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Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE
COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 2 mars 1999
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Bonjour. Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien, qui se réunit aujourd'hui pour une étude du projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.
[Traduction]
La séance est ouverte. Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunit aujourd'hui pour étudier le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.
• 1110
Avant que nous n'entendions nos témoins, je tiens à prendre
quelques minutes pour remercier très sincèrement tous les membres
du comité qui ont participé à nos déplacements. Je vous remercie
tous et chacun. Je sais que ce n'est pas facile de voyager pendant
la semaine de relâche, mais je crois que les audiences que nous
avons tenues en valaient vraiment la peine. Je tiens donc à
remercier tous les membres du comité qui y ont participé.
Je tiens par ailleurs à mentionner que le ministre a indiqué qu'étant donné toutes les préoccupations et les observations qui avaient été présentées par les témoins et étant donné que nous entendons encore des témoins aujourd'hui, il préférerait ne pas témoigner demain pour avoir un peu de temps pour se préparer. Il a indiqué qu'il pourrait témoigner le 10 mars, auquel cas la séance de demain n'aura pas lieu.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Le 10 mars?
Le président: Le 10 mars. Je propose que nous prenions 15 minutes à la fin de la réunion pour parler de nos travaux à venir, car si le témoignage du ministre est reporté... M. Mark a proposé que nous discutions jeudi de nos travaux futurs, car les fonctionnaires devront témoigner après le ministre pour mettre fin à nos audiences. Ainsi, au lieu de nous réunir en séance officielle jeudi, nous pourrions discuter de nos travaux futurs. Nous pourrions peut-être rester 10 ou 15 minutes à la fin de la séance aujourd'hui, vers 12 h 45, pour discuter de cela.
Je tiens à souhaiter la bienvenue à M. Jon Lien, professeur distingué honoraire à l'Université Memorial, à qui j'ai demandé de témoigner devant nous—nous sommes très heureux de vous voir là, monsieur Lien—et M. Gordon Nelson, professeur de géographie et de planification régionale à l'Université de Waterloo. Ces deux témoins examineront le projet de loi sous une optique différente et à partir d'un point de vue tout à fait impartial et universitaire.
Vous avez la parole, monsieur Lien.
M. Jon Lien (professeur chercheur honoraire, Université Memorial): Merci beaucoup.
Je vous suis très reconnaissant de me donner l'occasion de vous adresser la parole. Je suis ici en qualité d'universitaire spécialisé dans le comportement animal. Toute ma vie professionnelle a été consacrée aux océans. J'ai siégé à de nombreux comités s'intéressant aux océans, aux pêches et à la gestion des océans. Je vis dans une localité côtière sur la côte nord-est de Terre-Neuve et je profite de mes moments de loisirs pour m'en aller sur l'eau, faire de la voile, etc. Les océans occupent donc tous les recoins de ma vie.
J'ai été conseiller auprès du comité chargé de faire une étude de faisabilité sur la création d'une aire marine de conservation sur la côte nord-est de Terre-Neuve. Je peux donc parler en connaissance de cause des essais de mise en application de projets de loi comme celui qui nous occupe.
Il y a de cela au moins 25 ans, j'ai écrit ma première lettre à Parcs Canada pour faire remarquer ce qui me paraissait être une omission curieuse, et grave à mon sens, du fait que nous n'avions pas d'aires protégées dans les océans. Je croyais à l'importance de créer de ces aires comme moyen structurel de préserver les océans, et j'étais persuadé que les Canadiens devaient en savoir plus au sujet des océans pour que nous puissions appuyer la bonne gestion d'aires de ce genre. J'ai écrit bien des lettres à Parcs Canada sur les aires marines protégées au fil des ans, et j'ai enfin le sentiment d'avoir obtenu la bonne réponse. Je tiens vraiment à féliciter Parcs Canada pour le projet de loi C-48. Il s'agit à mon avis d'une mesure nécessaire. Je peux vous assurer qu'il est urgent de créer de ces aires marines dans les régions côtières de Terre-Neuve. Le projet de loi nous permet de faire un premier pas dans cette direction.
Je crois que, pour bien comprendre le projet de loi, il faut remonter à la création du réseau des parcs nationaux au Canada. Quand le parc de Banff a été créé, il s'agissait d'un début très modeste, à partir duquel nous avons créé le plus magnifique ensemble de parcs nationaux au monde. Le projet de loi C-48 est le début d'une démarche semblable visant les océans. Je crois réellement que nous sommes à la veille de nous engager dans une aventure très passionnante.
