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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 053 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 octobre 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    La 53e séance du Comité permanent de la Défense nationale est ouverte. Nous poursuivons notre étude du concept stratégique de l'OTAN et du rôle du Canada en matière de coopération de défense nationale.
    Avant que nous ne commencions, monsieur McKay, il y a trois motions dont le comité est saisi qui viennent de vous. Souhaitez-vous qu'elles soient examinées aujourd'hui?
    J'ai déposé ces motions par rapport au chapitre 3 du rapport du vérificateur général.
    Avant que vous ne commenciez, je vous signale qu'un des points à la fin de l'ordre du jour porte sur les Travaux du Comité.
    Oui. Je veux simplement les citer et proposer une méthode pour leur examen.
    J'invoque le Règlement. Allons-nous en discuter maintenant ou plus tard?
    Il faut établir, avant que nous ne commencions, si vous voulez qu'elles soient traitées aujourd'hui. Dans ce cas, nous les aborderons à la fin de la séance, dans le cadre du point à l'ordre du jour intitulé « Travaux du Comité ».
    Non, j'allais proposer qu'on les examine mardi, avant le sous-comité. Je crois que les rapports du vérificateur général sont des réponses importantes.
    Ce serait parfait.
    J'espère que le président et les membres du comité trouvent cela acceptable.
    C'est parfait. Vous pouvez les faire examiner n'importe quand, le jour qui vous convient. L'avis de motion ayant été transmis, le comité en est saisi.
    Au fait, mardi est-il un jour du sous-comité, monsieur le président?
    Le mardi, c'est toujours un sous-comité.
    Très bien; c'est l'endroit approprié pour les examiner.
    Est-ce que tout le monde a bien compris cela?
    Merci, monsieur McKay.
    Bienvenue à nos invités, Mme Peggy Mason, ambassadrice à la retraite, et M. Paul Meyer. Vous avez chacun environ 10 minutes pour présenter votre exposé, puis les membres du comité poseront des questions, comme d'habitude.
    Madame Mason, voulez-vous commencer?
    Merci beaucoup.
    Bonjour.

[Français]

    Pour commencer, je tiens à m'excuser. En effet, il m'a été impossible de transmettre mon texte à l'avance pour en permettre la traduction et la distribution. Par contre, j'ai donné des copies au greffier pour faciliter l'interprétation simultanée.

[Traduction]

    Je sais que ce n'est pas l'idéal, et je m'en excuse, mais j'espère que les interprètes pourront suivre mon texte. Le document sera disponible après, mais je n'ai pas une version traduite et je ne peux pas le distribuer tout de suite.
    Merci beaucoup. Je suis très heureuse d'être ici.
    Mon document porte le titre « Is it time to take a hard look at NATO's second pillar: crisis management? » Il s'agit du deuxième pilier de l'OTAN, la gestion des crises, un pilier sur le plan du concept stratégique des tâches fondamentales.
    Tout d'abord, à mon avis, l'OTAN n'est pas l'ONU et elle ne devrait pas gaspiller un temps, des efforts et des ressources précieux à tenter de reproduire le rôle de l'ONU dans la gestion des crises. Les membres de l'OTAN devraient plutôt s'efforcer de déterminer la meilleure façon d'appuyer le rôle militaire de l'ONU dans la gestion des crises en participant de nouveau avec des ressources sur le terrain, en mettant plus régulièrement des capacités opérationnelles de pointe à la disposition de l'ONU et, bien sûr, en dirigeant les efforts de stabilisation mis sur pied par l'ONU, le cas échéant.
    Deuxièmement, si le Canada et les autres pays membres de l'OTAN avaient participé davantage aux activités de maintien de la paix par les Casques bleus de l'ONU — certains pays l'ont fait, mais pas tous —, l'action internationale de stabilisation en Afghanistan, par exemple, aurait peut-être été tout autre.
    Rappelons-nous les mots utilisés dans le Concept stratégique 2010 et lors du Sommet de l'OTAN à Chicago pour la déclaration portant sur le rôle de l'OTAN dans la gestion des crises.
    Essentiellement, l'OTAN déclare que pour gérer les conflits, et certainement pour les éviter ou en gérer les séquelles, le rôle militaire ne suffit pas. C'est ce qui a amené l'OTAN à adopter la démarche globale et à faire intervenir toute la gamme des outils politiques, diplomatiques, policiers, techniques et autres dans la résolution des conflits. Mais, à mon avis, et je parle en connaissance de cause pour avoir passé la majeure partie des 10 dernières années à travailler avec l'OTAN, s'attendre à ce que l'OTAN fasse cela se résume à faire les choses à l'envers, car l'OTAN est, avant tout, une organisation militaire même si elle a, bien sûr, une importante structure de surveillance politique. Les opinions varient grandement à savoir si le rôle est principalement militaire ou principalement politique. À mon avis, la composante militaire ajoute de la valeur aux opérations de maintien de la paix et de stabilisation. Je dirais donc que la composante militaire ne peut assumer la direction quand les solutions sont essentiellement politiques, même si celles-ci ont souvent un élément important de soutien militaire.
    Disons les choses franchement: 28 nations ne sont pas 193 nations. Le Conseil de l'Atlantique du Nord n'est pas le Conseil de sécurité de l'ONU, même s'il y a un certain recoupement des membres. L'État-major militaire international de l'OTAN n'est pas le Département des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Les conseillers politiques de l'OTAN ne sont pas le Département des affaires politiques de l'ONU.
    Comme l'ont fait remarquer de nombreux témoins avant moi, la valeur ajoutée que présente l'OTAN est sa capacité militaire.
(1535)
    Tout effort, aussi bien intentionné soit-il, de reproduire le rôle international essentiel de l'ONU en matière de maintien de la paix et de la sécurité, et en particulier de la prévention et de la gestion des crises ainsi que de la consolidation après les conflits, est hautement problématique, surtout lorsqu'un tel effort détourne les ressources militaires les plus professionnelles des opérations menées par l'ONU.
    Voilà pourquoi peut-être des témoins précédents, comme Paul Chapin dans ses paroles et dans l'article qu'il a écrit avec David Bercuson, ont dit que ce rôle élargi de l'OTAN dans la gestion des crises était à la limite — les paroles mêmes de Paul Chapin — de ce que plusieurs pays en Europe peuvent considérer confortable, même avant la crise financière.
    Et la saga difficile de l'OTAN en Afghanistan n'a pas calmé leurs peurs.
     Revenons en arrière un instant. Quand Jill Sinclair, sous-ministre adjointe (Politiques) à la Défense nationale a témoigné, elle a mentionné les opérations et les missions de gestion des crises de l'OTAN: l'Afghanistan, la Lybie, le Kosovo, le contre-terrorisme en Méditerranée et la mission de formation de l'OTAN en Irak, puis elle a aussi parlé des plans civils d'urgence. L'OTAN a fait tout ceci et maintenant, bien sûr, le nouveau Concept stratégique ou la déclaration à l'issue du sommet de Chicago aidant, l'accent est encore plus fort sur l'aspect prévention des conflits.
    Comme je l'ai déjà dit, certains témoins avant moi ont indiqué à quel point ce rôle est à la limite de la zone de confort pour beaucoup de monde en Europe.
    J'aimerais parler un peu des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Il est extrêmement triste pour le Canada qu'après avoir eu un rôle prépondérant dans les activités de maintien de la paix de l'ONU pendant si longtemps, ayant cessé de participer aux opérations Casques bleus de l'ONU après la FORPRONU — la Force de protection des Nations Unies en ex-Yougoslavie au début des années 1990 —, nous sommes maintenant dans l'ignorance presque totale de la transformation, de la planification, de l'exécution et de la gestion des opérations menées par l'ONU depuis lors. Une révision fondamentale a été exécutée, et des leçons importantes ont été apprises.
    De nouvelles structures de commandement et de contrôle, des mécanismes perfectionnés de planification intégrée et des structures de soutien des missions sur le terrain ont été instaurés. Malheureusement, le message ne s'est pas transmis aux structures militaires de nombreux pays membres de l'OTAN, étant donné qu'ils sont loin de cette activité de l'ONU. Par conséquent, bien sûr, cette activité est privée de l'accès à toute cette spécialité militaire de pointe.
    J'aimerais citer ce qu'a dit James Appathurai au sujet de l'OTAN, à l'OTAN, — il a qualifié de primordial le rôle de l'OTAN en ce qui concerne les opérations de maintien de l'ONU, et je cite:
En tant qu'organisation, l'OTAN est mieux équipée que nulle autre organisation pour générer, déployer, commander et maintenir de vastes forces dans le cadre de ses opérations multinationales. Aucune autre organisation ne peut faire cela...
Aujourd'hui, l'OTAN a plus de 150 000 soldats... dans une diversité d'opérations.
    Comparez cela au fait que l'ONU a actuellement 82 000 soldats oeuvrant dans quelque 16 missions de maintien de la paix, ainsi que 3 000 observateurs militaires, 14 000 membres de personnel policier et 13 000 civils.
    Il est important de remarquer que la majorité de ces missions de Casques bleus ne sont pas de petites opérations. Elles sont mandatées au titre du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, de la même façon que l'a été la mission de l'OTAN en Afghanistan. Parlant franchement une fois de plus, si les Nations Unies comptaient principalement sur les missions menées par l'OTAN, d'immenses étendues du monde seraient abandonnées.
    C'est sur les dimensions politiques des opérations de maintien de la paix que je veux insister. Dans le rapport Brahimi, qui examinait les leçons tirées des échecs de mission de maintien de la paix de l'ONU en particulier — et je dirais que cela s'applique aussi à ce que l'OTAN appelle des opérations de réponse aux crises ou des opérations de gestion des conflits —, la leçon principale est le fait que le maintien de la paix ne peut se substituer à une démarche politique efficace. Si l'on veut faire concorder les mesures politiques aux mesures de maintien de la paix, les opérations de maintien de la paix doivent, idéalement, venir appuyer la mise en oeuvre d'un accord de paix ou, tout du moins, un processus de paix crédible.
(1540)
    Crédibilité signifie un appui intérieur et une légitimité au niveau des parties en conflit. Elle signifie également que les mesures sont largement appuyées à l'extérieur par une sorte de cadre politique ou stratégique commun. Je dirais que les problèmes inhérents à bon nombre des opérations Casques bleus, mais aussi, ce qui est particulièrement pertinent pour nous aujourd'hui, des opérations mandatées par l'ONU, mais non menées par l'ONU... autrement dit, les opérations de maintien de la paix menées par l'OTAN. Les problèmes de ces missions découlent du fait que la communauté internationale, certainement le Conseil de sécurité de l'ONU, n'a pas tenu compte de la leçon qu'une activité militaire doit être à l'appui d'un cadre politique et d'une démarche de paix crédibles.
    À mon avis, Haïti est l'exemple même d'une démarche de paix incomplète — le plus grand parti politique n'a pas participé aux élections. En République démocratique du Congo, divers groupes rebelles restent en dehors des accords négociés. En Afghanistan, où l'OTAN a une force de stabilisation, la Force internationale d'assistance à la sécurité, la communauté internationale a mis au point un cadre commun pour ses relations avec divers acteurs internes, sans tenir compte d'un processus qui aurait pu assurer une plus large inclusion politique. De plus en plus, une des principales fonctions des opérations de maintien de la paix de l'ONU est l'extension de l'autorité de l'État, ce qui a fini par se produire dans le cas de la FIAS.
    Comment une mission de maintien de la paix de l'ONU peut-elle fonctionner quand toute une variété d'actes non étatiques s'y opposent, surtout quand certains ou tous sont appuyés de l'extérieur, chose à laquelle la MONUC est confrontée en République démocratique du Congo? À mon avis, c'est une question que l'OTAN pourrait se poser pour l'Afghanistan. Jusqu'à quel point une mission de l'ONU peut-elle oeuvrer contre la volonté du gouvernement hôte, comme la MINUAD doit faire à Darfour? Dans quelle mesure la FIAS peut-elle réussir en Afghanistan suivant un cadre politique où la communauté internationale a pris position, intentionnellement ou pas, dans une guerre civile?
    Bien sûr, il y aura toujours des perturbateurs qui resteront en dehors de l'accord, mais il faut commencer par mettre au point un cadre politique aussi inclusif que possible pour que les perturbateurs puissent être effectivement isolés.
(1545)
    Madame Mason, vos 10 minutes sont écoulées.
    Puis-je continuer en résumant?
    Bien sûr, si cela est acceptable pour les membres.
    Des voix: Oui.
    Je suis désolée. J'ai lu plus lentement pour les interprètes et j'ai pris bien du retard.
    Le deuxième point dont je voudrais parler, et j'invite les questions à ce sujet, est que le plus grand malentendu au sujet des opérations actuelles de maintien de la paix de l'ONU se rapporte à l'emploi de la force. Je reviens à Paul Chapin qui parlait de la tâche aisée de l'ONU pour le maintien de la paix. En réalité, ils oeuvrent dans des environnements extrêmement dangereux avec des règles d'engagement très rigoureuses. Cela invite à se demander quelles sont les limites de l'emploi de la force quand on n'est pas en guerre, mais que l'on tente de stabiliser une situation? À mon avis, un dialogue sur les limites de l'emploi de la force, dans le contexte d'une discussion plus large sur l'exigence fondamentale d'un processus de paix crédible, pourrait aider à démontrer que la force robuste, aussi essentielle soit-elle, n'élimine quand même pas la nécessité de trouver des solutions politiques à des problèmes politiques.
    Essentiellement, je dis que, paradoxalement, si les pays membres de l'OTAN avaient continué à participer aux opérations de paix de l'ONU, ils auraient peut-être mieux compris que la force militaire robuste ne suffit pas à arriver à ces fins, si cette force n'est pas appuyée par un cadre politique crédible. Cela a été démontré à maintes reprises en Afghanistan. À mon avis, les membres de l'OTAN et les membres de l'ONU devraient tenir un dialogue très sérieux à ce sujet. L'ONU peut analyser les missions menées par l'ONU, mais elle ne peut analyser les missions menées par l'OTAN sans être parrainée par un pays membre de l'OTAN. C'est une chose qu'il serait très important de faire.
    L'autre point que j'ai à soulever — et vous me poserez peut-être des questions à ce sujet — porte sur le domaine dans lequel je travaille avec l'OTAN, la fausse perception que le commandement et le contrôle des missions de l'ONU sont très problématiques. De fait, à l'encontre des missions de l'OTAN, il n'y a pas de division entre le contrôle politique et le contrôle militaire dans les missions de l'ONU. Dans le cas de l'ONU, le commandement et le contrôle sont décentralisés jusqu'au niveau opérationnel sous un commandement civil, le responsable civil de la mission de l'ONU. C'est là, à mon avis, un élément essentiel de la réussite d'une opération de gestion de crise ou de maintien de la paix. Un commandement séparé entre une mission de l'ONU s'occupant de l'aspect politique, d'une part, comme en Afghanistan, et une mission militaire relevant d'autres autorités, d'autre part, mène à un commandement inefficace.
    Merci beaucoup, madame Mason. Nous avons tous une copie de votre biographie et de votre CV. Nous sommes conscients de votre expérience et nous apprécierions recevoir le document lui-même. En nous laisserez-vous une copie? Nous ne pourrons pas le distribuer avant de l'avoir traduit, mais le greffier vient de me dire qu'il va voir à ce que cela soit fait de sorte que tous les membres du comité l'auront en référence dans le cadre de nos délibérations.
    Normalement, lorsque nous avons deux invités, nous demandons aux deux personnes de présenter leur exposé avant de passer aux questions. C'est donc votre tour, monsieur Meyer.
    M. Meyer est agrégé supérieur à la Simons Foundation. Là encore, nous avons votre curriculum vitae, dont nous vous remercions. Allez-y, monsieur, vous avez 10 minutes.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, bonjour.
    Tout d'abord, je vous remercie de m'offrir cette occasion d'assister à votre séance afin de discuter de ce sujet important relatif à votre étude.

