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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 22 mars 2001

• 0913

[Traduction]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Le quorum est maintenant réuni.

Nous souhaitons la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. Avant de leur donner la parole, il nous faut discuter rapidement des dates fixées pour l'audition des témoins.

Souvenez-vous que lors de la dernière séance, nous nous sommes efforcés de trouver les jours les plus pratiques pour les députés afin qu'ils puissent se rappeler facilement quand ils doivent siéger, sans encombrer leurs horaires. À la fin de la séance, j'ai élaboré, en compagnie du greffier, un horaire correspondant au lundi après-midi, au mardi matin et au jeudi matin de 8 h 30 à 11 heures. Certains membres nous ont informés que ce n'était pas possible le lundi après-midi, ni même le lundi soir.

Je vous pose donc une question à laquelle il est très urgent de répondre et qui va déterminer l'échéancier fixé par le greffier—en l'occurrence, si les membres du comité préfèrent siéger le mercredi après-midi ou, si c'est possible, le mercredi soir. L'inconvénient du mercredi, c'est qu'on y vote parfois immédiatement après la période des questions, mais pas toujours. En plus des séances du mardi et du jeudi matin, est-ce que les membres du comité sont disposés à assister à des séances organisées le jeudi après-midi pour que l'on ait au minimum trois séances par semaine et éventuellement une quatrième si nécessaire, de manière à accélérer la procédure, qui va facilement se prolonger tout au long des deux prochains mois, et peut-être même jusqu'à la fin mai?

• 0915

J'aimerais rapidement faire le tour des membres du comité et savoir tout d'abord si le lundi est exclu, en second lieu si l'on peut siéger le mercredi, et éventuellement si c'est possible aussi le jeudi après-midi?

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, AC): Merci, monsieur le président.

Oui, nous préférons que toutes nos séances aient lieu le mardi, le mercredi et le jeudi, et nous sommes tout à fait disposés à nous adapter à l'horaire. Nous pouvons même organiser quatre séances dans cet intervalle. Nos déplacements nous causent des difficultés. Le problème vient aussi du fait que nous avons d'autres réunions stratégiques qui sont régulièrement organisées et que nous siégeons au sein d'autres comités. Nous sommes donc d'accord pour que le comité se réunisse jusqu'à quatre fois par semaine, dans la mesure toutefois où c'est le mardi, le mercredi et le jeudi.

Le président: Je vous remercie.

D'autres interventions ou d'autres commentaires? Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Ce qui me préoccupait, monsieur le président, c'est qu'un calendrier avait été fixé et que nous étions... Bien évidemment, pour des raisons légitimes, le président a pensé que le lundi pouvait être une bonne solution. Les recommandations de M. Forseth vont dans le même sens que les nôtres et il convient donc de retenir le mardi, le mercredi et le jeudi. Si à l'occasion, à condition que ce ne soit pas la règle, on décide d'organiser une quatrième séance, nous y serons favorables—mais il ne faut pas que ça devienne une habitude.

Le président: Bon, je ne sais pas ce que vous entendez pas «à l'occasion». Quoi qu'il en soit...

Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Je pense que le mardi et le jeudi matin... Je préférerais évidemment le mercredi après-midi, parce que nous avons souvent d'autres obligations—quand il ne faut pas assister à d'autres manifestations sur la Colline, j'ai des choses à faire à mon bureau—le mercredi soir. Je préférerais donc le mercredi après-midi ou le mercredi soir.

Le président: On doit donc en conclure que l'on s'entend pour retenir le mardi matin à 8 h 30, suivi du mercredi après-midi, puis du jeudi matin à 8 h 30, et que l'on pourrait ajouter éventuellement, lorsque c'est indispensable pour des questions de disponibilité, le jeudi après-midi?

[Français]

Monsieur Bigras, puis Mme Kraft Sloan.

M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le président, je ne connaissais pas la proposition avant d'entrer dans la salle; je n'ai donc pas consulté mon agenda. Vous savez que nous faisons tous très souvent partie d'autres comités. De prime abord, je n'entrevois pas de problème, mais j'aimerais aussi que l'on consulte les whips des différents partis, comme je l'ai demandé la dernière fois, pour qu'il y ait une certaine cohérence.

Cela me convient donc, à la condition que les whips de chacun des partis s'entendent sur cette proposition.

[Traduction]

Le président: On peut toujours consulter les whips ad vitam eternam, mais il nous faut prendre une décision, parce que le greffier doit faire le nécessaire pour inviter les témoins et organiser notre calendrier. Je pense donc qu'en fin de compte, tout se ramène à la disponibilité du membre du comité lui-même. J'aimerais que l'on fasse preuve ici d'un certain esprit de collaboration.

Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, je ne vous conseille pas d'organiser des séances à 8 h 30. Nous l'avons fait par le passé et, neuf fois sur dix, le quorum n'est pas réuni. Il y a des députés qui arrivent ici à 8 h 30 et d'autres qui ne sont pas là avant 9 heures.

Le président: C'est bien dommage, mais je pense que nous...

Mme Karen Kraft Sloan: Toutes les personnes présentes se morfondent alors en attendant que la séance puisse commencer.

Le président: Si les gens arrivent à l'heure, toutefois, la séance peut commencer.

Mme Karen Kraft Sloan: C'est jamais comme cela que ça se passe.

Le président: Il suffit que trois membres soient présents.

Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Je fais face à la même situation. Tous les mardis et tous les jeudis à 8 h 30 j'ai des réunions d'une demi-heure. Je serai donc là régulièrement à 9 heures, mais pas à 8 h 30.

• 0920

Le président: Monsieur Herron.

M. John Herron: À ce sujet, je n'aurai personnellement aucune difficulté à arriver à 8 h 30, mais il faut être juste avec nos collègues du NPD car traditionnellement—ce fut le cas tout au long du dernier mandat—ils doivent assister sans exception, tous les matins, à une séance organisée à 8 h 30 lorsque la Chambre siège. Nous ne tenons donc pas compte d'une activité bien établie par l'un des cinq partis reconnus à la Chambre.

Le président: Très bien. Voilà qui règle le cas des séances de 8 h 30. Ce sera donc à 9 heures.

Y a-t-il d'autres commentaires?

Le greffier va donc prendre les dispositions nécessaires en espérant que M. Bigras réussira à convaincre son whip du fait que nous devons examiner un texte de loi qui revêt en quelque sorte une certaine priorité. Nous confirmons donc l'horaire des séances—ce ne sera pas le lundi, mais le mardi et le jeudi à 9 heures ainsi que le mercredi après-midi. Nous laissons au président le soin de prévoir éventuellement des séances le jeudi après-midi au cas où des témoins ne pourraient pas se présenter les autres jours.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président. J'aimerais avoir une précision.

Si nous commençons désormais à 9 heures, est-ce que nous allons alors prendre une demi-heure de plus à la fin de la séance?

Le président: Il y a ce système infernal des blocs horaires qui exige—la plupart du temps—que nous partions à 11 heures. Parfois, nous aurons de la chance et nous pourrons éventuellement déborder sur le bloc horaire de quelqu'un d'autre—si la salle n'est pas occupée par un autre comité—surtout lorsqu'on est en présence d'un gros groupe de témoins, qui exige que nous siégions pendant deux heures et demie et même trois heures. C'est toutefois très difficile à prévoir à l'avance.

Mme Karen Kraft Sloan: Je me ferai un plaisir de siéger pendant trois heures.

Le président: C'est parfois possible. Tout dépend des activités des autres comités. Il se peut que nous soyons expulsés à l'occasion par un comité qui a besoin de son bloc horaire au dernier moment.

Monsieur Herron.

M. John Herron: Dans ce même ordre d'idées, si nous savons que le calendrier nous permet de disposer de trois heures un certain jour et si les témoins figurant sur la liste ne sont pas trop loin et son disposés à comparaître devant le comité, nous pourrions nous servir de ce créneau horaire parce que c'est la meilleure solution pour tous. Je suis donc tout disposé à siéger pendant trois heures lorsque c'est possible.

Toujours d'un point de vue logistique, il se peut que certains témoins se trouvent tout près. Mon adjoint m'a judicieusement fait remarquer que deux témoins qui ont déjà comparu ici ne figuraient pas sur la liste. Le ministère du Patrimoine et le ministère des Pêches ne figurent pas sur notre liste de témoins alors que c'était le cas auparavant. J'imagine que c'est une simple omission—une erreur.

Le président: Tenez-vous à en faire précisément la demande?

M. John Herron: Je demande que le ministère du Patrimoine et que le ministère des Pêches soient ajoutés à la liste. Ils ont déjà comparu auparavant.

Le président: Un instant. Ce ministère a pris part à l'élaboration de ce projet de loi, comme bien d'autres l'ont fait. Donc, à moins qu'il y ait un sujet précis qui relève de la compétence de ce ministère, une telle comparution ferait double emploi. Il est préférable de le laisser pour la fin, si nécessaire.

M. John Herron: Il s'agit donc de savoir si nous avons fait complètement erreur la dernière fois lorsque nous l'avons invité. Était-ce une erreur la dernière fois? Cela ne vient-il pas plutôt du fait que l'une des questions les plus controversées au sujet de cette partie du projet de loi est celle de la protection obligatoire de l'habitat fragile qui relève des compétences fédérales, ce qui implique l'intervention du MPO et bien évidemment de Parcs Canada?

• 0925

Le président: Il est apparu clairement la dernière fois, monsieur Herron, qu'il était superflu d'entendre les autres ministères et que nous n'en tirions aucun renseignement nouveau. Ce serait encore le cas cette fois-ci si nous en jugeons par le passé.

M. John Herron: Le Parti progressiste conservateur demande que l'on fasse comparaître ces deux intervenants. Cela ne dépend pas du bon vouloir du comité, c'est la démocratie.

Le président: Madame Kraft Sloan, suivie de Mme Redman.

Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, s'il faut que le comité invite ces témoins, il me semble que nous devrions faire comparaître ces ministères, comme c'est le cas généralement, avant que nous commencions à entendre les autres témoins, de façon à ce qu'ils puissent nous donner les raisons pour lesquelles ils ont choisi de rédiger le projet de loi de telle ou telle manière. Je pense qu'il est utile que ce soit précisé avant que nous commencions à entendre des témoins de l'extérieur et j'espère que nous entendrons aussi le ministère de la Justice, conformément à ce qu'a proposé mardi M. Knutson. Parmi tout ce que nous avons évoqué mardi, il s'agit là probablement de la proposition la plus judicieuse et la plus pertinente concernant ce texte de loi, lorsqu'on sait toutes les difficultés que nous avons rencontrées au sujet des autres projets de loi sur l'environnement, y compris en ce qui concerne ce projet de loi dans sa mouture précédente.

Le président: La question des autres ministères n'a pas été soulevée mardi, par conséquent...

Mme Karen Kraft Sloan: Celle du ministère de la Justice l'a été, monsieur le président.

Le président: La présence d'un fonctionnaire du ministère de la Justice en qualité de membre permanent lorsque cela est exigé par certains témoins...

Mme Karen Kraft Sloan: Eh bien en fait, monsieur le président...

Le président: Pouvez-vous me laisser poursuivre, s'il vous plaît?

Il s'agissait donc de savoir si un fonctionnaire du ministère de la Justice viendrait nous assister lorsque le groupe de témoins traitait de questions juridiques. La demande en a été faite par M. Knutson, et le comité a donné son accord. Il n'a pas été question mardi d'inviter d'autres ministères. Si nous procédons ainsi, bien entendu, la procédure en sera allongée, je vous le répète, et comme le comité en a fait l'expérience dans le passé, ces interventions feront tout simplement double emploi.

Madame Redman, suivie de Mme Kraft Sloan.

Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

Je conçois que nous avons ici un nouveau projet de loi et un nouveau comité, mais la question n'est certainement pas sans précédent. Le compte rendu des témoignages ayant précédé l'étude de l'automne dernier pourrait éventuellement être distribué aux membres du comité pour qu'ils en prennent connaissance.

Je ferai observer ensuite qu'il serait peut-être plus utile, si notre comité décide de faire témoigner le MPO, le ministère du Patrimoine ou Parcs Canada, que ces ministères soient convoqués en même temps et fassent partie d'un même groupe de témoins de façon à ce que nous puissions les interroger tous ensemble.

Le président: Très bien, si c'est ce que veut le comité.

Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: La seule difficulté que nous ont posée ces témoignages provenait du fait que nous n'avions pas le projet de loi et que nous devions faire des suppositions. Ce ne sera donc pas le cas cette fois-ci.

Pour en revenir cependant à l'argumentation de M. Knutson, j'avais cru comprendre que M. Knutson demandait le témoignage du ministère de la Justice, du moins une déposition par écrit, pour que nous puissions comprendre notamment quelle était son interprétation juridique des articles constitutionnels du projet de loi touchant la possibilité pour le gouvernement fédéral de faire valoir sa compétence. Je vous répète qu'à mon avis c'était là l'un des éléments les plus importants de notre discussion de mardi, parce qu'il nous est souvent arrivé de parler avec le ministère et que ses responsables nous disent qu'il était possible de faire telle ou telle chose alors que d'autres témoins de l'Association du Barreau canadien ou des associations du droit de l'environnement ainsi que d'autres spécialistes de la Constitution nous affirment qu'au contraire le gouvernement est en mesure de faire valoir plus largement ses pouvoirs.

J'ai donc considéré que la proposition de M. Knutson était excellente, qu'elle nous permettait d'avoir à l'avance le point de vue du ministère de la Justice et d'en discuter avec lui pour bien le comprendre. Ensuite, lorsque se présenteront les autres témoins, nous pourrons les interroger à la lumière de ce que nous a dit officiellement le ministère de la Justice, monsieur le président. C'est ce que j'avais compris.

Le président: Y a-t-il des commentaires?

• 0930

Pour résumer, on s'entend pour que le MPO et le ministère du Patrimoine viennent témoigner lors d'une séance organisée à part à l'intention des fonctionnaires des ministères et qui sera convoquée très bientôt. Pour ce qui est du ministère de la Justice, j'aimerais connaître davantage la pensée des membres du comité étant donné que ce que propose Mme Kraft Sloan ne correspond pas à ce qui a été convenu mardi. Mme Kraft Sloan propose que l'on organise une séance avec les fonctionnaires du ministère de la Justice. Mardi, nous avions décidé de demander plutôt qu'un fonctionnaire du ministère de la Justice soit présent lorsque certains témoins l'exigent. Que veut faire le comité?

Monsieur Bigras.

[Français]

M. Bernard Bigras: Honnêtement, j'avais compris que des représentants du ministère de la Justice devaient comparaître. Je tiens à vous rappeler ma demande. J'avais dit que j'était tout à fait d'accord avec M. Knutson et que nous pouvions, à la limite, inviter des représentants du ministère des Affaires intergouvernementales. J'avais compris que le ministère de la Justice devait faire une présentation sur l'interprétation du projet de loi. Je suis tout à fait d'accord avec Mme Kraft-Sloan quant à l'interprétation que le comité avait donnée à ce mandat.

[Traduction]

Le président: Très bien. Est-ce quelqu'un s'oppose à ce que nous demandions au ministère de la Justice de comparaître devant notre comité? S'il n'y a pas d'objection, il en est ainsi décidé.

Soyez les bienvenus ici ce matin. Excusez-nous de vous avoir fait attendre—il est 9 h 30. Vous avez la parole. Je vous demanderais de nous dire dans quel ordre vous allez intervenir.

Mme Karen Brown (sous-ministre adjointe, Service de la conservation de l'environnement, Environnement Canada): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Karen Brown. Je suis la sous-ministre adjointe, Conservation de l'environnement, à Environnement Canada. J'ai à mes côtés Ruth Wherry, directrice de l'équipe chargée des espèces en péril; David Brackett, directeur général du Service canadien de la faune et président à ses heures de la Commission de la sauvegarde des espèces, qui relève de l'UMN; David Wear, conseiller juridique détaché à Environnement Canada par le ministère de la Justice; et enfin Isabelle Jacques, elle aussi conseillère juridique détachée par le ministère de la Justice auprès d'Environnement Canada.

Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, nous avons rédigé un court document—en fait il n'est pas si court que cela puisqu'il fait quelque 11 pages—que nous avons remis au greffier. Nous espérons que tous les membres du comité l'ont reçu. Je ne me propose pas de le passer en revue en détail, ceci afin d'utiliser au mieux le temps qui nous est imparti par votre comité ce matin. Nous nous sommes efforcés cependant de représenter le cadre dans lequel s'insèrent les propositions et la stratégie de même que la législation s'appliquant aux espèces en péril, notamment à l'intention de certains des nouveaux membres du comité. Nous vous en avons indiqué les principaux éléments. Nous nous ferons un plaisir de vous donner des renseignements plus détaillés si vous nous le demandez.

Par conséquent, les feuillets que vous avez devant vous exposent la stratégie, les éléments essentiels du projet de loi lui-même, puis les différences que nous tenons à souligner entre le projet de loi C-33 et le projet de loi C-5.

Je tiens à dire tout d'abord au comité que nous sommes heureux de pouvoir collaborer ensemble au sujet de la Loi sur les espèces en péril. C'est une chance qui s'offre à tous. Nous empruntons désormais une voie nouvelle en matière de protection des espèces en péril dans notre pays. À n'en pas douter, nous considérons, et c'est aussi l'avis du ministre, que la Loi sur les espèces en péril est l'un des trois grands piliers de notre stratégie nationale concernant la protection des espèces en péril. C'est l'un de ses grands piliers, mais elle comporte aussi deux autres éléments très importants.

Il y a d'abord l'accord de protection des espèces en péril qui a été négocié en 1996 et qui sous-tend notre collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Il a fait l'objet de nombreux travaux ces cinq ou six dernières années. Il reste un élément important de notre action.

Le troisième grand pilier est celui de nos programmes d'intendance et de mesures incitatives qui a été lancé il y a deux ans. Vous pouvez d'ailleurs constater que dans ce cadre nous avons effectivement instauré un programme d'intendance concernant l'habitat des espèces en péril. De plus, d'importants changements ont été apportés par le budget de l'an 2000 à la Loi de l'impôt sur le revenu pour tenir compte des programmes de dons en matière écologique et pour encourager les donations volontaires de terrains à des fins de conservation. Nous collaborons aussi très étroitement avec nos partenaires pour essayer d'harmoniser les mesures d'intendance à l'échelle du pays de manière à ce que nos propriétaires fonciers soient uniformément bien traités.

• 0935

Les deux ou trois diapositives suivantes permettent d'évoquer en fait le cadre la législation. On y parle de la finalité de la loi et de ses éléments essentiels. Je ne les exposerai pas de manière très détaillée. Je dirai simplement que la loi se fonde sur des réalités scientifiques, comme toutes les lois qui s'appliquent à notre domaine.

Nous avons un mécanisme d'évaluation scientifique des espèces assez particulier, et nous pourrions parler longtemps du COSEPAC et du rôle qu'il joue dans cette stratégie importante. Nous allons discuter à part du mécanisme officiel d'établissement des listes, qui est bien différent du mécanisme scientifique d'évaluation des espèces.

Sur ce deuxième point important, par conséquent, une fois qu'une espèce figure sur les listes officielles, des mesures immédiates de protection sont arrêtées: l'obligation essentielle de planifier d'autorité la gestion et le rétablissement de l'espèce en question; ensuite, l'obligation d'intervention des pouvoirs publics à toutes les étapes, depuis la phase d'évaluation jusqu'à la phase de rétablissement, de gestion et d'intervention.

Ce qui fait entre autres l'originalité de ce projet de loi, bien entendu, c'est la notion d'intendance qui a été retenue et qui est encouragée directement par la loi.

Nous avons aussi des articles traitant de la protection de l'habitat essentiel dont, je suis sûre, nous ne manquerons pas de discuter. La loi comporte aussi des pouvoirs permettant d'indemniser les propriétaires fonciers.

Poursuivons rapidement en disant qu'il y a aussi des pouvoirs qui sont prévus en cas d'urgence. En cas de menace imminente, lorsqu'il convient de passer par-dessus les modalités établies, des pouvoirs correspondants permettent de le faire afin de protéger les espèces et leur habitat.

Il y a aussi des imbrications et un lien avec la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale car nous aimerions pouvoir modifier certaines dispositions de manière à mieux prendre en compte la protection des espèces ou les risques susceptibles d'être causés à l'environnement dans le cadre de la procédure d'évaluation des projets.

Bien évidemment, il y a les dispositions types d'application que l'on retrouve dans toutes les lois de ce genre ainsi que les mesures transitoires importantes lorsqu'on passe d'une absence de législation, comme c'est le cas actuellement, à un environnement légiféré. Bien sûr, nous disposons depuis très longtemps de tout un corps de doctrine et de nombreux travaux dont il nous faut tenir compte avant que la loi soit promulguée.

J'en viens rapidement à la diapositive 7. Je vais vous donner un aperçu des changements apportés par le projet de loi C-5.

Tout d'abord, nous avons apporté des changements au préambule du projet de loi. Nous avons jugé important de faire état de l'habitat des espèces en péril—l'habitat étant essentiel pour leur conservation—et de reconnaître qu'il y aura des circonstances dans lesquelles le coût de la conservation des espèces devra être partagé. Ce sont là des questions assez fondamentales pour de nombreux intervenants.

Nous avons aussi changé certaines définitions pour qu'elles soient conformes à celles qu'emploie le COSEPAC, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Cela implique certains changements apportés aux définitions des termes «individu» et «préoccupant». Par ailleurs, nous avons apporté certains changements à la définition de l'expression «conseil de gestion des ressources fauniques» afin d'être sûr d'y englober tout organisme autorisé à exercer des fonctions se rapportant aux espèces fauniques et aux revendications territoriales. La formulation a par ailleurs été modifiée pour se conformer au mécanisme d'établissement des priorités du COSEPAC afin de déterminer quand il convient d'évaluer les espèces fauniques.

Un certain nombre d'autres changements ont été apportés par le projet de loi C-5 pour qu'il y ait davantage d'ouverture, de transparence et de responsabilisation. Bien des gens se posent de grosses questions concernant la transparence des évaluations du COSEPAC et sur le caractère vraiment public de sa liste, ce qui fait qu'il est d'autant plus nécessaire de garantir que l'on rende davantage de comptes lorsqu'on procède à ces évaluations. Le projet de loi dispose que la liste du COSEPAC figurera dans le registre public en tant que liste scientifique des espèces en péril.

• 0940

Un nouvel article a par ailleurs été rédigé, qui exige que le ministre organise, au moins tous les deux ans, une table ronde de toutes les personnes intéressées par les questions de protection des espèces en péril. Ces dispositions sont en quelque sorte calquées sur celles de la Loi sur les parcs nationaux, dont les exigences sont très semblables. Les participants à cette table ronde informeront le ministre, sur un plan très général, de la façon dont nous protégeons ces espèces, et ce dernier sera tenu de répondre à ces recommandations. Nous sommes convaincus qu'il s'agit là d'un changement très utile.

Parallèlement, le registre public a pris par ailleurs davantage d'ampleur et il doit désormais englober les rapports annuels du COSEPAC, les rapports de situation générale, les plans d'action, les rapports annuels envoyés par le ministre au Parlement, et tout autre accord prévoyant des délégations de pouvoirs en vertu de la loi. Nous avons évidemment pris bien soin de faire en sorte que tous les documents associés à ce projet de loi soient rendus publics par l'entremise du registre.

Deux changements ont été apportés aux programmes de rétablissement. Les dispositions s'appliquant aux programmes de rétablissement ont été reformulées pour prévoir une période de commentaires de soixante jours concernant le programme proposé et de trente jours avant qu'il soit définitivement arrêté. On fera ainsi la différence entre le délai réservé aux commentaires du public et celui qui doit s'appliquer à tout changement exigé avant que le programme soit définitif. De plus, les plans en cours deviendront des programmes de rétablissement proposés.

Cela se rapporte plus particulièrement aux secteurs dans lesquels il peut déjà exister des plans de gestion, qu'il s'agisse des pêches ou éventuellement des espèces se trouvant dans les parcs nationaux, par exemple, de manière à s'assurer que l'on ne fait pas deux fois la même chose. Nous tenions cependant à bien préciser qu'éventuellement toutes les composantes d'un plan de gestion existant ne répondaient pas aux exigences s'appliquant aux espèces en péril. Par conséquent, nous exigeons là aussi qu'ils fassent l'objet d'une période de commentaires de soixante jours conformément à ce que prévoit la Loi sur les espèces en danger.

L'article traitant du plan d'action—il s'agit du plan d'action visant à un rétablissement—et sur la surveillance a été modifié de manière à ce que l'on puisse évaluer les incidences socio-économiques et en rendre compte tous les cinq ans à compter des cinq premières années de l'entrée en vigueur du plan. Les considérations socio-économiques préoccupent très fortement un bon nombre d'intervenants et ces rapports figureront eux aussi dans le registre public.

Nous avons apporté certains changements en ce qui a trait aux inscriptions d'urgence sur la liste. Nous avons ramené de deux ans à un an le délai imparti au COSEPAC pour rédiger un rapport de situation en cas d'inscription d'urgence sur la liste. Bien évidemment, à partir du moment où l'on procède à une inscription d'urgence, nous devons nous assurer que l'on rédige dans les meilleurs délais le document d'évaluation effectif pour s'assurer que la procédure suit son cours.

Un autre changement mineur a été apporté à l'examen des projets. Nous avons modifié la formulation de l'article portant sur l'examen des projets en parlant d'effets «préjudiciables» sur l'environnement. Cette disposition est conforme à la formulation actuelle de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous tiendrons et nous rendrons compte de tous les projets susceptibles d'avoir des effets préjudiciables sur les espèces en péril.

Le dernier changement significatif apporté au projet de loi C-5 a trait aux dispositions concernant les enquêtes. Il y a des articles qui portent sur la remise de rapports de situation. Les rapports de situation remis aux citoyens ont été supprimés. On a voulu ainsi être équitable envers les personnes faisant l'objet d'une enquête tout en maintenant le droit pour les citoyens de demander une enquête. Ces articles étaient structurés de manière à ce que les tiers puissent être tenus au courant de l'état des procédures d'enquête alors que ce n'était pas le cas pour les personnes soumises à l'enquête. Il y avait aussi le risque, dans ce cas, de porter préjudice à l'enquête. Ces articles ont donc en fait été retirés du projet de loi.

Qu'a-t-on fait d'autre, maintenant? Dans l'intervalle, nous continuons à travailler, comme vous pouvez l'imaginer. L'année dernière, nous avons mis en place un programme, d'une très grande importance, de rétablissement et d'élaboration de stratégies de rétablissement pour les différentes espèces. Vous savez que nous avons obtenu de nouvelles ressources à la suite de ces programmes et nous avons mis en place des mécanismes de révision assez généralisée des stratégies concernant les espèces les plus importantes.

• 0945

Nous avons aussi collaboré très étroitement avec le COSEPAC pour faire en sorte qu'il continue à procéder à des réévaluations des espèces en question et nous sommes prêts, nous avons fait toutes les formalités nécessaires, à ce que la législation, ou un texte législatif, entre en vigueur. Il s'agit là encore d'un travail considérable.

Dans l'intervalle, vous le savez tous, le ministre a reçu le rapport sur l'indemnisation confié à Peter Pearse. Je crois que nous avons ici quelques copies que nous pourrons remettre aux députés s'ils ne les ont pas encore reçues, mais le ministre continue à étudier ce rapport.

Les intervenants et les différentes parties intéressées dans tout le pays nous ont fait parvenir leurs commentaires, que nous étudierons de près pour en tirer des conclusions supplémentaires. Il est évident que ce rapport éveille un certain intérêt et nous étudions la question au moment où je vous parle.

Il est bien certain que nous serons bientôt prêts à mettre effectivement en place un mécanisme de réglementation régissant les dispositions d'indemnisation une fois que la loi entrera en vigueur. Cette procédure fait aussi l'objet d'une consultation, conformément à ce qu'exige la loi, et nous envisageons donc de poursuivre ces conversations à l'avenir avec toutes les personnes intéressées par les questions d'indemnisation.

Nous nous sommes aussi efforcés, de concert avec les provinces et les territoires, de voir ce que pourrait être la définition et la portée des accords bilatéraux en vertu de cette législation. Toutefois, nous sommes partis de l'accord lui-même—l'accord sur lequel on s'est entendu et qui a été signé par l'ensemble des provinces et des territoires—et nous avons essayé d'envisager quels pourraient être les problèmes de coordination avec les lois provinciales et territoriales, mais nous ne pouvons pas avancer davantage tant que la Loi sur les espèces en péril n'aura pas effectivement été adoptée.

Nous sommes tout disposés ce matin à répondre à vos questions. Je suis très heureux de collaborer avec le comité.

Je vous remercie.

Le président: Merci.

Mme Karen Redman: Monsieur le président, je voudrais simplement signaler que Mme Jacques et M. Near assistent aujourd'hui à nos délibérations. Ils représentent en fait le ministère de la Justice, de sorte que si l'un des membres du comité a une question épineuse à résoudre sur le plan du droit, c'est auprès d'eux qu'il trouvera la réponse.

Le président: Je vous remercie. C'est conforme à la décision prise mardi.

Y a-t-il d'autres témoins qui veulent intervenir? Non? Dans la négative, nous allons passer rapidement à la suite et je vais demander à M. Forseth de poser la première question.

M. Paul Forseth: Merci, monsieur le président.

À la page 2 du projet de loi, la ligne 22 du préambule dispose: «que, dans certains cas, les frais de la conservation des espèces en péril devraient être partagés». Cela nous ramène directement à la question de l'indemnisation.

Nous avons pris connaissance du rapport de Peter Pearse. Il est évidemment bien connu en Colombie-Britannique. Il nous dit beaucoup de choses aimables dans son rapport, mais il nous présente une formule qui n'a été très bien reçue par aucune des personnes auxquelles j'ai pu parler. J'aimerais que nous discutions un peu de l'ensemble... on dirait que c'est en quelque sorte après coup que l'on a pensé à l'indemnisation. À ce stade, l'indemnisation revêt une grande importance en ce sens qu'elle doit faciliter l'acceptation générale de toute la philosophie qui entoure un projet de loi de ce type. Étant donné que l'on peut voir sur votre diapositive que le projet est encore en cours d'élaboration, vous pourriez peut-être nous donner une meilleure idée des principes fondamentaux sur lesquels vous allez vraisemblablement vous fonder et nous indiquer comment va se présenter la formule d'indemnisation.

Je crois vraiment que la formule à laquelle est arrivé M. Pearse—10 p. 100, 50 p. 100, etc.—est inacceptable, de sorte qu'il nous faut faire appel à d'autres domaines du droit ou à d'autres principes. J'ai proposé entre autres qu'il y ait au minimum un énoncé de principes. La réglementation se référerait aux principes établis par la législation sur l'expropriation et par la jurisprudence canadienne.

• 0950

Toute cette question de l'indemnisation est bien difficile, surtout pour les habitants de l'Ouest. En général, dès qu'ils entendent parler d'une loi sur les espèces en péril, ils prennent peur et se réfèrent à tort à l'expérience américaine et autres situations de ce type. Cela n'a pas nécessairement grand-chose à voir avec ce projet de loi, mais la question de l'indemnisation est pour nous difficile. Pouvez-vous nous en dire davantage?

Mme Karen Brown: Bien sûr, avec plaisir.

Vous avez tout à fait raison. Toute cette question de l'indemnisation est au coeur des discussions que nous avons eues ces dernières années. N'oubliez pas que la politique d'indemnisation a été présentée par le ministre Anderson lorsqu'il a assumé la responsabilité de cette loi.

Comme vous le faites remarquer très justement, il s'agit là d'un domaine des politiques publiques très vaste et très complexe, et nous avons très peu d'expérience des questions d'indemnisation, et encore moins aux États-Unis, comme vous l'avez bien dit là encore. Nous avons dû faire un travail considérable pour comprendre les structures juridiques existantes, y compris en ce qui a trait au départ aux nécessités de l'expropriation et à tout ce qui s'ensuit. Ainsi, il y a certaines dispositions dans les lois provinciales qui régissent l'indemnisation, selon les circonstances.

À ce stade, le ministre Anderson a demandé à M. Pearse de procéder à une étude et de consulter la population pour essayer de faire certaines recommandations touchant un régime éventuel d'indemnisation. Ce rapport est désormais entre les mains du ministre, qui l'a rendu public, comme vous le savez.

