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Messieurs et mesdames les membres du comité, amiral Murray, c'est un privilège pour moi d'avoir été invité à comparaître devant votre comité pour participer à cet important débat sur la disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes.
Je suis ici au nom du brigadier Milton F. Gregg, V.C., du Centre d'étude Gregg sur les conflits et sociétés, qu'on appelle couramment Centre Gregg, de l'Université du Nouveau-Brunswick. Ce centre a pour mandat général d'étudier les causes, le déroulement et les conséquences des conflits dans l'histoire et à l'époque contemporaine, et d'examiner, en particulier, l'évolution de l'Armée canadienne ainsi que son avenir. À cet égard, nous entretenons une collaboration étroite avec le centre d'instruction au combat de la base de Gagetown.
C'est ainsi que des professeurs du Centre Gregg sont invités à participer au perfectionnement professionnel de la force terrestre et des unités d'instruction. Notre programme de recherche comprend notamment des projets en cours sur la mission du Canada en Afghanistan, sur la série de missions dangereuses de maintien de la paix des années 1990, et sur le rôle des Forces canadiennes pendant les deux guerres mondiales. Nous avons bien sûr d'autres projets, mais je serai mieux en mesure de vous parler de ceux que je viens de mentionner, étant donné que je travaille directement dessus.
Le point commun de nos missions en Afghanistan, de nos interventions pendant les années 1990 et, bien sûr, de notre rôle pendant les deux guerres mondiales, c’est qu’à ces trois époques, les forces canadiennes ont fait partie d'une grande coalition d'alliés, qui avaient décidé de conjuguer leurs efforts dans un objectif commun. Il y a aussi ce qu'on appelle aujourd'hui les missions pangouvernementales, c'est-à-dire l'approche globale, ou, le cas échéant, des missions comportant des dimensions inter-agences, multinationales et politiques.
Permettez-moi d'ajouter que nos professeurs, moi y compris, sont des historiens militaires de formation, et que par conséquent nous adoptons une approche historique, fondée sur des données probantes, pour toute cette étude sur la disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes. Par exemple, en 2006-2007, le Centre Gregg a entrepris un projet sur les opérations de l'Armée de terre canadienne en Afghanistan, en examinant l'instruction, le déploiement et le rapatriement, après une première période d'affectation, de la force opérationnelle à Kandahar. Cette étude s’est traduite par une courte description d’une période d’affectation, et, avec les autres recherches que nous avons faites sur des événements qui se sont produits depuis 2008, elle constitue pour l'essentiel la source des informations que je vais vous communiquer aujourd'hui.
En cette époque de guerre technologique très sophistiquée, il semble que la disponibilité opérationnelle nous ramène pratiquement toujours à une question d'équipement. D'après ce que j'ai observé, les composantes les plus importantes de la disponibilité opérationnelle, c'est-à-dire les composantes qui, plus que n'importe quels autres facteurs, déterminent si une unité peut réussir dans sa mission et remporter la victoire sur le champ de bataille, ces composantes, donc, sont l’entraînement et l’éducation. Ces deux préparations intellectuelles très distinctes servent à forger la volonté et la capacité mentale de surmonter l'obstacle afin de mener à bien la mission. L'entraînement et l'éducation sont aussi importants pour les officiers que pour les soldats du rang.
L'histoire militaire du Canada contient de nombreux exemples d'unités bien entraînées et commandées par des officiers ayant un bon niveau d'éducation qui ont réussi à mener à bien leur mission, même sans avoir le matériel le plus perfectionné ou les ressources suffisantes pour garantir leur succès. Je ne veux pas dire par là qu'en investissant dans l'entraînement et l'éducation, on peut faire l'économie d'un bon matériel. On sait que beaucoup d'unités canadiennes ont payé cher en vies humaines leur infériorité en matériel et en armement, mais je suis convaincu qu'une armée a beau avoir les navires, les avions et les tanks les plus sophistiqués, ce qui compte avant tout, ce sont les cerveaux qui les manipulent.
J'associe l'entraînement et l'éducation parce que les deux sont inséparables si l'on veut donner aux membres des Forces canadiennes les compétences pratiques et les capacités intellectuelles nécessaires pour résoudre des problèmes militaires. Il ne faut pas sous-estimer l'importance de l'entraînement et de l'éducation, surtout que cette année, les Forces canadiennes vont devoir se serrer la ceinture avec les coupures budgétaires qui s'annoncent. En effet, il va falloir faire des choix difficiles entre les individus, les institutions, les capacités et les équipements qui sont essentiels au maintien de la disponibilité opérationnelle que doit avoir le Canada, et les autres dont il faudra réduire les financements.
L'expérience des 65 dernières années nous enseigne que, lorsque le Canada décide, en temps de paix, d'imposer des restrictions budgétaires, il réduit traditionnellement les budgets consacrés à l'entraînement et à l'éducation afin de pouvoir continuer d'acheter de gros équipements.
