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PACC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PUBLIC ACCOUNTS

COMITÉ PERMANENT DES COMPTES PUBLICS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 5 juin 2001

• 0939

[Traduction]

Le président (M. John Williams (St. Albert, AC)): Bonjour à tous.

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Bonjour, monsieur Williams.

Le président: Bonjour, monsieur Harb.

Tout le monde est en pleine forme ce mardi matin.

Conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, nous étudions le chapitre 15,«Santé Canada—La santé des Premières nations: suivi», du rapport du vérificateur général du Canada d'octobre 2000.

• 0940

Nous nous écartons de notre procédure normale qui consiste à accueillir des hauts fonctionnaires du gouvernement. Ce matin, nous rencontrons Mme Lorraine Stonechild, de Saskatoon, en Saskatchewan. Nous vous souhaitons la bienvenue à titre personnel. Nous avons appris que vous aviez perdu votre frère et votre fils, et au nom du comité, je tiens à vous adresser mes condoléances les plus sincères. Nous souhaiterions aussi entendre votre histoire et nous vous sommes très reconnaissants d'être venue nous rencontrer ce matin.

Ne soyez pas intimidée par les personnes présentes dans cette salle. Nous ne sommes que de simples citoyens qui essaient de gérer ce pays du mieux possible. Quand nous constatons des problèmes, nous essayons de les régler. Nous voulons essayer de vous aider ainsi que votre peuple. Nous vous sommes reconnaissants d'être venue nous rencontrer.

Nos autres témoins viennent de Santé Canada. Il s'agit de M. Ian Potter, sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, du Dr Peter Cooney, directeur général intérimaire, Services de santé non assurés, et de M. Harry Hodes, directeur général adjoint, Alberta-Territoires du Nord-Ouest, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits. Nous rencontrons aussi des représentants du Bureau du vérificateur général: M. Ronnie Campbell, directeur principal, Direction des opérations de vérification, et M. Glenn Wheeler, directeur des opérations de vérification.

Je pense que nous allons commencer par une déclaration liminaire du représentant du Bureau du vérificateur général, suivie d'une déclaration liminaire du représentant de Santé Canada. Il n'y aura évidemment pas de déclarations initiales de Mme Stonechild, mais nous allons dialoguer avec elle.

Elle va faire une brève déclaration.

Monsieur Campbell, nous commençons par vous.

M. Ronnie Campbel (directeur principal, Direction des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de façon plus approfondie des résultats de notre vérification de Santé Canada, «La santé des Premières nations: suivi», qui se trouve dans le chapitre 15 du rapport de 2000, déposé en octobre. Je suis accompagné de M. Glenn Wheeler, directeur des opérations de vérification.

En 1993 et 1997, nous avions fait rapport sur la gestion, par Santé Canada, des programmes de santé des Premières nations. Les problèmes soulevés dans notre dernier rapport ne sont donc pas nouveaux. Après chaque vérification, le ministère a accepté nos recommandations et s'est attelé à régler les problèmes cernés.

Comme nous l'avons indiqué dans notre dernier rapport, nous craignons que le ministère n'ait pas encore fait suffisamment de progrès pour régler nombre des problèmes cernés. Nous sommes toujours des plus inquiets du fait que le programme permette à des personnes d'avoir accès à des quantités extrêmement importantes de médicaments prescrits.

[Français]

Monsieur le président, les faiblesses que nous avons observées ont des conséquences importantes. Il est essentiel que des mesures correctives soient prises rapidement.

Notre rapport de 2000 contient des observations tant sur les accords de contribution que sur les ententes de transfert, ainsi que sur plusieurs aspects des services de santé non assurés. Comme suite aux discussions de notre dernière audience du 5 avril, nous aimerions présenter brièvement quelques points sur les médicaments prescrits. Toutefois, nous serions heureux de répondre à toute question que le comité pourrait avoir sur les questions abordées dans le chapitre.

Il est important de maintenir une distinction entre les divers systèmes que Santé Canada a mis en place, ce à quoi ils servent et les résultats que l'on peut en attendre.

[Traduction]

Premièrement, le ministère a mis en place un contrôle sur les médicaments prescrits grâce à un système de traitement aux points de service. Ce système avertit le pharmacien avant qu'il ne remplisse l'ordonnance. Il signale les possibilités de médicaments en double et d'interaction entre les médicaments.

Deuxièmement, le ministère peut surveiller rétrospectivement l'utilisation globale des médicaments, et suivre l'utilisation des divers types de médicaments par région. Cela peut permettre d'établir les tendances de l'utilisation et les pratiques de prescription par médecins.

Troisièmement, le ministère peut surveiller rétrospectivement l'utilisation des médicaments par patient. Nous avons remarqué que ces analyses avaient déjà permis au ministère d'intervenir rapidement. Cependant, selon la vérification, ces interventions ont pris fin.

Enfin, le ministère a établi divers contrôles sur les paiements. Ceux-ci comprennent des vérifications automatiques et des vérifications des fournisseurs.

• 0945

Monsieur le président, en discutant des réponses de Santé Canada à nos recommandations, il pourrait être utile de maintenir ces distinctions.

Globalement, les mesures prises par Santé Canada comme suite à notre vérification de 1997 ne répondent pas adéquatement à nos observations et recommandations ni à celles du comité. Il faut que le ministère déploie des efforts continus et soutenus pour mettre en oeuvre toutes les recommandations.

Monsieur le président, voilà qui conclut ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.

Le président: Merci, monsieur Campbell.

Nous passons à une brève déclaration de M. Potter.

M. Ian Potter (sous-ministre adjoint, Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, Santé Canada): Merci, monsieur le président.

J'ai remis un document supplémentaire au comité, et je pense que les membres du comité en ont reçu un exemplaire. Il vise à répondre à certaines des questions que vous m'aviez posées la dernière fois que je suis venu, le 5 avril.

Nous faisons actuellement traduire les documents que vous nous aviez demandés à l'époque, et dès que la traduction sera prête, nous vous transmettrons ces textes.

Au cours de mon exposé d'ouverture, j'aimerais aborder quelques points. Je parlerai tout d'abord de l'utilisation à mauvais escient de médicaments prescrits dans la mesure où elle est reliée au programme des services de santé non assurés, en soulignant certaines des mesures prises par Santé Canada pour rectifier le problème; je parlerai aussi du rôle des autres organismes avec lesquels nous travaillons, du problème de la protection des renseignements personnels dans le contexte de l'utilisation de médicaments prescrits, et de nos plans futurs.

L'utilisation à mauvais escient de médicaments prescrits est un problème généralisé dont on ignore la pleine portée. Ce problème n'est pas limité à notre programme ou aux Premières nations et aux Inuits. Santé Canada s'est attaqué à ce problème depuis des années en éduquant le public et en faisant appel à des professionnels, en mettant en place des contrôles du programme des services de santé non assurés et en coopérant avec les provinces et les associations provinciales.

Je vous ai donné une comparaison de l'utilisation de médicaments contenant de la codéine et des benzodiazépines, qui sont les médicaments les plus courants utilisés à mauvais escient... Si vous prenez le tableau de la page 4 de mon mémoire, vous constatez que les bénéficiaires du programme des services de santé non assurés utilisent ces médicaments à peu près avec la même fréquence que les utilisateurs d'autres régimes publics.

Nous nous fondons sur une étude menée en 2000 qui nous a donné des informations sur le régime public de la Colombie-Britannique. Vous voyez que pour les bénéficiaires des services de santé non assurés, il y a environ 991 ordonnances de médicaments contenant de la codéine pour 1 000 bénéficiaires, contre 1 021 ordonnances dans le cadre du régime public de Colombie-Britannique. Les chiffres sont assez semblables pour les benzodiazépines.

Notre programme porte sur 700 000 bénéficiaires admissibles, et moins de 0,05 p. 100 de ces bénéficiaires ont dépassé la dose maximale recommandée de ces médicaments au cours d'une période de trois mois. Autrement dit, il s'agit d'un très faible pourcentage, mais c'est néanmoins une question importante pour ces personnes. Je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que, comme il s'agit d'un très petit nombre comparativement au nombre total de bénéficiaires admissibles, nous ne nous préoccupons pas des répercussions que cela peut avoir sur ces personnes.

Vous avez à la page 6 un tableau montrant l'évolution de l'utilisation des benzodiazépines et des médicaments contenant de la codéine. Comme le montre ce tableau, la quantité de médicaments contenant de la codéine et de benzodiazépines prescrits n'a guère changé au cours de cette période de cinq ans. Il y a un taux de croissance d'environ 2,9 p. 100 par an pour la codéine et d'environ 5 p. 100 pour les benzodiazépines. Cette croissance correspond à une croissance démographique d'environ 2,5 p. 100. Le nombre de clients augmente d'environ la moitié, et n'y a donc pratiquement aucune augmentation dans le cas de la codéine et qu'une augmentation d'environ 2 p. 100 par habitant pour les benzodiazépines.

• 0950

[Français]

Que faisons-nous? Santé Canada traite l'utilisation à mauvais escient de diverses façons. Nous avons installé un système électronique pour mettre en garde les pharmaciens contre les ordonnances en double et nous renouvelons le processus plus fréquemment. Nous fournissons des renseignements sur les agrégats aux organismes de réglementation. Nous faisons un examen permanent de la Liste des médicaments et radions de cette liste, au gré des besoins, certains médicaments utilisés à mauvais escient.

Les programmes de santé communautaire et des établissements ont de l'expertise en matière de traitement des toxicomanies liées aux médicaments prescrits. Nous avons introduit des programmes de sensibilisation et d'information au sujet de l'utilisation appropriée des médicaments prescrits et de la prévention de l'utilisation à mauvais escient à l'intention des premières nations et des Inuits. Nous avons mis en place la coordination de la surveillance de l'utilisation des médicaments avec les autorités provinciales, l'industrie pharmaceutique, les médecins et les pharmaciens.

[Traduction]

Depuis la mort tragique de Darcy Ironchild en 2000, Santé Canada a renforcé son dispositif d'examen de l'utilisation des médicaments. La plus importante de ces modifications est une surveillance plus étroite de l'annulation par les pharmaciens des messages sur l'utilisation des médicaments au moment de la présentation de la demande de paiement, et la mise en oeuvre de quantités maximales admissibles pour divers services pour lesquels une approbation préalable est requise.

Le système d'octroi de médicaments sur ordonnance dans le cadre de services de santé non assurés est complexe. Il fait intervenir les patients, les médecins, les pharmaciens, les organismes de réglementation tels que le Collège des médecins et chirurgiens et le Collège des pharmaciens, ainsi que les payeurs publics et privés de régimes.

Le programme des services de santé non assurés est le payeur du service. Ce n'est pas un organisme de réglementation des médecins ou des pharmaciens. Nous n'avons nullement mandat d'agir en tant qu'organe de régie.

La dernière fois que j'ai comparu, le comité m'avait demandé le nombre de renvois à des organismes de réglementation. Je vous soumets ces informations à la page 12, où vous pouvez voir que depuis 1996, 36 pharmaciens et 81 médecins ont été renvoyés aux organismes de réglementation, et que les mesures prises sont allées du retrait des privilèges de facturation des pharmaciens jusqu'à des condamnations au criminel.

Dans l'élaboration de notre politique et la gestion de notre programme de services de santé non assurés, il est important de trouver un équilibre entre les droits des 700 000 personnes que nous couvrons et les besoins du petit nombre de personnes dans le cas desquelles il risque d'y avoir abus des médicaments prescrits. Nous essayons donc de trouver l'équilibre approprié dans ce domaine.

Permettez-moi de vous citer une récente déclaration du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, George Radwanski, qui soulignait l'importance de la protection des renseignements personnels. Il disait que les informations personnelles sur la santé appartiennent à l'individu et à personne d'autre, et que c'est l'individu lui-même qui a le droit de décider qui peut obtenir cette information et à quelles fins.

En vertu des lois sur la protection des renseignements personnels, les informations sur les clients ne doivent pas être divulguées sans le consentement de ces clients. Comme je vous l'ai expliqué la dernière fois que nous sommes venus, nous travaillions avec l'Assemblée des premières nations et le Inuit Tapirisat du Canada à la mise en place d'un système de consentement qui nous permettrait de nous servir des renseignements personnels que nous recueillons pour intervenir en cas d'abus éventuels de médicaments prescrits.