[Traduction]

    Il y a plusieurs années, vers la fin de la guerre froide, j'ai fait partie de la délégation canadienne à l'OTAN. J'admire profondément l'alliance pour sa capacité de s'adapter aux nouvelles circonstances tout en maintenant la solidarité traditionnelle cruciale entre ses membres.
    Pour leur part, les membres de l'alliance, y compris le Canada, ont la responsabilité de revoir régulièrement les activités de l'OTAN pour déterminer si l'organisation offre encore le meilleur rapport qualité-prix. Le Concept stratégique a présenté une certaine orientation générale en établissant la défense collective, la gestion de crise et la coopération en matière de sécurité comme tâches fondamentales de l'alliance.
    J'approuve toutes ces tâches, mais j'aimerais voir un accent plus prononcé sur le rôle consultatif de l'alliance et le potentiel qu'il présente dans la prévention des conflits. La défense collective demeure le fondement de l'OTAN, mais, au cours des dernières années, cela ne signifie plus autant défendre un territoire allié en cas d'attaque que collaborer pour défendre des intérêts alliés quand ceux-ci sont menacés.
    La force unique de l'OTAN réside dans ses structures intégrées civile et militaire et la capacité que cela lui procure de mener d'importantes opérations conjointes complexes. Cette capacité inégalée de projeter et soutenir des forces et de gérer efficacement une mission multinationale est ce qui a fait de l'OTAN l'organisation de prédilection pour les opérations de combat à mener au nom des Nations Unies et d'autres groupes d'États. C'est ce qui s'est produit dans le cas des Balkans, de l'Afghanistan et, plus récemment, de la Lybie. L'alliance peut s'attendre à d'autres requêtes semblables à l'avenir.
    De son côté, le Canada devrait continuer à contribuer au maintien de cette capacité collective et à s'assurer que les États membres contribuent de façon appropriée. Une approche intelligente à la défense devrait comprendre une certaine mise en commun des ressources et le développement de capacités de créneau, plutôt que la tentative de faire en sorte que chaque membre possède toutes les capacités.
    Voilà pourquoi la décision du Canada de se retirer du programme AWACS de l'OTAN envoie, à mon avis, un message regrettable, car c'était l'exemple d'un programme commun de l'OTAN fournissant une capacité très spécialisée qui aurait représenté un coût prohibitif pour la plupart de ses membres si les nations avaient eu à l'acquérir individuellement. La présence continue du personnel des Forces aériennes canadiennes en Europe dans le cadre des équipages aériens intégrés des avions AWACS de l'OTAN a aussi fait fonction de rôle symbolique et politique important démontré par une présence tangible du personnel canadien sur le territoire européen, travaillant côte à côte avec des compagnons d'armes d'autres États de l'OTAN.
    Constituer des capacités expéditionnaires pour les Forces canadiennes est une façon de contribuer à la capacité de l'OTAN de projeter des forces, tout comme l'est appuyer les programmes communs ou contribuer à des capacités spécialisées qui pourraient être hors de portée pour d'autres alliés ou partenaires.
    J'ai mentionné plus tôt que l'OTAN devrait consacrer autant de temps à la prévention des conflits à la gestion des crises. À mon avis, cela se rapporte au rôle consultatif de l'alliance —, une fonction qui était la principale raison pour laquelle le Canada a appuyé l'article 2 du Traité de Washington lors de son inauguration — et à l'importance de maintenir l'OTAN comme point central des consultations politiques-militaires sur les défis de sécurité de nos jours.
    Le Canada, de concert avec les autres alliés qui ne font pas partie de l'Union européenne, comme la Norvège et la Turquie, doit faire preuve d'une grande fermeté pour voir au maintien de ce rôle de l'alliance car, à l'heure actuelle, l'Union européenne, d'une part, et les États-Unis, d'autre part, ont tendance à procéder de leur côté à leurs propres consultations internes, à nos dépens. Si le désir qu'a le Canada de voir à ce que l'OTAN soit une alliance autant politique que militaire est destiné à être plus qu'un but rhétorique, il va falloir qu'il y ait une réénergisation des mécanismes consultatifs de l'alliance et le déploiement d'efforts à cet effet au niveau central et des délégations.
(1550)
    Quand j'ai travaillé à l'OTAN, le comité politique de l'alliance a mené des consultations régulières sur les problèmes de contrôle des armes et de désarmement, ainsi que sur les préoccupations de sécurité régionale. J'ai l'impression qu'il y a eu une diminution continue de ce genre d'activités collectives d'évaluation et d'établissement de stratégie, ce qui est indispensable si l'alliance doit rester à l'avant-garde pour créer des programmes de prévention des conflits et non pas seulement des séances de gestion des crises. Ces consultations politiques sont essentielles si l'alliance doit contribuer activement à la sécurité internationale par le truchement de la diplomatie et du désarmement, et non pas seulement au moyen de l'emploi de la force.
    Malgré le Concept stratégique et l'étude subséquente sur la dissuasion et la défense, l'alliance s'accroche encore à une politique rétrograde et désuète en matière d'armes nucléaires. C'est une absurdité de conclure que tant que les armes nucléaires existent, l'OTAN restera une alliance nucléaire. Manifestement, tant et aussi longtemps que de telles armes demeurent dans l'OTAN elles vont continuer à exister. Malgré sa déclaration qu'elle est déterminée à créer les conditions propices pour qu'il n'y ait plus d'armes nucléaires dans le monde, l'alliance a apparemment peu fait pour identifier et réaliser ces conditions. Le Canada devrait faire cause commune avec l'Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège et les autres alliés du même avis pour s'assurer que l'alliance a effectivement une politique en matière d'armes nucléaires qui est crédible et compatible avec les obligations de ses membres au titre du TNP. Une revitalisation des consultations de l'OTAN s'occuperait aussi du contrôle des armes conventionnelles et du besoin de préserver les réalisations du passé qui sont actuellement menacées, comme le Traité FCE, et de renforcer d'autres, comme le Document de Vienne sur les mesures de confiance et le Traité Ciel ouvert, dans lequel le Canada a tenu un rôle important.
    La dernière mission exprimée dans le Concept stratégique porte sur la sécurité coopérative. Cette tâche fait aussi appel à une consultation soutenue entre les alliés et entre les membres de l'OTAN et leurs partenaires. Les conseils avec la Russie et l'Ukraine exigent une attention et un renouveau d'effort pour surmonter l'attitude de confrontation qui caractérise encore leurs séances. Dans le cadre d'une stratégie de prévention de conflits progressiste, nous devrions aussi encourager une approche créative pour l'établissement de normes de comportement d'état responsable au niveau de la sécurité cybernétique, et chercher des moyens d'éviter que le cyberespace se transforme en un nouveau champ de bataille est-ouest.
    Le Canada doit être prêt à investir dans l'alliance s'il veut continuer à bénéficier des dividendes importants en sécurité qu'il en retire. En une période où tant le MDN que le MAECI subissent des restrictions budgétaires, il va falloir poser des actions militaires et politiques canadiennes créatives et bien coordonnées pour s'assurer que nous sommes, en bout de ligne, un décideur de politique de l'OTAN, et non pas simplement un preneur de politique.
    Merci de votre attention.
(1555)
    Merci, monsieur Meyer.
    Le moment est venu du premier tour de questions.
    Nous commençons par l'opposition officielle, Mme Moore. Vous avez sept minutes, madame.

[Français]

    Merci beaucoup monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à Mme Mason.
    Dans l'une de vos présentations, il a été question des leçons apprises de l'Afghanistan. Vous avez fait une comparaison entre le rôle de l'ONU et celui de l'OTAN dans ce genre de missions. J'en citerai la traduction:
En résumé, une mission de maintien de la paix dirigée par l'ONU en Afghanistan aurait été fondamentalement différente de la débâcle de la FIAS de l'OTAN. On ne peut pas dire si elle aurait eu plus de succès à aider le peuple afghan vers une paix durable, mais on peut dire qu'elle aurait eu plus de chances d'y parvenir.
    Je n'essaie pas de refaire présentement la mission avec des hypothèses ou avec des « si », mais par contre, de par vos propos, on peut voir que vous faites une distinction entre l'OTAN et l'ONU en ce qui a trait à leur rôle et à leur potentiel sur les plans de la diplomatie, des opérations armées ou du maintien de la paix.
    Lors des dernières opérations internationales, la distinction entre l'ONU et l'OTAN a eu un peu tendance à se perdre. J'aimerais donc savoir quelles sont les différences fondamentales que nous, en tant que Canadiens qui avons à coeur la sécurité internationale et la diplomatie, nous ne devons pas oublier.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Si vous me le permettez, je vais répondre en anglais. J'espère que j'ai bien compris la question.