Depuis la Seconde Guerre mondiale, les progrès technologiques font grimper les coûts des équipements militaires, et c'est une réalité à laquelle nous ne pouvons pas échapper. Mais les gens qui se servent de ces équipements doivent toujours être considérés comme notre investissement le plus important. Ça peut prendre 10 ans ou plus pour construire un bateau de guerre, mais, comme je le dis toujours à mes étudiants, ça prend 35 à 40 ans pour former un maître de bord, ça prend 22 ans au moins pour former un bon fantassin, et ça prend 30 ans pour former un bon commandant de section ou un bon officier marinier. Les établissements d'entraînement et d'enseignement au Canada forment d'excellents militaires et n'ont jamais été aussi sophistiqués. Comme en 1914 et en 1939, l'inéluctabilité de la dernière guerre et le risque de perdre des vies humaines obligent ces établissements à viser l'excellence.
Étant donné le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui, où les menaces qui pèsent sur la sécurité globale du Canada sont incertaines, j'estime qu'on n'a jamais eu autant besoin de soldats bien entraînés et bien éduqués. Par conséquent, les établissements qui dispensent l’entraînement et l’éducation doivent être considérés comme une composante essentielle de la disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes, car ils ont été capables, au cours des 20 dernières années, de former les militaires compétents dont le Canada a eu besoin pour les différentes missions auxquelles il a participé.
Les établissements d'enseignement comprennent l’Académie canadienne de la Défense, le Collège militaire royal et le Collège des Forces canadiennes, avec des passerelles vers les universités et collèges civils appropriés.
Pour ce qui est de l'entraînement, je vais parler de l'Armée de terre, puisque c'est ce que je connais le mieux. À cet égard, la doctrine des forces terrestres, le programme d'entraînement et les diverses écoles qui composent le Centre d'instruction au combat sont les ingrédients indispensables qui permettent de former des soldats et des officiers de grande qualité. Ensuite, ces individus sont affectés à des unités sur le terrain pour s'entraîner en équipe. Traditionnellement, pour réduire les budgets, on réduit les coûts de l'entraînement individuel en espérant que le soldat réussira à acquérir ces compétences une fois qu'il se retrouvera dans un régiment, dans un escadron ou sur un navire. D’un autre côté, en temps de guerre, on privilégie souvent l’entraînement collectif, car on se dit que les individus qui ne sont pas qualifiés pourront quand même acquérir des compétences au sein de leur unité, pendant la préparation intensive qu'ils suivent juste avant le combat, et que s’ils n’en sont pas capables, ils seront écartés.
Il est indéniable que la meilleure façon d'assurer la disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes, quelle que soit la menace à laquelle elles doivent faire face, c'est de former des soldats compétents avant qu'ils ne soient affectés à leurs unités. De cette façon, ces soldats peuvent ensuite être préparés et mobilisés plus rapidement, à court préavis, que ce soit pour le soulèvement en Libye, une contre-insurrection soudaine et violente à Kandahar, ou une invasion de la Pologne par l'Allemagne.
Permettez-moi de mentionner, pour conclure, deux aspects de l'entraînement et de l'éducation sur lesquels, à mon avis, les Forces canadiennes devraient insister davantage. Le premier concerne l'histoire militaire; je prêche pour ma paroisse, me direz-vous. Je sais que le Comité permanent des affaires des anciens combattants s'intéresse aux activités commémoratives des grands exploits canadiens en temps de guerre. Il est important que les Canadiens connaissent l'histoire du Canada, mais il est important aussi, si l'on veut se préparer intellectuellement aux différentes menaces qui risquent de se présenter, de connaître l'histoire militaire du Canada, récente et moins récente, sans compter que cela ne coûte pas très cher.
Le deuxième aspect de l'entraînement et de l'éducation dont j'aimerais parler, et qui exige une plus grande attention de la part de plusieurs ministères — je sais qu'un membre de votre comité s'y intéresse plus particulièrement — consiste à offrir la possibilité à des membres des Forces canadiennes de travailler et de s'entraîner avec des agents du MAECI ou de l’ACDI. Peu de gens le savent, mais notre expérience en Sicile, en Normandie, en Somalie, en Bosnie et en Afghanistan nous enseigne chaque fois que la politique du Canada en matière de défense et de politique étrangère est beaucoup plus efficace lorsque les stratèges militaires collaborent avec les représentants civils, les envoyés diplomatiques et les travailleurs humanitaires.
Mais cette collaboration est rendue difficile par les cultures professionnelles divergentes de ces groupes. Ce n'est certainement pas la première fois que vous l'entendez. Pour améliorer la collaboration entre ces différentes entités, il faut donc que les Canadiens appelés à servir dans les quatre composantes (militaires et civiles) reçoivent l'instruction et l'éducation nécessaires pour comprendre que c'est en conjuguant nos efforts que nous pourrons améliorer les choses à l'échelle mondiale. C'est assurément ce qu'ils ont réussi à faire dans le passé.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd’hui.
Au fil des années, le Comité permanent de la défense nationale a largement contribué à la défense et à la sécurité du Canada, et c’est un réel privilège pour moi de présenter des commentaires relativement à votre étude sur le maintien en disponibilité opérationnelle des Forces canadiennes.
Je me dois d’emblée de souligner que je ne comparais pas devant vous aujourd’hui en ma qualité de membre externe du Comité de vérification ministérielle, et que les commentaires que j’exprime représentent mon point de vue personnel à titre de simple citoyen.