• 0955

Pour l'avenir, nous envisageons de mettre en place diverses choses. Nous étendons la liste des médicaments avec les quantités maximales de concentration. C'est un système que nous avons récemment mis en place et qui limite la quantité d'un médicament que peut recevoir un patient. Si on lui en prescrit plus, l'alerte est déclenchée dans notre système, et il faut l'intervention du médecin pour dépasser cette limite.

Nous poursuivons aussi nos discussions avec des groupes de Premières nations et d'Inuits pour clarifier la question du consentement, et nous espérons pouvoir mettre en place à l'automne un dispositif réglant cette question. Nous accroissons aussi les activités de prévention grâce à des programmes renforcés d'éducation et de promotion.

Merci beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Potter. Nous allons maintenant passer à Mme Stonechild. Je crois que vous allez nous faire une déclaration initiale. Nous vous en remercions.

Mme B. Lorraine Stonechild (témoignage à titre personnel): Je veux vous parler à titre personnel de mon frère et de mon fils, et de leurs décès.

J'ai du mal à comprendre comment on a pu écrire 300 ordonnances pour mon frère sans aucun contrôle et sans en parler à personne. Je sais que le gouvernement avait toutes ces informations dans une base de données, et si ces informations avaient été communiquées, il serait peut-être encore en vie aujourd'hui. J'ai téléphoné à plusieurs reprises pour arrêter cela, mais personne ne m'écoutait.

Maintenant, il y a beaucoup de personnes là-bas qui se font prescrire des médicaments sur ordonnance, par deux médecins. J'aimerais qu'on arrête cela, et je souhaiterais que les Premières nations se guérissent elles-mêmes au lieu de s'appuyer sur des médicaments sur ordonnance.

Il y autre chose à propos de la codéine—vous venez d'en parler—c'est qu'elle est en vente libre dans les magasins. C'est un des médicaments dont on fait l'usage le plus abusif. Vous pouvez aller dans n'importe quelle pharmacie. J'en ai parlé, et les gens me l'ont dit. Quand je parle autour de moi, je rencontre toujours quelqu'un qui connaît une personne de sa famille qui est morte d'une surdose. Il faut arrêter cela. On ne peut pas laisser les gens des Premières nations continuer à mourir à cause de l'indifférence du gouvernement, des médecins et des pharmaciens. Il faudrait partager l'information pour arrêter cela.

Je vous en prie, modifiez cette situation le plus vite possible. Je ne veux pas que les gens continuent à mourir. Je veux que mes petits-enfants aient une vie saine, sans devoir se rabattre sur des médicaments pour cacher leurs sentiments, je veux qu'ils soient sains. Faites quelque chose, je vous en prie. Ne laissez pas cela se poursuivre. Je ne veux pas que mes petits-enfants aillent demander aux médecins de leur écrire des ordonnances. Nous voulons qu'ils soient en bonne santé. Nous avons besoin de gens en bonne santé. Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Stonechild, de nous avoir dit combien cela a été difficile pour vous, quel déchirement vous éprouvez, et combien il est important pour tous les habitants de ce pays de voir leurs enfants et leurs petits-enfants mener une vie saine dans un environnement sain.

• 1000

J'espère qu'avec cette réunion aujourd'hui nous allons commencer à nous engager sur la voie des changements que vous réclamez.

Nous allons maintenant entamer la période des questions avec M. Bryden.

M. John Bryden (Ancaster—Dundass—Flamborough—Aldershot, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je commencerai par dire que l'une des raisons pour lesquelles nous étions impatients d'entendre ce témoignage de Mme Stonechild et d'autres intervenants, c'est que notre comité est au courant de ce problème depuis un certain temps et que nous voulons absolument essayer de le régler le plus vite possible. Comme l'a dit M. Potter, nous ne savons pas combien de personnes sont touchées par ce problème, mais nous savons qu'il y en a qui sont peut-être en train de mourir, qui sont actuellement victimes des mêmes excès.

Madame Stonechild, je voudrais commencer par vous demander si vous pensez que ce problème touche particulièrement les Autochtones qui vivent en milieu urbain plutôt que dans des réserves. Est-ce que c'est une situation plus caractéristique des Autochtones qui vivent dans les villes?

Mme Lorraine Stonechild: Je pense que c'est plus fréquent en milieu urbain parce qu'on a accès à des médecins, qu'il y a des pharmaciens sur place et que les gens se renseignent pour savoir où ils peuvent trouver un bon médecin pour se faire prescrire des médicaments. Une ordonnance menant à l'autre, ils deviennent rapidement drogués. Ils se renseignent pour savoir quel médecin va leur faire une ordonnance. Je vois cela très souvent, je le vois partout.

Dans les réserves, ils n'ont pas aussi facilement accès à des médecins et à des pharmaciens. Ils sont obligés de partir en ville pour voir un médecin et trouver une pharmacie pour s'acheter les médicaments.

M. John Bryden: Monsieur Potter, vous dites que d'après vos études, le nombre de personnes qui abusent du système est relativement faible. Dans votre étude, faites-vous la distinction entre les Autochtones en milieu urbain et ceux qui vivent dans les réserves?

M. Ian Potter: Non, monsieur Bryden.

M. John Bryden: Vous n'avez donc pas d'idée de l'ampleur du problème en milieu urbain, que ce soit dans ma ville de Hamilton, à Saskatoon ou ailleurs.

M. Ian Potter: Non.

M. John Bryden: Je voudrais revenir à Mme Stonechild un instant.

M. Potter a dit qu'on essayait de trouver avec l'Assemblée des premières nations un accord sur une formule de consentement. L'Assemblée des premières nations parlerait-elle au nom des Autochtones qui vivent en milieu urbain si elle conclut une entente avec Santé Canada sur une formule de consentement? Est-ce que cela changera quelque chose?

Mme Lorraine Stonechild: Je pense que oui.

M. John Bryden: Comment? Que feront les gens?

Mme Lorraine Stonechild: Je pense qu'on fera plus d'effort pour essayer de savoir combien d'habitants des Premières nations se font prescrire des médicaments. Avec leur aide, ce sera un processus ouvert. Je pense que cela donnera d'excellents résultats. Si on le fait, ce sera fantastique.

M. John Bryden: J'aimerais vous poser une autre question, si vous me le permettez, monsieur le président. Il y a aussi le problème de la protection des renseignements personnels. Je voudrais vous poser une question hypothétique, concernant des personnes que vous connaissez dans votre environnement immédiat et qui ont ce problème ou qui connaissent des personnes qui ont ce problème d'abus des médicaments dans le cadre d'un régime de services de santé non assurés.

Serait-il excessif de la part de Santé Canada d'imposer aux bénéficiaires de ce régime une entente de divulgation en vertu de laquelle, s'ils s'inscrivent à ce régime pour obtenir des médicaments sur ordonnance ou non, ils devraient signer un accord de consentement autorisant la communication d'information sur leur identité aux autres pharmaciens et autres médecins? Est-ce que ce serait possible?

• 1005

Excusez-moi, la question est probablement inutilement compliquée, laissez-moi donc la formuler autrement. À votre avis, les gens seraient-ils prêts à renoncer à une partie de la protection accordée à leur vie privée en contrepartie d'un meilleur dépistage de ceux qui pourraient profiter abusivement du régime?

Mme Lorraine Stonechild: Je pense qu'au moment de consulter le médecin, il faudrait signer un formulaire de consentement de manière à ce que les médicaments prescrits puissent être retracés. Je sais que la Loi sur la protection des renseignements personnels joue un rôle important dans le domaine des médicaments prescrits, et je pense également que quiconque consulte un médecin devrait donner ce genre de consentement afin que personne ne puisse se cacher et que tout soit transparent.

M. John Bryden: Sans entrer trop dans les détails, pouvez-vous me donner une idée de ce qui s'est passé dans le cas des membres de votre famille? Ont-il consulté plusieurs médecins pour obtenir leurs ordonnances?

Mme Lorraine Stonechild: Oui.

M. John Bryden: Le problème venait-il du médecin ou de la pharmacie?

Mme Lorraine Stonechild: Du médecin, je crois, parce qu'ils en consultaient plusieurs auprès de qui ils savaient pouvoir facilement obtenir une ordonnance. Il faut du temps pour dépister cela. Les ordinateurs ne servaient à rien parce qu'ils n'étaient pas reliés entre eux, de sorte que mon frère et mon fils avaient beau jeu de consulter plusieurs médecins et plusieurs pharmacies. Apparemment, les ordinateurs devraient être mis à niveau afin de pouvoir déceler les cas d'utilisation abusive des médicaments prescrits. Mais je sais pertinemment bien qu'ils ont tous les deux consulté plusieurs médecins.

M. John Bryden: J'aurais une autre question à vous poser. Le problème ne se pose pas seulement dans le cas des médicaments prescrits, car il y a également le problème des médicaments en vente libre, n'est-ce pas?

Mme Lorraine Stonechild: En effet.

M. John Bryden: Vous y aviez fait allusion. Ici encore, sans parler uniquement de votre propre expérience familiale, savez-vous s'il y a en milieu urbain des problèmes similaires, c'est-à-dire des gens qui parviennent facilement à se procurer des médicaments en vente libre comme de la codéine? Il y en a bien d'autres encore auxquels je songe. Est-ce également le cas?

Mme Lorraine Stonechild: Oui, c'est très fréquent. La seule mention qui est faite de quelqu'un qui achète un flacon de Tylenol 1, c'est une signature au bas d'un papier. J'ignore avec quelle fréquence ils peuvent acheter des médicaments comme celui-là, tout ce que je sais c'est qu'ils doivent signer un morceau de papier. La codéine crée une forte accoutumance, et pourtant c'est un médicament qui est vente libre, même s'il est parfois prescrit. Il suffit d'aller dans une pharmacie, de signer un morceau de papier et de passer à la caisse. Cela ne figure nulle part dans le dossier des médicaments prescrits. Si vous consultez un médecin, il vous fait une ordonnance et vous vous faites dire que Santé Canada ne la rembourse pas, mais vous pouvez quand même acheter le médicament en question si vous le payez de votre propre poche, et il n'y aura rien dans les dossiers.

Le président: Merci, monsieur Bryden.

Incidemment, j'avais oublié de vous dire au début de la séance que la déclaration liminaire du représentant de Santé Canada et le document remis au comité seront déposés auprès du greffier dans les deux langues officielles. Si quelqu'un souhaite avoir un exemplaire de ce rapport, il est disponible.

Monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, AC): Merci, monsieur le président.

Madame Stonechild, vous nous avez dit que votre frère avait obtenu plus de 300 ordonnances, je crois.

Mme Lorraine Stonechild: C'est exact.

• 1010

M. Philip Mayfield: Vous nous avez également dit que les gens se concertaient pour obtenir le nom du médecin le plus accommodant.

Mme Lorraine Stonechild: En effet.

M. Philip Mayfield: Serait-ce de cette façon qu'il a réussi à obtenir un aussi grand nombre d'ordonnances?

Mme Lorraine Stonechild: Je crois bien, oui.

M. Philip Mayfield: En plus de ces 300 ordonnances, s'est-il également procuré des médicaments en vente libre?

Mme Lorraine Stonechild: En plus des médicaments prescrits, oui.

M. Philip Mayfield: Cela fait déjà très longtemps que ces ordinateurs et ces banques de données nous préoccupent et lorsque je dis «nous», je veux parler du comité.

Monsieur Potter, j'ai vraiment été déçu d'entendre ce que vous nous avez dit ce matin. En effet, rien de ce que vous nous avez dit ne nous a appris quoi que ce soit sur les progrès que vous avez réalisés avec votre ministère pour trouver une solution au problème. Je constate que ce dossier vous met beaucoup sur la défensive, mais je n'ai vu nulle part les progrès que le comité vous avait réclamés. Lors de votre dernière comparution, c'était le 5 avril je crois, nous vous avions demandé un rapport. La greffière du comité l'a-t-elle reçu?

