Je souhaite la bienvenue à tout le monde. Nous sommes ici pour poursuivre, conformément au Règlement, notre étude sur la transparence du gouvernement et des données.
La réunion de cet après-midi comprendra trois parties. Dans la première, qui commence à 15 h 30, nous avions prévu d'accueillir Jennifer Stoddart, commissaire à la protection de la vie privée. Malheureusement le cabinet de Mme Stoddart nous a informés ce matin qu'elle est très malade et ne peut donc pas assister à la réunion. Elle est remplacée par Mme Chantal Bernier, commissaire adjoint à la protection de la vie privée, qui est accompagnée de Colin McKay, directeur de la Recherche, de la sensibilisation et de l'engagement.
Je propose de garder le premier groupe de témoins jusqu'à 16 h 20, après quoi nous entendrons le second groupe, qui comprend deux témoins. À 17 h 15, nous nous occuperons de la motion de Mme Freeman.
Madame Bernier, nous vous invitons maintenant à présenter votre exposé préliminaire. Je vous prie de le limiter à 10 minutes. Je vous souhaite encore une fois la bienvenue au comité.
:
Merci, monsieur le président.
Encore une fois, je présente toutes les excuses de Mme Stoddart, qui aurait beaucoup aimé se joindre à vous aujourd'hui.
Pour débuter, j'aimerais féliciter le comité d'avoir choisi d'aborder une question aussi pertinente et d'actualité que la protection de la vie privée dans le contexte du gouvernement transparent.
Au fur et à mesure qu'on demande de plus en plus de transparence de la part du gouvernement, la question de la protection des renseignements personnels est évidemment de plus en plus mise en lumière. Je pense que c'est un équilibre sur lequel on doit absolument se pencher dans une démocratie. Je suis donc heureuse de pouvoir venir ici aujourd'hui pour justement contribuer, je l'espère, à vos discussions.
[Traduction]
En septembre 2006, les commissaires fédéraux, provinciaux et territoriaux à l'information et à la protection de la vie privée ont signé une résolution appuyant et encourageant la transparence gouvernementale, comme moyen de favoriser la transparence et la responsabilité. La résolution disait expressément que la transparence gouvernementale doit dûment tenir compte de la protection de la vie privée, de la confidentialité et de la sécurité.
La lettre que la commissaire a adressée au comité le 15 juillet abordait la question des liens entre la transparence gouvernementale et la protection de la vie privée. Elle mentionnait que toute considération d'intérêt public favorisant la communication de l'information devait être mise en balance avec l'intérêt individuel du droit à la vie privée. Notre commissariat appuie les efforts déployés pour renforcer l'accès en ligne au gouvernement et favoriser la transparence, la responsabilité et l'engagement envers le public, mais il exhorte le gouvernement à ne pas perdre de vue la responsabilité de protéger la masse de renseignements personnels qu'il détient.
Permettez-moi de mentionner quelques préoccupations liées à la vie privée qui doivent guider notre discussion.
L'intégration de la transparence gouvernementale et de la protection de la vie privée dépend de plusieurs considérations que mettent sérieusement à l'épreuve les nouvelles technologies de l'information. La première considération est liée à la nature de l'information. Est-ce que des renseignements apparemment anonymes peuvent se transformer en renseignements personnels grâce à des interventions technologiques? Deuxièmement, de quelle façon l'ère numérique se répercute-t-elle sur l'équilibre traditionnel entre la transparence et la protection de la vie privée? Je vais examiner chaque considération à part en donnant des exemples concrets.
Premièrement, qu'est-ce que des renseignements personnels? Il y a une différence entre données ouvertes et informations ouvertes, ou entre données structurées et non structurées, la nuance constituant un aspect clé de l'examen. Les données structurées consistent essentiellement en faits, chiffres, ensembles statistiques, cartes géographiques, données météorologiques, etc. Ces ensembles de données ne contiennent aucun renseignement personnel identifiable. La Loi sur la protection des renseignements personnels s'applique s'il est établi que des données contiennent des renseignements personnels concernant une personne identifiable. Le problème, c'est que la limite entre l'identifiable et le non identifiable s'estompe de plus en plus avec l'apparition de nouvelles technologies de l'information. Ce qui constitue au départ des renseignements anonymes peut, grâce à l'utilisation de renseignements provenant d'autres sources et à des manipulations informatiques utilisant de puissantes technologies de bases de données, donner lieu à des données pouvant être reliées à des personnes particulières.
En voici deux exemples concrets. Dans le premier cas, une personne s'est plainte au commissariat parce qu'une organisation avait combiné des données démographiques de Statistique Canada à des renseignements tirés des pages blanches de l'annuaire téléphonique pour créer de nouveaux renseignements personnels, dont l'utilisation aurait dû être soumise à un consentement préalable. Notre enquête a révélé que cette plainte particulière n'était pas vraiment fondée parce que les nouvelles données produites concernaient des quartiers plutôt que des personnes identifiables. Il n'en reste pas moins que cette affaire nous a obligés à réfléchir aux conséquences de la fusion de bases de données différentes.
Le second exemple montre comment des données apparemment anonymes peuvent se transformer en renseignements personnels. Il s'agit de l'affaire Gordon c. Canada (ministre de la Santé). Nous avons obtenu l'autorisation de présenter des arguments dans cette affaire, qui a été entendue par la Cour fédérale en 2008. Dans ce cas, la demande d'accès à l'information d'un journaliste portant sur des données du système d'information de Santé Canada sur les effets indésirables des médicaments avait été acceptée, à l'exception du contenu de 12 zones de données. On avait jugé que ces zones pouvaient donner accès à des renseignements personnels identifiables. La Cour devait déterminer si la province d'origine d'un rapport ayant trait aux effets indésirables d'un médicament devait être exemptée de l'accès.
Le juge Gibson a estimé qu'il y avait des preuves sérieuses établissant que la divulgation de la province d'origine pourrait permettre d'identifier une personne particulière et, partant, donner accès à de précieux renseignements. De toute évidence, une telle divulgation n'était pas justifiée dans l'intérêt public.
Une seconde considération que je voudrais vous signaler concerne les effets d'Internet sur la transparence et la protection de la vie privée. La position du commissariat quant à la publication des décisions des tribunaux administratifs sur Internet en est un exemple. Les tribunaux administratifs fédéraux relèvent du commissariat puisqu'ils sont assujettis à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Nous sommes d'avis que la publication sur Internet a des répercussions sur les renseignements personnels qui vont au-delà des avantages du point de vue de l'intérêt public.