Vous aurez deviné à mes propos que je suis d'avis que le projet de loi mérite votre appui pour une vaste gamme de raisons. Je sais qu'il est le fruit d'un processus de consultations prolongées et bien réfléchies auprès de Canadiens de divers milieux. Par moment, je devenais très frustré parce que nous ne faisions que discuter et que nous ne faisions rien de concret. Le projet de loi reflète toutefois la sagesse accumulée au cours de ces consultations.
• 1115
Il me semble que la création d'aires marines de conservation
et la conservation des océans recueille beaucoup d'appuis. Les
aires marines protégées sont reconnues comme le noyau structurel de
la conservation marine. À l'échelle internationale, une vaste gamme
de mesures de ce genre ont été prises en vertu de diverses lois
prévoyant diverses utilisations et visant à répondre à divers
problèmes. Toujours est-il que le nombre de réserves océaniques
dans le monde ne cesse de croître. Ces réserves jouissent aussi
d'un appui grandissant de la population locale.
J'attire votre attention sur l'étude qui a été réalisée par la table ronde sur l'environnement et l'économie, où les habitants du littoral de Terre-Neuve ont été consultés sur les besoins en conservation des ressources halieutiques qui sont essentielles à la survie de leur localité. L'étude a permis de constater que les aires protégées et les aires de conservation sont considérées comme une mesure très importante.
Il y a de cela plusieurs années, j'ai interrogé 1 p. 100 de tous les élèves de cinquième et de neuvième année au Canada quant à leurs attitudes à l'égard des océans et de la faune océanique. J'ai été surpris par l'ampleur de l'appui des répondants à l'idée de protéger les océans en créant des sanctuaires. Quand on leur a donné une partie d'océan à gérer, le plus souvent, ils ont choisi d'en faire un sanctuaire ou le développement humain serait limité et réglementé. Stephen Keller, de Yale, a fait une étude il y a de cela un certain nombre d'années et a constaté que l'idée de réserver des aires de conservation dans les océans recueillait beaucoup d'appui parmi les Canadiens.
Le projet de loi à l'étude apporte une contribution très importante à notre programme national de protection des océans. Le ministère des Pêches et des Océans et Environnement Canada ont récemment pris des mesures pour créer des aires protégées dans les océans. Cette démarche se distingue par le fait qu'elle vise à protéger la biodiversité des océans. Elle ne vise pas des stocks de poisson ni des espèces fauniques en particulier, mais elle veut protéger toute la diversité de l'écosystème océanique.
Je crois que le projet de loi facilitera l'écotourisme marin. La semaine dernière, j'ai terminé une étude sur l'observation des baleines au Canada. Cela vous intéressera de savoir que la moitié de tous ceux qui viennent à Terre-Neuve de nos jours font une excursion pour aller voir des baleines. Au Canada, ces excursions sont un des secteurs touristiques qui croît le plus rapidement. Le projet de loi servira de fondement à cette activité. Toutes les provinces de l'Atlantique, la Colombie-Britannique et même le Manitoba, à ma grande surprise, ont un programme de promotion touristique axé sur l'écotourisme océanique.
Pour assurer la bonne marche et la durabilité de cette activité il faut au départ avoir des aires protégées, non pas de petites aires destinées à protéger des habitats uniques ou critiques comme celles que crée Pêches et Océans, ni les réserves naturelles que gère Environnement Canada, mais ces grandes aires marines nationales de conservation.
Ces aires apporteront selon moi une contribution importante aux pêches. J'ai siégé pendant quatre ans au Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, qui conseille le ministre des Pêches sur les stocks de poissons de fond de l'Atlantique. À maintes reprises, le conseil a déclaré qu'il fallait considérer les aires marines protégées comme une mesure importante pour préserver les stocks de poissons de fond dont les localités dépendent pour leur survie. Ainsi, une démarche de ce genre recueille des appuis solides, même aux Pêches.
Le projet de loi présente aussi un autre avantage: les aires qui seront créées serviront à sensibiliser les Canadiens aux océans et à leur faire comprendre et appuyer l'importance de bien gérer et de bien entretenir notre milieu océanique. Ces aires pourraient même donner lieu à des innovations, comme en témoigne ce qui s'est fait à Terre-Neuve.
• 1120
Anticipant l'interdiction de déversement des déchets des
usines de traitement du poisson dans les zones protégées, le Centre
canadien pour l'innovation dans le domaine des pêches a créé un
programme visant à traiter justement ce genre de déchets. En fait,
ce qu'il a fait, c'est établir un processus, très heureux
d'ailleurs, qui permet de tirer de ces déchets un excellent compost
que les gens peuvent acheter et utiliser dans leurs potagers ou
leurs jardins.
