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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 038 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 mai 2012

[Enregistrement électronique]

  (1135)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Pardonnez notre retard, mais il y avait des votes à la Chambre.
    Notre réunion sera écourtée, malheureusement. On m'informe que nos témoins ont un avion à prendre à 12 h 45 pour rentrer à Washington. Nous devrons donc ajourner plus tôt. Je ne pense pas que nous puissions faire trois tours de questions, mais nous essaierons d'en faire au moins deux. Je serai très strict pour ce qui est du temps. Quand votre temps sera écoulé, je vous interromprai afin que tous les membres aient du temps de parole.
    Nous poursuivons notre étude du concept stratégique de l'OTAN et du rôle du Canada en matière de coopération de défense internationale. Notre témoin, aujourd'hui, est le général Stéphane Abrial, commandant suprême allié Transformation, à l'OTAN. Il est aussi membre de l'armée de l'air française.
    Il est venu en compagnie de l'ambassadeur Ravic Huso, conseiller politique du commandant suprême allié Transformation, et du colonel Eric Autellet, adjoint exécutif du SACT.
    Je vous souhaite à tous la bienvenue. Nous sommes impatients d'entendre votre exposé.
    Alors sans plus tarder, général, nous vous écoutons.

[Français]

    Mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la défense nationale, je voudrais tout d'abord vous remercier de me donner l'occasion de contribuer à votre réflexion sur l'Alliance atlantique, à l'aune de sa vision de l'avenir et notamment de ses concepts stratégiques. J'en suis d'autant plus heureux que j'interviens deux jours après James Appathurai. Je pense apporter une perspective qui sera en phase avec la sienne, tout en y étant complémentaire.
    En tant que, de par ma fonction, garant de l'avenir militaire de l'Alliance atlantique, j'ai pu être associé de très près à la préparation du dernier concept qui a été adopté au sommet de Lisbonne, en novembre 2010, et notamment par le rôle de réflexion stratégique ou de think tank militaire, pourrait-on dire, qui incombe à mon état-major. Je suis également impliqué dans sa mise en oeuvre en tant que responsable de l'entraînement et des exercices au sein de l'OTAN, tout autant que comme acteur de ce que nous appelons le développement capacitaire.
    Il me semble particulièrement opportun de faire le point sur le dernier concept stratégique alors que nous approchons du sommet des chefs d'État et de gouvernement qui se tiendra, comme vous le savez, à Chicago dans moins de 15 jours.
    Permettez-moi donc, dans mon allocution d'ouverture, d'embrasser ces deux perspectives, soit le temps long du concept et le temps plus court du sommet, car en réalité l'enjeu dominant forme un tout. Je commencerai par quelques observations sur le dernier sommet, celui de Lisbonne, qui a été l'occasion de doter l'Alliance atlantique d'un nouveau concept stratégique, un document qui trace la voie pour l'Alliance atlantique à l'horizon de 2020.
    L'heure était en effet venue de s'accorder sur un tel document. Le concept précédent datait de plus d'une décennie, quand l'Alliance atlantique avait un tiers de membres en moins, et surtout avant les événements tragiques et si lourds de conséquences du 11 septembre 2001.
    Quels sont les axes saillants de ce concept? J'en dégagerai trois.
    Le premier est la volonté de faire face à un nouvel environnement de sécurité en mettant davantage en relief la sécurité coopérative, tout en réaffirmant la primauté de la défense collective. Cela concerne en particulier un dossier majeur, celui de la défense antimissile balistique en réponse au défi de la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs. Cette défense a été reconnue à Lisbonne comme une nouvelle mission de l'OTAN ou plutôt comme une nouvelle façon de remplir notre mission pérenne et essentielle de défense collective. Cela concerne également d'autres défis émergents tels que l'autre nouvelle mission définie par le concept stratégique à Lisbonne, la défense cybernétique.
    Le second axe saillant est le désir d'une plus grande ouverture à des partenaires. C'est la réponse à une mondialisation des questions de sécurité, qui nous invite à coopérer toujours davantage avec des pays partenaires tels que les 22 pays qui se trouvent en ce moment même à nos côtés en Afghanistan. C'est aussi la condition de la mise en oeuvre d'une véritable approche globale qui nous amène à accroître notre capacité à coopérer avec d'autres organisations internationales comme l'Organisation des Nations Unies et l'Union européenne, mais aussi avec des organisations non gouvernementales.
    Le troisième axe, enfin, est la volonté, selon les termes du préambule du concept stratégique, d'aider les alliés à obtenir « un maximum de sécurité pour l'argent qu'ils investissent dans la défense ». En d'autres termes, le concept appelait à la fois à la réforme et à l'efficience.

  (1140)  

[Traduction]

    Pour ces trois secteurs, le texte du concept stratégique adopté il y a 18 mois a déjà été transposé dans la réalité. Prenons l'une des menaces émergentes, la menace cybernétique. L'OTAN a maintenant instauré toutes les mesures nécessaires pour que sa capacité de réaction en cas d'incident informatique soit pleinement opérationnelle d'ici la fin de 2012.
     Dans ses efforts axés sur les partenariat et la communication, le quartier général de l'OTAN crée une interface permanente avec d'autres intervenants pour opérationnaliser une démarche détaillée de coopération civilo-militaire pour la gestion de crise et la coopération en matière de sécurité.
    Pour ce qui est du rapport coût-efficacité, la structure militaire de l'OTAN s'engage dans une vaste réforme, la plus importante depuis la réduction des effectifs, après la fin de la guerre froide. Le quartier général sera réaménagé en fonction des leçons tirées des opérations pour contrer les menaces émergentes, et l'effectif passera de 13 000 à 9 000 militaires.
     Comment le sommet de Chicago se démarquera-t-il de Lisbonne et du dernier concept? Il sera d'abord caractérisé par la constance des grandes orientations définies il y a 18 mois. J'en prends pour exemple les progrès réalisés pour transformer le programme de défense antimissile balistique de l'OTAN, fondé sur la capacité de défense dans un théâtre antérieur, et en faire une réalité. Le travail de base est maintenant terminé et nos dirigeants seront en mesure de dévoiler à Chicago ce que nous appelons la « capacité opérationnelle provisoire », un système qui protégera les populations et les territoires de tous les pays membres de l'alliance.
    L'Afghanistan est un autre exemple. Lisbonne a officialisé l'avènement d'une phase de transition, et Chicago témoignera de la constance de notre engagement à l'endroit de ce pays avec l'établissement d'un partenariat stratégique à long terme après 2014.
    Mais le sommet de Chicago ne traitera pas uniquement de la mise en oeuvre des décisions historiques prises en 2010, il cherchera également à habiliter l'OTAN à répondre à d'importants événements qui se sont produits depuis, et en particulier à deux phénomènes critiques. Le premier, une véritable surprise stratégique, est la succession d'événements politiques survenus dans le monde arabe et leur conséquence la plus directe pour l'OTAN: notre Opération Unified Protector. Cette opération a surtout permis de constater que l'OTAN conserve toute sa pertinence et son efficacité. Quelle autre organisation était prête à exécuter ainsi les résolutions du Conseil de sécurité, pratiquement au pied levé?
    Comme dans le cas de toutes nos opérations, nous avons aussi tiré de nombreuses leçons de l'Opération Unified Protector. La compilation de ces leçons constitue un volet important de la mission du SACT. Nombre d'entre elles portent sur les capacités, qu'il s'agisse de ressources, de commandement et de contrôle, ou d'instruction. D'autres nous ont sensibilisés plus encore à l'importance de faire intervenir les partenaires, notamment ceux de la région. Pendant l'opération, il était essentiel que les partenaires initiaux contribuent à l'un ou l'autre des rôles politiques et militaires pour que nous puissions obtenir les résultats désirés.
    Le deuxième phénomène est l'impact de la crise financière et économique sur les dépenses de défense. Dès 2011, par exemple, 20 de nos 28 pays membres avaient déjà réduit leurs dépenses de défense relativement aux niveaux antérieurs à 2008. En Europe, les budgets de défense totaux ont reculé de plus de 21 milliards de dollars américains au cours de cette période, en chiffres absolus. Comme vous le savez, cela correspond à peu près à l'ensemble du budget de défense canadien, et nous savons tous que d'autres réductions sont prévues.
    Compte tenu en particulier de ce dernier point, la question des capacités et, surtout, du ratio coût-capacités, revêt encore plus d'importance. C'est peut-être pour cette raison que le résultat original le plus important que l'on attend du prochain sommet est l'initiative de défense intelligente.
    La défense intelligente repose sur une simple observation. Nos pays ne peuvent pas se permettre de dépenser plus pour la sécurité, et bon nombre sont obligés de dépenser moins. Par ailleurs, les défis auxquels nous sommes confrontés ne disparaissent pas. Qu'ils se rapportent aux vulnérabilités de la mondialisation, à la dissémination de technologies susceptibles de créer des perturbations ou à d'autres changements, par exemple une nouvelle entente dans le Grand Nord, nous n'avons d'autre choix que d'améliorer le rapport coût-efficacité des ressources que les États allouent à la défense, notablement en intensifiant notre collaboration.
    Au cours de la dernière année, l'OTAN a sollicité le point de vue des alliés sur la façon d'adopter cette orientation. Je suis heureux de pouvoir dire que la réponse a été très positive. Une vision détaillée s'est dégagée, fondée sur trois piliers principaux.
    Le premier est la priorisation, c'est-à-dire un effort pour mieux aligner l'investissement au titre de la défense nationale avec les priorités collectives définies. C'est évidemment surtout une question de volonté nationale, mais l'OTAN peut l'appuyer en précisant le tableau des besoins collectifs, entre autres en améliorant les cadres établis, par exemple ce que nous appelons notre processus de planification de défense.
    Le deuxième pilier est la spécialisation. Peu de pays membres peuvent maintenir des capacités dans toute la gamme des besoins de l'alliance, et la spécialisation nationale devient inévitable, que cela nous plaise ou non. Ce qui est en jeu, c'est la possibilité que les pays suivent l'évolution actuelle et se spécialisent par défaut, entre autres en effectuant des compressions non coordonnées, ou qu'une voie nettement préférable soit adoptée, celle que nous appelons la spécialisation par dessein, c'est-à-dire une spécialisation issue d'une démarche d'ensemble réfléchie et cohérente.