Bien d'autres réactions nous sont communiquées. Il est évident que les arguments et les questions que vous soulevez, monsieur Forseth, auront une grande incidence sur la façon dont nous allons structurer ce régime d'indemnisation.

Nous examinons évidemment d'autres modèles. Nous enregistrons de nombreuses réactions de personnes qui sont très préoccupées par les pourcentages préconisés dans le rapport de M. Pearse et il faudra bien évidemment que nous nous penchions très sérieusement sur ces questions.

Nous sommes aussi en train de travailler avec certains spécialistes des questions d'évaluation et d'expertise, tant pour ce qui est des terrains privés que pour les autres, et il nous faudra aussi faire davantage de recherches en droit sur les questions de précédents, qui sont fondamentales. Disons simplement que notre travail n'est pas encore terminé, de même que la tâche du ministre qui consiste à essayer de mettre en place un bon régime d'indemnisation.

En ce qui nous concerne, l'enjeu est de disposer ici de tous les outils avec lesquels on peut chercher à protéger les espèces en péril sur le terrain. Le ministre a fait de gros efforts pour nous procurer toute la gamme des outils nécessaires—depuis les mesures incitatives et la collaboration avec les propriétaires fonciers jusqu'à la réglementation répressive nécessaire à l'occasion—en passant dans ce cas, si l'on en fait usage, par les régimes d'indemnisation devant faire en sorte que l'on ne subisse pas un préjudice quand on a des espèces en péril sur son terrain. Vous êtes bien conscients de l'équilibre nécessaire entre tous ces outils et il est clair que nous aurons bien d'autres discussions au sujet de ces dispositions.

Disons que les principes d'équité et de justice joueront un grand rôle dans toute cette discussion, de même qu'il faudra s'assurer que l'ensemble des outils dont on dispose, tant dans la loi que dans les autres textes, nous permettent finalement de traiter correctement les propriétaires fonciers et de nous assurer de leur participation active à la protection des espèces en péril.

M. Paul Forseth: J'ai une question supplémentaire à poser.

C'est une bien bonne réponse, mais cela revient essentiellement à nous dire: faites-nous confiance. Je ne suis pas sûr que cette réponse donne entière satisfaction à tous ceux que cette question inquiète beaucoup et qui ont tendance à être très méfiants.

Vous nous dites que les travaux se poursuivent, que vous avez des consultations permanentes. Pouvez-vous nous décrire davantage ce mécanisme public de consultations? Est-ce que le ministre fait les choses de son côté, ce qui fait que l'on va voir arriver tout à coup une formule et que la bataille va alors s'engager? Y a-t-il à l'heure actuelle une procédure de consultation publique?

• 0955

Je peux comprendre que le ministre des Finances hésite beaucoup à incorporer à la loi une formule ne fixant aucune limite, qui ne s'insère pas dans le processus budgétaire annuel normal et dont on ne peut prévoir le coût. Nous avons l'obligation d'administrer les finances du pays. Je dois faire comprendre aux gens que je représente qu'il faut en fait que cette formule figure dans le règlement et non pas dans la loi. Si le ministre ou son ministère ne nous informent pas davantage sur les orientations qu'ils vont prendre et ne nous renseignent pas sur la transparence de l'opération et sur la possibilité pour les tiers de participer, la réponse sommaire que vous nous donnez, faites-nous confiance, reste très préoccupante.

Le président: Je vous prie de donner une réponse aussi courte que possible.

Mme Karen Brown: Le gouvernement est tenu en droit de procéder à des consultations sur toutes les propositions de règlement et l'on organisera une procédure publique et transparente pour essayer de mettre la dernière main aux règlements présentés par le ministre.

Le président: On a aussi annoncé une affectation de crédits sur les cinq prochaines années de sorte qu'il y a d'ores et déjà un plafond établi dans l'annonce faite par le ministre, d'une année sur l'autre. C'est bien ça?

Mme Karen Brown: Des crédits ont été affectés à ce programme. Ils l'ont été avant l'adoption de la loi, monsieur le président, de sorte qu'il nous faut étudier clairement les répercussions que pourrait avoir cette loi sur notre capacité à mettre en oeuvre des programmes. Nous devrons en tenir compte à mesure que nous avancerons.

Le président: Vous vous pencherez éventuellement sur la question lors de votre deuxième série de questions.

[Français]

Monsieur Bigras, s'il vous plaît.

M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président.

Je vous souhaite la bienvenue au comité.

J'avais compris, jusqu'à maintenant, que la protection de l'habitat était une responsabilité provinciale. D'ailleurs, en 1989, le gouvernement libéral du Québec a fait adopter une loi afin de protéger les espèces menacées. Il a aussi adopté une loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, en plus de se doter d'un autre outil, le règlement sur les pêches.

Le projet de loi qui est à l'étude aujourd'hui intègre la notion d'habitat essentiel. Comment appliquera-t-on cette loi, étant donné que la protection de l'habitat est une responsabilité provinciale, et quelle sera sa relation avec la loi de 1989 et les autres lois? Jusqu'où ira-t-elle? Son application se limitera-t-elle au territoire domanial et aux terres fédérales?

Mme Karen Brown: La loi prévoit en général le même cadre de mise en oeuvre, qu'il s'agisse de terres fédérales ou provinciales.

Le cadre de mise en oeuvre prévoit que l'intendance et les actions volontaires constituent toujours la plus grande priorité, et que l'action des gouvernements provinciaux ou municipaux constitue la seconde. On s'attend à ce que toutes les provinces protègent l'habitat avec leur propre loi. Si elles ne voulaient ou ne pouvaient pas le faire, et qu'il était important de le faire, la loi permettrait au fédéral d'intervenir dans le cas de terres provinciales ou fédérales.

M. Bernard Bigras: Je voudrais poser une question concrète. Ce projet de loi prévoit l'existence d'agents de l'autorité, donc des agents de l'autorité fédérale. Au Québec, nous avons des agents de la protection de la faune. Il existe aussi au Québec des réserves fauniques ou des parcs Québec.

• 1000

Je voudrais savoir s'il est possible que des agents de l'autorité fédérale interviennent dans une réserve faunique du Québec pour appliquer la loi fédérale. Si c'est le cas, avez-vous prévu des protocoles d'intervention?

Il faut se rendre compte que deux autorités existeront: les agents de la protection de la faune du Québec et les agents de l'autorité fédérale. L'autorité fédérale peut-elle intervenir dans les réserves fauniques au Québec et, si oui, avez-vous prévu un protocole?

Mme Karen Brown: La réponse la plus simple est que nous prévoyons un protocole. Nous travaillons présentement avec le Québec et les autres gouvernements provinciaux pour déterminer les éléments de ces ententes bilatérales. Il est impossible d'être plus précis pour le moment parce que la loi n'a pas été adoptée. Lorsqu'elle le sera, il sera plus facile de conclure des ententes avec les provinces afin de réduire les possibilités de dédoublement. Cela est très important pour nous et pour les provinces.

M. Bernard Bigras: Je voudrais poser une dernière question. Si je comprends bien, vous voulez vous accorder tous les pouvoirs législatifs nécessaires et par la suite conclure des accords bilatéraux avec les provinces. Vous voulez vous donner le pouvoir conféré par la loi et par la suite négocier des accords.

L'accord d'harmonisation respectait-il les champs de compétence et les responsabilités provinciales?

Mme Karen Brown: L'accord sur la protection des espèces en péril respecte ces compétences et prévoit des programmes et des projets de loi complémentaires entre le fédéral et le provincial. Nous avons travaillé très fort avec les provinces et territoires pour essayer de respecter les divers champs de compétence.

M. Bernard Bigras: Ma dernière question sera très courte. Je crois qu'un représentant du ministère de la Justice est présent. C'est ce que Mme Redman a dit. Êtes-vous sûrs qu'il n'y a pas de risques de contestation judiciaire de ce projet de loi de la part d'un intervenant? Avez-vous des garanties, êtes-vous blindés constitutionnellement, si je peux m'exprimer ainsi?

Le président: M. Wear peut répondre brièvement. Allez-y.

[Traduction]

M. David Wear (conseiller juridique, Environnement Canada): Vous me demandez de vous garantir qu'il n'y aura jamais de contestations judiciaires et je pense que c'est une garantie qu'il est impossible de donner. Est-ce que l'on peut prévoir une telle contestation? Là encore, on ne fait qu'émettre des hypothèses. Il se peut qu'il y en ait une. Le gouvernement fédéral doit plaider assez régulièrement des causes constitutionnelles.

Nous avons évidemment évalué le bien-fondé de notre position et le ministère de la Justice est convaincu que nous disposons effectivement des compétences que suppose la loi.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Bigras.

[Traduction]

Pour que tout soit bien clair, M. Comartin est le prochain sur ma liste, suivi de M. Herron, de M. Reed, de M. Laliberte, de Mme Carroll et de Mme Kraft Sloan.

Monsieur Comartin, vous avez la parole.

M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

Madame Brown, vous nous dites dans vos notes que la réglementation—j'en reviens à la question de l'indemnisation—est prête à être promulguée. Je sais que la chose est inhabituelle, mais étant donné qu'il y a un grand manque de confiance sur la question de l'indemnisation, est-ce que le ministère est disposé à publier cette recommandation pour qu'elle soit examinée par le comité?

Mme Karen Brown: Laissez-moi préciser une chose. Tout d'abord, nous cherchons à faire en sorte que la réglementation soit promulguée, mais nous nous attendons à ce qu'il y ait un long délai entre la sanction royale et la promulgation.

Un certain nombre de règlements devront être rédigés avant la promulgation si l'on veut que le projet de loi donne des résultats. L'un des plus importants porte bien entendu sur la liste des espèces auxquelles vont s'appliquer la loi, ce qui représente bien sûr un gros travail, et nous considérons que le règlement sur l'indemnisation doit être prêt avant la promulgation.

• 1005

On prévoit à l'heure actuelle un délai entre la sanction royale et la promulgation pour nous permettre de discuter très largement et très ouvertement du type de régime de réglementation qui doit s'appliquer à l'indemnisation.

Nous sommes tout à fait disposés à discuter pleinement avec le comité pour qu'il nous fasse connaître son point de vue sur la question de l'indemnisation. Nous continuons à enregistrer toutes sortes de réactions des personnes qui sont penchées sur le rapport et nous sommes en train d'essayer de les résumer. Nous nous efforcerons, bien sûr, de tenir votre comité au courant de l'état de nos travaux et des réflexions qui nous sont communiquées si cela peut vous être utile. Nous sommes tout à fait disposés à le faire.

M. Joe Comartin: Cela veut dire que pour l'instant vous n'êtes pas disposé à nous communiquer ce que vous avez en projet.

Mme Karen Brown: Je vous avoue franchement que nous n'avons pas le projet de règlement.

À ce stade, nous disposons du rapport de M. Pearse. Un certain nombre de mémoires nous ont été envoyés à l'échelle du pays. Comme je vous l'ai signalé il y a quelques minutes, nous faisons d'autres recherches juridiques. Nous avons engagé deux autres spécialistes chargés de se pencher sur certaines questions d'évaluation que nous avons soulevées, et nous continuons à rassembler toutes les opinions. À un moment donné, nous serons en mesure de fournir un résumé de ce que nous avons recueilli, mais nous n'avons pas encore de projet de règlement.

M. Joe Comartin: Je lis à la page 11 de vos notes «le règlement est prêt pour la proclamation». J'en conclus qu'il va être prêt.

Mme Karen Brown: Oui, bien sûr, il le sera.

M. Joe Comartin: Et pour l'instant, le ministère n'a pas encore rédigé de projet ou autre document de ce genre.

Mme Karen Brown: Non, ça n'a pas été fait.

M. Joe Comartin: Voilà qui met fin à mes questions, monsieur le président. Je vous remercie.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Comartin.

Monsieur Herron, s'il vous plaît.

[Traduction]

M. John Herron: Puis-je utiliser le temps qu'il reste à Joe?

J'ai quatre questions à poser, en espérant pouvoir le faire lors de ce premier tour. Deux d'entre elles se rapportent à la justice, et j'y reviendrai, mais vu mon nom de famille, j'ai pensé qu'il était bien normal que je pose à un moment donné une question sur les oiseaux migrateurs.

J'ai pu constater qu'il y avait un consensus remarquable entre les groupes écologiques nationaux et au moins deux groupes industriels pour ce qui est des domaines dans lesquels il est possible de donner plus de mordant à ce projet de loi. Il s'agit du renforcement de la protection de l'habitat relevant de la compétence fédérale, de la reprise de la liste actuelle du COSEPAC, de l'intensification du rôle du COSEPAC sur l'établissement des listes et de la création d'un mécanisme faisant intervenir les tiers dans les conflits portant sur l'application des règlements.

Donc, ce consensus s'apparente à celui auquel est parvenu en 1996 le groupe d'étude du gouvernement sur la conservation des espèces en voie de disparition, alors qu'une coalition encore plus large d'associations de l'industrie canadienne des ressources naturelles était représentée, notamment les pâtes et papiers, l'industrie minière, l'industrie pétrolière et gazière, la pêche et l'agriculture. Ces mêmes changements ont été appuyés par le Congrès du travail du Canada—ça vous intéresse, Joe—par plus de six cents scientifiques des universités et du gouvernement et par pratiquement tous les groupements écologiques du pays.

Presque tous les changements que ces groupements souhaitaient portaient sur des questions relevant de la compétence fédérale, de sorte que la version du projet de loi C-65 entérinée par le gouvernement a réglé la plupart d'entre eux. Étant donné l'existence d'un tel consensus à l'extérieur du gouvernement, qu'est-ce qui nous empêche de renforcer ce projet de loi dans ces secteurs? Plus précisément, qui s'oppose à la protection de l'habitat sur les terres fédérales, qui s'oppose à la protection de l'habitat des poissons et des oiseaux migrateurs et qui s'oppose à ce que l'on utilise la liste actuelle du COSEPAC comme point de départ du projet de loi?

Mme Karen Brown: Merci, monsieur Herron.

Personne ne s'oppose à la protection de l'habitat sur les terres fédérales et personne non plus à ce que l'on se serve des listes du COSEPAC comme point de départ.

À ce stade, je vous le répète, nous venons de consacrer un an et demi à réévaluer avec le COSEPAC l'ensemble des espèces qui figurent actuellement sur la liste. C'est une énorme tâche, mais nous l'avons accomplie pratiquement à 90 p. 100. Si nous le faisons, c'est parce que nous voulons que ces espèces figurent dans la première liste visée par la loi. Malheureusement, cela prend beaucoup de temps.

Il y a une ou deux choses qu'il ne faut pas oublier au sujet du processus d'évaluation du COSEPAC. L'identification de bien des espèces qui figurent sur la liste remonte à quelque 25 ans, ce qui fait qu'une grande partie de l'information est périmée. Le mécanisme en vertu duquel elles ont été inscrites sur la liste n'était peut-être pas aussi ouvert et transparent que ne le veut le projet de loi.

• 1010

Je pense en particulier à certains intérêts qui existent en matière de pêche, à certains droits autochtones, au sujet desquels il convient de recueillir davantage de renseignements pour être sûr d'être bien informé lorsque nous procédons à l'évaluation. Ce projet de loi envisage une procédure très ouverte et tout à fait transparente, de sorte que nous avons demandé l'avis de tout le monde en ce qui a trait à la situation de ces espèces.

Nous faisons donc de gros efforts pour nous assurer que l'analyse de ces espèces est prise en compte dans les évaluations et que le COSEPAC aura terminé ses travaux avant que l'on adopte la législation. C'est ce que nous visons. Personne ne fait opposition. Il y a un certain nombre d'espèces sur lesquelles il faudra se pencher davantage. Pour certaines espèces, sur lesquelles nous n'avons fait encore qu'un travail sommaire, nous avons besoin de tirer parti de la somme considérable des connaissances traditionnelles autochtones. La concordance ne sera donc pas parfaite car il reste beaucoup de travail à faire.

M. John Herron: Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a un large consensus dans la population canadienne sur un certain nombre de points qu'il convient d'améliorer. Je vais m'efforcer maintenant de donner des exemples précis.