Je pense que l'industrie aquicole craint grandement que ces aires ne limitent leurs activités, mais récemment, après une évaluation environnementale de l'aquiculture en Colombie-Britannique, on a vu qu'en fait, l'industrie s'est montrée fort capable d'innover et d'établir des pratiques plus respectueuses de l'environnement. Le fait est que les Canadiens ont affirmé à maintes reprises qu'ils sont disposés à payer un prix plus élevé pour ces produits s'ils ont l'assurance qu'ils ont été créés d'une manière respectueuse de l'environnement.
Plus particulièrement, je travaille en autres choses pour un groupe qui a des liens avec l'étude de la faisabilité sur la côte Nord-Est, et ce groupe se penche sur la commercialisation particulière des produits qui proviennent de zones soigneusement gérées. Le Fonds mondial pour la nature et Unilever ont établi un conseil d'intendance qui certifie les entreprises de pêche respectueuses de l'environnement. On a également réuni un groupe d'agences de commercialisation qui exigent un prix élevé pour ce genre de produits de l'océan et qui l'obtiennent.
Donc, le rendement pour les pêcheurs est supérieur s'ils sont certifiés respectueux de l'environnement. Je pense que nous allons trouver dans ces aires de conservation marine des entreprises de pêche certifiées, et je serais très étonné si le poisson provenant de ces aires n'est pas commercialisé de cette façon.
Je dirai une dernière chose en appui à ce projet de loi, et c'est que j'ai examiné les diverses possibilités de gestion de ces aires. On permet ici l'exploitation de l'aire mais tout en protégeant l'écosystème d'une manière durable. Il me semble que ce projet de loi présente les éléments qu'il faut pour, à tout le moins, lancer un programme qui permet à la fois l'exploitation et la préservation. On se propose ici de délimiter une aire représentative, de la zoner comme il faut, en tenant compte de sa sensibilité, on l'on part de là. Je pense que cela répond aux exigences fondamentales de bon nombre de groupes qui se sont intéressés...
Je vais maintenant passer à quelques critiques. Jusqu'à présent, je vous ai dit que ce projet de loi me plaît beaucoup, et j'ai aussi quelques critiques à formuler.
• 1125
Il n'y a rien de parfait bien sûr, et nous nous lançons ici
dans une aventure nouvelle. L'établissement d'aires de conservation
en mer froide est une initiative tout à fait neuve dans l'histoire
de la conservation océanique. Je crois fermement que nous avons
beaucoup à apprendre ici.
Mon principal grief concernant ce projet de loi tient au fait qu'il ne prévoit pas de révision de la Loi. Dans la Loi sur les océans, il y a une disposition qui dit que cette Loi sera examinée dans trois ans. Il y aura donc obligatoirement une révision. Nous en sommes à nos tout débuts dans l'établissement des réserves et des aires de conservation, et je crois que l'apprentissage risque d'être très difficile, et il est donc crucial que nous examinions nos efforts systématiquement et que nous réfléchissions à nos réussites et à nos échecs. Je recommande donc que l'on ajoute ici une mesure en ce sens.
J'ai observé avec intérêts le débat sur ce projet de loi qui a eu lieu sur la côte nord-est de Terre-Neuve. À Ottawa, il est assez facile de discuter de ce projet de loi en vase clos. Mais pour les gens sur place, lorsqu'on parle de la création d'une aire de conservation marine, il est question aussi de l'économie locale, des écoles locales, de l'état des chemins, de l'avenir des enfants et de tout le climat social de la collectivité. Il est donc vraiment difficile de discuter de ces questions dans les collectivités concernées.
Il sera donc extrêmement important d'apprendre comment agir au mieux de telles sortes que nous pourrons optimiser l'exploitation et la préservation de ces aires. L'expérience nous dira s'il y a des choses qu'il faut retrancher de ce projet de loi ou s'il y a des choses qu'il faut y ajouter. À l'heure actuelle, je ne crois pas que nous ayons l'expérience voulue pour proposer beaucoup de modifications à ce projet de loi.
La légende de Cousteau dit en autres choses que l'océan est une aire inexploitée qui présente un grand potentiel. En fait, l'océan n'est pas un désert, et la colonisation du Canada a commencé par l'implantation de communautés à proximité des aires riches et hautement productives. Le ministère des Pêches nous dit aujourd'hui que nous avons exploité à fonds ou surexploité la plupart de ces ressources. Ce genre d'initiative de conservation ne s'opère donc pas dans un désert vide, comme c'était le cas à Banff. Nous lançons cette expérience dans une région où les gens tirent leurs gagne-pain de l'océan.