  (1145)  

    Le troisième pilier est la collaboration multilatérale en matière de capacité. Ces derniers mois, j'ai collaboré à définir un ensemble de projets multinationaux qui pourraient modifier les attitudes à égard du développement des capacités. Sur les instructions du secrétaire général, j'ai parlé aux représentants des nations et j'ai recueilli des milliers de nouvelles idées pour coopérer dans de nombreux secteurs, dont le renseignement, la surveillance et la reconnaissance, la logistique et la maintenance de la protection de la force, et ce pour tous les éléments, l'approvisionnement, l'instruction et le soutien.
    Le Canada nous a apporté un solide appui, et je lui en suis reconnaissant. Il a par exemple assumé la direction du projet en s'engageant à faciliter l'interopérabilité de l'armement sur les aéronefs de l'OTAN, ce qui, comme tant d'autres propositions, prend tout son sens à la lumière des dernières opérations. Je dois ajouter que les projets de coopération, par leur nature même, contribuent tous à l'interopérabilité. C'est toujours un objectif clé de l'OTAN, et c'est une notion qui se trouve au coeur des activités de mon commandement.
    De fait, l'interopérabilité sera le thème principal d'une initiative commune des forces qui sera adoptée à Chicago, en synergie avec la défense intelligente. Grâce à des initiatives comme l'instruction multinationale améliorée et appuyée par des exercices ou un regain d'importance accordée à la technologie, elle vise à exploiter les gains et l'interopérabilité découlant des dernières opérations. Bref, la défense intelligente, c'est de posséder les capacités qu'il nous faut, et l'interconnexion des forces nous assure que ces capacités pourront se combiner.
    Bref, le sommet de l'OTAN à Chicago — le premier depuis l'adoption du concept stratégique, en 2010 — montre bien comment un document de ce genre peut aider l'alliance à progresser. Évidemment, un plan décennal n'est pas un engagement ferme, mais il donne à l'alliance une vision commune et acceptée qui pivote autour de ces trois tâches fondamentales essentielles que sont la défense collective, la gestion de crise et la coopération en matière de sécurité.
    Le prochain sommet confirmera hors de tout doute une orientation convenue à Lisbonne en matière de réforme, de défense antimissile et de partenariats, y compris dans le contexte de nos relations à long terme avec l'Afghanistan. Il ouvrira aussi de nouvelles perspectives importantes, en particulier grâce à une petite initiative de défense, et ces perspectives modifieront sensiblement notre façon de travailler au cours des prochaines années.
    Avec tous ces points à l'ordre du jour, je suis convaincu que le sommet de Chicago, le premier à se tenir de ce côté-ci de l'Atlantique en plus de 10 ans, enverra un message clair à notre public pour signifier que l'OTAN continuera de s'acquitter de ses responsabilités en matière de sécurité dans la région euro-atlantique et au-delà. C'est pourquoi ce sommet est si important, et je suis impatient d'y participer.
    Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs.

  (1150)  

    Merci, général.
    Je sais que les membres du comité sont conscients du fait que vous êtes le premier Européen nommé à la tête d'un important commandement stratégique de l'OTAN. Nous voulons vous féliciter de cette affectation. Auparavant, vous étiez chef d'état-major de l'armée de l'air française et vous êtes pilote de chasse de profession. Lors de l'Opération Desert Storm, vous commandiez la 5e Escadre de chasse de l'armée de l'air française. Vous avez beaucoup d'expérience et vous occupez depuis longtemps des postes de commandement.
    Nous allons commencer par des tours de sept minutes, avec M. Harris. Vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite la bienvenue, général Abrial.

[Traduction]

    Merci d'être venu discuter avec notre comité. Nous sommes très heureux de vous accueillir et de pouvoir vous poser quelques questions au sujet du nouveau concept stratégique de l'OTAN.
    Permettez-moi de commencer par le paragraphe 26 du document conceptuel. On y parle de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération. Je m'intéresse à la première affirmation, qui dit que l'OTAN cherche à assurer sa sécurité avec le plus faible niveau de forces possible. Il est aussi question de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération, des activités qui contribuent à la paix, à la sécurité et à la stabilité non seulement de l'alliance, mais du monde. La défense intelligente semble bien convenir à cela, puisque nous devons mener ce genre d'activité.
    Il est question de désarmement tant pour les armes conventionnelles que pour les armes de destruction massive, ainsi que pour la non-prolifération. Outre la réduction des effectifs militaires, qui passent de 13 000 à 9 000, par exemple, quels sont les efforts déployés par l'OTAN, en particulier avec ses nations membres, pour chercher à réduire ou à éliminer la possibilité d'une autre course aux armements, que ce soit les forces conventionnelles ou, évidemment, le nucléaire. Il se fait du travail du côté nucléaire. Vous pourriez peut-être nous en parler. Quelqu'un est venu, il y a quelques jours, pour nous parler de cela.
    Pour ce qui est des armes conventionnelles, est-ce qu'on s'efforce de les réduire, en passant à la prochaine étape, plus technologique? Je sais que la cybertechnologie est le nouveau secteur émergent et qu'il faut suivre le mouvement. Tous les pays qui s'inquiètent de cela le font. Qu'en est-il des armes conventionnelles régulières? Est-ce que nous nous efforçons d'éviter des dépenses massives pour l'achat de nouvel équipement?
    Merci beaucoup.
    Je n'aborderai pas la question du nucléaire parce que, comme vous le savez sans doute, le nucléaire ne s'inscrit pas dans mon mandat. Je n'ai aucune responsabilité à ce sujet ni au sujet de ce que les nations discutent en termes de mesures dissuasives futures et de postures différentes pour l'OTAN, qui seront définies à Chicago dans quelques semaines.
    Pour ce qui est des armes conventionnelles, oui, nous ne souhaitons nullement une course aux armements, au contraire. Dans le cadre de mes fonctions à l'OTAN, nous essayons d'établir les besoins de capacité pour l'avenir. La première rubrique de cette partie du document parle d'elle-même. Nous définissons les besoins de capacité minimaux. C'est sur cette base que nous demanderons aux nations d'examiner leur propre développement des capacités en fonction du niveau minimal de capacités militaires dont l'OTAN a besoin pour s'acquitter de sa mission, comme convenu par les chefs d'État et reflété dans le niveau d'ambition que nous avons décidé que l'OTAN pourrait atteindre. Quelles sont les capacités minimales qu'il nous faut pour accomplir la mission?
    Il est très important de signaler que nous faisons cela après avoir analysé ce que nous appelons l'orientation politique. Selon le concept stratégique, qui est renouvelé, ou un nouveau concept défini et convenu tous les 10 ans environ, nous produisons dans un cycle de deux à quatre ans ce que les nations appellent l'orientation politique. C'est une vision politique à jour de ce que l'alliance devrait faire. Du côté militaire, nous prenons ce document, qui est étayé par le concept de la plus récente analyse du contexte stratégique, pour définir les besoins futurs.

