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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 23 avril 2002




¿ 0905
V         Le vice-président (M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne))
V         M. Ian Scott (gestionnaire, Nord du Canada et pipelines, Association canadienne des producteurs pétroliers)

¿ 0910
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. George Sinclair (directeur principal, bitume, Pert-Canada, Athabasca Oil Sands Developers)

¿ 0915

¿ 0920
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. John Lavoie (témoigne à titre personnel)

¿ 0925

¿ 0930

¿ 0935

¿ 0940
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Michael Barrett (président par intérim, Comité consultatif de l'environnement Kativik

¿ 0945
V         Mme Paule Halley (membre, Comité consultatif de l'environnement Kativik)

¿ 0950

¿ 0955
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne)
V         M. John Lavoie
V         M. Roy Bailey

À 1000
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. George Sinclair
V         M. Roy Bailey
V         M. George Sinclair
V         M. Ian Scott

À 1005
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. John Lavoie
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ)
V         Mme Paule Halley

À 1010
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Paule Halley
V         M. Bernard Bigras
V         M. Michael Barrett
V         M. Bernard Bigras
V         M. Michael Barrett
V         Mme Paule Halley
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Paule Halley
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Joe Comartin (Windsor--St. Clair, NPD)
V         Mme Paule Halley
V         M. Michael Barrett
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. John Herron (Fundy--Royal, PC)

À 1015
V         M. Michael Barrett
V         M. John Herron
V         M. George Sinclair
V         M. Ian Scott
V         M. John Herron
V         M. Ian Scott
V         Mme Paule Halley

À 1020
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie

À 1025
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)

À 1030
V         M. John Lavoie
V         M. Julian Reed
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)
V         M. Allan Cunningham (vice-président, Ressources humaines, Affaires communautaires et développement durable, Suncor Energy, Athabasca Oil Sands Developers)

À 1035
V         Mme Karen Redman
V         M. Allan Cunningham
V         Mme Karen Redman
V         M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.)
V         M. George Sinclair
V         M. Alan Tonks
V         M. John Lavoie
V         Le vice-président (M. Bob Mills)

À 1040
V         M. John Lavoie
V         M. George Sinclair
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Ian Scott
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.)

À 1045
V         M. George Sinclair
V         M. Allan Cunningham
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. George Sinclair
V         M. Rick Laliberte
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Roy Bailey

À 1050
V         M. George Sinclair
V         M. Roy Bailey
V         M. George Sinclair
V         M. Roy Bailey
V         M. George Sinclair
V         M. Roy Bailey
V         M. George Sinclair
V         M. Roy Bailey
V         M. Ian Scott
V         M. Roy Bailey
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         M. Joe Comartin

À 1055
V         M. George Sinclair
V         M. Joe Comartin
V         M. George Sinclair
V         M. Joe Comartin
V         M. George Sinclair
V         M. Allan Cunningham
V         M. Ian Scott
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Karen Redman
V         M. John Lavoie
V         Mme Karen Redman

Á 1100
V         Le vice-président (M. Bob Mills)
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         Mme Paule Halley
V         Mme Hélène Scherrer

Á 1105
V         Mme Paule Halley
V         Mme Hélène Scherrer
V         Mme Paule Halley
V         M. Michael Barrett
V         Le vice-président (M. Bob Mills)










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 067 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 23 avril 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0905)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)): La séance est ouverte. Même si certains membres ne sont pas encore arrivés, nous allons quand même commencer.

    J'aimerais d'abord souhaiter la bienvenue à nos invités à la salle de guerre. Cela ne veut pas dire que nous allons nous batailler. Je pense qu'il s'agit d'un nom historique et que cette salle avait un certain usage dans le passé.

    Nous allons suivre l'ordre du jour et céder la parole au représentant de l'Association canadienne des producteurs pétroliers.

+-

    M. Ian Scott (gestionnaire, Nord du Canada et pipelines, Association canadienne des producteurs pétroliers): Merci, monsieur le président.

    Je désire vous remercier au nom de l'Association canadienne des producteurs pétroliers de l'occasion qui m'a été offerte de présenter aujourd'hui au comité nos points de vue sur le projet de loi C-19.

    Je croyais voir mon collègue, David Luff, ici. Je crois qu'il est à Ottawa. Il se peut qu'il se joigne à nous un peu plus tard.

    J’ai une précision à apporter. Nous avons dit dans notre mémoire que notre association était composée de 150 entreprises membres. En fait, suite à des fusions et à des acquisitions, chose très courante dans l’industrie gazière et pétrolière, nous comptons maintenant 140 membres. Nous procédons à l'exploration, à la transformation et à la production du gaz naturel, des liquides du gaz naturel, du pétrole brut, du pétrole synthétique, du bitume et du soufre élémentaire dans tout le Canada. Nos membres produisent 95 p. 100 du pétrole et du gaz au Canada. Nous comptons aussi 125 membres associés offrant une gamme de services de soutien à l'industrie pétrolière et gazière d'amont. Ensemble, ces membres et membres associés constituent une proportion importante d'un secteur industriel national, évalué à 52 millions de dollars par année, qui emploie plus d'un demi million de Canadiens et de Canadiennes.

    Je ne ferai que de très brefs commentaires aujourd’hui. Je crois que vous avez devant vous notre mémoire. Je vais m’arrêter sur certains des points dont j’estime important de faire connaître au comité.

    Il importe de noter que pour de nombreuses activités, les évaluations environnementales sont effectuées avant que toute autorité responsable ne soit appelée à le faire en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. La plupart, sinon toutes les activités pétrolières et gazières font appel à une technologie connue et utilisée souvent tout en respectant les pratiques, les protocoles et les exigences réglementaires bien établis.

    L'ACPP appuie fortement l'évaluation environnementale en tant que composante du développement d'un projet. L'industrie pétrolière et gazière a joué un rôle de pionnier en matière d'évaluations environnementales. L'ACPP reconnaît que l'évaluation environnementale fait en sorte qu'on tienne compte des répercussions environnementales dès l'étape de planification d'un projet et que le public intéressé ait l'occasion de participer.

    L'ACPP a été un membre actif du Comité consultatif sur la réglementation, connu aussi sous l'acronyme CCR, depuis ses tous débuts. Nous croyons que le comité constitue un outil de valeur permettant de réunir les intervenants intéressés dans le but de dégager un consensus sur les questions relatives aux évaluations environnementales.

    Il est important de se rappeler que la LCEE établit un processus s'appliquant à de nombreuses activités différentes, grandes et petites, ayant une signification minimale ou très importante et faisant souvent appel à des compétences multiples. Ce processus requiert, comme le confirment de récentes causes entendues devant les tribunaux, une mesure de jugement et de discrétion.

    Le projet de loi C-19 est fondé sur une recommandation issue d'un consensus du CCR que nous appuyons. L'ACPP a appuyé le rapport par consensus du CCR, Examen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale - Rapport au ministre de l'Environnement (mai 2000). L'ACPP croit que les questions ne faisant pas consensus soulevées dans le rapport du CCR ne devraient pas être interprétées comme voulant dire qu'un consensus est irréalisable, mais plutôt parce qu'il n'y a pas eu suffisamment de temps pour explorer diverses options permettant de dégager un consensus.

    L'ACPP comprend que le Comité puisse vouloir explorer divers aspects de la LCEE et, à cette fin, l'ACPP présente son optique sur la LCEE. Nos commentaires ne visent pas à déroger au consensus du CCR. Toutefois, ils donneront au Comité une meilleure appréciation du fait que le projet de loi reflète un compromis.

    L'ACPP appuie une coordination de l'action du gouvernement et du public dans la protection de l'environnement. L'ACPP s'est engagée à travailler de concert avec tous les intervenants et tous les ordres de gouvernement à l'élaboration de lignes directrices pour les activités pouvant avoir une incidence sur l'environnement.

    La participation du public devrait s'effectuer tôt. L'industrie le fait présentement et cela se reflète dans la LCEE. La façon dont cela s'effectue devrait être laissée à la discrétion de l'AR. Les promoteurs de l'industrie ont l'incitatif économique de travailler de concert avec le public et ils accordent souvent un financement, mais là encore cela devrait être la responsabilité du promoteur.

    L'ACPP a élaboré un document pour ses membres intitulé ,Guide pour une participation véritable du public, qui est le résultat d'un processus faisant intervenir plusieurs parties intéressées. Tout fonds créé aux termes de la LCEE devrait continuer de provenir des deniers publics.

    L'ACPP reconnaît le rôle unique que peuvent jouer les peuples autochtones en matière d'évaluation environnementale, en particulier pour les projets touchant les territoires des réserves ainsi que les régions touchées par les traités et revendications territoriales. L'ACPP appuie les modifications proposées de manière à permettre la participation autochtone et une meilleure reconnaissance du rôle des connaissances traditionnelles, de même que les connaissances locales, dans le processus d'évaluation environnementale.

¿  +-(0910)  

    Nombre de déclencheurs créent des problèmes de mise en oeuvre de la LCEE et, par conséquent, réduisent son efficacité et son efficience en créant de l'incertitude. L'ACPP reconnaît que cela dépasse la portée du projet de loi. Cependant, nous croyons que si le gouvernement ne fait rien pour traiter les déclencheurs dans le Règlement sur les dispositions législatives et réglementaires désignées, les modifications proposées ne parviendront pas à atteindre le premier objectif du ministre, soit celui d'un «processus certain, prévisible et opportun» (Rapport du Ministre au Parlement,  Renforcer l'évaluation environnementale pour les Canadiens). Par exemple, les déclencheurs de la Loi sur les pêches continuent de créer des problèmes.

    Merci.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Nous ferons passer tous les témoins et après nous pourrons poser des questions.

    Je cède maintenant la parole à M. Sinclair, qui, je crois parle au nom de l'Athabasca Oil Sands Developers.

+-

    M. George Sinclair (directeur principal, bitume, Pert-Canada, Athabasca Oil Sands Developers): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Au nom de mes collègues et de moi-même, je vous remercie de l'occasion qui m'a été offerte de témoigner devant ce comité ce matin pour parler de notre mémoire du 21 février 2002.

    D'abord, je m'appelle George Sinclair et je suis le directeur principal de la section du bitume, de Petro-Canada. À mes côtés, je vous présente M. Allan Cunningham, vice-président de Suncor Energy. M. John Vanderbeek, directeur du développement durables et des affaires juridiques de Suncor, et Mme Sue Lowell, directrice de l'approbation des projets de Suncor Energy, m'ont aussi accompagnés.

    Monsieur le président, nous représentons un groupe qui s'appelle Athabasca Oil Sands Developers qui regroupe des entreprises voulant exploiter les sables bitumeux dans la région de Fort McMurray dans le nord de l'Alberta. L'Alberta Chamber of Resources qui représente diverses industries de la province appuie notre mémoire. L'une de ses entreprises membres, l'Albert Pacific Forest Industries, s'est aussi prononcée en faveur de notre mémoire.

    Je suis directeur de l'Alberta Chamber of Resources en plus de travailler auprès de l'Athabasca Oil Sands Developers. Petro-Canada et Suncor sont toutes les deux membres de l'ACPP qui a déjà témoignée ce matin.

    Ce que nous aimerions faire, monsieur le président, si vous voulez bien nous le permettre, c'est fournir des renseignements sur la Cumulative Environmental Management Association, aussi connu sous l'acronyme CEMA, dont les débuts remontent à 1997. Nous voulons vous montrer à quel point la CEMA cadre avec le projet de loi modifiant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Nous aimerions améliorer l’efficacité du processus de la CEMA de sorte qu'elle s'aligne avec l’un des objectifs énoncés pour l'étude de cinq ans de la LCEE--c'est-à-dire assurer un processus plus prévisible, certain et opportun et comme nous le voulons tous, un processus diminuant les incertitudes actuelles et améliorant la qualité de l’évaluation environnementale et la collaboration fédérale-provinciale.

    J’en viens maintenant à notre exposé que vous avez reçu il y a quelques mois je crois. Je m’arrêterai sur quelques-unes des diapositives pour vous présenter des éléments clés.

    La première diapo que je présenterai s’appelle Les idées clés. Nous désirons vous transmettre aujourd’hui trois idées clés. D'abord, les sables bitumeux de l'Alberta constituent une ressource stratégique importante pour le Canada. Avant d'entamer les travaux de construction et d'exploitation, chaque projet d'exploration de sables bitumeux doit d'abord obtenir l'approbation réglementaire, une étape importante. Une étude d'impact environnemental ainsi qu'une évaluation des effets cumulatifs doivent aussi être effectuées au préalable.

    Deuxièmement, il est possible d’atténuer les effets cumulatifs en utilisant des outils de gestion adaptée. La Cumulative Environmental Management Association est l’outil régional de choix.

    Ensuite, un processus qui est plus prévisible, certain et opportun est essentiel. À cet égard, nous comptons soumettre une proposition visant la modification de la LCEE pour inclure dans la définition de mesures d'atténuation les méthodes de gestion adaptée. Cela permettrait de reconnaître un mécanisme semblable à la CEMA comme forme légitime de mesures d'atténuation.

    Nous nous sommes déjà identifiés dans notre soumission comme l’Athabasca Oils Sands Developers. Nous avons aussi souligné que les sables bitumeux sont une ressource stratégique importante pour le Canada. Il s’agit d’une industrie en plein essor et nous tentons de faire avancer un bon nombre de projets ainsi que le processus s’y rattachant.

    Pour faire prospérer l’industrie des sables bitumeux, nous devons en tant qu’industrie relever de nombreux défis. Vous trouverez aussi une diapo qui s’intitule Enjeux permanents et j’aimerais vous parler de quelques-uns des points du schéma pour illustrer les risques et l’incertitude quant à la réalisation de certains projets.