M. Ian Potter: Non. Comme je vous l'ai déjà expliqué, ce rapport est en train d'être traduit et il sera disponible dès que la traduction sera prête.

M. Philip Mayfield: D'accord.

En ce qui me concerne personnellement, c'est un problème qui me préoccupe depuis que le vérificateur général nous a signalé qu'il remontait déjà à dix ans. Nous avons entendu les représentants du ministère nous dire qu'il fallait terminer la réalisation d'un logiciel. Ensuite, c'est le logiciel qui ne fonctionnait pas. Maintenant, on vient nous parler de la protection de la vie privée, qui empêche le ministère d'apporter une solution au problème. Ce qui me frappe ici, c'est que Mme Stonechild a suggéré une solution, en l'occurrence qu'on demande au patient qu'il accepte que les ordonnances qu'il fait remplir soient versées à son dossier, ce qui réglerait le problème de la protection de la vie privée. Il me semble donc qu'il y a bel et bien une solution.

Ce qui m'inquiète, c'est que nous avons entendu parler ce matin du problème sous sa forme sans doute la plus brutale, en l'occurrence des gens qui sont morts parce qu'ils se sont retrouvés dans un système qui leur permettait, pour une raison ou une autre, l'irresponsabilité du pharmacien ou du médecin... J'aimerais savoir très précisément quels sont les changements que vous avez mis en place depuis notre réunion du 5 avril. Pourriez-vous me les exposer, je vous prie?

M. Ian Potter: Je préfère demander au Dr Cooney de vous brosser un tableau des mesures que nous avons prises depuis le décès tragique de Darcy Ironchild, ainsi que des mesures que nous prenons actuellement; c'est-à-dire depuis notre dernière réunion.

Je présente mes excuses au comité si je lui ai donné l'impression d'être sur la défensive. La position de Santé Canada est que ce problème est grave. Nous prenons des mesures conformes au mandat que nous donne la loi pour apporter une solution au problème. Comme je l'ai déjà dit, il n'y a pas que Santé Canada qui ait les moyens d'intervenir dans ce dossier. Il n'empêche que nous le prenons très au sérieux. Je vais donc demander au Dr Cooney de vous faire part de quelques-unes des mesures importantes que nous avons prises pour apporter une solution à ce problème.

Dr Peter Cooney (directeur général intérimaire, Services de santé non assurés, Santé Canada): Comme nous vous l'avions dit en avril, nous intervenons sur plusieurs plans différents et en particulier, là où à mon avis nous avons d'excellentes chances d'apporter une solution au problème, en examinant de plus près les dérogations accordées par les pharmaciens. Comme l'a dit votre témoin précédent, les médicaments sont actuellement dispensés par un système de dérogation. Nous surveillons désormais de beaucoup plus près ces dérogations, comme le recommandait d'ailleurs le vérificateur général.

• 1015

M. Philip Mayfield: Au sujet de ces dérogations, docteur, que se passe-t-il lorsque vous en découvrez une qui vous semble illogique, qui n'aurait pas dû être accordée de toute évidence?

Dr Peter Cooney: Nous allons trouver le pharmacien et nous lui demandons pourquoi il a accordé cette dérogation. Si le pharmacien a une bonne raison de l'avoir fait, nous faisons le remboursement. Au cas contraire, nous ne remboursons pas. Si le problème se répète chez le même pharmacien, nous en saisissons le Collègue des pharmaciens de la province.

Voilà donc une de nos interventions.

En second lieu—nous l'avions mentionné le 5 avril et nous continuons d'ailleurs à le faire—nous imposons à certains médicaments et à certains éléments couverts par le programme des quantités maximales admissibles. Le témoin précédent vous l'a dit, la quantité de tel ou tel médicament prescrite l'inquiète beaucoup, et elle a parfaitement raison. Ce que nous essayons de faire, et nous l'avons d'ailleurs déjà fait pour certains médicaments, c'est d'imposer un maximum absolu à la quantité de ce médicament qui est prescrite. C'est une mesure qui tient de la prévention plutôt que de la réaction. Comme vous le savez, l'examen des dossiers des médicaments prescrits pose pour problème qu'il se fait rétrospectivement, puisqu'il s'agit d'ordonnances qui ont été déjà prescrites.

M. Philip Mayfield: Mais avez-vous ainsi pu contrôler le problème de la protection de la vie privée dont nous avions discuté lors de notre dernière réunion?

Dr Peter Cooney: En effet: nous avons fait comprendre au pharmacien que dans le cas de tel ou tel médicament, il y avait une limite à ne pas dépasser. Cela vaut pour plusieurs médicaments, et nous en ajoutons sans cesse de nouveaux à la liste.

M. Philip Mayfield: Cela veut-il dire que le patient n'a qu'à aller dans une autre pharmacie pour recommencer à zéro?

Dr Peter Cooney: Effectivement, le patient peut aller dans une autre pharmacie, mais le pharmacien lui dira la même chose.

Cela étant, l'un des problèmes que cela pose—et Mme Stonechild en a également dit un mot—c'est que si le patient paye le médicament de sa poche, c'est au pharmacien à déterminer s'il va ou non le lui vendre. Par contre, dans le cadre du programme des services de santé non assurés, peu importe le pharmacien que le patient va voir, c'est le même avis de dérogation qui devrait apparaître sur l'écran, c'est le même avertissement de dosage maximum qui devrait apparaître à l'écran, auquel cas aucune dérogation ne devrait être accordée,

Notre troisième initiative va également à mon avis apporter une solution à l'un des principaux problèmes évoqués par Mme Stonechild, en l'occurrence le choix du médecin. Nous avons fait en sorte que le numéro d'identification du médecin doive obligatoirement être mentionné. Jusqu'à présent, comme dans le cas de la majorité des régimes à tiers payant, il n'était pas obligatoire d'indiquer un numéro d'identification pour le médecin. Si on ignorait le nom du pharmacien ou du médecin, il suffisait d'inscrire un numéro factice, par exemple 99999, et la demande pouvait être traitée. Nous avons maintenant modifié le système pour interdire ce genre de pratique. Le pharmacien doit donc identifier le médecin lorsqu'il introduit l'ordonnance dans le système, de sorte qu'il sera lui-même alerté s'il y a un problème. Le pharmacien sera également alerté si le malade a consulté plusieurs médecins différents mais toujours le même pharmacien.

Voilà donc les trois secteurs d'intervention importants.

En quatrième lieu, nous avons constitué un comité d'experts, le Comité de la pharmacologie et de la thérapeutique, qui examine régulièrement les médicaments prescrits pour notre compte. Nous avons entre autres demandé à ce comité—c'était d'ailleurs l'un des éléments que le vérificateur général avait portés à notre attention—de chercher quels étaient les médicaments susceptibles de faire l'objet d'une surconsommation ou d'une utilisation abusive. Le comité s'en est chargé pour notre compte et il nous a d'ailleurs aidé à déterminer les quantités maximales admissibles pour d'autres médicaments. Le comité nous dit par exemple qu'il faut rayer tel ou tel médicament de la liste parce qu'il n'est pas bon ou parce qu'il risque de provoquer une surconsommation ou une utilisation abusive. Ou encore, le comité peut nous dire que tel médicament n'est pas mauvais, mais que sa consommation par un patient doit être plafonnée à tel ou tel niveau.

M. Philip Mayfield: Monsieur le président, me permettriez-vous de poser une toute petite question pour conclure?

Madame Stonechild, vous avez dit que vous étiez très active dans le milieu à Saskatoon. Je voudrais pour commencer vous demander combien de gens, à votre connaissance, sont morts d'une surdose de médicaments depuis le mois d'avril. J'aimerais également demander au Dr Cooney, à M. Potter ou à un autre représentant du ministère le nombre de cas de décès qui ont été portés à leur connaissance depuis notre réunion en avril.

• 1020

Mme Lorraine Stonechild: Sur un plan purement social, j'ai parlé à trois ou quatre personnes, et elles m'ont dit connaître une ou deux personnes qui sont décédées récemment d'une surdose de médicaments.

M. Philip Mayfield: Uniquement à Saskatoon?

Mme Lorraine Stonechild: En effet. À Saskatoon et dans les environs—en Saskatchewan j'imagine.

M. Philip Mayfield: Monsieur Potter, pourriez-vous répondre à ma question?

M. Ian Potter: Je n'en connais pas le nombre, je le crains.

M. Philip Mayfield: Merci, monsieur le président.

Le président: Nous pourrons peut-être tirer cela au clair cet après-midi pendant notre vidéoconférence avec les témoins de la Saskatchewan.

Je vous remercie, monsieur Mayfield.

Monsieur Harb.

M. Mac Harb: Merci, monsieur le président. Je voudrais faire une observation et également poser une question.

Tout d'abord, je tiens à remercier nos témoins, et en particulier Mme Stonechild. Comme vous l'avez dit, nous lui offrons nos plus sincères condoléances.

Ce qui me frappe, c'est que nous avons ici une série de problèmes qui touchent non seulement les autochtones, mais toute la population canadienne. Si l'on pense en particulier aux personnes âgées, qui souvent prennent un, deux, trois ou quatre médicaments différents, il arrive que ces médicaments régissent mal entre eux.

Ainsi, lorsqu'on se demande combien d'Autochtones sont morts à la suite d'une surdose, on devrait plutôt se demander combien de personnes âgées ou combien de gens en général sont morts dans les mêmes circonstances, et combien de gens sont morts parce qu'ils prenaient des médicaments à forte dose, qu'il s'agisse d'un médicament prescrit ou d'un médicament en vente libre.

Je comprends fort bien le problème de M. Potter et je compatis avec lui car il doit faire l'adéquation entre la protection de la vie privée et la protection de l'individu, sans même parler des problèmes de territoire de compétence.

Ce qui me frappe, c'est que l'une des façons de trouver une solution à l'ensemble du problème serait de travailler en concertation avec les provinces de manière à ce que chaque patient doive traiter avec un seul médecin pour se faire prescrire ses médicaments, point final. Si, pour une raison ou une autre, le patient n'est pas satisfait des services de ce médecin, il aurait le droit d'en consulter un autre, voire un troisième, en l'espace d'un an, mais pas plus.

Cette formule remédierait au problème du magasinage qui a été invoqué un peu plus tôt et, en fin de compte, elle pourrait produire des économies pour le contribuable mais également sauver des vies à plus long terme.

Je voudrais demander à M. Potter si le ministère est en pourparlers avec les ministères provinciaux de la santé pour mettre au point un système qui établirait ce juste milieu tout en assurant la sécurité de nos concitoyens. J'aimerais également savoir—et le vérificateur général pourrait sans doute répondre à cette question —si le commissaire à la vie privée est appelé, directement ou indirectement, à offrir ses conseils quant à la meilleure formule possible pour remédier au problème. Je vais m'arrêter là.

Le président: Merci, monsieur Harb.

Monsieur Potter.

M. Ian Potter: Vous mentionnez trois éléments, monsieur Harb. D'abord, vous me demandez si nous sommes en pourparlers avec les provinces et avec d'autres organismes de réglementation afin de trouver le moyen de mieux comprendre ce dossier et de mieux intervenir. La réponse est oui. Ce domaine est réglementé par les pouvoirs publics provinciaux, de sorte que nous devons traiter individuellement avec chacune des provinces et chacun des territoires à qui la loi donne le pouvoir d'administrer et de contrôler les activités des médecins et des pharmaciens.

Ensuite, vous me demandez s'il n'y aurait pas une meilleure façon d'organiser le système—ce que nous appelons le système des soins de première ligne—de manière à ce que chacun ait son médecin attitré, à ce qu'il y ait un meilleur contrôle des soins et des traitements dispensés à chaque patient. Cette question est effectivement à l'étude par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. C'était l'un des éléments qui ressortait de l'accord signé par les premiers ministres en septembre dernier. La question de savoir s'il serait possible d'organiser ce que nous appelons les soins de première ligne de manière à ce que chaque personne ait son hôpital ou son médecin attitré, parfaitement identifié, est une question qui fait l'objet de discussions entre les deux paliers de gouvernement. Chaque patient aurait donc sa clinique attitrée et ne pourrait plus magasiner pour trouver le médecin le plus accommodant.