  (1155)  

    Je vais essayer d'être un peu plus précis. Prenons, par exemple, le développement de l'avion d'attaque F-35. Est-ce que c'est une technologie pour laquelle d'autres entités — disons la Russie et la Chine, qui se considèrent comme des joueurs importants — devront dépenser des sommes similaires si elles veulent mettre au point des technologies semblables et ainsi assurer une sorte d'équilibre? Pourquoi ne pas considérer cela comme un pas dans la direction, essentiellement, d'une course aux armements conventionnels? Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux que les trois organisations dont nous parlons — la Chine, la Russie et l'OTAN et les États-Unis, les partenaires — décident qu'il serait préférable de ne pas la développer? C'est un exemple que je propose.
    Mon prochain exemple relève peut-être de la spécialisation dont vous parliez, au sujet des défis du Grand Nord, et j'aimerais que vous nous précisiez un peu cela. Je pense au plan du Canada, qui veut construire des navires de patrouille militaire dans un secteur où je n'entrevois aucun défi militaire. Je ne suis pas certain de la position de l'OTAN à ce sujet.
    Pourriez-vous nous parler de ces deux questions?
    En ce qui concerne le choix d'un équipement précis pour les pays membres, l'OTAN n'a rien à dire. L'OTAN établit simplement la nécessité d'une capacité. Lorsque nous parlons de capacité, nous envisageons toute la gamme des activités, de la doctrine à l'instruction, y compris bien sûr l'infrastructure et l'équipement. Mais nous ne disons pas aux nations, qui sont souveraines, quel équipement elles doivent acquérir. C'est à la nation qu'il revient de prendre cette décision.
    Nous nous contentons de dire qu'il nous faudra être en mesure de mener telle et telle mission et d'utiliser les ressources qui conviennent au type de mission, que ce soit air-air, air-sol ou surface-air. Il incombe à la nation de déterminer la meilleure façon de procéder et le meilleur rapport entre les chiffres et la technologie et d'acquérir ce qui lui paraît nécessaire pour elle, en tenant compte des besoins de l'alliance et de ses propres ressources.
    Nous ne pouvons pas ignorer l'existence d'une technologie; il nous faut tenir compte des dernières avancées technologiques. Évidemment, dans le travail que mon commandement effectue avec l'industrie, nous examinons d'éventuels progrès technologiques. Nous voulons nous assurer que nous aurons accès à la meilleure technologie possible et que nous aurons aussi les moyens nécessaires pour désamorcer les projets de personnes mal intentionnées.
    Là encore, pour en revenir à votre question, nous n'avons rien à dire pour ce qui est du type d'équipement qu'une nation veut acquérir. Nous nous attendons simplement à ce que les nations acquièrent un certain type d'équipement.
    Merci. Votre temps est expiré.
    Monsieur Strahl, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, général, de votre visite et de votre témoignage.
    Je veux revenir sur la défense intelligente. C'est une expression que nous avons entendue quand nous examinions l'état de préparation des Forces canadiennes, l'objet de notre dernière étude. Il m'a paru intéressant que les témoins, et même différents éléments du spectre politique, interprètent différemment cette expression. Pour certains, c'est une question de réduction des capacités pour se concentrer sur un aspect particulier, alors que pour d'autres, c'est une question d'interopérabilité.
    Si le Canada a réussi à maintenir son budget de défense, c'est essentiellement parce que sa situation financière est très enviable. Quelle est la vision de l'OTAN pour les Forces canadiennes? Quel conseil pourriez-vous donner à un pays comme le nôtre, qui a tout l'éventail des capacités et qui en est fier? Est-ce que le concept stratégique de défense intelligente s'applique également à tous les pays de l'OTAN ou est-ce différent dans le cas des pays qui possèdent déjà un éventail complet?

  (1200)  

    Merci.
    L'initiative de défense intelligente a été lancée par le secrétaire général en février 2011, lors de la conférence de Munich sur la sécurité. L'initiative de défense intelligente repose solidement sur trois piliers: priorisation, spécialisation, et coopération multinationale. Il ne s'agit pas de réduire les capacités ni de suggérer que nous devrions moins dépenser pour la défense. L'objectif est de veiller à ce que, malgré les difficultés financières que toutes nos nations connaissent, nous puissions disposer des capacités qu'il nous faut pour remplir les missions que nos 28 membres décident de mener.
    Pour ce qui est de la priorisation, il nous faut veiller à ce qu'il n'y ait aucun conflit entre les priorités nationales et les priorités de l'alliance. Nous devons définir et discuter cela le plus possible dès le départ.
    La spécialisation ne signifie pas que l'OTAN demande à un pays d'abandonner quoi que ce soit ni qu'elle lui ordonne de faire quelque chose de précis. Nous voulons exploiter les forces que les pays possèdent déjà, s'ils sont prêts à en faire profiter les autres, et veiller à ce que les forces d'un pays puissent être mises à la disposition d'autres pays qui pourront alors se concentrer sur d'autres questions qui correspondent à leurs propres points forts.
    La coopération multinationale vise à déterminer dans quelle mesure nous pouvons collaborer en matière de développement des capacités. Aujourd'hui, la majorité des programmes de capacité, c'est-à-dire les programmes d'acquisition, sont nationaux. Certains sont multinationaux, mais ils sont rares. Nous aimerions que les attitudes changent, à long terme, et que les nations envisagent en premier lieu des projets multinationaux, qui pourraient alors devenir la règle plutôt que l'exception.
    L'approche intéresse toutes les nations. Si une nation pense qu'il y va de son intérêt et qu'elle a les ressources nécessaires pour continuer à s'intéresser à l'ensemble du spectre, l'OTAN ne la contredira pas. C'est une décision souveraine de cette nation. Le problème touche probablement plus les pays qui n'en ont pas les moyens et qui sont si faibles dans tous les secteurs du spectre qu'ils n'ont aucune efficacité. Certains pays ne peuvent rien faire. Certains pays n'auraient jamais accès à une capacité donnée s'ils ne travaillaient pas au niveau multinational. Au plan multinational, les nations peuvent développer de nouvelles capacités, moderniser celles qu'elles possèdent et parfois même conserver certaines capacités dont nous avons besoin, malgré la crise financière.
    Merci.
    Nous parlons donc d'interopérabilité. Dans notre étude précédente, celle qui portait sur l'état de préparation, il a été question de l'importance de l'interopérabilité, et pas seulement dans nos propres contextes. Le Canada agit toujours avec un partenaire international, que ce soit l'OTAN ou l'ONU.
    Comment l'OTAN collabore-t-elle avec les alliés pour accroître l'interopérabilité? On nous a parlé de nouvelles acquisitions. Qu'en est-il des forces et du matériel existants? Quel rôle joue l'OTAN pour que nous puissions tous fonctionner en harmonie dans le théâtre?
    Je dirais que, pour l'OTAN, tout se ramène à l'interopérabilité. Il faut que toutes les nations membres soient en mesure de fonctionner ensemble. De plus en plus, comme nous l'avons vu en Afghanistan et lors de la campagne de Libye, nous devons aussi accroître l'interopérabilité avec d'éventuels partenaires.
    L'interopérabilité est au coeur du mandat de mon commandement: nous définissons les besoins de capacité, nous travaillons dans le dossier de l'instruction. Le fait même que nous menions ensemble des activités d'éducation et d'instruction ainsi que des exercices fait intervenir l'aspect humain de l'interopérabilité.
    J'ai mentionné que nous avions une collaboration plutôt étroite avec des partenaires industriels pour envisager l'avenir, ce que les militaires considèrent comme les éventuels contextes d'engagements futurs et les technologies que l'industrie croit pouvoir développer pour demain. Nous nous efforçons d'assurer dès le départ l'interopérabilité.
    Quant aux ressources existantes, certaines sont déjà relativement interopérables, et certaines ne le sont pas. Une partie de notre travail consiste à trouver des façons d'ajouter l'interopérabilité, indispensable pour que nous puissions fonctionner de concert. Nous ne voulons certainement pas que tous possèdent les mêmes équipements. Cela n'est pas notre objectif. Ce que nous voulons, c'est que si certaines nations décident d'acquérir un matériel donné ou d'organiser de l'instruction et d'équiper leur propres forces, ces forces puissent communiquer et travailler ensemble.
    C'est au coeur du travail de mon commandement.