Ce qui veut dire qu'il faut gérer très délicatement les rapports que nous avons avec les gens sur place. L'attitude des pêcheurs envers l'océan est très semblable à l'attitude des peuples autochtones envers la terre. Pour eux, c'est beaucoup plus qu'un endroit d'où ils tirent leurs gagne-pain; c'est ce qui les définit comme peuple et comme culture, et c'est ce qui leur donne un mode de vie qui les définit en toutes choses. Donc les sentiments qu'ils éprouvent face aux zones océaniques sont très complexes, et il nous faut apprendre à en tenir compte.
Dans les régions côtières de Terre-Neuve, comme c'est le cas dans de nombreuses autres régions côtières du Canada, on se méfie énormément du gouvernement. La gestion gouvernementale a mené à l'épuisement des stocks de poisson, modifié les exigences relatives à l'assurance-chômage, supprimé les paiements qui étaient versés aux gens, ce genre de chose. On croit souvent dans ces collectivités que le gouvernement est totalement insensible aux besoins locaux, il sera dont extrêmement difficile de surmonter cette méfiance.
Andy Mitchell, le secrétaire d'État aux Parcs, est venu à Terre-Neuve et a parlé au comité consultatif. Il a dit: «je sais que vous ne nous faites pas confiance. D'ailleurs, il nous faudra gagner votre confiance, étape par étape.» Je pense que c'est tout à fait vrai.
L'établissement de ces aires sera un processus fort long. On ne peut tout simplement déclarer que telle région constitue une aire de conservation marine, et c'est chose faite. La fondation chargée de la restauration de la baie de Chesapeake aux États-Unis a récemment célébré son 25e anniversaire. Et elle disait essentiellement dans son rapport: «nous sommes maintenant organisés, et nous commençons à mettre en oeuvre notre programme.» Je pense qu'il faudra beaucoup de temps pour établir ces aires de conservation.
• 1130
Il y a une autre chose que j'aimerais dire au sujet de la
prudence dont fait état ce projet de loi, et c'est que, pour mieux
gérer les océans, il faut surtout des connaissances, tout
simplement. Faire des recherches et acquérir une compréhension
scientifique des océans coûtent cher, c'est une entreprise très
spécialisée, et Parcs Canada peut compter ici sur les acquis du
ministère des Pêches et Océans. Ces deux organismes peuvent établir
des programmes scientifiques participatifs, comme ils l'ont fait,
par exemple sur la côte nord-est de Terre-Neuve. Parcs Canada peut
mettre au point des programmes de pêches indicatrices, ou quelque
chose du genre, de concert avec Pêches et Océans Canada, mais il
lui faudra plus de connaissances pour gérer sagement ces aires. Je
pense qu'à l'heure actuelle, nous risquons de commettre de grosses
erreurs, comme nous l'avons vu à Pêches et Océans Canada, si l'on
en croit les connaissances que nous avons maintenant.
Quand on parle d'interprétation en eau froide, il s'agit d'une eau qui est juste au-dessus du point de congélation, il faudra donc apprendre à interpréter cet environnement d'une manière différente. On ne peut pas simplement envoyer n'importe qui dans cet environnement. Ce n'est pas n'importe qui qui peut sauter là-dedans et voir ce qui se passe. Je crois donc qu'il faudra montrer ici beaucoup d'innovations dans la manière dont Parcs Canada interprète les aires de conservations marines.
L'établissement de ces aires exigera des ressources, et je pense que ce serait cruel de donner à ces instances la responsabilité d'établir ces aires sans leur donner les ressources qu'il leur faut. Si Parcs Canada se voit confier tout à coup la responsabilité de créer un système complet et différent d'aires de conservation tout en demeurant responsable de ses parcs historiques nationaux, il y aura une concurrence naturelle entre ces divisions pour de maigres ressources. Et comme l'initiative de conservation marine sera la dernière arrivée, je pense qu'elle risque d'en souffrir.
Chose certaine, Parcs Canada a démontré qu'il peut innover et faire beaucoup avec des ressources minimales. Par exemple, dans cette étude de faisabilité sur la côte Nord-Est, Parcs Canada a interviewé des pêcheurs et s'est servi de leur savoir traditionnel pour définir l'habitat critique d'espèces particulières. Il est résulté de ce processus de cartographie une somme résolument étonnante d'information sur toute la région de la côte Nord-Est.
Je conclurai en disant que j'appuie fortement ce projet de loi. Je pense que votre geste en ce sens est historique. Dans 100 ans, nous allons regarder en arrière et nous demander pourquoi nous n'avons pas agi plus vite, mais nous serons heureux d'avoir commencé quelque part. Nous allons apprendre beaucoup, et nous serons obligés de modifier notre approche au fur et à mesure, et il faudra peut-être modifier ce projet de loi. Mais je pense que le projet de loi, tel qu'il est, nous donne un bon point de départ.