L'une des exigences de la stratégie de défense Le Canada d’abord, ou SDCD, est la suivante:
... une force bien équilibrée, polyvalente et apte au combat et avoir toute la souplesse nécessaire pour relever l’ensemble des défis qui se présenteront dans les années à venir.
Il est primordial pour la défense et la sécurité canadiennes de satisfaire à cette exigence.
Dans mes observations préliminaires, je préciserai ce que signifie un tel engagement au chapitre de la disponibilité opérationnelle, laquelle est définie dans la SDCD comme étant:
... la souplesse et l’état de préparation des Forces canadiennes pour se déployer à la demande du gouvernement. Elle englobe les ressources nécessaires pour assurer la maintenance de l’équipement, la tenue de l’entraînement et la préparation des unités en vue des opérations.
La disponibilité opérationnelle est l’un des quatre piliers des capacités militaires décrits dans la SDCD, les trois autres étant le personnel, l’équipement et les infrastructures.
Revenons à l’engagement de disposer d’une force bien équilibrée, polyvalente et apte au combat. Je vais maintenant présenter certains aspects clés nécessaires à une force opérationnelle bien équilibrée, polyvalente et apte au combat des Forces canadiennes.
Tout d’abord, l’équilibre comporte de nombreuses facettes et doit inclure un équilibre entre les quatre piliers eux-mêmes, c'est-à-dire un équilibre entre les capacités des Forces canadiennes au sein de la Marine, de l’Armée de terre, de la Force aérienne, de la force interarmées et de la force spéciale; et un équilibre dans les niveaux de préparation des diverses capacités et unités de nos Forces canadiennes.
L’atteinte des divers types d’équilibre dont je vous parle ici est un art, et non une science, qui nécessite une bonne dose de jugement professionnel et aguerri, exactement du genre de celui acquis et amplement démontré par les Forces canadiennes au cours de la dernière décennie.
L’équilibre constitue aussi un objectif permanent quelque peu théorique qui doit être rajusté de temps à autre en fonction des réalités opérationnelles et financières courantes. La mission terrestre de combat en Afghanistan est un exemple où il a fallu accorder une priorité particulièrement élevée, entre autres, à la disponibilité opérationnelle des unités d’armes de combat de l’Armée de terre et à la capacité de la Force aérienne en matière d’hélicoptères tactiques.
En ce qui a trait aux quatre piliers, le maintien d’un équilibre entre le personnel et la disponibilité opérationnelle requiert un financement suffisant pour garantir un entraînement individuel et collectif permettant de doter le personnel de la force nécessaire pour satisfaire pleinement et concrètement aux niveaux de préparation. Autrement dit, le nombre de militaires portant l’uniforme doit s’équilibrer avec les ressources disponibles pour ainsi obtenir des membres qualifiés et efficaces des Forces canadiennes.
En ce qui concerne l’équipement, il se doit d’être moderne; il doit garantir une capacité de combat et permettre aux Forces canadiennes de remporter la victoire sur des champs de bataille complexes et redoutables en ce XXIe siècle. En cette ère technologique très avancée, aucun entraînement, même celui dont jouit le personnel militaire de calibre international comme les Forces canadiennes, ne peut parer aux contraintes dues à de l’équipement désuet et inadéquat qui ne peut être à la hauteur de celui dont dispose un adversaire bien équipé. De plus, fait malheureux, des armes modernes sont facilement accessibles de nos jours à n’importe quel joueur, faisant partie ou non d’un État, et disposant d’assez d’argent.
En outre, étant donné que le financement et d’autres ressources sont, et seront sans doute, toujours limités, il est essentiel de faire tous les efforts possibles pour remplacer l’équipement désuet, dont le coût de maintenance et d’opération est extrêmement élevé et qui n’apporte habituellement qu’une capacité opérationnelle assez restreinte dans l’équation de la disponibilité opérationnelle, en dépit des coûts exorbitants. Le vénérable hélicoptère Sea King, qui faisait de l'excellent travail déjà avant la fin des années 1960, quand je suis entré dans la Marine, est un exemple classique de ce problème.
Dans le même ordre d’idées, il doit exister un équilibre entre les investissements effectués dans les infrastructures et dans la disponibilité opérationnelle. L’emplacement, la capacité et le coût des infrastructures sont tous des éléments qui affectent directement ou indirectement la disponibilité opérationnelle. Il faut assurer un maintien adéquat des infrastructures utiles et réduire au minimum les investissements inutiles consacrés aux infrastructures âgées et désuètes qui sont d’une utilité ou d’une valeur opérationnelle limitée, plus particulièrement dans le contexte de ressources limitées auquel font aujourd’hui face le Canada et le ministère de la Défense nationale (MDN).
Ainsi qu’il a été souligné au départ, et comme en témoignent les opérations diversifiées menées par les Forces canadiennes à l’échelle mondiale depuis la fin de la guerre froide, il doit aussi exister un équilibre dans les Forces canadiennes entre les capacités de la Marine, de l’Armée de terre, de la Force aérienne, de la force interarmées et de la force spéciale. C’est primordial si le gouvernement compte disposer de la souplesse nécessaire pour satisfaire à toute la gamme d’exigences opérationnelles possibles dans ce monde dangereux et imprévisible dans lequel nous vivons.