    En procédant dans le sens contraire des aiguilles de l’horloge, j'attire votre attention sur le cercle qui s’appelle Climat d'investissement et coûts financiers, un point qui traite des nombreux risques auxquels nous faisons face. Nous n’exerçons évidemment aucun contrôle sur les prix des marchandises. Nous pouvons aussi parler des dépenses en immobilisations. Ce qui importe de signaler, c'est que nous devons tout au long d'un projet traiter avec une foule d'intervenants et s'adapter à un processus d'approbation réglementaire long qui examine en profondeur nos études d'impact environnemental et nos analyses de l'impact socio-économique.

¿  +-(0915)  

    L'un des éléments essentiels de notre processus d'approbation réglementaire traite de la question d'incertitude décisionnelle et de celle des effets cumulatifs. Nous recommandons un concept appelé «gestion adaptative» comme mesure d'atténuation spécifique. Je parlerai davantage de ce sujet quand nous passerons à la prochaine série de diapositives relatives à la CEMA, mais permettez-moi d'apporter quelques éclaircissements dès maintenant.

    Premièrement, la gestion adaptative consiste essentiellement en un processus systématique visant à améliorer constamment les politiques et les pratiques de gestion. Pour ce faire, il faut apprendre des résultats des programmes opérationnels. Deuxièmement, ces processus sont essentiels pour réduire les effets environnementaux potentiels. Troisièmement, pour mettre en oeuvre ces processus, il faut instaurer un programme de surveillance régional d'avant-garde.

    La prochaine série de diapositives portera sur la CEMA et la façon dont elle remplit son rôle relatif au processus de gestion adaptative. Nous vous avons fourni beaucoup de documentation à ce sujet dans le mémoire que nous vous avons soumis en février. En voici les faits saillants.

    On a lancé le processus en 1997-1998, et on a constitué officiellement une association en l'an 2000. CEMA est une organisation qui rassemble différents intervenants et qui est coordonnée--ce qui est très important pour nous--et elle permet à tous ses membres d'exprimer leurs préoccupations et de faire des recommandations.

    Qui sont les intervenants qui font partie de la CEMA? De nombreux secteurs sont bien représentés. En premier lieu, les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux et les autorités de réglementation en font partie. Les groupes qui représentent le gouvernement fédéral sont Environnement Canada, le ministère des Pêches et des Océans, l'ACEE, Santé Canada et Ressources naturelles Canada. Les entreprises du secteur privé qui participent aux travaux de la région des sables pétrolifères de l'Athabasca en font aussi partie, de même que les groupes autochtones, soit les cinq premières nations de cette région et les Métis, ainsi que les ONG, pour qui ce processus est très légitime et pratique.

    Le processus et les représentants de la CEMA reconnaissent clairement que pour avoir un impact cumulatif, il faut partager les responsabilités. Les recommandations, qui font suite aux discussions que les membres de la CEMA ont eues, seront envoyées aux autorités de réglementation de l'Alberta pour qu'elles les étudient et les mettent à exécution. Dans le cas présent, les autorités de réglementation sont les ministères de l'environnement et du développement durable des ressources en Alberta, de même que l'Alberta Energy and Utilities Board ou l'EUB.

    Permettez-moi de souligner quelques autres éléments de réflexion au sujet de la CEMA. Premièrement, son mandat est de faire des recommandations sur la meilleure façon de gérer les effets cumulatifs et de protéger l'environnement. Ces recommandations seront fondées sur des limites scientifiques et des données provenant de recherches existantes et de sources d'informations traditionnelles, de même que de nouvelles recherches.

    Selon nous, la CEMA est le meilleur exemple de ce type de collaboration au Canada. Premièrement, elle combine l'innovation avec la collaboration de nombreux intervenants. Elle a tout l'appui des intervenants régionaux. À nos yeux, c'est un modèle de premier plan sur la façon de mener une évaluation continue des effets cumulatifs relatifs à des questions environnementales prioritaires.

    Pour pouvoir entreprendre ces activités, il faut des engagements importants sur le plan financier. Par exemple, la CEMA reçoit chaque année plus de 4 millions de dollars de la part du secteur privé, en plus du financement assuré par de nombreuses autres personnes. Il faut ajouter à cela des dépenses collectives de 10 millions de dollars pour la recherche environnementale, la surveillance, le renforcement de la capacité, etc., ainsi que des dollars dépensés pour chaque projet présenté. Nous parlons d'un total pouvant atteindre de 5 à 10 millions de dollars. Ces recherches et ces informations enrichissent la base de données de la région, laquelle constitue un outil de plus en plus important.

    L'un des buts de la révision de cinq ans de l'ACEE--M. Scott y a fait référence dans son commentaire--est d'établir un processus plus prévisible, plus sûr et plus opportun. On a intégré un certain nombre de dispositions dans le projet de loi C-19 pour atteindre ce but.

    La Section de première instance de la Cour fédérale a pris récemment une décision, appelée la décision Suncor, qui a soulevé la question d'incertitude décisionnelle de la part du ministre de l'Environnement quant à la fiabilité d'un processus de gestion adaptative comme mesure d'atténuation. Évidemment, dans notre cas, cela renvoie au processus de la CEMA que je viens tout juste de vous décrire.

    Selon nous, on ne peut assez souligner l'importance de promouvoir la collaboration des gouvernements fédéral et provinciaux, et la coordination de leurs activités, alors que nous visons une harmonisation. Il est certainement toujours possible d'améliorer ce type d'activités, surtout sur le plan des prises de décisions.

¿  +-(0920)  

    Dans notre mémoire de février, nous avons indiqué que certaines des modifications que nous avons proposées à l'ACEE aideraient à réduire l'incertitude décisionnelle, alors que d'autres clarifieraient la question du contrôle fédéral sur les mesures d'atténuation. Toutefois, il existe d'autres modifications que l'on pourrait étudier pour éliminer toute incertitude décisionnelle causée par la décision Suncor et pour traiter et résoudre directement la question qui consiste à déterminer si les mesures d'atténuation, qui relèvent du pouvoir des autorités de réglementation des provinces, sont autorisées sous la direction de l'ACEE. Nous proposons donc de nouvelles modifications pour que vous puissiez les étudier.

    Nous avons une nouvelle formulation, monsieur le président, que nous remettons au greffier. Nous avons modifié quelque peu la formulation du mémoire que nous vous avons soumis. En général, nous proposons une modification de la définition de «mesure d'atténuation» en y ajoutant la notion de processus de gestion adaptative comme mesure d'atténuation spécifique, ce qui rendrait tout à fait claire l'intention du Parlement d'inclure des dispositions semblables à celles du processus de la CEMA comme mesure légitime d'atténuation. Deuxièmement, nous proposons une modification claire qui donnerait aux autorités fédérales le pouvoir de déléguer la responsabilité de mettre en oeuvre des mesures d'atténuation aux gouvernements et agences provinciaux.

    Pour conclure, monsieur le président et membres du comité, je dirai que les processus de la gestion adaptative moderne comme celui de la CEMA offrent une occasion d'améliorer la protection de l'environnement et de prévoir et gérer les effets environnementaux que peuvent entraîner de grands projets d'exploitation des ressources. Nous sommes donc d'avis qu'une consécration législative claire d'un processus de gestion adaptative comme outil d'atténuation légitime améliorerait le projet de loi.

    Comme je l'ai déjà mentionné, nous voulons laisser entre vos mains des modifications que nous avons apportées à la formulation. Je crois que je vous en ai fourni une copie, et nous avons d'autres copies ici que nous pourrons également distribuer.

    Je vous remercie de votre attention.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Nous passons maintenant à M. Lavoie.

+-

    M. John Lavoie (témoigne à titre personnel): Je viens de Manitouwage, dans le nord de l'Ontario. Cet endroit se trouve environ à mi-chemin entre Thunder Bay et Saut Ste. Marie, et à environ 40 miles au nord du parc national Pukaskwa.

    Vous avez en main une copie de mon mémoire écrit. Je ne vais pas vous le lire aujourd'hui. Je parlerai de façon plus spontanée. Mon mémoire complétera en quelque sorte mon exposé: vous y trouverez des renseignements plus détaillés.

    Je suis ici pour vous parler des modifications proposées au projet de loi C-19, particulièrement en ce qui a trait à la participation du public et à son accès à l'information. Je vais suggérer des façons d'améliorer le projet de loi C-19. Je connais très bien la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Je vais commencer par vous expliquer un peu comment j'en suis venu à participer à l'évaluation environnementale.

    Il y a quelques années, on a fait une proposition relativement à l'aménagement hydroélectrique d'un site appelé Twin Falls sur la rivière Kagiano, près de l'endroit où je demeure. La rivière Kagiano est tributaire de la rivière Pic, qui coule dans une partie du lac Supérieur, dans le parc national Pukaskwa. Ce site est très spécial. Twin Falls est la plus haute chute d'eau de l'Ontario, elle a près de 200 pieds de hauteur. Plutôt que de tomber abruptement, elle tombe en cascade sur une distance de plusieurs centaines de mètres, où se succèdent des saillies rocheuses, des plans d'eau et des canaux. Le nom Twin Falls (chutes doubles) vient du fait que la rivière est séparée dans le haut par une grande île, puis elle coule suivant deux grands canaux. On peut aussi compter plusieurs autres îles le long des chutes.

    On a reconnu le grand potentiel archéologique de ce site. Il se trouve sur une route d'expédition établie, route qui est très populaire et très fréquentée. On utilise beaucoup cette route et les chutes à des fins récréatives, et c'est un lieu de pêche important. Il s'agit de l'une des frayères les plus importantes pour les poissons suivants: salmonidés, esturgeons, dorés jaunes et grands brochets. C'est l'une des meilleures frayères de la rive nord du lac Supérieur.

    Pendant six ou sept mois en 1998, j'ai demandé de nombreuses fois au ministères des Pêches et des Océans les documents du registre public, et la chance que le public puisse participer au processus d'approbation. J'ai fait au-delà de 20 demandes. J'ai fait des douzaines de téléphones, mais je n'ai eu accès qu'à la boîte vocale, ce qui ne m'a pas beaucoup aidé. J'ai envoyé des lettres et j'ai pu parler à l'occasion à des gens du ministère des Pêches et des Océans.

    Les résidents de la région de Manitouwadge et des environs étaient inquiets relativement à cette proposition d'aménagement hydroélectrique. Il s'agit d'un lieu unique et on a ignoré et discrédité beaucoup de connaissances locales précieuses au cours du processus d'approbation.

    Le ministère des Pêches et des Océans ne m'a jamais dit que je ne pouvais pas obtenir les documents, maison a invoqué beaucoup d'excuses, en affirmant par exemple que la liste des documents n'était pas prête ou qu'on avait envoyé les documents pour une vérification de l'AIPRP avant de les publier, ou qu'il y avait un manque de personnel et qu'on ne pouvait traiter rapidement ma demande. À un moment donné, on m'a envoyé à la pêche en me faisant passer par un processus formel d'accès à l'information. Après les nombreuses tentatives infructueuses que j'ai effectuées pendant plusieurs semaines, on m'a finalement dit que je pouvais facilement obtenir ces documents en passant par le registre public et que je n'avais pas à passer par l'AIPRP.

¿  +-(0925)  

    Environ cinq mois après ma première demande de tous les documents, j'en ai enfin obtenu la liste. Il ne s'agissait que de la liste. J'ai appris qu'il manquait 80 documents, des documents très importants liés au projet. Je les ai commandés immédiatement, mais en vain.

    Je devrais peut-être expliquer les raisons pour lesquelles je tenais tant à ces documents. Je savais qu'une partie des renseignements que présentaient le promoteur et le ministère des Ressources naturelles était erronée. Moi et d'autres personnes avons fait part de ces problèmes au promoteur et à la province.

    Je voulais voir sur quelle information le gouvernement fédéral se fondait pour faire une sélection. De plus, la province ne suivait pas ses propres directives relativement au projet, au sujet de la collecte de renseignements.

    Le régime d'écoulement de la rivière Kagiano indiqué par le promoteur n'était que théorique. On ne l'a jamais mesuré. Personne n'a jamais vraiment su combien il y avait d'eau à ce site. De toute évidence, cette information est extrêmement importante.

    Le régime d'écoulement indiqué par le promoteur ne semblait pas concorder avec les données connues dans cette région. Le ministère des Pêches et des Océans n'a participé à aucune réunion publique à Manitouwadge. Le biologiste en chef n'avait visité les lieux que brièvement à deux occasions, soit pendant deux heures à chaque fois. Le ministère des Pêches et des Océans n'avait mené aucune étude pour le projet. Je craignais avec raison qu'il utilise des données erronées et incomplètes.

    Finalement, en juillet 1998, soit six ou sept mois après ma première demande de dossiers, le MPO a autorisé la destruction de cet habitat de poissons. C'était une décision importante en vertu de laquelle on pouvait immédiatement passer à l'étape de la construction. On a accordé cette autorisation et on a publié le rapport d'examen préalable au même moment.

    Je n'avais toujours pas les documents en main, et aucune réunion publique n'avait été organisée. J'ai reçu les documents seulement après avoir intenté une poursuite contre le gouvernement fédéral.

    Peu de temps après, j'ai lu un article de journal qui disait que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien subventionnait l'un des partenaires du projet. J'ai mené une enquête sur l'évaluation environnementale: après plusieurs semaines, j'ai appris qu'on en avait menée aucune. Éventuellement, on en a mené une, mais c'était après qu'on ait fait l'annonce du financement.