[Traduction]

    En quelques mots, la différence fondamentale entre une mission menée par l'OTAN et une mission menée par l'ONU est la division du commandement. Dans une mission menée par l'ONU, l'autorité politique — le chef de la mission, le représentant spécial du secrétaire général de l'ONU — a le pouvoir de diriger la mission, y compris l'élément militaire. Dans une mission autorisée par l'ONU et menée par l'OTAN...
    En Afghanistan, par exemple, il y a une mission politique de l'ONU, la MANUA, qui s'occupe parfois d'éléments étroits, et parfois d'éléments plus larges. Le problème en Afghanistan découle, en partie, du fait que la MANUA était initialement une mission très étroite qui ne bénéficiait pas d'un processus diplomatique étendu de maintien de la paix. Puis, vous avez la mission militaire de l'OTAN. L'OTAN tient le discours, par exemple, que les forces militaires doivent toujours être à l'appui d'un processus politique, mais que la mission politique est distincte, même si l'OTAN intervient. Ce sont deux choses différentes. Il faut donc constamment travailler très fort pour s'assurer que la mission militaire menée par l'OTAN, qui relève d'un organe politique distinct de l'OTAN, le Conseil de l'Atlantique du Nord, va dans le sens du cadre établi par la communauté internationale et présenté par la mission politique de l'ONU.
    On se trouve donc à séparer les rôles politique et militaire dans une situation où une cohérence des deux est absolument cruciale. C'est là que se situe la différence. Dans une mission de l'ONU, il n'y a pas une telle division et la responsabilité repose entièrement sur la direction politique; par conséquent, on peut être certain que toutes les actions militaires prises appuient les grands objectifs politiques.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
    Si nous avons fini par avoir ces missions divisées, c'est parce qu'un pays particulier, les États-Unis, ne voulait pas que ses forces soient dirigées par un commandement de l'ONU. Par conséquent, si les capacités formidables des États-Unis devaient être disponibles, il fallait que ce soit sous une autre forme. C'est l'origine de la situation. Initialement, les pays comme le Canada participaient aux deux types de missions. Cependant, il y a une limite à ce que des forces de bien plus petite taille peuvent faire. Il a fallu choisir, et le Canada a choisi de participer aux missions menées par l'OTAN.
    Malheureusement, on aboutit à la situation problématique où les meilleures forces, en termes de capacité professionnelle, sont éloignées d'un cadre où elles peuvent être utilisées le plus efficacement pour faire en sorte que l'action militaire appuie entièrement le cadre politique plus large. Cette séparation mène aussi à la possibilité de ne pas remarquer si le cadre politique est assez solide pour permettre la réussite de l'action militaire.
    L'Afghanistan est l'exemple parfait d'une situation où le cadre politique n'était pas assez solide pour permettre une action militaire efficace. Malgré toute son efficacité, une action militaire ne saurait se substituer à un cadre politique efficace; par conséquent, si les deux sont dans une même mission, il est plus facile de réévaluer.
    Je suis désolée d'avoir parlé si longtemps, mais c'est vraiment...
(1600)
    Il vous reste encore une minute et 45 secondes.

[Français]

    Je vous remercie. C'était très apprécié.
    Monsieur Meyer, j'ai vu que vous avez été représentant, notamment à Moscou, dans le cadre de l'OTAN et pour le compte du ministère des Affaires étrangères du Canada.
     Il y a quelques mois, un autre spécialiste du désarmement, M. Ernie Regehr, est venu nous parler. Il a mis en évidence les liens avec la Russie et le besoin de réinventer nos relations avec ce pays en matière de désarmement. Selon lui, en ce qui a trait aux forces conventionnelles, l'OTAN représente plus une menace pour la Russie que la Russie en représente une pour l'OTAN.
    J'aimerais donc avoir vos commentaires sur le sujet. En tant que pays qui veut se soucier de la sécurité internationale et en tant que membre de l'OTAN, quelle relation devrait-on entretenir avec la Russie? Quelle est la part de la relation Russie-Canada ou Russie-OTAN qui pose problème sur le plan du contrôle des armes, du désarmement et de la sécurité internationale? Comment remédier à ces limites?

[Traduction]