Le besoin récent et presque simultané pour le gouvernement de tenir un rôle de combat en Afghanistan dans le cadre d’opérations de contre-insurrection, et d’organiser « à toute vapeur » une opération majeure d’aide humanitaire à la suite du tremblement de terre dévastateur survenu en Haïti ou de diriger et fournir des forces navales et aériennes de combat lors de la mission de l’OTAN en Libye, montre bien pourquoi un investissement excessif dans la disponibilité opérationnelle d’une capacité donnée au détriment d’autres capacités représenterait une stratégie des plus risquées pour le Canada.
Mon commentaire final concernant l’équilibre a trait à la nécessité de disposer des ressources adéquates afin qu’aucune composante, aucune unité ou aucun groupe de militaires des Forces canadiennes ne soit maintenu dans une disponibilité opérationnelle de haut niveau ou en opération sans relève adéquate. Cela s’est produit à l’occasion par le passé au sein des Forces canadiennes et de nos alliés. Au bout du compte, c’est une recette qui donne lieu à l’épuisement professionnel du personnel, à des problèmes de maintien en poste et à une efficacité opérationnelle réduite.
Les Forces canadiennes sont reconnues partout dans le monde pour leur professionnalisme hors pair et leur dynamisme. Cependant, un investissement moindre veut dire une disponibilité opérationnelle moindre, qui peut se traduire directement par une souplesse réduite dans l’attribution des tâches et par un rythme opérationnel réduit et, à tout le moins, des délais d’intervention opérationnelle beaucoup plus lents pour les Forces canadiennes dans les secteurs où existe un faible degré de préparation.
Mes commentaires au sujet de l’équilibre ont, dans une certaine mesure, englobé bon nombre d’aspects que j’aborderai au sujet de la polyvalence. Le fait, notamment, d’assurer un bon équilibre des niveaux de préparation des capacités de la Marine, de l’Armée de terre, de la Force aérienne, de la force interarmées et de la force spéciale, permet de garantir, dans une large mesure, des Forces canadiennes aptes et polyvalentes.
Cependant, la nature diversifiée des six missions confiées aux Forces canadiennes, dans le cadre de la stratégie de défense Le Canada d’abord, fait ressortir d’autres aspects des exigences au chapitre de la polyvalence.
Voici brièvement en quoi consistent les six missions: mener des opérations quotidiennes nationales et continentales; offrir un soutien dans le cadre d’un événement international important au Canada; répondre à une attaque terroriste importante; appuyer les autorités civiles en cas de crise au Canada, par exemple en cas de catastrophe naturelle; diriger et/ou mener une opération internationale importante durant une période prolongée; déployer des forces en cas de crise à l’étranger pour une période de plus courte durée.
Comme nous le savons tous, il ne s’agit pas ici d’une liste purement hypothétique. En 2010, les Forces canadiennes se sont acquittées, de façon très efficace et simultanément, de quatre de ces missions.
En plus des exigences militaires traditionnelles, il ressort clairement de cette liste de missions qui ont été confiées aux Forces canadiennes que la polyvalence doit englober une disponibilité opérationnelle en vue d’appuyer les autres ministères et provinces, ainsi que les organismes chargés de faire respecter la loi et les organismes de secours d’urgence au Canada et à l’étranger.
L’exigence qui est énoncée dans la stratégie de défense Le Canada d’abord et selon laquelle les Forces canadiennes doivent être aptes au combat est absolue et primordiale. Dans le monde actuel, les unités et le personnel des Forces canadiennes déployés à l’étranger et qui s’exposent à des dangers doivent être aptes au combat.
Depuis 1990, plus précisément au cours de la dernière décennie, les opérations militaires canadiennes ont permis aux Forces canadiennes de faire preuve d’un leadership à tous les niveaux grâce à une expérience de combat inestimable, et d’évaluer de façon très pratique et crédible les exigences liées à l’entraînement individuel et collectif, à l’équipement et au soutien nécessaires pour assurer la disponibilité opérationnelle élevée essentielle au succès dans le cadre des combats futurs.
Cette expertise sera essentielle au cours des mois et des années à venir, à mesure que progressera la transformation des Forces canadiennes et que le gouvernement, le MDN et les Forces canadiennes s’efforceront de poursuivre la mise en oeuvre de la stratégie de défense Le Canada d’abord, dans le but de fournir une force bien équilibrée, polyvalente et apte au combat, malgré les contraintes budgétaires à court terme dues à la crise économique mondiale et ses répercussions sur le Canada.
Pour terminer, je voudrais dire que la fierté et le dévouement désintéressés des membres des Forces canadiennes, ainsi que la supériorité de leur préparation, se fondent sur la conviction qu'ils ont qu'eux et leurs familles seront pris en charge s'il leur arrivait d'être blessés ou tués au service du Canada. En conséquence, je ne saurai trop insister sur l'importance de l'engagement pris par le ministère de la Défense nationale de traiter les membres des Forces canadiennes, les anciens combattants et leurs familles, y compris les familles de ceux qui sort morts au combat, avec dignité, compassion et générosité.