Je suis originaire d'une petite localité où la vie de mes voisins est tributaire de la santé des océans. C'est dans ce contexte, et au nom de cette culture, que je vous prie instamment d'adopter ce projet de loi. Et je pense qu'il est très facile de considérer cela ici à Ottawa comme un simple projet de loi de plus—et j'ignore dans quelle mesure vous avez un attachement émotif à ce projet de loi—mais de mon point de vue à moi, et du point de vue de mes voisins, vous tenez là la possibilité de bonifier le rapport que nous avons avec l'océan. Je vous prie donc instamment d'adopter ce projet de loi.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
Le président: Merci beaucoup, professeur Lien.
Professeur Nelson, vous avez la parole.
M. Gordon Nelson, phd (professeur de géographie et de planification régionale, Université de Waterloo): Merci beaucoup, monsieur le président.
Le professeur Lien a dit plusieurs choses que je m'apprêtais à dire, je tâcherai donc d'être un peu plus direct, et de me concentrer sur certains éléments qui sont peut-être un peu différents, et qui constituent une perspective quelque peu différente de la sienne.
Mes origines et mes intérêts sont différents. Je vis dans la région des Grands lacs où les aires de conservation marine sont importantes. J'ai pris part à diverses activités liées à l'examen des aires de conservation marine dans diverses régions des Grands lacs, particulièrement le lac Érié, depuis environ huit ans.
Je préside le Centre des ressources du patrimoine, qui assure la liaison entre la politique gouvernementale et la pratique, la recherche et la planification. De concert avec Parcs Canada et d'autres instances, nous avons tenu une série d'ateliers dans les régions de Long Point et de Point Pelee et dans d'autres régions du secteur qui présentent un certain intérêt ou une certaine pertinence relativement aux aires de conservation marine. J'ai également fait certains travaux relativement aux plans de conservation des écosystèmes dans la région de la baie Georgienne, qui est à mon avis un endroit idéal pour la création d'une aire de conservation marine. Mais il y a des difficultés, ce dont je parlerai un peu plus tard.
• 1135
J'ai également fait des recherches dans les îles Shetland,
dans la mer du Nord, dans les années 80, 90, sur les effets de
l'exploitation pétrolière et gazière dans la zone côtière et sur
certains environnements dans le nord-est de l'Écosse et dans les
îles Shetland. C'est à ce moment que je suis entré en contact avec
les aires de conservation marine de diverses sortes.
Je suis membre du conseil d'administration de la CPAWS, la Canadian Parks and Wilderness Society, et je siège également au conseil d'administration d'Héritage Canada. Pour ma part, ce projet de loi m'intéresse tant du point de vue de l'intégrité écologique que de l'intégrité historique.
J'énumère dans mon texte les points forts du projet de loi, et je ne crois pas qu'il soit nécessaire de les répéter verbalement. Essentiellement, comme Jon l'a dit, c'est un projet de loi marquant dans la mesure où, pour la première fois, l'on imprime certaines orientations qui nous permettrons de combler nos besoins et de relever les défis que posent la protection des grands écosystèmes en mer et en eau douce, de la même façon qu'on a protégé des zones terrestres avec la création des parcs nationaux.
Il y a à mon avis certaines améliorations qui méritent réflexion, et j'en fais état longuement dans mon texte. Je trouve le préambule très utile. On y définit fort bien les principes.
Mais il y a trois notions qui, à mon avis sont importantes et pourraient être ajoutées au préambule, ou qui auraient peut-être leur place au paragraphe 4(1) de l'énoncé. Il s'agit d'abord en premier lieu d'ajouter cette notion du maintien de l'intégrité écologique. On dit qu'il faut «maintenir la structure et la forme des systèmes océaniques». Il s'agit essentiellement de définir l'intégrité écologique. On définit l'intégrité écologique dans la Loi sur les parcs nationaux, il me semblerait donc indiqué qu'il y ait une sorte de parallèle entre les deux lois, particulièrement étant donné qu'avec la Loi sur les océans et la création des aires de conservation faunique du Canada, ce projet de loi-ci me semble être celui qui est le plus axé sur la préservation.
Je pense qu'il y a lieu d'ajouter à l'énoncé cette notion d'intégrité historique. On mentionne ici et là dans le projet de loi l'idée du patrimoine culturel, mais pas autant qu'il faudrait le faire.