  (1205)  

    Merci, monsieur.
    Merci.
    Dans votre discours, vous avez parlé d'interopérabilité. Vous avez parlé de l'initiative d'interconnexion des forces. Est-ce ce dont vous parlez maintenant, la façon dont tous collaborent?
    L'initiative d'interconnexion des forces est une nouvelle initiative que le secrétaire général a lancée à Munich cette année, à l'occasion de la dernière conférence sur la sécurité.
    Elle comporte essentiellement trois aspects. Le premier est une amélioration de l'éducation et de l'instruction des particuliers. Le second est une amélioration des exercices, la réalisation d'un plus grand nombre d'exercices en commun. Le troisième est la technologie, de sorte que nous ayons tous au départ l'interface voulue, l'interopérabilité voulue.
    Tous ces aspects sont indispensables à mon travail, alors j'imagine que la mission du SACT sera élargie. Mais cela est extrêmement important, et je crois que le secrétaire général a raison de vouloir examiner cette question immédiatement. Les forces de l'OTAN, les forces des pays membres, travaillent ensemble dans le cadre de diverses opérations depuis 20 ans.
     Nous entrevoyons maintenant qu'après 2014, le rythme des opérations diminuera — c'est du moins ce que l'on espère. Si tel est le cas, nous devrons veiller à maintenir ce niveau d'interopérabilité que nous avons atteint dans le cadre de toutes ces opérations, et nous aurons besoin d'autres moyens: instruction, exercices, accent mis sur la technologie.
    Merci.
    Monsieur McKay, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, général, de contribuer à notre étude.
    Il est fort clair que les menaces futures, ou même les menaces actuelles, seront de plus en plus le fait d'acteurs non étatiques. L'OTAN est certainement une organisation étatique. À la suite de votre examen de la stratégie de défense intelligente, que pouvez-vous nous dire sur votre analyse des acteurs non étatiques? Si vous combattez des pirates en Somalie, ce n'est pas l'État de la Somalie que vous combattez, ce sont les pirates eux-mêmes. En Afghanistan, ce sont les Talibans, Al-Qaïda, ce genre de choses... Ce ne sont pas des États.
    En outre, comme l'OTAN est une organisation qui regroupe des État, il lui faut plus de temps pour prendre ses décisions — et c'est sans doute peu dire. Ces décisions sont en outre assujetties aux limites qu'un gouvernement peut vouloir imposer à une intervention.
    Pouvez-vous me dire comment l'OTAN s'adaptera à cette prolifération d'intervenants non étatiques? Comment cela affectera-t-il la circulation de renseignements et la prise de décisions relativement à une intervention?
    Merci.
    Oui. Avec 28 membres, il faut plus de temps pour prendre les décisions que si nous les prenions seuls. Pourtant, il n'a même pas fallu un jour pour invoquer l'article 5 après le 11 septembre, et il ne nous a pas fallu 11 jours pour arriver en Libye. Si vous comparez cela aux mois et même plus, à l'époque de la Bosnie et du Kosovo, je crois que c'est un bon exemple qui montre bien que même à 28 nous pouvons encore fonctionner et en arriver à des décisions relativement rapidement.
    Nous voudrions aussi signaler que nombre des risques que comportent les menaces et les défis d'aujourd'hui ne revêtent pas un caractère étatique, soit parce qu'il s'agit de petits groupes, soit parce que ce sont des menaces globales et difficiles à identifier. C'est le cas par exemple des cybermenaces.
    À l'OTAN, nous ne fondons pas nos efforts de développement des capacités et de définition des besoins sur des menaces perçues, mais plutôt sur le type de mission que nous pourrions devoir réaliser. J'en veux pour exemple la défense antimissile balistique. Cette défense ne vise pas un État en particulier. Elle vise à protéger nos territoires et nos populations contre une éventuelle attaque balistique limitée. Nous pensons qu'il est de plus en plus possible que cela se produise à l'avenir en raison de l'attitude de certains États, mais aussi de certains groupes, de certains intervenants non étatiques, parce que la technologie balistique prolifère, comme tant d'autres.
    Pour ce qui est des cybermenaces, nous nous intéressons de très près à la cyberdéfense. Nous avons une nouvelle mission, qui a été décidée à Lisbonne, un nouveau concept stratégique pour la défense antimissile balistique et la cyberdéfense. Nous assurerons cette défense principalement par l'entremise de la cellule de réaction aux incidents informatiques, à Bruxelles. Nous le ferons en fonction d'une norme d'excellence élaborée à Tallinn, en Estonie, pour des raisons évidentes. Nous sommes prêts à faire face aux attaques, d'où qu'elles proviennent.

  (1210)  

    Mais est-il vrai que l'organisation n'est pas plus forte que son membre le plus faible?
    Tous les systèmes de défense n'ont que la force de leur élément le plus faible.
    Oui. Dans un cyberespace, cela soulève de graves préoccupations, parce que si l'attaquant peut pénétrer le maillon le plus faible, alors tout le système est exposé. Que faites-vous dans ce cas?
    Voilà un excellent exemple de cybermenace. Les pays de l'OTAN ont décidé que l'OTAN assurerait la défense de ses propres systèmes. Nous sommes responsables des systèmes que possède l'OTAN. La cyberdéfense des systèmes nationaux relève de chaque pays.
    La cyberdéfense est généralement une question où il faut appliquer ce que nous appelons une approche d'ensemble. Elle ne relève pas uniquement du domaine militaire. Souvent, elle n'est pas du tout militaire: c'est quelque chose qui doit être réglé au moyen d'approches pangouvernementales dans chaque pays.
    D'accord. C'est curieux, parce que si le Canada a une cyberdéfense faible, cela peut affaiblir la cyberdéfense de l'OTAN.
    Je veux changer de thème pour les quelques minutes qui me restent et parler des véhicules aériens sans pilote. Évidemment nous avons des contraintes budgétaires, mais cela peut constituer un mode de surveillance intéressant, à tout le moins, et peut-être aussi un moyen d'attaque.
    J'aimerais connaître les intentions de l'OTAN à ce sujet et aussi savoir quelles politiques, le cas échéant, l'OTAN pourrait élaborer relativement aux exécutions sommaires. Ces interventions ont suscité une certaine controverse aux États-Unis, où dans un cas c'est un citoyen américain qui a été ciblé. Évidemment, nous sortons à peine du conflit libyen, où le général Bouchard déterminait les cibles, mais il examinait aussi chaque cas sur le plan éthique. Dites-moi ce que vous pensez des véhicules sans pilote et des aspects éthiques dont il faut tenir compte.
    À titre de commandant suprême allié Transformation et d'ancien chef de l'armée de l'air française, je suis d'avis que le nombre de véhicules aériens sans pilote va augmenter. Je ne dirais pas que nous aurons seulement ce type d'appareils à l'avenir, mais le rapport entre le nombre de pilotes dans les habitacles et le nombre de pilotes au sol évolue, et nous ne savons pas exactement où cela s'arrêtera. Je crois toutefois qu'il y a de plus en plus de situations où il nous faut des UAV.
    La décision récente de l'OTAN, par exemple, d'acheter des systèmes de surveillance terrestre pour l'alliance, des UAV de surveillance, est un bon exemple. Nous devons être en mesure de surveiller, d'examiner et peut-être de déceler les activités anormales avec des véhicules de grande autonomie.
    Un appareil avec pilote ne peut pas rester en vol aussi longtemps qu'un appareil piloté depuis le sol, et je pense donc que sur les plans technologique et opérationnel nous allons assister à une augmentation du nombre des UAV. La question éthique est incontournable. Nous devons la régler, et c'est parfaitement normal qu'il y ait cette vision éthique dans le processus décisionnel entre le niveau politique et le niveau tactique, sur le terrain.