    Tout à fait. Ceux qui ont une perspective historique peuvent voir l'ironie. Pendant de nombreuses années, l'OTAN a insisté qu'elle avait besoin d'une politique de dissuasion nucléaire parce qu'elle était conventionnellement plus faible que l'Union soviétique du jour avec le Pacte de Varsovie. Maintenant, le même raisonnement est inversé et Moscou dit devoir conserver ses forces nucléaires parce que le pays est conventionnellement plus faible que l'OTAN, ce qui, objectivement, est le cas.
    Toutefois, je ne pense pas que cela devrait être accepté sans que l'on ne fasse des efforts pour établir le niveau de confiance qui permettrait le retrait des forces nucléaires qui restent et une durabilité de la coopération. Nous devons reconnaître les incroyables réalisations stratégiques accomplies, surtout par les régimes de contrôle des armements et de désarmement, dans la diminution des forces et la réduction des risques de guerre.
    Bien sûr, cela s'est accompagné de changements politiques de grande importance, mais il y a eu tout un régime de notifications, d'observations et de restrictions essentiellement au niveau de la limitation de catégories d'armes spécifiques, et l'élimination de toutes les catégories de missiles balistiques, par exemple, dans le cadre du Traité FNI. Ce sont des réalisations très importantes, cruciales, que nous devons continuer à renforcer et à étendre. Voilà pourquoi j'insiste sur la nécessité d'une action diplomatique auprès de la Russie et d'autres au sujet de ces questions.
(1605)
    Monsieur Strahl, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais profiter de l'occasion pour souhaiter rapidement bonne chance à tous nos collègues qui participent à la mission d'observations électorales en Ukraine, surtout notre collègue d'Etobicoke-Centre, Ted Opitz, qui est parti aujourd'hui après son importante victoire à la Cour suprême.
    Mes questions portent, une fois de plus, sur le désarmement nucléaire. Le sujet de la relation OTAN-Russie suscite certainement beaucoup d'intérêt, et je reviendrai là-dessus dans un instant.
    La diplomatie avec la Russie est possible. Je pense bien que nous continuons à avoir de bonnes relations diplomatiques avec ce pays, en dépit d'un accroc ici et là en chemin. Mais qu'en est-il de pays comme la Corée du Nord ou l'Iran qui ont une capacité nucléaire ou, certainement, des aspirations à cet effet? D'aucuns pourraient dire qu'il serait irresponsable de la part de l'OTAN de procéder unilatéralement au désarmement, ou de ne pas surveiller cette menace. Tant qu'il y a des pays avec lesquels nous n'avons pas de relations diplomatiques ou qui ne font pas partie de la communauté internationale générale, ne serait-il pas un peu imprudent d'éliminer les capacités de l'OTAN face à cette menace?
    Monsieur Meyer.
    Ça le serait si l'action était unilatérale et je ne le recommanderais pas. On a une certaine marge de manoeuvre initiale. Par exemple, le rapatriement des bombes nucléaires à chute libre américaines qui restent en Europe est une étape qui aiderait les relations en général et contribuerait à obtenir une transparence et des contrôles au niveau des armes nucléaires russes dites substratégiques ou tactiques qui sont encore en Europe.
    Quand je parle d'une démarche plus énergique pour le désarmement nucléaire, je pense plutôt au côté diplomatie et à la nécessité de trouver des moyens de faire baisser les niveaux actuels. Tous les États dotés d'armes nucléaires devraient participer. L'attitude de bon nombre d'entre eux est que, étant donné que ce sont les États-Unis et la Russie qui possèdent ensemble 95 p. 100 de l'arsenal nucléaire total c'est eux qui doivent commencer à réduire considérablement les nombres, au moins des centaines plutôt que des milliers; à ce stade, ils seraient disposés à agir.
    Plus d'une génération après la guerre froide, tous les États, tant ceux dotés que ceux non dotés d'armes nucléaires, ont la responsabilité de s'engager plus sérieusement dans l'élimination d'une arme qui est susceptible de causer des dommages catastrophiques et qui, franchement, n'est pas adaptée aux défis militaires contemporains qui se situent largement au niveau des armes classiques.
    Le dialogue est raisonnablement établi entre les États-Unis, l'Europe et la Russie. Mais d'après ce que j'ai vu, nous n'avons certainement pas des relations diplomatiques normales avec la Corée du Nord et l'Iran. Ma question se rapporte plutôt à ces deux pays. Que faisons-nous dans le cas de ces pays avec lesquels nous n'avons pas un dialogue ouvert ou, tout du moins, la possibilité de discussion?
(1610)
    De toute évidence, ce sont deux cas difficiles. La Corée du Nord a probablement le régime le plus bizarre au monde à l'heure actuelle, le plus stalinien au pire sens du mot. Il est très difficile à comprendre par rapport au comportement international normal auquel on pourrait s'attendre.
    Ceci étant dit, je crois qu'il y a des pressions qui pourraient être exercées, et des mesures incitatives qui pourraient être prises. Avec le temps, on peut espérer, au mieux, une normalisation des relations dans le cadre d'une entente de dénucléarisation de la péninsule coréenne.
    Au fur et à mesure que la Chine assume de plus grandes responsabilités en tant que grande puissance, on peut s'attendre à ce que Beijing se voie dans l'obligation de faire preuve de plus de créativité et de fermeté à l'égard de son allié titulaire en Corée du Nord, et exerce des pressions sur lui.
    Compte tenu de l'expérience que vous avez de l'OTAN et du peuple russe, pouvez-vous nous dire quels sont les engagements de la Russie à l'égard du désarmement et de la non-prolifération des armes nucléaires?
    Quelles sont vos observations en ce qui concerne la décision de la Russie de se retirer de l'initiative Nunn-Lugar?
    Comme tout autre État partie au TNP, la Russie a l'obligation d'exécuter le désarmement nucléaire et, en tant qu'État doté d'armes nucléaires, elle se doit de donner l'exemple à cet égard, et elle a fait quelques progrès. Malheureusement, tant du côté des États-Unis que de la Russie, le rythme de cette réduction est loin d'être satisfaisant.
     Il faut reconnaître, en toute objectivité, que l'adoption du concept de défense antimissile balistique aux États-Unis est une complication, car la Russie s'inquiète des répercussions éventuelles sur ses forces de dissuasion si le développement de cette technologie va de l'avant.
    J'ai mentionné brièvement les forces militaires conventionnelles et l'infériorité relative, ainsi que l'effet de freinage résultant. Mais la Russie a pris un engagement avec le nouveau traité START et je crois, une fois de plus, que tous les États qui ont des relations avec Moscou ont la responsabilité de convaincre ce pays qu'il doit assumer un rôle de leader et agir rapidement pour réduire son arsenal et être responsable dans son utilisation.
    Le programme Nunn-Lugar a été très utile, mais, à mon avis, la Russie étant maintenant en meilleure posture financière, elle devrait financer elle-même le retrait de ses ADM antiques et excédentaires, et ne plus continuer à compter sur la largesse des pays du G-8, y compris le Canada, pour se genre d'aide. Il y a peut-être d'autres pays qui pourraient en bénéficier davantage ou qui mériteraient plus que la Russie de recevoir de l'argent du partenariat global des G-8 à ce stade.
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. McKay. Vous avez sept minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord poser une question à Mme Mason, puis je passerai à M. Meyer.
    J'ai été frappé par votre commentaire que si l'OTAN s'était restreinte, en quelque sorte, à la capacité des Casques bleus, l'approche en Afghanistan aurait pu être tout à fait différente. Vous citez l'exemple de l'Afghanistan, et je suppose que vous avez d'autres exemples. L'action principale ne peut être militaire quand la solution est politique et l'emphase devrait être mise sur la prévention des conflits. La tragédie pour le Canada est que cela nous a rendus incapables de contribuer aux opérations de maintien de la paix ou aux opérations des Casques bleus.
    On semble ici être relativement satisfait de la notion que nous ne pouvons pas réellement participer aux opérations des Casques bleus. Recommandez-vous donc que les Forces armées et le gouvernement rétablissent la capacité que nous avions par le passé de participer à des opérations menées par l'OTAN ou l'ONU dont l'orientation principale est le rétablissement de la paix, le maintien de la paix, la résolution des conflits, etc. — en d'autres termes, la recherche d'une « solution politique » avant que les choses ne se transforment en conflit militaire.
(1615)
    Merci beaucoup de cette question.
    J'aimerais revenir un instant à la dure leçon, l'expérience frustrante du Canada, surtout dans le cadre de la Force de protection de l'ONU en ex-Yougoslavie, et comparer cela au sentiment de satisfaction retiré des missions menées par l'OTAN, la IFOR et la SFOR, qui vient appuyer le point de vue que nous ne voulons pas participer aux activités de l'ONU, nous voulons participer à celles de l'OTAN.
    J'ai parlé du changement important qui s'est produit, du fait que l'ONU s'est réorganisée pour mieux mettre sur pied des opérations de paix très complexes. Mais j'aimerais mentionner un autre aspect qu'il ne faut pas oublier. La Force de protection de l'ONU en ex-Yougoslavie a été détruite parce qu'il n'y avait pas de paix à maintenir au milieu d'une guerre. La très robuste force de stabilisation internationale de l'OTAN, déployée après les accords de Dayton, a été déployée dans le contexte d'un accord à faire respecter.
    La leçon à tirer ici, à mon avis, est qu'il ne suffit pas d'avoir une force militaire capable, il faut avoir un accord de paix à faire respecter. C'est cette portion de l'équation qui s'est perdue quand nous avons opté pour les opérations du côté de l'OTAN et avons concentré nos efforts sur la capacité militaire, perdant de vue le fait que les deux éléments sont extrêmement importants. Lorsqu'on parle d'un cadre de rétablissement de la paix, l'ONU est l'organisme leader pour cela.
    Quant à ma recommandation pour un premier pas — parce que c'est manifestement un changement important dans la façon de penser —, je propose que les pays comme le Canada, qui ont l'expérience que nous avons, entament un dialogue, prennent dans le contexte de l'OTAN et de l'ONU l'initiative de parrainer un dialogue au sein des Nations Unies sur les leçons tirées de l'emploi de la force dans ces opérations complexes.
    Comme ici nous courons constamment contre la montre, j'aimerais vous demander de vous concentrer un peu plus sur la Lybie. Quelle est la leçon tirée ici? Assurément, sous le commandement du général Bouchard, l'opération a été réussie, mais nous semblons avoir abandonné le bateau pour ce qui est du conflit après le conflit, pour ainsi dire. Quelles seraient, brièvement, vos conclusions à ce sujet?
    J'aimerais mentionner, en passant, que j'ai été très heureuse d'avoir... Le général Bouchard a été le premier commandant canadien avec qui j'ai participé à de la formation, avant qu'il ne finisse à la tête de cette mission importante.
    Peut-être que nous aurions fait exactement ce que nous avons fait. Mais le problème en Lybie est le suivant. Nous demandons-nous si nous avons gagné la bataille et perdu la guerre? L'accent mis sur l'action militaire signifie que les armes étaient grandement dispersées, pas seulement en Lybie, mais aussi dans la région et dans la sous-région, ce qui a mené à une grave déstabilisation.
    C'est impossible à dire, en rétrospective, mais peut-être que si nous avions tenu compte davantage du fait qu'il fallait avoir une solution politique en bout de ligne, et tenu compte des dangers d'un effort militaire à court terme et ce à quoi celui-ci pourrait mener, peut-être — peut-être — que nous aurions fait exactement la même chose. Mais peut-être aussi que nous aurions pris en compte la dimension politique beaucoup plus tôt. Cela aurait signifié que nous n'aurions pas forcément mis des conditions à la paix, comme « Kadhafi doit partir ». Des conditions qui ne pouvaient pas être respectées ont mené à l'opération militaire. Cela fait voir les choses différemment et mène à se dire que l'approche militaire a un potentiel très élevé de risques et de coûts.
(1620)
    Monsieur Meyer, vous avez fait une observation intéressante sur le retrait du Système aéroporté d'alerte et de contrôle, l'AWACS, quand vous parliez de la défense intelligente et ce genre de choses. C'était une décision déconcertante de la part du gouvernement. Bien sûr, c'est dans le contexte de tout un lot de décisions déconcertantes, mais passons...
    Il me semble que le retrait a des répercussions importantes pour d'éventuelles missions militaires auxquelles nous voudrions participer. Est-ce exact?
    C'est clairement une capacité clé. Le système a été déployé dans l'opération en Libye, par exemple. Quand vous faites partie du programme, vous y avez accès. Si je ne m'abuse, 17 pays participent au programme, et je ne vois pas très bien comment nous pourrions en bénéficier, puisque nous nous sommes retirés. Il y a peut-être une option de paiement à l'utilisation. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, cela m'a semblé une décision malheureuse. C'est exactement à l'inverse de l'orientation qui serait compatible avec une défense intelligente, c'est-à-dire de tenter de se procurer des articles à prix élevé dans une alliance commune.
    Cependant, ne faut-il pas se demander dans quelle mesure une défense « intelligente » est intelligente?
    Mon propos, c'est que l'objectif de la défense intelligente, selon ce que je comprends de cette terminologie, consiste à obtenir des avantages et des réductions des coûts. Une façon d'y parvenir, c'est qu'au lieu que chaque État membre s'emploie à acquérir des trousses ou des capacités vraiment dispendieuses, ils peuvent le faire collectivement, ce qui contribuerait à réaliser les objectifs de l'alliance en matière de défense collective.
    Merci, monsieur. Votre temps est écoulé.
    Nous passons au deuxième tour. Monsieur Norlock, vous êtes notre premier intervenant. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président et merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
    Monsieur Meyer, ma question s'adresse à vous. Elle portera encore sur le dossier libyen, mais sous un angle un peu différent. La mission en Libye a nécessité un certain degré de coordination avec des partenaires régionaux, notamment la Ligue arabe et l'Union africaine. Il a été beaucoup question dans la discussion sur le concept stratégique de la nécessité que l'OTAN établisse des partenariats plus solides avec des pays ou des régions qui ne font pas partie de l'alliance.
    À votre avis, à quel point est-il important pour la mission en Libye, et pour des missions futures, que l'OTAN établisse des partenariats de travail solides avec d'autres pays ou régions, similaires ou identiques à l'Union africaine ou peut-être avec des pays au sein de la région de l'Asie-Pacifique?
    En bref, je crois qu'il est très important d'établir ces partenariats.
    Si la Ligue arabe n'avait pas lancé un appel à un engagement militaire actif en Libye, je ne crois pas que l'opération aurait eu lieu. L'OTAN aurait été mal avisé de tenter de le faire sans la couverture politique, pour ainsi dire, qui est venue de l'appui politique accordé par une association d'États arabes dans cette région puis, par la suite, de l'Union africaine, si je me souviens bien. C'est un excellent exemple de recherche de collaboration. Malgré la participation très symbolique du Qatar à cette opération, la bénédiction politique a eu une valeur inestimable au plan de la crédibilité et, au bout du compte, de l'acceptabilité de cette intervention.
    Je le répète, il faut y réfléchir plus en profondeur dans le cadre de processus consultatifs permanents visant à identifier ces partenaires potentiels et à consolider les liens.
    Peggy a tout à fait raison. L'idéal serait de le faire sous l'égide de l'ONU, où il serait possible de fusionner une capacité civile et une capacité militaire, mais la dimension militaire de l'ONU, même si elle figure dans la Charte, ne s'est jamais concrétisée. Nous devons donc trouver une façon d'agir. L'OTAN offre la capacité militaire la plus sophistiquée, mais elle doit veiller à ce que d'autres acteurs sentent qu'ils font partie de l'action, qu'ils ont une voix au chapitre. Ces détails restent à régler, à mon avis, pour trouver la bonne façon de permettre à d'autres partenaires de sentir qu'ils peuvent exercer une influence politique et non simplement apporter leur contribution à l'entreprise.
(1625)
    Êtes-vous en train de dire que comme elles partagent le même continent, l'Union africaine et la Ligue arabe devraient jouer un plus grand rôle dans la situation en Libye que l'OTAN?
    Je crois que ces intervenants doivent assumer une plus grande part de la responsabilité, et pour être honnête, je crois que l'Union africaine, en particulier, a fait un pas dans cette direction. Il faut toutefois aussi reconnaître les capacités limitées d'un grand nombre de ces États.
    Je pourrais citer un bon exemple de cette multiplication de la force de l'OTAN, pour ainsi dire, que je recommande: l'OTAN avait accepté de créer pour les forces de l'Union africaine un pont aérien stratégique dans le cadre de la mission en Somalie, une mission approuvée par l'Union africaine et l'ONU. En réalité, sans l'aide d'un pont aérien sophistiqué au moyen d'avions de transport militaire lourds, ces soldats auraient difficilement pu entrer dans le territoire, être approvisionnés, etc. J'aimerais voir davantage de collaboration de cette nature.
    Le fait est que l'OTAN est une alliance d'États assez développés. Ils possèdent des capacités qui font défaut à la majorité des autres États. Néanmoins, ces autres États devraient avoir un rôle à jouer et peuvent fournir l'infanterie, par exemple, ou certains éléments de base. Cependant, si l'OTAN pouvait fournir ces éléments et actifs plus sophistiqués, je pense que ce serait un moyen très raisonnable et solide de remplir à la foi la fonction militaire et de créer clairement un partenariat politique élargi. À mon sens, c'est la voie de l'avenir.
    Merci.
    Je vais changer de sujet et me diriger vers l'espace.
    Monsieur Meyer, vous...
    Si vous pouvez le faire en 30 secondes environ, ce serait fantastique.
    Je suppose que je vais devoir réserver Star Trek pour une autre question.
    Vous avez 30 secondes, donc vous pouvez...
    Je veux parler du désarmement de l'espace et du fait que, bien entendu, nous pouvons voir les acteurs principaux. En ce moment, 60 nations sont présentes dans l'espace pour une multitude de raisons, qu'il s'agisse de défense, de sécurité ou de communications.
    Je me demande dans quelle mesure, du point de vue de la militarisation de l'espace, l'OTAN a-t-elle un rôle à jouer à l'égard de la sécurisation de l'espace.
    Je dois vous demander d'être bref, monsieur Meyer.
    D'accord. À mon sens, les consultations que tient l'OTAN sur la façon de protéger l'actuel environnement paisible de l'espace représentent tout à fait une tâche politique qui convient à l'alliance.
    Merci, monsieur.
    Monsieur Kellway, à votre tour d'intervenir. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci beaucoup à nos deux témoins pour vos deux exposés très intéressants.
    Madame Mason, vous alliez parler de votre proposition, je crois, avant que M. McKay ne vous coupe avec son envolée poétique sur la malédiction du temps. J'aimerais en savoir un peu plus sur la proposition que le Canada parraine un dialogue à l'ONU sur le recours à la force. Je ne sais pas si votre proposition est incomplète, mais aimeriez-vous conclure sur ce point?
    J'aimerais vous entendre sur ce qui ressortirait d'un tel dialogue, à votre avis.
    Merci beaucoup.
    Un processus permanent assez rigoureux est en cours du côté de l'ONU pour examiner les leçons à retenir des missions dirigées par l'ONU, c'est-à-dire les missions des Casques bleus. Il y a une grande somme de travail à cet égard. Cependant, l'ONU, comme organisation, ne peut donner l'apparence de juger des opérations dirigées par l'OTAN, c'est pourquoi nous n'avons pas le même genre d'analyse globale. Les différents pays membres de l'OTAN se penchent sur leur expérience en Afghanistan par exemple, mais il n'y a pas d'examen rigoureux portant sur quelques-uns des enjeux clés qui ont surgi, qui ont posé de lourds problèmes dans le contexte de l'ONU.
    En particulier se pose cette question des limites du recours à la force. Aussi robuste que soit votre capacité militaire, le but d'une mission de stabilisation, qu'elle soit dirigée par l'ONU ou par l'OTAN, n'est pas de finir par déclarer la guerre aux différentes parties, c'est de stabiliser la situation. Où se situent les limites du recours à la force? Combien faut-il convaincre de pays membres d'entrer dans la tente pour que la mission fonctionne, au lieu d'isoler les détracteurs? L'ONU a fait un assez bon bout de chemin dans cette discussion sur sa mission, mais je crois qu'il est fondamental que nous mettions à contribution toute l'expérience chèrement acquise de l'OTAN en la matière. Il faut donc que le Canada parraine ce dialogue.
    Il y a aussi d'autres éléments. Le deuxième élément serait les difficultés inhérentes aux missions bicéphales, lorsque le leadership politique et le leadership militaire sont séparés, comme dans une mission dirigée par l'OTAN et une mission de l'ONU, par opposition à une mission intégrée, ce qui est le modèle de l'ONU. Penchons-nous sur la question, et si c'est aller trop loin de demander à de nombreux pays de l'OTAN de se réengager sous le leadership de l'ONU, pouvons-nous examiner des façons de réduire le plus possible les problèmes inhérents au leadership bicéphale?
    Le Canada pourrait en discuter avec d'autres pays de l'OTAN puis parrainer ce dialogue à l'ONU... Il faudrait que l'ONU soit de la partie, il y a des mécanismes pour le faire.
(1630)
    Pensez-vous que nous en arriverons à une conclusion sur les limites du recours à la force et, sans doute, d'une façon plus créative ou constructive. Commençons-nous à parler de ce cadre politique inclusif et crédible plus global que vous avez mentionné? Existe-t-il à l'état de projet à l'ONU, selon vous? Pouvez-vous nous l'exposer, très brièvement?
    En un mot, cela dépend de chaque mission. Au moins deux ou trois propositions très détaillées sont déjà sur la table  — il se fait tard — pour réunir, pour amorcer, pour déployer des efforts importants pour la première fois en vue de créer un cadre politique détaillé pour l'Afghanistan. Le plus récent serait les recommandations très détaillées de l'International Crisis Group concernant un processus dirigé par l'ONU qui mobiliserait toutes les nations ayant fourni des troupes à la FIAS et les autres pour élaborer... Nous devons négocier le cadre.
    Le cadre politique est-il propre à chaque situation?
    Oui.
    Le cadre politique dont vous parlez n'est pas sous l'égide de l'ONU, en fait de structure, de pouvoirs, de relations. C'est particulier à un conflit ou à une quelconque crise.
    L'ONU possède la compréhension générale des éléments requis, mais essentiellement par « cadre politique », j'entends dans l'idéal, dans le meilleur des scénarios, que nous parlons d'un accord de paix qui est négocié et qu'on peut ensuite mettre en oeuvre. C'est le meilleur scénario. Bon, nous n'avons pas d'accord de paix, mais avons-nous un processus de paix? Les parties qui doivent participer au processus de paix sont-elles toutes présentes? La plupart d'entre elles sont-elles présentes? Un nombre suffisant d'entre elles sont-elles présentes? C'est le cadre politique. Les principaux acteurs régionaux sont-ils tous présents?
    Le rôle du Pakistan était la question qui revenait inlassablement par rapport à l'Afghanistan. Pourtant, faire la leçon, ou la morale, ou des menaces au Pakistan pour qu'il cesse de jouer un rôle négatif et qu'il commence à jouer un rôle positif ne pourrait vraiment porter ses fruits que dans le contexte d'un vaste processus de paix qui satisferait aux besoins du Pakistan. C'est le genre de choses dont il faut discuter. C'est vraiment l'ONU qui possède le savoir-faire pour assumer la direction de cet exercice, mais d'autres intervenants ont un apport très précieux à fournir grâce à l'expérience qu'ils ont acquise en Afghanistan et ailleurs.
    Merci beaucoup, monsieur Kellway. Votre temps est écoulé.
    Nous donnons la parole à M. Harris.
    Merci, monsieur Harris.
    Je suis un invité à cette réunion et malheureusement, nous n'avions pas le texte de vos déclarations. Je dois donc me souvenir de certaines choses que vous avez dites. Le fait d'être un nouveau venu est peut-être un avantage parce que j'entends des choses sur lesquelles je ne peux m'empêcher de poser des questions qui vous sembleront peut-être un peu simplistes.
    Madame Mason, vous avez parlé d'un cadre politique efficace mis en place ou créé d'une quelconque façon avant une opération militaire. Il me semble que dans bien des pays dont nous parlons, qui sont dirigés par des forces assassines comme les talibans, des dictateurs qui n'ont vécu que par les armes et pour les armes par soif de pouvoir... j'ai l'impression que c'est un peu une chimère de croire que l'ONU, laquelle en passant offre si souvent une tribune à des personnages comme le dictateur de l'Iran et qui, à mon avis, a perdu de ce fait beaucoup de crédibilité, du moins auprès des nations occidentales... Cela me semble un peu une chimère de croire que la création d'une structure politique efficace, selon votre expression, pourrait vraiment se produire avant une opération militaire.
    Comment pouvez-vous justifier l'affirmation selon laquelle l'exercice aurait peut-être pu fonctionner en Afghanistan? L'idée même de se réunir en Afghanistan, compte tenu des circonstances là-bas... j'ai du mal à croire que nous aurions pu avoir quelque chose du genre.
(1635)
    Merci beaucoup pour votre question.
    Bien entendu, le recul est toujours une chose merveilleuse, tout est toujours tellement beaucoup plus clair avec le recul et j'en suis très consciente.
    Avant toute chose, nous devons faire la distinction entre une opération militaire et une opération de stabilisation ou une intervention de gestion de crise. Les toutes premières mesures qui ont été prises en Afghanistan, qui étaient clairement destinées à chasser les talibans ne sont pas ce dont il est question ici, c'est-à-dire les mesures qui ont été prises après cette intervention, l'effort de stabilisation que l'OTAN a fini par diriger.
    Dans ce contexte, la communauté internationale a effectivement tenté de mettre en place un cadre politique, au début par l'Accord de Bonn, qui est devenu l'Accord de Londres. Il y avait un cadre très large. Le problème tient au fait que des acteurs importants ont été laissés de côté, c'est-à-dire les talibans, et les Pachtounes, dans une grande mesure, le plus important groupe ethnique en Afghanistan. Avec le recul, beaucoup ont dit, et de fait Brahimi l'a dit à l'époque, que le moment le plus propice pour négocier l'accord était le moment où les talibans étaient incroyablement faibles et pratiquement décimés.
    S'il y avait eu un cadre politique inclusif, les choses auraient pu être très différentes aujourd'hui, mais comme il n'y en avait pas, au bout du compte, l'intervention militaire n'a pas été suffisante pour stabiliser la situation, et nous connaissons tous la situation dans laquelle nous nous trouvons par rapport à Afghanistan
    Si vous me permettez de vous interrompre, ma thèse était que des organisations comme les talibans, peu importe la force qu'elles ont, n'ont vraiment rien à cirer de n'importe quelle forme de cadre ou structure politique concrète qui comporte un élément de démocratie dans laquelle le peuple a vraiment une voix au chapitre. Ce n'est pas ainsi qu'ils ont fonctionné pendant les décennies ou les siècles au cours desquels ils ont été au pouvoir ou ont cherché à le prendre en Afghanistan.
    Comment pourrions-nous espérer que, par magie, ils soient disposés à participer à la mise en place d'une structure politique concrète? La chose semble impossible. Ce n'est pas leur genre. Ce ne l'a jamais été. Ils ont clairement dit que ce ne le sera jamais. Ils veulent le pouvoir absolu, et le contrôle par la force, la seule chose qu'ils ont clairement montrée qu'ils connaissent. Tous ceux qui voudront leur barrer le chemin seront tués.
    Comment peut-on espérer politisé ce conflit?
    Évidemment, leur existence ne remonte pas à plusieurs siècles. Ils sont une créature de l'armement des moudjahidines et de l'instruction donnée dans les madrasa pour faire face aux Soviétiques qui avaient envahi l'Afghanistan.
    Pour ramener le débat à la dure réalité, nous n'avons pas négocié avec les talibans au moment où ils étaient à leur plus faible. C'était après l'intervention militaire des États-Unis dans le sillage du 11-Septembre, à laquelle le Canada a participé en dépêchant des troupes. Nous n'avons pas mis en place un cadre politique avec eux à cette époque alors qu'ils étaient au plus faible. Nous nous retrouvons aujourd'hui — peut-être pas le Canada, mais les États-Unis et d'autres, sans aucun doute les États-Unis — engagés dans des négociations avec eux alors qu'ils sont beaucoup plus forts. Au bout du compte, il faut négocier. J'affirme qu'il aurait été de loin préférable pour nous si nous avions su dès le départ à quel point c'était important. C'était le meilleur scénario pour négocier. Nous sommes probablement dans le pire scénario, mais ces négociations sont en cours parce que la guerre doit avoir une fin et qu'elle ne peut prendre fin par des moyens militaires, comme nous l'a prouvé de façon dramatique dans ce qui est désormais la plus longue guerre dans laquelle les États-Unis ont été engagés.
(1640)
    Merci, madame Mason.
    M. Choquette, un autre de nos invités, est notre intervenant suivant.
    Bienvenue, monsieur.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs, d'être venus témoigner devant nous.
    Mes questions s'adressent à Mme Mason.
    Je voudrais d'abord dire que je suis totalement d'accord avec vous. En effet, à un moment donné, il va falloir négocier. On ferait mieux de commencer tout de suite afin d'en arriver, si possible, à des solutions politiques négociées. Bien sûr, la solution armée devrait être la dernière. À cet égard, je pense qu'il devrait y avoir beaucoup plus de Casques bleus provenant du Canada, ce qu'on avait auparavant et qui faisait la fierté du pays.
    Dans quelle mesure le nouveau concept stratégique de l'OTAN traduit-il les leçons apprises par l'alliance au cours de la dernière décennie?
    Je vais répondre en anglais, si vous me le permettez.