[Français]
Afin de réconcilier les objectifs de transparence du gouvernement et de protection de la vie privée des individus par rapport aux tribunaux administratifs, notre bureau, avec la collaboration de nos homologues des provinces, a développé un document de référence qui offre justement des conseils et des paramètres aux tribunaux administratifs quant à la divulgation électronique de leurs décisions. Ce document de référence est affiché sur notre site Web.
[Traduction]
Nous offrons, dans le document de référence, quelques recommandations susceptibles d'aider les tribunaux administratifs à trouver l'équilibre nécessaire entre la transparence et la protection des renseignements personnels. Par exemple, nous recommandons que le tribunal détermine d'abord s'il a l'obligation légale de mettre sa décision à la disposition du grand public. Deuxièmement, nous recommandons qu'il juge si la divulgation de l'information est nécessaire et si elle est indiquée, encore une fois sur la base de l'intérêt public. Nous croyons qu'il faut évaluer l'intérêt public en tenant compte d'une série de considérations, comme la protection du public contre la fraude, les préjudices matériels ou les fautes professionnelles ou encore la dissuasion. Si la divulgation de renseignements personnels sert l'intérêt public, il faut quand même envisager le caractère délicat de l'information, son exactitude et la possibilité que la divulgation porte préjudice à la personne intéressée.
Je voudrais maintenant aborder le principe de la protection de la vie privée au stade de la conception. Il s'agit d'une approche préventive qui impose d'intégrer au départ les considérations relatives à la protection de la vie privée dans la conception des nouveaux programmes et des nouvelles bases de données, plutôt que d'y penser après coup. Ce concept est essentiel à la transparence gouvernementale.
Créer un climat de confiance entre le gouvernement et les citoyens constitue un élément clé de la transparence. À cette fin, il est essentiel de traiter avec respect les renseignements personnels des gens, de les sauvegarder et de veiller à éviter toute divulgation abusive. C'est la raison pour laquelle les autorités chargées de la protection des données sont de plus en plus persuadées, tant chez nous qu'ailleurs dans le monde, que les gouvernements doivent directement prévoir la protection des renseignements personnels au stade de la conception de tout programme ou service servant à recueillir des renseignements personnels. La protection de la vie privée doit constituer l'option par défaut et non une chose à laquelle on pense plus tard.
Au niveau opérationnel, il est important d'examiner en détail la logistique, l'architecture et les risques des projets de renforcement de la transparence gouvernementale. Compte tenu du rythme auquel les gouvernements avancent, il est vital de penser à une formation régulière en protection des renseignements personnels, surtout dans le cadre des projets informatiques, à des règles et des processus appropriés de communication de l'information ainsi qu'à l'organisation et à la dotation des systèmes existants d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.
Je voudrais également parler de l'évaluation des initiatives de transparence gouvernementale. Chaque fois que le gouvernement communique des renseignements, il doit procéder à une évaluation sérieuse de sa conformité à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Chaque ensemble de données doit faire l'objet de diverses évaluations portant sur le genre de données, l'objet de la communication de l'information, la nature de l'organisation et les enjeux en cause. Le commissariat se fait un plaisir d'aider les ministères et les organismes fédéraux à renforcer leurs pratiques de protection des renseignements personnels dans le cadre de son examen de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée.
[Français]
J'aimerais donc conclure en réitérant notre appui au gouvernement transparent comme étant une clé de notre démocratie. La transparence, par ailleurs, ne devrait pas venir au détriment des droits fondamentaux des citoyens à la protection de la vie privée. Cet équilibre délicat que nous avons établi jusqu'à présent entre la transparence et la vie privée ne doit pas être compromis par de nouvelles technologies qui rendent l'information à la fois plus accessible que jamais auparavant et plus recherchée que jamais auparavant.
Nous encourageons donc le gouvernement à continuer d'incorporer la protection de la vie privée dans le développement des nouveaux systèmes de technologie de l'information et de ses bases de données, et à continuer de valoriser la vie privée comme étant une caractéristique immuable de la dignité humaine.
[Traduction]
Je vous remercie. Je suis maintenant prête à répondre à vos questions avec mon collègue Colin McKay. Merci beaucoup.
Je veux d'abord vous parler d'une déclaration assez générale faite par la juge en chef de la Cour suprême du Canada, Beverley McLachlin. Elle a elle-même avancé l'idée que nous avons actuellement un tel contexte de dissémination de l'information que le principe des tribunaux ouverts a pris un sens allant bien au-delà de ce qu'on avait envisagé au départ.
Le principe des tribunaux ouverts a pour but de mettre en lumière le processus judiciaire — pas nécessairement les parties — de façon à tenir les tribunaux responsables de leurs actes. À l'heure actuelle, la publication des décisions sur Internet donne au public des renseignements sur les parties. Dans le contexte particulier des tribunaux administratifs fédéraux, qui s'occupent de questions très personnelles et très délicates, comme l'invalidité, les plaintes et la discrimination, la publication sur Internet peut affaiblir la protection de la vie privée, causant un préjudice qui va bien au-delà de l'intérêt public servi.
J'aimerais vous raconter à cet égard une petite anecdote. Cet été, j'ai reçu un courriel d'une personne qui me demandait conseil. Elle venait de découvrir que sa plainte à un tribunal administratif fédéral devait bientôt être réglée et que la décision serait placée sur Internet. Comme cette personne se plaignait de discrimination, elle craignait, si la décision était rendue publique, que cela nuise à sa carrière future. Elle me demandait si elle ne ferait pas mieux, dans ces conditions, de retirer sa plainte. Bien sûr, je lui ai répondu que je ne pouvais pas intervenir dans sa décision, mais qu'elle devait supposer que la décision serait effectivement publiée sur Internet parce que nous n'avions pas encore réussi à persuader les tribunaux de faire preuve d'autant de discrétion que nous l'aurions voulu.
Je vous raconte cette anecdote parce qu'elle met en évidence la possibilité d'une limitation de l'accès aux tribunaux administratifs parce qu'Internet a donné lieu à des effets sur la vie privée qui vont au-delà de ce qu'on avait pensé au départ.
:
Bonjour, tout le monde, et bien sûr bonne Saint-Valentin. C'est merveilleux de pouvoir discuter de données en ce jour faste.
Votre greffier m'a donné un grand devoir à faire, dont la plus grande partie se trouve dans mon mémoire. J'espère que vous l'avez reçu.
