Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité de nouveau à comparaître devant votre comité afin de vous informer de la disponibilité opérationnelle au sein des Forces canadiennes.
[Français]
Comme vous le savez, je suis le major-général Jonathan Vance, directeur de l'état-major interarmées stratégique.
Au nom de la haute direction de la Défense nationale, permettez-moi de commencer par dire que nous sommes très heureux de votre intérêt relativement à l'étude de la préparation des Forces canadiennes. Bien que souvent méconnue, la disponibilité est une question de première importance pour les Forces canadiennes. Elle est au coeur même de la façon dont nous concevons la force et que nous préparons et déployons des hommes et des femmes des Forces canadiennes.
Devant vous, vous trouverez huit diapositives offrant une large vue relative à la préparation des Forces canadiennes. Je tiens à vous guider à travers cette brève présentation, après quoi je serai heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
Passons à la diapositive no 1, qui présente un organigramme du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes. Comme vous le savez, le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes sont des organisations uniques et complexes. Elles sont contrôlées et gérées par un quartier général intégré dans lequel le personnel militaire et civil travaillent main dans la main pour s'assurer que les hommes et les femmes qui servent le Canada le font avec les meilleures ressources et la meilleure formation disponibles.
La préparation est une question de portée générale qui s'applique à tous les niveaux de commandement au sein des Forces canadiennes, ainsi qu'à beaucoup de nos homologues civils de la Défense nationale. Je suis conscient que dans le cadre de votre étude, vous avez déjà exprimé un intérêt à rencontrer le commandant du Commandement Canada, le commandant du Commandement de la Force expéditionnaire du Canada et le commandant de l'Armée canadienne. Et je sais que vous allez entendre mon patron, le Chef d'état-major de la Défense, ce jeudi, qui sera en mesure de vous fournir son opinion sur l'état de préparation des Forces canadiennes. Je suis certain que tous ces témoignages seront très utiles à votre étude.
Pour les compléter et afin de nous assurer que vous obteniez un aperçu exhaustif de la préparation des Forces canadiennes, nous suggérons respectueusement que vous envisagiez de convoquer le commandant de la Marine royale canadienne, l'Aviation royale canadienne et le commandant du Commandement du soutien opérationnel du Canada, ou leurs représentants. Enfin, le vice-chef d'état-major de la Défense, le vice-amiral Donaldson, se tiendra à votre disposition à la fin de mon exposé pour répondre à toute question que vous pourriez avoir et mettre en contexte la préparation des Forces canadiennes dans le cadre de la gestion globale des ressources et du développement des forces.
J'aimerais simplement faire une remarque sur cette première diapositive. Les encadrés en surbrillance montrent qui va comparaître et qui, selon nous, devrait comparaître. Je ne peux m'attendre à ce qu'ils comparaissent tous.
Diapositive 2. En prévision de vos audiences, j'ai pensé qu'il pourrait être utile d'expliquer le rôle de chacun des témoins potentiels quant à l'état de préparation des Forces canadiennes. Vous trouverez la liste de leurs fonctions ainsi que leurs photos sur la diapositive 2.
Tout d'abord, il y a le chef d'état-major, qui est responsable du commandement et du contrôle des Forces canadiennes, et donc, de la préparation des Forces canadiennes dans son ensemble.
Ensuite, le lieutenant-général Semianiw, commandant du Commandement Canada, assure le commandement de toutes les opérations effectuées au pays ainsi que les opérations englobant le Canada, les États-Unis et le Mexique. Dans notre jargon, dans le cadre de la préparation, nous disons que c'est celui qui emploie la force. Il s'agit d'un commandant de niveau opérationnel qui déploie les forces pour des missions nationales et continentales.
De même, le lieutenant-général Beare, commandant du COMFEC, Forces expéditionnaires du Canada, emploie la force pour les opérations expéditionnaires, comme en Afghanistan et en Libye.
En ce qui concerne ceux qui génèrent la force, c'est-à-dire ceux qui détiennent les forces, le lieutenant-général Devlin est le commandant de l'Armée canadienne. C'est à lui que revient la tâche de fournir des troupes prêtes au combat et de l'équipement qui peuvent être confiés à un commandant opérationnel et déployés dans le cadre d'opérations nationales ou internationales par les employeurs de la force.
Diapositive 3. Dans le même ordre d'idées, le lieutenant-général André Deschamps et le vice-amiral Paul Maddison, commandants respectifs de l'Aviation royale canadienne et de la Marine royale canadienne, fournissent les marins, le personnel aérien, les navires et les avions prêts au combat qui peuvent être efficacement déployés par les employeurs de la force.
Je voudrais souligner qu'une partie importante de la préparation est la capacité d'appuyer les opérations, c'est-à-dire la logistique, en quelque sorte. Si vous le souhaitez, vous pourrez entendre le major-général Mark McQuillan, le commandant du Commandement du soutien opérationnel du Canada, dont l'organisation s'occupe de générer et d'employer la force.
Enfin, le vice-chef d'état-major de la Défense, le vice-amiral Bruce Donaldson, est responsable devant le sous-ministre et le Chef d'état-major de la Défense pour les questions internes. Il est particulièrement bien placé pour vous parler de la manière dont la préparation des Forces canadiennes est gérée du point de vue des ressources, de la structure de la force et du développement de la force.
Diapositive 4. Nous en venons maintenant au coeur de la question: qu'est-ce que la préparation. Je tiens à souligner que la préparation englobe un large éventail d'activités et doit donc être bien expliquée car il existe différentes interprétations de ce qu'elle représente. Dans les grandes lignes, la préparation est la capacité d'une force militaire d'exécuter une mission ou une tâche en temps opportun et dans le respect des délais prescrits. Le caractère opportun et la durée de la mission sont à prendre en compte.
Bien sûr, cette capacité est influencée par plusieurs facteurs. Nous considérons que la préparation se trouve au carrefour des considérations stratégiques et politiques, du renseignement, des ressources et de la formation.