Prenons le cas des oiseaux migrateurs. La LEP n'étend pas la protection fédérale à l'habitat des oiseaux migrateurs. Le juge La Forest, un juge très respecté qui vient récemment de prendre sa retraite de la Cour suprême du Canada, a rédigé les deux derniers arrêts de la cour en matière de Constitution et d'environnement. Il démontre de manière très probante que l'habitat des oiseaux migrateurs est, aujourd'hui comme hier, une compétence fédérale essentielle. Il estime que la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs couvre actuellement l'habitat et que le gouvernement du Canada peut prendre des règlements s'appliquant aux zones protégées à l'intention des oiseaux migrateurs ainsi qu'au contrôle et à la gestion de ces zones.

La réglementation d'application de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs protège par ailleurs l'habitat jusqu'à un certain point. La loi précise que «nul ne peut déposer une substance dangereuse dans une zone fréquentée par les oiseaux migrateurs».

M. La Forest est un juriste très respecté au Canada. Sur cette question, il conclut que le gouvernement du Canada a indéniablement le pouvoir de protéger les oiseaux migrateurs ainsi que leur habitat. L'Association du Barreau canadien partage ce point de vue dans son mémoire. Il semble qu'en dépit des avis ainsi donnés par le juge La Forest et l'Association du Barreau canadien, certains juristes du département fédéral de la justice—il y en a parmi nous aujourd'hui, ce que je juge très utile, et je les en remercie—ne partagent pas ce point de vue.

Compte tenu de tout ce qui précède, ne pensez-vous pas que l'on peut soutenir à bon droit que l'habitat des oiseaux migrateurs est un domaine de compétence fédérale?

Mme Karen Brown: Je vais demander à David Wear de vous répondre sur ce point, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.

M. David Wear: Merci, monsieur Herron.

Nous connaissons bien le point de vue de l'ancien juge à la Cour suprême. Nous avons d'ailleurs discuté à plusieurs reprises avec lui de ce point de vue. Il y a des avis divers concernant l'étendue de la compétence fédérale en ce qui a trait à l'habitat des oiseaux migrateurs. Je pense que le juge de la Cour suprême à la retraite part du point de vue que la Convention sur les oiseaux migrateurs elle-même autorise le gouvernement fédéral à faire essentiellement tout ce qui lui plaît au sujet des oiseaux migrateurs et de leur habitat en particulier. Il faut bien dire que ce n'est pas l'avis du ministère de la Justice. C'est là le fondement de cette loi.

M. John Herron: Sur ce point précis, nous avons le point de vue du ministère de la Justice et un autre point de vue donné par l'ancien juge en chef de la Cour suprême, que partage l'Association du Barreau canadien. Il y a donc au minimum ici des avis partagés. Pour une simple question de prudence, ne faudrait-il pas demander à un tiers de régler ce conflit étant donné l'énorme clivage que l'on enregistre parmi les juristes sur cette question?

Le président: Merci, monsieur Herron.

Monsieur Wear, rapidement.

M. David Wear: Je ne peux que vous répondre que ce n'est pas là la façon habituelle de formuler les lois du gouvernement.

• 1015

M. John Herron: D'une certaine manière, il y a une intervention des tiers en matière d'indemnisation. Je dirais donc qu'il y a là un précédent et que l'on peut presque dire que ce droit existe déjà.

M. David Wear: Disons que ce n'est certainement pas un point de vue juridique. Il a été demandé à M. Pearse, sur le plan des politiques, d'étudier les régimes d'indemnisation, et c'est ce qu'il a fait.

M. John Herron: Toutefois, pour ce qui est des tiers, le règlement du conflit sur un autre plan—c'est la façon dont nous avons abordé la question de l'indemnisation. Il y a là aussi une question juridique. La même formule pourrait donc bien évidemment être retenue pour régler ces divergences concernant les avis juridiques.

S'il me reste du temps...

Le président: Vous n'en avez plus.

M. John Herron: Il ne m'en reste plus, j'attendrai donc le deuxième tour.

Le président: Vous pouvez vous réserver pour le deuxième tour. Merci, monsieur Herron.

J'ai sur ma liste M. Reed, M. Laliberte, Mme Carroll, Mme Kraft Sloan et le président. Monsieur Reed, vous avez la parole.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Monsieur le président, notre Herron, avec deux R, vient de disparaître.

On s'intéresse de près dans ce projet de loi aux propriétaires fonciers et aux responsabilités qu'on va les aider à assumer, mais je n'ai pas l'impression qu'on se préoccupe de ceux qui tirent les chasse-d'eau. Dans sa majorité, notre population est urbaine. La moitié au moins des espèces en péril sont aquatiques. Tout autour des Grands Lacs, en particulier, nous continuons à polluer l'eau du fait des eaux usées qui se déversent par les égouts et nous prélevons de l'eau destinée à un usage domestique. Il me semble donc ici que le projet de loi ne s'attaque qu'à la moitié du problème. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

Mme Karen Brown: En général, le gouvernement fédéral et les provinces ont d'autres moyens à leur disposition. La législation a une finalité très précise et vous avez tout à fait raison de signaler qu'elle porte sur les espèces en péril.

Dans le cadre, toutefois, de cette loi sur les espèces en péril, à mesure que nous nous mettrons à élaborer des programmes de rétablissement s'appliquant à telle ou telle espèce de poisson dans les Grands Lacs, il est évident que la procédure à laquelle nous recourons, qui fait appel à toutes les parties prenantes et aux habitants de ces régions, nous permettra de déceler les premières causes qui font que ces espèces sont en péril. Ce sera éventuellement dans certains cas un polluant chimique. Dans d'autres cas, une question d'habitat. La pêche pourra aussi en être responsable. De nombreux domaines sont à étudier.

L'un des plus gros défis à relever au sujet des centaines et des milliers d'espèces de notre pays s'explique par le fait que bien souvent on ne sait pas vraiment ce qui cause les baisses de population. Ce projet de loi nous permet donc de faire porter notre action sur les espèces particulièrement touchées et d'essayer de remédier à la situation grâce à des programmes de rétablissement.

On part ici du principe qu'il est très possible que dans le cadre d'un programme de rétablissement il faille se réclamer d'un autre texte de loi. Je vais vous en donner un exemple. Il se peut que l'on ait besoin à l'occasion de se pencher sur la réglementation touchant les demandes d'aspersion ou d'utilisation des pesticides, selon l'espèce en cause, aux termes de la Loi sur les produits antiparasitaires. Il nous faudra éventuellement envisager de recourir à des mesures précises sur les produits chimiques ou sur d'autres questions liées à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Le gouvernement du Canada, de même que les provinces et les municipalités, disposent donc d'un certain nombre d'outils dont nous n'allons pas manquer d'envisager l'utilisation dans ces programmes de rétablissement, notamment lorsqu'il s'agit des espèces des Grands Lacs, en faisant appel aux compétences acquises en matière de planification des opérations de gestion à l'échelle des Grands Lacs. Nous faisons largement confiance aux municipalités, à la ville de Toronto et à différents autres secteurs pour nous aider à déterminer par quel moyen nous pouvons continuer à améliorer la qualité de l'eau.

Nous sommes donc bien conscients du fait que le rétablissement des espèces se heurte à de nombreuses difficultés. Tout ne sera pas réglé nécessairement par un seul texte de loi, mais les programmes de rétablissement nous aideront à définir dans quels secteurs il nous convient d'apporter des améliorations.

M. Julian Reed: Il est évident que le mécanisme de réglementation, lorsqu'il est nécessaire, par exemple, de définir si des espèces risquent d'être mises en péril par tel ou tel projet, va encore entraîner des coûts supplémentaires que les tenants des petits projets ne pourront peut-être pas assumer étant donné le temps qu'il faut consacrer à une étude, venant s'ajouter à celui qui est consacré à toutes les autres études que les responsables des projets doivent déjà entreprendre à l'heure actuelle.

• 1020

Je me demande s'il y aura quelque disposition venant alléger certains des coûts qui vont inévitablement venir s'ajouter lorsque quelqu'un va mettre en oeuvre un projet—notamment sur les terres publiques.

Mme Karen Brown: Depuis que la Loi canadienne d'évaluation environnementale, celle que je connais le mieux—et je ne sais pas très bien ce que les provinces sont susceptibles d'exiger—est entrée en vigueur, même si ce n'est pas expressément mentionné, tous les projets soumis à autorisation doivent effectivement tenir compte de la présence ou de l'absence d'une espèce en péril.

Les modifications proposées en conséquence par cette loi vont rendre la chose explicite. Donc, le problème qui se pose à l'heure actuelle... d'un point de vue stratégique, on pourrait supposer que toute personne qui propose un projet a d'ores et déjà pris en compte la question des espèces en péril. De notre point de vue, il n'y a là aucune exigence et aucun fardeau de type nouveau. Lorsqu'on présente des projets au niveau communautaire—ou même à n'importe quel niveau—dans le pays, les groupes d'intérêt locaux se chargent presque toujours de répertorier les espèces susceptibles d'être en danger. Je ne suis donc pas d'accord à ce stade pour dire qu'il y aura des coûts supplémentaires liés à l'identification des espèces en péril lorsqu'on propose un projet.

M. Julian Reed: Toutefois, en vertu des dispositions de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, n'importe qui peut arrêter un projet, quitte à déterminer ensuite qu'il s'agit d'une folle poursuite. C'est le cas, en particulier, en vertu de la Loi de l'Ontario. Je pourrais vous citer quelques exemples très intéressants. Le problème est de savoir qui va défrayer la procédure lorsqu'une personne s'oppose à un petit projet en alléguant qu'il fait courir des risques et que l'on s'aperçoit six mois plus tard qu'il s'agit d'une folle poursuite.

Mme Karen Brown: Je ne suis vraiment pas en mesure de commenter le cas...

M. Julian Reed: C'est le tenant du projet...

Mme Karen Brown: Je ne connais pas en détail la situation que vous évoquez. Je me ferai un plaisir de vous en reparler...

M. Julian Reed: Je pense que nous devrions être conscients des répercussions éventuelles de la réglementation.

Mme Karen Brown: Je tiens aussi à ajouter qu'en ce moment nous nous efforçons effectivement de mettre en place l'information entourant ces espèces en commençant par les listes du COSEPAC, qui s'efforce de déterminer quelles sont toutes ces espèces. Par ce moyen et grâce à un mécanisme de consultation public, ouvert et transparent, nous cherchons à nous doter d'une base de données et de cette information afin de savoir quelles sont ces espèces, pour que ce ne soit pas une surprise pour le propriétaire foncier ou pour le tenant d'un projet de prendre connaissance de cette information au moment où elle est rendue publique.

C'est une tâche ardue, je vous le garantis. Toutefois, nous perfectionnons nos données et nous améliorons nos systèmes d'information pour que la population puisse savoir à l'avance, lorsqu'un projet est proposé, quelle est la diversité biologique dans les régions concernées.

M. Julian Reed: Le COSEPAC nous a dit dernièrement...

Le président: Vous voulez qu'il y ait un deuxième tour?

M. Julian Reed: Bien évidemment.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Laliberte, suivi de Mme Karen Kraft Sloan.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Merci, monsieur le président.

Vous parlez de responsabilité partagée. Cela s'explique en grande partie par l'étendue du champ de compétence provinciale qui existe dans ce domaine. Le fondement juridique de cette action ne provient-il pas cependant des accords de transfert des ressources naturelles aux termes desquels le gouvernement fédéral a transféré les ressources naturelles et fauniques aux provinces? Est-ce la relation que le gouvernement fédéral a avec les provinces?

Mme Karen Brown: Seulement dans les provinces des Prairies.

M. Rick Laliberte: Seulement dans les provinces des Prairies. Éclairez ma lanterne. Qu'en est-il des autres... Il y a d'autres provinces.

• 1025

Mme Karen Brown: C'est un cas particulier. La Constitution elle-même traite des pouvoirs s'appliquant aux pêches, aux eaux intérieures, au littoral, etc.

David.

M. David Wear: De manière générale, les provinces qui gèrent une grande partie de la faune depuis la Confédération le font avant tout en vertu des pouvoirs de gestion de la propriété et des ressources naturelles, qui relèvent des compétences provinciales dans la Constitution.

Pour les provinces des Prairies de l'Ouest, d'autres dispositions viennent se superposer à l'accord que vous avez cité mais, de manière générale, les provinces ont assumé la gestion d'une grande partie de la faune en se fondant sur les pouvoirs que leur reconnaît la Constitution en matière de propriété foncière et de gestion des ressources naturelles.

M. Rick Laliberte: Vous voulez parler de la nouvelle Constitution ou de la Loi sur l'Amérique du Nord britannique? D'où vient cette compétence? Je connais bien les provinces à l'intérieur de leurs frontières—je pense que c'est vers 1912 qu'elles ont été définitivement fixées pour l'Ontario et le Québec. J'essaie simplement de savoir quel est le fondement juridique de tout cela.

M. David Wear: Il n'y a en fait qu'une seule Constitution. Différents documents composent la Constitution du pays.

Le fondement historique de la gestion de la faune par les provinces se trouve à l'article 91 ou 92—je ne me souviens jamais si c'est la compétence provinciale ou fédérale—mais il y a des dispositions dans ces articles de la Constitution qui traitent de la gestion des ressources naturelles et des propriétés publiques provinciales.

C'est dans une large mesure le fondement historique des pouvoirs constitutionnels des provinces en matière de gestion de la faune.

La compétence fédérale porte précisément sur les pêches. Les dispositions constitutionnelles qui nous concernent se réfèrent au littoral ainsi qu'à la gestion des terres fédérales—les propriétés publiques. Le gouvernement fédéral peut donc lui aussi se fonder sur divers chefs de compétence pour gérer les domaines de la faune que nous estimons devoir nous concerner.

Il y a le cas précis de la Convention sur les oiseaux migrateurs, qui est un traité de l'empire et qui constitue un autre chef de compétence dont peut se prévaloir le gouvernement fédéral pour exercer sa compétence sur les oiseaux migrateurs.

M. Rick Laliberte: Donc, sur le plan de la compétence, ai-je raison de partir du principe que la compétence exercée par notre pays s'appuie aussi au départ sur les traités signés avec les nations autochtones?

M. David Wear: Si vous me demandez par là dans quelle mesure il nous faut évidemment tenir compte des droits autochtones et issus de traités existants, je vous réponds par l'affirmative. On le retrouve à l'article 35 de la Loi constitutionnelle.

M. Rick Laliberte: Pour ce qui est de l'application de ce projet de loi dans la pratique, j'aimerais vous poser une question précise. Comment se rattache l'article 32 à l'article 34 et comment les choses vont-elles se passer sur le terrain, si je peux m'exprimer ainsi... Il s'agit des interdictions.

Mme Karen Brown: Excusez-moi, mais j'essaie rapidement de me faire une idée. Je pense que c'est probablement Ruth qui est la mieux placée pour répondre à votre question.

Mme Ruth Wherry (directrice, Espèces en péril, Service canadien de la faune, Environnement Canada): L'article 32 interdit de manière générale de tuer un individu d'une espèce sauvage inscrite comme espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, de lui nuire, de le harceler, de le capturer ou de le prendre.

L'article 34 se rapporte précisément aux espèces qui ne sont pas aquatiques, qui ne sont pas des oiseaux migrateurs ou qui ne se trouvent pas sur des terres domaniales. Il ne s'appliquera que dans une province ou un territoire dans lesquels le gouverneur en conseil a pris un décret dans ce sens, sur la recommandation du ministre.

M. Rick Laliberte: L'article 34 établit donc des exceptions.

Mme Ruth Wherry: En fait, il permet de s'assurer que s'il n'existe pas de dispositions dans les lois provinciales ou territoriales réprimant les agissements visant à tuer une espèce ou à détruire son habitat, le ministre peut alors recommander au gouverneur en conseil d'étendre par décret ces interdictions s'appliquant à ces espèces dans les provinces et les territoires.

M. Rick Laliberte: Il serait donc peut-être bon que notre comité se familiarise avec les lois provinciales qui existent dans ce domaine.

Mme Ruth Wherry: Oui, pour voir si elles couvrent ou non le domaine concerné.

M. Rick Laliberte: Très bien.

• 1030

Vous utilisez le terme «socio-économique». Pour contrôler les plans d'action, vous fondez vos décisions sur des considérations socio-économiques. Il y a le côté «sociologique» et le côté «économique».