• 1025

De toute évidence, les ordres professionnels devront décider s'ils sont prêts à accepter une formule de ce genre. Il y a déjà, un peu partout au Canada, des expériences, des démonstrations et des projets-pilotes dans ce sens. Santé Canada a pour position qu'une telle formule pourrait améliorer considérablement le niveau et la qualité des soins.

Quant à votre troisième question...?

M. Mac Harb: Savons-nous au juste combien de gens sont morts à cause de cela? Je sais que mon collègue a parlé du cas des Autochtones, mais j'aimerais avoir des chiffres concernant la population dans son ensemble.

M. Ian Potter: Je ne suis pas au courant et ce n'est pas non plus ma spécialité. Je pourrais demander si ce renseignement existe. Je l'ai d'ailleurs déjà demandé, mais il semblerait qu'il faille faire davantage de recherches à ce sujet. Je vais demander à ce que cela soit étudié par les organismes de recherche comme les Instituts de recherche en santé du Canada, afin que nous puissions, si c'est possible, arriver à mieux comprendre la problématique. Par contre, pour l'instant, ce renseignement n'existe pas à ma connaissance.

Le président: Je vous remercie, monsieur Harb.

M. Mac Harb: MM. Williams et Campbell allaient me donner une réponse concernant le commissaire à la protection de la vie privée.

Le président: Excusez-moi, allez-y, monsieur Campbell.

M. Ronnie Campbell: Monsieur le président, nous avions signalé en 1993 que le programme des services de santé non assurés n'était sanctionné par aucune loi. Nous savons que, depuis lors, la question de la protection de la vie privée est devenue un domaine à la fois difficile et mouvant.

Dans notre chapitre sur l'an 2000, nous avions recommandé à Santé Canada de faire en sorte de se doter des outils nécessaires pour faire face à cette situation. À l'époque, le ministère nous avait dit envisager deux options possibles, un cadre législatif et l'obtention du consentement. Il est manifeste qu'il a longuement étudié la question du consentement, mais ce n'est pas nécessairement la seule option possible.

Le président: Monsieur Potter, avez-vous effectivement dit que vous envisagiez des changements législatifs au niveau provincial? Vous ai-je bien compris?

M. Ian Potter: Non, et excusez-moi si c'est l'impression que je vous ai donnée. Ce que nous proposons, c'est de mettre en place les bases nécessaires pour l'obtention du consentement, ce qui nous permettrait de faire face aux cas de ce genre de cette manière-là plutôt que par voie législative.

Le président: Donc, comme l'a signalé M. Campbell, parmi les options qui se présentaient à vous, vous avez décidé d'opter pour celle-là et d'abandonner les autres?

M. Ian Potter: Pour l'instant, tout ce que nous pouvons vous dire c'est que, même s'il existait une loi, il faudrait de toute manière obtenir le consentement du patient.

Je voudrais attirer l'attention des membres du comité sur le discours qui a été prononcé récemment par le commissaire à la protection de la vie privée devant les membres de l'Institut canadien d'information sur la santé, discours dans lequel il a souligné que le droit à la vie privée était un droit fondamental. Nous sommes par conséquent d'avis que la façon la plus commode de faire face à cette situation consiste à obtenir le consentement de l'intéressé.

Le président: Vous parlez d'obtenir le consentement de chaque patient, de chaque personne?

M. Ian Potter: En effet.

Le président: Et si le patient est malade et s'il ne donne pas son consentement, qu'allez-vous faire?

M. Ian Potter: Je suis persuadé que nous allons trouver le moyen de faire en sorte que les gens puissent nous donner leur consentement.

Le président: Mais avez-vous un plan quelconque? Quelqu'un va consulter un médecin et lui dit: «Je suis malade». Le médecin lui répond: «Oui, vous êtes malade, voici une ordonnance.» Mais avant de la lui remettre, le patient doit lui donner son consentement. S'il ne le fait pas, que se passe-t-il?

M. Ian Potter: Pour l'instant, je suis optimiste et je suis persuadé que nous allons trouver...

Le président: Je sais que vous êtes optimiste, mais que feriez-vous dans un tel scénario?

M. Ian Potter: Lorsque nous en serons arrivés à ce point-là, nous devrons élaborer une proposition qui nous permettra de juger sur pièce.

Le président: En avez-vous déjà discuté?

M. Ian Potter: Nous y avons réfléchi, oui. Avons-nous une politique à ce sujet? Non.

• 1030

Le président: Très bien.

Madame Hinton.

Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson et Highland Valleys, AC): Je pense que la façon la plus raisonnable de procéder serait de légiférer. C'est peut-être un peu trop simpliste pour certaines personnes, mais à mon avis, lorsque nous parlons de cas comme ceux- là, c'est le bon sens qui devrait l'emporter, et la question de la protection de la vie privée devrait passer au second plan.

Il faut que je vous dise une chose, madame Stonechild, et c'est que vous avez toute ma sympathie. Je compatis à la perte de votre enfant car j'en ai perdu un moi aussi.

On parle ici de 300 ordonnances. La même année?

Mme Lorraine Stonechild: Oui.

Mme Betty Hinton: Comme il n'y a que 365 jours dans l'année, 300 ordonnances semblent un chiffre assez incroyable. Par contre, vous avez également dit que vous étiez au courant de ce qui se passait et que vous aviez essayé de faire quelque chose.

Mme Lorraine Stonechild: En effet.

Mme Betty Hinton: Pourrais-je vous demander à qui vous vous êtes adressée et de quelle façon? Par courrier?

Mme Lorraine Stonechild: Non, j'ai téléphoné. J'ai téléphoné aux médecins. J'ai téléphoné aux médecins et aux chirurgiens de Saskatoon, et ils m'ont tous dit qu'ils ne pouvaient rien faire.

Je leur ai parlé du problème de toxicomanie de mon frère Darcy, je leur ai parlé des 300 ordonnances. Mais ils m'ont répondu que le gouvernement fédéral, Santé Canada, le service qui contrôle les ordonnances, ne leur communiquait rien à ce sujet, de sorte qu'ils ne pouvaient rien faire. La lettre n'est arrivée qu'après sa mort.

Tout cela a été très décourageant pour moi, alors que je sais fort bien qu'il aurait été possible de faire quelque chose au lieu de se contenter de parler et de rester là sans rien faire. Je sais qu'on aurait pu faire quelque chose.

Mme Betty Hinton: Je suis d'accord avec vous. Il y a déjà plusieurs années de cela, j'étais aide-pharmacienne mais à l'époque, les médicaments contrôlés étaient surveillés de très très près. J'aimerais savoir s'il y a eu depuis des changements dont j'ignorerais l'existence. Je voudrais poser la question à M. Potter.

En second lieu, je voudrais vous demander si vous vous êtes adressée aux pharmaciens et si vous leur avez demandé comment, à leur avis, on pourrait améliorer le système.

En troisième lieu, je voudrais vous demander s'il y a des éléments qui permettraient de prouver que des ordonnances sont vendues. Est-il possible que quelqu'un obtienne une ordonnance et la vende à un tiers? Par exemple, la codéine a toujours été un médicament très facile à vendre. Y a-t-il quelque chose qui permettrait de prouver ce genre de trafic?

Voilà donc mes trois questions.

M. Ian Potter: Je vais demander au Dr Cooney d'y répondre.

Dr Peter Cooney: Vous avez demandé pour commencer si les provinces ou d'autres pouvoirs publics faisaient quelque chose dans le cas des médicaments contrôlés. La réponse est oui. D'ailleurs, j'espère que cet après-midi votre comité en parlera avec les gens de la Saskatchewan.

Plusieurs provinces ont mis en place ce qu'elles appellent un système d'ordonnances en trois exemplaires. Lorsqu'un médecin prescrit un médicament contrôlé ou un narcotique, il doit établir son ordonnance en trois exemplaires. Le premier est destiné à la pharmacie, le deuxième au Collège des médecins et chirurgiens... Il y a donc un système qui permet de dépister les médecins qui prescrivent davantage de médicaments comme cela. C'est un système d'ailleurs dont nous pourrions discuter cet après-midi.

Dans le cas de la Saskatchewan, nous envisageons actuellement d'informatiser intégralement ce système. Pour l'instant, il est toujours manuel, ce qui ralentit un peu les choses. Mais c'est cela que les pharmaciens souhaitent. Bien sûr, ce n'est pas une masse à faire étant donné que le système doit faire intervenir toutes les officines et exige la mise en place d'une composante technologique dans chaque point de vente afin que le Collège des médecins et des chirurgiens puisse obtenir les données en temps réel. Le groupe de travail de la Saskatchewan va vous en parler cet après-midi.

Votre troisième question portait sur la vente d'ordonnances. Effectivement, vous avez raison, il y a des ordonnances qui se vendent, ce qui représente un véritable problème.

Il est toutefois à espérer que le système de dérogation que nous avons introduit, de même que le contrôle que nous exerçons sur les médicaments dispensés, pourront y obvier.

• 1035

Mais en fait, je dirais que le problème se résume à ceci: si quelqu'un veut acheter quelque chose—c'est-à-dire aller à la pharmacie et payer le médicament de sa poche—il faut revenir au médecin étant donné que notre système ne permettra pas de dépister ce genre de chose. C'est précisément là où l'ordonnance à triple exemplaire jouera son rôle: en effet, l'information sera à nouveau communiquée au médecin par le pharmacien.

Les perspectives sont donc assez bonnes dans ces deux domaines. Quelle était votre deuxième question?

Mme Betty Hinton: Je vous demandais si vous aviez parlé aux pharmaciens?

Dr Peter Cooney: Oui. Nous informons les pharmaciens quand nous recevons un message. Pour bien situer les choses, disons que la grande majorité des pharmaciens sont très honnêtes, de même que les médecins. C'est sur les cas problèmes que nous devons nous concentrer, par exemple la question des dépassements. Si un pharmacien continue à dépasser la limite—c'est-à-dire s'il continue à donner sans cesse le même médicament aux mêmes personnes—on va le voir dans le système et nous allons intervenir auprès de ce pharmacien.

C'était d'ailleurs l'une des recommandations que nous avait faites le vérificateur général, et c'est un des domaines dans lesquels nous avons vraiment resserré notre action depuis six mois environ.

Mme Betty Hinton: À mon avis, il y a quatre responsables ici, et je pense que sur ces quatre, le pharmacien et le médecin sont les deux qui ont le moins de responsabilités. Je crois que les plus responsables, ce sont le gouvernement et les utilisateurs.

Je n'apprécie pas qu'on donne l'impression de transférer toute la responsabilité à des gens qui ne font que faire leur travail. En fait, c'est le gouvernement qui devrait superviser tout cela. Il faudrait que les utilisateurs soient rendus responsables de leurs actes. La situation est grave au pays, et il faut faire quelque chose. Il faut cesser de parler et passer à l'action.

Dr Peter Cooney: Vous avez parfaitement raison, et il n'est pas question de nous soustraire à nos responsabilités à cet égard. Nous sommes toutefois limités dans la mesure où les pharmaciens et les médecins sont régis par des lois provinciales. Nous devons donc informer les pharmaciens et les médecins ainsi que leurs collèges de ces problèmes. Vous avez raison, il faut le faire, et nous le faisons.

Mme Betty Hinton: Je pense que c'est un parfait exemple des multiples problèmes de santé sur lesquels les provinces et le gouvernement doivent collaborer.

Dr Peter Cooney: J'espère que cet après-midi vous constaterez que cette coordination fonctionne bien avec les gens de la Saskatchewan.

Mme Betty Hinton: Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Hinton.

[Français]

Monsieur Bertrand, s'il vous plaît.

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Moi aussi, j'aimerais remercier les témoins qui se sont déplacés ce matin pour venir nous parler d'un sujet que je considère très important. J'aimerais aussi remercier très sincèrement Mme Stonechild. Je sais que ce doit être très difficile pour elle de venir témoigner devant nous, mais je peux lui dire que son témoignage était émouvant et troublant quand elle nous a parlé des circonstances ayant entouré les décès de son frère et de son fils. Je la remercie très sincèrement de sa présence ici ce matin.

Monsieur le président, j'ai deux questions, et les deux s'adressent, je présume, à M. Potter.