La diapositive 5 vous montre des aspects précis de la préparation. Premièrement, il y a la préparation tactique, qui consiste à dispenser la formation et à fournir l'équipement nécessaire à la réalisation de la tâche visée, et qui consiste à rassembler notre personnel afin de le former de façon collective au sein de leur service respectif, soit l'armée de terre, la marine ou l'aviation.
Deuxièmement, il y a la préparation opérationnelle, qui consiste à rassembler ces services ou des éléments de ces services dans un environnement interarmées composé de différents services et de différents types d'opération et à les former à collaborer afin de réaliser une mission précise.
Bien entendu, ces deux derniers se combinent pour produire la préparation stratégique, c'est-à-dire la capacité de l'armée dans son ensemble de répondre aux directives et aux priorités gouvernementales.
La diapositive 6 explique brièvement comment on atteint un état de préparation élevé. D'abord, l'individu doit recevoir l'entraînement pour s'acquitter de son rôle et de sa tâche. Deuxièmement, l'entraînement collectif permet de rassembler les effectifs et de former des unités cohésives au sein des services. Troisièmement, comme je viens de le dire, ces groupes propres à chaque service, ou des éléments de ces groupes sont rassemblés pour suivre un entraînement interarmées. Comme le montre la diapositive, ceci permet de rassembler l'armée de terre, la marine et l'aviation ainsi que d'autres intervenants interarmées comme la cyber force opérationnelle et la force spatiale au sein d'un même commandement pour un objectif précis.
À la fin de cet entraînement collectif et interarmées à tous les niveaux, le commandant responsable d'une unité donnée déclare son unité opérationnelle et prête à être employée.
Enfin, la diapositive 7 vous explique comment les Forces canadiennes passent de la génération de la force à l'emploi de la force dans le cadre d'une mission particulière, par exemple, dans le cadre de l'opération mobile, en Libye. Tout d'abord, il y a certains intrants qui relèvent de la responsabilité de ceux qui génèrent la force. Par exemple, le chef du personnel militaire fournit les recrues qui ont été formées. Le SMA (Matériels) du côté civil du MDN, fournit les navires. Le SMA (Gestion de l'information et systèmes de communication) ou SMA(GI), fournit la technologie. Ensuite, la Marine royale canadienne les rassemble afin de former l'équipage et de s'assurer de la disponibilité d'un navire qui est prêt à aller en mission — et il y a, bien sûr, bien d'autres aspects à cela. Ensuite, l'employeur de la force, le COMFEC, par exemple, déploie ses actifs et donne aux navires des commandes et des directives nationales. Il convient aussi de noter que les générateurs de force produisent aussi des facilitateurs comme les communications, les cuisiniers, le personnel médical, les ingénieurs, la logistique, etc., qui permettent à une force interarmées d'effectuer des opérations dans l'ensemble du spectre du conflit.
Voilà. Monsieur le président, il me fera plaisir de répondre à vos questions.
:
Je l'ai bien comprise, mais compte tenu de son aspect technique, je vais y répondre en anglais.
[Traduction]
C'est une excellente question. C'est au coeur même de ce qu'est l'état de préparation. Donc, merci pour la question.
Divers facteurs déterminent ce que nous faisons, la mesure dans laquelle nous le faisons, la durée de temps que nous le faisons et le nombre de missions pour lesquelles nous sommes prêts à le faire à un moment donné. Premièrement, il y a l'orientation globale du gouvernement. Qu'est-ce qu'ils demanderaient aux Forces canadiennes d'être prêtes à faire? Quel est le large éventail que nous devons être prêts à faire? Devrions-nous êtres prêts rapidement ou devrait-il y avoir une période de développement avant que nous ne commencions un projet important?
Cette question porte donc sur la structure même des Forces canadiennes. À quelle fin sommes-nous structurés? À partir de cette structure, nous déterminons la rapidité avec laquelle certaines parties seraient prêtes et combien de temps il faudrait pour que d'autres parties soient prêtes à fonctionner sur une longue période. Le meilleur moyen de se faire est de vous offrir un exemple.
La recherche et sauvetage est une responsabilité qui fait partie du mandat que le gouvernement nous a donné. Nous avons une série d'avis très spécifiques. Nous devons être capables de réagir rapidement étant donné la nature même de la tâche. Notre structure des forces nous permet de maintenir une capacité de réponse rapide en matière de recherche et sauvetage partout au pays en partenariat avec d'autres ministères.
En même temps, nous devons être prêts à mener une guerre importante, comme dans le cas de l'Afghanistan. Nous maintenons la capacité de déployer un groupement tactique à plutôt court préavis — dans un délai de 60 jours — à un endroit comme l'Afghanistan où il accomplira bien son travail, entouré de toutes les parties prenantes. Si nous voulons maintenir cet engagement pendant des années, comme nous l'avons fait en Afghanistan, il nous faudrait plusieurs groupements tactiques pour faire une rotation appropriée. La politique des Forces canadiennes est de tenter de ne pas redéployer des soldats dans une période de 24 mois — je vous permets de faire les calculs —, donc on détermine la taille de la structure des forces qu'on veut.
Outre cela, il faut tenir compte de la gestion des ressources. Nous pourrions estimer qu'il faut avoir un effectif armé énorme étant donné tout ce qu'on pourrait lui demander. Bien sûr, le pays est disposé à financer des forces armées d'une certaine taille, qui peut fluctuer avec le temps, mais généralement nous avons la taille que nous pouvons avoir en fonction des ressources.
Donc, il faut réunir ces deux éléments et tenir compte des orientations politiques, de la réalité des ressources à votre disposition et de la nature de la tâche que vous devez accomplir, dans tout l'éventail des conflits, de la guerre aux opérations nationales, pour déterminer la meilleure posture possible des forces afin qu'elles puissent accomplir pour les Canadiens ce qu'on demande d'elles.
Présentement, je vous dirais que les Forces canadiennes sont bien équilibrées pour répondre à toutes les lignes d'opération de la stratégie de défense Le Canada d'abord. Il y a six grandes missions, depuis les opérations nationales jusqu'aux engagements internationaux, tels que l'Afghanistan, un conflit plus robuste. Nous avons des forces affectées à toutes qui sont à des états de préparation différents pour accomplir la tâche. Et certainement, pour ce qui est des situations qui nécessitent une réaction rapide, telles que les crises nationales, nous sommes préparés.