    Je ne suis pas ici aujourd'hui pour débattre des mérites de ma poursuite contre le gouvernement. Je veux plutôt vous faire part de mon expérience et faire certaines recommandations pour éviter que des situations semblables se reproduisent.

    Une poursuite a été nécessaire pour que je puisse obtenir les documents. Même si on a déterminé que le registre public offrait un accès public adéquat, il n'était pas justifié qu'on refuse de me remettre les documents.

    Si on m'avait remis les documents au moment opportun, j'aurais pu signaler les difficultés. On aurait pu alors éviter les nombreux problèmes qui se sont ensuivis, y compris les poursuites entamées par d'autres personnes.

    Je recommande que le paragraphe 55(1) proposé, qui traite de l'accès à l'information, comprenne les trois éléments suivants. Il doit comporter des délais précis relativement à l'affichage d'informations au registre, et ces informations doivent être données dans les plus brefs délais. Deuxièmement, puisque tous n'ont pas accès à un ordinateur ou à Internet, je propose qu'on remette à toute personne qui en fait la demande une copie des documents sur papier.

    Dans sa forme actuelle, le paragraphe 55(2) proposé semble affaiblir la disposition existante qui a trait à la fourniture de tous les rapports. Troisièmement, j'aimerais que la disposition suivante soit comprise dans le paragraphe 55(2): ils doivent fournir tout rapport qui a trait à l'évaluation, y compris les rapports scientifiques et techniques.

    Dans mon mémoire, les raisons et la formulation des modifications sont explicités.

¿  +-(0930)  

    J'aimerais que nous parlions de l'importance que représente la participation du public aux examens. Il semblerait que la LCEE se contredise sur ce pont... Dans le préambule, il est question de son engagement afin de faciliter la participation du public dans l'évaluation environnementale, alors qu'en pratique, l'article 18 permet, dans 99 p. 100 de toutes les évaluations environnementales, de refuser la participation du public. C'est scandaleux.

    Il n'est pas nécessaire que le public participe à tous les examens. Je propose que vous ajoutiez un paragraphe, 18(5), qui permettrait au public de participer à l'élaboration d'un rapport d'examen préalable et de documents connexes, lorsque l'autorité compétente reçoit une demande écrite d'une personne âgée de 18 ans ou plus. Dans mon mémoire, je présente cette proposition en termes bien précis.

    Les modifications proposées au projet de loi C-19 ne vont pas assez loin et ne permettent pas d'avoir accès facilement et rapidement aux documents. Ces modifications ne font rien pour améliorer la participation du public qui est actuellement quasi inexistante. Ces deux éléments sont cruciaux pour une évaluation environnementale efficace.

    Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-19 ne fait rien pour empêcher que ne se répètent mes expériences. Si j'avais eu les documents et l'occasion de prendre part aux discussions, j'aurais pu apporter l'information cruciale suivante en ce qui concerne le projet de Twin Falls, au ministère des Pêches et des Océans. J'aurais pu leur dire que les documents ne contenaient aucune information indiquant que le promoteur avait l'intention de poursuivre l'examen du réservoir après sa construction. En fait, ce projet avait été approuvé en tant que projet au fil de l'eau, mais l'intention était clairement de mettre en place un réservoir après la construction initiale, et cela n'avait jamais été évalué.

    Le rapport de contrôle préalable qui devait être fourni et qui était l'un des documents clés de tout le processus, n'apparaissait pas dans le registre public et il semblerait que le ministère des Pêches et des Océans n'ait jamais vu ce rapport. Ce rapport avait été rédigé à l'intention de l'organisme de crédit, pour l'assurer que le projet était viable sur le plan financier. Mais, cette information n'a pas été mise à disposition du ministère des Pêches et des Océans. Le rapport de contrôle préalable qui devait être fourni mentionnait que le réservoir était nécessaire pour rendre le projet viable. Lors de la dernière réunion d'information, qui s'était tenue à Manitouwadge, le promoteur a indiqué qu'il avait l'intention de poursuivre l'examen du réservoir après la construction de ce projet. Mais, cette information n'est mentionnée dans aucun des documents. Un des partenaires participant à ce projet m'a confirmé, après le début des travaux, qu'ils avaient un jour l'intention de poursuivre l'examen du réservoir.

    Les rapports ne mentionnaient pas que c'était seulement le premier de quatre projets hydro-électriques prévus pour ce bassin hydrographique. Le promoteur a volontairement fourni cette information lors de la première journée portes ouvertes, et il avait affiché un diagramme à cet égard. Au cours de la dernière année, le partenaire principal du promoteur a été cité dans un article paru dans un magazine. Il a déclaré qu'ils avaient engagé le processus réglementaire et le processus d'approbation pour les trois autres sites qui se trouvent au bord du bassin hydrographique. Le paragraphe 16(1)a) de la LCEE devrait tenir compte de l'impact cumulatif qu'aura ce projet sur l'environnement, en plus des autres projets qui pourraient être menés à bien. Les résidents de cette région étaient au courant que d'autres projets étaient planifiés, mais apparemment le gouvernement fédéral ne l'était pas.

¿  +-(0935)  

    Les autorités ont fait abstraction ou ont ignoré les connaissances et l'expérience locale que possèdent depuis des générations les personnes qui habitent dans la région, et près des sites de Twin Falls en particulier. Ils avaient été avertis que d'énormes accumulations de glace se forment dans les chutes lors des gels qui se produisent tard à l'automne. En fait, pendant la construction, le projet a été inondé à deux reprises, sans avertissement, en raison de la formation de bancs de glace. Heureusement, cela n'a pas causé de pertes de vie, mais le projet a subi des retards importants et le site a subi d'importants dégâts environnementaux.

    Une des inondations a provoqué le glissement de la digue de protection construite en sacs de sable et des centaines de sacs remplis de sable ont été déversés dans l'habitat aquatique. Ces sacs n'ont pas été récupérés. Là encore, le paragraphe 16(1)a) devrait tenir compte de l'effet que pourraient avoir les incidents ou les accident sur l'environnement. La digue de protection en sacs de sable n'était pas construite selon les plans et les spécifications qui avaient été approuvés. Les autorités avaient été averties que la digue pourrait céder et ce sont des personnes qui connaissent la rivière qui les en ont avertis. Mais les connaissances locales ont été ignorées.

    L'objectif de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale était de reconnaître la légitimité et de donner des directives pour l'évaluation environnementale. J'ai assisté au massacre et à l'entrave des examens de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale par les personnes chargées de faire observer la loi. Comment l'AINC peut-il s'en sortir en faisant une évaluation environnementale, après s'être engagé à fournir des fonds fédéraux?

    La LCEE doit avoir un certain pouvoir. Le respect de la loi doit être obligatoire et le non respect de cette dernière doit être sanctionné durement.

    Le gouvernement fédéral s'est protégé contre moi et m'a fait payer les frais engendrés par mon action en justice. Cela peut dissuader plus d'un citoyen d'essayer de combler les lacunes que présente la LCEE.

    Pour conclure, j'aimerais expliquer pourquoi ce projet en particulier et le processus d'évaluation environnementale étaient si importants. Ce projet devait être le projet pilote et il devait servir de modèle aux projets hydroélectriques de l'Ontario. Avec la déréglementation d'Ontario Hydro qui est imminente, des douzaines de ces petits projets hydro-électriques verront le jour dans la province. Il est donc important que des directives et des règles claires soient établies, afin de prévenir la répétition de ces problèmes importants dont je vous ai donné un aperçu.

    Ceci met fin à ma présentation.

¿  +-(0940)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci, Monsieur Lavoie.

    Pouvons-nous continuer s'il vous plaît avec le prochain groupe, le Comité consultatif de l'environnement Kativik.

+-

    M. Michael Barrett (président par intérim, Comité consultatif de l'environnement Kativik: Merci, Monsieur le président.

    Je m'appelle Michael Barrett. Je suis ici en tant que président du Comité consultatif de l'environnement Kativik.

    Le Comité a été créé en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, qui a été signée en 1975, et existe depuis 1980. Selon les dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, nous sommes le forum de discussions officiel pour les discussions qui ont lieu entre le gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec et l'administration régionale Kativik en ce qui concerne l'examen des problèmes liés à l'environnement dans la région Kativik au nord du 55e parallèle, qui s'étend grosso modo sur un tiers des territoires du Nord du Québec, ce qui inclut les rives de la Baie d'Hudson, le détroit d'Hudson et la baie d'Ungava.

[Français]

    Des neuf membres du comité consultatif, trois sont nommés par le gouvernement du Québec, trois par le gouvernement du Canada et trois par l'Administration régionale Kativik.

    Paule Halley, qui m'accompagne aujourd'hui, va faire la deuxième partie de notre présentation.

[Traduction]

    Le comité consultatif et le peuple du Nunavik, le nom de notre région, font des évaluations environnementales depuis environ vingt ans.

    Le chapitre 23 de la Convention de la Baie James inclut des dispositions concernant les évaluations environnementales fédérales et provinciales. Ces dispositions prévoient une forte participation de la part des Inuit. Les 14 villages de notre région sont des villages Inuit et 90 p. 100 de notre population est Inuit. Le processus fédéral prévoit que deux des cinq membres de la commission d'examen sont nommés par l'administration régionale Kativik. Ils sont donc Inuits ou représentent les Inuits. Le processus du Québec est similaire.

    Au Nunavik, lorsque la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a été déposée au début des années 1990, nous l'avons examinée et en sommes venus à la conclusion que les dispositions ne s'appliquaient pas car, en ce qui concerne la Convention de la Baie James, en raison de sa protection constitutionnelle, il n'y aurait qu'une révision fédérale. Il y a des disposition pour harmoniser les révisions québécoises et fédérales, mais les deux peuvent évoluer de façon indépendante. Une des dispositions stipule qu'il n'y a qu'une révision pour les projets qui relèvent de la compétence fédérale. Dès lors, jusqu'à ce jour, nous n'avons fait aucune présentation. Les Cris de la région de la baie James, en vertu du chapitre 22, ont des dispositions similaires.

    Vers la fin des années 1990, nous nous sommes engagés dans une série de projets communautaires pour construire des infrastructures marines. Ces projets sont destinés à la communauté. L'impact en est local. Ils sont construits par l'entité Inuit au Québec. Bien sûr, ils sont soumis à l'évaluation environnementale, tant provinciale que fédérale.

    L'Agence canadienne d'évaluation environnementale a alors décidé que la loi devrait également s'appliquer. Nous en sommes arrivés au point où une entité tierce révisait un projet local. Nous avions une entité composée de représentants de divers ministères. Dans ce cas, il s'agissait de trois ministères fédéraux, et, je crois, de deux autres ministères fédéraux associés qui révisaient un projet qui avait déjà été évalué par notre propre commission provinciale et par une commission d'examen fédérale. Nous avions maintenant des personnes présentes dans des bureaux fédéraux dans le sud du Québec.

    Lors du premier projet, en 1999, à Kangiqsualujjuaq, aucune de ces personnes n'était jamais venue visiter notre région. Elles étaient responsables de la révision d'un processus. Vous pouvez donc imaginer que nous avons été bombardés de centaines de questions dans le cadre de cette révision, dont la première était « Où êtes-vous situés? » Selon nous, c'est pour cela qu'on s'est éloigné du processus d'évaluation environnementale.

    La Convention de la Baie James et du Nord québécois était le premier accord moderne sur une revendication territoriale. Les dispositions environnementales étaient très strictes à cette époque. Nous pensons qu'elles sont toujours strictes. Elles permettent à nous les Inuits de prendre part au processus de révision et nous disposons de directives et de principes.

    Avec la mise en place de la LCEE, nous disposons maintenant de directives et de principes totalement différents et, lorsque nous en arrivons à la phase de réalisation des projets, nous devons composer avec trois ensembles de conditions différentes. On a tenté d'harmoniser les conditions de la LCEE qui s'appliquent au processus fédéral et provincial, mais selon nous, nous nous perdons dans le processus. Nous perdons notre énergie à tenter d'améliorer, de mettre en place des mesures d'atténuation, pour rendre les projets plus viables. Au lieu de cela, nous devrions nous concentrer sur le processus.

    Selon nous, les dispositions de la Convention de la Baie James devraient les remplacer. Actuellement, six de ces infrastructures marines sont en construction. Notre région se développe maintenant, et se développera certainement encore par la construction de routes, par son potentiel hydro-électrique et par le développement de ses infrastructures régionales. Nous continuons à tenir compte des dispositions de la Convention de la Baie James et du Nord québécois.

¿  +-(0945)  

    Je me permets maintenant de donner la parole à Paule Halley pour la deuxième partie de la présentation. Nous serions heureux de répondre à vos questions. Notre présentation a été envoyée au Ministre, car c'est avec lui que nous communiquons d'habitude, mais nous sommes heureux d'avoir la possibilité de soumettre notre point de vue au Comité.

[Français]

+-

    Mme Paule Halley (membre, Comité consultatif de l'environnement Kativik): Michael Barrett, le président du CCEK, vous a présenté le contexte actuel de la mise en application, par le fédéral, des régimes d'évaluation de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    À titre de Comité consultatif, nous avons examiné comment le gouvernement fédéral applique et administre le régime de la convention au Nunavik afin de nous assurer que cette double procédure fédérale se réalise dans le respect des objectifs et des institutions de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. C'est dans ce contexte que nous avons examiné plus attentivement les dispositions de la convention et de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ainsi que le processus de révision de cette loi.

    En tout premier lieu, j'aimerais attirer l'attention des membres du comité sur le fait que la convention prévoit, au chapitre 23, un régime complet d'évaluation environnementale qui a ceci de très particulier: le régime s'intéresse aux impacts environnementaux et s'intéresse également aux impacts sur le milieu social des Inuits.