Dans vos délibérations avec votre ministère et avec les autres ministères provinciaux, est-ce que vous avez songé à utiliser une carte à puce électronique? Je sais que cela se discute présentement. Je sais qu'au Québec, il y a déjà une étude à cet sujet et j'aimerais savoir si vous avez pensé à une telle carte afin de surveiller les visites chez le médecin et les ordonnances qui sont remises aux gens.

Je vais vous laisser répondre à cette question et j'en poserai ensuite une deuxième.

[Traduction]

M. Ian Potter: Oui, nous examinons le recours à des dossiers électroniques ou des cartes à puce qui nous permettraient d'avoir de meilleurs renseignements. Nous envisageons dans ce domaine deux types de liens. Il y a d'une part une carte qui serait utilisée à la fois par les provinces et le gouvernement fédéral. On en discute actuellement dans un contexte fédéral-provincial.

• 1040

D'autre part, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien s'intéresse à une nouvelle carte, un certificat de statut d'Indien, qui est pour l'instant un simple carton. On remplacerait ce carton par une carte électronique dans laquelle il pourrait y avoir une puce qui contiendrait des informations que nous pourrions utiliser dans notre programme.

Nous envisageons donc ces deux possibilités. La mise au point de ce genre de dispositifs est assez complexe et coûteuse. Il va donc nous falloir un certain temps pour arrêter notre choix.

[Français]

M. Robert Bertrand: Quand vous avez vos discussions sur le développement de cette carte, je présume que le commissaire à l'information est aussi impliqué, parce que comme M. Campbell le mentionnait si bien tout à l'heure, il s'agit d'une discussion très délicate. Il faut établir un équilibre entre les besoins du client et ceux des ministères.

[Traduction]

M. Ian Potter: C'est effectivement un équilibre délicat. Le respect des renseignements personnels est extrêmement important. C'est important pour la santé des gens. C'est un droit fondamental. Et en outre, la relation entre le médecin et le patient est extrêmement importante. Je pense que le gouvernement doit respecter cette relation et respecter le pouvoir de décision du médecin.

Il faut être très prudent lorsqu'on intervient dans le régime de traitement d'un particulier ou qu'on communique des informations sur son traitement ou sur son état. Le point fondamental sur lequel on s'est entendu quand on a mis en place l'assurance-médicaments, c'était que les médecins continueraient à gérer le système de traitement. C'est leur décision. C'est leur jugement professionnel. Le gouvernement n'a pas à chercher à se substituer à eux.

Nous obtenons certains renseignements qui sont extrêmement importants et qui peuvent avoir une incidence sur la situation du patient en pareil cas. À mon avis, nous devons travailler soigneusement avec les organismes de médecins et les provinces afin de trouver le juste milieu sur le plan de la protection des renseignements personnels ainsi que sur le plan de nos interventions visant à contrôler ce que nous payons et les décisions du médecin qui prescrit un régime de traitement au patient.

Comme le Dr Cooney l'a dit, je sais que cet après-midi vous allez parler au Collège des médecins et chirurgiens de la Saskatchewan, et je crois qu'on attirera votre attention sur ces questions.

[Français]

M. Robert Bertrand: Dans la présentation que vous avez faite, il y a une chose qui m'a fait sursauter un peu. À la page 9, vous dites ce que vous allez faire afin d'améliorer le système, et je cite:

    Surveillance plus étroite de l'annulation par les pharmaciens des messages sur l'utilisation des médicaments au moment de la présentation de la demande de paiement.

Je n'étais pas au courant qu'un pharmacien pouvait changer ce que le médecin avait écrit dans l'ordonnance. Est-ce une pratique assez courante?

[Traduction]

M. Ian Potter: Il peut y avoir un malentendu. Les annulations sont un mécanisme qui permet de déceler des ordonnances en double ou des contre-indications à l'égard du médicament en cause, le cas échéant. Nous faisons une mise en garde au pharmacien.

• 1045

Comme je l'ai dit, nous devons respecter les rapports entre le médecin, le pharmacien, et le patient. Nous estimons que le régime de traitement approprié au patient est tributaire du jugement professionnel de ces deux professions.

Nous pouvons décider de payer ou non, et nous attirons leur attention sur ce qui peut constituer des problèmes pour nous. Mais nous croyons qu'il faut respecter leur jugement professionnel. Nous ne voulons pas nous mettre à décider que tel régime de traitement n'est pas indiqué pour tel patient. L'annulation est donc une espèce de mise en garde, mais elle ne permet pas au pharmacien de modifier le régime de traitement prescrit.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bertrand.

Monsieur Potter, sur cette question, quel genre de message d'annulation envoyez-vous au pharmacien si un médicament est prescrit trop fréquemment? Quel genre de message reçoit-il sur son écran d'ordinateur?

M. Ian Potter: Je demanderais au Dr Cooney d'y répondre.

Dr Peter Cooney: Il reçoit un message, monsieur le président, qui lui fait savoir qu'il y a un problème avec un médicament qu'on a demandé. Autrement dit, il doit ensuite vérifier...

Le président: C'est tout ce que cela dit, qu'il y a un problème avec ce médicament?

Dr Peter Cooney: Le message précise qu'il y a un problème de fréquence à l'égard du médicament. En d'autres termes, c'est un avertissement au pharmacien. Les messages varient selon la nature de l'erreur que le pharmacien risque de commettre. S'il s'agit d'un problème de fréquence—c'est-à-dire que c'est trop tôt pour exécuter l'ordonnance—le pharmacien en sera prévenu.

Le président: Alors, s'il exécute une ordonnance aujourd'hui, est-ce que le message signale qu'on en a exécuté une hier aussi?

Dr Peter Cooney: Le message ne précise pas la date d'exécution de la première ordonnance. Il ne fait que signaler que c'est trop tôt.

Le président: Donc, si le médecin fait une ordonnance pour des médicaments pour deux semaines, et si on fait exécuter l'ordonnance, on obtient des médicaments pour deux semaines. Le message d'annulation ne signale-t-il pas qu'on a reçu des médicaments pour deux semaines il y a trois jours?

Dr Peter Cooney: Le message d'annulation indique que le patient a reçu des médicaments... en fait, ce que le message énonce...

Le président: C'est cela que je veux savoir. Qu'est-ce que le message énonce?

Dr Peter Cooney: Le message est déclenché si le patient retourne chez le pharmacien avant que les deux tiers des médicaments ne soient pris. Autrement dit, si on reçoit une ordonnance pour deux semaines, on ne peut pas la renouveler avant que les deux tiers des comprimés prescrits ne soient pris.

C'est alors au pharmacien de décider. Il sait maintenant qu'il y a un problème de fréquence, ou peut-être que le patient demande plus de médicaments qu'il ne lui en faut. Le pharmacien doit alors demander au patient pourquoi il est revenu si tôt. Le patient pourrait donner des raisons précises pour cela.

Par exemple, il se peut que le patient doive s'absenter et qu'il ait besoin de... Il se peut que le patient soit de retour après une semaine pour chercher des médicaments pour deux semaines de plus, ou qu'il ait pris le premier médicament, qu'il n'y ait pas réagi positivement, et qu'il demande maintenant un médicament semblable dans la même catégorie que celle que le médecin a prescrite. À ce moment-là, le pharmacien téléphonerait normalement au médecin et lui demanderait si tout cela est légitime. Est-ce vrai que le patient n'a pas réagi au premier médicament? Et le médecin confirmerait cela. Voilà pourquoi certaines annulations peuvent être valables.

Le président: Je n'insinue pas qu'elles ne sont pas valables. Ce que j'essaie de demander, c'est si le pharmacien reçoit des renseignements adéquats pour prendre une décision.

Pourquoi avons-nous ces annulations? Manifestement, le pharmacien estime qu'il est plus important de délivrer le médicament que de respecter la mise en garde. La mise en garde survient lorsque votre système informatique constate qu'il y a un problème disons, d'exécution trop fréquente. Nous avons donc un dilemme. Le pharmacien se trouve devant une ordonnance et une mise en garde. Il y a annulation, puisque le pharmacien délivre les médicaments. Qu'est-ce qui empêche la mise en garde de donner au pharmacien des renseignements adéquats pour dire qu'il ne devrait pas délivrer ces médicaments?

Dr Peter Cooney: Eh bien, la mise en garde lui donne effectivement des renseignements adéquats pour savoir qu'il ne devrait pas délivrer les médicaments. Il doit décider s'il y a lieu d'annuler la mise en garde ou non. Il s'agit du jugement professionnel du pharmacien, et les résultats sont présentés dans le rapport du vérificateur général. Dans à peu près 50 p. 100 des cas, le pharmacien téléphone au médecin. Ensuite, le pharmacien annule la mise en garde en envoyant un message précis, de sorte que nous savons, notre système sait, les motifs de l'annulation.

• 1050

Le président: Si l'ordonnance précédente pour 10 jours avait été faite par un autre médecin, est-ce que le pharmacien saurait quel médecin appeler?

Dr Peter Cooney: Il ne saurait pas quel médecin appeler. Il aurait l'ordonnance actuelle, et il téléphonerait au médecin actuel. Il lui demanderait des motifs, étant donné le problème de fréquence. Si le deuxième médecin disait qu'il ignorait que le patient était déjà allé chez un autre médecin, à ce moment-là, on l'espère, le pharmacien ne délivrerait pas les médicaments.

Le président: Vous ne donnez pas le nom du premier médecin. Les deux professionnels, qui sont capables de comprendre l'effet de ce médicament, ne peuvent pas se parler car ils ignorent l'identité l'un de l'autre. Est-ce exact?

Dr Peter Cooney: Nous laissons au pharmacien le soin de décider avec le deuxième médecin.

Le président: Vous m'avez dit que vous ne donnez pas au pharmacien le nom du médecin qui a fait la première ordonnance.

Dr Peter Cooney: C'est exact.

Le président: Comment pourra-t-il l'appeler, ou même faire part au deuxième médecin qu'un autre médecin, qu'il ne connaît pas, a fait une ordonnance? Ils ne peuvent pas se parler, pas vrai?

Dr Peter Cooney: Monsieur le président, le pharmacien dirait au deuxième médecin qu'il s'agissait de la deuxième exécution d'une ordonnance donnée.

Le président: Vous ne me suivez pas.

Le médecin qui fait la deuxième ordonnance a l'obligation professionnelle de traiter le patient comme il faut. Il a donc fait une ordonnance, sans savoir qu'une autre ordonnance a été faite 10 jours auparavant.

Vous privez les deux médecins de la possibilité de se parler puisque vous refusez de donner les renseignements.

Dr Peter Cooney: Le pharmacien peut parler au patient et au deuxième médecin prescripteur. Pour des raisons de protection des renseignements personnels, nous ne pouvons pas donner le nom du premier médecin prescripteur.

Le président: Je trouve cela plutôt décevant. C'est un problème dont vous avez connaissance depuis des années.

Les médecins sont des professionnels. Le patient qui va chez le Dr A et le Dr B a donc retenu les services de deux professionnels pour s'occuper de sa santé. Nous dire que les deux professionnels ne peuvent pas se parler pour des raisons de protection de renseignements personnels, à mon avis, c'est aberrant.

Je n'y comprends rien. Deux professionnels ont signé. Ce sont tous des médecins compétents, diplômés. Quand je vais, ou n'importe qui d'autre va, à l'hôpital, on peut être examiné par une dizaine de médecins. Ils partagent tous l'information.

M. Ian Potter: Monsieur le président, à notre avis, notre politique est conforme à la Loi sur la protection des renseignements personnels. On tient compte du fait que les noms des médecins que le patient consulte sont des renseignements du patient.

Certains patients peuvent ne pas vouloir partager les renseignements avec leur médecin ou avec un autre médecin. Il se peut qu'ils soient allés chez un médecin et qu'ils veuillent aller chez un autre. Ils ne veulent pas que nous partagions ces renseignements.

Le président: Je pense que c'est faire preuve de beaucoup de naïveté, monsieur Potter, alors que nous avons Mme Stonechild ici à cause d'ordonnances à répétition pour son frère et son fils. Vous adoptez cette attitude naïve selon laquelle les deux parties ne devraient pas être tenues au courant de ce qu'elles font, l'une et l'autre. Je n'arrive pas à le croire.