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C'est également une bonne question.
[Traduction]
Tout dépend de la taille des missions à l'étranger.
Je pourrais peut-être vous parler d'un exemple qui s'est déjà présenté. Une petite brigade d'environ 3 200 militaires s'est trouvée à Kandahar, en Afghanistan pendant une période ininterrompue de cinq ans. Pendant la même période, nous avons été en mesure de former une force opérationnelle de 2 000 soldats en Haïti. En même temps, nous avions aussi une force répartie de plus de 2 000 en préparation pour les Jeux olympiques. C'était une période difficile pour les forces. Nous avons été mis à rude épreuve.
Alors que toutes ces missions se déroulaient, nous avons maintenu nos ressources en recherche et sauvetage ainsi que notre capacité de secourir les Canadiens en cas de crise, et ce, partout au pays, du nord jusqu'au sud et d'est en ouest.
Quand on essaie de déterminer combien d'opérations la structure de nos forces nous permet de mener à l'étranger, il faut savoir en quoi l'opération consiste. Quel est le contexte? S'agit-il d'une guerre en règle? Dans quelle mesure voulons-nous être présents?
Comme nous l'avons vu en Afghanistan, la taille de nos forces nous aurait permis d'y rester de façon presque continue. Si nous voulions être plus présents en Afghanistan — en d'autres mots, si nous voulions déployer une brigade entière et des ressources supplémentaires —, nous n'aurions probablement pas assez de recrues pour pouvoir maintenir les effectifs au sol sans changer certains facteurs. Un de ces facteurs est la durée pendant laquelle nous voulons rester.
Au plus fort des guerres en Irak et en Afghanistan, l'armée américaine, avec la taille qu'elle a, est passée de déploiements de 12 mois à des déploiements de 15 mois. En calculant qu'il faut faire rentrer les soldats au pays pour qu'ils se reposent, les entraîner de nouveau ensemble et les renvoyer au théâtre pour le reste de la mission, on se rend compte que les forces armées ne sont pas assez nombreuses compte tenu des facteurs. Un de ces facteurs est le temps que chaque soldat consacre à la mission sur le terrain.
C'est donc une excellente question. Cela porte sur la structure des forces, ce dont nous disposons pour mener des opérations, la meilleure façon de nous préparer et les volets où investir.
J'aimerais ajouter un point qui, je crois, est utile. On a tendance à étudier les grands segments des Forces canadiennes en particulier: les bataillons, les navires, les avions. Toutefois, au fur et à mesure que les guerres se complexifient et multiplient les difficultés, les rouages qui permettent aux forces de travailler efficacement deviennent de plus en plus importants.
Prenez par exemple les commandements, contrôles et communications. De nos jours, on ne peut travailler au sein d'une alliance ou d'une coalition sans avoir des capacités techniques très sophistiquées pour le commandement et le contrôle. On ne peut gérer le genre de puissance de tir qu'on a vu en Libye sans avoir un accès extrêmement fiable au RSR à distance: la capacité de voir et d'utiliser le réseau de satellites qui permet de se protéger dans un domaine cybernétique et de fournir les renseignements nécessaires, etc.
Tout est interrelié. En fait, certains de ces rouages, en particulier dans les Forces canadiennes, sont ceux de densité relativement faible qui nécessitent des investissements constants pour s'assurer que les volets plus imposants fonctionnent efficacement. Il serait inutile d'envoyer un bataillon ou un navire à l'étranger si on n'a pas le système de renseignement nécessaire pour faire fonctionner l'équipement de façon intelligente et précise.
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Merci de votre question.
Je ne suis pas d'accord lorsque vous dites qu'il existe une tension entre les meilleurs et les plus brillants ainsi que la nature du devoir militaire. J'ajouterai également, au sujet de votre affirmation à propos des meilleurs et des plus brillants qu'il ne s'agit pas seulement de ceux qui viennent du CMR. Nos soldats de partout au pays qui s'enrôlent comme jeunes soldats et membres de la Force aérienne sont aussi parmi les meilleurs et les plus brillants et ils s'en tirent très bien dans les forums alliés. Nous le voyons. Nous avons une bonne matière brute.
Le fait est que vous avez posé une excellente question et, bien entendu, c'est l'un des défis continuels; comment nous assurer que quelqu'un conserve son esprit critique tout en évoluant dans un environnement qui comporte, par nécessité, certains aspects doctrinaires. La réponse simple, c'est qu'il s'agit d'un défi continuel et que nous reconnaissons l'importance de disposer d'esprit critique à tous les niveaux, tout en veillant à ce que cet esprit critique ne favorise pas le chaos jusqu'à empêcher le travail de se faire.
Nous voyons chaque jour ce qui vous a poussé à poser la question lorsque nous tentons de pousser les gens à penser, de leur donner la confiance et les outils nécessaires pour réfléchir, tout en restreignant leurs actions suffisamment pour veiller à ce que la mission soit accomplie. Il s'agit d'une hiérarchie et, à mesure qu'on monte en grade, on ne devient pas nécessairement plus intelligent que tout le monde, mais on a l'expérience et la capacité de mettre en contexte les situations où l'on place nos chefs subalternes.
Vous verrez donc que grâce à cet incroyable investissement en éducation et à la formation directe ainsi qu'à ce type d'exercice, les Forces canadiennes ont établi un très bon équilibre entre l'éducation et la formation directe. Nous avons établi un bon équilibre.
Les opérations menées ne sont pas routinières ni banales; elles exigent un esprit critique, par exemple, dans le domaine de la conduite de la guerre en général... En Afghanistan, on n'est pas simplement arrivé là-bas pour commencer nos activités. Il a fallu réfléchir. Il a fallu élaborer des stratégies et des campagnes qui tenaient compte d'une série de facteurs extrêmement vastes qui pouvaient mener à la réussite ou à l'échec, selon la façon dont on les utilisait.