  (1215)  

    Merci.
    Nous allons maintenant commencer notre tour de questions de cinq minutes. Les questions devront être brèves.
    Monsieur Norlock.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux témoins, merci d'être venus.
    Comme je n'ai que cinq minutes, il vous sera peut-être difficile de répondre à toutes mes questions.
    Certains opposants, non seulement ici mais à l'étranger, voudraient que les Forces canadiennes se débarrassent de leur capacité expéditionnaire et se concentrent sur les capacités de créneau. Cette approche est-elle souhaitable pour l'OTAN, ou l'OTAN compte-t-elle sur le Canada pour assumer une plus large part de ses capacités expéditionnaires avérées? J'ai constaté que dans certaines de vos réponses, général, vous disiez que l'OTAN ne refuserait jamais cela.
    Vous avez dirigé l'armée de l'air française et il vous incombait notamment de la doter du meilleur équipement disponible. Vous avez dit que la technologie était très importante pour l'avenir, et que si l'on était en mesure de le faire il faudrait donner aux militaires, en l'occurrence la force aérienne du Canada, l'équipement le plus avancé sur le plan technologique. Vous avez dit aussi que nous ignorions d'où viendrait la prochaine menace ou la prochaine attaque. La menace pourrait venir d'une nation qui a la meilleure technologie, et divers témoins ont affirmé au comité que la technologie furtive l'emportait sur la non furtive à tous les coups. Je me demande donc si vous pourriez commenter le type d'aéronef qui, selon vous, conviendrait le mieux à la défense aérienne et à la force de frappe aérienne d'une nation.
    Pour ce qui est de la question expéditionnaire, par le passé le débat a porté sur les moyens de défense collective par opposition aux capacités expéditionnaires. Selon moi, c'est une fausse question. Si vous regardez l'étendue géographique de l'OTAN, quand vous avez une situation de défense collective quelconque, nous pouvons déplacer nos forces sur de longues distances. Les forces doivent aller du Portugal à la Norvège, du Canada à la Turquie. Les distances sont expéditionnaires, alors selon moi, à l'exception de quelques rares ressources, il n'y a pas d'opposition entre défense collective et capacités expéditionnaires.
    Faut-il des activités de créneau? Je dirais que si les nations pouvaient maintenir tout l'éventail et ne pas se limiter à des créneaux, l'OTAN en serait ravie, évidemment. Plus l'organisation est en mesure de réagir dans l'ensemble du spectre, et mieux cela vaut.
    Si jamais une nation n'avait pas le choix, alors il serait bon que les membres de l'OTAN entament un dialogue où l'OTAN ferait office de facilitateur ou de coordonnateur pour déterminer quelle est la meilleure façon de se spécialiser. Je le dis parce que c'est une question de spécialisation de l'initiative de défense moderne, et cela se ramène à un thème qui a été beaucoup discuté, soit le partage du fardeau des deux côtés de l'Atlantique ou entre des nations précises. C'est une partie importante de la solidarité, prouver que chacun peut supporter une charge adaptée à ses capacités, et personne ne s'y oppose.
    La technologie est importante. L'efficacité d'une force, selon moi, tient à la combinaison optimale de technologie et de personnel. Vous pouvez bien disposer de la meilleure technologie, si vous n'avez pas les bonnes personnes ou si vous avez les bonnes personnes mais qu'elles ne sont pas bien formées, alors la technologie ne vous sera pas très utile.
    Nous nous devons d'être en mesure de donner à nos forces, aux militaires que nous enverrons affronter le danger, la meilleure technologie possible et imaginable, pas une technologie à 120 p. 100, selon moi, mais la meilleure technologie que nous puissions nous offrir, pour pouvoir ensuite regarder ces gens dans les yeux et leur dire que nous avons tout fait pour qu'ils aient les moyens de mener à bien la mission que nous, la nation, leur avons confiée.
    Quel est le meilleur aéronef? Si vous posez la question à un aviateur français, vous connaissez la réponse.
    Il vous reste 30 secondes.
    Merci.
    Je sais qu'il faut rester neutre, mais l'un de nos débats porte sur la nécessité de doter nos troupes du meilleur équipement disponible pour effectuer les missions que notre pays a toujours pu accomplir. C'est dans ce contexte que je posais la question au sujet des capacités expéditionnaires.
    Sur le plan mécanique, est-ce que l'OTAN n'aurait pas plus de difficulté si une nation dotée de capacités expéditionnaires décidait de ne plus les partager? Vous auriez une carence, comment y feriez-vous face?

  (1220)  

    Selon moi, la plupart des capacités aujourd'hui sont doubles. Vous pouvez les utiliser pour la défense collective ou dans un contexte expéditionnaire... Nous n'achetons pas les capacités; nous les ciblons, et donc il s'agirait uniquement de capacités expéditionnaires.
    Selon moi, certaines des capacités que nous développons dans un but de défense collective ne sont pas très mobiles ni déployables. Mais tout ce que nous achetons dans un but expéditionnaire peut aussi être utilisé pour la défense collective. Je ne pense donc pas qu'il y ait vraiment de conflit dans ce domaine.
    Merci.

[Français]

    Madame Moore, vous disposez de cinq minutes.
    Cela nous fait plaisir de vous recevoir aujourd'hui.
    J'aimerais revenir sur le concept de smart defence, ou défense intelligente. Comment, avec ce concept, peut-on établir une collaboration entre les pays européens membres de l'OTAN et les pays d'Amérique du Nord membres de l'OTAN? Comment ce concept s'inscrit-il dans les deux continents?
    Merci beaucoup.
    J'utilise très souvent le terme « smart defence » même quand je parle en français, car la traduction exacte pourrait être « défense astucieuse », mais cela ne fait pas très sérieux, ou « défense intelligente », ce qui fait un peu pédant. J'hésite, mais on essaie de faire mieux quoi qu'il arrive.
    Dans le cadre de mes responsabilités, ayant été nommé par le secrétaire général comme l'un de ses deux envoyés spéciaux pour la smart defence, je travaille très étroitement avec l'Union européenne, et plus particulièrement avec l'Agence européenne de défense qui est chargée de l'initiative de l'Union européenne appelée pooling and sharing et dont l'esprit et la philosophie sont exactement semblables aux nôtres. En effet, on cherche à déterminer comment on peut mieux mettre en commun des moyens et développer des choses ensemble pour faire face à une situation financière critique.
    Comment cela se traduit-il? Cela se traduit par le fait que, quel que soit le sujet abordé, nous commençons par échanger avec nos partenaires de l'Union européenne pour nous assurer que nous ne travaillons pas sur la même chose ou que, si nous travaillons sur le même sujet, que nous travaillons sur deux aspects différents ou deux phases différentes du développement d'un projet. Cela fonctionne très bien, mais c'est un travail continu.
    Vous comprendrez bien que l'Union européenne demande à ses membres de lui fournir des idées et que nous demandons aux pays membres de l'OTAN de nous fournir des idées. Les idées sont les mêmes. Une fois que les nations ont proposé les mêmes idées aux deux institutions, elle se tournent vers nous et demandent pourquoi il y a dédoublement. C'est pourquoi nous commençons nos échanges ainsi: afin d'éviter ce dédoublement. Nous arrivons à un tel point de compréhension et de connaissance mutuelles que nous parvenons maintenant à prouver la complémentarité des deux institutions. Ainsi, les projets développés par l'Union européenne et l'OTAN sont vraiment utiles tous deux pour une meilleure sécurité de défense de chacun des pays membres et, bien sûr, de chacune des deux institutions.
    Un bon exemple est le domaine médical, et plus spécifiquement le soutien médical aux opérations. Il y a deux projets en ce moment: l'un défendu par l'Italie et l'autre par la France. L'un est mené par l'Union européenne et l'autre par l'OTAN. Ils se complètent parfaitement, de manière à nous permettre d'améliorer la couverture médicale, c'est-à-dire le soutien médical apporté aux gens qui pourraient être blessés lors d'opérations.
    Un autre exemple est le ravitaillement en vol. On a beaucoup parlé du ravitaillement en vol lors de la crise libyenne. On a alors dit qu'il y avait une lacune foncière. Du côté de l'OTAN, nous avons regardé cela et, dans nos analyses, il apparaît que l'OTAN ne manque pas d'avions ravitailleurs en vol. Par contre, les alliés européens de l'OTAN en manquent. Le nombre global est bon, mais le problème est qu'ils sont presque tous de ce côté-ci de l'Atlantique. Il en manque donc un peu du coté européen pour qu'il y ait un bon équilibre. Après discussion avec les amis de l'Union européenne, on en est venu à décider que l'Union européenne, en ce moment, portera un projet de développement de capacité dans le domaine du ravitaillement en vol, un projet qui concernera uniquement les pays européens. Cependant, cette capacité servira aussi au renforcement de la capacité globale de l'OTAN, puisque 21 nations sur 28 sont les mêmes.
    Voilà comment nous travaillons sur les concepts, mais aussi projet par projet. Nous continuons à travailler sur la façon de faire pour nous compléter.

