Afghanistan.
Compte tenu de l'universalité des services et de ce que nous demandons aux membres des Forces canadiennes dans le cadre de missions comme celle de l'Afghanistan, il existe naturellement des tensions entre la responsabilité d'un professionnel de la santé de protéger un diagnostic, de protéger les renseignements concernant l'état de santé d'un patient, et le devoir de diligence d'un commandant à l'égard de l'unité et de la personne pour qu'elle ne soit pas déployée si elle a une blessure de stress opérationnel ou s'il y a une autre raison qu'on ne peut percevoir et qui l'empêche d'être déployée. Pensez-vous que les tensions peuvent être apaisées pour la vaste majorité du personnel des FC, ou nous avons encore du travail à faire?
Je crois que pour la vaste majorité, ce que j'appelle des tensions constructives entre les deux forces en présence sont bien gérées. C'est l'une des choses que nous enseignons à nos nouveaux médecins, y compris les civils. Nous leur enseignons beaucoup de choses sur ces forces diamétralement opposées et sur la façon de faire ce travail délicat. La meilleure façon de le faire, c'est d'examiner le patient, d'examiner les capacités et les limites de la personne. Si l'on fait cela, tout tombera en place.
Dans l'ensemble, oui. Je crois que pour la vaste majorité, c'est bien géré. Toutefois, je le répète, comme je le dis toujours, cela ne signifie pas que nous voulons atteindre un taux de satisfaction de 100 p. 100 dans tout. Nous ne réussirons jamais à le faire.
J'aimerais connaître l'évaluation que vous faites du programme de formation En route vers la préparation mentale. C'est évidemment un programme dont ont parlé d'autres témoins. On a appris des leçons importantes et des mesures ont été prises. Quelle évaluation en faites-vous?
Je pense que ce n'est qu'un volet. Il faut examiner la situation dans son ensemble. Dans le cadre de la stratégie en matière de santé mentale, il y a la formation des recrues sur la santé mentale, et elle est déjà offerte. Pour différents niveaux de formation, tant pour les MR que pour les officiers, c'est intégré dans les exigences de la formation. Il y a la formation générale et ensuite le programme de formation En route vers la préparation mentale, qui comprend cinq stades, et c'est vraiment dans le cadre du déploiement. Si l’on ne se concentre que sur cela, il est trop tard, car on ne va pas former les gens, modifier leur façon de penser en profondeur en fonction de cela. Ils doivent le faire à partir du recrutement pour que la nouvelle façon éclairée d’examiner la santé mentale leur soit inculquée dès que le processus de recrutement commence, qu’il s’agisse d’un soldat ou d’un élève-officier.
Oui. Elle commence maintenant dès l’étape du recrutement. Toutes les recrues la suivent, et ce, dans le cadre du cours de chefs subalternes, de celui de chefs intermédiaires, etc.
Merci.
Commodore, au sein des Forces canadiennes, nous avons vraiment un excellent groupe de professionnels en santé mentale qui s’efforcent de fournir de très bons services aux membres, souvent dans des situations très stressantes et traumatisantes. Qui leur fournit des soins de santé mentale?
C'est une question très intéressante.
Vous connaissez le proverbe « médecin, guéris-toi toi-même ». Les professionnels en santé mentale ne sont pas si nombreux, surtout sur une base; c’est différent du système de santé civil, où il n’y a pas de superviseur. Un médecin du secteur privé se débrouille seul. Même si la pratique se fait en groupe, la personne doit demander des soins et les organismes médicaux ont aussi des programmes de médecins pour leur bien-être mental, mais c’est vraiment sa décision. Aucun système n'offre cette supervision, sauf dans les forces armées.
Dans les forces armées, il y a un médecin-chef de la base et une infirmière militaire chef sur chaque base. Nous avons un système hiérarchique selon lequel chaque personne est censée examiner l’autre personne. Bien entendu, comme vous le savez, il y a un processus annuel, le RAP, le Rapport d'appréciation du rendement, et un processus trimestriel, la RDP, la revue du développement du personnel. Nous sommes censés interroger les gens. Les membres du personnel médical ne sont pas différents des autres personnes, mais nous avons plus de connaissances dans le domaine médical. Nous faisons preuve de leadership. Si nous constatons cela, il s’agit de prendre les mesures qu’il faut pour fournir l’aide nécessaire.
Merci.
Commodore, je vous remercie d’avoir comparu devant nous en tant que membre retraité des FC, en tant qu’ancien combattant. Je vous remercie pour vos 31 années de services et les soins que vous avez encadrés et que vous avez vous-mêmes prodigués à des membres des Forces canadiennes. Je vous félicite pour votre retraite. J’espère qu’elle sera très agréable. Je sais que vous serez très occupé et qu’on fera appel à vos compétences, comme nous l’avons fait aujourd’hui. Je vous souhaite un très joyeux Noël et je vous offre mes meilleurs vœux pour 2013.
Monsieur Harris, je crois comprendre que vous voulez faire un rappel au Règlement.
Merci, monsieur le président.
J’aimerais soulever la correction d'une erreur au paragraphe 8 du rapport dissident de l’opposition officielle sur le rapport de notre comité La disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes.
Le Bureau du vérificateur général a souligné qu’on n’a pas fait référence au bon rapport en citant le vérificateur général adjoint, Jerome Berthelette. À la ligne 3 du paragraphe 8 de notre rapport dissident, on a fait référence par mégarde au rapport du vérificateur général sur les F-35. En fait, il était question du rapport de l'automne 2011. La citation est exacte, mais ce n'est pas le bon rapport.
On nous a demandé de corriger l'erreur, et c'est pourquoi je la soulève.
Merci.
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