Monsieur Bryden, voulez-vous poser des questions?

[Français]

M. Robert Bertrand: Monsieur le président...

[Traduction]

Le président: Oui, monsieur Bertrand.

[Français]

M. Robert Bertrand: J'aimerais poser une dernière question. J'écoutais M. Cooney et, d'après ce que j'ai pu comprendre, le système semble bien fonctionner. La question que j'aimerais poser est la suivante: qu'est-ce qui est arrivé dans le cas de M. Stonechild? Qu'est-ce qui a fait que le système n'a pas marché?

[Traduction]

Dr Peter Cooney: Il s'est produit une suite de circonstances assez fâcheuses dans le cas de M. Stonechild. Tout d'abord, il y avait un médecin qui faisait des ordonnances en assez grande quantité, je crois. Deuxièmement, il y avait un pharmacien qui annulait les messages sur l'utilisation des médicaments et qui au fond ne tenait aucun compte de ce qui était affiché à l'écran. Ensuite on remettait les médicaments.

• 1055

À l'heure actuelle, nous avons un système qui permet de surveiller l'annulation par les pharmaciens et les numéros internes des médecins, de suivre la situation et d'empêcher ce genre d'abus.

Le président: Vous disposez d'une liste de tous les médecins auxquels une personne peut avoir recours?

Dr Peter Cooney: Nous en avons déjà parlé ce matin. Nous avons les numéros de tous les médecins canadiens qui participent à ce régime. Si un médecin a des raisons de croire qu'un patient a consulté un autre médecin sans avoir communiqué cette information, cela devrait déclencher l'envoi d'un message au pharmacien pour qu'il ne délivre pas le médicament. C'est cela l'intention.

Le président: Je n'arrive pas vraiment à saisir ce que vous me dites, docteur Cooney. Vous disposez de renseignements selon lesquels il y aurait quatre médecins, ou deux médecins ou plus qui sont consultés. Pourtant, à cause de la protection des renseignements personnels, vous estimez que vous ne pouvez rien faire. Ce sont tous des professionnels qui essaient de soigner le patient. Malheureusement, les conséquences sont graves.

Monsieur Bryden.

M. John Bryden: D'abord, j'ai une observation à faire. Il me semble que l'interprétation donnée par Santé Canada de la Loi sur la protection des renseignements personnels donne aux citoyens le droit fondamental de se tuer aux frais du contribuable. Je pense que cela ne va pas. Je ne rejette pas toute la responsabilité sur Santé Canada. Je pense qu'il faudra de toute évidence obtenir des précisions concernant la Loi sur la protection des renseignements personnels.

Je voudrais vous poser deux questions. Je ne comprends pas pourquoi Santé Canada n'a pas de données sur le nombre de décès attribuables à un recours abusif au programme de services de santé non assurés. Il faut quand même se rappeler que c'est un régime qui est entièrement financé par le contribuable. Des gens sont morts.

Pourquoi le ministère de la Santé n'a-t-il pas rassemblé des données non seulement concernant le nombre de personnes qui sont mortes mais aussi le nombre de personnes affectées dans les villes? Pourquoi ne le savez-vous pas?

M. Ian Potter: Comme je l'ai dit lors de ma dernière comparution ici, la collecte de données sur les décès ne relève pas de notre programme. Il faudra la participation d'autres organismes afin d'établir un lien entre ces décès et notre programme.

C'est une question légitime. Est-il possible d'obtenir la réponse à cette question? Ce ne sont pas des statistiques qui sont produites normalement par notre programme administratif. Il faudrait une étude spéciale et des recherches particulières. Cela exigerait aussi la collaboration des organismes de réglementation provinciaux, donc une collaboration entre les provinces et notre programme.

M. John Bryden: Monsieur Potter, qui prend ces décisions? Qui décide? Si vous ne pouvez pas prendre la décision vous-même, qui peut le faire?

Je ne comprends pas pourquoi cela ne s'est pas fait. Si ce n'est pas votre responsabilité, à qui incombe-t-elle? La tragédie de Mme Stonechild est-elle nécessaire pour qu'on commence à produire ce genre de données?

M. Ian Potter: Comme je l'ai déjà expliqué, cela fait l'objet de discussions avec les bureaux provinciaux de l'état civil qui s'occupent d'inscrire les décès et les causes de décès. Sans être spécialiste dans ce domaine, je crois savoir qu'il faut faire une étude assez détaillée du dossier pour établir ce lien par rapport à la cause du décès. Ce n'est pas quelque chose de facile.

Comme je l'ai dit, c'est un domaine légitime d'étude. J'ai pris note de votre suggestion. Nous allons soulever cette question auprès des responsables des recherches, qu'ils pourraient envisager cette recherche en priorité lors de l'établissement de leurs plans.

M. John Bryden: J'ai une dernière question.

Madame Stonechild, nous avons entendu votre témoignage. Voudriez-vous y ajouter quelque chose?

Mme Lorraine Stonechild: Combien d'autres personnes doivent mourir avant que tous les renseignements soient mis en place? Combien vais-je rencontrer d'autres personnes qui vont mourir dans des circonstances semblables ou dont des parents auront le même sort?

Je suis beaucoup mieux renseignée lorsque je me promène dans mon village et que je parle aux gens. Dans ma collectivité, on échange des renseignements. Je ne comprends pas pourquoi personne d'autre ne dispose de ces renseignements, surtout les personnes qui s'occupent de nos services de santé et qui paient nos médicaments. On ne s'y retrouve plus. C'est tellement simple, et pourtant on a rendu les choses si compliquées.

• 1100

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bryden et je vous remercie encore une fois, madame Stonechild.

Monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: Merci, monsieur le président.

Monsieur Potter, dans votre déclaration liminaire vous avez mentionné que le nombre de patients qui dépassent les doses normales est minime—0,05 p. 100 ou 0,5 p. 100?

M. Ian Potter: Il s'agit de 0,05 p. 100.

M. Philip Mayfield: Qu'est-ce que cela représente en chiffres?

M. Ian Potter: Environ 300, monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: Environ 300. C'est donc un nombre assez important de personnes.

Lorsqu'on parle de votre politique en matière de protection des renseignements personnels et que j'écoute Mme Stonechild, j'ai l'impression que c'est une politique assez meurtrière. Si quelqu'un se présente à un magasin d'alcools en Ontario en état d'ébriété, le commis doit refuser de lui vendre ce qu'il veut. Peu importe la quantité, on doit simplement lui refuser. Je suppose que si l'alcool était vendu et que cela portait à conséquence, le commis pourrait perdre son emploi.

On entend parfois parler d'usines auxquelles les gens peuvent s'adresser pour obtenir des ordonnances et acheter des drogues sans trop de difficultés. Avez-vous constaté ce genre de pratiques? Il est beaucoup question de respecter les compétences professionnelles. Mais quel degré de prudence exercent-ils ces professionnels qui traitent avec ces gens qui meurent? Font-ils preuve de prudence raisonnable?

M. Ian Potter: Je vais demander au Dr Harry Hodes, directeur général adjoint du programme de santé communautaire en Alberta, de répondre à votre question. Le Dr Hodes a beaucoup travaillé dans ce domaine en tant que médecin et fonctionnaire de Santé Canada, et pourrait vous éclairer sur les efforts entrepris par les organismes professionnels pour régler ce problème.

Dr Harry Hodes (directeur général adjoint, Alberta/Territoires du Nord-Ouest, Direction générale de la Santé des Premières nations et des Inuits): Merci.

Monsieur le président, je tiens d'abord à dire que je peux parler uniquement de mon expérience en Alberta. Mon poste à la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits ne comporte pas de responsabilités nationales.

Je pense que vous avez demandé quel degré de responsabilité est exercé par les professionnels dans les soins qu'ils dispensent à ces patients.

M. Philip Mayfield: Je m'intéresse plus particulièrement à certains professionnels. Comme Mme Stonechild a dit, les gens se retrouvent entre eux et apprennent quel médecin il faut consulter et dans quelle pharmacie on peut acheter les médicaments. Le problème semble se poser pas nécessairement au niveau de la profession, mais avec un certain nombre de personnes dans ces professions. Êtes-vous en mesure d'identifier ce genre de personnes, les personnes qui ne font pas preuve de suffisamment de prudence?

M. Harry Hodes: Oui, vous avez absolument raison. Il s'agit d'un petit nombre de médecins qui, malheureusement, attirent les personnes qui cherchent des médicaments. Ils finissent par être bien connus chez les toxicomanes.

M. Philip Mayfield: De quels outils disposez-vous pour faire face à ce genre de personnes?

M. Harry Hodes: Il n'y a pas d'outils législatifs, mais le Collège des médecins et des chirurgiens de l'Alberta a la possibilité d'agir en vertu de la loi et nous travaillons en étroite collaboration avec le collège en lui communiquant l'information qu'il demande.

M. Philip Mayfield: La loi vous donne-t-elle un droit de regard sur des organismes autonomes et indépendants comme les associations de pharmaciens, les collèges de médecins et des chirurgiens? Avez-vous une responsabilité par rapport à ces organismes?

M. Harry Hodes: Pas d'après la loi. Ils sont régis par des lois provinciales. Mais nous travaillons avec eux de façon collégiale pour régler les problèmes dont il est question ici.

M. Philip Mayfield: Je vous demande donc si vous estimez qu'il devrait y avoir un règlement ou une disposition législative qui prévoit ce genre de rapport avec les associations?

M. Harry Hodes: Les associations sont régies par une loi provinciale, et il y a également une loi provinciale qui concerne les collèges de pharmaciens et de médecins.

M. Philip Mayfield: Pouvez-vous interdire de pratiquer à un médecin ou à un pharmacien en abus de pouvoir?

M. Harry Hodes: Nous ne le pouvons pas, mais les collèges le peuvent.

M. Philip Mayfield: Merci.

Le président: Merci, monsieur Mayfield.

• 1105

Comme vous pouvez l'entendre, les cloches sonnent. Il nous reste quatre minutes pour le tour de M. Finlay, et ensuite, nous allons suspendre la séance pour aller voter.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le président, j'avais simplement une observation à faire.

Je m'excuse de mon arrivée tardive, je ne veux pas donner l'impression que je comprends tout ce qui se passe, mais j'ai l'impression qu'on a dit des choses étranges concernant la protection des renseignements personnels, les médecins, etc. J'ai un médecin chez moi à Woodstock et j'ai également un médecin ici. Ils ne sont pas en communication, et je préfère les choses comme ça. Si je consulte un autre médecin, c'est parce que je ne suis pas tout à fait disposé à accepter sans réserve l'opinion du premier. Ça ne me plairait pas du tout si le deuxième médecin disait, eh bien, je vais donner un coup de fil au premier pour voir ce qu'il fait. C'est la même chose pour un avocat. Si je vends une propriété à Philip, je ne vais pas retenir les services du même avocat, je m'en trouverai un autre.

Je pense qu'on crée un problème là où il n'y en a pas alors qu'il y a des choses plus importantes à protéger. J'ai de la compassion pour Mme Stonechild. J'ai également perdu un enfant dans un accident d'autobus. Avec les lois actuelles, il ne serait pas mort, mais les lois n'étaient pas les mêmes à l'époque. Nous apprenons l'expérience aidant et nous changeons les lois. Les enfants ne peuvent plus descendre de l'autobus et passer par l'arrière, ils sont obligés de passer par devant, du moins en Ontario, c'est la loi. Parfois, la tragédie est inévitable. C'est peut-être une question de chance, d'intention—qui sait, il n'y a pas des remèdes pour tout, et nous n'allons certainement pas assouplir les dispositions en matière de protection des renseignements personnels pour permettre l'intervention d'un tiers qui aurait une responsabilité particulière. C'est l'un des problèmes de la Loi sur les Indiens. Elle prétend dire ce qui est le mieux pour tout le monde. Eh bien, ce n'est pas le cas. On ne peut pas saisir le prétexte de la mort de quelqu'un pour décréter la quantité de pilules admissible. Il nous faut une certaine perspective par rapport à nos objectifs à long terme.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Finlay.