Pour garantir la disponibilité opérationnelle, nous investissons dans la réflexion critique à tous les niveaux. Nous favorisons un environnement de commandement de la mission où nous identifions de façon adéquate la tâche et le contexte dans lequel nous nous trouvons et nous laissons aux gens la possibilité d'user d'imagination et d'expérience au mieux dans cet environnement. Mais certaines choses ne sont pas négociables, comme les règles d'engagement. Peu importe l'importance d'un esprit créatif, le Chef d'état-major de la Défense établit les règles d'engagement pour des raisons très claires. Vos armes et votre équipement peuvent être utilisés à de nombreuses fins, mais ils ne peuvent être utilisés que d'une seule façon. N'essayez pas d'être trop créatifs dans ce domaine, etc. Il s'agit aussi de prendre soin des gens, et...
Il y a un équilibre adéquat, comme dans toutes les professions, entre l'esprit critique et le respect des règles; c'est ce qui nous permet d'être efficaces.
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Merci de votre question.
Avant de commencer, monsieur le président, j'aimerais ajouter un nom à la liste de témoins potentiels que nous recommanderions respectueusement à votre comité. Il y a le chef du personnel militaire, qui gère le perfectionnement des officiers et le système de perfectionnement des MR. Grâce à lui, des investissements sont faits à l'organisation, notamment dans des établissements comme le Collège des Forces canadiennes, notre école de recrues à Saint-Jean, etc.
En réponse à votre question, je souligne que l'étude de la conduite de la guerre, tout comme l'étude de bien d'autres grandes entreprises humaines, est vaste et exigeante. Plus nous le faisons, plus nous comprenons qu'elle nécessite des penseurs de même que des personnes qui peuvent exécuter les idées de façon appropriée. Il faut finir par faire quelque chose; on ne peut rester dans un établissement d'enseignement pour toujours. Il vient un moment où il faut appuyer sur la gâchette.
Pour bâtir des forces armées qui tentent d'établir des pratiques exemplaires par rapport à leurs alliés, il faut se demander ce que sont les normes, ce que le pays attend de ses forces armées et quels sont les matériaux bruts dont nous disposons, que ce soit le personnel, l'équipement ou la formation. Tout cela, les haut gradés des forces armées et les gens dont je vous ai déjà parlé le font tous les jours.
Les cours que nous demandons aux futurs leaders de suivre — et plus ils avancent en grade, plus les cours sont difficiles — visent à renforcer l'idée d'utiliser les outils à leur disposition de façon correcte et sage du point de vue technique, tout en pouvant reconnaître que même la meilleure solution technique possible peut ne pas s'appliquer dans le contexte où ils se trouvent. L'histoire regorge de gens qui mènent la dernière guerre: si la cavalerie avait fait sa meilleure charge à vie, ça n'aurait pas eu d'importance que ceux d'en face soient armés de mitraillettes.
Nous essayons autant que possible d'éviter de nous retrouver dans une telle situation. Nous tentons d'être créatifs et de rester de notre temps. Nous ne voudrions jamais que notre organisation soit accusée de placer ses soldats dans une situation à laquelle ils n'ont pas été bien préparés ou de ne pas agir de façon adéquate dans un certain contexte. Nous investissons beaucoup dans notre leadership à tous les niveaux pour veiller à ce qu'ils agissent correctement.
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Merci de votre question.
C'est un processus complexe, qui comprend différentes parties, à l'interne, ainsi que le gouvernement en général. Généralement, en réponse à une crise — et Haïti serait un bon exemple —, des liens immédiats sont établis entre les niveaux les plus élevés des Forces canadiennes, c'est-à-dire le Chef d'état-major de la Défense, le ministre, le sous-ministre, le Conseil privé et souvent le cabinet du premier ministre ou le premier ministre lui-même.
Nous voulons agir rapidement et avec force pour avoir des répercussions importantes; la situation en Haïti est un exemple de situations où toutes les personnes que j'ai mentionnées ont été impliquées, en plus des Affaires étrangères et des services consulaires en Haïti. Toutes les parties se sont coordonnées. Le ministère des Affaires étrangères compte une organisation appelée GTSR. Cette organisation est directement impliquée dans de telles situations. On nous dit clairement que nous devons réagir, prendre des mesures et créer des environnements positifs pour les gens.
En ce qui concerne le ministère, du point de vue de la planification militaire uniquement, et si l'on tient compte de tous les services, c'est à mon personnel et, au bout du compte, à moi de recommander au CEMD les mesures à prendre, comment prendre ces mesures et ce que coûteront ces mesures, tant en termes de ressources qu'en termes de réaffectation des ressources à partir des autres tâches en cours. Nous fournissons des conseils au chef et nous lui donnons ensuite les instruments qui lui permettront de formuler des ordres — des règles d'engagement écrites, etc.
Le rôle de mon personnel est de tenter de soutenir le Chef d'état-major de la Défense et les Forces canadiennes dans le ministère grâce à tous les interlocuteurs afin de déterminer ce que nous allons faire, de rédiger les ordres servant à y arriver et d'appliquer ces ordres.
Lorsqu'une situation est moins urgente, le même processus se déroule plus lentement. Il y a souvent consultation avec le ministère des Affaires étrangères et le centre du gouvernement pour déterminer ce que nous souhaitons faire, combien de temps nous souhaitons rester, etc. Une fois qu'une décision est prise — habituellement à la suite d'une lettre rédigée par le ministre ou d'une réponse reçue —, nous passons en mode planification militaire pure et simple et nous réunissons les actifs.
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Oui, tout à fait. C'est une excellente question, et elle porte sur le coeur même de la question de la disponibilité opérationnelle en général.
Pour répondre à votre question de façon précise en ce qui concerne ce pour quoi nous nous préparons, si on pense que la disponibilité opérationnelle comporte un aspect temporel, comme la vitesse de réaction, alors on reste prêt à réagir à ce genre de choses qui est hautement susceptible de se produire, et ce, à court préavis. L'exigence de répondre, par exemple, dans le cas de la recherche et sauvetage, doit être remplie très rapidement. Il y a également ceux qui sont prêts à réagir à des crises internationales, comme à Haïti, et qui n'ont pas besoin de beaucoup d'entraînement préparatoire pour la défense et l'autodéfense. Mais il faut tout de même exporter ces forces très rapidement à titre d'appui. L'EICC est un exemple d'unité ayant un haut niveau de disponibilité opérationnelle et pouvant partir pour appuyer des individus en crise partout dans le monde, tout en se préservant pendant une certaine période. Voilà donc ce qui entre en jeu.