    À ce sujet, la Cour d'appel fédérale a écrit, dans l'arrêt Bande d'Eastmain en 1993:

La Convention prévoit de façon détaillée et exhaustive la portée et la nature des études environnementales auxquelles les parties ont convenu de soumettre les projets de développement entrepris en territoire conventionné. Le régime mis en place représente l'expression du consensus particulier intervenu entre les parties,...

    Le chapitre 23 introduit donc un régime complet; c'est-à-dire que la convention prévoit toutes les règles d'évaluation et, notamment, ses propres règles gouvernant les cas de cumul des procédures d'évaluation environnementale.

    À l'article 23.7.6, la convention interdit, en termes exprès, la mise en oeuvre d'une double procédure fédérale en territoire du Nunavik. Je cite la disposition:

...tout projet de développement ne peut faire l'objet de plus d'un processus d'évaluation et d'examen des répercussions à moins que ledit projet ne relève à la fois de la compétence provinciale et fédérale ou à moins que ledit projet soit situé en partie dans la Région et en partie ailleurs où un processus d'examen des répercussions est requis.

    Donc, la convention est claire. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale n'est pas applicable sur le territoire du Nunavik. À cet égard, je souligne qu'en dehors des cas de cumul prévus dans la convention, il n'est pas possible de signer des ententes d'harmonisation et de délégation, ou d'instituer des commissions conjointes ou de substitution comme le prévoit la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, car ces mécanismes-là n'existent pas dans la convention. De plus, les organismes qui sont créés par la convention, comme le comité fédéral d'évaluation, composé en majorité de fonctionnaires fédéraux, n'ont pas le pouvoir inhérent de signer des ententes d'harmonisation, de délégation et autres avec l'Agence canadienne. Ce pouvoir ne leur est pas accordé par la convention.

    Le seul moyen de modifier les termes de la convention est de le faire dans le respect de ses dispositions, notamment l'article 23.7.10 qui stipule:

Les dispositions du présent chapitre ne peuvent être amendées qu'avec le consentement du Canada et de la partie autochtone intéressée pour les matières relevant de la compétence fédérale...

Or, il s'avère que, dans les cas où l'on a appliqué une double procédure fédérale, il n'y a eu aucune approbation de la part des Inuits à cette double application.

    Au-delà de cet examen, le CCEK s'est demandé si les régimes de la convention et de la loi canadienne étaient, en pratique, à ce point semblables que l'on puisse appliquer l'un ou l'autre sans qu'il y ait vraiment de différence, si ce n'est que le nom des régimes change. On a donc fait un examen comparé des deux régimes d'évaluation. Il s'avère que les deux régimes sont tout à fait différents.

¿  +-(0950)  

    J'aimerais attirer l'attention des membres de ce comité sur la différence la plus importante: c'est que la convention accorde un statut particulier aux Inuits, à leur milieu social, à la faune dont ils dépendent et à leurs activités traditionnelles de chasse, de pêche, de trappe, etc. Par exemple, la convention précise que le régime doit accorder aux Inuits une participation plus grande que celle accordée aux autres membres du public canadien et québécois. On ne retrouve rien de tel dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    De plus, un examen plus technique des deux régimes révèle que les règles d'assujettissement, les objectifs des deux régimes, les institutions qu'ils mettent en oeuvre et les processus décisionnels sont tout à fait différents les uns des autres. Donc, en bout de ligne, les différences entre les deux régimes sont si importantes que le fait d'appliquer au Nunavik la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a pour effet de changer les termes de la convention, qui prévoit un régime complet d'évaluation environnementale.

    Selon le CCEK, l'Agence canadienne ou l'administrateur fédéral ne peut modifier ainsi le régime de la convention sans l'intervention de la partie inuit. Si l'Agence canadienne ou l'administrateur fédéral avait un tel pouvoir, la convention le prévoirait explicitement. Or, on ne retrouve aucun de ces pouvoirs accordés au fédéral dans la convention, et aucune entente, ad hoc ou autre, n'est intervenue avec la partie inuit.

    Suivant les principes qui gouvernent les conventions, une partie ne peut pas modifier ses droits et ses obligations simplement en adoptant une nouvelle loi, comme la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Si on devait accepter un système semblable, qui permettrait à l'administrateur fédéral de changer seul les termes d'une convention, cela affaiblirait grandement le rôle des autochtones au Canada et amoindrirait l'efficacité des conventions à titre d'instruments de règlement des litiges territoriaux avec les communautés autochtones du Canada.

    Donc, compte tenu de cette analyse et des termes de la convention, il apparaît au CCEK que la convention doit être prépondérante et que la loi canadienne ne doit pas recevoir application sur le territoire du Nunavik tant que son application n'a pas fait l'objet d'une entente avec la partie inuit. En outre, le caractère prépondérant de la convention est prévu par une loi du Parlement canadien qui a été adoptée pour mettre en oeuvre la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et qui stipule à son article 8:

8. En cas de conflit ou d'incompatibilité, la présente loi l'emporte sur toute autre loi qui s'applique au Territoire dans la mesure nécessaire pour résoudre le conflit ou l'incompatibilité.

    Donc, le CCEK a produit un avis à l'administrateur fédéral dans lequel il demandait à l'autorité fédérale de respecter les termes de la convention. Il lui demandait également de modifier la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, d'où notre présence ici, afin que les fonctionnaires chargés de son application reconnaissent clairement le caractère prépondérant du régime de la convention et que cette loi ne doit pas être appliquée au Nunavik sans qu'on en négocie les modalités avec la partie inuit.

    Nous sommes d'avis que ces éclaircissements doivent apparaître dans la loi et non pas comme un simple pouvoir délégué à l'administration gouvernementale, compte tenu que dans la loi précédente, l'administration publique avait le pouvoir de substituer le chapitre 23 à la loi canadienne et ne l'a pas utilisé. Il convient donc de dire clairement aux fonctionnaires fédéraux que cette loi ne s'applique pas au Nunavik.

    Cette recommandation est partagée par des organisations inuits qui ont déjà présenté des mémoires lors du processus de révision et par d'autres organisations autochtones au Canada qui ont également présenté des mémoires lors du processus quinquennal. Cette recommandation est également partagée par le Comité consultatif de la réglementation, un comité fédéral, qui a recommandé au ministre de l'Environnement de modifier la Loi sur l'évaluation environnementale afin de permettre l'application des régimes négociés avec les autochtones lorsque de tels régimes existent.

    Nous recommandons donc que l'article 7 de la loi indique clairement que, dans de tels cas, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'applique pas.

    Je serai heureuse de répondre à vos questions. Merci.

¿  +-(0955)  

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Bien. Merci beaucoup.

    Je remercie nos témoins et nous allons maintenant passer aux questions. Je demanderais aux témoins de répondre le plus précisément possible, de façon à pouvoir répondre à un maximum de questions.

    Nous allons commencer avec M. Bailey, s'il vous plaît.

+-

    M. Roy Bailey (Souris--Moose Mountain, Alliance canadienne): Merci, Monsieur le président.

    Si j'espérais obtenir des précisions en venant à cette réunion ce matin, je dirais qu'il reste beaucoup de travail à faire. Comme vous l'avez très justement mentionné, il reste beaucoup de travail à faire en ce qui concerne le projet de loi C-19 et il est nécessaire d'y apporter des modifications majeures.

    À la lumière de vos propos, je conclue qu'il n'y a pas d'harmonisation entre le provincial et le fédéral, etc., pour ce processus, par lequel vous espérez arriver à une évaluation environnementale. Cela me préoccupe considérablement. Comme l'a mentionné ce monsieur, il y a des évaluations écrites qui circulent, alors que les parties concernées n'ont jamais visité le site. Est-ce exact?

+-

    M. John Lavoie: Presque, oui. Il y a eu de brèves visites.

+-

    M. Roy Bailey: D'accord. Ce que je veux dire, c'est qu'aucun d'entre-vous ne m'engagerait en tant qu'évaluateur environnemental, parce que je n'en connais pas assez sur le sujet. Je vous demande donc si les critères d'évaluation pour un projet ont été standardisés tant au fédéral qu'au provincial? Ne devraient-ils pas tous chanter la même chanson?

    Apparemment ce n'est pas le cas. Aussi longtemps qu'il y aura cette incohérence, il faudra des mois et des mois pour concrétiser un projet. Cela deviendra très coûteux, comme certains d'entre vous l'ont mentionné. C'est comme si les gouvernements, de même que le troisième échelon du gouvernement, ne savaient pas à quoi sert cette loi, surtout en ce qui concerne l'évaluation environnementale.

    C'est bien ce que je pense en vous écoutant. Aurais-je mal compris?

À  +-(1000)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Qui aimerait répondre à cette question?

+-

    M. George Sinclair: Moi.

    Merci pour cette question. Je comprends pourquoi vous la posez. Du point de vue des sables bitumeux--et je parlerai de mon expérience personnelle--j'estime que nous avons fait de grands progrès en matière d'harmonisation. Nous avons constaté une évolution très positive au cours des dernières années en ce qui concerne la collaboration entre les divers groupes.

    Je crois que c'est clair et M. Scott pourra peut-être nous faire profiter de son expérience personnelle sur tout le territoire canadien dans certains projets de l'ACPP, mais on remarque plus d'éléments communs en Alberta sur ce qui est requis pour une évaluation de l'impact environnemental et sur la façon dont inter-réagissent les différents intrants en ce qui concerne notamment les exigences fédérales. Nous voulons nous assurer que nous ne négligeons aucune possibilité.

    Quant aux personnes qui assurent ce genre de service pour nous, étant donné que vous ne désirez pas être embauché--ce qui est intéressant--beaucoup sont compétentes. Certaines se spécialisent sur des régions spécifiques du pays. Je crois que tant le gouvernement que l'industrie ont tendance à utiliser les mêmes spécialistes pour assurer ces services. À mon avis, nous avons déjà accompli beaucoup en mettant ces différents éléments en présence.

    À mon avis, nous avons fait beaucoup de progrès et nous continuons, mais il y a encore place à l'amélioration. Et ce processus dont nous avons parlé, le processus de gestion d'adaptation connu sous le nom de CEMA a réellement permis d'instaurer un esprit de collaboration dans la région où nous travaillons et dans celle des sables bitumeux.

+-

    M. Roy Bailey: Avez-vous constaté des façons de faire différentes entre les divers ministères? Prenez l'exemple du ministère des Pêches et des Océans; quand on écoute votre partenaire, on comprend qu'il y a un manque d'harmonisation entre les différents ministères. Corrigez-moi si j'ai tort.

+-

    M. George Sinclair: Je peux ajouter quelques renseignements, puis M. Scott fera quelques commentaires, je crois.

    En ce qui concerne l'Alberta, on constate une réelle harmonisation entre le personnel provincial du ministère de l'Environnement et de l'Energy and Utilities Board. Le MPO et Environnement Canada sont aussi en pleine discussion. Des questions se sont posées au fil des années, mais dans ce domaine aussi nous avons remarqué quelques améliorations, particulièrement en ce qui concerne les relations avec le MPO. Je crois que monsieur Scott peut en parler un peu, si vous le voulez bien.

+-

    M. Ian Scott: Le CCME a certainement des dispositions visant l'harmonisation; on a assisté à des tentatives d'harmonisation dans diverses provinces en ce qui concerne les processus d'évaluation environnementale entre le gouvernement fédéral et les provinces. Une partie du problème persiste, car toutes les provinces n'ont pas signé des accords bilatéraux avec le gouvernement fédéral. C'est pourquoi il existe encore une faille dans ce domaine.

    Néanmoins, bien que ces ententes aient été mises en place, il arrive que, les ententes auxiliaires ne le soient pas encore, ce qui est une préoccupation du secteur des hydrocarbures. Nous pensons qu'une meilleure harmonisation est possible. Nous estimons aussi que, dans certains cas, il faut admettre que les provinces ont un rôle à jouer et que, dans bien des cas, elles effectuent des évaluations environnementales depuis de longues années.

    Pour ce qui est des différents ministères fédéraux, nous avons certainement constaté que certains se sont ralliés à la question de l'intention de la LCEE. D'autres ont plutôt abandonné leur rôle dans la LCEE, ce qui a donné lieu à des problèmes d'incertitude pour les entreprises.

    Certaines questions se posent aussi en ce qui concerne différents ministères qui ne comprennent pas entièrement le processus intégral établi par la LCEE. L'un des points qui relèvent du Comité consultatif de la réglementation et que par tous les intervenants ont reconnu était le besoin de veiller à ce que tous les ministères fédéraux comprennent ce qui leur est demandé en vertu de la LCEE. J'aime rappeler aux gens que bien que la loi s'adresse souvent aux promoteurs industriels, cette loi visait en partie à obliger les ministères fédéraux à appliquer couramment l'évaluation environnementale sur tout le territoire canadien.

À  +-(1005)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Lavoie.

+-

    M. John Lavoie: Il y a eu des désaccords entre les ministères fédéraux lorsque je tentais d'avoir accès à l'information afin d'assurer la participation publique. J'ai parlé à quelqu'un de l'agence qui m'a répondu très franchement que le ministère des Pêches et Océans avait une interprétation de la LCEE qui ne correspondait pas à celle de l'agence.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président. Veuillez m'excuser d'avoir été en retard.

    Mes questions s'adresseront en grande partie au Comité consultatif de l'environnement Kativik. Votre mémoire est assez conforme au contenu de la présentation que le Grand Conseil des Cris nous a livrée la semaine dernière. En réalité, dans vos deux mémoires, vous insistez sur un fait que je trouve moi aussi déplorable, soit le refus du gouvernement fédéral d'établir une relation de nation à nation et ce, dans le cadre de la question qui nous intéresse présentement.