Je m'inspire ici quelque peu de l'expérience que j'ai des Grands Lacs, où la province a créé le parc marin national Fathom Five afin de protéger les épaves et les ressources culturelles, mais au fil du temps, comme Jon l'a dit, par suite de l'évolution graduelle de l'intérêt et des politiques dans ces régions, on s'est aussi fortement intéressé à la conservation de la nature dans ce parc. Donc il y a un beau rapport à établir ici entre le patrimoine culturel et le patrimoine naturel. Je pense que l'on aurait intérêt à préciser un peu plus l'aspect intégrité historique.
Il y a un autre aspect que j'aimerais voir consolider dans ce projet de loi, et j'en parle un peu plus loin dans mon mémoire; c'est la fonction recherche et observation. Il serait utile, à mon avis, de la mentionner explicitement dans l'énoncé du projet de loi.
Je fais aussi quelques observations sur les interdictions. Je suis d'avis qu'il faut songer sérieusement à interdire certaines activités comme le chalutage par le fond ou le dragage, et ces interdictions devraient figurer dans le projet de loi.
Dans certains autres mémoires, on fait également état de certaines préoccupations relativement à l'aquiculture et au dragage des canaux de navigation. Je pense que ces préoccupations sont parfaitement légitimes. Lorsque j'ai fait mes recherches dans les îles Shetland, comme je vous disais plus tôt, l'aquiculture du poisson y était très répandue et causait des tas de difficultés dans ces régions. D'ailleurs, on avait interdit expressément l'aquiculture dans certaines petites régions autour des Shetland, étant donné que cette activité, particulièrement la production massive de déchets, avait des effets néfastes sur l'environnement et l'intégrité écologique.
• 1140
Je parle également de la notion d'évaluation environnementale,
qui me semble presque absente du projet de loi. Pour moi, cela fait
partie intégrante du principe ou de l'approche de précaution.
Encore là, dans l'esprit de la gestion adaptative ou graduelle, ou
de l'évolution d'une gestion plus efficace, dans le sens qu'a
décrit Jon Lien, l'évaluation environnementale peut être utile.
Elle peut faciliter en fait la mise en oeuvre du principe de
précaution. Je pense qu'il faut le mentionner explicitement à un
endroit indiqué dans le projet de loi.
J'ai des réserves relativement au plan de gestion. Avoir un plan de gestion, c'est une idée formidable et essentielle. Je pense qu'il peut être un peu plus explicitement placé dans le projet de loi. Je fais une suggestion en ce sens au bas de la page 2, et je dis que l'on pourrait ajouter au paragraphe 4(3) une phrase qui dirait que, dans tout plan de gestion, on zonerait chaque aire de conservation marine pour en faire un usage conforme à la protection de l'environnement local, de l'intégrité écologique de l'aire de conservation marine, et de la santé générale de l'écosystème, qui constituent à mon avis les trois objectifs de ce projet de loi.
Au haut de l'avant-dernière page, je reviens au rôle essentiel de la fonction science et observation dans les aires de conservation marine. Je fais valoir que c'est peut-être le rôle le plus important des aires marine de conservation.
Ce que nous n'avons pas au Canada, c'est un point de repère qui nous permettrait de mesurer les changements dans les environnements océaniques ou dans les grandes étendues d'eau douce. Les effets sur l'habitat, le fond océanique et d'autres aspects du système remontent à il y a fort longtemps, comme Jon Lien l'a mentionné, mais nous en saurions beaucoup plus sur ces changements si nous réservions des aires aux travaux et aux observations scientifiques, de telle sorte que nous pourrions comparer les changements qui s'effectuent à l'extérieur de ces sanctuaires aux changements qui s'effectuent à l'intérieur, et nous pourrions mieux orienter nos politiques et nos pratiques. Je suis d'avis qu'une large part de chaque aire marine de conservation doit être réservée expressément à la recherche et à l'observation scientifiques, et soumise à un degré relativement élevé de protection.
Les États-Unis ont explicitement reconnu le rôle essentiel que joue la recherche et la surveillance dans les aires de conservation marines et ont créé une catégorie d'aires spécifiques devant servir spécifiquement à cette fin et connue sous le nom de réserve nationale pour la recherche en milieu estuarien. Il s'agit surtout d'estuaires comme Chesapeake Bay et la baie près de San Diago, car ce sont là des habitats marins particulièrement importants. Ils font le lien entre les eaux profondes et les eaux peu profondes. Ils permettent d'évaluer ce qui se passe à l'intérieur des terres. Ils utilisent également cette science et cette surveillance dans d'autres aires de conservation visées par leur loi sur les zones côtières.