Je n'aborderai cependant pas toutes les questions qui figurent dans le mémoire, mais je vais vous présenter un survol rapide. J'ai commencé par une description de ce que sont les groupes de la société civile et de ce qu'ils font. J'ai mentionné deux organisations particulières de la société civile, à savoir le Consortium des données communautaires et le Système de rapports sur la qualité de vie de la Fédération canadienne des municipalités. J'ai également parlé du Centre de recherche en géomatique et en cartographie, centre de recherche officiel de l'Université Carleton qui utilise beaucoup de données et qui en produit aussi.
J'explique ensuite pourquoi la transparence gouvernementale est importante. J'expose certains des problèmes qui se posent et parle des données publiques qui devraient être accessibles aux groupes de recherche communautaires, de ce que le gouvernement fédéral peut faire pour s'orienter vers une politique de données publiques plus ouverte et trouver des moyens de consulter les utilisateurs. Enfin, je présente quelques recommandations.
Je n'examinerai pas tout cela aujourd'hui. J'axerai plutôt mon exposé sur les organisations communautaires, les organisations de recherche, les problèmes et les recommandations.
Je commencerai par les organisations communautaires. Il y en a des milliers au Canada qui font du travail de la plus haute importance pour la société civile. Elles peuvent s'occuper de choses telles que l'aide aux sans-abri, la sécurité alimentaire, la planification urbaine, l'éducation, la santé des populations, etc.
Le Consortium des données communautaires est une organisation qui fait des achats groupés de données de Statistique Canada dans le cadre d'une licence de type consortium. Il le ferait autrement, mais, comme nous le savons tous, Statistique Canada a une politique de recouvrement des coûts qui fait que ses données sont très coûteuses et font l'objet de licences très exclusives comprenant des restrictions très strictes sur le partage. Les membres ont donc dû former ce consortium pour être en mesure d'échanger ces informations entre eux, en mettant en place une entité et une infrastructure de partage de données et en mettant au point des moyens d'utiliser les données publiques pour informer leurs utilisateurs.
Le Consortium des données communautaires se compose de 17 réseaux de données regroupant 50 municipalités, villes et régions du pays. Il compte 850 membres comprenant notamment des conseils scolaires, des services de police, des comtés, des villes, de grandes régions métropolitaines, Centraide, des conseils de planification sociale et des centres de santé et de ressources communautaires. Parmi eux, des chercheurs travaillant dans la communauté se servent de toutes sortes de données publiques provenant de multiples organismes gouvernementaux, et surtout de Statistique Canada, pour prendre des décisions locales fondées sur des preuves. Ces groupes utilisent les données pour élaborer des plans de services humains et des stratégies d'atténuation de la pauvreté et pour prendre des décisions éclairées en matière de développement durable, d'environnement, de santé des populations, etc. Comme je l'ai dit, ils le font par l'entremise de l'infrastructure appelée Consortium des données communautaires.
Le plus important, pour ces groupes, est de disposer de données regroupées au niveau de la communauté, c'est-à-dire au niveau des quartiers, des districts de santé, des secteurs municipaux, etc. Il s'agit donc de données réparties à l'échelle inframunicipale. En effet, lorsqu'on examine les tendances et les schémas à l'échelle de la communauté, on peut mieux cibler les efforts afin de réaliser le mandat de l'organisation de la société civile qu'on représente. Je vous ai donné une liste de ces organisations.
Le système de rapports sur la qualité de vie produit par la Fédération canadienne des municipalités porte sur 24 villes de sept provinces du Canada. Il recueille des données auprès de la SCHL, d'Industrie Canada, de Citoyenneté et Immigration Canada, d'Environnement Canada, d'Élections Canada, du secteur privé, des provinces et des ONG et obtient des données administratives des 24 villes participantes. Ces données servent à produire une série d'indicateurs portant sur 10 domaines, comme les caractéristiques démographiques, l'engagement civique, l'infrastructure communautaire, l'éducation, l'environnement, etc.
Le système dispose d'un excellent outil appelé « outil de collecte de données municipales ». Dans chaque ville, un responsable désigné fait des recherches dans les établissements municipaux locaux pour trouver des données sur les sans-abri, le logement, les installations de loisirs, la qualité des parcs publics et des piscines, et ainsi de suite. Ces responsables établissent le prix du transport en commun dans la ville et les problèmes liés à la sécurité sociale et cherchent à déterminer si la population a les moyens de payer ces services.
Le système comprend en outre un outil de visualisation des données qui sera mis en service au cours de l'été. Comme vous le savez probablement, le système produit un certain nombre de rapports thématiques vraiment importants à l'échelle nationale, ainsi que des rapports locaux intéressant les 24 villes. Même si nous pouvons avoir des plates-formes nationales pour le logement et les sans-abri, l'immigration et l'infrastructure sociale, nous savons que chaque ville a des particularités à cet égard. Calgary n'est pas Vancouver, qui se distingue d'Halifax. Toutefois, ces rapports servent de base à des stratégies nationales et donnent des renseignements sur tout un éventail de questions.
Il y a aussi le Centre de recherche en géomatique et en cartographie, qui est le centre de recherche officiel de l'Université Carleton. Le centre s'intéresse principalement aux sources ouvertes, à l'interopérabilité, à la cybercartographie, à l'archivage et à la préservation des données. Il produit en outre des atlas de différents types — multimédia, multisenseurs, dynamiques, interactifs — sur toutes sortes de questions, comme les connaissances indigènes, les peuples autochtones du Nord et les traités, les risques d'itinérance, etc.
Le centre de recherche est essentiellement financé par des fonds publics. Il estime donc que les résultats de ses travaux appartiennent au public. Par conséquent, ses atlas et les comités au sein desquels il mène ses travaux visent dans la mesure du possible des données ouvertes. S'il produit lui-même des données, il les communique dans des formats ouverts et dans le cadre de licences ouvertes. Il utilise et crée des technologies en source ouverte axées sur l'interopérabilité et distribue les technologies qu'il met au point et les produits qu'il utilise dans le cadre de licences libres de type BSD.
Les trois organisations — le Consortium des données communautaires, le système de rapports sur la qualité de vie de la Fédération canadienne des municipalités et le Centre de recherche en géomatique et en cartographie — comptent un millier de chercheurs travaillant partout dans le pays, qui utilisent, manipulent, étudient et analysent des données publiques à différentes échelles dans leurs collectivités.