Il y a également les forces qui attendent un avis pour bouger, pour un événement qui pourrait prendre un peu plus longtemps à survenir, mais qui est tout de même important. Cela signifie qu'il faut pouvoir s'impliquer dans un endroit où le Canada a des intérêts stratégiques, ou encore là où les valeurs canadiennes sont en jeu — par exemple, la Libye. Nous avions des actifs aériens et navals prêts à répondre; nous ne savions pas où ils allaient être déployés en Libye, mais nous connaissions le type de crise.
Et donc la réponse toute faite serait que nous sommes prêts pour tout. Mais bien entendu, cela ne décrit pas toute la situation. Nous sommes prêts lorsqu'une échéance est associée à ces forces, pour les événements qui vont sans doute se produire, mais dont nous ne sommes pas certains à 100 p. 100. Nous avons un délai dans lequel le gouvernement aimerait formuler une réponse. Mais il faut aussi tenir compte des orientations stratégiques plus larges — en l'espèce, ce qui est contenu dans la stratégie de défense Le Canada d'abord —, lorsque le Canada souhaite aussi pouvoir faire preuve de leadership lors d'entreprises et d'événements importants. Dans ce cas, nous avons vu le lieutenant-général Bouchard — un produit du système de formation et d'éducation des Forces canadiennes, un produit de son service, un produit de la capacité interarmées — en position pour mener les opérations internationales.
C'est un peu plus difficile à comprendre lorsqu'on fréquente des capacités plus globales. Quelle est la taille de la guerre dans laquelle nous nous embarquerions? Pendant combien de temps y resterions-nous? Ce sont des questions pour la politique du gouvernement qui demandent de réels investissements dans les Forces canadiennes, dans quelle taille... Et par « taille » je veux dire endurance, parce qu'on ne peut pas envoyer tout le monde et toutes les ressources à l'étranger en même temps; il faut pouvoir faire une rotation. J'imagine qu'on pourrait tout envoyer à l'étranger en même temps, mais ce ne serait que pour une seule fois, et on y serait jusqu'à ce que le travail soit fini — et le monde ne tourne plus vraiment de cette façon.
C'est une excellente question; elle ouvre de nouveaux sujets de discussion, et j'espère avoir au moins tenté de vous répondre.
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Tout à fait. Merci de votre question.
Je peux vous donner un exemple portant sur la formation. Il est de plus en plus important pour nos forces de s'entraîner dans des structures de coalition ou d'alliance pour que nous puissions veiller à bien comprendre la façon dont nos alliés et les coalitions fonctionnent, la façon dont toutes les parties s'intègrent les unes aux autres et la façon dont la technologie établit un lien entre les différents éléments et les rapproche. Quelque chose d'aussi simple que de pouvoir transmettre une image en direct d'une partie de la coalition à une autre devient de plus en plus important si on se préoccupe de la précision et de la collecte de renseignements et si la rapidité est importante, etc.
L'une des tâches que j'accomplis pour appuyer le CEMD — et je ne suis pas le seul à le faire — consiste à aider à concevoir la participation canadienne dans des exercices internationaux, lorsque nous réunissons l'armée, la marine, l'aviation et les autres unités pour mener des exercices internationaux, qu'ils aient été amorcés par nous ou par des organismes internationaux ou d'autres pays. Nous participons à ces exercices et, au bout du compte, nous gérons les leçons retenues à la suite de ces exercices, ce qui pourrait ensuite avoir des répercussions sur la façon dont nous opérons ou sur l'équipement que nous avons ainsi que les décisions à ce sujet. Ça peut être aussi simple qu'une mise à niveau d'un logiciel, ou encore la nécessité d'envisager un concept de façon entièrement différente. Les exercices amènent donc l'expérience.
Nous collaborons tous — mon personnel, le sous-ministre adjoint (Politique) et les autres — à l'international afin d'établir les réponses en cas de crise. Cela va de soi. Nous réglons de nombreux conflits en ce qui concerne tant le raffinement des missions que de la portée lorsque nous abordons une mission.
En ce qui concerne la disponibilité opérationnelle, nous nous fions vraiment à l'expérience et aux exercices, de même qu'aux commentaires des autres pays au sujet de ce que nous avons appris. Nous avons maintenant une excellente idée de la façon dont nos alliés en Afghanistan fonctionnaient et de ce qu'ils ont appris lors des opérations à Kandahar et à Helmand, etc. Nous tentons de les assimiler de notre mieux.
Nous opérons mondialement — et ce n'est pas seulement la responsabilité de mon personnel. Par exemple, j'irai à Washington dans quelques semaines pour participer, avec sept autres pays, à un conseil multinational de l'interopérabilité, une sorte de groupe réduit de l'OTAN qui comprend sept pays intéressés à partager des renseignements sur la façon dont nous pouvons améliorer nos opérations conjointes. Cela c'est avéré très précieux lorsque nous avons monté les opérations en Libye, par ce que les mêmes nations étaient représentées.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci, général, d'avoir comparu aujourd'hui.
J'ai quelques excuses à faire. Tout d'abord je voudrais m'excuser d'être sorti de la salle à plusieurs reprises pendant votre exposé. Je m'en excuse. Je suis certain que vous comprendrez qu'étant donné que l'équipe A du NPD s'occupe de la course à la direction du parti, l'équipe B doit s'occuper de tout le reste. Je dois donc jongler avec différents dossiers. Je m'en excuse. Je vais aussi vous poser une question qui vous a peut-être déjà été posée alors que j'étais en dehors de la salle, donc si tel est le cas, je m'en excuse d'avance.
Ceci étant dit, j'aimerais aussi formuler quelques remarques préliminaires à ma question. Comme je suis nouveau dans le dossier, je ne suis même pas certain de la bonne façon de poser cette question, donc il se peut qu'elle soit ambiguë pour vous. Général, je vais tenter de la formuler du mieux que je peux et nous verrons si vous serez en mesure d'y répondre.