Ce qui manque, c'est la dimension écologique. Je pense qu'il faut tenir compte de ces trois dimensions lorsqu'on procède à ces contrôles. S'il y a à la fois des espèces en péril et des prédateurs dans la région, que va-t-on faire pour les prédateurs? Il vous faudra tenir compte de toutes ces questions. Il n'y a pas que l'impact humain sur les espèces, il nous faut aussi tenir compte de l'ensemble du cycle biologique.

Tout cela pour dire qu'il nous faut aller au-delà des répercussions socio-économiques et tenir compte des trois dimensions.

Mme Karen Brown: Oui, vous avez tout à fait raison.

Les programmes de rétablissement et les plans d'action tiennent absolument compte des paramètres biologiques et écologiques. Le changement apporté visait par ailleurs à indiquer clairement que nous rendrons compte des considérations socio-économiques. Cela vient en plus.

Le président: Qu'est-ce qui est envisagé? Où se trouve cette disposition dans la loi?

Mme Karen Brown: Le fondement même du plan d'action, tout cet article, relève des dispositions s'appliquant aux programmes de rétablissement et aux plans d'action, monsieur le président.

Le président: Quelles sont les dispositions de la loi qui renvoient aux trois dimensions auxquelles se réfère M. Laliberte?

Mme Karen Brown: Il se réfère, je pense, au suivi et aux rapports ainsi qu'à l'article 56, soit aux changements que nous avons évoqués dans notre exposé. Il s'agit de l'article 56.

Le président: Oui, mais le député faisait état de l'absence de dimension écologique. La question est donc de savoir où est la dimension écologique.

Mme Karen Brown: je pense, monsieur le président, qu'elle ressort du contenu des différents articles se référant au plan d'action et au plan de gestion devant permettre un rétablissement. Nous nous référons uniquement au suivi de ces plans.

Vous devez vous reporter aux articles qui traitent précisément dans la loi des plans d'action devant permettre un rétablissement.

Le président: Auriez-vous l'obligeance de les citer?

Mme Karen Brown: Ce sont les plans d'action des articles 47 à 56 inclus.

Mme Ruth Wherry: Comme l'a fait remarquer Karen, l'ensemble des plans d'action et des programmes de rétablissement s'appuient sur des considérations écologiques. Nous ne faisons qu'ajouter l'obligation de tenir compte aussi des considérations socio- économiques.

Le président: Merci, monsieur Laliberte.

Madame Carroll, vous avez la parole.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'appartiens au monde des affaires et il est probable que j'ai appris le peu que je sais au sujet de l'environnement depuis mon élection. Souvent, je consulte les documents d'information donnant le point de vue d'un secteur d'industrie ou du monde des affaires lorsque nous cherchons à les concilier avec nos préoccupations environnementales.

J'ai eu la chance de faire partie du groupe d'étude du premier ministre sur l'Ouest et à ce titre nous nous sommes rendus dans cette région l'année dernière. Un certain nombre de groupes d'industries que le groupe d'étude avait entrepris de contacter, et auxquels M. Herron a fait allusion, sont venus nous parler. En passant, je dois vous dire que les responsables sont venus directement nous donner le point de vue du groupe qu'ils représentaient en venant témoigner devant nous.

Je reviens à la question que vous a posée M. Herron. Il vous a dit que les groupes actuels, notamment le secteur des pâtes et papiers, l'industrie minière et d'autres secteurs encore, puisque le groupe d'étude de 1996 s'adressait à un ensemble d'industries plus larges, nous ont recommandé de renforcer la protection de l'habitat qui relève de la compétence fédérale.

Vous avez déjà pris cela en note, parce que je reprends ce qu'il vous a dit, afin que nous ne nous écartions pas de notre sujet en attendant une réponse. Il a parlé de la répartition des coûts, de l'éventualité de l'intervention des tiers et a cherché à trouver dans ce texte de loi ce que de toute évidence nous n'y trouvons pas, ou du moins ce que je n'y vois pas.

Pour conclure et de manière à bien préciser mes questions, je crois, madame Brown, que la transparence à laquelle vous avez fait allusion existe bien en l'espèce. Je pense que l'on a procédé à de larges consultations. D'après mes notes, je constate que de ce fait les entreprises, le monde scientifique, les écologistes et les particuliers ont placé la barre plus haut en ce qui concerne cette législation que ne semble l'indiquer le texte qui est présenté devant notre comité.

• 1035

Je vais vous reposer la même question que mon collègue puisqu'il a pu le faire avant moi étant donné que les députés de l'opposition intervienne avant ceux du gouvernement: si le consensus a été aussi large qu'il le décrit, et mes propres observations de même que mes discussions avec d'autres intervenants me le font penser, à qui s'adresse cette législation?

Je vous demande à nouveau qui s'oppose à la protection de l'habitat, au principe consistant en répercuter les frais d'établissement de cette liste ou à un certain nombre de démarches évoquées aujourd'hui ou qui interviendront à l'avenir?

Je vous demanderai d'être précis, si vous le pouvez, parce que nous n'avons pas beaucoup de temps. Je vous remercie.

Mme Karen Brown: Je ne peux pas être précis, je vous l'avoue. Je pense que vous constaterez vous-même en écoutant les témoins qui vont comparaître devant vous les prochaines semaines qu'il y a en fait bien plus de divergences d'opinion qu'on a pu vous le faire croire.

Mme Aileen Carroll: Je crois vous avoir dit clairement que ma question ne s'expliquait pas par ce que d'autres m'ont dit mais qu'elle venait de mes propres observations. Je vous demanderai donc...

Mme Karen Brown: Laissez-moi évoquer tout d'abord les groupes que vous avez mentionnés—le GTEP, le Groupe de travail sur les espèces en péril, en est un, et il y a en a d'autres—ils ne représentent pas tous les groupements industriels de notre pays. Vous avez nommé l'Association des pâtes et papiers et l'Association minière. Ces dernières ne représentent pas les intérêts de l'agriculture ou des pêches. Il y a un certain nombre de grands secteurs de l'économie qui n'y sont pas représentés.

Un autre point d'une importance fondamentale pour les conversations que nous avons aujourd'hui et que nous aurons à l'avenir, et dont vous entendrez vous aussi parler, c'est celui des droits autochtones, tant au sud du 60e parallèle, qui sont très étendus, sur les terres des réserves indiennes, qu'au nord de ce 60e parallèle, avec les conseils de gestion des ressources fauniques, qui sont les organismes chargés en droit de gérer la faune. Il y a en outre des considérations provinciales et territoriales qui sont prises en compte dans l'élaboration de ces propositions. Les différents secteurs avec lesquels nous traitons ont des idées très arrêtées sur la question et il y a bien d'autres éléments à prendre en compte.

Je ne dis pas, et je ne veux pas qu'on me fasse dire, qu'il y a des oppositions. Chacun a une idée très différente de la panoplie d'outils qu'il convient d'utiliser et dans quelle mesure il convient de le faire. Certains préfèrent légiférer et d'autres aimeraient que nous fassions plus largement appel aux mesures volontaires et incitatives. Nous n'avons pas ménagé nos efforts pour essayer de trouver la panoplie qui convient et cela se reflète en partie dans le texte que vous avez devant vous aujourd'hui.

Mme Aileen Carroll: Merci, madame Brown. J'ai une autre question à vous poser.

Je vous ai écouté attentivement. Si je vous comprends bien, les points de vue ou les conclusions et les recommandations du groupe de travail de 1996—qui s'appliquaient en fait à bien d'autres secteurs que ceux des mines et des pâtes à papier—ne représentaient pas ceux de tous les groupements d'intérêt économiques, mais seulement ceux d'un certain nombre de grands secteurs, à l'exclusion de l'agriculture ou des pêches.

J'attends moi aussi avec impatience les travaux de notre comité et les témoignages des différents groupes qui vont venir comparaître, et il nous incombe en fait de tirer parti de toutes les opinions, souvent divergentes, qui vont nous être communiquées. Je veux toutefois être bien claire dès le départ: cette loi étant principalement le fruit des travaux de votre ministère, quels sont les compromis qui vous semblent devoir être faits?

Enfin—étant donné que je sais que le sujet est délicat—j'aimerais demander à M. Wear, du ministère de la Justice... Il est risqué de vous faire connaître ma situation personnelle, étant mariée depuis 32 ans à un avocat qui pratique devant les tribunaux et qui est l'ancien président du Barreau de l'Ontario.

Dans votre réponse à M. Herron, vous avez déclaré que le ministère de la Justice n'était pas d'accord avec M. La Forest et avec l'Association du Barreau canadien. J'aimerais avoir plus de détails à ce sujet. On est tenté normalement de dire: «laissez tout cela et allez devant les tribunaux pour faire valoir votre cause». Vous allez bien entendu nous dire pour quelle raison le ministère de la Justice n'est pas d'accord.

• 1040

Mme Karen Brown: Puis-je répondre tout d'abord à la première question et demander ensuite à David d'intervenir?

Mme Aileen Carroll: J'ai peur que mon temps de parole soit alors dépassé.

Mme Karen Brown: Je tiens tout d'abord à dire clairement, au sujet du Groupe de travail sur les espèces en péril, que je ne connais pas les gens qui opéraient au sein de ce groupe. C'était bien avant que je m'occupe de la question.

Mme Aileen Carroll: C'était en 1996. Je n'étais pas là moi non plus.

Mme Karen Brown: Toutefois, ce que représente ce groupe est bien clair.

Mme Aileen Carroll: Je vous remercie.

Mme Karen Brown: Je tiens à bien préciser que nous n'avons pas écarté les recommandations de ce groupe. Nous avons particulièrement apprécié que les groupements industriels et écologiques aient étroitement collaboré pour essayer d'en venir à un consensus et présenter certaines recommandations.

La difficulté se présente souvent lorsqu'on cherche à incorporer tout cela dans un texte de droit. Lorsqu'on en vient à des propositions et à des ententes très larges sur les politiques, je vous avoue bien franchement que c'est sur les détails que tout achoppe. Nombre d'éléments du consensus disparaissent lorsque l'on cherche effectivement à formuler sur le plan juridique les points sur lesquels on croyait s'être entendu. C'est donc une bataille constante, je vous l'avoue, et nous en sommes terriblement conscients.

Mme Aileen Carroll: J'apprécie vos commentaires, mais en ma qualité de parlementaire et de membre de ce comité, je pense qu'il me faut retourner voir ce qui s'est passé en 1996, avant que nous nous penchions toutes deux sur la question. J'ai l'impression qu'à l'époque les secteurs de l'agriculture et des pêches étaient fortement représentés au sein de ce groupe. Si ce dernier a recommandé que l'on fixe la barre plus haut qu'elle ne l'est à l'heure actuelle, votre ministère a alors comme moi le devoir de revenir sur ce qui s'est passé en 1996, afin de savoir pourquoi on était prêt alors à fixer la barre si haut.

Monsieur Wear.

M. David Wear: Je ne suis pas vraiment en mesure...

Le président: Madame Brown, vous voulez commenter?

Mme Karen Brown: Oui, effectivement. Merci, monsieur le président.

Nous ne considérons absolument pas que le projet qui est devant vous n'atteint pas la barre fixée par le groupe d'étude. Je pense que l'on s'accorde généralement à dire que notre projet est tout à fait conforme aux orientations politiques. Le défi qu'il nous faut relever maintenant est de le traduire effectivement dans un texte de loi.

Nous avons par ailleurs beaucoup avancé depuis les travaux du groupe d'étude de 1996. Nous avons procédé à plusieurs autres séries de consultations et nous avons fait plusieurs autres tentatives d'élaboration de projets législatifs.

Bien des choses se sont passées depuis lors et je pense que le ministre sera d'accord pour dire que nous ne pensons pas nous situer au-dessous de la barre, que notre démarche est tout à fait cohérente par rapport...

Mme Aileen Carroll: Ce n'est pas une question de conviction; il s'agit de tenir compte des recommandations effectives et de ce que le comité a préconisé et de se demander dans quelle mesure elles ont été reprises dans la loi. Il ne s'agit pas d'avoir des impressions mais de se demander si les dispositions sont bien là. Toutefois, nous en reparlerons, j'en suis convaincue.

M. David Wear: Je ne suis pas sûr à 100 p. 100 d'être présent en personne pour représenter le point de vue du ministère de la Justice. Il est assez inhabituel de demander au ministère de la Justice de comparaître en tant que témoin pour débattre essentiellement des avis juridiques qu'il donne à un ministère client. J'attendrai avec intérêt que le comité nous invite à prendre part à ses délibérations et, bien évidemment, le ministère de la Justice répondra à votre demande à l'échelon approprié. C'est à peu près tout ce que je peux dire aujourd'hui.

Mme Aileen Carroll: Je crois savoir que lorsque nous avons mis en place la LCPE, le ministère de la Justice a participé à toutes les délibérations. Est-ce que je me trompe?

Le président: C'est exact, mais cela n'a rien à voir avec l'argument de M. Wear.

Ce n'est pas parce que le ministère a participé aux délibérations que M. Cameron était appelé à interpréter la position de celui-ci; il était là pour répondre aux questions posées par les membres du comité au sujet des articles de la LCPE.

Quoi qu'il en soit, le ministère est invité ici à présenter son point de vue et la discussion pourrait être très utile.

M. John Herron: J'invoque le règlement. J'ai du mal à comprendre ici, mais la question précise posée par Mme Carroll se référait à ce qui se passe lorsqu'on n'est pas d'accord avec...

Le président: Pourriez-vous poser la question lors du deuxième tour? Nous aurons le temps de le faire, j'espère.

Madame Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci, monsieur le président.

Soyez le bienvenu, monsieur Brackett. Excusez-moi de ne pas vous avoir reconnu ce matin. Vous avez plus de... Ça vous va très bien, d'ailleurs.

J'ai peur d'être allée un peu trop loin. Rappelez-moi à l'ordre, monsieur le président.

Une voix: Si un homme avait fait ce genre de réflexion à une femme venue témoigner, on aurait crié au scandale.

Mme Karen Kraft Sloan: Je vous priais simplement de m'excuser de mon manque de tact du fait que je ne vous ai pas dit bonjour ce matin.

• 1045

Poursuivons au sujet de cette loi.

L'ancien projet de loi, déposé avant l'élection de 1997, prévoyait un filet de sécurité. Selon les dispositions du texte antérieur au projet de loi C-33, le gouvernement fédéral devait obligatoirement intervenir lorsque les provinces ne protégeaient pas suffisamment les espèces.

Je tiens à vous féliciter pour la façon dont est formulé le nouveau projet de loi étant donné que la portée du filet de sécurité est plus large. Je vous en sais gré. Ce qui m'inquiète, toutefois, c'est que ces dispositions ne sont pas d'application obligatoire dans ce projet de loi; elles sont discrétionnaires. Pourquoi est-on passé d'une obligation à un pouvoir discrétionnaire?

Mme Karen Brown: Je vous remercie tout d'abord de nous avoir donné cette précision concernant le filet de sécurité.

Nous n'avons certainement pas ménagé nos efforts pour nous assurer que le texte de loi actuel englobe toutes les espèces au Canada. Vous avez raison de signaler que ce n'était pas le cas du projet de loi C-65. Son application était très restrictive.

De la façon dont il est formulé, ce projet de loi prévoit que les interdictions s'appliquant à la protection des espèces et de la faune qui se trouve sur place s'appliquent automatiquement aux espèces qui relèvent de la compétence fédérale. Nous partons alors du principe—et nous en accordons bien évidemment la possibilité—que les provinces et les territoires vont veiller à ce que leurs lois en fassent autant, ce qui nous ramène à la question soulevée tout à l'heure. Si ce n'est pas le cas, le ministre peut alors demander au gouverneur en conseil de mettre en place ce filet de sécurité.

Nous avons rendu la chose obligatoire dans la mesure du possible, en partant du principe que les gouvernements provinciaux et territoriaux feront le nécessaire en se dotant des outils législatifs devant leur permettre de protéger toutes les espèces dont ils sont chargés.

Mme Karen Kraft Sloan: Dans le texte antérieur, cette disposition était d'application obligatoire, même si le projet de loi avait une portée plus restrictive. La mise en place d'un filet de sécurité reste discrétionnaire dans le nouveau texte de loi. Pour quelle raison l'application, qui était obligatoire la dernière fois, est aujourd'hui discrétionnaire?