Les investissements réalisés récemment dans les programmes d’aide aux victimes et dans les soins de santé, ainsi que dans les améliorations apportées à la Nouvelle Charte des anciens combattants, sont essentiels et doivent se poursuivre.
Je vous remercie, monsieur le président. Je me ferai maintenant un plaisir de tenter de répondre aux questions des membres du comité.
Amiral, vous avez dit dans votre déclaration liminaire, au troisième paragraphe de la page quatre:
Mon commentaire final concernant l’« équilibre » a trait à la nécessité de disposer des ressources adéquates afin qu’aucune composante, aucune unité ou aucun groupe de militaires des Forces canadiennes ne soit maintenu dans une disponibilité opérationnelle de haut niveau ou en opération sans relève adéquate.
Nous savons que, pour envoyer une relève à la force régulière, il faut faire appel à la réserve. Un grand nombre de personnes nous ont dit que, dans les milieux bien informés, on s'attendait à ce que les coupures ciblent prioritairement la réserve, car c'est là que c'est le plus facile.
Si l'on part du principe qu'on a besoin de la réserve… Au cours des 10 dernières années, si nous n'avions pas pu compter sur la réserve, nous n'aurions pas eu de forces armées canadiennes. Sans les réservistes, nous n'aurions pas eu la force permanente que nous pensions tous avoir. Autrement dit, la réserve a joué un rôle crucial.
Pour en revenir au budget, je comprends que vous disiez, amiral, qu’aucun gouvernement ne va attendre le rapport d'un simple comité. Je vous le concède. Mais j'avais quand même préfacé ma question en disant que je supposais que le gouvernement n'avait pas encore pris de décision au sujet de la disponibilité opérationnelle, car sinon, cela reviendrait à forcer notre comité à tourner en rond, ce qui, nous le savons, n’est pas du tout son intention.
Sans savoir ce que nous annoncera finalement le budget, j'ai l'impression que la réserve va être la première victime, car c'est là que les coupures feront le moins de dégâts. Par contre, cela aura immédiatement un impact sur la disponibilité opérationnelle, puisque, comme vous l'avez dit, amiral, nous devons nous assurer qu'aucune unité ni aucun groupe de militaires n'est maintenu dans une disponibilité opérationnelle de haut niveau sans relève adéquate.
Qu'en pensez-vous, amiral — et vous aussi monsieur Windsor, si vous voulez faire quelques commentaires?
Je n'ai pas dit « simple comité », car votre comité est extrêmement important, et je le pense sincèrement.
La question de la réserve est un enjeu énorme. Il est indéniable que, pendant les années 1990, l'armée régulière et la réserve ont toutes deux été sollicitées de façon excessive. C'est à cela que je fais allusion ici. De plus, peu après sa nomination au poste de commandant de l'Armée, Rick Hillier avait déclaré que l'Armée avait été sollicitée de façon excessive et qu'il était temps de lui donner un peu de répit. C'est un peu la même chose maintenant. Mais quand je pense à certains de nos alliés, je ne sais vraiment pas comment ils font, quand on voit les coupures budgétaires qui leur sont imposées. Ça fait réfléchir.
Pour ce qui est de la réserve, je pense qu'il vaut mieux attendre le budget et voir ce que le ministre de la Défense et le chef d'état-major de la Défense décideront en conséquence. Je serais surpris qu'on diminue le nombre de réservistes. Par contre, comme le recommandait le rapport Leslie, et vous savez sans doute que cela est actuellement envisagé, il se peut qu'après notre mission en Afghanistan, on réduise le nombre de réservistes de classe B, qui ont un contrat à plein temps, puisqu'on en a moins besoin depuis qu'on ne participe plus à des missions de combat en Afghanistan. Par contre, je serais très surpris que des changements soient apportés aux réservistes de classe A.
Je pense également que, pendant les années 1990 et en Afghanistan, tous les services se sont rendu compte de la capacité extraordinaire que représentaient les réservistes. Par conséquent, je crois que, dans le cadre de la transformation des Forces canadiennes et compte tenu des leçons que nous avons tirées et dont parlait mon collègue tout à l'heure, nous allons faire ce qu'il faut pour que les réserves conservent leur dynamisme et que les leçons que nous avons tirées de notre expérience en Afghanistan et lors d'autres missions récentes soient prises en compte. Je serais très surpris qu'à la suite du budget, on apporte des changements à la réserve.
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Il est indéniable que les équipements que vous venez de décrire ont joué un rôle crucial en sauvant des vies et en contribuant au bon déroulement de la mission, mais c'est aussi grâce aux compétences fondamentales que possèdent les militaires canadiens, compétences qu'ils ont acquises au cours de différentes missions de maintien de la paix, comme c'était le cas en Afghanistan pendant les 10 années qui ont précédé le déploiement à Kandahar.
D'après ce que j'ai pu observer personnellement, c'est-à-dire la capacité accrue de surveiller tous les recoins de la province de Kandahar… J'étais dans la salle lorsqu'un UAV a permis de sauver une vie tout en contribuant à mettre fin à une autre, ce qui, par ricochet, a contribué à la victoire — et en plus, le coût est relativement modeste, ce qui est assez étonnant.