J'aimerais vous poser quelques questions relatives à la disponibilité opérationnelle. Tout d'abord, j'aimerais savoir; on entend souvent parler des forces militaires des États-Unis et du nombre de fronts sur lesquels ils sont en mesure d'intervenir en même temps. Avec cette notion en tête, je sais que vous devez toujours partir de là où vous vous trouvez, mais si vous pouviez repartir de zéro... Ou plutôt, comment composez-vous avec le fait d'être au Canada? Comment calculez-vous votre portée opérationnelle sachant que vous devez garder un certain nombre de choses en réserve pour différents problèmes qui pourraient survenir? Quelle est votre approche en matière de disponibilité opérationnelle pour ce qui est du nombre de fronts sur lesquels vous pouvez intervenir?
Ma deuxième question est la suivante — et vous pouvez maintenant comprendre pourquoi j'ai tenu à préciser que je n'étais pas certain de la manière dont je devais formuler ma question. Quels sont les défis associés au maintien de la disponibilité opérationnelle tout en devant mettre en place ou supprimer progressivement une partie considérable des forces armées, c'est-à-dire, en Afghanistan?
Ce sont les deux questions que je voulais vous poser, général, et je vous remercie une fois encore de votre présence.
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Merci de votre question, monsieur.
Nous y avons répondu en partie plus tôt, mais je peux résumer ce qui a été dit.
À combien de choses pouvons-nous réagir? Tout dépend si c'est une grosse chose et du temps pendant lequel on veut continuer à réagir à cette chose. Je ne joue pas les plaisantins; c'est précisément comme cela que je décrirais la situation. À l'époque du président Kennedy, les États-Unis avaient pour politique d'être en mesure de mener deux guerres et demie. C'était défini comme suit: un front d'une certaine ampleur, une intervention de l'OTAN, une en Asie du Sud-Est et un peu d'autres choses. C'était de rigueur à l'époque. De nos jours, cela présente quelques difficultés supplémentaires et la plupart des gouvernements, y compris celui des États-Unis, ne décrivent plus leur capacité en ces termes.
Notre approche est très similaire à celle de tous nos alliés, quand il s'agit de décrire la structure de notre force, et ce pour quoi elle est conçue — selon la politique du gouvernement du jour, ce qu'on mettrait en vitrine pour réagir rapidement, d'une part, et ce qui serait un peu plus lent mais plus délibéré et combien de temps on pourrait le maintenir. Le fait est que, à court préavis, nous sommes en mesure de mener des opérations de recherche et sauvetage partout au Canada; d'apporter de l'aide en cas de désastre international; et d'intervenir localement quand les Canadiens sont en butte à des crises, des inondations, etc. Avec un préavis un peu plus long mais qui reste minime, nous pouvons, par exemple, évacuer des Canadiens vivant dans une région exposée à des menaces. Avec un plus long préavis, vu qu'il faut un peu plus de préparation et un entraînement précis, on peut aller dans un endroit comme l'Afghanistan.
Ça, c'est notre vitesse de réaction. Il reste à voir ensuite combien de temps on veut rester et quelle est notre endurance. On ne part pas à zéro chaque année quant à la façon dont on structure la force d'un pays. Il y a une force existante, qui a été essentiellement construite au fil des années — sauf quelquefois — afin de pouvoir apporter une contribution significative quelque part dans le monde, pour répondre directement à votre question. Nous pouvons faire intervenir l'armée, la marine et l'aviation, comme en Afghanistan —, encore que l'élément marine ait manqué. Mais nous aurions pu ajouter un élément marine. En fait, cet élément était présent mais pas dans la même région.
Nous pouvons donc orchestrer une grosse intervention durant un certain temps, plus quelque chose de plus modeste, plus quelque chose d'un peu plus petit mais de ponctuel. Je pense que c'est en ces termes qu'on envisage les choses. Je vais vous en donner un exemple: notre présence en Afghanistan, puis Haïti et, quand même, la capacité d'être présents pour les Jeux olympiques. Quand le rythme opérationnel — vous avez sans doute entendu ce terme — est si élevé qu'on n'a pas beaucoup le temps de rester chez soi avant de devoir repartir, on met nos troupes à contribution. C'est quelque chose que nous gérons avec beaucoup de prudence, à la fois dans le souci des familles et dans celui de la capacité des soldats de fonctionner.
Il y a eu un summum récemment, selon moi. L'Afghanistan était en cours; le soutien aux Canadiens partout au pays était toujours en place, y compris la recherche et sauvetage et intervention en cas de catastrophe; Haïti; et les Jeux olympiques.
Ai-je répondu à vos deux questions, avec ces exemples?
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Je vous remercie de la question.
Je dirais que, dans l'ensemble, nous sommes manifestement beaucoup plus prêts maintenant que nous ne l'aurions été il y a une décennie, pour toute une série de raisons, notamment l'investissement dans notre capacité de déployer nos forces. Les C-17 ont fait une grosse différence dans notre état de réparation perçu et effectif. En effet, c'est bien joli d'être prêts, si vous ne pouvez pas vous rendre sur place, cela ne sert pas à grand-chose. Il y a donc un continuum de l'état de préparation qui vous permet d'aller sur place et de faire quelque chose. On ne peut s'en tenir aux notions abstraites éternellement; un jour ou l'autre, il faut faire quelque chose.
De plus, nous pouvons maintenant nous appuyer sur une somme d'expérience qui n'existait pas il y a 10 ans. Cela fait 10 ans que nous sommes en Afghanistan. Nous comprenons la nature de la guerre, la façon de fonctionner parmi des alliés, ce qu'il faut apporter à la table et ce que les alliés doivent nous donner pour que nous fonctionnions efficacement. Comme j'y ai fait allusion dans un exemple, auparavant, être fin prêts avec une force de cavalerie ne sert pas à grand-chose quand la guerre se fait à la mitraillette.