    Je retiens d'abord le fait que l'Agence canadienne n'a obtenu aucun accord de la part des Inuits, que ce soit à l'égard de l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ou sur le système fédéral de double procédure.

    De plus, vous estimez, et je suis de ceux qui le croient aussi, qu'il doit y avoir une valeur prépondérante accordée autant à la convention qu'à ses institutions ou à ses mécanismes. Cependant, vous avez très peu parlé des aspects du projet de loi et de la loi qui donnent au ministre un pouvoir discrétionnaire lui permettant d'établir un mécanisme de substitution, à la convention, par exemple, afin d'appliquer la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ou toute autre procédure fédérale. Il existe donc un pouvoir discrétionnaire, qui s'applique aussi au ministre et qui me semble aller de soi, que ce soit pour les provinces ou dans le cadre de la convention. J'aimerais entendre vos commentaires sur les aspects du projet de loi ou de la loi qui donnent ce pouvoir au ministre.

+-

    Mme Paule Halley: Ces pouvoirs existaient également dans la loi antérieure. Je crois que c'est l'ancien article 42 qui permet au ministre de substituer un processus et donc d'appliquer la convention au lieu de la loi canadienne. C'est ce qui devrait être fait, à notre avis, en respect de la signature du gouvernement fédéral en 1975, lorsqu'il a signé la convention.

    Ce pouvoir existe donc depuis 1975 et n'a pas été utilisé. Nous sommes d'avis que cet éclaircissement doit se retrouver dans la loi et non pas être simplement délégué comme un pouvoir discrétionnaire à l'administration publique. L'article 8 de la loi du Parlement de 1976 prévoit que la convention est prépondérante sur les autres lois du Canada. Par conséquent, les autres lois doivent être cohérentes et donner la prépondérance aux conventions qui ont été signées il y a 25 ans, pour leur donner plein effet. Il ne s'agit pas de changer les termes d'une convention, d'une entente, d'un régime en adoptant de nouvelles lois.

    Je crois que le Parlement doit s'assurer de rester cohérent et prévoir une exclusion pour les projets qui sont déjà soumis à un processus d'évaluation qui, suivant les termes signés en 1975, est le seul processus qui s'applique dans la région. Donc, ces projets-là sont exclus de l'application de la loi canadienne. Ensuite, on invite le ministre à aller rencontrer la partie inuit et à changer les termes de cette convention et, si la partie inuit le désire, à appliquer pleinement la loi canadienne.

    C'est une question de principe. Ce n'est pas simplement au ministre de décider quelles sont les intentions des Inuits. Ce n'est pas non plus au CCEK de le décider; il vient plutôt dire ici, au Parlement, que les règles sont déjà établies et que la loi canadienne n'a pas d'application sur ce territoire-là. Il faut qu'on le reconnaisse expressément dans la loi. Ensuite, si on veut changer les règles du jeu, il faut aller voir la partie avec laquelle on s'est engagé à appliquer ce régime.

    Donc, je crois que la situation est restée la même. Le projet de loi ne change pas les règles du jeu. Il ne fait que compliquer davantage cette loi qui l'était déjà, avec des règlements à adopter en vertu des alinéas 59k.4) et 59k.3) proposés, avec une série de règlements peut-être à venir. Il s'agit toujours encore du pouvoir discrétionnaire donné à l'administration publique d'élaborer des listes d'organismes qui vont peut-être pouvoir... C'est beaucoup trop flou pour qu'on puisse penser que ça va donner préséance à la convention dans un avenir rapproché.

    Alors, nous sommes d'avis que c'est dans la loi qu'on doit retrouver cette précision afin d'enlever cette discrétion à l'administration publique.

À  +-(1010)  

+-

    M. Bernard Bigras: Iriez-vous jusqu'à dire que la loi actuelle et le projet de loi sont non conformes aux principes énoncés dans la convention?

+-

    Mme Paule Halley: L'expérience nous dit qu'on n'arrivera pas à cet objectif. Cette loi existe déjà et elle a généré le problème, malgré l'existence de ce pouvoir . Il faut donc être plus clair. Il faut encadrer davantage la discrétion administrative.

+-

    M. Bernard Bigras: Voici une dernière petite question. Le Grand Conseil des Cris du Québec nous a parlé d'une entente entre le gouvernement du Québec et ses nations, qui venait reconnaître les nations et le processus d'évaluation inscrit dans le chapitre 23. Est-ce que vous êtes au courant de cette entente?

+-

    M. Michael Barrett: Oui.

+-

    M. Bernard Bigras: Qu'est-ce que vous en pensez?

+-

    M. Michael Barrett: Ça concerne le gouvernement du Québec et les Inuits. C'est une entente qui devrait être ratifiée au cours des trois prochaines semaines. Mais le gouvernement du Québec a noté deux ou trois endroits où le processus d'évaluation environnementale qui se trouve dans le chapitre 23 s'applique.

    Comme nous le disons dans notre présentation, notre processus environnemental s'applique à tous les développements à venir dans la région du 55e parallèle.

+-

    Mme Paule Halley: Permettez-moi d'ajouter que depuis la fin des années 1970, on retrouve au Québec une reconnaissance formelle du régime de la convention dans le chapitre 2 de la Loi sur la qualité de l'environnement du Québec, qui met complètement en oeuvre les termes de la convention. Ce sont des régimes séparés de ceux du Sud. C'est complètement reconnu et ça fonctionne très bien. On a simplement confirmé, avec les ententes récentes, qu'on allait continuer à agir de la sorte.

+-

    M. Bernard Bigras: C'est ce que vous souhaiteriez dans l'évaluation canadienne?

+-

    Mme Paule Halley: Oui. Le fédéral n'a pas appliqué son régime jusqu'à la loi canadienne. On aimerait qu'il applique le régime avant d'appliquer la loi canadienne, parce qu'on donne la priorité aux Inuits. C'est important de reconnaître leur signature.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor--St. Clair, NPD): Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

    Je m'excuse de ne pas poser cette question en français mais je voudrais être assez précis.

[Traduction]

    Je suis perplexe. Le ministère de la Justice, le gouvernement fédéral, ont-ils d'une façon ou d'une autre remis en question votre opinion ou acceptent-ils que la convention ait priorité sur la Loi sur l'évaluation environnementale?

[Français]

+-

    Mme Paule Halley: Nous avons récemment remis notre avis officiel, mais nous sommes en contact avec les représentants locaux du ministère de l'Environnement et de l'Agence canadienne. Ils sont au courant de nos démarches et de notre opinion. Ils continuent à appliquer la double procédure et à s'harmoniser entre eux, mais en s'assurant que la loi canadienne s'applique.

[Traduction]

+-

    M. Michael Barrett: Vous devez vous rappeler que nombre de ces projets s'appuient sur la collectivité. Ce sont des projets dans les collectivités inuites, et les Inuits participent à l'évaluation des incidences environnementales. À l'heure actuelle, la LCEE s'applique, donnant le pouvoir de décision à des gens de l'extérieur qui n'ont jamais vécu ici et parfois n'ont même jamais visité notre région.

    Nous avons un problème d'échelle. Nous travaillons au progrès, nous essayons d'améliorer les conditions de vie, les normes dans les villages, de consacrer notre énergie à clarifier les choses. Cela viendra, mais à l'heure actuelle, nous travaillons beaucoup à améliorer les conditions de vie dans les villages isolés.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Herron.

+-

    M. John Herron (Fundy--Royal, PC): J'aimerais seulement faire un suivi de certains grands aspects d'autres exposés qui ont été présentés. Le premier est le concept d'évaluation environnementale et les batailles entre juridictions qui se livrent entre les provinces et le gouvernement fédéral. Nous entendons assez souvent, bien que ce ne soit pas toujours justifié, qu'il y a trop de chevauchements entre ce qui est du ressort du gouvernement fédéral et ce qui est du ressort du gouvernement provincial.

    Pouvez-vous citer des exemples précis, ayant trait à l'évaluation que nous examinons aujourd'hui, où une évaluation environnementale et les questions qui ont été posées et les processus qui ont été établis ont été effectués à l'échelon provincial, puis ont été obligatoirement refaits de la même manière au fédéral? Pourriez-vous citer quelques exemples bien précis où cela s'est produit? Quelqu'un?

À  +-(1015)  

+-

    M. Michael Barrett: J'ai assumé de nombreuses fonctions au fil des ans, parfois à la mise en œuvre et parfois en qualité de promoteur. Plus récemment, à titre de promoteur--je reviendrai aux projets d'infrastructure marine parce que c'est un exemple classique--nous avons appliqué notre processus provincial en vertu de la Convention de la Baie-James.

    Nous avons neuf membres d'une commission, parmi lesquels quatre sont nommés par les représentants inuits ou des entités inuites, plus notre secrétaire et notre analyste. Nous avons le processus fédéral, qui comprend cinq membres plus un secrétaire et des analystes. Maintenant, nous en sommes à 15 ou 16 et, en plus, nous avons l'Agence canadienne d'évaluation environnementale ayant au moins deux ministères présents, bien qu'un troisième participe, et deux autres ministères qui agissent à titre d'observateurs. Alors, nous avons maintenant 20 personnes qui examinent un projet, dont seulement six viennent peut-être de notre région ou y habitent.

    Vous pouvez commencer par là. Dans le premier cas, la collectivité compte 600 personnes.

+-

    M. John Herron: Je recherche des exemples précis où un aspect d'un projet avait été examiné par une entité, puis la même procédure avait été exécutée par une autre entité. Avez-vous des exemples?

+-

    M. George Sinclair: Monsieur Scott aura peut-être un exemple pour vous.

+-

    M. Ian Scott: Je crois que cet exemple vous satisfera. En Alberta, nous avons environ 1200 passages de cours d'eau par pipelines par an. Le gouvernement de l'Alberta a établi un code de pratiques qui est très normatif. En fait, le code est plus normatif que l'ancien système de permis qui exigeait que les sociétés prennent certaines mesures avant la construction de toute installation.

    Le potentiel existe et il existe maintenant. C'est plus qu'un potentiel. Le code de pratiques est étudié par le ministère fédéral des Pêches. Je n'irais pas jusqu'à dire que le code n'est pas conforme au ministère fédéral des Pêches, mais à l'heure actuelle, les entreprises sont confrontées au problème suivant: elles doivent non seulement se conformer au code de pratiques de l'Alberta, mais aussi tenter de déterminer quelles sont les exigences d'examen en vertu de la Loi fédérale sur les Pêches.

    En d'autres termes, chaque passage de cours d'eau en Alberta risque de faire l'objet d'examen préalable en vertu de la Loi fédérale sur les Pêches.

+-

    M. John Herron: Il s'agit donc de la LCEE et des Pêches?

+-

    M. Ian Scott: Oui, parce qu'en vertu de la LCEE, le paragraphe 30(2) de la loi sur les Pêches pourrait s'appliquer.

[Français]

+-

    Mme Paule Halley: Pour compléter ce que disait le président, Michael Barrett, je dirai que dans le cas des quais maritimes au Nunavik, la saison de la construction est très courte à cause des conditions climatiques. Dans certains cas, le projet avait suivi tout le processus provincial et avait reçu toutes les autorisations provinciales, mais les autorisations fédérales n'avaient toujours pas été reçues et la saison allait se terminer sans que les travaux puissent être complétés. Dans certains cas, les travaux ont été commencés avant qu'on reçoive les autorisations fédérales nécessaires. Vu que la lenteur était monnaie courante, il y a même eu, au niveau du processus fédéral, des demandes d'autorisation préalable qui ont été approuvées parce que l'hiver allait arriver et que les travaux allaient devoir être reportés à l'année suivante étant donné le fait que la saison est très courte. Ainsi, on allait finir le processus, mais les travaux étaient permis.

    La duplication a donc eu lieu dans le cas des quais maritimes dans le Nord. Au Québec, il y a également eu des cas de duplication. Je pense, par exemple, à la restauration du canal de Lachine. Dans ces cas-là, il y a eu des commissions conjointes ad hoc. J'ai documenté au moins huit cas, dans le sud du Québec, où il y a eu duplication des processus fédéral et provincial.

À  +-(1020)  

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci beaucoup.

    Madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Je vous remercie beaucoup.

    Je tiens à remercier tous les témoins qui sont présents aujourd'hui. Il fait bon entendre une discussion aussi étoffés des différentes questions entourant le projet de loi C-19.

    Je voulais adresser mes questions à monsieur Lavoie. Examinons l'objectif de l'alinéa 4(d) de la Loi sur l'évaluation environnementale. On y lit «de veiller à ce que le public ait la possibilité de participer au processus d'évaluation environnementale». Comme monsieur Lavoie l'a fait remarquer, il est tout à fait évident qu'il est impossible de participer quand sans avoir accès aux documents.

    Monsieur Lavoie, vous nous avez dit dans votre exposé qu'on vous a condamné aux dépens et je me demande si vous accepteriez de nous en divulguer la somme et de nous expliquer ce que cela signifie pour vous personnellement.

+-

    M. John Lavoie: J'ai pratiquement épuisé les économies de toute ma vie pour aider à payer --

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Donc, vous avez dû payer les dépens.

+-

    M. John Lavoie: Oui, je suis désolé. Je n'ai peut être pas été clair sur ce point.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Non, c'est moi qui me suis trompée. Je ne suis pas avocate, monsieur Lavoie. Donc, vous avez dû payer les dépens.

+-

    M. John Lavoie: C'est exact.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: La cour a donné raison au gouvernement.