À bien des égards, ma réponse paraîtra évidente à beaucoup d'entre vous: ces nouveaux types d'équipements font partie de ceux dont je parlais tout à l'heure — ils sont nouveaux pour nous, en Afghanistan, mais ils pourraient certainement être utiles ailleurs, et c’est donc là le genre de capacités et d'équipements que nous devons conserver quoi qu'il arrive.
Cela a aussi contribué à mettre au jour la valeur d’un service particulier de l'Armée qu'on avait eu tendance, comme vous y avez fait allusion tout à l'heure en parlant d'équilibre, à remiser dans un coin obscur, et je veux parler de l'artillerie. Le Régiment royal de l'artillerie canadienne, à la fois l'armée régulière et la réserve, dispense des programmes d'entraînement qui apprennent aux soldats comment se servir de ce genre d'équipement, et je vous rappelle que la devise du Régiment royal est « Ubique », c'est-à-dire omniprésents. Ils sont entraînés à contrôler le théâtre des opérations dans toutes ses dimensions et dans tous ses aspects, dans tous les coins, et d'en surveiller toutes les dimensions et tous les aspects. Ils fournissent des informations ponctuelles aux commandants, lesquels sont alors en mesure de prendre des décisions judicieuses quand il faut tirer, quand il faut manoeuvrer ou quand il faut mener une négociation avec un dirigeant important.
Par conséquent, les gens qui — et j'en reviens à ce que je disais dans ma déclaration liminaire — contrôlent les UAV et le RSR sont généralement des canonniers. D'où la nécessité de préserver, à l'avenir, le rôle crucial de l'artillerie dans l'Armée canadienne.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins de comparaître.
Au cours des dernières semaines, j'ai eu le privilège d'écouter plusieurs conférences du lieutenant-général Bouchard qui, je suppose, est à l'avant-garde de la disponibilité opérationnelle. En tout cas, compte tenu de son expérience à des postes de commandement dans notre armée, il est certainement très bien placé. Il a parlé de son expérience au commandement des forces de coalition en 2011-2012, et ses commentaires ressemblent étrangement aux vôtres. Il a parlé des sensibilités culturelles dont il faut tenir compte lorsqu'on dirige des forces de coalition. Il a aussi parlé des contraintes, quand on lui dit qu'il a 80 ou 90 avions à sa disposition alors qu'en fait, il ne peut compter que sur 40 ou 45 appareils. Et c'était la même chose pour les navires: s'il avait une flotte de 10 ou 12 bâtiments, il n'y en avait en fait que cinq ou six qui étaient opérationnels. Il a parlé aussi des mandats divergents des gouvernements.
Il a fait également une observation intéressante au sujet des différents niveaux de secret entre les alliés: le renseignement n'est pas toujours mis à la disposition des autres, si bien que pendant la première phase des bombardements, ils utilisaient littéralement des cartes Google pour repérer l'endroit où ils devaient lâcher leurs bombes. En conclusion, il a parlé d'une certaine « agilité d'esprit », ce qui nous ramène aux deux aspects que vous souligniez tout à l'heure, monsieur Windsor: il faut connaître l'histoire militaire, mais il faut aussi avoir les compétences intellectuelles nécessaires pour diriger.
Vous avez fait une remarque intéressante en ce qui concerne l'interopérabilité, faute d'un terme plus approprié, entre le MAECI, l'ACDI et les Forces canadiennes. Ces trois grands silos sont encore passablement isolés, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez à propos de l'interopérabilité.
J'aimerais également savoir quel conseil vous aimeriez donner aux Forces canadiennes pour qu'elles tiennent compte, dans leur recrutement, de cette « agilité d'esprit ». Car si c'est une qualité vraiment importante en 2011-2012, elle va l’être encore plus dans quelques années.
Ma troisième question porte sur le rapport du général Leslie, notamment toute la question de la « frappe » et des « arrières », à propos de la composition de l'effectif. Pour l'instant, ni le CEMD ni le ministre n'ont choisi de répondre au rapport du général Leslie. Si vous en aviez l’occasion, quel suivi conseilleriez-vous au CEMD ou au ministre de donner aux recommandations du général?
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Je ne suis pas très à l'aise pour répondre à la troisième question, car je ne pense pas avoir une connaissance suffisante de la situation. Mais pour ce qui est des deux premières, je vais vous donner quelques idées qui vous seront peut-être utiles.
En ce qui concerne votre première question, c'est-à-dire la question de l'interopérabilité entre les Forces canadiennes et d'autres ministères fédéraux, c'est un problème beaucoup plus difficile à régler que celui qui consiste à opérer efficacement avec nos alliés de l'OTAN. Depuis longtemps, les Forces canadiennes participent à des manoeuvres multinationales, à des programmes d'échange d'officiers, et à des programmes d'entraînement conjoints, où les officiers sont envoyés à l'étranger, dans d'autres pays de l'OTAN. À ce niveau-là, ce n'est pas un problème. Par contre, quand il s'agit de trouver des façons de surmonter les barrières culturelles qui existent entre l'Agence canadienne de développement international, le ministère des Affaires étrangères et les Forces canadiennes, c'est là qu'on a un problème.