:
Oui, j'oublie constamment ces pauvres dames qui traduisent dans leur cabine.
Excusez-moi, mesdames. Je parle un peu trop vite. Je vais faire de mon mieux.
Ces organisations de recherche, qui travaillent dans des universités et des collectivités, pourraient toutes bénéficier d'une plus grande transparence gouvernementale et d’une politique de données plus ouverte. Pourquoi? Parce qu'elles pourraient alors consacrer leur temps à la recherche au lieu de le consacrer à trouver de l'argent pour payer les données publiques dont elles ont besoin. Elles pourraient concentrer leurs efforts sur l'utilisation des données plutôt que de passer 70 p. 100 de leur temps — ces chiffres sont réels parce que je suis obligée de passer énormément de temps à le faire — à essayer de localiser les données dans la multitude d'organismes gouvernementaux que nous avons à tous les paliers de gouvernement au Canada.
Elles pourraient profiter d'une telle politique si elles n'ont pas à négocier avec des administrateurs publics des conditions de licence. Il est très difficile de négocier l'accès aux données nécessaires pour faire de la recherche sociale et de la recherche en politiques. Personne ne demande des données personnelles. Nous voulons tous obtenir des données regroupées en fonction des caractéristiques géographiques particulières que chacun d'entre nous utilise dans son secteur d'analyse. Dans le contexte actuel où personne ne veut prendre de risques dans la fonction publique, si on essaie de négocier l'accès à un ensemble de données, qui peut ou non présenter un ministre donné sous un jour favorable, on n'obtiendra probablement rien du tout parce qu'il n'y a pas de politique générale pouvant guider les fonctionnaires sur la façon de prendre des décisions concernant les ensembles de données dont ils se servent.
Nous avons un certain nombre de problèmes, comme le manque de normes relatives au format des données publiques. Dans le cas des groupes communautaires avec lesquels je travaille, le regroupement des données est important. Le gouvernement fédéral ne croit pas avoir le mandat de servir les collectivités. C'est pourtant là que nous vivons. Nous vivons tous dans un quartier, un secteur municipal, une ville, un comté, etc. Nous voudrions que les données soient regroupées en fonction de caractéristiques géographiques généralement reconnues, c'est-à-dire en fonction de ces différentes collectivités, des répartitions faites par Statistique Canada ainsi que des circonscriptions électorales fédérales ou des districts de santé.
Il y a des politiques rétrogrades de recouvrement des coûts. Nous disons souvent, en plaisantant, que nous devons hypothéquer la maison pour être en mesure d'étudier la situation des sans-abri au Canada. C'est déplorable. Ce sont nos données publiques. Nous avons payé leur production avec nos impôts. Je vous en prie, financez Statistique Canada pour qu'il n'ait pas à vendre ses données publiques. Toutefois, n'obligez pas Statistique Canada à offrir gratuitement ses données dès demain sans augmenter en conséquence son budget. Accordez-lui davantage de crédits pour couvrir les coûts qu'il ne pourra plus recouvrer. Ensuite, mettez donc ces données publiques à la disposition des citoyens afin que ces groupes communautaires puissent continuer à faire l'excellent travail qu'ils ont accompli jusqu'ici.
J'ai déjà mentionné le problème des licences restrictives et des données sans interopérabilité. Je vous ai déjà parlé de l'absence de politiques d'accès aux données et de mécanismes de recherche des données. Il n'y a ni portail ni catalogue. Il faut aller parler à tous les ministères, organismes, agences et sociétés d'État de l'administration fédérale. Il faut faire des appels à froid et parler chaque fois à au moins 20 ou 30 personnes avant d'arriver à trouver l'ensemble de données qu'on cherche. Ensuite, il faut négocier. S'il vous plaît, faites en sorte qu'il soit plus facile de trouver les données en les organisant et en les dotant de bonnes descriptions et de bonnes métadonnées.
De plus, imposez à toute personne qui reçoit des fonds publics de recherche au Canada d'avoir une stratégie de gestion des données. Il est déplorable de constater que, chaque fois qu'une recherche est faite au Canada, les chercheurs ne sont ni autorisés à communiquer leurs données ni financièrement appuyés pour le faire. Cela est très simple. Les IRSC ont commencé à le faire. De plus, l'Année polaire internationale est un excellent exemple d'un projet canadien de financement de la recherche conçu dans cette optique.
Ajoutons à cela que nous n'archivons et ne préservons pas nos données. Je vous en prie, appuyez la création d'une archive de données au Canada. Cela est insensé. Ce sont des ressources qui font partie de notre patrimoine. Nous devons les préserver pour le long terme.
Bien sûr, le financement de la recherche portant d'une façon générale sur les données est insuffisant.
Je vais conclure en formulant quelques recommandations de base. Vous pourrez examiner le mémoire en détail plus tard. Je vous ai fourni le nom des organisations que vous pouvez consulter ainsi qu'une liste des choses que vous pouvez faire, mais, je vous en prie, nommez immédiatement un agent en chef des données dans chaque ministère et chaque organisme. Cette personne aurait pour rôle de dresser un inventaire des données de l'organisme, en précisant qui les produit et comment. L'agent appliquerait tous les bons principes d'accès ouvert, de métadonnées et de gestion des données. Il créerait un portail qui permettrait aux chercheurs et aux organisations de la société civile qui veulent faire leur travail de s'adresser à un guichet unique, et non à une cinquantaine de personnes, pour avoir accès à un ensemble de données.
Si vous pensez au projet de la Fédération canadienne des municipalités, il compte quelque 200 variables. Je passe tout mon temps à parler au téléphone à tous ces charmants fonctionnaires, mais je préférerais utiliser les heures que j'y consacre à faire de l'analyse et à rédiger des rapports, car c'est cela, en définitive, qui est utile aux Canadiens.
Je propose en outre de dresser un catalogue. Considérez les modèles GéoGratis et GéoBase. J'examinerais en outre la façon dont l'infrastructure de données géospatiales a été créée à Ressources naturelles Canada. C'est un excellent exemple canadien d'une infrastructure de données ouvertes. Ensuite, je chargerais les cerveaux les plus brillants du pays d'étudier ensemble ce problème. Je ne crois pas que ce soit la responsabilité exclusive du gouvernement de le faire. De nombreuses organisations devraient y contribuer: organismes de recherche, provinces, territoires, ministères fédéraux, collectivités et secteur privé.