  (1225)  

    Lors d'un déploiement ou d'une mission, fait-on une étude économique pour savoir si on a à déployer des avions de chasse, des navires ou quoi que ce soit d'autre, pour savoir de quel pays on peut utiliser les ressources pour que ça entraîne le moins de coûts possible pour l'OTAN? Si on déploie des choses en provenance du Canada, des États-Unis ou d'un pays d'Afrique du Nord, les coûts sont plus élevés qu'à partir de l'Europe. Ces études sont-elles faites avant les déploiements de matériel ou de ressources?
    De manière générale, nous recherchons toujours l'approche la plus économique possible pour toutes les activités, mais quand il s'agit d'une opération réelle comme celle en Libye, il revient à chaque nation de proposer sa propre contribution. Il faut aussi garder en mémoire un principe de base de la solidarité au sein de l'OTAN: les coûts sont assumés par la nation qui apporte une contribution. Donc, ce ne sont pas des coûts supplémentaires pour l'OTAN. Il n'y a pas une caisse de l'OTAN comme telle qui va payer pour une opération et qui paiera différemment selon que les forces viennent du Canada ou de l'Italie, par exemple.
    Il revient à chaque pays de décider, d'abord, du bien-fondé d'une opération; c'est ce qui s'est passé en Libye. Vingt-huit pays ont dit qu'il fallait y aller. Il revient ensuite à chaque pays, de manière tout à fait souveraine, de décider comment il va contribuer à cette activité. C'est ainsi que pour l'opération en Libye, encore une fois, il n'y a eu que huit membres de l'OTAN qui y ont contribué physiquement. Cependant, l'ensemble des pays membres y ont contribué par l'entremise de la structure de commandement et des quelques éléments financiers en commun qui ont été mis à disposition. Pour ce qui est de la manière dont les forces sont générées pour une opération, c'est chaque nation qui décide d'y contribuer avec tel ou tel type d'équipement, tel ou tel nombre de personnes, et qui en assumera les coûts.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Chisu.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, général, d'être venu aujourd'hui.
    J'ai une question au sujet de la transformation. Cela pourrait englober la transformation de nos modes de collaboration les uns avec les autres, à l'intérieur de l'OTAN et avec d'autres pays qui ne sont pas membres de l'organisation.
    Comment l'OTAN travaille-t-elle avec les nouvelles nations membres et, évidemment, avec les nations non membres qui sont ses partenaires?
    Je pose cette question en raison d'une expérience que j'ai vécue en Bosnie et en Herzégovine, quand je travaillais avec les soldats britanniques et hongrois. Leurs systèmes de communication n'étaient pas compatibles. J'étais le seul à parler hongrois et anglais, et c'était un problème. J'ignore si c'est la même chose pour les communications en Afghanistan, si le système britannique est en mesure de communiquer avec le système canadien, le système canadien, avec le système français, etc.
    La transformation est un beau mot qui a de nombreuses définitions. C'est difficile. Je vais essayer de l'expliquer simplement, mais essentiellement mon travail comprend deux volets. D'une part, nous nous intéressons à l'appui aux opérations en cours, l'adaptation à court terme à des situations changeantes, et d'autre part, nous réfléchissons à la transformation à long terme, comment s'assurer que les forces que nous allons mettre sur pied en vue du long terme seront adaptées à ce que nous envisageons comme environnement futur.
    L'avenir continuera toujours de nous surprendre. J'ai mentionné au sujet du printemps arabe que l'opération en Libye était une surprise stratégique. Si vous regardez l'histoire militaire au fil des siècles, c'est une succession de surprises stratégiques. Si vous analysez l'histoire, cette série de surprises, vous constatez que ceux qui ont pu repousser la première attaque et qui ont survécu à cette première attaque — la première surprise — ont généralement réussi à prendre le dessus à long terme. Notre but n'est pas de dire que nous ne serons plus jamais surpris, mais que nous nous adapterons, que nous pourrons réagir et, au bout du compte, remporter la victoire.
    Quand nous acceptons un nouveau membre à l'OTAN, nous travaillons très fort avec ce pays pour qu'il respecte les normes de l'OTAN. C'est une partie de mon travail, à titre de commandant allié Transformation. Nous aidons les nations relativement à tous les aspects de la transformation, de leurs propres documents stratégiques nationaux jusqu'à la façon de former un nouveau corps de sous-officiers, par exemple. Certains pays n'en ont pas. Il faut leur montrer ce que nous faisons et comment nous travaillons et comment ils peuvent atteindre la norme exigée à l'OTAN. Cela fait partie de ce que nous appelons la phase d'intégration. Nous venons de terminer cette phase avec deux pays qui ont récemment été acceptés au sein de l'alliance.
    Avec nos partenaires, nous avons d'autres mécanismes qui permettent un maximum d'échanges, pour qu'au moins lorsque nous collaborons avec eux nous soyons interopérables et que nous n'ayons pas de difficultés comme celles que vous mentionnez. J'utilise l'exemple de la campagne de Libye. L'une des nations partenaires, un pays européen très puissant, a largement contribué à la campagne. Il a détaché des avions de combat, mais nous avons découvert que nous ne pouvions pas les ravitailler parce que nos systèmes de carburant étaient incompatibles. Le problème a été réglé en quelques jours. C'était un problème que nous aurions dû relever plus tôt. C'est une partie du processus d'apprentissage, veiller à être pleinement interopérable dès le départ.
    Votre question au sujet de l'échange d'information, de la communication, soulève un aspect essentiel. Elle se rattache à une question qu'on m'a posée précédemment sur la façon d'échanger l'information. Nous devons adopter une nouvelle attitude. Nous devons nous assurer que nous passons de l'ancien besoin d'en connaître à l'obligation de partager, parce que de cette façon nous sauverons des vies et nous serons plus efficaces. Mais nos systèmes doivent aussi pouvoir communiquer entre eux. C'est pourquoi mon commandement a élaboré pour l'Afghanistan ce que nous avons appelé le réseau de mission afghan. C'est un réseau élémentaire auquel chaque pays, quand il décide de le faire, peut raccorder même ses systèmes secrets pour échanger de l'information délicate, ce qui peut sauver des vies et améliorer l'efficacité des opérations. C'était un réseau très précis, constitué pour l'Afghanistan. Maintenant, nous passons à l'étape suivante, nous allons tenter d'élaborer un réseau plus générique, qui pourra être monté dans le cadre de toutes les opérations.
    C'est le genre de choses que nous faisons, au commandement suprême allié Transformation.

  (1230)  

    Avez-vous...
    Monsieur Chisu, votre temps est expiré, nous devons passer au suivant.
    Monsieur Kellway, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins. Merci d'être venus aujourd'hui. Cette discussion a été fort intéressante jusqu'à maintenant, fort utile.
    Je vous demande d'être patient, compréhensif et tolérant, car je voudrais examiner un peu plus en détail certains des concepts et des définitions dont vous avez parlé. J'espère que cela ne vous paraîtra pas redondant, mais il me semble que d'une certaine manière nous utilisons des termes ici qui ont peut-être un sens un peu différent pour vous.
    L'un des termes clés est l'interopérabilité. Je crois vous avoir entendu dire, et j'aimerais que vous le précisiez, que l'interopérabilité ne visait pas à ce que tous utilisent le même équipement, mais qu'il fallait la concevoir en fonction de la spécialisation par dessein. Autrement dit, la notion que tous pourraient avoir le même équipement ne inscrite pas dans la défense intelligente ni dans le concept de spécialisation par dessein. L'interopérabilité ne signifie pas que vous pouvez prendre un militaire d'un pays quelconque et lui confier du matériel d'un autre pays, ni que tous conduisent les mêmes véhicules ou utilisent les mêmes aéronefs. Est-ce bien cela?
    Je ne vois pas le lien que vous faites avec la spécialisation, mais pour ce qui est de l'interopérabilité, oui, c'est précisément cela. Nous ne préconisons pas un seul type de char, un seul type d'aéronef, un seul type de navire, un seul type de carabine. Nous disons que deux unités, deux soldats qui combattent côte à côte doivent pouvoir travailler ensemble. Il faut qu'ils puissent échanger l'information dont ils ont besoin, se parler, savoir ce qu'ils peuvent attendre du voisin. Ils ont un type d'instruction similaire, un niveau d'instruction similaire, pour que les commandants sachent ce qu'ils peuvent attendre de leurs troupes, etc.
    Dans un contexte interopérable, vous êtes distinct, mais vous collaborez. Cela commence par l'attitude, par l'esprit évidemment, avec l'éducation et l'instruction.
    Permettez-moi d'insister un peu. L'idée que tous auraient le même matériel semble presque contredire le concept d'interopérabilité comme on le comprend sous l'angle de la spécialisation par dessein. Autrement dit, ces forces de l'OTAN ne sont pas vraiment interopérables ni spécialisées par dessein, si toutes utilisent le même aéronef, en quelque sorte.
    La notion d'interopérabilité, lorsque tous utilisent le même équipement, me semble — et j'aimerais savoir ce que vous en pensez — contraire au concept de spécialisation par dessein.