Au cours des 20 dernières années, chaque fois que ces trois ministères ont réussi à collaborer efficacement, c'était, je pense, grâce aux personnalités en place. Ces gens-là collaboraient bien entre eux, mais leurs ministères ne collaboraient pas bien à cause de leurs organisations structurelles respectives.
L'obstacle le plus important me semble être l'idée qu'ils se font de la planification militaire, et leur appréhension de l'espace et du temps, combien de temps ça va prendre pour mettre en oeuvre tel ou tel projet. Les Forces canadiennes doivent pouvoir arrêter des plans et organiser des opérations en un tournemain. Les gens des Affaires étrangères, eux, travaillent sur un horizon de six mois, un an, voire deux ans. Quant à l’ACDI, c'est un horizon de plusieurs décennies.
Je suppose que les Forces canadiennes sont, parmi les trois, la seule organisation à avoir une taille suffisante pour pouvoir envoyer ses hauts dirigeants à un programme de perfectionnement professionnel bien ciblé.
Je pense que Bouchard a fait du très bon travail. Que la force de coalition le garde pour bénéficier de l'expérience qu'il a acquise au Canada et à l'OTAN est une très bonne idée.
Pour ce qui est de la collaboration entre le MAECI, l'ACDI et les Forces canadiennes, je reconnais que le défi est de taille, mais il ne faut pas oublier le rapport Manley et la réponse du gouvernement à ce rapport, le retour d'expérience de l'Afghanistan, les efforts déployés par certaines personnes — y compris un membre de ce comité — et les leçons que nous tirons de l'Afghanistan, tout cela, c'est hors pair.
Ce qu'il faut faire, c'est tirer profit de ce retour d'expérience et l'institutionnaliser, pour être sûrs que nous n’oublions aucune des leçons que nous avons tirées en Afghanistan, sans parler de l'expérience de gens comme le général Bouchard, lequel a dirigé une force de coalition de 31 pays.
L'approche pangouvernementale que nous avons adoptée pour notre mission en Afghanistan, quand je vois où cela nous a menés, j'estime que c'était la meilleure approche. En tout cas, elle était aussi bonne que celle de n'importe lequel de nos alliés. Avant, ça fonctionnait sur le terrain, mais ça ne fonctionnait pas à Ottawa. Maintenant, ça va bien à Ottawa depuis quelques années, et il faut conserver ce modèle.
Pour ce qui est du recrutement, je vous dirai que la réponse, c'est l'éducation. C'est ça qui est important.
Vous avez posé tout à l'heure une question au sujet des réservistes, et je peux vous dire qu'ils m'épatent. Voyez combien ils sont à avoir un doctorat. En fait, dans la force régulière, c'est l'éducation qui est la solution au recrutement, en plus des possibilités de perfectionnement professionnel, dans les collèges militaires aussi bien que dans les universités civiles.
D'après ce que je sais, le rapport du général Leslie sur « la frappe et les arrières » fait l'objet d'un suivi, mais comme le budget va être présenté prochainement, il y a tout le secret qui entoure son contenu. Mais le chef d'état-major de la Défense a déclaré, à la conférence d'Ottawa sur la sécurité et la défense — tout comme le ministre, la semaine dernière — qu’il prenait des mesures à la suite du rapport Leslie. Comme je l'ai dit tout à l’heure, il y aura des changements pour ce qui est de l'infrastructure civile et du nombre de réservistes de classe B; je pense que ce n'est un secret pour personne. Mais je pense aussi que certains aspects importants du rapport Leslie vont faire l'objet d'un suivi attentif.
Je m'en tiendrai là.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aussi à nos témoins.
Je voudrais profiter de la présence d'un historien parmi nous pour lui poser quelques questions.
Amiral Murray, vous nous avez fait un exposé qui, sur le plan de la doctrine, me paraît tout à fait bien articulé, surtout quand vous parlez de la disponibilité opérationnelle et de la nécessité de maintenir un certain équilibre. Quand on passe en revue les six missions énoncées dans la stratégie de défense Le Canada d'abord, on se pose justement la question de l'équilibre pour les missions cinq et six. Quand on parle de disponibilité opérationnelle, c'est au niveau de ces deux missions qu'il semble que le bât blesse. Autrement dit, comment définissez-vous le maintien de la disponibilité opérationnelle dans le cadre de ces deux missions?
Dans vos propos sur l'équilibre, vous supposez, et je constate moi-même que ça revient régulièrement dans nos discussions, vous supposez, dis-je, que l'histoire va se répéter, et ça fait déjà plus de 10 ans que nous sommes en Afghanistan. Autrement dit, pour ce qui est de la disponibilité opérationnelle, il faut que, dans notre stratégie d'équilibre, nous prévoyions que nous aurons un autre Afghanistan et que nous aurons à combattre dans le cadre d'une autre mission de ce genre.