Enfin, vous devriez envisager des types de licences plus créatifs et plus courants pour l'ensemble des données du gouvernement du Canada, qu'il s'agisse de renseignements administratifs, de cartes, de données du recensement, etc. La Nouvelle-Zélande l'a fait, de même que le Royaume-Uni et l'Australie. Ce sont tous des pays qui ont, comme nous, le droit d'auteur de la Couronne de type Westminster. Nous devrions aussi être en mesure de le faire.
Je vous remercie.
Dans les communautés scientifiques, les données ouvertes permettent d'établir des normes plus générales permettant des échanges plus étendus de données et favorisent une culture de citoyens-scientifiques. Dans le domaine de l'éducation, les bons établissements ouvrent l'accès à la meilleure information du monde.
Nous avons parlé de données et de systèmes empoisonnés dans lesquels les particuliers n'auront jamais accès à leur propre dossier de santé. Nous avons aussi parlé de la science stimulante en provenance de GCPedia et de notre communauté de géomatique.
D'autres ont expliqué comment les données ouvertes peuvent assurer un accès plus efficace et plus utile à l'information. Le monde des affaires examine des modes plus ouverts et plus sociaux. Une ouverture favorable aux consommateurs est un avantage concurrentiel. Nous avons évoqué la possibilité de créer une culture d'innovation et de résolution de problèmes fondée sur le fait que tant de Canadiens sont en ligne et avons expliqué comment ce que nous bâtissons peut donner lieu à des systèmes de connaissance cohérents et réutilisables, qui seraient à la disposition de tout le monde et dans lesquels un adolescent de 14 ans ou un aîné de 80 ans peuvent accéder aux mêmes données et aux mêmes réseaux qu'un chercheur, organiser ces données à leur gré et communiquer avec d'autres. Nous avons parlé de la façon dont les gens peuvent cesser d'utiliser leur ordinateur comme une machine à écrire pour créer plutôt des données réutilisables, de la façon dont beaucoup de gens peuvent participer plus intensément aux processus démocratiques et de la façon dont tout cela peut servir à renforcer la confiance dans le gouvernement.
Je voudrais vous parler d'un projet particulier de données ouvertes. Aujourd'hui, si je vais dans une clinique médicale, je pourrais fort bien me faire dire que personne ne peut me voir dans la journée. Si je fais des recherches en consultant de nombreuses sources complètement différentes de renseignements sur les cliniques médicales, je pourrais avoir une meilleure idée de la clinique où j'aurais le plus de chances de voir rapidement un médecin. Le logiciel moderne basé sur Internet permet de trouver des solutions faciles aux problèmes de ce genre. Dans une seule après-midi, j'ai pu recueillir les coordonnées des salles d'urgence de tous les hôpitaux de Montréal. Je les ai placées sur une carte en incluant la position actuelle de l'utilisateur et de l'hôpital le plus proche, puis j'ai ajouté les renseignements que j'avais glanés sur la capacité et l'utilisation des ressources. Même cet effort aurait pu être utile à quelqu'un qui essaie de se faire une opinion éclairée et d'assumer une plus grande responsabilité pour sa propre santé. Il pourrait aider beaucoup de gens à perdre moins de temps à rester assis dans une salle d'attente et pourrait contribuer à équilibrer le système de santé grâce au choix des cliniques les plus proches et les moins susceptibles d'être encombrées.
Toutefois, si les hôpitaux et les cliniques publiaient délibérément des renseignements sous forme de données ouvertes de qualité, il serait possible de faire beaucoup plus. Nous pourrions déterminer quelles cliniques sont les plus indiquées pour différentes maladies et développer des représentations prédictives en temps réel permettant de déterminer les heures les plus favorables correspondant à des emplacements donnés. Une fois la conception technique faite, les gens pourraient faire usage de leur expérience pour mesurer les problèmes et les succès. On obtiendrait ainsi un circuit harmonieux et peu coûteux de rétroaction pour les gens et leur système de santé. Avec des données ouvertes, des outils Internet peu compliqués et une diffusion à grande échelle, nous aurions des incidences financières minimes et des effets profonds. Comme les hôpitaux sont fragmentés, il est bien possible que nous n'ayons jamais un système officiel complet, mais, avec un niveau minimal de soutien en données ouvertes, nous pouvons disposer de systèmes utiles constamment en évolution qu'aucun organisme ne pourrait établir dans un avenir prévisible.
Beaucoup de gens comme moi peuvent créer un système de ce genre en une après-midi, parce que c'est le métier que nous exerçons dans la journée. Nous travaillons sur les plus grands systèmes du monde libre, qui nous permettent de placer des données interactives dans les interfaces Web les plus évoluées et les plus reconnues du monde. Par comparaison, les interfaces spéciales faites sur mesure qu'utilisent souvent les organismes publics ne font pas le poids. Ces interfaces obligent l'utilisateur à réapprendre un système qui est ordinairement loin d'être aussi bon que les meilleurs systèmes du Web et à couper-coller une adresse pour obtenir un itinéraire de transport en commun ou voir ce qu'il y a aux alentours. De plus, elles ne permettent pas à l'utilisateur d'ajouter des renseignements pouvant être utiles à d'autres.
J'ai appris ces deux derniers jours, en consultant les actualités, que certains gouvernements ne profitent pas de ce qu'Internet a de mieux à offrir. Dans un cas, le gouvernement britannique a payé une maison de consultants 200 000 £ pour créer un système qui a planté aussitôt qu'il a été mis en ligne. Un programmeur a conçu en huit heures un système beaucoup plus robuste. Dans un autre cas, la BBC a annoncé qu'elle devait fermer 172 sites Web pour des motifs financiers. Un type a réussi à capturer les données de ces sites et à les archiver en se servant d'un système d'hébergement à 4 $ par mois.
En recourant gratuitement à des outils Web peu coûteux, des gens se servent de cartes numériques pour trouver des restaurants et des itinéraires d'autobus. Craigslist a privé les journaux de leurs revenus d'annonces classées en recourant à des bénévoles pour offrir un service gratuit facile à utiliser. Les gens trouvent des renseignements sur toutes sortes de sujets en consultant l'encyclopédie populaire Wikipédia. Les nouvelles détaillées voyagent rapidement sur les réseaux sociaux et sont accompagnées de commentaires personnels. Des sites tels que openparliament.ca publient les délibérations du Parlement et permettent d'en faire un examen plus fin. Ce sont quelques exemples des avantages des réseaux numériques. Des données ouvertes de base permettent aux gens de réutiliser efficacement l'information, de participer aux processus démocratiques et de pratiquer l'apprentissage continu.