Vers la fin, je fais des observations au sujet du titre et de l'administration. Je pense que l'idée d'un titre incontestable est très utile mais sans doute très difficile à réaliser dans certaines zones. Du moins certainement dans la zone où j'ai travaillé au cours des dernières années, dans les Grands Lacs, il serait très difficile d'obtenir un titre incontestable. À cet égard, je dirais qu'un genre d'accord à long terme comme celui proposé au paragraphe 8(4) pourrait être une façon d'amener les gens à la table des aires de conservation marines et de déterminer dans quelle mesure un titre incontestable pourrait ou non s'appliquer.
Comme je le souligne dans mon point numéro 7, je suis par ailleurs d'accord pour dire que la façon dont le paragraphe 8 est libellé limite gravement la capacité du ministère du Patrimoine canadien de gérer les aires marines de conservation. J'aime bien la suggestion qui a été faite par le Fonds mondial pour la nature Canada dans son mémoire et selon laquelle, plutôt que de se mettre d'accord pour interdire une activité, les deux ministres devraient s'entendre avant qu'une activité puisse avoir lieu.
En conclusion, j'aborde cette dernière idée de l'intégrité commémorative et du patrimoine culturel. Jon Lien a mentionné les possibilités qu'offrent l'écotourisme et, pour moi, le tourisme patrimonial dans ces zones de conservation marines. Par exemple, dans la région des Grands Lacs l'attrait des épaves pour les plongeurs et d'autres activités du genre, notamment dans le parc marin national Fathomn Five, peut être quelque chose de très valable, pourvu que l'on prenne les mesures voulues pour protéger ces sites naturels. Je pense qu'il y a plus de 40 000 plongeurs qui se rendent chaque année dans la région de Tobermory pour voir ces épaves.
• 1145
Encore une fois, je pense qu'il y a plusieurs raisons pour
lesquelles on devrait peut-être accorder un peu plus d'attention
dans la loi aux questions du patrimoine culturel et de l'intégrité
commémorative.
Je voudrais conclure en vous remerciant de l'occasion qui m'a été donnée de vous présenter cet exposé et de vous livrer mon point de vue. Je vous en suis très reconnaissant.
J'appuie le projet de loi, mais j'ai certaines préoccupations dont je vous ai fait part dans mes observations. Je ne le dis pas dans mon mémoire, mais j'ai certaines préoccupations en ce qui concerne les ressources disponibles pour faire ce travail. Je pense qu'il est très important de bien réfléchir aux conséquences du projet de loi pour les ressources. Je pense que Parcs Canada aura besoin de ressources additionnelles pour bien faire son travail, tout comme certains autres partenaires également. Je suis moi aussi d'avis que nous n'avons peut-être pas suffisamment investi dans les bonnes mesures de protection environnementale ou dans des mesures de développement durable, pour nos mers, nos lacs et nos océans.
Ce que Jon Lien vient de décrire est essentiellement une sorte de gestion adaptée ou de mouvement vers un genre d'idéal, et je pense que lui et moi sommes tout à fait d'accord face à une telle approche.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Nelson.
Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Mark.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan—River, Réf.): Merci, monsieur le président. Je remercie nos deux témoins d'être ici aujourd'hui. Vos observations ont été vraiment utiles.
Je ne crois pas qu'il y ait un seul Canadien qui ne puisse être d'accord pour dire que les aires de protection ou les aires de gestion sont une bonne chose. Je pense que M. Lien a visé juste lorsqu'il a dit qu'il faut en fait convaincre les gens qui vivent dans les régions qu'il s'agit là d'une bonne chose, qu'il ne s'agit pas carrément d'une attaque flagrante de leur culture et de leur gagne-pain.
Andy Mitchell a dit qu'il y avait un manque de confiance... c'est réellement l'un des problèmes en ce qui concerne ce projet de loi. Les gens qui sont venus témoigner devant notre comité et qui s'y opposaient, le faisaient justement pour cette raison, soit le manque de confiance à l'égard du processus, de tout le processus de consultation, qu'il s'agisse...
Je suppose que le plus gros problème est l'inconnu. Comme vous le savez, le projet de loi à l'étude englobe essentiellement les trois côtes qui pourraient être désignées comme étant des aires protégées. J'ai déjà dit que ce serait peut-être beaucoup plus facile si les employés des parcs et les scientifiques savaient exactement ce qu'ils veulent protéger. Cela rendrait certainement la décision plus facile à ceux qui vivent le long de ces trois côtes au Canada.