[Traduction]

    Cela me donne l'occasion de parler un instant de l'aspect nucléaire. Dans mes observations écrites, j'ai repris à mon compte toutes les observations d'Ernie Regehr sur le désarmement nucléaire. Je me range bien sûr du côté de Paul Meyer et j'approuve ses propos. Autrement dit, ce qui m'encourage dans le concept stratégique, entre autres, c'est qu'il laisse vraiment moins de place aux armes nucléaires.
    Il reconnaît aussi — je me réjouis de cette reconnaissance dans le concept stratégique — l'importance de la prévention des conflits et des gestes qu'il faut poser après un conflit. Il a été question un peu plus tôt de la situation en Libye. Bien sûr, il y a une mission de l'ONU très importante en Libye qui essaie de gérer l'énorme effort de reconstruction de la nation dans l'après-conflit. Je souhaite qu'il y ait des forces militaires compétentes des pays de l'OTAN au sein de cette mission. J'espère ne pas avoir paru trop négatif dans mes observations.
    Je pense que l'OTAN a appris des leçons extrêmement précieuses en ce qui concerne les éléments nécessaires à la gestion de crise, à la prévention et au règlement de conflit, mais il reste d'importantes leçons à apprendre. Je me suis concentré surtout sur cette leçon concernant la primauté du processus de paix, aussi difficile puisse-t-il être. Je conviens avec M. Harris que la tâche n'est pas facile. Rien de tout cela n'est facile. C'est pourquoi nous devons apporter ce que nous avons de mieux à la table si nous voulons réussir. Cela signifie que nous avons besoin des meilleurs militaires, mais aussi du meilleur cadre politique et l'ONU est le haut siège du savoir-faire en la matière. Bien entendu, l'OTAN peut entrer dans la partie et prêter son concours.

[Français]

    Je suis d'accord avec vous.
    Dans quelle mesure les règles et les structures de l'OTAN sont-elles mises à l'épreuve en raison de la nature des conflits actuels, ceux des temps modernes? En d'autres termes, quels seront les plus grands défis de l'OTAN à l'avenir?