Je vais maintenant suspendre la séance. Il nous reste à peu près 20 minutes. Alors, après le vote, nous allons continuer pendant une vingtaine de minutes, et ensuite lever la séance.

La séance est suspendue.

• 1107




• 1144

Le président: Bonjour encore une fois, mesdames et messieurs. Nous allons reprendre la séance et continuer pendant une vingtaine de minutes, le temps qu'il nous restait à faire avant l'interruption de cette réunion pour le vote.

• 1145

Nous nous excusons auprès des témoins, mais malheureusement, lorsque les cloches sonnent au Parlement, il faut se présenter au vote pour gagner ou perdre, selon le cas.

Monsieur Bryden, vous avez une question.

M. John Bryden: Si vous permettez, monsieur le président, j'aurais deux commentaires.

Dans la foulée des commentaires de M. Finlay, je dirais que ce qui est important pour la protection des renseignements personnels, ce n'est pas le fait qu'on échange les conseils de médecins. Ce qui est important, c'est de savoir si la capacité d'une personne d'avoir des ordonnances multiples de docteurs différents devrait être protégée en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Voilà la question à laquelle nous devons répondre.

J'aimerais ajouter autre chose. Nous avons fait nos devoirs—nous avons essayé de voir s'il y a des données sur le nombre de personnes qui sont affectées par le recours abusif du programme des médicaments en vente libre. J'aimerais demander à M. Potter de déposer dans un très proche avenir la correspondance entre Santé Canada et les registraires de l'État civil, pour que le comité puisse mieux déterminer le dynamisme du ministère dans à cet égard.

Le président: Est-ce que cette correspondance pourrait être déposée, monsieur Potter?

M. Ian Potter: Absolument, monsieur le président.

Le président: Très bien. Dans combien de temps pourriez-vous le faire?

M. Ian Potter: Dans deux ou trois jours. Je dois voir combien de temps il va falloir pour faire traduire tous les documents.

Le président: Bon, très bien.

Il faudra peut-être que quelques documents soient traduits, monsieur Bryden.

M. John Bryden: Je veux qu'il soit noté au compte rendu que pour améliorer le programme, nous devons savoir où les décès ont eu lieu et surveiller les données. Cela nous permettra de voir si les solutions dont nous discutions aujourd'hui seront efficaces une fois qu'elles seront mises en oeuvre.

Enfin, j'aurais une question pour Mme Stonechild. Apparemment, il y a une différence entre une surdose d'un médicament d'ordonnance qui a été prescrit, et un problème causé par un médicament en vente libre qui a aussi été prescrit, ou au moins obtenu, en vertu du programme des services de santé non assurés. À sa connaissance, les médicaments en vente libre auraient-ils joué un rôle dans les tragédies concernant son frère et son fils?

Mme Lorraine Stonechild: Dans les cas de mon frère, l'enquête a déterminé qu'il y avait aussi des médicaments en vente libre dans son système.

M. John Bryden: Si vous permettez, monsieur le président, j'aurais une dernière petite question pour M. Potter.

À la page 6 de votre exposé vous nous donnez un diagramme qui est censé montrer l'utilisation de codéine dans les médicaments du type benzo. Est-ce que les données se fondent seulement sur l'utilisation de ce médicament prescrit? Est-ce qu'elles comprennent aussi l'utilisation de ces deux médicaments en vente libre, la codéine et les benzos?

M. Ian Potter: Ces données sont tirées de nos dossiers d'ordonnances. Si aucune ordonnance n'a été faite, la transaction n'est pas dans nos dossiers. Si l'utilisateur n'a pas payé le médicament et s'il n'y avait aucune ordonnance, la transaction n'apparaît pas dans notre système.

M. John Bryden: Mais la transaction apparaît si l'utilisateur obtient de la codéine qui n'est pas prescrite mais qui est payée par le régime?

M. Ian Potter: Il y a une ordonnance pour tout médicament payé par le régime, même si c'est un médicament en vente libre. Nous exigeons une ordonnance pour les médicaments en vente libre et les médicaments délivrés sur ordonnance. Et quand l'utilisateur paye les médicaments en vente libre de sa poche, la transaction n'est pas dans le système.

M. John Bryden: J'ai une dernière question. J'essaie de comprendre tout ça.

Si on parle d'un médicament comme la codéine, qui est disponible par ordonnance ou en vente libre, ce n'est pas au niveau du médecin qu'on mettra fin aux abus. Il se peut que le médecin ne tienne pas de dossier sur les ordonnances qu'il donne pour des médicaments en vente libre—peut-être qu'il en tient, je ne sais pas. Est-ce donc au niveau de la base de données de la pharmacie qu'on pourra identifier les abus?

• 1150

M. Ian Potter: Oui, c'est la seule base de données qui contiendrait l'information sur le volume et le nombre de ventes de médicaments en vente libre contenant de la codéine.

Le président: Il y a quelque chose qui me préoccupe beaucoup. Je comprends qu'on veuille protéger les renseignements personnels dans le cas d'une personne qui achète un médicament en vente libre comme n'importe qui peut le faire. On ne peut pas demander aux gens des Premières nations de s'inscrire quand ils achètent un médicament en vente libre, quand le reste de la population peut l'acheter sans rien signer.

M. John Bryden: Ce n'est pas exactement ce que j'essaie de dire. Nous comprenons que nous n'avons aucun moyen de contrôler la liberté d'achat des gens, qu'ils soient membres des Premières nations ou pas. Nous pouvons seulement étudier ce qui se produit au sein du programme des services de santé non assurés. C'est là que la question des renseignements personnels se posse parce qu'il s'agit d'un programme gouvernemental et donc assujetti à la Loi sur la vie privée à la différence des ventes à de simples particuliers.

Je n'ai pas d'autres questions. À vous, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Bryden.

Monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: Merci beaucoup.

Madame Stonechild, avant d'aborder la question qui me préoccupe, j'aurais une question sur un commentaire dans votre témoignage. Vous avez dit que pour obtenir un médicament en vente libre, un Indien n'a qu'à aller à la pharmacie et signer une feuille de papier. Est-ce que cela se fait pour que les frais soient assumés par...?

Mme Lorraine Stonechild: Non. Même s'ils paient pour le médicament eux-mêmes, ils doivent signer la feuille et le pharmacien prend note du médicament qu'ils ont acheté et de la quantité. Si quelqu'un veut acheter du Tylenol contenant de la codéine—100 ou 50 comprimés—le pharmacien note la transaction. Mais ces informations ne sont pas transmises. Votre numéro de traité n'a aucun effet; or, vous devez montrer une pièce d'identité quand vous achetez sans ordonnance du Tylenol avec codéine.

M. Philip Mayfield: Le Tylenol 3, n'est-ce pas?

Mme Lorraine Stonechild: Non. Le Tylenol 3 exige un formulaire en trois exemplaires.

M. Philip Mayfield: Je ne savais pas que je devais montrer une pièce d'identité pour acheter du Tylenol.

Mme Lorraine Stonechild: C'est ce qu'on fait à Saskatoon. Quand vous achetez du Tylenol—de l'acétaminophène avec codéine—on vous demande de montrer une pièce d'identité et on en prend note, juste au cas où...

M. Philip Mayfield: Je comprends. Est-ce que tout le monde doit montrer une pièce d'identité, ou seulement les Indiens qui ont l'air de prendre de la drogue?

Mme Lorraine Stonechild: Je crois que tout le monde doit le faire.

M. Philip Mayfield: Bon.

J'ai une question pour les fonctionnaires de Santé Canada. J'ai l'impression que quand un problème se pose, malgré les dispositions sur la protection des renseignements personnels vous avez toujours la possibilité de vous adresser au Collège des médecins et chirurgiens ou l'Association des pharmaciens, et d'avoir des conversations utiles avec des gens qui écoutent.

Comment se fait-il que les dispositions sur la vie privée ne s'appliquent pas dans ces cas-là, de la même façon qu'elles s'appliquent quand vous parlez à certains médecins ou pharmaciens?

M. Peter Cooney: Quand on s'entretient personnellement avec le registraire, un membre du Collège des médecins ou du Collège des pharmaciens, on parle de la clientèle d'un pharmacien en particulier. Normalement, on vous demande de partager des informations sur les pratiques d'un certain pharmacien ou médecin. Vous leur donnez ce qu'on qualifierait de minimum d'information.

En d'autres mots, l'information n'a rien à voir avec le patient. On a tendance à divulguer un minimum d'information parce qu'on se renseigne sur le pharmacien ou le médecin.

• 1155

Le président: J'aurais une question là-dessus. L'ordonnance en trois parties pour les médicaments contrôlés qui s'applique à tout le monde m'intéresse beaucoup. Voici ma question: pour ce qui est de la protection de l'information à ce niveau-là, il n'y a aucun problème, mais il semble y en avoir un au niveau de l'administration du programme. Pourquoi?

Monsieur Cooney, me dites-vous qu'une fois qu'on envoie la troisième partie de l'ordonnance au Collège des médecins et chirurgiens—si c'est là qu'on l'envoie... je pense que c'est bien ça—on se contente de compiler l'information pour les médecins qui rédigent des ordonnances et on ne cherche pas à savoir si une personne par exemple s'adresse à dix médecins différents peut-être pour faire remplir la même ordonnance?

M. Peter Cooney: Vous devrez poser cette question aux médecins cet après-midi. D'après moi, c'est probablement ce qu'ils font. J'estime que c'est une des possibilités que nous étudions avec les associations provinciales, et qui pourrait régler votre problème.

Le président: Je crois savoir qu'ils le font parce que je me souviens de cas cités dans les journaux, et c'est pour ça qu'on a des ordonnances en trois exemplaires. C'est pour identifier les utilisateurs problèmes, pas vraiment les prescripteurs problèmes.

Évidemment, il n'y a aucune difficulté à ce niveau-là en vertu de la Loi sur la vie privée, donc je ne vois pas pourquoi il y a toutes ces formalités qui vous empêchent de sauver des vies quand il s'agit du programme des Premières Nations. Je ne comprends simplement pas la différence.

M. Peter Cooney: En vertu des lois provinciales, le pharmacien doit fournir cette information au Collège des médecins et chirurgiens.

Le président: Est-ce que les lois provinciales donnent plus de latitude que les lois fédérales?

M. Peter Cooney: Les lois provinciales obligent les pharmaciens à partager cette information avec le collège, et c'est ce qui se fait. J'espère qu'on en parlera cet après-midi.

Le président: Mais le gouvernement fédéral ne voit pas la nécessité d'introduire des dispositions semblables dans ses lois pour pouvoir partager cette information qui sauve des vies?

M. Peter Cooney: Ce qu'on essaie de faire, en Saskatchewan par exemple, c'est d'établir un lien avec le pharmacien pour que notre information soit incluse.

Le président: Je vois ce que vous essayez de faire, mais vous dites qu'il y a un problème avec la divulgation des renseignements personnels.

Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Mayfield. J'espère que vous me permettrez d'enchaîner sur ce que vous dites.

M. Philip Mayfield: Si vous m'assurez que j'aurai tout le temps qui m'est dû...

Le président: Absolument.

J'essaie de comprendre votre intransigeance à propos d'une question qui semble vous empêcher de sauver la vie de gens, comme M. Ironchild, le frère de Mme Stonechild, parce que vous êtes pris dans toute une série de formalités qui vous empêchent d'agir à cause de la protection des renseignements personnels. Et pourtant la chose semble tout à fait possible au niveau provincial. Donc, je ne comprends pas pourquoi vos mains sont liées, et pourquoi vous les gardez liées quand vous avez la capacité de les délier à tout moment.

M. Ian Potter: Monsieur le président, nous n'avons pas vraiment la possibilité de changer les choses de cette façon.

Le président: Mais les provinces ont cette possibilité. Pourquoi l'ont-elles?

M. Ian Potter: Les provinces ont leurs propres structures réglementaires et législatives. Nous avons la nôtre. Il nous incombe de respecter les lois du Parlement dans leur forme actuelle, et comme nous les comprenons.