Dans une génération, Internet sera profondément enraciné dans tout ce que nous ferons. Nous continuerons à être témoins de vagues d'innovation issues des cerveaux les plus brillants et les plus motivés du monde. L'interaction ne sera probablement pas profonde pour la plupart des gens, mais elle le sera pour certains et elle touchera tout le monde.
Tout ce potentiel se fonde sur les caractéristiques existantes et la conception des données informatiques dans le Web extraordinaire créé par Tim Berners-Lee, qui dirige le développement des données ouvertes au gouvernement britannique. Son mandat consiste à rendre les données ouvertes et accessibles, avec une participation directe des particuliers.
Tirer des leçons de ce qui se passe dans le monde, s'en servir et contribuer aux efforts déployés, tout cela doit constituer une partie essentielle de l'approche canadienne. Nous savons qu'il existe des qualités de données ouvertes allant de l'opacité d'un document PDF aux données richement organisées et reliées à l'aide de normes et de licences ouvertes.
L'accessibilité signifie que les données doivent toujours être organisées selon de multiples perspectives, dans une culture où chacun est persuadé que c'est la bonne chose à faire. Même si la plupart des gens sont en ligne et si les ordinateurs peuvent donner l'égalité aux handicapés visuels et aux personnes à mobilité réduite, il reste qu'un tiers des Canadiens ne sont pas en ligne et ne le seront jamais. Nous pensons donc aux réseaux sociaux comme moyen de relier les gens entre eux.
Beaucoup de courtiers du savoir seront nécessaires à l'intérieur comme à l'extérieur de l'administration publique. Il s'agit d'une entreprise énorme, mais l'investissement nécessaire produira des gens plus intelligents et plus capables et donnera lieu à des améliorations réelles de la qualité de vie dans une économie du savoir. Il y aura des avantages à court terme, mais nous devons créer des objectifs, des visions et des points de repère concrets à long terme, avec la participation ouverte de nombreuses personnes.
Si nous pensons à des progrès réels, nous constaterons que plus il y aura d'information, plus nous aurons besoin de l'organiser soigneusement au moyen de systèmes tels que CKAN. Autrement, il sera impossible de trouver les renseignements recherchés ou l'information sera redondante, ce qui nous fera perdre des occasions. Des répertoires de données qui ne se basent pas sur ces normes structurées nous feront reculer.
Les licences doivent être déterminées. Pour bien des raisons, les licences par attribution Creative Commons peuvent être considérées comme les meilleures. Elles sont bien connues et établissent des liens avec l'origine des données.
Le gouvernement doit négocier ouvertement avec des sociétés telles que Google pour veiller à ce que les données disponibles dans les services virtuels dématérialisés ne dépendent d'aucun fournisseur particulier et deviennent plutôt des normes comme celles des services de transport en commun. Mon expérience des systèmes hospitaliers me montre qu'il existe des ensembles de données regroupées susceptibles d'être partagés et d'autres qui ne peuvent pas l'être. Les ministères doivent habiliter leurs experts et nommer des gens chargés de déterminer de quelle façon délimiter la réutilisation des données et comment établir une culture de données ouvertes.
Faire en sorte que la plupart des gens comprennent comment réutiliser les données est un problème plus difficile, mais le gouvernement peut travailler utilement sur de multiples fronts en collaborant avec les médias, en lançant une campagne de sensibilisation et de participation et en appuyant des groupes de protection de la vie privée et de lutte contre la fraude pour inspirer une culture de curiosité divertissante et réaliste dans les réseaux sociaux. Cette attitude constituerait le meilleur point de départ pour créer une culture de confiance et de participation.
Enfin, si le gouvernement compte procéder à des consultations électroniques dans ce domaine, ce serait une excellente occasion de travailler ouvertement à une première étape réelle d'organisation des enjeux et de faire vraiment participer les gens aux discussions comme participants de première catégorie.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie aussi les deux témoins.
Tracey, je tiens à vous remercier particulièrement pour votre document très complet et vos recommandations.
Je suis bien d'accord avec vous que nous avons besoin de données ouvertes et accessibles. Toutefois, on se demande parfois quelles données croire. Comment faire la distinction entre celles qui sont exactes et celles qui ne le sont pas?
Dans l'exemple le plus récent, un centre d'études et de recherches a contesté — à tort, je crois — les données de Statistique Canada sur la criminalité. Il semble que les chiffres avaient été prélevés d'une façon très sélective dans un autre rapport. Quoi qu'il en soit, nous disposons maintenant des deux séries de statistiques.
À votre avis, comment les données ouvertes et le gouvernement transparent doivent-ils se présenter pour qu'on puisse avoir confiance dans les données elles-mêmes?
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En ce moment, les municipalités doivent acheter les données, alors que je paie des taxes municipales. Les gouvernements provinciaux et territoriaux doivent également acheter les données, et j'acquitte aussi des impôts provinciaux et territoriaux. Le gouvernement fédéral et toute la kyrielle des ministères et des organismes doivent tous acheter les mêmes données.
Si je dois les acheter, je les achèterai, même si je les ai déjà payées avec mes impôts. De plus, les organismes de recherche, comme les bibliothèques universitaires qui participent à l'Initiative de démocratisation des données, achètent aussi ces données. À titre d'utilisatrice, j'ai dû moi-même, comme toutes ces organisations pour lesquelles je travaille, acheter ces mêmes données une dizaine de fois. Or il s'agit là de ressources qui ne diminuent pas avec l'utilisation.
Je veux dire par là que le recouvrement des coûts pourrait peut-être être plus coûteux qu'une simple communication des données. Considérez Ressources naturelles Canada et les décisions prises au sujet de GéoGratis, de GéoBase, de l'Atlas du Canada, de l'infrastructure de données géospatiales, des cartes topographiques, etc. Le ministère s'est rendu compte que les frais d'administration, la collecte des redevances et la gestion des demandes d'accès à l'information peuvent finir par coûter cher. Je crois qu'une demande d'accès à l'information de 5 $ coûte 75 $. Chaque fois que vous achetez des données, pensez à ce qu'il en coûte pour gérer le système.
J'estime qu'il est extrêmement coûteux de nous vendre les données recueillies avec l'argent de nos impôts. Je demande au gouvernement de partager avec nous ces données publiques qui nous appartiennent.