Nous avons 10 ans d'élargissement de nos horizons intellectuels et d'expérience avec nos alliés, d'utilisation de technologies à la fine pointe du progrès sur toute la ligne, en commençant par notre capacité d'utiliser des atouts de renseignement, de surveillance et de reconnaissance et en finissant par la biométrie, avec toute la gamme entre les deux. Il y a des choses que nous comprenons mieux et dont nous avons à présent une certaine expérience: mener des forces au combat, les y amener, les y maintenir. Instruits par l'expérience, nous avons une meilleure vision d'ensemble de ce à quoi il convient de se préparer. Tant que l'on n'est pas passé par ces expériences, on risque d'oublier certains éléments.
Prenez notre compréhension de la façon de se préparer à des décès, aux soins aux familles, aux soins à long terme à apporter aux blessés. Eh bien, il y a 10 ans... Peut-être était-ce des réalités avec lesquelles nous étions autrefois extrêmement familiers, mais il y a des choses qu'on oublie. Maintenant, on mesure pleinement ce que cela signifie. Vu notre expérience, donc, nos investissements et la formation continue résultant de notre travail avec nos alliés, je dirais que nous sommes beaucoup mieux placés qu'il y a 10 ans.
Il y a beaucoup de choses que l'on peut et que l'on doit faire, pour maintenir un état de préparation, vu qu'il fait intervenir plusieurs composantes. On a tendance à confondre un état de forte préparation avec la capacité de réagir rapidement. Or, les confrontations majeures ne débutent pas généralement de but en blanc. Pour les choses qui vont se passer très vite, nous avons généralement quelque chose en vitrine de prêt à déclencher. Prenez la situation en Haïti, un tremblement de terre ou une catastrophe quelque part, nous avons les forces voulues pour apporter une contribution. Pour apporter quelque chose d'un peu plus substantiel, dans une situation comme celle de l'Afghanistan, il faut un peu plus de temps pour évoluer; dans ce cas, nous avons prouvé, selon moi, que quand on n'avait pas la capacité au départ, on était en mesure de l'acquérir.
Ainsi, quand nous avons commencé en Afghanistan, nous n'avions pas de tank. Il nous fallait des tanks. On les a obtenus. Nous n'avions pas les équipes de liaison et de mentorat opérationnel. Nous les avons construites. Le combat génère de lui-même des idées neuves et des exigences en matière de préparation.
Je sais que je m'étends un peu dans ma réponse, mais je voulais souligner aussi l'importance du concept d'une approche pangouvernementale. Avant l'Afghanistan, les Forces canadiennes travaillaient essentiellement en vase clos, mais elles n'étaient pas les seules à le faire. Le mot d'ordre quand on montait une mission des Nations Unies était plus ou moins: « Allez effectuer vos tâches militaires. »
Avec les contre-insurrections et la nature du conflit en Afghanistan — nature du conflit à l'avenir, selon nous —, il faut évidemment pouvoir tisser des liens au sein du gouvernement, afin de permettre une réponse concertée de l'ensemble du gouvernement. C'est une capacité que nous avons acquise et perfectionnée au cours des 10 dernières années, si bien que les Affaires étrangères, l'ACDI, le ministère de la Défense nationale, le Centre de la sécurité des télécommunications, bref, tout le monde, mesurent ce que les autres apportent à la table et l'apprécient pleinement. Je pense que nous avons tiré de l'expérience des leçons importantes, que nous appliquerions si c'était à refaire.
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Oui, merci de la question.
[Traduction]
Nous avons divers outils à notre disposition pour déterminer si nous atteignons nos objectifs en matière de disponibilité opérationnelle. Ils se retrouvent dans...
Si j'ai bien compris, les membres du comité vont s'entretenir avec le commandant de l'armée. Du côté de la marine et de l'armée de l'air, on pourra vous fournir une description détaillée du lien entre les ressources et la production d'un actif utilisable, ainsi que de la manière dont ces informations sont reliées aux Forces canadiennes — au bout du compte, c'est ce que j'examine, sur une base annuelle, cyclique.
Il existe toutefois des exceptions. Lorsqu'il faut procéder à la modernisation de toute une flotte, comme c'est le cas actuellement des navires de la classe-Halifax, le commandant informe le chef d'état-major en passant par moi dans certains cas, de l'impact sur notre disponibilité opérationnelle. Je vais tenter de répondre à la question, mais vous feriez mieux de l'adresser aux chefs des armées. Ils ont à leur disposition des outils quelque peu différents en fonction du service dont ils sont responsables qui leur permettent d'évaluer leur disponibilité opérationnelle. En effet, les outils utilisés par l'armée de l'air sont différents de ceux dont se sert l'armée. Mais ce qu'il y a de sûr, c'est qu'ils ont à leur disposition des trousses d'outils.
Pour ce qui est de l'évaluation définitive de notre disponibilité opérationnelle, une évaluation est envoyée au CEMD, et mon personnel ainsi que d'autres comparent notre disponibilité opérationnelle à ce à quoi nous devrions être prêts à faire face.
Vous vouliez savoir tantôt s'il était possible de garantir que l'injection de 10 millions de dollars ou d'un pourcentage quelconque, se traduirait par une amélioration de la situation. C'est une bonne question. Il faudrait d'abord que nous acceptions le financement et qu'on sache à quoi il servirait. S'agit-il de financement ponctuel, ou de sommes qui viennent grossir le budget de base? Quelle politique du gouvernement tente-t-on de concrétiser? Il faudra que tout cela soit défini et après cela, nous élaborerions un plan qui inclurait des mesures permettant d'évaluer notre efficacité et nous en ferions rapport.
Voilà donc ce qui se fait concrètement. Je sais que votre question était théorique: l'augmentation du financement se traduit-elle toujours par une plus grande disponibilité opérationnelle? Je dirais que oui, à partir du moment où la disponibilité opérationnelle a été définie comme étant l'objectif visé. Si nous obtenions plus d'argent, cela nous permettrait-il d'améliorer les services octroyés aux soldats blessés? Sans doute, si c'était là l'objectif visé. Tout cela dépend donc de la cible des investissements.
Nous savons, preuve à l'appui, qu'un financement adéquat nous permet d'assurer une bonne disponibilité opérationnelle de façon générale, et c'est vrai aussi pour nos autres activités. D'ailleurs, nous le démontrons annuellement dans les rapports que nous faisons au Parlement.