Ceci impose certaines limites à notre conduite. Comme j'ai essayé de l'expliquer au comité, en vertu des dispositions des lois du Parlement, nous essayons de mettre au point des méthodes qui nous permettront d'établir une procédure efficace pour des situations où il pourrait y avoir une surconsommation de médicaments d'ordonnance.

Le président: Monsieur Potter, je n'accepte malheureusement pas votre argument. Un peu plus tôt, vous nous avez dit que vous préféreriez obtenir le consentement des intéressés plutôt que d'imposer des lois. Les provinces, de toute évidence ont résolu le dilemme. Je n'arrive pas à comprendre que vous ne voyiez pas la nécessité d'agir quand des gens comme Darcy Ironchild meurent de surdose. Les provinces adoptent des lois qui permettent aux médecins et aux pharmaciens de se communiquer l'information sur les ordonnances multiples, mais il semble que vous ayez les mains liées et ne puissiez rien faire.

Monsieur Mayfield, c'est à vous.

M. Philip Mayfield: Merci beaucoup, monsieur le président.

• 1200

Si vous contactez le Collège des médecins et chirurgiens, et des pharmaciens, au sujet de particuliers qui vous inquiètent, surtout des particuliers que vous avez notés ou peut-être inscrits, qui, d'après vous, ont fait un usage abusif du système pour une raison ou une autre, n'avez-vous pas le pouvoir de dire à une pharmacie que vous ne paierez plus les factures de certains clients, lesquels devront s'adresser ailleurs qu'à cette pharmacie, ou que vous n'allez plus payer les ordonnances rédigées par un certain médecin? Faites-vous quelque chose de pareil, ou continuez- vous à accepter chaque ordonnance de chaque médecin?

M. Ian Potter: Nous appliquons certaines lignes directrices et certaines procédures en ce qui concerne les pharmacies. Si nous croyons que les pratiques d'une pharmacie ne sont pas conformes aux normes générales, nous avons la possibilité de la rayer de la liste—c'est-à-dire de ne plus payer les factures qui proviennent de cette pharmacie. Cela se fait.

Nous ne pouvons pas contrôler les médecins et nous n'avons pas l'autorité de le faire. Nous ne payons pas les médecins; ce sont les provinces qui les payent. Les médecins sont régis par leur propre organisme de réglementation, et c'est cet organisme qui peut suspendre ou imposer des mesures disciplinaires contre un médecin dont les pratiques ne sont pas conformes aux normes.

En ce qui concerne les pharmaciens, nous surveillons leurs activités, et si nous estimons que leurs pratiques ne sont pas compatibles avec les normes, nous pouvons les suspendre pendant une certaine période ou indéfiniment.

M. Philip Mayfield: Y a-t-il des cas où on pourrait lire à l'écran de la pharmacie que les ordonnances de tel ou tel médecin ne seront pas remplies?

M. Ian Potter: Non.

Le président: Merci, monsieur Mayfield. Avez-vous d'autres questions?

M. Philip Mayfield: Oui, j'en ai quelques autres.

Le président: D'accord. M. Bryden en a une, après j'en ai quelques-unes moi-même et, ensuite, nous allons conclure.

M. Philip Mayfield: Sur la question de la protection des renseignements personnels, je pensais vous demander comment allaient les négociations avec l'Assemblée des premières nations et les autres. Mais je préfère à ce stade vous parler de mes craintes concernant votre prudence excessive, si je peux m'exprimer ainsi.

À mon avis, vous avez démontré qu'il faut être très prudent, et qu'il faut respecter à la lettre les paramètres législatifs. Je ne cherche surtout pas à dire qu'il faut négliger tout à fait ces paramètres, parce que nous tenons à avoir de l'ordre, et cela pour de bonnes raisons. Cependant, il me semble que le ministère est tellement prudent, tellement conservateur, qu'il en fait une vertu, plutôt que de s'intéresser au sort de ceux qui souffrent de l'inaction du ministère.

Cela dit, je tiens à poser une question au responsable du Bureau du vérificateur général, à M. Campbell, ou à n'importe qui. Dans votre déclaration, vous dites:

    [...] nous craignons que le ministère n'ait pas encore fait suffisamment de progrès pour régler nombre des problèmes cernés. Nous sommes toujours des plus inquiets du fait que le programme permet à des personnes d'avoir accès à des quantités extrêmement importantes de médicaments prescrits.

Je vous demande donc de nous dire clairement, au comité et à tous ceux qui nous écoutent, quelles sont vos préoccupations précises. Voulez-vous bien le faire, s'il vous plaît, monsieur Campbell?

M. Ronnie Campbell: Oui, certainement. Merci.

En 1997, nous avions évoqué plusieurs craintes au sujet du système de traitement aux points de service qui devait être mis en place sous peu. Il s'agissait d'un projet pilote du ministère à ce moment-là, et il présentait des possibilités intéressantes. Nous nous inquiétons du fait qu'avec les renseignements fournis à l'époque, on prévoyait donner aux pharmaciens les dates des trois dernières ordonnances. De plus, les responsables du ministère nous ont dit à ce moment-là qu'ils pensaient renforcer les avertissements prévus dans le cadre du système. Nous avions dit que puisque les pharmaciens pouvaient passer outre aux avertissements, il était donc important que le ministère surveille de près ces annulations de la part des pharmaciens.

• 1205

Le système que le ministère a fini par mettre en place donnait un peu moins de renseignements qu'on avait prévu au départ et on n'avait pas renforcé les avertissements, comme le ministère s'était engagé à le faire. Plus important encore, les mesures que le ministère avait promis de prendre pour surveiller ces annulations n'avaient pas été prises de façon satisfaisante au moment de notre vérification.

Je sais que le ministère nous a fait des promesses en réponse au chapitre, et M. Cooney a dit ce matin que plusieurs de ces mesures ont été prises depuis la vérification. Cependant, nous n'avons que les renseignements que nous avions au moment de la vérification. Nous allons certainement donner suite à toutes les réponses et à tous les engagements contenus dans le chapitre.

Le président: Merci, monsieur Campbell.

Monsieur Bryden, une dernière question.

M. John Bryden: Monsieur Potter, combien coûte le programme des services de santé non assurés? Les contribuables paient combien?

M. Ian Potter: Environ 578 millions de dollars.

M. John Bryden: Un demi-milliard de dollars.

Je veux faire une remarque à Mme Stonechild. Madame, M. Potter et d'autres ont été mis sur la sellette ce matin au sujet de ce programme et le fait que des gens continuent à mourir, malgré les plaintes faites au fil des ans. À la décharge de M. Potter et des fonctionnaires de son ministère, je tiens à dire, qu'à mon avis, ce n'est pas de sa faute, c'est de la faute du Parlement. Il s'agit d'un programme énorme et coûteux pour lequel il n'y a pas d'autorisation législative. J'estime qu'il est injuste de demander à M. Potter—qui agirait toujours dans les meilleurs intérêts de son ministère, j'en suis sûr—d'interpréter la loi sur la protection des renseignements personnels. D'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, ce n'est pas Santé Canada qui est responsable de cet échec, mais plutôt le Parlement, car nous avons permis à ce programme d'exister pendant beaucoup trop longtemps sans le définir dans une loi.

J'espère que nous allons essayer de corriger cela, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Bryden. Et je suis sûr que notre rapport tiendra compte de vos observations. Cela ne fait aucune doute.

Je sais que c'est difficile pour vous, madame Stonechild, mais pourriez-vous me dire quel était l'état de santé de Darcy la dernière année, où il avait fait remplir ces 307 ordonnances? Était-il normal, si j'ose employer une telle expression?

Mme Lorraine Stonechild: J'ai surtout parlé à Darcy au téléphone, et je le voyais dans l'autobus. Je n'allais pas le voir régulièrement, parce que je savais qu'il surconsommait des médicaments, Parfois il semblait normal, et parfois non. Parfois je ne le reconnaissais plus, car durant toute sa vie, il a connu des hauts et des bas.

Le président: Oui. Si j'ai posé la question, c'est parce que je suis sûr que parfois quand il allait voir le médecin pour obtenir une autre ordonnance, il aurait semblé un peu bizarre, un peu drogué, et pourtant il l'obtenait. Le fait qu'on lui a donné des ordonnances dans ces circonstances-là me trouble.

Je lis un article du StarPhoenix de Saskatoon du 21 avril 2001. Je crois savoir qu'il s'agit d'une citation:

    [...] Darcy [...] a pu accumuler plus de 160 médicaments psychotropes, dont le Valium, le Demerol et l'hydrate de chloral [...] Il a aussi pu se procurer des dizaines d'antidépresseurs, d'anxiolytiques, d'antibiotiques, d'anti-inflammatoires et des médicaments en vente libre comme le Gravol, le Maalox, le Tylenol et l'ibuprofène.

M. Cooney, vous disiez que dans votre système de messages aux pharmaciens, ou impose des limites sur les médicaments. Mais j'ai cru comprendre que ces limites s'appliquaient à un médicament précis: si quelqu'un utilisait trop un médicament donné, un message serait envoyé. Mais j'ai l'impression que le système ne décèlerait pas le fait que quelqu'un prenait du Gravol, du Maalox, du Tylenol, de l'ibuprofène, du Valium, du Demerol et de l'hydrate de chloral, chacun selon les limites imposées pour chaque médicament. Pris ensemble, ces médicaments pourraient avoir des effets très néfastes.

• 1210

M. Peter Cooney: Le système de messages fonctionne de deux façons. L'une est celle que vous décrivez: dans le cas d'un médicament précis. L'autre mécanisme vise une catégorie précise de médicaments. Le système de messages devrait noter cette catégorie de médicaments et avertir le pharmacien. Donc vous avez raison: le premier mécanisme ne fonctionnerait pas, mais le deuxième—la catégorie de médicaments—constaterait cette surutilisation.

Le président: Si quelqu'un reçoit une gamme très vaste de médicaments, est-il protégé par le système d'avertissement que vous avez mis en place?

M. Peter Cooney: Oui, parce que cette vaste gamme de médicaments s'appliquer à une ou plusieurs catégories précises.

Le président: Oui. Je prends à coeur les observations de M. Bryden, qui a dit que nous avons échoué, que le Parlement a échoué, en ne donnant pas l'ordre et l'autorisation à Santé Canada d'offrir un programme pour les Premières nations qui réponde à leurs besoins tout en les protégeant.

Lorsque les gens sont toxicomanes, ils sont beaucoup moins capables de se contrôler, comme chacun le sait. Par conséquent, ils cherchent par tous les moyens à obtenir ces médicaments, et il faut prévoir des mesures de contrôle.

Une question très rapide, monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: À ce sujet, lors de ma conversation avec M. Potter plus tôt, nous avons parlé du besoin d'avoir une loi. Je vous demande de préciser votre pensée, s'il vous plaît. Je n'ai pas eu l'impression que vous estimiez avoir besoin d'une loi pour vous aider à faire ce que vous faites.

Mes collègues disent qu'il faut adopter une loi, et je ne vais pas les contredire si cela pouvait vous être utile. Je vous exhorte à faire ce qu'il faut pour que votre ministère prenne des mesures pour aider les gens qui comptent sur vous.

Que pensez-vous des remarques de M. Bryden et de M. Williams? Pensez-vous qu'une loi vous permettrait de mieux vous acquitter de vos responsabilités?

M. Ian Potter: La décision concernant une loi éventuelle dépasse probablement ma...

M. Philip Mayfield: Ne soyez pas prudent, s'il vous plaît. Donnez-nous un coup de main.

M. Ian Potter: Tout fonctionnaire dirait qu'une loi est plus utile qu'une politique.

Le président: Sur ce, monsieur Mayfield, je tiens à remercier Mme Stonechild d'être venue ce matin.

Nous savons qu'il a été très difficile et même déchirant pour vous de venir parler de cela en public. Cependant, nous vous remercions de nous avoir relaté ce qui s'était passé. Nous espérons que votre présence ici aujourd'hui saura contribuer à améliorer le programme de sorte que vos enfants et vos petits-enfants grandiront en bonne santé.

Je tiens également à remercier les autres témoins d'être venus ce matin.

Nous allons nous réunir de nouveau cet après-midi à 15 h 30 dans la salle 701 de l'édifice La Promenade, à 151 rue Sparks.

La séance est levée.

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