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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
Merci beaucoup de me donner l'occasion de vous rencontrer pour discuter de Street View et de la collecte de données utiles transmises sur des réseaux Wi-Fi, que Google a recueillies par erreur, et de répondre à vos questions.
Je m'appelle Jacob Glick, et je suis conseiller en matière de politique au Canada chez Google. À ce titre, je travaille avec des organismes de réglementation, des décideurs, des universitaires, des représentants de la société civile et l'industrie à des questions de politique d'intérêt public qui touchent Google et l'Internet ouvert. Au Canada, Google a des bureaux à Waterloo, à Toronto, à Montréal et à Ottawa. Nos bureaux d'ingénieurs de Waterloo et de Montréal développent des produits utilisés par des centaines de millions de personnes sur la planète, et ces bureaux connaissent une expansion marquée.
Pour commencer, je ferai le point sur les produits Street View de Google, car la comparution de M. Lister devant le comité remonte à juin 2009. Le déploiement de Street View de Google a été un grand succès, et il a montré comment on pouvait concilier vie privée et innovation pour offrir des services de pointe aux consommateurs.
Avant le lancement de Street View au Canada, nous avons tenu compte de toutes les préoccupations que le comité et la commissaire à la protection de la vie privée ont cernées. Nous avons appliqué la technologie de brouillage la plus perfectionnée pour masquer les visages et les plaques minéralogiques sur toutes nos images. Tous peuvent demander à Google de retirer les images d'eux-mêmes, de leur maison, de leurs enfants ou de leur voiture dans Street View. Enfin, après un an, nous intégrons ce brouillage de façon permanente.
Les Canadiens sont de fervents utilisateurs de Street View. En chiffres absolus, ils sont au troisième rang des plus grands utilisateurs de ce produit dans le monde, derrière les États-Unis et le Royaume-Uni. Depuis le lancement, les Canadiens de tout le territoire se servent de cette cartographie de nouvelle génération pour tracer le parcours à suivre pour aller au magasin, faire la promotion de leur entreprise locale, vendre leur maison et explorer leur pays en ligne.
Nous voulons non seulement mettre le comité au courant du déploiement réussi de Street View, mais aussi vous parler de l'incident des réseaux Wi-Fi, ce qui ne se rattache pas à proprement parler à Street View, mais les véhicules de Street View ont servi de plate-forme
Je tiens à dire d'abord que nous sommes très peinés de cet incident. Ce qui s'est passé n'est pas conciliable avec notre engagement de servir les usagers d'Internet. À dire vrai, cela nous embarrasse.
Je vais donner un aperçu de ce qui s'est passé et expliquer comment nous avons découvert le problème, ce que nous avons fait tout de suite et ce que nous faisons maintenant pour prévenir tout autre incident semblable. Ensuite, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
D'abord, je soulignerai quelques faits importants. Google n'a transféré aucune donnée utile transmise par réseau crypté. Google ne voulait utiliser les données d'aucune manière, et elles n'ont servi dans aucun de ses produits ou services. Aucune donnée utile canadienne n'a été cédée ni communiquée à des tiers. Les données ont été isolées et mises en sécurité.
Que s'est-il donc passé? En 2007, comme vous le savez, Google se préparait à lancer Street View et déployait un parc de véhicules dans le monde pour recueillir des images à l'échelle de la rue. En même temps, un ingénieur de notre groupe de services géodépendants a eu l'idée d'utiliser les véhicules de Street View comme plate-forme pour faire ce que bien d'autres entreprises ont fait, c'est-à-dire déceler les points d'accès Wi-Fi pour appuyer les services géodépendants.
C'est une pratique courante dans l'industrie que d'utiliser les points d'accès publics Wi-Fi comme points de repère pour renseigner les utilisateurs sur l'endroit où ils se trouvent. L'ingénieur a conçu le code du logiciel pour recueillir les données réseau Wi-Fi et, hélas, les données utiles également. Par données utiles, on veut désigner le contenu des transmissions.
Google ne voulait pas de ces données utiles et croit qu'il ne sert à rien de les recueillir et qu'il est inacceptable de le faire.
L'ingénieur aurait dû signaler aux avocats à l'interne, chez Google, ce plan de collecte des données utiles. Il ne l'a pas fait. S'il l'avait fait, Google aurait eu la possibilité de repérer et de régler le problème dès le début du programme. Le code a donc été déployé sur les véhicules de Street View. Le logiciel a fait ce qu'il était programmé pour faire et il a recueilli les données réseaux et les données utiles Wi-Fi transmises sur des réseaux non cryptés.
En avril dernier, l'Administration de la protection des données de Hambourg a demandé à Google de vérifier les données recueillies par les véhicules de Street View. Nous avons fait la vérification et constaté que nous recueillions des données utiles en plus des données réseau. Avant d'annoncer publiquement ce que nous avions découvert, j'ai appelé moi-même la commissaire Stoddart pour l'informer du problème.