Mme Karen Brown: Cela tient davantage au choix des termes pour ce qui est de la formulation du projet de loi.

Employait-on le terme «doit» dans le projet de loi C-65? Je n'en sais rien. Nous allons vérifier et nous vous en reparlerons.

Mme Karen Kraft Sloan: Oui, il y avait l'article sur les habitats chevauchant les frontières, l'article 33 du projet de loi précédent, 32 et quelque chose dans le projet actuel.

Mme Karen Brown: Très bien.

Mme Karen Kraft Sloan: J'ai parlé à ce sujet de déplacements transfrontaliers. Toute espèce se livrant à des déplacements transfrontaliers serait soumise à l'application obligatoire des dispositions sur le filet de sécurité.

C'était là une disposition très importante du projet de loi précédent. Elle contribuait largement à assurer la protection légale des espèces en péril à l'échelle du pays. Elle incitait véritablement les provinces à faire le nécessaire concernant les espèces en péril.

J'aimerais que notre comité obtienne sous une forme ou sous une autre une réponse par écrit à ma question.

Mme Karen Brown: Ce sera fait.

Mme Karen Kraft Sloan: Vous m'avez peut-être déjà répondu en partie sur le deuxième point qui me préoccupe au sujet du filet de sécurité.

Quels critères va-t-on retenir pour déterminer si une province protège bien les espèces en péril? Vous nous avez dit que les dispositions devraient être exactement les mêmes.

Il nous arrive parfois d'avoir d'excellentes lois, mais qu'elles ne soient pas appliquées. Par conséquent, lorsque vous nous dites que ces dispositions doivent être exactement les mêmes, est-ce qu'il s'agit simplement d'exiger que dans leurs recueils ces lois se présentent exactement sous la même forme? Y aura-t-il aussi d'autres critères? Va-t-on se demander, par exemple, si les lois sont vraiment appliquées? Permettent-elles effectivement de protéger les espèces?

• 1050

Mme Karen Brown: Je n'ai jamais dit que les dispositions devaient être identiques, parce qu'elles peuvent être tout à fait différentes tout en permettant d'obtenir les mêmes résultats. Il convient de le signaler.

Certaines provinces ont des lois s'appliquant expressément aux espèces en péril. D'autres ont englobé la protection des espèces en péril dans les lois pertinentes. Je tenais simplement à donner cette précision.

Au bout du compte, il faut s'assurer que ces dispositions protègent l'habitat et empêchent que l'on tue ces espèces. Bien entendu, si ces dispositions n'offrent pas cette protection, le ministre pourra alors faire ce genre de recommandation.

Il n'est pas toujours facile pour les différents paliers de gouvernement, et non pas simplement pour les provinces et les territoires, de veiller à ce que la loi soit appliquée. Sur le plan des principes, toutefois, nous voulons pouvoir disposer au départ de tous les outils juridiques.

En discutant avec les provinces et les territoires d'un accord bilatéral, nous nous efforcerons de déterminer comment il nous faudra effectivement collaborer pour garantir l'application de la loi. N'oublions pas non plus que la Loi sur les pêches jouera un rôle dans toute cette opération. Nous collaborerons avec le ministère des Pêches et des Océans et avec les agents des pêches pour essayer de nous doter des moyens de garantir l'application des règlements exigés par cette loi.

Mme Karen Kraft Sloan: Pouvez-vous nous indiquer comment vont être établis les critères s'appliquant au filet de sécurité?

Mme Karen Brown: Aux termes des interdictions générales, il est dit que nul ne peut tuer, harceler une espèce ou lui nuire... L'essentiel est de se pencher sur la formulation de la loi fédérale et de s'assurer qu'il existe des dispositions équivalentes dans les lois provinciales. Nous examinerons la chose de près avec chacun des gouvernements provinciaux une fois que la loi aura reçu la sanction royale ou aura été promulguée.

Mme Karen Kraft Sloan: Est-ce que le public aura la possibilité de prendre part à l'opération? Si le ministre estime qu'à son avis la province protège ces espèces mais qu'un particulier considère qu'il n'en est rien, êtes-vous prêt à envisager une possibilité de recours permettant à un membre du public de présenter une requête au ministre fédéral pour qu'il fasse une recommandation au GEC qui, on peut l'espérer, promulguera la législation après que l'on aura procédé à l'enquête qui s'impose?

Mme Karen Brown: Nous espérons bien qu'il ne sera pas nécessaire d'agir ainsi pour chacune des espèces. Ce serait un lourd fardeau législatif.

Nous cherchons à ce que les gouvernements provinciaux, dans le cadre de leurs définitions et de leurs divers textes de loi, assurent la permanence de ces dispositions et les appliquent à toutes les espèces. Nous pourrons alors être sûrs que les cadres juridiques effectifs sont complémentaires et déjà en place. S'il nous faut réexaminer la situation pour chacune des espèces, nous n'en sortirons pas.

Il pourra toujours se produire à l'occasion qu'une espèce en particulier échappe à la législation, mais depuis la signature de l'accord en 1996, huit des dix provinces et territoires ont apporté des changements pour s'assurer que leurs définitions concordent avec celles que nous envisageons au niveau fédéral.

La question est vraiment importante. Bien des lois provinciales sur la faune se limitaient jusqu'alors au gibier au sens large. La plupart des provinces et des territoires ont apporté des changements à leurs lois sur la faune afin d'englober les plantes, les reptiles, les animaux et tout ce qui revêt évidemment pour nous un grand intérêt dans le cadre de la Loi sur les espèces en péril.

Ces dispositions doivent servir de cadre et permettre de s'assurer que les textes législatifs sont complémentaires, au niveau fédéral et provincial.

Mme Karen Kraft Sloan: Si toutefois les antécédents d'une province démontraient qu'elle n'a pas adopté les lois nécessaires à la protection des espèces en général ou que ces lois sont insuffisantes, êtes-vous disposé à prévoir une forme de recours permettant au public de déposer une requête au gouvernement? Vous avez déclaré que vous incitiez le public à participer à l'ensemble de l'opération, ce qui englobe le mécanisme d'évaluation du COSEPAC.

Mme Karen Brown: Nous ne manquerons pas d'encourager la participation du public lors de la mise en oeuvre des accords bilatéraux. Ce sera une procédure tout à fait ouverte et transparente et chacun sera invité à faire ses commentaires. Nous espérons que l'on nous donnera ainsi une idée de la façon dont sont perçus ces accords par le public. Aux termes de la présente loi, ces accords devront être consignés dans un registre public et il en sera de même pour tous les futurs accords comportant une délégation de pouvoirs. Je vous signale par ailleurs que nous avons procédé à des changements pour nous assurer de la transparence de toute cette procédure, qui pourra faire l'objet de commentaires dans le registre.

• 1055

En outre, il y a des dispositions prévoyant la possibilité pour les particuliers de nous demander d'intervenir et de faire enquête aux termes de la loi fédérale s'il y a une infraction. Je considère qu'il est particulièrement important sur le plan du droit de savoir jusqu'à quel point nous pouvons nous substituer par ce moyen à la compétence provinciale.

Mme Karen Kraft Sloan: Effectivement. Je ne proposais par là un moyen d'empiéter sur la compétence provinciale, je disais simplement que cela ne manquerait pas d'inciter le ministre à exercer sa compétence fédérale pour ce qui est du filet de sécurité.

Mme Karen Brown: La responsabilisation sera certainement bien plus grande dans la mesure où les dispositions s'appliquant au filet de sécurité sont reconduites chaque année et bien entendu révisées dans le cadre des tables rondes qui sont organisées tous les deux ans. Ce sont là les moyens qui visent à garantir que les responsables continuent à agir ouvertement et rendent compte tout à fait publiquement de l'administration de la loi.

Le président: Merci, madame Kraft Sloan. Il vous reste deux questions pour le deuxième tour.

J'espère que vous permettrez au président de poser une ou deux questions à ce stade. Madame Brown, je voudrais faire rapidement deux observations, qui se veulent constructives, et j'espère que c'est ainsi que vous les interpréterez.

Alors que vous établissiez une comparaison, dans l'échange avec Mme Kraft Sloan, entre dispositions obligatoires et facultatives des deux projets de loi, vous avez parlé de choix de terminologie. Cela m'a bien fait comprendre qu'un texte de loi relève d'un choix de terminologie. Ce choix est important et il ne faut pas qu'il dépende de considérations ou de facteurs n'ayant rien à voir avec la loi. C'est pourquoi les gens s'intéressent d'aussi près à la différence qui existe entre dispositions obligatoires et facultatives, et ce projet de loi est empreint d'une terminologie se rapportant à des dispositions d'application facultatives.

Ma deuxième observation a trait à l'intervention en matière socio-économique de M. Laliberte, qui a eu tout à fait raison d'attirer votre attention sur l'article 46 et les suivants. Il y a une référence très appuyée aux conditions socio-économiques à l'alinéa 49e) et il est toujours bien délicat de s'engager dans une telle voie.

Je vous fais remarquer que le moratoire sur la pêche à la morue n'aurait pas été prononcé pour des considérations socio-économiques si la crise n'avait pas atteint de telles proportions deux ans après le rapport publié par M. Leslie Harris en 1990. Il y a d'énormes résistances à l'intérieur du système lorsqu'il s'agit d'agir en fonction de critères socio-économiques et de ce fait les espèces courent de plus en plus de risques.

Bien évidemment, je ne me prononce pas dans un sens ou dans l'autre. C'est une simple observation. La formulation du projet de loi est ce qu'elle est, mais j'ai de fortes réticences chaque fois que l'on fait référence dans le projet de loi aux conditions socio-économiques, parce que dans la pratique les considérations socio-économiques priment par rapport aux considérations écologiques. Je pense que c'est ce que voulait souligner M. Laliberte, et nous sommes nombreux autour de cette table à être d'accord avec lui. Je tenais à ce que l'on en prenne acte.

• 1100

Pour faire suite aux questions posées par M. Herron et Mme Kraft Sloan, pouvez-vous commenter le fait qu'en septembre dernier les ministères qui ont comparu devant notre comité ne s'opposaient absolument pas à ce que la liste de réévaluation du COSEPAC devienne automatique? Nous n'avons entendu aucune objection à ce propos. Le COSEPAC lui-même, lorsqu'il a comparu devant nous, nous a déclaré qu'il convenait que la réévaluation de la liste avait pour but d'en faire automatiquement la liste de référence en droit. Comment se fait-il que ce point de vue n'ait pas repris dans le projet de loi qui nous est présenté?

Mme Karen Brown: Le projet de loi prévoit que nous allons reprendre la liste du COSEPAC. Le gros problème est celui du calendrier, monsieur le président, et il s'agit de savoir à quel moment la loi sera prête et à quel moment la liste du COSEPAC le sera. Voilà déjà un moment que nous essayons de fixer l'échéancier et nous sommes tout à fait disposés à prendre l'avis du comité à mesure que l'on s'approche de la date de mise en oeuvre de cette loi. Le COSEPAC poursuit ses travaux; nous espérons que lorsqu'il se réunira en mai, à Osoyoos, nous nous serons approchés de notre objectif, qui consiste à mettre la dernière main à ces évaluations. Je pense que nous essayons de mener les deux choses en parallèle, et vos propositions seront les bienvenues.

Le président: Vous nous incitez à apporter des amendements, si je comprends bien votre réponse? Je vous remercie.

Pour ce qui est des espèces aquatiques, pouvez-vous nous dire comment on va protéger ces espèces dans les territoires et empêcher qu'elles soient tuées ou détruites par les résidents?

Mme Karen Brown: Il faudra se réclamer de la Loi sur les pêches, à moins que cela fasse l'objet d'une rétrocession de pouvoirs... Dans leur majorité, les lois territoriales sur la faune ne traitent pas des poissons, sauf dans les cas où il y a une entente précise, et il y a une entente sur les pêches dans l'intérieur des terres qui a été passée entre le gouvernement fédéral et le Territoire du Yukon.

En outre, les conseils de gestion des ressources fauniques ont des responsabilités importantes, et je suis sûre que votre comité ne l'ignore pas—en ce qui a trait...

Le président: Étant donné que l'on a affaire aux espèces en péril, pourquoi ne pas renforcer cette mesure en mentionnant aussi la chose dans le projet de loi?

Mme Karen Brown: Nous avons cherché à nous assurer que les textes de référence, au départ de cette législation, viennent compléter la Loi sur les pêches pour ce qui est des définitions et de l'application. La Loi sur les pêches est en fait l'un des principaux outils dont dispose aussi le ministère des Pêches, qui est le ministre responsable dans ce projet de loi. Il en va de même pour la Loi sur les parcs nationaux et pour différents textes de loi dont dispose chacun des ministres responsables pour s'assurer que tous les éléments sont bien en place.

Le président: Je reviendrai éventuellement sur la question à une autre occasion.

Enfin, comment va-t-on pouvoir empêcher que les résidents tuent ou détruisent les espèces migratrices? Est-ce que cela est visé par les articles 32 et suivants?

Mme Karen Brown: Les dispositions portant sur le filet de sécurité mettent toutes les espèces sur le même pied, qu'elles traversent ou non les frontières. Elles bénéficient donc du même niveau de protection que toutes les espèces visées par la disposition portant sur le filet de sécurité.

Le président: Est-ce que vous vous référez aux articles 32 et 61?

Mme Karen Brown: Oui, et aux autres.

Le président: La protection des espèces qui débordent des frontières relève-t-elle, à votre avis, de la compétence fédérale?

Mme Karen Brown: Personnellement, je n'ai pas d'opinion à ce sujet, monsieur le président.

Le président: Je ne vous demande pas votre opinion personnelle, mais un avis juridique. Est-ce le cas ou non?

Mme Karen Brown: Je vais demander à David Wear de vous donner une réponse en droit.

M. David Wear: Tout dépend de la définition que vous donnez aux espèces débordant des frontières, j'imagine. Si la question est...

Le président: C'est bien simple, monsieur Wear: c'est une espèce qui traverse les frontières.

M. David Wear: Si la question que l'on se pose est de savoir si une espèce dont l'habitat chevauche une frontière relève automatiquement de la compétence fédérale, notre ministère répond par la négative.

Le président: Elle n'en relève donc pas.

M. David Wear: Si c'est pour la seule raison qu'elle passe d'un côté et de l'autre d'une frontière internationale.

Le président: Elle ne relève pas de la compétence fédérale.

M. David Wear: Elle n'en relève pas.

• 1105

Le président: Que faut-il donc pour que l'on dise qu'une espèce déborde des frontières? Combien de fois faut-il qu'elle traverse les frontières?

M. David Wear: La loi n'établit pas cette distinction parce que toutes les espèces sont protégées par les mêmes interdictions prévues par la loi.

Le président: Il y a toutefois une responsabilité fédérale spéciale chaque fois que l'on traverse les frontières—ainsi, pour ce qui est de l'acheminement et de la distribution des ondes. Qu'est-ce qui est transfrontalier?

M. David Wear: La majorité des pouvoirs fédéraux découlent de sa compétence en matière d'échanges et de commerce et non du fait que l'on traverse et retraverse la frontière.

Le président: Qu'est-ce qui fonde alors la loi sur les espèces migratrices si ce n'est pas le simple fait que l'on traverse les frontières?

M. David Wear: La compétence fédérale s'appuie sur la signature de la Convention sur les oiseaux migrateurs, qui est un traité passé entre les États-Unis et le Canada. Il est considéré comme un traité de l'empire. À ce titre, il permet d'asseoir la compétence fédérale.

Si l'on examine les politiques ayant présidé à la signature du traité dans un premier temps, il est évident qu'il s'agissait de protéger une espèce traversant un certain nombre de frontières. Toutefois, sur le strict plan du droit, la compétence fédérale est tirée de la Convention sur les oiseaux migrateurs.

Le président: Nous y reviendrons.

Nous allons passer au deuxième tour de questions. Nous allons commencer par M. Forseth, suivi de M. Comartin, de M. Herron, de M. Reed et d'autres intervenants. Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Merci, monsieur le président.

Je voudrais évoquer un instant le rapport entre la science et la politique. À la page 15 du projet de loi, le paragraphe 27(1) revêt une importance assez fondamentale. Il dispose:

    Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par règlement, établir la Liste des espèces en péril et la modifier soit par l'inscription d'une espèce sauvage, soit par la reclassification ou la radiation d'une espèce sauvage inscrite.