+-

    M. John Lavoie: Oui, le gouvernement a réclamé les frais et la cour lui a alloué le remboursement des dépens contre moi. J'ai dépensé toutes mes économies dans ce procès que j'ai moi-même intenté et je trouve que cela ne devrait pas être possible.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Il me semble qu'à bien des égards, vous avez été très modeste en nous exposant le type de travail que vous avez fait ici. Vous êtes trappeur, je crois, dans le nord de l'Ontario.

    M. John Lavoie: Oui.

    Mme Karen Kraft Sloan: Et de toute évidence, vous avez beaucoup travaillé pendant toute votre vie pour atteindre une certaine sécurité financière pour vous-même et votre famille. En cherchant quelque chose d'aussi simple que de l'information sur un examen préalable concernant une évaluation environnementale particulière, vous avez dû sacrifier tous les biens que vous aviez acquis, toutes vos économies.

    Si nous examinions ce qui s'est produit dans ce cas. Vous avez aussi mentionné que l'AINC a annoncé le financement d'un projet et a entrepris l'évaluation environnementale après cette annonce. Est-ce exact?

+-

    M. John Lavoie: Oui, c'est exact.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Si nous examinons l'article 10 de la Loi, il y est dit que «Avant la réception par une personne ou un organisme de la part d'une autorité fédérale, d'une aide financière»--et je laisse les membres lire le reste de l'article. Mais il y est aussi dit «et avant la prise d'une décision irrévocable». J'estime que le gouvernement fédéral ne communique pas d'avis concernant le financement de projets sans avoir pris certaines décisions irrévocables.

    Donc, nous avons maintenant, un ministère du gouvernement qui contrevient à sa propre loi. Comment est-il puni? Quelle amende a-t-il dû payer?

+-

    M. John Lavoie: Il n'y a aucune conséquence pour le ministère. Et la LCEE est très claire à ce sujet: l'évaluation gouvernementale doit précéder toute prise de décision. J'ai oublié de mentionner que les évaluations environnementales concernant un projet mené par divers ministères fédéraux sont également censées être synchronisées, ce qui n'a pas été le cas ici.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Nous nous retrouvons donc avec une situation où un simple citoyen a dû sacrifier toutes ses économies pour ne faire que ce qu'il estimait être son devoir de citoyen, c'est-à-dire s'informer au sujet d'une situation qui touche sa collectivité. Or, un ministère n'a pas respecté sa propre loi, mais il n'a pas payé pour son erreur.

    J'aimerais d'abord demander à M. Lavoie si, en vertu du projet de loi C-19, la situation concernant l'accès à l'information a été réglée et, deuxièmement, si la situation de non-respect de la loi par un ministère a été réglée.

+-

    M. John Lavoie: Non, ces problèmes ne sont absolument pas réglés. Les brèches sont toujours présentes et interdisent la participation du public, en plus de la communication de certains documents, car cette dernière activité est entièrement à la discrétion du gouvernement fédéral.

    Un ministère qui ne se conforme pas aux dispositions de la LCEE doit en subir les conséquences.

    Quelle était déjà votre deuxième question?

À  +-(1025)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Vous avez répondu à mes deux questions, merci.

+-

    M. John Lavoie: Il doit y avoir un prix à payer pour ceux qui ne respectent pas la loi.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Absolument.

    Monsieur le président, puis-je poser une autre question?

    Le vice-président (M. Bob Mills): Allez-y.

    Mme Karen Kraft Sloan: Je crois comprendre que vous avez laissé entendre que les responsables du ministère des Pêches et des Océans ont établi que la zone des chutes ne constituait pas un habitat du poisson, même si elle faisait partie d'un refuge ichtyologique provincial. Je me demandais si vous saviez comment ils en étaient arrivés à une telle conclusion.

+-

    M. John Lavoie: Je n'en ai aucune idée. Il est clair qu'il s'agit d'un habitat du poisson, car cette zone est humide. Un spécialiste des pêches que j'ai engagé a déterminé que l'on aurait asséché jusqu'à 20 000 mètres carrés d'habitat du poisson, et que le plan de rétablissement des pêches prévoyait une mesure d'indemnisation qui ne s'appliquait qu'à 136 mètres carrés.

    Il s'agit bel et bien d'un refuge ichtyologique. Les poissons de ce secteur bénéficient d'une importante quantité de nourriture dans les divers bassins, ce qui explique en partie pourquoi ces chutes constituent un emplacement aussi productif.

    Si vous vous rendez sur place aujourd'hui, vous constaterez que la roche-mère est très évidente. Il n'y a qu'un mince filet d'eau qui coule dans les deux canaux principaux, lorsque tout est en règle. Les promoteurs doivent assurer un débit de base de un mètre cube par seconde dans les chutes au cours du semestre d'été.

    L'été dernier, les promoteurs se sont fait prendre, car ils ont acheminé toute l'eau vers les turbines. Il s'agit là d'un délit très grave, dont le MPO et la province ont été avisés. Et pourtant, il a fallu un mois avant qu'un ordre de fermeture ne soit émis. En gros, personne ne s'assure que les conditions du gouvernement fédéral liées au projet sont respectées.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Est-ce que l'entreprise a dû payer une amende?

+-

    M. John Lavoie: Les responsables du MPO m'ont dit qu'ils n'avaient pas l'intention d'en imposer une. Ils ont discuté avec le ministère provincial des Richesses naturelles et celui de l'Environnement, je crois. Les responsables de ce dernier ont procédé à une enquête assez exhaustive. Ils se sont rendus sur place à de nombreuses reprises. D'après ce qu'ils viennent tout juste de me mentionner, ils ont envoyé tous les documents à leurs avocats, et ils ont recommandé que des accusations soient portées contre le promoteur de l'emplacement. Cependant, le MPO ne semblait pas vouloir s'en mêler.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Mais cela ne l'a pas trop gêné lorsqu'il est allé chercher vos économies, n'est-ce pas?

+-

    M. John Lavoie: C'est exact.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président. Malheureusement, je dois me rendre à une autre réunion dans quelques minutes.

    Permettez-moi de vous dire que, traditionnellement, la participation fédérale-provinciale à ces dossiers s'est avérée très confuse. Prenons d'abord, au début des années 90, le cas où le ministère des Richesses naturelles de l'Ontario a disséminé le processus de prise de décision parmi les régions au lieu de le limiter au cabinet du ministre. Et ce n'est là qu'un des problèmes.

    Étant donné que le ministère des Richesses naturelles de l'Ontario a également administré la Loi sur les pêches au nom du gouvernement fédéral jusqu'au milieu des années 90, je ne sais pas à quel moment le problème est survenu. Mais depuis 1990 environ, le gouvernement ontarien n'a adopté aucune politique relative aux rejets sur place. Il vient tout juste d'élaborer une déclaration--qui fera l'objet d'audiences--concernant une politique de gestion des eaux. Il y avait une politique en 1986, mais elle a été abandonnée en 1990.

    Enfin, j'aimerais mentionner pour le compte rendu que le processus de prise de décision est provincial en ce qui a trait à l'approbation des projets à proprement parler. Je me demande donc pourquoi le gouvernement ne prend pas part à votre poursuite. II constitue le principal intervenant dans ce dossier, et il n'a pas renouvelé à ce jour de politique relative aux rejets sur place dans le cas des projets hydroélectriques.

À  +-(1030)  

+-

    M. John Lavoie: J'avais l'intention de mentionner la province dans ma poursuite, mais le processus suivi par la province pour ce type de projet n'est pas défini dans la loi. On y retrouve plutôt des lignes directrices non obligatoires en droit. Un gros manuel, intitulé «Waterpower Program Guidelines», décrit le processus que la province était censée suivre pour en arriver à l'approbation du projet. Nous n'avons pu convaincre la province de se conformer aux lignes directrices, et elle n'a pas été forcée de le faire vu que ces règlements n'étaient pas obligatoires en droit.

    L'autorisation du ministère des Pêches et des Océans était la plus importante dans le cadre de ce projet, car on s'apprêtait à détruire un habitat du poisson. Sans cette autorisation, le projet n'aura tout simplement pas eu lieu.

+-

    M. Julian Reed: Vous avez raison, l'utilité de ces soi-disant lignes directrices s'est anéantie en 1990, étant donné que le processus de prise de décision est passé du cabinet du ministre aux régions; ce changement, à mon avis, est une énorme erreur qui est la cause probable d'une grande partie de la confusion qui règne depuis entre le MPO et le ministère de l'Ontario. Je vous remercie d'avoir soulevé et présenté ce point. Je ne sais pas pourquoi on ne vous a pas immédiatement donné accès aux documents.

    Pour ma part, monsieur le président, je vais procéder à une enquête afin d'essayer d'obtenir des réponses.

    Merci beaucoup.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Madame Redman.

+-

    Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

    J'ai plusieurs questions. J'aimerais poser la première à M. Cunningham et à M. Sinclair. J'ai sous les yeux le mémoire que l'on vient tout juste de faire circuler.

    Le paragraphe 38(5) du projet de loi C-19 reconnaît que la gestion adaptée peut jouer un rôle dans l'évaluation environnementale. Le projet de loi stipule qu'au cours de l'exécution d'un programme de suivi, si des effets non intentionnels surviennent et qu'ils doivent être éliminés, les résultats de ce suivi pourront servir à la mise en oeuvre des méthodes de mesure de la gestion adaptée. Quelle est votre opinion sur cette disposition du projet de loi?

+-

    M. Allan Cunningham (vice-président, Ressources humaines, Affaires communautaires et développement durable, Suncor Energy, Athabasca Oil Sands Developers): Nous reconnaissons le paragraphe 38(5) proposé... La gestion adaptée dont il y est question constitue essentiellement une définition. Ce que nous suggérons d'abord, c'est que, par le biais de l'amendement proposé que nous avons fait circuler, nous incluions la gestion adaptée dans la définition de l'atténuation des effets afin d'utiliser concrètement cette définition dans la loi.

    Ensuite, on pourrait reconnaître les mesures d'atténuation en fonction de la capacité du gouvernement fédéral à déléguer son pouvoir à d'autres autorités de façon adéquate. Cela rejoint la discussion portant sur la CEMA qui a eu lieu plus tôt. Nous croyons que la CEMA, du point du vue de l'industrie, est un modèle de classe mondiale.

    L'un des aspects de la CEMA dont nous n'avons pas tellement parlé ce matin, c'est qu'elle se penche aussi sur les effets cumulatifs, qu'il s'agisse de l'air, de l'atmosphère, de l'eau et du reste. Nous estimons que nous disposons d'un organisme de premier ordre, dans le nord-ouest de l'Alberta, qui répond aux besoins qui sont remis en question aujourd'hui.

    Nous tenons simplement à nous assurer que, grâce à la LCEE, nous pourrons appliquer ce merveilleux modèle de façon à minimiser les disputes éventuelles entre les autorités provinciales et fédérales. La plupart du temps, nous sommes plutôt satisfaits de la façon dont le processus se déroule. Aujourd'hui, notre but consiste à améliorer ce processus et à nous assurer que la tendance se maintiendra.

    Ainsi, l'un des résultats que nous espérons obtenir par le biais des recommandations et des amendements que nous suggérons est l'amélioration du processus de prise de décision à tous les niveaux de réglementation, notamment aux niveaux fédéral, provincial et autres. De toute évidence, notre engagement en tant qu'industrie consiste à suivre cette ligne de conduite à la lettre.

    Enfin et surtout, nous pensons que, par le biais de la CEMA, nous pourrons créer--en fait, nous sommes déjà en train de le faire--un organe qui nous permettra de procéder à des évaluations environnementales globales nettement supérieures du point de vue des régions. C'est dans cette direction que nous voulons consacrer nos efforts en tant que promoteurs du nord-ouest de l'Alberta.

À  +-(1035)  

+-

    Mme Karen Redman: La gestion adaptée est perçue comme une mesure pouvant prêter à controverse par les ONGE, mais il est clair que vous êtes d'avis qu'elle accroîtrait le niveau d'exactitude du processus d'évaluation environnementale au lieu de l'atténuer.

+-

    M. Allan Cunningham: La raison en est simple: grâce à la CEMA, nous nous assurons maintenant de la participation de tous les intervenants au processus, y compris des ONGE. Les Autochtones et les ONGE sont déjà du nombre, et tous les paliers de gouvernement sont représentés, notamment le gouvernement fédéral. Tous les joueurs clés de l'industrie et du secteur de l'exploitation des sables bitumineux sont présents.

    Nous bénéficions donc d'une collaboration tout à fait unique et particulièrement efficace.

+-

    Mme Karen Redman: Monsieur le président, j'ai d'autres questions, mais je sais que mon collègue, M. Tonks, doit partir, et je crois que sa question a trait à ce sujet. Est-ce que je peux lui céder ma place et revenir plus tard?

    Le vice-président (M. Bob Mills): Certainement.

    Monsieur Tonks.

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais simplement, monsieur Sinclair, assurer le suivi et tenter d'établir un rapprochement entre le processus lié à la CEMA et le problème auquel M. Lavoie a été confronté jusqu'à un certain point. Je suis impressionné du soutien que vous avez obtenu par le biais du gouvernement de l'Alberta en ce qui a trait au processus touchant l'atténuation.

    Pour moi, atténuation veut dire suivi. Ce terme sous-entend une mise en oeuvre et une relation très étroite au cours de ce processus. Vous avez indiqué que les effets cumulatifs relevés par la CEMA font l'objet d'études et sont évidents dès le début, et je crois que cela est surtout vrai lors du processus d'examen préalable.

    Avez-vous l'impression--et j'aimerais bien que M. Lavoie réponde à cela, mais j'aimerais d'abord avoir votre avis--que ce processus, à grande échelle, aurait atténué le problème dès le début, nonobstant la question de l'accès à l'information et la façon dont cette dernière a ou n'a pas été rendue accessible? Pour ce qui est du processus total, pensez-vous qu'il soit possible de lui trouver une application?