[Traduction]

    Vous pourriez peut-être répondre, le temps que je me rassemble mes esprits.
    Je pense avoir évoqué la cybersécurité dans ma déclaration préliminaire. C'est un domaine nouveau. Il n'a pas encore été militarisé, mais il pourrait l'être très bientôt et je crois que cette responsabilité revient à la diplomatie qui a cédé le pas aux interventions militaires. En l'occurrence, l'OTAN a commencé à analyser ses défenses cybernétiques, et c'est utile, mais je crois qu'elle devrait aussi envisager, dans l'optique de prévenir des conflits, la possibilité de commencer à négocier avec les Russes et d'autres nations un régime de renforcement de la confiance, un régime de modération en ce qui concerne d'éventuelles opérations hostiles dans le cyberespace. C'est un élément d'un défi émergent dont il serait utile de tirer parti.
    En plus de l'élaboration de ces mécanismes de gestion de crise complexes, mais importants, il y a l'établissement de partenariats avec d'autres États de sorte que ceux qui contribuent d'une quelconque façon à une mission dont l'alliance a été chargée sentent aussi qu'ils ont un poids politique dans ces processus.
(1645)
    Si vous me le permettez, j'ajouterais un point.
    Le vice-président (M. Jack Harris): Brièvement, s'il vous plaît.
    Mme Peggy Mason: Je veux souligner le travail que l'OTAN accomplit dans la lutte contre la piraterie au large des côtes de la Somalie, par exemple. Il s'agit d'un nouveau domaine de gestion de crise pour l'OTAN. On y investit des sommes énormes. Je soutiens que le dialogue dont je parle avec l'ONU pourrait inciter des pays comme le Canada qui participent à cette intervention à examiner si l'argent serait mieux investi ailleurs, si nous nous penchions vraiment sur le genre de stabilisation, de force et d'accord-cadre politique qui pourraient être nécessaires afin de stabiliser la Somalie.
    La lutte à la piraterie n'aura jamais de fin parce que de jeunes hommes n'ont pas d'emplois et qu'il y en a une source inépuisable là-bas qui se livrent à des actes de piraterie innovateurs et très lucratifs. Oui, c'était merveilleux de voir l'OTAN monter au créneau pour apporter son concours, mais il faudrait vraiment y voir une opération à court terme pendant que nous nous penchons sur ce que nous pouvons faire concrètement pour trouver une solution détaillée au problème d'une Somalie déstabilisée.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Sopuck. Vous disposez de cinq minutes.
    Vous avez parlé de la mise en oeuvre d'un cadre politique en Afghanistan et je suppose que vous parliez d'un cadre politique démocratique. Les démocraties fonctionnelles ont besoin d'institutions fonctionnelles, un mot qui n'a pas encore été prononcé. Comme Fukuyama l'écrit dans son livre intitulé The Origins of Political Order, que vous connaissez sans doute, le développement des institutions s'étend sur des siècles et une culture doit changer sur une période de temps énorme afin de créer l'institution qui créera ensuite un pays dans lequel l'ordre règne, comme notre pays, comme la Grande-Bretagne.
    Comment est-il possible d'élaborer un cadre politique pour un pays en l'absence d'institutions fonctionnelles, par exemple, dans une culture tribale?
    Évidemment, le cadre politique sert à amorcer le processus. Je me répète, bon nombre de ces éléments existent en Afghanistan. Un effort énorme est déployé pour mettre sur pied des institutions démocratiques convenables, efficaces. L'élément manquant en Afghanistan n'est pas l'absence d'un cadre politique, mais plutôt le fait que le cadre politique n'était pas inclusif. Dans les faits, il privilégiait une partie à la guerre civile au dépens de l'autre, ce qui a engendré de très graves problèmes pour la crédibilité du gouvernement, entre autres. Beaucoup d'Afghans disaient: « Pourquoi les seigneurs de guerre qui m'ont exploité ici, là et partout sont-ils maintenant les membres privilégiés du gouvernement? » Les talibans ne sont pas les seuls cibles de leurs critiques.
    Le problème ne tient donc pas au fait qu'il manquait un vaste effort de renforcement des institutions dans le cadre politique de l'Afghanistan, c'est qu'il manquait cet aspect, que j'affirme être un aspect essentiel, en l'occurrence un cadre inclusif. Il n'y en avait pas et malheureusement, c'est ce qui a miné tout le processus.
    Il me semble cependant que dans les pays moins développés, le tribalisme est presque inné; le tribalisme est pratiquement dans nos gènes. C'est pourquoi la mise en place d'institutions fonctionnelles a pris des siècles, parce que nous avons dû surmonter notre nature tribale. Ajoutons la corruption endémique et le tribalisme, et je deviens de moins en moins optimiste.
    Entre autres rôles au Parlement, je préside le Groupe d'amitié parlementaire Canada-Ukraine. L'Ukraine est un pays européen qui, mieux que n'importe quel pays, aurait dû devenir une démocratie fonctionnelle et pourtant, même là, cela ne s'est pas produit.
    Quand on voit où se situe l'Afghanistan, je ne sais pas... Aidez-moi un peu.
(1650)
    Il est sage d'être très préoccupé et prudent.
    Cet effort dont nous parlons est véritablement, comme vous l'avez mentionné, destiné à court-circuiter ce qui a pris beaucoup de temps à créer dans nos pays. Soyons francs, c'est une tentative d'ingénierie sociale.
    Je dis que si c'est notre intention, nous devons faire le maximum pour réussir. Cela signifie que nous devons concrètement veiller à saisir les leçons sur ce qui fonctionne ou non, de toutes parts, à l'OTAN, à l'ONU. Même ainsi, il n'y a aucune garantie, mais nous aurons une meilleure chance de réussir tout en étant réalistes à propos de ce qu'il est possible d'accomplir sur une période donnée.
    L'Afghanistan n'a jamais atteint l'étape de la stabilisation complète, elle n'a donc jamais pu passer à l'étape suivante. Le président Karzaï a dû passer la plus grande partie de son temps à consolider des alliances, à couvrir ses arrières à cause de la guerre civile incessante. Il s'agissait des pires conditions pour accomplir ce qui, de l'avis de tous, représente une tâche extraordinairement difficile.
    Il vous reste environ 45 secondes.
    Il est primordial aux fins de l'élaboration de politiques de déterminer si la chose est même possible. Si je suis la plupart du temps un type dont « le verre est moitié plein », mais quand on voit certaines situations — et qu'on pense à cette pauvre fille qui a été la cible de tirs en Afghanistan parce qu'elle voulait aller à l'école — j'ai l'impression que pour les ennemis de la civilisation occidentale, c'est une mentalité. Je ne sais pas comment il est possible de régler le problème d'une façon rationnelle.
    Ça s'est passé au Pakistan.
    Tout ce qu'on puisse dire, c'est que le pays est diversifié. Il y a des forces séculières en présence et des éléments plus raisonnables. Il y a une association d'avocats dynamique. Malheureusement, le désordre règne, mais je ne crois pas que nous puissions baisser les bras. Nous devons chercher des façons d'identifier qui sont les alliés de notre démocratie libérale, dans une certaine mesure ou du moins, potentiellement, qui s'emploie à renforcer les institutions du pays et essayer d'aider ces défenseurs locaux le plus possible.
    Votre temps est écoulé, monsieur. Merci beaucoup.
    Nous revenons à madame Moore.

[Français]

    Merci.
    Ma question s'adresse à Mme Mason.
    Le comité a appris que, même si l'OTAN se tourne toujours vers l'ONU pour obtenir un mandat dans le cas d'opérations expéditionnaires, l'alliance n'a pas besoin d'un mandat de l'ONU pour entreprendre une mission, particulièrement s'il est question de défendre un allié. En sachant cela et, dans ce contexte, que devrait faire l'OTAN lorsque le Conseil de sécurité de l'ONU est paralysé?
    Voulez-vous dire quand le Conseil de sécurité est bloqué?
    Oui, lorsqu'il n'avance pas en ce qui a trait à un certain enjeu.
    Je vous remercie de la question.

[Traduction]

    C'est une très bonne question.
    C'était très intéressant, si on pense aux témoignages antérieurs des représentants de l'OTAN dans ce dossier — le sous-secrétaire général adjoint James Appathurai, par exemple. Il a insisté sur l'importance pour l'OTAN d'avoir la légitimité d'un mandat accordé par l'ONU et il a souligné qu'à une seule occasion et pour une courte période, à cause du blocage — évidemment, il parlait de Kosovo — une intervention militaire a eu lieu sans mandat de l'ONU et, au bout du compte, l'ONU a donné rétroactivement son aval, pour ainsi dire. J'évoque cet exemple parce que l'une des choses que l'OTAN a apprise dans le cadre des opérations auxquelles elle a participé, c'est l'importance fondamentale d'obtenir cette autorisation de l'ONU et la légitimité qui l'accompagne.
    Plus tôt au cours de notre discussion, nous avons dit à quel point ces interventions sont difficiles. Sans autorisation de l'ONU, elles sont infiniment plus difficiles et je ferais l'hypothèse que c'est une partie du problème qui se pose par rapport à la Syrie. Il est simplement si difficile d'obtenir la légitimité générale nécessaire à une opération — par exemple pour pouvoir recruter des participants arabes à l'opération libyenne parce qu'elle était largement appuyée par la communauté internationale et qu'elle avait la sanction importante de l'ONU dont nous parlons. C'est primordial au succès d'une opération.
    Je dirais qu'actuellement, cela ne signifie pas qu'il ne peut pas y avoir d'exception à l'avenir, disons, par exemple, lorsque le conseil est si bloqué et que nous croyons vraiment que nous devons agir malgré tout. Toutefois, ce genre de décision devrait être vu comme une exception extraordinaire dans des circonstances extraordinaires, parce qu'ainsi, les chances de succès deviennent encore plus minces.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
(1655)

[Français]

    Si je comprends bien, vous dites que l'OTAN a davantage intérêt à travailler de façon à aider le Conseil de sécurité à sortir d'un blocage ou d'une paralysie plutôt que décider d'agir sans l'aval de l'ONU.
    J'aimerais clarifier une chose. Selon le droit international, seul le Conseil de sécurité a le droit d'autoriser l'usage de la force. L'OTAN ne peut pas agir seule avec légitimité.
     Le problème avec la mission en Libye est qu'au Conseil de sécurité, la Russie et la Chine se sont abstenues relativement à la résolution qui autorisait l'usage de la force. Elles sont déçues, si on peut dire, de la mise en oeuvre de cette mission et par le fait qu'elles manquent de contrôle et d'influence politique sur les actions de l'OTAN. C'est la racine du problème actuel avec la Syrie. On ne veut pas répéter ce que Moscou et Beijing voient comme l'erreur et l'échec concernant la Libye.

[Traduction]