Toute cette opération relève d'une action gouvernementale ou politique. Les groupements écologiques n'ont pas manqué de critiquer cette disposition lorsqu'il s'agit de déterminer qui va déclencher l'application de la loi concernant une espèce donnée—les scientifiques ou les politiciens. J'aimerais que vous nous expliquiez comment on a réussi à éviter, disons, l'effet pervers qui ferait que les intérêts financiers et politiques priment par rapport aux analyses scientifiques faisant état d'un danger. Comment a-t-on réussi à protéger la stricte application et l'intention du projet de loi contre les considérations politiques à court terme lorsqu'il s'agit d'agir ou de ne pas agir? Je suis sûr que vous avez assisté à de nombreuses discussions et entendu maintes critiques sur toute cette question de l'opposition entre la science et la politique. Pouvez-vous répondre aux critiques émises dans le cadre de cette polémique?

Mme Karen Brown: Vous avez bien raison de parler de politique. Les deux camps ont des idées bien arrêtées sur la question. Il y a des gens qui affirment que l'on devrait confier aux scientifiques le soin d'arrêter la liste légale.

Nous avons fait une très grosse distinction entre l'évaluation scientifique et la détermination ainsi que l'établissement de la liste des espèces en péril par le COSEPAC, soit l'identification des espèces effectivement en voie de disparition ou relevant d'une certaine catégorie par rapport à celles qui seront répertoriées par la loi et qui bénéficieront des protections juridiques mises en place par ce projet de loi. Il est possible qu'il faille tenir compte d'importantes considérations, notamment socio-économiques, pour prendre ces décisions, et l'on a pris la décision bien arrêtée de confier aux parlementaires et aux responsables élus le soin de se prononcer sur les protections ainsi accordées.

Nous avons pris bien soin de nous assurer que les listes et le mécanisme d'évaluation du COSEPAC soient ouverts et transparents pour éviter certains des problèmes que vous avez relevés et pour nous assurer que cette opération a des fondements scientifiques et qu'elle ne fait pas l'objet de certaines pressions politiques qui pourraient s'exercer autrement. Nous sommes tout à fait convaincus que les scientifiques poursuivront cet excellent travail. Le projet de loi dispose que le ministre, lorsqu'il établit sa propre liste, doit tenir compte des évaluations du COSEPAC. Nous avons donc cherché à équilibrer les deux points de vue. Nous nous rendons compte que c'est une considération très importante.

• 1110

M. Paul Forseth: Je me souviens qu'il n'y a pas si longtemps, une conférence de presse a été donnée dans ce même bâtiment par certains groupes écologiques qui dénonçaient l'ensemble de la législation en faisant justement le parallèle entre la science et la politique. Pouvez-vous nous préciser pour quelle raison ces ONG ont tort de faire ce genre de critiques?

Mme Karen Brown: Je ne dis pas qu'elles ont tort ou qu'elles ont raison. Je dis simplement qu'il y a différents points de vue.

Le mécanisme d'évaluation des espèces, soit la procédure d'évaluation du COSEPAC, revêt une importance tout à fait fondamentale pour le bon fonctionnement de ce projet de loi. Il est au coeur de toute l'opération. Il faut qu'il s'appuie sur des données scientifiques absolument impeccables. Il faut qu'il soit tout à fait transparent et ouvert à tous, à l'ensemble des citoyens et des groupements d'intérêt de notre pays, à toutes les parties prenantes et aux propriétaires fonciers. Il est absolument indispensable à la réussite à long terme de l'opération de protection des espèces.

Ce que l'on a cherché avant tout à reconnaître dans cette loi, c'est que les scientifiques ont un rôle important à jouer, et nous les aiderons à le faire. Les scientifiques conseillent et les ministres, les parlementaires et les responsables élus décident. C'est le fondement de cette démarche.

Il y a bien des avis divergents lorsqu'il s'agit de savoir si l'on devrait confier au COSEPAC la tâche ardue d'établir en droit les listes. Ce que vous pouvez constater ici, c'est que les scientifiques vont donner des conseils, les ministres et les parlementaires se chargeant de prendre les décisions concernant les mesures de protection devant être accordées par le droit.

M. Paul Forseth: Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Forseth.

Monsieur Comartin, une dernière question.

M. Joe Comartin: Puis-je en englober trois?

Madame Brown, pouvez-vous me dire combien d'espèces ont été rajoutées à la liste du COSEPAC depuis 1993? Si vous ne pouvez pas le faire aujourd'hui, pourriez-vous me l'indiquer plus tard?

Mme Karen Brown: Oui, nous pourrons certainement le faire.

M. Joe Comartin: Je ne suis pas sûr de ce que vous avez dit tout à l'heure, mais j'ai eu l'impression que vous n'écartiez pas la possibilité que la liste du COSEPAC puisse en fait être adoptée par la réglementation.

Mme Karen Brown: On a toujours envisagé que la liste du COSEPAC soit un règlement d'application de la loi et recense les espèces auxquelles s'applique la loi.

Vous n'ignorez pas que les activités du COSEPAC sont annuelles. En fait, ce comité s'est réuni à plusieurs reprises au cours des dernières années afin de pouvoir procéder à toutes les réévaluations. Selon la formule envisagée, pour pouvoir ajouter certaines espèces de manière relativement efficace à l'avenir—et aussi en fait pour les retirer de la liste parce qu'il y a des espèces qui changent de catégorie et parce que nous réussissons à opérer un rétablissement dans certains cas—il est préférable de recourir à l'outil de la réglementation. Nous nous sommes demandés ce matin dans quelle mesure la liste du COSEPAC sera prête, disons, quand la Loi sur les espèces en péril entrera effectivement en vigueur, et si l'on va, comme on le prétend, reconduire cette liste dans la loi.

M. Joe Comartin: On risque donc, pendant un certain temps, de ne pas encore avoir de liste alors que la loi aura été adoptée.

Mme Karen Brown: Nous faisons tout notre possible pour que cela ne se produise pas.

M. Joe Comartin: Il n'en reste pas moins que ce risque existe effectivement.

Mme Karen Brown: À mon avis, la promulgation de la loi est... Nous ne pourrions pas la promulguer si la liste n'est pas prête.

M. Joe Comartin: Il y a donc encore un risque.

Mme Karen Brown: Nous sommes en mesure d'établir un échéancier de manière à nous assurer que la liste, sa reprise dans la loi et tout ce qui s'ensuit, soit prête pour la promulgation. Pour l'instant, toutefois, rien ne nous oblige en droit à faire quoi que ce soit au sujet de la liste du COSEPAC.

M. Joe Comartin: Nous en sommes bien conscients.

Le président: M. Herron a le temps éventuellement de poser une question.

M. John Herron: Je vais ici me lancer dans des questions qui ont trait au droit et à la justice, mais au préalable j'aimerais faire rapidement un commentaire. Il ne s'agit pas simplement de reprendre l'argumentation de Mme Carroll.

Vous savez, 1996 ce n'est pas bien loin. Le groupe d'étude sur les espèces en voie de disparition englobait un large éventail de secteurs, plus étendu que celui du groupe de travail sur les espèces en péril. Nous comptions des représentants de l'industrie pétrolière et gazière, des pêches et du secteur agricole, qui étaient en fait parties prenantes. Tous avaient déclaré, sur le point litigieux de l'établissement des listes et de la compétence fédérale, qu'ils étaient prêts à fixer la barre plus haut que nous l'avons fait dans ce texte de loi. Toutefois, je laisserai cela de côté.

• 1115

L'opinion du ministère de la Justice est quelque peu inquiétante sur la question des oiseaux migrateurs. L'Association du Barreau canadien et le juge La Forest sont venus nous dire très clairement que la Loi sur la Convention des oiseaux migrateurs relevait de la compétence fédérale. Il y a eu aussi l'arrêt de la mine Cheviot, qui a clairement statué que l'application de la Loi sur la Convention des oiseaux migrateurs s'étendait actuellement à l'habitat. Vous nous dites que l'avis du ministère de la Justice n'est pas le même que celui du juge La Forest et de l'Association du Barreau canadien. J'aimerais que vous donniez quelques précisions à notre comité sur ce point en particulier.

Sur le plan de la justice, j'aimerais aussi aborder un autre sujet, soit celui qu'a évoqué M. Knutson lorsqu'il a interrogé la dernière fois Mme Brown. Le ministre de l'Environnement a fait une observation très sibylline lorsqu'il nous a parlé d'un certain type de hiérarchie en ce qui a trait à la protection de l'habitat essentiel, entendant par là que la protection obligatoire de l'habitat essentiel sur le territoire domanial ferait, sous une forme ou sous une autre, l'objet d'une contestation judiciaire. Nous savons qu'aux termes d'une loi canadienne, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, nous avons d'ores et déjà hiérarchisé les initiatives d'application obligatoire qui relèvent de la compétence fédérale. Cette hiérarchie existe donc déjà.

Mme Brown avait promis au comité de lui fournir la jurisprudence appuyant la réponse faite à M. Knutson au sujet d cette hiérarchie. Je demande à nouveau qu'elle nous soit fournie. Je voudrais aussi que l'on m'explique de manière plus détaillée pour quelle raison le ministère de la Justice n'est pas d'accord avec le juge La Forest et avec l'Association du Barreau canadien. Je continue à penser qu'il pourrait être utile de demander à un arbitre de se prononcer sur ce point étant donné que de toute façon il risque à un moment ou à un autre de faire l'objet d'une contestation judiciaire.

M. David Wear: Je vous dirais tout d'abord que je ne connais pas l'opinion de l'Association du Barreau canadien en ce qui a trait aux oiseaux migrateurs, mais elle a souvent émis des avis conformes à ce point de vue particulier.

Quand on a dix avocats dans une salle et que l'on obtient éventuellement des avis divergents sur une question donnée, c'est simplement une question d'opinion.

Quant aux avis juridiques précis que nous avons donnés à Environnement Canada, je ne suis certainement pas en mesure de m'engager à vous les fournir à ce stade.

M. John Herron: Et pour ce qui est de la jurisprudence s'appliquant à la hiérarchisation de la LCPE que l'on a évoquée la dernière fois? Gar pourra peut-être répondre à votre place sur ce point. Savez-vous à quoi je fais allusion?

M. David Wear: Non.

M. John Herron: Le ministre a déclaré dans son exposé qu'il y aurait une protection hiérarchisée, je pense que c'est l'expression qu'il a employée. Cela faciliterait les contestations judiciaires du projet de loi en droit constitutionnel. Pouvez-vous me développer l'argumentation qui est suivie et m'indiquer quelle est la jurisprudence qui appuie cette thèse. Il a poursuivi en ces termes: «Je ne suis pas un spécialiste, mais l'affaire la plus récente dont je me souviens est celle d'Hydro-Québec».

Pour votre défense, vous avez indiqué clairement que vous n'étiez pas avocat. «Je dois vous avouer que je ne connais pas la jurisprudence, mais je ne manquerai pas de revenir vous en reparler». Nous aimerions savoir quelle est la jurisprudence qui vous permet de dire qu'il ne vous est pas possible d'instaurer un système hiérarchisé prévoyant obligatoirement des interdictions lorsque la chose relève de la compétence fédérale et non dans les autres cas. Le ministre l'a dit clairement devant le comité. Nous savons pourtant que dans d'autres lois fédérales, comme la LCPE, ces dispositions existent déjà. Vous vous êtes engagé à faire parvenir cette documentation au comité. Je ne pense pas que le comité l'ait reçue. Notre comité ne manquerait pas d'apprécier que vous respectiez l'engagement que vous avez pris l'automne dernier sur cette question.

Mme Karen Brown: Nous nous efforcerons de répondre à toutes les questions que le comité est susceptible de se poser et nous vous communiquerons les documents si, effectivement, cette jurisprudence existe.

• 1120

Je pense que le ministre exprimait une crainte qu'il pouvait effectivement avoir. Il s'inquiétait du fait qu'il puisse y avoir à l'avenir des contestations judiciaires. Je ne pense pas que nous puissions citer un arrêt précis de la Cour suprême nous indiquant si oui ou non les dispositions concordent dans l'ensemble des provinces et des territoires.

Je comprends que la compétence soit plus forte sur le territoire domaniale et dans les domaines fédéraux.

Le président: Je vous remercie.

Monsieur Reed, madame Carroll, madame Kraft Sloan, monsieur Knutson et le président.

M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.

La question est peut-être déplacée et il est éventuellement impossible d'y répondre, mais j'espère qu'il n'aura pas été inutile de la poser.

Le COSEPAC nous a dit l'année dernière qu'il avait omis, ou qu'il avait été dans l'impossibilité, de faire la différence entre le cycle naturel des espèces et les activités humaines préjudiciables. La liste des espèces en péril, ou celle des espèces en voie de disparition, n'ont pas établi la différence entre les deux causes.

La question que l'on se pose c'est si, à l'occasion du moins, on n'influe pas sur le mécanisme naturel et, en tant qu'êtres humains, nous ne faisons pas partie de la nature?

Mme Karen Brown: Je vais demander à David Brackett de vous répondre.

M. David Brackett (directeur général, Service canadien de la faune, Environnement Canada): Merci.

Je dois dire que les commentaires du COSEPAC m'étonnent jusqu'à un certain point. Selon la durée d'examen de la question, il devrait être tout à fait possible de séparer les fluctuations du cycle naturel de celles qui découlent des menaces dues au changement de l'écosystème, par exemple, qu'il soit ou non le fait de l'homme.

Quant à savoir s'il n'y a pas un risque d'influer sur les phénomènes naturels, la majeure partie des dispositions du projet de loi visent justement le fait que nous exerçons d'ores et déjà une influence. Il s'agit, si vous voulez, de contrer cette influence lorsque ces menaces ont mené une espèce au bord de l'extinction. C'est pourquoi nous avons entrepris d'adopter la LEP. Il se peut que pour certaines espèces qui vivent très longtemps, ou lorsque les fluctuations sont très rapides, le COSEPAC ne puisse pas de prime abord établir cette distinction, mais je suis sûr qu'avec le temps il y parviendra.

M. Julian Reed: Je vous remercie.

Merci, monsieur le président.

Le président: La parole est à Mme Kraft Sloan.

Mme Karen Kraft Sloan: En fait, je vais laisser d'abord la parole à M. Knutson, qui n'a pas eu la chance de poser une question.

Le président: Monsieur Knutson.

M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Je vous remercie, madame Sloan.

Je ne peux pas présumer de ce qui va se passer, mais il se pourrait bien que notre comité délibère d'une proposition d'amendement visant à rendre obligatoire la protection de l'habitat qui relève de la compétence fédérale. Il se peut que l'on ait plus tard ce genre de discussion.

Il serait bon qu'on nous dise en quoi consiste la compétence fédérale. Nous pourrions avoir l'avis de l'Association du Barreau canadien et de certaines ONG. Elles ont patronné la décision La Forest. Quand nous nous retournons ensuite vers le ministère de la Justice, nous nous retrouvons devant un mur car on nous dit qu'Environnement Canada est son client et que l'avis qui lui a été donné est confidentiel.

Je siège ici en tant que parlementaire, non pas en tant que simple citoyen, mais en tant que responsable chargé de contribuer à l'adoption de meilleures lois. Je me demande, à partir du moment où le ministère de la Justice vient nous dire que les avis qu'il donne à Environnement Canada sont confidentiels, si Environnement Canada ne pourrait pas renoncer à cette confidentialité. Je ne demande pas qu'on me fasse une réponse aujourd'hui. Je vous demande simplement d'y réfléchir.

• 1125

Cette question mise à part, je me demande dans quelle mesure vous pouvez nous signaler à quel chapitre d'un recueil de jurisprudence ou d'un ouvrage de droit constitutionnel on trouve cette disposition qui restreint la compétence du gouvernement fédéral pour ce qui est de la protection de l'environnement—ce sont là les paramètres. En effet, je serais le dernier à vouloir déposer, discuter et voter un amendement qui amènerait finalement la Cour suprême à frapper le projet de loi d'inconstitutionnalité.

C'est une simple observation. Je vois que Mme Brown hoche la tête, et je peux donc partir du principe que vous allez considérer la chose.

Sur la question des oiseaux migrateurs, est-ce que c'est la compétence qui a précédé la signature du traité, est-ce le contraire ou est-ce que les deux coexistent?