  (1235)  

    La spécialisation par dessein ne signifie pas que nous allons jusqu'à déterminer le type d'équipement, si une nation décide de se spécialiser et de partager avec d'autres un savoir-faire donné dans un domaine donné. Cela ne signifie pas que tous utilisent le même équipement.
    Merci.
    Vous avez dit précédemment que votre planification et votre état de préparation étaient axés sur le concept de mission. Lorsque vous envisagez d'éventuelles missions pour l'avenir, est-ce le genre de planification que vous faites? Vous déterminez qui va faire quoi à l'avenir? Y a-t-il ce genre d'état de préparation? Pour une mission donnée, vous prévoyez un rôle pour le Canada, un autre pour la France, quelque chose comme ça?
    Regardez la Libye, il ne semble pas que la spécialisation ait joué, puisque le Canada y a contribué dans les airs et en mer.
    Non, nous n'avons pas l'intention d'assigner à l'avance les missions à une nation ou à un groupe de nations. Nous voulons assurer tous les aspects de la défense intelligente, mais globalement, à l'avenir, l'organisation aura les capacités nécessaires pour remplir les missions que nos chefs d'État choisiront. Pour l'instant, nous ignorons quelles seront ces opérations, alors nous nous concentrons pour faire en sorte que l'alliance — les 28 membres — ait des capacités à la hauteur de ses ambitions. Comme vous le savez, cela signifie que nous devons pouvoir exécuter deux grandes opérations interarmées, comme nous les appelons, et six petites opérations interarmées, celles qui peuvent concerner un seul domaine — aérien, maritime ou terrestre, mais à petite échelle. Nous ne désignons pas d'adversaire précis. Nous avons une définition au niveau politique de ce qu'une grande opération ou une petite opération signifie, et nous travaillons pour définir les capacités correspondantes.
    Il incombe à la nation de décider ce qu'elle veut faire de sa propre institution de défense. Nous essayons d'assurer une cohérence d'ensemble, d'où l'importance de coordonner la réflexion et d'échanger des points de vue entre les pays membres sur ce que pourraient être les grands axes d'évolution des institutions de défense, afin de pouvoir coordonner et maintenir la cohérence globale de l'alliance.
    Merci.
    Madame Gallant, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Si des nations veulent le même équipement et qu'elles ont les mêmes besoins, quels avantages pourraient-elles tirer d'une collaboration pour l'acquisition de cet équipement?
    L'avantage principal — et le plus évident — serait l'économie de coût. Si deux, trois ou quatre nations décident d'acquérir un certain type d'équipement ensemble, et si elles peuvent éviter d'élaborer des cahiers des charges nationaux, cela ajoute au fondement commun du programme d'acquisition, et ces nations économiseront de l'argent et du temps. Comme les budgets de défense sont très limités, cela permettra à ces mêmes nations de continuer à entretenir leurs capacités dans d'autres domaines où d'en élaborer de nouvelles, si elles croient qu'elles devront exécuter de nouvelles missions ou relever de nouveaux défis.

  (1240)  

    Alors sur le plan de l'interopérabilité, elles deviennent naturellement interopérables?
    C'est utile, évidemment.
    D'accord. Est-ce qu'il serait encore plus utile pour le succès des missions de donner aux alliés, après avoir développé ensemble un équipement, la possibilité de se raccorder à cet équipement ou d'ajouter différentes capacités?
    Je suis désolé, je n'ai pas bien compris votre question.
    Certains pays veulent parfois qu'un équipement offre une capacité précise et elles l'ajoutent de leur propre chef, mais un autre pays peut décider plus tard qu'il lui faut cette même capacité, alors il pourrait enlever ce qu'il utilisait et le remplacer par la nouvelle capacité.
    L'aspect coopération multinationale de la défense intelligente présente une difficulté particulière, et c'est de rapprocher les calendriers et les cahiers des charges des nations. Nous avons constaté par le passé que la collaboration au plan multinational n'est pas toujours la meilleure solution. Nous avons tous eu des expériences où le passage à l'échelle multinationale a entraîné plus de retards et plus de coûts sans peut-être produire un résultat optimal. Nous voulons profiter des expériences passées pour définir les critères adéquats afin que lorsque nous faisons certaines choses ensemble nous en tirions des avantages sans créer d'inconvénients.
    Du point de vue conceptuel, par exemple, nous développons une notion que nous appelons la proximité stratégique: pourquoi certaines nations voudraient-elles faire des choses ensemble dans un groupe donné pour un projet donné. C'est peut-être pour des raisons de proximité géographique régionale. Il peut y avoir des aspects culturels et linguistiques, des antécédents de coopération réussis, par exemple entre quelques nations qui utilisent le F-16 en Europe — de la Norvège au Portugal et à la Belgique, etc. Les opérations menées avec succès par ces nations peuvent les inciter à entreprendre un autre projet dans un autre domaine.
    Il peut s'agir de nations qui partagent la même vision stratégique. Je songe par exemple au tout récent traité franco-britannique de Lancaster House sur la collaboration dans un contexte de défense. Nous voulons avoir les meilleures chances de succès pour chaque projet. Cela ne signifie pas que tous les regroupements sont identiques. Au contraire, nous avons quelque 25 projets qui seront entérinés à Chicago et nous avons 200 idées de plus que nous étudions pour poursuivre le travail par la suite.
    Les groupements ne se ressemblent jamais les uns les autres. Chaque projet réunit de trois à huit ou neuf nations, et tous ces groupements sont différents. Pour chaque thème, il y a un élément de proximité stratégique qui vous donne les meilleures chances de succès. C'est ce que nous étudions.
    Depuis une décennie, l'OTAN envisage la création d'une force de réaction rapide, mais ce projet a évolué avec le temps et la réaction n'est plus aussi rapide. Nous avions des gens prêts à s'entraîner ensemble puis à travailler ensemble sur le terrain — je ne parle pas, bien sûr, de l'Opération Unified Protector, qui a été couronnée de succès.
    Est-ce que nous envisageons encore de créer cette force de réaction rapide ou est-ce que nous avons dilué le projet et allongé les délais de réaction pour minimiser les coûts?
    Nous poursuivons sur cette voie. L'OTAN continuera de préciser le concept de force de réaction de l'OTAN, que nous avons maintenant depuis des années, comme vous le disiez si justement, et qui n'a jamais été utilisé, pour diverses raisons.
    L'une des raisons, par exemple, c'est que lorsque vous mettez des forces sur pied pour une rotation d'intervention de l'OTAN — cela durait six mois par le passé et c'est maintenant un an —, vous devez les préparer 18 mois à l'avance. Vous garantissez que les éléments fournis par les nations auront l'habitude de travailler ensemble, du quartier général jusqu'au niveau des forces. Mais la composition de la force n'est pas toujours adéquate pour les opérations qui se présenteront dans quatre ou cinq mois, et les nations qui ont accepté de fournir des effectifs à la force d'intervention de l'OTAN ne veulent pas nécessairement participer à une opération donnée. Nous avons eu ce cas en Libye, où huit pays ont décidé de contribuer matériellement alors que d'autres se sont abstenus. C'est pourquoi chaque fois qu'une opération a été lancée par le passé nous avons dû constituer une nouvelle force spéciale.
    Nous maintenons la force d'intervention de l'OTAN pour deux raisons: premièrement, parce que nous croyons encore qu'il est utile d'avoir des forces prêtes à intervenir, et deuxièmement, parce que c'est un excellent outil de transformation et de formation. Cette période de 18 mois pendant laquelle ces forces s'entraînent ensemble pour atteindre un certain niveau de préparation est une période de transformation. L'année au cours de laquelle ces forces sont sur pied d'alerte est une excellente occasion de formation. Nous voulons conserver cet avantage.