+-

    M. George Sinclair: J'aurais quelques commentaires à faire, monsieur Tonks.

    Je pense que le processus que nous vous avons décrit est excellent, mais il ne s'est pas fait sans difficultés de croissance. J'aimerais également souligner que l'élément le plus important, lorsque vous procédez à n'importe quelle activité d'aménagement au Canada, c'est de réunir les bonnes personnes pour discuter des détails importants dès le début. Nous pensons que ce processus nous permet et nous a permis d'agir dans ce sens. Je suis dans le domaine depuis longtemps, et j'ai participé à des projets où nous ne disposions pas de cet outil, et ce à notre détriment ainsi qu'à celui de nos partenaires.

    Avec le temps, nous avons appris énormément en parcourant le pays quant à la bonne façon de collaborer, et ce processus permet de recueillir les meilleurs éléments et de les regrouper. Je ne vois pas pourquoi les concepts que nous avons appliqués ici en vue de rassembler dès le début les divers intervenants pour qu'ils s'occupent ensemble de ce genre de détails ne pourraient pas être repris ailleurs.

+-

    M. Alan Tonks: Monsieur Lavoie, vous aimeriez peut-être faire un commentaire.

+-

    M. John Lavoie: Si j'en juge par mon expérience en Ontario, s'il existe une échappatoire, on en profite. Certes, il est possible d'appliquer une certaine forme de gestion adaptative en fonction du site, mais je crois que c'est une question de négociation. Je ne sais pas dans quelle mesure la LCEE pourrait en tenir compte.

    Ceux qui ne respectent pas la loi doivent en subir les conséquences, mais ils doivent être fortement incités à s'y conformer. Actuellement, ce n'est pas le cas. Le non-respect de la loi n'entraîne pas de conséquences, il faut donc lui donner plus de mordant.

    M. Allan Tonks: Merci.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je trouve les propos de M. Lavoie plutôt étonnants. Je viens d'un milieu où les intervenants comme vous sont présents dès le début pour savoir ce qui se passe. Je suis plutôt étonné d'apprendre que vous n'êtes pas présent à la table de négociation dès le début. À mon avis, M. Sinclair l'a souligné de façon assez évidente.

    Ce sont les agents du MPO, munis de fusils et de gilets pare-balles, qui ont forcé la porte des bureaux du ministère provincial de l'Environnement. C'est ce qui s'est réellement passé. Selon nous, le MPO représente le pouvoir parce qu'il utilise la force lorsqu'il participe à un projet. S'il n'y avait ne serait-ce qu'un mené dans cette rivière, il déploierait toute sa force pour faire enquête. Alors, je trouve très étrange que ce que vous venez de dire puisse se produire.

    Comme M. Tonks et Mme Redman l'ont vaguement demandé, si la CEMA s'y était réellement intéressée, cette situation se serait-elle produite? Je pense que oui, Monsieur Lavoie, parce que vous auriez été présent à la table, et c'est vraiment ce dont il s'agit. Je crois qu'il est possible, si nous arrivons à libeller correctement ce projet de loi, de faire en sorte que tous les intervenants participent au processus dès le début.

    Personne n'a parlé du coordonnateur de l'évaluation environnementale. Lorsque j'ai lu le projet de loi la première fois, j'ai vraiment eu l'impression que c'était une bonne idée, parce que l'un des responsables de ce projet ne serait pas un représentant du gouvernement provincial, du gouvernement fédéral ou du secteur industriel. Personne n'en a parlé. J'aimerais savoir si vous croyez que c'est une bonne idée. Est-ce un point positif de ce projet de loi?

À  +-(1040)  

+-

    M. John Lavoie: Il existe toujours des échappatoires. Le coordonnateur peut, à son gré, demander que des documents soient fournis ou que le public soit autorisé à participer. Mais si j'en juge par mon expérience en Ontario, on tire toujours parti des échappatoires.

    La nomination d'un commissaire peut être une bonne idée, mais son rôle doit être défini très clairement, et la loi doit être resserrée afin d'éliminer les échappatoires.

+-

    M. George Sinclair: À mon avis, il faut toujours s'efforcer de limiter la bureaucratie. Nous devons établir des processus qui ne sont pas trop complexes. Ils doivent être simples et il faut éviter qu'ils soient entravés par la bureaucratie, de sorte que le public canadien puisse s'y retrouver plus facilement.

    En Alberta, lorsque nous faisons une demande pour l'exploitation de sables bitumineux, par exemple, nous présentons des demandes à la commission de l'énergie et des services publics et au ministère de l'Environnement, qui nomment chacun un chef d'équipe chargé de rassembler l'information fournie par d'autres ministères provinciaux et d'assurer la liaison avec les groupes fédéraux. Une certaine coordination est donc assurée, mais le changement ne s'est pas produit du jour au lendemain. Nous avons tiré la leçon de l'expérience. Il faut arriver à simplifier les choses et à limiter la bureaucratie. C'est la réponse que je vous fais.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Scott.

+-

    M. Ian Scott: Certes, l'ACPP est en faveur de la nomination d'un coordonnateur fédéral de l'évaluation environnementale. C'est un moyen, selon nous, de s'assurer que toutes les parties intéressées sont réunies à la table de négociation dès le départ. Mais nous estimons également que dans certains cas, une fois le processus lancé, il est préférable que l'autorité responsable prenne des décisions plutôt que de servir d'intermédiaire.

    L'absence des ministères à la table de négociation dès le départ crée beaucoup d'incertitude. Nous sommes donc en faveur des propositions que contient le projet de loi.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Nous allons maintenant passer à la deuxième table ronde.

    Nous vous avons oublié, monsieur Laliberte. Je vous ai fait sauter votre tour. Je m'en excuse. Il s'agit toujours de la première table ronde.

+-

    M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Ma question s'adresse aux représentants du groupe Athabasca Oil Sands Developers. En ce qui concerne la gestion des effets environnementaux cumulatifs dont vous parlez, pour dire les choses simplement, vous l'avez peut-être oublié en aval de la rivière Clearwater, mais la Saskatchewan n'a pas été consultée. Cependant, il est possible que le gouvernement provincial l'ait été sans que la communauté soit au courant.

    Dans le nord de la Saskatchewan, les gens savent, lorsqu'ils regardent Bill Matheson à la télévision, que le temps est une journée en retard en Saskatchewan. C'est un phénomène météorologique auquel les gens de l'Ouest sont habitués. En réalité, outre le temps, les particules provenant des sables bitumineux se déplacent elles aussi, et personne ne nous a dit s'il y a un danger ou des conséquences sur les plans écologique et économique. Nous parlons plutôt des répercussions socio-économiques.

    Dans ce secteur, il y a un énorme bassin hydrographique que la Saskatchewan a désigné parc provincial. La source qui coule en Alberta est donc très propre. Nous veillons à conserver la qualité de nos cours d'eau en leur accordant le statut de parc.

    De l'autre côté, un très gros projet d'exploitation est en cours, et nous nous posons cette question: Quand viendra-t-on nous demander si l'environnement en subit les effets de notre côté? Je me rappelle qu'en 1998, lorsque le projet a été annoncé, j'étais très enthousiaste. Je me disais: On va s'assurer que tout se passe bien. Mais personne n'est venu. Prévoyez-vous le faire? Existe-t-il un plan visant à élargir l'évaluation des effets cumulatifs? S'agit-il simplement d'un oubli de votre part, ou est-ce que vos activités n'ont aucune incidence sur notre région?

À  +-(1045)  

+-

    M. George Sinclair: Ce sont là de bonnes questions. Je vais vous répondre, puis je demanderai à M. Cunningham s'il veut ajouter quelque chose.

    J'ai oublié de dire que le gouvernement de la Saskatchewan est représenté au sein de la CEMA. Je ne connais pas le nom de son représentant, mais on peut penser que cette personne est en rapport avec des responsables de la province et qu'elle les tient informés de ce qui se passe.

    Je n'ai pas d'autres commentaires à faire à ce sujet. Peut-être que M. Cunningham a quelque chose à ajouter.

+-

    M. Allan Cunningham: Tout ce que j'aimerais dire, c'est que tous les ministères fédéraux sont représentés au sein de la CEMA. Nous nous donnons beaucoup de mal pour réunir tous les intervenants autour de la même table afin d'en arriver à un consensus.

    La CEMA est un organisme de recommandation. Son rôle consiste à rassembler l'information, y compris les données scientifiques--quelques-uns des meilleurs spécialistes du monde font partie de notre équipe--, qui servira à formuler des recommandations. C'est sur ces recommandations que l'autorité chargée de la réglementation fonde ses décisions. Nous cherchons donc à réunir le plus d'information possible, en tenant compte des données actuelles et nouvelles, afin de permettre aux organes de réglementation de prendre des décisions éclairées.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Sinclair, peut-être pourriez-vous indiquer au comité le nom du représentant de la Saskatchewan, de sorte que nous puissions en informer tous les membres du comité, et en particulier M. Laliberte.

+-

    M. George Sinclair: C'est ce que je vais faire, monsieur le président.

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

+-

    M. Rick Laliberte: Laissez-moi vous donner un exemple pour montrer à quel point nous sommes liés. Un orignal albinos a été aperçu l'été dernier à Fort McMurray, et la nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre dans notre patelin. L'intégration est profonde sur les plans écologique, culturel et même linguistique. Le peuple des Dénés a suivi le cours de cette rivière pendant des siècles. Une route commerciale importante s'étendait entre les deux réseaux fluviaux, la rivière Churchill et le fleuve Mackenzie. Je pense qu'il ne faut pas l'oublier.

    Si j'étais vous, je réviserais ma position par rapport à la Saskatchewan en ce qui concerne le modèle d'évaluation et de gestion des effets cumulatifs. Je tiendrais compte des collectivités locales. De vastes régions peuplées constituent des territoires de piégeage. Je dirais qu'ils correspondent essentiellement aux limites de comté ou aux municipalités rurales dans le sud. Il y a des gens qui y vivent, et la connaissance traditionnelle pourra permettre d'évaluer les effets de tout cela sur l'environnement.

    Je vous propose donc d'étendre votre évaluation des effets cumulatifs. Ne vous limitez pas à la province parce que, pour nous, ça veut dire Regina, qui se trouve loin dans les prairies, là où l'on pouvait trouver des tas d'ossements autrefois. Nous vivons dans la brousse, dans le bouclier précambrien, au pays de l'eau douce. Consultez-nous parce que c'est dans notre région que se déroule votre projet. Je crois qu'il devrait en sortir quelque chose de bon.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Merci.

    Monsieur Bailey.

+-

    M. Roy Bailey: Nous vivons à une époque où il n'est plus possible de construire une route principale ou une autoroute reliant une autre autoroute sans modifier l'environnement ou la nature.

    Je me rappelle la période où les régions rurales de la Saskatchewan ont été électrifiées. Tout le monde voulait avoir l'électricité, mais personne ne voulait de poteau sur son terrain. L'histoire se répète aujourd'hui, 60 ans après. J'imagine que dans le nord de la Saskatchewan, où la SPC s'apprête à construire une ligne de transport d'énergie, les gens ne voudront pas qu'elle traverse telle ou telle forêt.

    D'une certaine façon, je comprends le point de vue des promoteurs, et encore plus aujourd'hui après cette brève rencontre, parce qu'on ne peut pas arrêter le progrès. On peut entraver sa marche, mais cela ne fera que le ralentir. Rien n'arrête le progrès.

    Nous réclamons d'autres types d'énergie. On envisage donc de construire un barrage. Le projet doit ensuite passer par toutes sortes d'étapes en vue de déterminer la façon dont l'énergie sera produite, etc., etc. Au moment d'élaborer le projet, tous les aspects sont-ils pris en considération? Dans le cas d'un pipeline, quelles routes et quelles rivières peut-on traverser? Des travaux d'arpentage sont-ils exécutés pour l'ensemble du trajet? Tous les propriétaires sont-ils avisés?

    Tout est-il fait au préalable? Est-ce la bonne façon de procéder?

À  +-(1050)  

+-

    M. George Sinclair: Il s'agit effectivement d'un processus complexe.

+-

    M. Roy Bailey: Colossal même.

+-

    M. George Sinclair: Les intervenants sont nombreux et il faut négocier avec tous ces gens. L'infrastructure est importante dans tous les projets.

    Dans le cas d'une installation ayant un emplacement central, l'électricité y sera acheminée, ou le gaz naturel par exemple. Un pipeline sera nécessaire pour transporter cette ressource. Il faut tenir compte de tout cela.

+-

    M. Roy Bailey: En négociant avec tout le monde, on finit forcément par tomber sur des gens qui ont une attitude négative ou intransigeante. On en rencontre toujours. La négociation avec ce genre de personne est-elle confiée à un groupe particulier ou est-elle intégrée à la gestion d'ensemble du projet? Cette tâche est-elle laissée, du moins en partie, à des groupes externes?

+-

    M. George Sinclair: Par exemple, à Petro-Canada, notre personnel traite directement avec les groupes d'intérêts. En outre, nous avons un conseiller des affaires communautaires qui s'occupe des projets particuliers liés aux sables bitumineux. Je participe aussi personnellement au dialogue avec les chefs des Premières Nations ou avec des citoyens de Fort McMurray, par exemple, sur certaines questions.

    Ce n'est pas simple. Nous vivons dans une société où tout le monde veut avoir son mot à dire. Nous devons aussi faire attention à notre façon de procéder. Nous devons nous assurer d'avance de l'engagement des gens. Parfois, les plans ne sont pas clairs au début, mais, à mesure que le projet évolue, ils s'éclaircissent et plus de personnes s'y engagent.