    Merci, monsieur Meyer.
    Madame Gallant, c'est votre tour d'intervenir.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
    Premièrement, cette question s'adresse à monsieur Meyer. Étant donné que votre organisation et vous, personnellement, faites la promotion du désarmement, à votre avis, le projet de bouclier antimissile couvrant l'Europe, les États-Unis et l'Australie également visant à détecter et à intercepter les lancements de l'Iran est-il nécessaire?
    Différents éléments entrent en jeu ici. Pour le moment, je ne crois pas que cette capacité soit prioritaire. L'Iran ne possède pas la capacité de lancer des missiles balistiques à longue portée et je ne crois pas que la perception d'une menace relative en Europe justifierait de déployer de grands efforts sur ce front. La difficulté tient en partie au fait que le même système, le système de défense antimissile balistique Aegis, déployé par les États-Unis pour le compte de l'OTAN pour le moment, est en voie de développement et d'expansion. À terme, la vélocité de certains missiles qu'on pense incorporer dans ce système leur permettrait d'intercepter un missile russe. C'est cette crainte qui a incité Moscou à s'y opposer. Moscou a demandé des garanties écrites, contraignantes, de Washington que ce ne serait pas le cas et Washington a rechigné à les fournir.
    À mon sens, par rapport à l'Iran, il faudrait mettre l'accent sur l'intensification en cours de la pression et de l'isolement diplomatiques à Téhéran jusqu'à ce que le régime iranien prenne les mesures pour rassurer la communauté internationale sur ses intentions, surtout par rapport à son programme nucléaire. À mon avis, nous devrions concentrer nos forces, notre investissement sur cette stratégie, pour le moment.
(1700)
    Croyez-vous que la capacité nucléaire de l'Iran n'est destinée qu'à des fins pacifiques, pour la production d'isotopes médicaux et d'électricité?
    Je crois que son orientation n'est pas encore claire. C'est pourquoi l'Iran doit coopérer inconditionnellement avec l'Agence internationale de l'énergie atomique. Les sanctions que le Conseil de sécurité de l'ONU a imposées à l'Iran visent à l'encourager à coopérer ainsi. Même un personnage faisant autant autorité que le directeur du renseignement national aux États-Unis a mentionné qu'ils n'ont aucune preuve que l'Iran est engagé dans un programme de développement de l'arme nucléaire, mais ses opérations suscitent manifestement des doutes qui justifient une exposition et une coopération totales tant que l'Iran demeure un État membre du traité de non-prolifération.
    Une partie de la justification de la capacité nucléaire que certaines nations membres de l'OTAN possèdent est celle-ci: puisqu'un pays européen hautement démocratisé possède cette capacité, les plus petits pays perçoivent moins la nécessité de posséder eux-mêmes une capacité nucléaire. Ils ne sentent pas qu'ils doivent y investir de l'argent ou des efforts parce que quelqu'un peut assurer leur protection.
    À votre avis, est-ce une raison concrète qui justifie que ces pays de l'OTAN possèdent la capacité nucléaire?
    Pas à long terme. Je me répète, l'alliance dit qu'elle veut créer les conditions propices à un monde sans arme nucléaire, conformément aux obligations que confère le TNP que tous les États membres de l'OTAN ont signé. À mon avis, cette déclaration va dans le bon sens. Néanmoins, j'aimerais qu'on mette plus d'énergie et plus de dynamisme à y arriver.
    Honnêtement, sous un angle purement militaire, le meilleur dénouement pour l'OTAN et pour l'Occident, de façon plus globale, serait d'avoir la possibilité demain d'éliminer toutes les armes nucléaires, parce que l'OTAN et l'Occident jouissent d'une énorme supériorité en matière de puissance nucléaire conventionnelle qui serait encore plus dominante s'il n'y avait pas d'armes de destruction massive comme facteur de dissuasion potentiel.
    D'un point de vue, pourrait-on dire, à la fois strictement stratégique et sous l'angle de l'obligation politique de réaliser l'objectif du désarmement nucléaire, je pense qu'il serait possible d'en faire plus sous ce rapport.
    Merci. Madame Gallant, votre temps est écoulé.
    Nous donnons maintenant la parole à notre prochain intervenant du même côté de la clôture ou, du moins, du même côté de la pièce. Monsieur Strahl, vous avez la parole.
    Je laisserai madame Gallant poursuivre son intervention.
    Merci, monsieur Strahl.
    C'est tout à fait acceptable.
    L'ONU suit sans doute de très près la situation au Mali. Vous avez clairement suggéré — et cette question s'adresse à vous, madame Mason — que l'OTAN participe à des missions des Casques bleus et que si cela avait été le cas dans le conflit en Afghanistan, l'issue aurait été très différente.
    Selon vous, quel type de rôle ou de mission l'OTAN devrait-elle avoir au Mali?
    Une fois encore, je dois faire une nuance, parce que je ne veux pas donner l'impression qu'il existe une solution magique à toutes les situations de cet ordre. Ma thèse par rapport à la façon dont la situation en Afghanistan aurait pu tourner, c'est que nous aurions pu avoir une meilleure chance, nous serions peut-être dans une meilleure posture que nous le sommes après tout ce temps et ces efforts, si nous avions tenu compte des connaissances acquises par suite des opérations de paix de l'ONU. Je ne veux évidemment pas laisser entendre qu'il existe une quelconque solution magique à ces situations très difficiles.
    Quant au Mali, c'est une situation de stabilisation. Une négociation est en cours et l'ONU examine ce qu'elle peut faire. Un problème très grave se pose du fait que des armes très puissantes sont entre les mains d'éléments très problématiques qui déstabilisent le pays, lequel présente ses propres problèmes internes, mais il avait été stabilisé, et la sous-région également. Il reviendrait donc à l'ONU, et au pays lui-même, de déterminer l'aide dont il a besoin. S'il en vient à réclamer une aide externe pour stabiliser la situation, et si cette aide externe dont il croit avoir besoin comporte un volet militaire, on pourrait alors envisager que l'OTAN offre de fournir des forces dans le contexte d'une mission dirigée par l'ONU ou, comme je le mentionne dans mes observations écrites mais que je n'ai pas dit ici, et ce dont Paul Meyer a parlé, c'est que l'OTAN, avec ses capacités de pointe, aurait peut-être des capacités, du matériel particulier, un pont aérien ou d'autres éléments à fournir pour aider.
    Il n'y a pas qu'une réponse. Il faut concrètement que l'ONU travaille avec le Mali et la sous-région pour déterminer ce qui peut être nécessaire et possible pour stabiliser la région, pour mettre ces armes sous contrôle, puis comment l'OTAN peut y contribuer, collectivement ou par l'entremise des différents États membres.
(1705)
    Je reviens à vous, monsieur Meyer.
    À votre avis, quel est le rôle de l'OTAN en matière de cybersécurité?
    J'ai déjà mentionné qu'évidemment, qu'elle doit d'abord mettre de l'ordre dans sa cour, s'assurer d'avoir des défenses cybernétiques solides pour les systèmes de l'OTAN et ceux des États membres et d'être à même d'aider ces derniers s'ils sont attaqués.
    L'an dernier, une doctrine, une politique de la défense cybernétique de l'OTAN a été promulguée et c'est essentiellement là où nous en sommes. C'est bien jusqu'à un certain point. Toutefois, j'aimerais que l'OTAN pousse un peu plus loin. Ma suggestion était d'envisager d'abord le contexte diplomatique afin d'élaborer des normes de ce qu'on désigne comme un comportement responsable des États dans le cyberespace, reconnaître l'existence d'une utilisation militaire potentielle à des fins offensives qui devraient probablement être interdites ou rigoureusement réglementées, étant donné la nature et la dépendance particulières de l'humanité vis-à-vis un cyberespace sûr et opérationnel...
    Voici un exemple. Nous avons parlé de prévention des conflits. C'est un enjeu émergent. Il se prêterait bien à un examen précoce. Je crois que ce serait une excellente initiative que l'OTAN pourrait prendre, comme je l'ai dit, pour étendre la portée de ses mesures de défense au-delà de son propre cyberespace.
    Monsieur le président, le témoin a mentionné que les pays membres de l'OTAN pourraient prêter leur concours si l'un d'eux était attaqué. Certes, l'élément important au sein de l'OTAN est l'article 5. Si un pays subit une attaque, celle-ci est réputée constituer une attaque contre tous les États membres. À quel moment l'article 5 devrait-il être invoqué en cas d'attaque dans le cyberespace? Comment cette aide se matérialiserait-elle?
    À ce jour, l'OTAN a hésité à déclarer qu'une cyberattaque était l'équivalent d'une attaque armée, laquelle déclenche l'application de l'article 5. Dans le cas de l'Estonie, par exemple, on constate qu'elle n'a pas invoqué l'article 5. Cela dit, l'article 4 prévoit la consultation entre les États et c'est l'article qui a été invoqué. Dans la doctrine de la défense cybernétique dont je viens de parler, on constate qu'elle dit essentiellement que si un État membre estime avoir besoin d'aide par suite d'une cyberattaque, il peut adresser une demande et l'OTAN s'efforcera de l'aider.
    C'est ainsi que ces situations sont gérées. Je crois que l'approche est raisonnable dans le cadre de l'alliance.
(1710)
    Merci, monsieur Meyer.
    Notre prochain intervenant est un autre invité, M. Larose.
    Bienvenue parmi nous, monsieur Larose. Vous disposez de cinq minutes.
    Votre nom figure sur la liste, madame St-Denis. Vous êtes la suivante après M. Larose. Bienvenue à vous également.

[Français]

    Merci, monsieur le vice-président.
    Ma question s'adresse à M. Meyer. Je vous remercie d'être ici parmi nous.
    Pourriez-vous nous décrire certaines des forces et des faiblesses des traités internationaux existant en matière de désarmement nucléaire et de non-prolifération, s'il vous plaît?

[Traduction]

    Bien sûr. Plusieurs défis se posent à la communauté internationale par rapport à la non-prolifération, au contrôle des armes et au désarmement, et en partie, ces problèmes découlent de la nécessité de prendre conscience de ce que le traité de non-prolifération, lequel est l'accord de sécurité internationale en vigueur ayant suscité le plus grand nombre d'adhésions, avec 189 États parties et seulement 4 États en dehors de ce régime... Le traité prévoit le désarmement nucléaire et la non-prolifération et l'utilisation pacifique de l'énergie atomique. Des progrès ont été accomplis dans tous ces domaines, mais de toute évidence, on pourrait faire beaucoup plus.
    Si je ne m'abuse, un sujet dont il a été question et qui était à l'étude à la dernière conférence d'examen du TNP en 2010 est un document consensuel renfermant plusieurs plans d'actions. L'un de ces plans visait à réduire le statut opérationnel des forces nucléaires. Comme plusieurs d'entre vous le savent, même plus d'une génération après la fin de la Guerre froide, il reste près d'un millier de forces stratégiques déployées en état soi-disant « d'alerte instantanée ». À mon avis, il faut se pencher sur le danger que représente cette état des choses, surtout compte tenu de la situation stratégique et des relations politiques nettement plus favorables. Il s'agit d'un domaine auquel les États avaient convenu de s'attaquer mais à l'égard duquel, honnêtement, les choses ne bougent pas.
    Le Traité sur l'interdiction de la production de matière fissile est un autre domaine dans lequel le Canada a été actif. La matière fissile est ce qui sert à produire des armes nucléaires, il est donc tout à fait logique que pour avoir vraiment une chance d'en arriver au désarmement nucléaire, l'une des premières mesures à prendre consiste à fermer le robinet de la production. C'est un objectif dont la communauté internationale est convenue depuis près de 50 ans et, une fois encore, cela faisait partie des résultats escomptés du TNP. Malheureusement, la Conférence de Genève sur le désarmement, qui devait négocier ce traité, n'a pas réussi à produire d'entente sur un plan d'action depuis 1998 et nous sommes maintenant rendus au point où des pays disent à juste titre que si la Conférence sur le désarmement ne peut livrer la marchandise, envisageons d'autres façons de procéder. Le Canada est, de tradition, le promoteur d'une résolution qui est actuellement soumise à l'Assemblée générale. Elle propose de former un groupe d'experts gouvernementaux pour aider à élaborer le texte de ce traité.
    À mon avis, l'approche pourrait être encore plus opérationnelle, mais c'est un autre exemple d'un enjeu reconnu comme une priorité et pourtant, depuis des années, nous n'avons pas réussi à faire de progrès. Le traité d'interdiction complète des essais nucléaires en est un autre. Là encore, huit pays bloquent l'entrée en vigueur officielle du traité. J'aimerais que ces pays fassent ce qui doit être fait et mettent en oeuvre ce traité.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute et demie.

[Français]

    La prochaine question rejoint ce que vous venez de mentionner. Je trouve cela très intéressant. On dirait que depuis la fin de la guerre froide, on a oublié un certain nombre de choses. Pourtant, la menace est encore plus grande.
    Quel rôle le Canada pourrait-il jouer au sein de l'OTAN sur le plan du désarmement nucléaire et de la non-prolifération?

[Traduction]

    Je crois que nous pourrions essayer de regagner une partie du rôle de leadership que nous avions à l'époque au sein de l'alliance dans ces dossiers.
    Je fais référence à l'importance des mécanismes consultatifs. Ils font partie des joyaux de l'alliance mais là encore, ils ne sont bons que si on les utilise. À une certaine époque, le Canada s'efforçait avec beaucoup plus de dynamisme de mettre l'alliance au défi et de la pousser à adopter des approches plus progressistes dans certains dossiers.
    Il me semble qu'un rétablissement de ce mécanisme s'impose. Quelques énoncés très ambigus à la fin de la déclaration issue du Sommet de Chicago semblent donner à entendre qu'il vaudrait mieux que nous soyons plus actifs, mais je n'ai pas eu connaissance qu'il en soit ressorti quelque chose de concret.
    L'autre élément, c'est de ne pas tenter de faire cavalier seul. Nous avons des alliés d'optique commune. Le Canada doit aussi entamer un dialogue avec eux afin d'exercer une plus grande influence au sein de l'alliance qui consiste, comme vous le savez, en 28 États travaillant par consensus. Il faut pouvoir compter sur des amis dans ces dossiers.
    Je pense que plusieurs pays aimeraient qu'il y ait un regain d'activité: il faudrait que le Canada s'unisse, s'associe à des pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas, la Norvège, la Turquie et d'autres pour faire en sorte que l'alliance demeure crédible et soit vue comme une force positive et non une entrave au progrès en matière de contrôle des armes et de désarmement.
    Ce sont les priorités que je recommanderais pour le Canada.
(1715)
    Madame St. Denis, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Il me fait plaisir de participer à la réunion de votre comité même si je suis seulement de passage et que mes connaissances sont un peu limitées sur ces enjeux.
    Je vais vous poser une seule question sur la Libye. Le comité a appris que le nouveau gouvernement de la Libye n'a pas demandé d'aide à l'OTAN après la fin de la guerre. Quelles organisations remplissent habituellement ce rôle? À votre avis, l'OTAN devrait-elle avoir certaines responsabilités par rapport à la Libye?