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Au chapitre de l'efficacité, il y a un problème au niveau des normes et des pratiques communes de l'ensemble des organismes de l'administration fédérale. Il serait souhaitable qu'ils regroupent et diffusent tous leurs données de cette façon. Malheureusement, ils ne font pas. Il n'y a pas de pratiques normalisées.
Citoyenneté et Immigration Canada présente ses données en fonction des lieux d'établissement, qui peuvent se situer n'importe où au Canada. D'autres organismes répartissent leurs données selon le code postal. Malheureusement, les codes postaux ne correspondent pas aux quartiers, etc.
Je suis d'avis que nous devrions nous retrousser les manches et considérer les caractéristiques géographiques que les Canadiens ont jadis utilisées pour se décrire eux-mêmes, parler de leurs collectivités et s'organiser. Ensuite, adoptons pour politique de regrouper les données en fonction de ces caractéristiques. Cela serait efficace pour le gouvernement fédéral parce que nous aurions une norme s'étendant à tout le pays. Tout le monde recueille des données ponctuelles, mais chacun les regroupe différemment, de sorte qu'il est difficile de recouper les données.
L'autre aspect de l'efficacité consiste à assurer l'interopérabilité entre les différents organismes. J'aime beaucoup les groupes communautaires, car ce sont eux qui assurent le dynamisme de nos collectivités. Ce sont eux qui nous obligent à rendre compte de ce que nous faisons et à nous assurer de faire ce que nous sommes censés faire, surtout dans les villes. Ils ont besoin des données à ce niveau de détail pour pouvoir concentrer leurs efforts. Par exemple, un conseil scolaire a besoin de connaître la zone qu'il dessert. Dans le domaine de la santé des populations, un comité du Sénat a examiné les déterminants sociaux de la santé. Nous avons besoin de microdonnées pour déterminer où se produisent les problèmes de santé. On pourrait gagner en efficacité dans ce domaine aussi.
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Bonjour à vous deux. Je vous remercie de votre présentation.
Je trouve cela très intéressant, Mme Lauriault, parce que c'est la première fois qu'un témoin vient nous parler des groupes communautaires. Vous avez parlé de la transparence des données pour venir en aide à des gens qui sont démunis tels que les aînés et les sans-abris. Cela permet que plus de données, d'informations et de services sont accessibles gratuitement aux gens qui sont sans moyens.
Ma première question aborde la faisabilité de l'accès à l'information. Vous avez dit qu'il serait intéressant d'avoir un portail. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a la responsabilité de mettre en oeuvre la Loi sur l'accès à l'information et les données ouvertes. Vous parlez d'un portail dans chaque ministère.
Ne privilégieriez-vous pas plutôt un portail unique qui pourrait rediriger tout le monde? Vos usagers, des personnes qui sont souvent à faibles revenus, ne sont pas de grands chercheurs. Vous vous adressez dans vos demandes à des chercheurs qui sont très habiles à chercher l'information. Vous vous adressez aussi à des groupes communautaires et à des communautés plus vulnérables. Un portail unique plus simplifié ne serait-il pas une des avenues que vous pourriez privilégier?
Ma deuxième question s'adresse autant à M. Mason qu'à vous. Elle concerne les renseignements qu'on ne devrait pas divulguer.
Madame Lauriault, votre façon de faire telle qu'expliquée dans votre document est plus claire. Cependant, j'aimerais que M. Mason nous donne un peu plus de précisions. J'ai eu l'impression que même la vie privée pouvait ne pas être protégée dans les huit points qu'il a soulevés dans son document.
Je vais vous laisser répondre.
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La Ville de Montréal participe au travail et aux portails du Consortium des données communautaires. On a donc une communauté et on diffuse les données provenant de Statistique Canada en anglais et en français. Nous communiquons aussi dans les deux langues.
En ce qui a trait au projet sur la qualité de vie avec la Fédération canadienne des municipalités, les données, comme les rapports, sont diffusés aussi en anglais et en français.
On comprend qu'il n'est pas toujours facile de faire en sorte que toutes les banques des données soient en anglais ou en français, mis à part comment elles sont décrites.
La technologie dans laquelle elles sont diffusées, la façon dont on y fait de la recherche et la façon dont elles sont décrites devraient absolument être bilingues. Mis à part les banques de données officielles, comme celles de Statistique Canada et d'Élections Canada, on suggère et on recommande que les autres banques de données soient diffusées dans la langue dans laquelle elles ont été créées.
On parle des fichiers X, Y, Z, 1, 2, 3, 4, avec le plus possible des en-têtes en anglais et en français. C'est notre façon de procéder et de travailler.
Au sujet de votre question sur les portails, prenons l'exemple des bibliothèques publiques ici, à Ottawa. Plusieurs d'entre elles ont leur collection et leur portail. Toutefois, un portail de la Bibliothèque publique de la ville d'Ottawa les rassemble toutes. On cherche à un endroit, mais on est reliés à tous les autres.
On demande donc que le Conseil du Trésor établisse les normes pour ce genre de portail avec les bonnes métadonnées. On les chercherait au même endroit, mais on donnerait la responsabilité aux créateurs des données de bien les gérer dans leur propre institution parce qu'ils sont les plus près de celle-ci.
En ce qui concerne les droits d'auteur, M. Mason ne suggère pas de laisser tomber la question. Il dit que d'autres licences sont plus permissives sur le plan du partage des données numériques. La Nouvelle-Zélande, l'Australie et l'Angleterre ont adopté ces licences.
Il y a une autre licence appelée le Public Domain Dedication and Licence qui vient d'apparaître sur le Web et qui fait partie des suggestions de mon rapport.
Je vous recommanderais aussi d'aller visiter le groupe CIPPIC de l'Université d'Ottawa. David Fewer, Michael Geist et Teresa Scassa sont les experts en droit d'auteur, en particulier en ce qui a trait au droit d'auteur des données.
Vous allez voir des références à la fin de mon résumé. Je vous donne la liste de tous les organismes dont j'ai parlé ici. Vous pouvez aller les consulter pour avoir plus d'informations.
N'hésitez pas, madame Freeman, à communiquer avec moi.
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Je me suis beaucoup inspirée de l'Angleterre. L'histoire des données numériques ouvertes a commencé en Angleterre. Cela avait commencé même avant ça, il y a 400 ans, avec les astronomes et les scientifiques. Ils étaient les premiers à avoir développé les données il y a plusieurs centaines d'années. Ils avaient toujours collaboré et partagé leurs données parce qu'ils savaient qu'avec les données diverses portant sur les lacs et les forêts, il fallait qu'elles soient organisées de façon commune.