M. David Brackett: Je pourrais peut-être vous répondre sur ce point en tant que directeur général du Service canadien de la faune.

Avant le traité de 1916, ce sont les provinces qui exerçaient leur compétence sur les oiseaux migrateurs. Comme il s'agissait d'un traité de l'empire, le gouvernement fédéral a été chargé de sa mise en oeuvre.

M. Gar Knutson: Cela signifie donc que c'est l'Angleterre qui a décidé d'en faire une compétence fédérale?

M. David Brackett: Le traité a été négocié entre les États-Unis d'Amérique et la Grande-Bretagne, pour le compte du Canada, et cela se reflète dans sa formulation.

Les origines du Service canadien de la faune remontent aux débuts de l'application de ce traité en 1917, une fois qu'il a été signé.

M. Gar Knutson: Vous nous dites donc en fait que c'est la Grande-Bretagne qui a conféré au gouvernement fédéral de nouveaux pouvoirs qu'il n'avait pas jusque-là?

M. David Brackett: Non, c'est la négociation de ce traité avec les États-Unis qui lui a conféré ces pouvoirs.

M. Gar Knutson: Effectivement, je pense que ça revient au même.

Donc, si l'on part du principe que lorsqu'on va signer au plan international les accords sur la biodiversité, il faut alors que le gouvernement fédéral ait la compétence nécessaire pour conclure les accords que nous signons—quelle est la valeur de cet argument au plan constitutionnel?

M. David Brackett: Je vous répète que je ne suis pas juriste, je suis un biologiste spécialisé dans la faune, mais il y a eu un tournant au milieu des années 30. Je laisserai ici à David Wear le soin de retracer l'évolution constitutionnelle du Canada.

M. David Wear: Pour répondre à votre question au sujet des traités, la Convention sur les oiseaux migrateurs est en substance un type différent de traité, si vous voulez, que le traité sur la biodiversité. En fait, le traité de l'empire confère un pouvoir constitutionnel au gouvernement fédéral de nature autre que celui que lui accordent les autres traités.

Je pense que votre question se ramène au fait que lors de la signature des traités modernes, indépendamment des questions autochtones, le gouvernement fédéral a besoin de disposer indépendamment de sa propre compétence avant de pouvoir envisager de mettre en oeuvre les dispositions d'un traité international. Autrement dit, on reconnaît la compétence provinciale et fédérale alors qu'un traité de l'empire, comme vous l'avez fait justement remarquer, confère, d'une manière tout à fait spéciale, la compétence au gouvernement fédéral.

M. Gar Knutson: Très bien.

Je ferai une dernière observation. Pouvez-vous aussi me dire—et je ne vous demande pas de le faire maintenant—quelles sont toutes les répercussions de l'affaire d'Hydro-Québec, la cour faisant appel au chef de compétence relatif aux droits criminels pour asseoir la compétence fédérale? Il y a longtemps que je n'ai pas lu l'arrêt, mais j'ai cru comprendre que la cour a déclaré qu'il est absolument indispensable de protéger l'environnement de nos jours, sinon ce serait un crime. Il semble que cela nous ouvre tout grand la porte.

M. David Wear: Vous voulez que je réponde? Je vais vous répondre brièvement.

L'affaire d'Hydro-Québec est certainement très importante et nous nous sommes servis dans cette loi de notre chef de compétence relatif au droit criminel pour asseoir, si vous voulez, le pouvoir de procéder à des interdictions d'ordre général pour toutes les espèces du Canada. Si vous me demandez, par conséquent, si l'affaire d'Hydro-Québec et si le recours à la compétence en matière de droit criminel ont influé sur l'élaboration de la LEP, je vous réponds par l'affirmative.

M. Gar Knutson: Non, ma question à l'origine—il n'est pas nécessaire de trancher aujourd'hui—c'est de savoir si à partir du moment où nous adoptons, ou le Parlement adopte un amendement autorisant le ministre à prendre des règlements protégeant l'habitat relevant de la compétence fédérale, quelles en seront les conséquences? Je vous l'ai dit, je ne m'attends pas à ce que l'on puisse avoir une réponse aujourd'hui.

• 1130

Le président: Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll: Si vous me le permettez, je pense que vous avez bien raison de dire que l'on ne va pas y répondre aujourd'hui, mais il faudrait y répondre à un moment donné lorsque nous avancerons dans la procédure. En écoutant les questions posées par M. Knutson et les réponses données par M. Wear, je pensais que le greffier pourrait éventuellement faire parvenir une copie du procès-verbal au professeur Rounthwaite, qui va travailler avec nous plus tard, mais dont les connaissances pourraient nous être très utiles sur ce point, dans la mesure où il a une excellente formation constitutionnelle s'appliquant tout particulièrement aux espèces en voie de disparition. Ce pourrait être utile.

Je vous remercie.

Le président: Oui, merci. Ce sera fait.

Madame Kraft Sloan, suivie du président, après quoi nous lèverons la séance.

Mme Karen Kraft Sloan: Je vous remercie.

M. Laliberte a posé un certain nombre de questions au sujet de l'article 56, et il s'inquiétait du fait qu'on avait l'impression que les répercussions socio-économiques serviraient de critères d'évaluation de la mise en oeuvre des plans d'actions et autres mesures de ce type. Mme Wherry a précisé par ailleurs que les plans d'action s'appuyaient en fait sur des critères écologiques.

Afin que les choses soient plus claires, ma question se rapporte au fait que cet article renvoie au suivi et aux rapports concernant la mise en oeuvre du plan d'action. Il se passe donc deux choses ici: le ministre doit effectuer un suivi et faire des rapports sur le plan d'action lui-même en évaluant sa mise en oeuvre, puis il doit se pencher sur les répercussions socio-économiques. Par conséquent, si le plan d'action lui-même est fondé sur des considérations écologiques ou contient des éléments écologiques, est-ce que le suivi est en soi fondé sur les critères écologiques?

Mme Karen Brown: Oui. La réponse immédiate, c'est que l'article 49 définit tout ce que doit contenir le plan d'action. Cet article a pour objet de préciser que le ministre doit procéder au suivi de la mise en oeuvre du plan d'action et que ce plan d'action, reportez-vous à l'alinéa 49(1)e), doit englober l'évaluation des répercussions socio-économiques de sa mise en oeuvre. Il s'agissait donc simplement de préciser que nous allons en fait rendre compte des deux choses. C'était une simple clarification.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien.

Je comprends que le plan d'action comporte des éléments écologiques et qu'il faudra en tenir compte. J'imagine cependant que le suivi lui-même va continuer à renvoyer à ces objectifs et à ces buts précis.

Mme Karen Brown: Le suivi qui...

Mme Karen Kraft Sloan: L'évaluation des répercussions socio-économiques du plan d'action lui-même.

Mme Karen Brown: C'est exact.

Mme Karen Kraft Sloan: Est-ce que cela vient en plus de ce que prévoit l'article 56? Ou est-ce que l'on se réfère à la même chose qu'à l'article 56?

Mme Karen Brown: C'est la même chose qu'à l'article 56.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien. Cela ne vient donc pas s'y ajouter.

Mme Karen Brown: Non.

Mme Karen Kraft Sloan: Bon.

Je me demande donc pour quelle raison—parce que la formulation est importante—vous recensez des éléments écologiques et socio-économiques à l'article 49, qui établit en quelque sorte le contenu du plan d'action, alors qu'à l'article 56 on insiste que sur les répercussions socio-économiques. Alors que l'intention du ministère est de soumettre le suivi et les rapports à des considérations écologiques, il m'apparaît que l'on insiste beaucoup trop sur les répercussions socio-économiques, à moins que je...

Mme Ruth Wherry: L'intention véritable du changement apporté à l'article 56, pour parler tout d'abord du suivi de la mise en oeuvre, c'est d'atteindre les objectifs fixés dans les plans d'action et dans les programmes de rétablissement. Est-ce que l'on fait bien ce que l'on s'est engagé à faire pour les différentes espèces?

• 1135

Parallèlement, le fait de rajouter une disposition exigeant un rapport socio-économique, une évaluation des répercussions socio-économiques au bout de cinq ans, visait principalement à répondre aux très grandes préoccupations qui se font jour et qui consistent à dire que l'étape du programme de rétablissement fait appel à des considérations socio-économiques. Vous entendrez d'ailleurs nombre de témoins appelés à comparaître vous dire que ces dispositions devraient figurer au stade du programme de rétablissement. Le principe même du programme de rétablissement est de s'inspirer de critères biologiques et scientifiques, et il ne s'agit pas à ce stade de tenir compte des répercussions socio-économiques.

Par conséquent, lorsqu'on va rendre compte de la réalisation des objectifs cinq ans plus tard, il faudra aussi faire figurer une évaluation des répercussions socio-économiques. Ça ne change pas ce qu'on aura fait au cours des cinq années antérieures.

Mme Karen Kraft Sloan: Je comprends bien, mais on nous dit à l'article 49 que le plan d'action doit englober des considérations écologiques et biologiques tout en procédant entre autres à l'évaluation des répercussions socio-économiques du plan. C'est donc un élément qu'il convient de faire figurer. Les répercussions socio-économiques doivent figurer dans le plan d'action.

L'article 56 dispose ensuite: «Il incombe au ministre compétent d'assurer le suivi de sa mise en oeuvre», etc., en parlant du plan d'action, et il évoque ensuite «les répercussions socio-économiques». Par conséquent, si la mention des répercussions socio-économiques faite à l'article 56 ne vient pas s'ajouter à ce qui est déjà dans le plan d'action, je ne pense pas que vous allez vous opposer à ce que l'on fasse mention aussi des répercussions écologiques et biologiques. En effet, si en procédant ainsi vous avez voulu rassurer certains intérêts de notre pays, il y en a d'autres qu'il convient aussi de rassurer.

Je pense que vous avez beaucoup travaillé pour essayer de nous donner finalement un excellent projet de loi sur les espèces en péril et qu'il faut parfois faire bien des choses pour rassurer certains intérêts. Toutefois, il y en a d'autres, à mon avis, qui n'ont pas toujours raison d'être aussi confiants. Je pense que cela s'est vu dans un communiqué de presse récent dans lequel on nous disait que les groupes de pression et l'industrie avaient fait certains commentaires au sujet du projet de loi. On relevait avec intérêt que l'industrie n'était pas un groupe de pression, contrairement aux écologistes et aux scientifiques.

Tout cela pour vous montrer que la formulation, comme vous avez déjà pu le constater, est très importante dans ce genre de discussion et peut modifier le cours des choses. Par conséquent, s'il ne s'agit pas là d'une exigence supplémentaire de l'article 56, je propose que le ministère envisage un éventuel amendement traitant aussi des répercussions écologiques et biologiques.

Est-ce qu'il me reste deux secondes pour demander un autre éclaircissement?

Le président: Oui.

Mme Karen Kraft Sloan: Madame Brown, lorsque vous nous avez parlé tout à l'heure de la liste du COSEPAC et de sa refonte, vous avez indiqué que l'on y trouvait des espèces qui ont été inscrites il y a 25 ans alors qu'à votre avis la procédure n'était pas aussi transparente qu'on le souhaitait ou que ne l'exige ce projet de loi. Vous nous avez dit que vous étiez en train de corriger la liste. On nous laisse entendre par ailleurs qu'il pourrait être possible de reconduire cette liste une fois qu'elle aura été nettoyée.

À titre de précision, je vous demande de nous dire si dans le cadre de ce mécanisme de révision, lors de cette refonte, on va retirer de la liste ces espèces inscrites il y a 25 ans, qui ne sont pas censées y figurer. Est-ce que ce sera en vertu d'une décision scientifique prise par le COSEPAC ou d'un autre type de décision que l'on va décider de nettoyer cette liste? Est-ce que cela fait plutôt partie du mécanisme de réévaluation?

Mme Karen Brown: Je dirais rapidement que c'est les deux. Nous avons évidemment besoin de comprendre quelle est la situation des espèces à ce stade, et cette opération est en cours. Dans certains cas, le COSEPAC, pour des raisons scientifiques qui lui sont propres, a déplacé une espèce d'une catégorie à une autre, la reclassifiant ou la déclassifiant selon les circonstances et les données nouvelles dont il dispose. C'est une première chose. Selon la procédure suivie, cette liste sera remise à titre consultatif au ministre de l'Environnement et, à ce stade, elle sera incorporée d'une manière ou d'une autre à la loi. Il faudra donc faire les deux choses.

• 1140

Mme Karen Kraft Sloan: Si le COSEPAC ne prend pas la décision, et si cette décision n'est pas fondée sur des motifs scientifiques, qui d'autre, par conséquent, va intervenir dans le processus de décision et comment les choses vont-elles se passer?

Mme Karen Brown: Soyons bien clairs, c'est le COSEPAC qui va prendre les décisions scientifiques. Il est cependant en train de recueillir des données supplémentaires dans certains cas. Dans d'autres cas, nous avons fait appel pour un certain nombre d'espèces—sept pour l'instant—aux connaissances traditionnelles des Autochtones, afin d'être absolument sûrs d'avoir toute l'information nécessaire. Dans d'autres encore, les réévaluations vont prendre davantage de temps parce qu'il faut se rendre effectivement sur le terrain. Ce n'est pas simplement une question de connaissances scientifiques.

Toutes ces opérations sont donc en cours. La réévaluation a porté aussi ces dernières années sur la mise à jour des critères de l'UMN. Nous tenons absolument à appliquer des normes mondiales qui soient à jour, ce qui a joué un rôle important dans l'opération. Toutefois, c'est bien le COSEPAC qui prend les décisions définitives concernant la situation des espèces.

Mme Karen Kraft Sloan: Donc, pour ce qui est des espèces que vous avez mentionnées tout à l'heure, celles qui ont été inscrites sur la liste il y a 25 ans et qui peut-être ne devraient plus y figurer ou qui ont éventuellement besoin de changer de catégorie, les décisions vont être prises par le COSEPAC.

Mme Karen Brown: Par le COSEPAC, effectivement.

Mme Karen Kraft Sloan: Il n'y aura pas d'autres formalités et aucun autre décideur n'interviendra.

Mme Karen Brown: Non. L'ensemble de la révision est effectuée par le COSEPAC.

Mme Karen Kraft Sloan: Très bien. Je vous remercie.

Le président: Bon, il faut conclure maintenant.

Madame Brown, c'est davantage une observation qu'une question—sans vouloir vous forcer la main—vous avez indiqué très clairement ce matin que vous étiez prête à accueillir d'éventuels amendements. Voilà qui ne manque pas d'être encourageant.

Notre comité va vraisemblablement passer énormément de temps à examiner des amendements, et son travail serait donc facilité et écourté si l'on se décidait le plus tôt possible au sujet des possibilités d'amendements plutôt que de se prononcer à la dernière minute. Comme vous pouvez le voir, notre comité a tout à fait la volonté de renforcer ce projet de loi dans le cadre du mandat qui lui incombe particulièrement, soit celui de l'environnement et du développement durable, qui lui tient à coeur. Par conséquent, chaque fois que vous serez en mesure de nous informer à l'avance, ou chaque fois que pourront le faire les témoins du ministère qui vont comparaître à l'avenir, cela nous sera d'une grande utilité. J'espère qu'il s'agit là d'une proposition raisonnable.

Merci beaucoup. Cette séance a été très utile et pleine d'enseignements. Je vous prie de nous excuser une fois de plus d'avoir commencé en retard. Nous aurions pu finir une demi-heure plus tôt. Nous attendons avec impatience les conseils du ministère de la Justice.

Contrairement à M. Knutson, je n'ai pas trop peur que la Cour suprême déclare inconstitutionnel un texte de loi sortant de notre comité. Je vous avoue bien franchement que je crains davantage les conseils du ministère de la Justice, qui risquent d'empêcher notre comité d'apporter certains amendements venant renforcer ce projet de loi, sans nécessairement être déclarés inconstitutionnels par la Cour suprême. J'imagine, bien entendu, que c'est là une question laissée à l'appréciation de l'ensemble du comité, mais je tiens à ce que vous sachiez que vos avis seront étudiés de très près et qu'ils ne seront pas facilement acceptés s'ils vont à l'encontre du mandat de notre comité.

Cela dit, je vous remercie au nom de mes collègues. Nous nous reverrons, j'en suis certain.

La séance est levée.

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