Ensuite, Google a fait une annonce publique et présenté des excuses pour l'incident. Soyons clairs: Google ne voulait pas de ces données utiles, qui ont été recueillies par erreur. Peu après que j'eus informé la commissaire Stoddart du fait que des données utiles avaient été recueillies au Canada, elle a entrepris une enquête. Nous avons coopéré avec elle et donné à ses enquêteurs accès aux données utiles canadiennes à notre siège social.
Pour donner une idée du sérieux de l'enquête, je dirai que les enquêteurs de la commissaire ont été les seules autorités au monde en matière de protection des données qui aient mené leur enquête sur la question au siège social de Google en Californie. La commissaire a publié une lettre préliminaire sur ses conclusions, que nous acceptons. Nous sommes déterminés à régler ce problème.
On nous a demandé: comment ces données ont-elles pu être recueillies sans que Google le sache? Situons d'abord le contexte: les données utiles Wi-Fi représentent une quantité relativement faible de données. Toutes ces données recueillies au Canada pourraient tenir sur une clé USB qu'on achète chez Best Buy ou Costco. De plus, ce sont les données brutes qui ont été enregistrées sur les disques durs des véhicules: elles ne peuvent être ni comprises ni reconnues à moins d'un traitement qui les rendra lisibles pour l'humain. En dehors de l'ingénieur qui a rédigé le code, personne, chez Google, ne prévoyait utiliser ces données. Personne n'a donc été porté à les regarder.
Il importe de signaler que Google ne voulait ni recueillir ni utiliser de quelque façon les données utiles, et l'entreprise ne les a utilisées dans aucun produit ou service. Malgré tout, cette collecte de données est inexcusable. Dès que Google a découvert qu'on avait par erreur recueilli des données utiles sur les réseaux Wi-Fi non cryptés, tous les véhicules de Street View dans le monde sont rentrés au garage. Toutes les données utiles Wi-Fi ont été immédiatement isolées et sécurisées. À noter que personne n'a examiné les données utiles provenant du Canada sinon les enquêteurs de la commissaire à la protection de la vie privée et ceux qui ont facilité leur travail. Elles n'ont été communiquées à aucune tierce partie.
On a le droit de demander quelles mesures Google met en place pour éviter que l'incident ne se reproduise. D'abord, Google a entamé une enquête approfondie pour savoir comment cela s'était passé et quelles dispositions prendre pour empêcher que cela ne se reproduise. Google a commandé un examen du code à des experts indépendants, dont le rapport a été rendu public sur notre bloc et communiqué à la commissaire pendant son enquête.
Je peux également ajouter que Google a annoncé le 22 octobre un certain nombre de modifications importantes de ses pratiques et contrôles visant à protéger la vie privée. Avant de les rendre publiques, je me suis entretenu moi-même avec la commissaire Stoddart pour l'informer de ces modifications. Elle en a également discuté plus à fond avec mes collègues la semaine dernière. Les modifications annoncées sont les suivantes. D'abord, Google a nommé Mme Alma Whitten au poste de directrice de la protection de la vie privée pour veiller à ce que nous intégrions à nos produits et à nos pratiques internes des contrôles efficaces pour protéger la vie privée. Mme Whitten est une spécialiste internationalement reconnue dans les domaines de la protection de la vie privée et de la sécurité en sciences informatiques. Deuxièmement, nous améliorons notre formation de base en matière de protection de la vie privée en mettant un accent particulier sur la collecte, la manipulation et l'utilisation responsable des données. Enfin, Google ajoute de nouvelles garanties à son système actuel d'application de la protection des renseignements en prévoyant des vérifications internes indépendantes pour protéger la vie privée des utilisateurs.
Nous estimons que ces modifications se traduiront par une amélioration notable de nos processus et contrôles pour empêcher que des incidents semblables ne se reproduisent. Voilà où nous en sommes. Nous sommes désolés de cet incident et nous en avons tiré des leçons. Nous améliorons nos processus en conséquence.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci, monsieur le président.
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Votre collègue va googler sur son BlackBerry, mais entre-temps, voici comment je comprends la chose.
Lorsque des données sont transmises sur Internet, elles se composent de deux éléments: les en-têtes et les données utiles. Les premières sont l'information d'identification de base. Dans ce cas, c'est l'information identifiant le réseau que nous essayions de recueillir. Par exemple, si on se trouve chez Starbucks, il y a le nom du routeur. Voici un bon exemple: quand on allume son ordinateur portable, on cherche les réseaux Wi-Fi disponibles, car tous les portables ont une antenne Wi-Fi intégrée, et on voit qu'il y en a cinq, par exemple. C'est l'information que nous cherchions à recueillir: le nom du réseau et d'autres données techniques sur le réseau. C'est l'information que vous voyez sur votre BlackBerry lorsque vous l'allumez et cherchez les réseaux Wi-Fi disponibles.
L'autre élément, ce sont les données transmises sur le réseau. Par exemple, si je navigue sur Internet et cherche les maisons de vacances en Floride, le contenu des pages Web qui est transmis constitue ce qu'on appelle les données utiles.