L'Angleterre avait vraiment la politique la plus régressive sur le plan du recouvrement des coûts et les licences les plus régressives des pays ayant adopté le système de Westminster, un système comme le nôtre. Cependant, il y a eu une campagne et le journal The Guardian a fait la promotion de la diffusion publique des données. En effet, si on considère l'encadrement de l'information du secteur public, la politique de l'Union européenne et la politique INSPIRE de l'Union européenne, on voit qu'il s'agit de politiques de données ouvertes et d'accès aux données.
L'Angleterre a organisé ses institutions par rapport à ces grandes politiques de l'Union Européenne et dans l'esprit du gouvernement transparent. Tout ce dont je parle ici est là.
Vous pouvez aussi aller voir l'exemple des États-Unis, mais ces derniers constituent un cas particulier parce qu'il ont déjà un système selon lequel la tenue des dossiers créés aux États-Unis est du domaine public.
Quant à nous, nous sommes un peu mal pris parce que nous n'avons pas de système de domaine public pour nos données mais plutôt un système de droit d'auteur de la Couronne. Nous, les citoyens, sommes donc un peu plus loin. En anglais, on dit We are subjects to the Crown.
[Traduction]
Au Canada, notre qualité de citoyens n'est pas la même qu'aux États-Unis.
[Français]
Par conséquent, les responsabilités du gouvernement quant à la diffusion des données sont donc quelque peu différentes.
Pour ma part, je peux seulement rediffuser les données provenant de Statistique Canada si je le fais sous forme de tableau, de charte, de graphique ou de carte. Je n'ai pas le droit d'utiliser les données que m'a confiées Statistique Canada et de les transmettre à David en lui disant d'en faire quelque chose. Pour ma part, je fais une carte et je lui dis de me raconter une histoire sur la base des données. Si je lui fournis les données, j'enfreins en effet la loi canadienne.
C'est ainsi pour tous les objets créés par le gouvernement fédéral en raison de la problématique du droit d'auteur de la Couronne. David et moi ainsi que plusieurs autres organismes avons donc suggéré de protéger le droit d'auteur des données numériques canadiennes, qu'elles soient scientifiques, géomatiques, administratives ou qu'elles proviennent du gouvernement fédéral, en les encadrant par des licences de Creative Commons Attribution ou des licences de Creative Commons Public Domain Database. Si on agit de la sorte, cela veut dire que je pourrais prendre les données de Statistique Canada, en faire l'analyse et confier ces mêmes données à David qui pourrait en faire autre chose à son tour. En outre, si je le voulais, je pourrais faire une analyse et peut-être même revendre les résultats de celle-ci.
Par ailleurs, selon le droit d'auteur de la Couronne, si le gouvernement n'aime pas ce que je dis, il a le droit de reprendre les données. C'est également un peu problématique. On l'a constaté lorsqu'il a été question du recensement alors que le gouvernement avait commencé à en influencer les questions. Il s'agit d'une politique régressive. On ne voudrait pas que toutes les données numériques soient contrôlées de la même façon, surtout les données numériques publiques qui concernent les différentes zones géographiques dont on a discuté tout à l'heure. C'est le problème que suscite le droit d'auteur de la Couronne. Cela ne nous permet pas le partage, la rediffusion et la recréation d'autres objets numériques provenant des données du gouvernement fédéral.
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Il est évident que l'infrastructure a une influence, n'est-ce pas? On a besoin du réseau pour faire passer l'information et les thèmes. Ainsi, le Centre de recherche en géomatique et en cartographie travaille dans le Nord, où les réseaux à grande vitesse font gravement défaut. Nous avons donc dû créer des réseaux locaux pour que les aînés et les étudiants autochtones puissent utiliser les cartes et les atlas qu'ils ont eux-mêmes créés.
On a évidemment besoin d'un réseau pour transmettre le contenu. C'est un enjeu important. De plus, la mesure du débit sur Internet peut constituer un problème, parmi d'autres, si nous parlons de données ouvertes. L'accessibilité a certainement une incidence sous cet angle.
Il y a cependant l'accessibilité que recherchent les personnes handicapées. Le gouvernement du Canada a fait du très bon travail dans ce dossier et a réalisé d'importants progrès grâce à l'initiative de normalisation des sites Internet et des autres normes élaborées par le Conseil du Trésor dans ce domaine. Il y a aussi une chose très importante appelée le Consortium World Wide Web, qui s'occupe particulièrement de créer du contenu pour les personnes handicapées.
Mme Freeman a en outre évoqué un autre très bon point en demandant si ces choses sont faciles à utiliser. Pouvons-nous trouver du contenu? Est-il esthétiquement agréable à voir? Est-il tellement complexe que personne ne peut s'y retrouver ou bien est-il présenté d'une façon conviviale pour encourager les utilisateurs à chercher de l'information et leur permettre de la trouver et de l'utiliser?
C'est ainsi que je vois l'accessibilité, à part l'accès au réseau et aux licences. Pour moi, elle comprend aussi la nomination dès demain d'un agent en chef des données qui m'aidera à trouver les données dont j'ai besoin pour faire de la recherche.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Ma motion se lit comme suit:
Que le Président du Conseil du Trésor soit invité à comparaître devant le Comité dans le cadre de l'étude du gouvernement transparent.
Cela me semble absolument important et même essentiel, compte tenu du fait que nous avons reçu la semaine dernière Mme Corinne Charette, qui est la dirigeante principale de l'information et qui relève du Secrétariat du Conseil du Trésor. Elle travaille déjà sur un portail relatif à un gouvernement transparent. Le Secrétariat du Conseil du Trésor est quand même l'institution responsable de la Loi sur l'accès à l'information, des données transparentes et de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
En ce sens, il apparaît important et même essentiel que le ministre responsable du Secrétariat du Conseil du Trésor, qui a édicté ces lois et qui a la responsabilité de divulguer l'information, vienne au comité pour nous informer des politiques.
Nous avons rencontré la dirigeante de l'information, qui relève de lui, mais on ne connaît pas exactement le mandat qu'il lui a donné. Ce n'est pas clair. Il serait opportun que nous sachions davantage quels sont les directives et mandats donnés à cette dirigeante de l'information qui est responsable des données ouvertes du gouvernement transparent.
Je vous remercie, monsieur le président.