  (1245)  

    Merci.
    Il est presque 13 h 45, et je sais que vous voulez partir entre 13 h 45 et 13 h 50. Seriez-vous disposé à répondre encore à au moins deux petites questions? Deux de nos députés n'ont pas encore eu l'occasion de vous parler.
    Nous n'aurons pas cinq minutes complètes pour chacun, parce que le général Abrial et sa délégation ont un avion à prendre.
    Monsieur Brahmi, vous pouvez poser au général la question qui vous brûle les lèvres, puis je laisserai M. Alexander en poser une à son tour.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, général.
    Puisque je n'ai qu'une seule question, j'aimerais parler du fait que le Canada s'est retiré de deux programmes. Je pense que c'est un peu votre aire d'expertise, puisque ça concerne les AWACS et la surveillance par véhicule aérien sans pilote. J'aimerais que vous parliez des conséquences que peut avoir pour l'OTAN, de façon générale, le fait que le Canada se soit retiré de ces deux programmes.
    Tout d'abord, cela n'aura pas de conséquences sur l'OTAN, d'une manière générale. Il y aura des conséquences pour les nations qui contribuent à ces programmes, puisque le partage du fardeau et des coûts sera différent. L'OTAN continuera à avoir ces capacités. Dans le domaine des AWACS, il n'y a absolument aucun doute, la mission existe depuis très longtemps. L'unité même existe et va perdurer.
    En ce qui a trait au domaine de la surveillance, de la connaissance et du renseignement, la capacité alliée de surveillance terrestre qui vient d'être achetée fera partie d'un ensemble beaucoup plus vaste. C'est une des initiatives qui seront agréées à Chicago, sur la base d'une proposition commune faite par les États-Unis et la France. Nous allons essayer d'élargir le spectre de cette fonction de renseignement et de surveillance, car nous nous sommes aperçus que nous n'étions pas tout à fait au niveau espéré. Il y aura donc une série d'initiatives, dont l'AGS fait partie, avec les nations qui contribueront au programme, mais il y aura beaucoup d'autres aspects, par exemple un centre de fusion en Sardaigne. On verra les moyens que chaque nation apportera individuellement et viendra brancher à ce système.
    En gros, l'efficacité de l'OTAN n'est pas en jeu.

[Traduction]

    Merci.
    Allez-y, monsieur Alexander.

[Français]

    Général, je vous remercie de votre témoignage.
    Vous avez évoqué l'importance de l'état de préparation des forces de tous les alliés. Bien sûr, c'était la conclusion principale de notre rapport sur cette question importante, en ce qui a trait aux Forces armées canadiennes.
    Jusqu'à quel point le haut commandement de l'OTAN pense-t-il avoir protégé les investissements en entraînement malgré les compressions budgétaires? En effet, lors des exercices précédents, non seulement au Canada mais aussi dans plusieurs pays, les réductions budgétaires ont eu une influence sur l'entraînement. Pourriez-vous ajouter deux mots sur votre vision des effets de la défense intelligence sur les capacités de nos forces navales? On parle beaucoup, bien sûr, de nos missions récentes au sud de l'Europe, en Libye, dans l'espace méditerranéen, mais il y a aussi le défi très important des pirates dans l'océan Indien et d'autres défis qui pourraient entraîner une implication de l'OTAN.
    Merci bien.
    Pour moi, l'entraînement est un aspect absolument fondamental de la Transformation. C'est une partie intrinsèque de la Transformation et il faut focaliser là-dessus au maximum.
    Au sein de l'OTAN, il n'y a pas une révolution, mais une très forte évolution de la notion d'entraînement, de formation et d'exercice. Il y a plusieurs aspects.
    Premièrement, comme vous le savez peut-être, jusqu'à maintenant, dans mon domaine, j'étais chargé du volet de la formation et de l'entraînement individuel, et le Commandement allié Opérations à Mons, en Belgique, sous les ordres du SACEUR, était chargé du volet de l'exercice collectif. Maintenant, ces responsabilités sont regroupées et c'est moi qui les assumerai à l'avenir. Nous espérons qu'il y aura une meilleure efficacité, une meilleure utilisation des ressources et une meilleure cohérence globale.
    Deuxièmement, l'OTAN essaie de rationaliser les activités parce qu'il y a beaucoup de redondance dans ce qui existe à l'OTAN comme tel et entre les nations dans le domaine de l'éducation, de la formation et de l'entraînement. Nous rationalisons tous les processus. Nous essayons de faire en sorte qu'il y ait là aussi un partage d'information maximum. Par exemple, nous mettons en place en ce moment un outil qui permettra à chaque homme et à chaque femme des forces armées et à leur chef de savoir exactement quels sont les cours et l'entraînement nécessaires avant un déploiement en Afghanistan, et où ces cours sont offerts. Cela veut dire que chaque nation mettra à disposition des places pour les autres nations. C'est un acte qui nous paraît important parce que, comme toutes nos forces sont réduites, les institutions de formation et d'entraînement ont un surplus de capacité. Alors, pour mieux les utiliser, augmentons la visibilité et la transparence.
    Nous essayons de faciliter les choses. La lutte contre les engins explosifs improvisés et les bombes de circonstance est un exemple précis. Il y a deux ans encore, beaucoup de pays envoyaient des forces en Afghanistan qui n'avaient aucun entraînement dans la lutte contre ces engins. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, parce que nous avons réussi à rationaliser et à améliorer l'accès à ces cours.
    Ce qui reste, c'est ce qui reste entre les mains d'une nation. Pour sa part, l'OTAN apporte l'élément d'interopérabilité humaine et de travail en commun, mais la formation de base est entre les mains d'une nation. Il revient donc à chaque nation de s'assurer que la formation de base de ses forces, elle, restera au niveau nécessaire. C'est une responsabilité qui est purement nationale, encore une fois. Globalement, ce que nous faisons en ce moment au sein de l'OTAN m'amène à penser que nous allons réussir non seulement à maintenir, mais aussi à améliorer le niveau global de formation et d'entraînement, et ce, à un coût réduit grâce à la mise en commun.
    En ce qui concerne l'impact de la smart defence dans le domaine naval, je dirais qu'il est le même que dans les autres domaines. Elle aide les nations à développer ou à maintenir les capacités nécessaires dans ce domaine malgré la crise que nous connaissons, de même qu'à éviter les décisions non coordonnées que nous devons subir après et auxquelles nous devons trouver des remèdes. Les exemples abondent. Les nations, quels que soient leur taille ou leur lieu géographique, prennent leurs décisions de manière souveraine et elles y sont fortement favorables, en général, quand il y a une grande réforme de la défense.
    Si demain on pouvait faire en sorte que les nations se coordonnent entre elles et nous donnent un peu plus de visibilité en amont sur les décisions qui seront prises, cela favoriserait une capacité globale dans le domaine maritime comme dans tous les autres — mais je trouve que le domaine maritime est particulièrement important — et une cohérence dans la durée. C'est un des axes de notre travail.

  (1250)  

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Général, je vous remercie infiniment d'avoir pris le temps de venir. Je sais que vous avez de lourdes responsabilités à Washington. Le comité vous remercie d'être venu ce matin. Je sais que vous devez prendre l'avion pour rentrer immédiatement, mais votre contribution aujourd'hui nous aidera énormément à préciser les recommandations que nous adresserons au gouvernement du Canada en vue de continuer de remplir notre rôle au sein de l'OTAN et de travailler avec tous nos partenaires alliés. Je vous souhaite un bon voyage de retour.
    Merci d'être venus, monsieur l'ambassadeur Ravic Huso, colonel Eric Autellet et général Stéphane Abrial.
    Je suis prêt à accepter une motion d'ajournement. Oui, allez-y.
    Une voix: Je le propose.
    Le président: La séance est levée.
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