[Traduction]

    Par rapport à la Libye, une résolution du Conseil de sécurité a établi une mission de l'ONU pour tenter de donner suite à l'intervention et de stabiliser la situation en Libye et ainsi aider à favoriser la création d'institutions démocratiques du genre de celles dont nous parlions plus tôt. Il s'agit d'une résolution très large sous la direction de l'ONU. Il s'agit d'une mission dirigée par l'ONU, de sorte que les éléments militaires sont sous l'autorité du chef de la mission de l'ONU. Cela signifie que si l'OTAN devait prêter son concours, ce serait par l'entremise de ses différents pays membres qui fourniraient des forces, ce qui serait extrêmement utile, je crois. Cependant, on espérerait aussi un dialogue entre les deux, parce qu'il y a des échanges d'officiers entre l'OTAN et l'ONU. La discussion pourrait porter sur la pertinence que l'OTAN intervienne elle-même ou par l'entremise de ses différents pays membres, si l'aide doit se résumer ou non à l'équipement, si des capacités spécialisées pourraient être utiles ou non. Ce serait ce genre de dialogue.
    Néanmoins, parce qu'il s'agit d'une mission des Casques bleus de l'ONU, la seule façon que des forces de l'OTAN... Elles n'ont pas besoin d'une demande; les forces de l'OTAN n'ont pas à attendre une demande de l'OTAN pour offrir de l'aide à l'ONU, mais ce serait ainsi qu'il faudrait qu'elles procèdent.

[Français]

    Je vais m'arrêter ici, c'est suffisant.

[Traduction]

    Merci beaucoup, et merci d'être venue.
    Monsieur Norlock, vous êtes le suivant sur notre liste. Vous pouvez repartir dans l'espace. Vous disposez de cinq minutes.
    Eh bien, je serais perdu dans l'espace.
    Le vice-président (M. Jack Harris): Nous ne vous voudrions pas que vous vous perdiez dans l'espace.
    M. Rick Norlock: Monsieur le président, j'écoutais nos témoins parler du désarmement nucléaire par rapport à l'Iran et personne n'a parlé de l'éléphant dans la pièce en ce qui concerne la capacité, ou l'incapacité, nucléaire... Le développement de la capacité nucléaire; nous pourrions être en désaccord, vous et moi, sur une question de degré, mais je suis d'avis qu'il s'agit de développement; ils l'ont presque avoué. Je suppose que l'éléphant dans la pièce est Israël. Voilà une nation qui commence à développer une capacité nucléaire et une nation qui possède une capacité nucléaire et évidemment, Israël a ses amis et ses ennemis. C'est ce qui inquiète beaucoup d'entre nous.
    Certains d'entre nous — à titre individuel, s'entend — seraient prêts à ne pas s'en mêler et à laisser la communauté internationale, par l'entremise de l'ONU... un processus long et pénible à cause de tous les tiraillements. Certains d'entre nous seraient prêts à ne pas intervenir en attendant de voir s'il est vrai que l'Iran ne cherche qu'à produire de l'électricité au moyen de l'énergie atomique. Mais voilà qu'il dit qu'il veut faire disparaître un autre pays de la surface de la terre, et le pays en question possède la capacité nucléaire. Que faites-vous dans un tel cas dans le contexte du désarmement nucléaire au Moyen-Orient?
(1720)
    C'est un point qu'il est bon de situer dans le contexte plus global. De toute évidence...
    De fait, le contexte est très étroit.
    Je dis plus global dans un contexte régional, celui du Moyen-Orient. Rappelez-vous qu'à une autre époque, l'Irak et la Libye avaient des programmes nucléaires secrets. Ils étaient des tricheurs sous le régime du TNP. Ils ont été dévoilés et leur cas a été réglé, avec une certaine coopération en ce qui concerne la Libye. La Syrie n'a pas encore justifié une installation très suspecte qu'Israël a détruit unilatéralement en 2007.
    Il est important de ne pas oublier qu'il n'y a pas que l'Iran qui teste les limites en ce qui concerne le comportement nucléaire responsable sous le régime du TNP, et en retour, cette attitude est fonction des tensions qui demeurent au Moyen-Orient.
    J'ai mentionné le TNP. Je crois qu'il est important d'intervenir à l'intérieur de ce cadre.
    L'une des décisions prises à la conférence d'examen en 2010 était qu'il devrait y avoir cette année une conférence de tous les États du Moyen-Orient pour discuter de la possibilité de créer une zone sans arme nucléaire de destruction massive au Moyen-Orient. Un facilitateur a été désigné, un diplomate finlandais, et la Finlande s'est proposée pour être l'hôte de cette conférence. Le temps file. Elle est censée se tenir à Helsinki avant la fin de l'année. Le facilitateur fait sans cesse la navette diplomatique pour essayer d'encourager tous les pays concernés à se présenter. J'espère sincèrement qu'ils le feront et je pense que ce serait très embarrassant, évidemment, si l'Israël ou l'Iran étaient les seuls à ne pas se présenter. Je crois qu'une pression continue doit être exercée pour assurer un comportement responsable.
    J'ai mentionné le TICE tout à l'heure.
    Désolé, qu'est-ce que ce sigle signifie?
    Veuillez m'excuser, c'est une déformation professionnelle.
    Il s'agit du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. C'est une réalisation très importante, mais le traité n'est pas encore entièrement en vigueur à cause de huit États. Trois de ces États, Israël, l'Iran et l'Égypte, ont signé le traité mais ils tardent encore à le ratifier. Le traité doit être ratifié pour être mis en oeuvre.
    S'il est possible d'amener ces États à faire un pas concerté vers la ratification, ce serait une fantastique mesure de renforcement de la confiance.
    Je me répète, je crois qu'il y a des domaines dans lesquels des intervenants extérieurs bien intentionnés — et je place le Canada dans cette catégorie — peuvent encourager les États de cette région à se montrer plus responsables, les aider à surmonter en partie leur méfiance tout en soutenant l'organisation internationale légitime vouée à garantir l'observation du TNP et des accords de garanties de l'AIEA.
    C'est le genre d'approche à l'égard du Moyen-Orient à laquelle je souscrirais.
    Je crois que c'est ce qui se passe, en partie, et le Canada y souscrit, mais le Canada dit aussi que si vous voulez organiser une danse, vous avez besoin de partenaires et pour le moment, nous n'avons pas forcément réussi à attirer ces partenaires, si on suppose que l'Iran a effectivement une capacité nucléaire naissante.
    Combien de minutes?
    Je crois que vous n'avez pas le temps de poser une autre question. Vous avez déjà pris deux minutes de plus que prévu.
    Monsieur Norlock, merci pour cette dernière observation.
    Je vois que nous sommes assez près de la fin de notre séance et au lieu de tenter de lancer un autre tour ou de répartir les deux minutes qui restent, je peux exercer la prérogative du président et poser moi-même une question.
    Nous avons entendu parler de la responsabilité de protéger, et des témoins nous ont parlé de la Libye, et vous-même, madame Mason, en avez parlé aujourd'hui.
    Je me demandais si vous pourriez, à tour de rôle, nous dire ce que vous pensez du concept de la « responsabilité dans les mesures de protection », une idée que le gouvernement du Brésil a présentée au secrétaire général de l'ONU en novembre 2011 dans le sillage de la mission en Libye, pour exhorter la communauté internationale à adhérer à des principes fondamentaux, à des paramètres et à des procédures lorsqu'elle exerce la responsabilité de protéger. Avez-vous, l'un ou l'autre, ou tous deux, des observations à formuler?
(1725)
    Je pense qu'il incombe évidemment à tous les États membres qui contribuent à une mission de se conduire eux-mêmes conformément aux obligations que le droit international leur confère, notamment les droits de la personne et le droit humanitaire. Il est alors nécessaire, puisque les troupes restent toujours sous le commandement national, que ces commandements veillent à la discipline de leurs troupes et que si un militaire est reconnu coupable d'avoir enfreint la loi, qu'il en soit tenu comptable et qu'il fasse l'objet de mesures disciplinaires appropriées.
    L'ONU a fait différentes déclarations dans le passé dans lesquelles elle reconnaît que des membres de missions autorisés et mandatés par l'ONU ont commis des actes criminels, d'où l'importance de garantir que les normes les plus élevées soient appliquées, dans le souci de la réputation et de l'acceptabilité future des missions de l'ONU.
    Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une révélation de la part du Brésil de souligner qu'il y a eu des difficultés, mais je crois que l'ONU a essentiellement réagi comme elle devait le faire, du moins par rapport aux politiques qu'elle a établies.
    Vous ne croyez pas que c'est lié à des préoccupations au sujet d'un glissement dans l'exécution de la mission ou de modification de la mission et de la confusion qui en résulte chez les différents États?
    Personnellement, je n'ai pas vu le texte du Brésil, mais je crois comprendre que la responsabilité de protéger dans le cadre de l'exécution d'une mission fait référence à la reconnaissance qu'il y a évidemment une obligation de respecter le droit international et humanitaire, ce qui limite les soi-disant dommages collatéraux, entre autres.
    Encore là, sans avoir vu les détails, je voudrais simplement dire qu'en ce qui concerne la sensibilisation à cette responsabilité, pour le compte de l'ONU, je crois que c'est assez bien développé.
    Je pourrais peut-être ajouter deux ou trois observations.
    J'ai eu pour ma part la chance d'entendre le diplomate brésilien faire des observations sur le sujet devant un autre comité et je crois qu'il y avait aussi l'élément, qui ressort de la discussion sur la Libye, de savoir si le mandat était rigoureusement respecté ou non. Paul Meyer a mentionné que la Russie et la Chine avaient exprimé leurs préoccupations au sujet de la possibilité que le mandat se soit transformé en un changement de régime alors qu'il n'était manifestement pas censé être un changement de régime.
    Je crois qu'il y a un domaine, je me répète, où un leadership divisé peut faciliter ce genre d'argument, ou susciter des craintes de cet ordre. Si la mission est clairement un mandat de l'ONU et sous le commandement de l'ONU et qu'elle est soumise à la surveillance du Département des opérations de maintien de la paix et au suivie stratégique du Conseil de sécurité, il est à espérer qu'il soit plus difficile de soulever des préoccupations au sujet du mandat. Il incombe au Conseil de sécurité, dans son rôle de suivi stratégique, de veiller à ce que l'ONU ne s'écarte pas de son mandat. Voilà un domaine dans lequel il y aurait encore une fois avantage à ne pas avoir de leadership divisé.
    J'aimerais aussi soulever un autre point, parce qu'il s'agit d'un domaine dans lequel le Canada...
    Veuillez le faire très brièvement parce que nous manquons de temps.
    L'objectif de protéger les civils qui font face à une menace imminente dans le contexte d'une mission fait désormais partie de bon nombre de mandats de l'ONU, et cet élément pose beaucoup de problèmes à l'armée. Il ne s'agit pas d'opérations de combat: c'est tout à fait différent et la doctrine n'a pas suivi cette évolution. Le Canada pourrait apporter une contribution dans ce domaine, de concert avec d'autres pays d'optique commune... Comment s'organiser et quoi faire pour protéger des civils dans les faits? Quels principes pouvons-nous élaborer dans ce contexte? L'ONU a fait une partie du chemin, mais à mon avis, elle aurait avantage que des membres de l'OTAN s'engagent dans l'élaboration de cette doctrine.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Sur cette note, nous allons nous arrêter.
    Madame Mason et monsieur Meyer, merci beaucoup pour vos exposés et votre présence. Ce fut très enrichissant. Ce sont des sujets très complexes à traiter en aussi peu de temps.
    Je crois que vous avez tous deux des documents. Si vous pouvez nous en laisser un exemplaire, nous les ferons traduire et distribuer.
    Quelqu'un veut proposer la levée de la séance?
    Un député: Je propose.
    Le vice-président (M. Jack Harris): La séance est levée.
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