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Vous avez parfaitement formulé votre question.
Je dirais que le processus évolue avec la progression de nos missions. L'Afghanistan est un bon exemple. Au départ, l'objectif visé par les opérations antiterroristes était d'éliminer la menace, à savoir le taliban, du gouvernement, ce qui s'est très bien passé. Ensuite, le but des opérations qui ont suivi était d'asseoir avec le temps la gouvernance afghane pour que le gouvernement puisse se prendre en main. C'était là l'objectif visé dans le cadre des opérations. Plusieurs stratégies ont été mises à contribution pour atteindre cet objectif dont la stratégie anti-insurrectionnelle qui, au final, nous a rendu le plus service. Notre tâche, c'était d'aider les Afghans à asseoir leur gouvernance dans tous les secteurs de façon à réellement répondre aux besoins de la population et, en même temps, éliminer les causes de l'insurrection.
Les conflits ne commencent pas tous de la même façon et progressent, souvent. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que les forces en jeu, qu'elles soient vos alliés ou vos ennemis, changent. En Afghanistan, il y a eu beaucoup de changements. L'insurrection s'est amplifiée parce que les autorités afghanes n'étaient pas suffisamment crédibles pour tuer dans l'oeuf le mouvement insurrectionnel. Le mouvement a été attisé et s'est amplifié.
Nous, les militaires, nous passons en revue toutes sortes de scénarios potentiels — on pourra assister à ceci, à cela... c'est ce que nous faisons à l'heure actuelle pour la Libye. La situation libyenne pourrait connaître divers dénouements. Nous essayons de prévoir ce qui arrivera, en prenant en compte les facteurs pertinents. Comme vous l'avez dit, j'estime que nos rapports avec le gouvernement sont francs et ouverts. En définitive, c'est le chef d'état-major qui donne conseil, en matière militaire, au gouvernement. Voilà qui répond à votre question. Le chef d'état-major est loin de travailler seul, mais au bout du compte, c'est lui qui dit voici ce que nous pouvons faire, voici comment nous allons y arriver, voici ce sur quoi repose le succès de la mission, et en voici les risques.
Tout cela ne se décide pas par l'entremise de négociations à proprement parler, mais plutôt d'échanges francs et honnêtes. Ce n'est pas comme si, au début d'un conflit, on se demandait systématiquement comment on réagirait si le scénario Y se concrétisait. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. On évolue, c'est en fait le gouvernement qui décide si on va évoluer ou pas — ce qui veut dire qu'on devrait alors se retirer ou changer la nature de notre mission complètement, comme ce qui s'est produit en Afghanistan. La stratégie anti-insurrectionnelle avait abouti, tel qu'escompté, et l'envoi massif de troupes américaines avait porté fruit. Les choses s'étaient beaucoup calmées à Kandahar. L'heure était venue pour financer les institutions qui permettraient d'instaurer en Afghanistan une bonne structure de gouvernance.
Dans certains cas, ce qui se passe sur le terrain, c'est le résultat d'une grande prévoyance, d'actions prédéterminées de constatations réfléchies, mais il arrive qu'on change d'objectif tout simplement parce qu'une nouvelle cause louable voit le jour. Tout n'est pas toujours bien planifié.
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Merci de votre question.
En raison du poste que j'occupe, je ne suis pas vraiment en mesure d'identifier ou de comprendre les points faibles de la stratégie canadienne. Dans mon monde à moi, il n'y a pas de points faibles, parce que nos opérations sont planifiées en fonction de ce qu'on est en mesure de faire. Je me situe dans le présent.
Le vice-chef serait mieux placé pour vous dire quels investissements pourraient permettre de modeler les forces armées de demain — il saurait quels ajustements s'imposent. Il est mieux placé que moi pour répondre parce que le processus de développement des forces armées est assorti de l'élaboration d'un modèle qui permet de comprendre quelle configuration devraient avoir les forces armées de demain et comment cibler les investissements. Ensuite, on passe au concret.
Je ne dis pas cela pour être facétieux. Mon horizon se situe dans le court terme: mes responsabilités auprès des forces armées ne vont pas au-delà de trois ans. Pour moi, il n'y a pas vraiment de points faibles, au sens classique du terme. Il est clair qu'il faut continuer à investir — et là, je voudrais vous parler non d'un point faible mais plutôt d'une activité qu'on devrait financer, à savoir notre cybercapacité, dont j'ai déjà parlé. Il faudra assurer la sécurité de nos réseaux, peu importe ce que nous réserve l'avenir. Par ailleurs, il est important qu'on fasse le nécessaire pour pleinement tirer profit des capacités de RSR ici, et ailleurs. Enfin, il faut protéger les réseaux du renseignement que nous avons tissés avec nos alliés afin que nous sachions ce qui se passe dans le monde. Il faudra donc faire des investissements à plusieurs niveaux: ressources humaines, équipement, formation et éducation.
Ce n'est pas comme si, quand je vais travailler, je me disais qu'il y avait un gros problème. Je ne pourrais pas vous dire, en toute honnêteté, qu'il me faut absolument X ou Y. Nous avons ce dont nous avons besoin. S'il faut procéder à une redistribution des ressources pour que des ressources X soient disponibles sur demande, c'est moi qui prendrai la décision. Ça fait partie de mes tâches. Donc, on ne peut pas vraiment parler de carence.
J'essaie d'influer sur les débats qui permettent de déterminer comment seront effectués les investissements pour que ceux dont nous avons besoin soient prêts en temps opportun. Est-il nécessaire d'avoir des bataillons prêts à déployer? Des bâtiments de garde? Des aéronefs? Doit-on apporter quelques ajustements à notre stratégie? Voilà ce dont je suis responsable, et je dois vous dire que pour le moment il n'y a rien qui nous empêche de répondre aux demandes qui nous sont faites. Ça, c'est vraiment le facteur clé.
Si on me demandait de faire quelque chose et que je ne me sentais pas prêt, je vous dirais sans doute toute autre chose, mais pour l'instant, ça ne s'est pas produit.