Voilà la différence entre les « données réseau » et les « données utiles ». Dans le premier cas, il s'agit du point d'accès sans fil et dans le deuxième, du contenu transmis sur le réseau.
J'ai répondu à votre question?
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Nous avons cherché la commissaire à la protection de la vie privée une solution sensée en droit canadien, une solution qui lui semble acceptable et que nous pensions acceptable pour le comité et les Canadiens, afin de prévenir les Canadiens avant le captage des images. Comme vous l'avez signalé fort justement, tous nos véhicules sont clairement identifiés, et la même chose vaut sur toute la planète. Il est visible que ce sont des véhicules de Google et nous avons un site Web que nous mettons constamment à jour en fournissant de l'information sur les endroits où nous allons capter des images.
Quant à indiquer avec précision le jour et l'heure ainsi que le quartier, il y a là un niveau de complexité qu'il faut admettre. Ce sont des véhicules qui circulent et il faut tenir compte de la météo et d'autres facteurs, si bien qu'il est difficile de prédire avec précision où et quand les véhicules se trouveront. Il reste que, en général, nous fournissons ce qui nous semble un avis complet et acceptable, aussi bien au Canada qu'ailleurs dans le monde, bien que le contenu précis de l'avis puisse varier légèrement.
Il y a cependant un autre point important à souligner à propos de cette question. Google n'est pas la seule entreprise qui capte des images à l'échelle de la rue au Canada. Pour créer les cartes GPS qui servent dans la plupart de vos voitures et sur les sites Web qui offrent des cartes numériques, les entreprises captent de l'information numérique, et elles suivent une démarche très semblable à la nôtre et prennent des photographies de toutes les rues et de toutes les maisons. Et, que je sache, elles ne préviennent personne. Aucun organisme de réglementation n'a examiné leurs activités, que je sache, et elles n'ont pas les mêmes obligations que nous en ce qui concerne la conservation des données.
Si nous comparons les activités de nos concurrents aux nôtres, il est important de se situer dans un contexte plus large: toutes les cartes numériques que vous utilisez sont produites à partir de photographies à l'échelle de la rue. C'est ainsi qu'on crée ces cartes.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Glick, d'être ici aujourd'hui.
Je tiens vraiment à vous féliciter de votre témoignage très honnête. Vos aveux ont eu quelque chose de rafraîchissant et je comprends que ce fut une erreur commise par inadvertance et que vous prenez toutes les mesures voulues, d'après ce que je peux voir, pour corriger le problème.
J'ai été étonné d'apprendre qu'autant de Canadiens se servent de Street View. Cela témoigne de la valeur de l'application. Vous avez dit qu'elle était particulièrement précieuse pour ceux qui n'arrivent pas à lire les cartes. Je vous dirai qu'elle l'est également pour les habitants de Kitchener, car on y trouve une série de rues qui vont dans tous les sens. Vous le savez, puisque vous en êtes originaire. La rue King va vers l'est, l'ouest, le nord et le sud. Il est donc difficile de donner des indications. Je vous suis reconnaissant de vos efforts.
Je suis déçu qu'il n'y ait pas beaucoup de zones rurales cartographiées sur Street View. Je représente les trois localités de Wellesley, Wilmot et Woolwich. Je suis désolé de ne pas pouvoir un dimanche après-midi me promener sur Google et voir les beaux paysages de ma circonscription. C'est une façon de vous inciter à cartographier les zones rurales également. Mon utilisation de Street View a été très limitée. Je ne sais donc pas si beaucoup de zones rurales sont cartographiées. Y en a-t-il?
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Merci beaucoup de ces questions. Si cela ne vous dérange pas, je vais répondre dans l'ordre inverse, dans l'intérêt du comité.
Nous cherchons littéralement les meilleurs ingénieurs au Canada, et nous les attirons parce que nous leur offrons un milieu de travail de qualité. À dire vrai, Google a vraiment du mal à recruter du personnel, mais comme le bureau de Waterloo fait des recherches sur toute la planète pour Google, il réussit particulièrement bien grâce à notre système d'éducation de la plus grande qualité et à la présence d'excellents ingénieurs chez nous.
Votre autre question concernait ce que la commissaire a appelé la protection de la vie privée dès l'étape de la conception. C'est une expression que nous devons à la commissaire à la vie privée de l'Ontario, Ann Cavoukian. Nous appuyons à fond les principes que la commissaire Cavoukian préconise: il faut intégrer intimement dans l'organisation les valeurs de la protection de la vie privée, dès le début de la conception des produits.
Pensons-y. Nous discutions un peu plus tôt de l'intégration du cryptage dans Gmail. Il s'agit d'une protection intégrée dès la conception. La commissaire Cavoukian l'a déjà dit. C'est que la notion de protection de la vie privée dès la conception est un élément clé si on veut faire en sorte que vous et Google ayez des communications privées que personne d'autre ne peut connaître.
Nous voulons continuer à agir de la sorte. La formation que nous offrons permettra, je l'espère, d'approfondir ces efforts dans l'entreprise.