J'aimerais donc vous demander, à vous monsieur Windsor, pour commencer, comment l'histoire peut-elle nous aider à anticiper l'avenir? Est-il vraiment inéluctable que nous devions nous préparer à un autre Afghanistan ou à une autre opération internationale importante, qui nécessitera le déploiement de contingents considérables sur le terrain, par exemple? Ou bien peut-on tirer certaines leçons de l'histoire qui nous donneraient peut-être une perspective différente sur l'équilibre des forces, par exemple?
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C'est une question difficile.
Je pense que nous n'aurions pas intérêt — c'est le genre de question que les historiens militaires réexaminent régulièrement — à nous préparer pour une dernière mission. Ce n'est pas l'objectif de cette discipline.
Mais nous pouvons trouver des exemples… prenons celui de l'Afghanistan.
Il n'y a rien dans la mission canadienne à Kandahar que les Forces canadiennes n'avaient pas déjà expérimenté à un moment donné, dans le passé; or, il a fallu créer de nouvelles institutions, de nouvelles capacités et de nouvelles stratégies alors qu'en fait elles existaient déjà.
Je vais vous donner rapidement l'exemple de l'invasion de la Sicile par les Alliés, car c'est un projet sur lequel nous travaillons en ce moment. Les forces armées essayaient d'influer sur des négociations diplomatiques contre une puissance ennemie, le gouvernement italien, et par conséquent, les opérations militaires devaient être organisées de façon à influer sur ce processus diplomatique. Le paysage devait être reconstruit afin de pacifier la population et de la rallier à la cause des Alliés, et par conséquent, les forces de reconstruction faisaient partie intégrante des forces de combat… Il s'agissait aussi de mener une guerre très intense contre une armée qui utilisait des engins explosifs improvisés pour vous empêcher de pénétrer dans des montagnes qui ressemblaient étrangement à l'Afghanistan.
Vous trouverez dans l'histoire tous les outils d'apprentissage qu'il vous faut, mais vous ne devez pas conclure, de l'exemple de l'Afghanistan, que les autres missions se dérouleront exactement de la même façon. S'il y a une leçon à tirer de ces deux exemples — l'invasion de la Sicile pendant la Seconde Guerre mondiale et l'Afghanistan —, c'est qu'il y a, en matière de formation et de préparation, une série de principes reconnus auxquels les Forces canadiennes adhèrent, tout comme leurs partenaires de l'OTAN.
Si vous vous préparez au pire scénario, vous serez capables de mener à bien n'importe quelle mission.
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Toute cette question est vraiment très intéressante. Personnellement, je suis extrêmement fier, en tant que Canadien, de… Parlons de l'Afghanistan. Quelles que soient les opinions que les gens ont pu avoir au sujet de notre engagement en Afghanistan, il est indéniable qu'ils ont toujours appuyé les membres des Forces canadiennes. Chaque fois qu'il a été question de TSPT, de soins de santé ou de soutien aux familles, 30 millions de Canadiens se sont ralliés à la cause, quelles que soient leurs opinions.
Vous savez, quand on voit ce qui se passe au sud de la frontière, c'est un peu ce qui arrive quand l’armée ne se sent pas suffisamment appuyée par la population. Je ne dis pas qu’il n’y a pas eu un peu de ça au Canada, mais de façon générale, ce n'est pas ainsi que ça s'est passé chez nous, et il faut que ça continue comme ça.
Ce n'est pas aux généraux ou aux soldats d'expliquer à la population pourquoi nous sommes en guerre, mais en revanche, il faut qu'ils aient la possibilité d'expliquer et de montrer à la population canadienne ce qu'ils sont en train de faire. Certes, ils ne peuvent pas emmener les Canadiens voir ce qui se passe en Afghanistan, mais ils peuvent inviter les Canadiens à des portes ouvertes dans les bases, sur les navires, etc., enfin ce genre de choses.
Je pense que c'est l'une des raisons principales pour lesquelles les programmes des réservistes et des cadets sont si importants au Canada. Les réserves sont présentes dans beaucoup plus de collectivités que l'armée régulière. Quel que soit le nombre avec lequel on se retrouvera — 70 000, 60 000 —, les soldats sont regroupés dans des super-bases généralement éloignées des grands centres urbains. C'est pour ça qu'on a encore plus besoin de nos programmes de réservistes et de cadets. Le fait est que les Forces canadiennes... j'ai dit tout à l'heure qu'elles font de l'excellent travail parce que ce sont des forces canadiennes. Vous savez, il faut montrer aux Canadiens ce que fait l'Armée canadienne, surtout qu'avec notre magnifique mosaïque multiculturelle, tous ces gens qui viennent d'autres pays, où ceux qui portent un uniforme ne sont pas nécessairement les personnes les plus fréquentables — en fait, il vaut mieux éviter de les rencontrer... C'est important de leur faire comprendre que ceux qui portent un uniforme canadien sont des gens qui ont une éthique, une morale, etc.
Comment y parvenir? Je ne sais pas vraiment. Vous êtes beaucoup plus experts en la matière que moi. L'engagement est quelque chose de très important. Si nous n'avons pas un autre Afghanistan bientôt — ce que je souhaite —, ou une autre Libye, comment entamons-nous ce dialogue?
C'est important, dans une démocratie moderne, de savoir comment les citoyens peuvent converser avec les militaires et vice-versa de façon que chacun se comprenne et se fasse confiance.