    Par exemple, il est possible de ne pas connaître le chemin que prendra un pipeline pour livrer un produit jusqu'à ce que vous discutiez avec un tas de personnes des conséquences de construire le pipeline d'une certaine façon ou pas. Vous pourriez préférer l'option C, comparée aux options A et B, après avoir fait le tour de la question. Le dialogue a une grande incidence sur le succès de votre projet et détermine si votre projet peut avancer ou non, selon que vous ayez obtenu toutes les approbations.

+-

    M. Roy Bailey: Il y a aussi des répercussions importantes sur le coût.

+-

    M. George Sinclair: Absolument.

+-

    M. Roy Bailey: Je vous remercie.

+-

    M. Ian Scott: Je crois qu'un autre point important est que le public ne voit que le résultat final d'un processus ou d'une décision. Il ne se rend pas compte que dans l'industrie du pétrole et du gaz naturel, dans la plupart des cas, les responsables d'entreprises doivent établir un dialogue avec les propriétaires des terres et avec le public avant même de soumettre un projet. Dans bien des cas, les négociations initiales précèdent les prises de décision pour un puits, une raffinerie, une station de compression ou même pour l'itinéraire d'un pipeline. Les discussions sont importantes.

    Malheureusement, il est parfois difficile d'en arriver à une entente et les dialogues se terminent en cour. Je crois que, lorsqu'il est question d'évaluation environnementale, le recours aux tribunaux n'est pas la meilleure solution.

+-

    M. Roy Bailey: Non, ce n'est pas possible.

    Je vous remercie.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Je ne peux pas passer outre à la remarque de M. Bailey voulant que le progrès est égal à la croissance et au développement. Je peux citer de nombreuses situations où cela n'a pas été le cas.

    Permettez-moi de poser une question et peut-être même d'exprimer mes inquiétudes concernant la méthode de gestion adaptée. Est-ce que cette méthode n'est pas, dans certains cas, utilisée comme une façon de détourner le processus d'évaluation environnementale, plutôt que pour protéger l'environnement? Je peux entrevoir trop de situations potentielles où cela pourrait se produire, où des questions qui ont besoin d'être prise en considération, et qui le seraient dans le contexte d'un processus d'évaluation environnementale, sont carrément mises de coté. J'aimerais obtenir des commentaires de M. Sinclair ou de M. Scott, à savoir si mes inquiétudes sont fondées ou non.

À  +-(1055)  

+-

    M. George Sinclair: Je comprends votre point de vue, mais selon mon expérience et les projets que nous promouvons, en particulier en Alberta d'où je tire la plus grande partie de mon expérience--j'ai aussi une expérience de projets à l'échelle nationale, mais je m'en tiendrai à l'exemple de l'Alberta--il est primordial d'effectuer des évaluations environnementales. Nous en avons besoin, car elles font partie des documents exigés par les organismes de réglementation qui ont la charge d'approuver un projet. C'est une étape importante dans le cas de la plupart des projets pour lesquels j'ai travaillé dans la province. Selon mon expérience, je ne peux concevoir que nous ayons essayé de contourner le processus d'évaluation environnementale.

+-

    M. Joe Comartin: Vous proposez qu'une évaluation environnementale soit effectuée en premier, comme que vous le dites, en tant que point de départ pour...

+-

    M. George Sinclair: Exactement. Lorsque nous faisons notre demande, monsieur Comartin, nous soumettons des formulaires au EUB et à l'Alberta Environmental Protection. L'évaluation environnementale fait partie des exigences de l'Alberta Environmental Protection. Elle y est.

+-

    M. Joe Comartin: Êtes-vous en train de proposer de changer les étapes du processus?

+-

    M. George Sinclair: Non.

+-

    M. Allan Cunningham: J'aimerais ajouter un commentaire.

    Comme l'a mentionné M. Sinclair, l'évaluation environnementale fait partie de toute soumission. Ces évaluations sont obligatoires. Manifestement, le but visé de la CEMA est de les améliorer et de les effectuer plus efficacement. Nous nous référons à la gestion adaptée aujourd'hui afin de nous assurer, au moyen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, que nous puissions avoir accès à cet outil, CEMA, pour nous permettre de faire de meilleures évaluations environnementale et aussi des suivis. Le but de notre présence ici aujourd'hui est d'ajouter, et non de réduire, de la valeur à cette question très importante, selon une perspective canadienne.

+-

    M. Ian Scott: Je crois aussi que la gestion adaptée, telle que je la comprends, ne doit pas remplacer l'évaluation environnementale. C'est le processus qui rend presque l'évaluation environnementale--les programmes de suivi--la plus dynamique possible. Je peux vous donner des exemples où, dans le passé, une entreprise a proposé d'utiliser une technique particulière--qu'elle aura soit proposée ou été contrainte d'utiliser par les organismes de réglementation--et au cours du suivi, elle a été en mesure de démontrer que la procédure proposée était soit très efficace ou une perte de temps. Alors, je crois que la gestion adaptée peut être un outil très utile pour nous permettre de déterminer si une procédure fonctionne, si ont doit l'utiliser plus souvent ou si elle ne fonctionne pas. Je ne crois pas qu'elle doive remplacer l'évaluation environnementale, mais elle peut contribuer à en améliorer le processus--pour vérifier si ce qui a été proposé a bien fonctionné. Je ne vois pas la gestion adaptée comme une solution de rechange de l'évaluation environnementale.

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je vous remercie beaucoup.

    Madame Redman.

+-

    Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

    Vous avez mentionné ceci brièvement dans votre premier exposé, mais, selon vous, qu'est-ce qui constitue un accès à l'information convenable pour le public?

+-

    M. John Lavoie: Dans mon cas en particulier, cela aurait voulu dire que j'aurais eu accès aux documents au moment où je les ai demandés. J'ai dû aller en cour pour obtenir les documents. C'était la seule façon de les obtenir tandis que le projet avait déjà été approuvé et était en construction. Ce n'est pas acceptable. L'accès à l'information convenable pour le public signifie qu'on peut mettre en oeuvre le registre immédiatement et obtenir tous les documents au fur et à mesure qu'ils sont disponibles.

    Je sais que le projet de loi C-19 prévoit mettre sur pied un registre électronique. En plus de déposer les documents dans le registre électronique, il faut aussi fournir des copies papier. Beaucoup de personnes ne sont pas cultivées en informatique et n'ont pas accès à l'Internet. Sur demande, ces personnes pourraient obtenir des copies papier des documents du registre.

    Aussi, une autre question liée à l'évaluation environnementale est que, tout d'abord, le public doit être informé du processus et la meilleure manière de le renseigner est de publier le processus dans les journaux locaux. S'il y a une évaluation gouvernementale en cours, la population doit en être avertie et la meilleure façon de le faire est au moyen des médias locaux.

+-

    Mme Karen Redman: Alors, vous appuyez le registre électronique, mais vous souhaitez aussi la conservation des documents papier et l'accès à ces documents?

    M. John Lavoie: C'est exact.

    Mme Karen Redman: Je vous remercie.

    

    

Á  +-(1100)  

+-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Monsieur Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je vais surtout m'adresser au Comité Kativik, à qui j'aimerais poser quelques questions. D'abord, si j'ai bien compris, vous avez déjà une convention qui répond à toutes les exigences importantes en matière d'évaluation environnementale, et vous considérez cette dernière plus complète, dans la mesure où elle prend en considération des facteurs socio-économiques et d'autres facteurs qui sont propres à votre culture. Parce qu'à votre avis, ces éléments ne se trouvent pas dans la Loi sur l'évaluation environnementale actuelle, vous souhaiteriez qu'on utilise votre convention intégralement et que le projet de loi C-19 ne s'applique en aucun cas à vos territoires. Jusqu'à maintenant, c'est exact?

    Y a-t-il, dans la loi actuelle, un ou des éléments qui pourraient compléter votre convention? Étant donné que cette dernière a été signée il y a une trentaine d'années déjà, certains éléments de la loi actuelle pourraient peut-être bonifier votre convention, faire en sorte qu'il y ait un heureux mélange des deux parties, ou que l'aspect juridique de votre convention soit plus complet. Aimeriez-vous, au contraire, qu'on n'utilise que la convention et qu'on ne tienne compte d'aucun des éléments du projet de loi C-19?

+-

    Mme Paule Halley: Notre convention est également celle du Parlement du Canada puisqu'elle a été signée par le fédéral. Nous sommes un comité consultatif; nous nous assurons que la convention est appliquée et respectée. Nous ne pouvons représenter le point de vue des Inuits. De fait, s'ils étaient consultés par les autorités fédérales, ces derniers diraient peut-être que la loi canadienne améliore le processus, puisque celui-ci est vieux de 25 ans. C'est donc avec les Inuits que devront se tenir les discussions et on ne devrait pas présumer de leur position à ce sujet. Le comité ne juge pas que la loi est bonne ou mauvaise, mais fait valoir le fait que le fédéral applique déjà un processus dans cette région et que ce dernier est né d'une négociation conclue avec une autre partie. Consulter l'autre partie avant de changer les règles du jeu est élémentaire. C'est ce que Comité consultatif dit au fédéral, et on souhaiterait que la loi soit claire à cet égard parce que l'expérience démontre que ce n'est malheureusement pas le cas.

    C'est une loi du Parlement du Canada qui a mis cette convention en vigueur. Le Parlement devrait donc être cohérent avec lui-même et conserver la valeur de ces conventions signées avec les autochtones du Canada. Le Parlement ne peut pas changer les règles du jeu en adoptant de nouvelles lois sans consulter les parties avec lesquelles il a conclu une entente. Il s'entend sur des régimes particuliers.

    Comme vous l'avez dit, il est exact que le régime est révolutionnaire comparativement à bien d'autres régimes d'évaluation environnementale. On évalue l'impact des projets de développement économique sur le milieu social et on cherche à préserver les traditions, les coutumes et les activités traditionnelles des peuples nordiques en matière de chasse, de pêche, etc. La loi canadienne n'accorde aucune garantie aux Inuits à cet égard. Mais le Comité consultatif ne doit pas se substituer à la partie inuit.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Si je comprends bien, vous recommandez qu'il y ait une consultation pour s'assurer que dans ce projet de loi, on prenne en considération ce qu'on ne prend pas en considération maintenant, c'est-à-dire une évaluation sociale. La convention, même si elle était tout à fait pertinente il y a 30 ans, à sa signature, a peut-être besoin d'être bonifiée aujourd'hui. Il faut s'assurer qu'on sera bien servis par une loi qui pourrait bonifier une convention dont certains éléments sont peut-être absents. Donc, vous recommandez surtout qu'il y ait une consultation auprès des peuples inuits pour s'assurer... Non?

Á  -(1105)  

+-

    Mme Paule Halley: Non. On souhaite qu'il soit reconnu que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'applique pas aux projets sur des territoires où s'appliquent d'autre régimes déjà reconnus par le gouvernement du Canada, et que cela soit inscrit dans la loi elle-même. Si la convention est modifiée de manière à prévoir l'application de la loi canadienne, à ce moment-là, la convention va continuer à s'appliquer puisqu'elle dira que la loi canadienne s'applique.

    On ne veut pas juste consulter la partie inuit. On veut modifier une entente qui a été conclue avec les Inuits il y a 25 ans. Ce n'est pas une loi du Parlement qui peut changer ce que les Inuits veulent faire ou ne pas faire en matière d'évaluation environnementale.

    On vous demande de prévoir que la convention a prépondérance sur la loi canadienne et on invite les autorités fédérales, si elles veulent changer les règles du jeu, à aller négocier avec les personnes avec lesquelles elles ont établi les règles du jeu. Ce seront toujours ces règles qui s'appliqueront et, si ces personnes choisissent la loi canadienne, elles la choisiront.

+-

    Mme Hélène Scherrer: J'ai un peu de difficulté à voir si c'est l'oeuf ou la poule qui vient d'abord. Souhaitez-vous que la convention s'applique, quitte à ce qu'on y ajoute des choses intéressantes que vous trouveriez dans la loi, ou si vous souhaitez que la loi elle-même prenne en considération des éléments de la convention et les applique?

+-

    Mme Paule Halley: Nous souhaitons qu'on reconnaisse la préséance de ce type de traité et qu'on permette à la partie inuit de reconnaître que la loi canadienne mérite application si elle le désire. Ce sera à la partie inuit de négocier cela avec le fédéral.

+-

    M. Michael Barrett: Il y a des façons de changer le processus dans la convention. Cependant, c'est une convention par laquelle les Inuits cédaient certains droits, et on ne peut pas faire de changements sans que la partie inuit soit d'accord sur ces changements.

[Traduction]

-

    Le vice-président (M. Bob Mills): Je vous remercie. Nous n'avons plus de questions.

    Je remercie nos invités. Je crois que nous avons largement couvert la question. M. Lavoie nous a parlé de l'intérêt du public. Je vous remercie beaucoup, monsieur Lavoie, de nous avoir présenté votre point de vue. Je suis persuadé que vous parlez au nom de centaines de personnes dont nous ignorons l'existence. Puis nous avons parlé de la question des Premières Nations et des représentants de l'industrie sont présents. Je crois que le groupe d'invités que nous avons entendu aujourd'hui était bien équilibré.

    À titre d'information, le Comité poursuivra ses audiences sur le projet de loi C-19 et, en bout de ligne, procèdera à l'examen paragraphe par paragraphe avec les modifications. Le projet de loi C-5 a quelque peu perturbé le cours de nos audiences, mais nous y parviendrons.

    Je vous remercie d'être venus.

    L'audience est levée.