Une autre chose que j'ai été très heureux d'entendre, c'est que M. Lien est d'avis qu'il ne faut pas accélérer le processus de création de ces 29 aires protégées. Je suis heureux de l'entendre, et je pense que notre rôle de députés de l'opposition consiste à nous assurer que le processus qui est suivi est le bon et que les gens ont l'occasion d'y participer, et qu'ils peuvent exprimer leurs points de vue.
La question que je vous pose—et je crois que vous y avez également tous les deux fait allusion—est la suivante: comment pouvons-nous assurer une transition sans heurts de la loi à la réalité?
M. Jon Lien: Je pense que c'est exactement la question qui me préoccupe le plus. À mon avis, nous n'avons pas suffisamment d'expérience pour faire autre chose que de simplement lancer l'idée. Je suis vraiment convaincu qu'au fil du temps, nous voudrons modifier ce projet de loi de plusieurs façons.
L'un des problèmes que pose la mise en place de ces programmes, c'est que le gouvernement dit aux gens qu'il a tout un marché à leur proposer: «Vous savez, je suis d'Ottawa, je vais vous aider», et ce genre de choses. On n'a rien fait pour amener les gens à accepter cela comme quelque chose qui pourrait les aider, qui pourrait leur être avantageux. Il s'agit d'une nouvelle initiative qui comporte toutes sortes de nouvelles idées et qui a de grave conséquences sur la vie des gens. Il y a donc cette crainte de la nouveauté qui pourrait avoir de graves conséquences. Nous devons donner aux gens le temps d'examiner tout cela.
• 1150
J'entends constamment les gens dire que nous avons besoin d'un
processus dynamique. L'expression que les gens comme nous
utiliseraient est «gestion adaptive». On va essayer les choses,
voir comment elles fonctionnent, en essayer une autre, laisser
tomber si nécessaire ou aller de l'avant.
Ce qui effraie les gens, là-bas, c'est l'aspect permanent de cette mesure législative. Bien qu'elle établisse la base de la valeur de conservation, c'est également l'une des choses qui nous inquiète le plus.
Pour ce qui est du manque fondamental de confiance à l'égard du gouvernement, peu importe qu'il s'agisse de créer une nouvelle aire de conservation marine, de mettre en place un régime d'assurance-emploi ou d'assurance-maladie ou d'autres choses du genre. Dans les collectivités côtières dont je suis originaire, le manque de confiance n'a jamais été aussi élevé. Je ne connais pas toutes les raisons pour lesquelles on en est arrivé là, mais je sais que c'est le cas et que c'est une réalité à laquelle nous devons être confrontés dans le cadre de ces programmes.
Ce que nous avons fait sur la côte Nord-Est—j'ai tenté d'aider le comité du mieux que je le pouvais—nous avons dit que nous allions faire quelque chose qui valait la peine. Donc, en fin de compte, nous dirons peut-être non à Parcs Canada, mais le processus qui consiste à examiner nos besoins en matière de conservation, à examiner nos options, à déterminer quels segments de la communauté ont des besoins spéciaux, à apprendre à travailler en coopération et le processus d'éducation que cela comporte—tout cela a été extrêmement utile.
Je peux vous dire que Parcs Canada a judicieusement investi toutes les ressources qu'il pouvait investir dans ce processus. Même si en fin de compte nous leur disons non, le processus aura été utile, ne serait-ce que pour ces raisons.
Voilà donc mes observations sur le sujet qui nous préoccupe.
Le président: Étant donné l'heure et comme nous avons plusieurs personnes qui sont prêtes à poser des questions, pourriez-vous, s'il vous plaît, être concis dans vos questions et dans vos réponses?
Monsieur Nelson.
M. Gordon Nelson: Je pense qu'il faut procéder graduellement et commencer par les régions où les chances de succès sont meilleures que dans d'autres. Les études que nous avons effectuées au cours des huit dernières années dans les Grands Lacs, notamment dans le lac Érié, où nous avons fait une analyse des zones où l'on pourrait créer une aire de conservation marine, ont permis de dégager très clairement des divergences d'opinions et différents niveaux de confiance parmi les gens selon la région.
C'est dans le parc national de la Pointe-Pelée que les points de vue étaient les plus positifs. Les gens là-bas travaillent depuis longtemps avec Parcs Canada et il était clair pour eux que ces nouveaux programmes comporteraient des avantages, du moins c'était leur point de vue. Par ailleurs, dans ce cas-ci, il y a des exemples américains. La Old Woman Creek National Estuarine Research Reserve se trouve du côté américain dans l'Ohio. C'est donc une autre région qui serait favorable à ce genre d'initiative.
Les gens de la région ont créé leur propre aire de conservation marine privée pour la protection de la plongée et d'autres ressources à Leamington près de Pointe-Pelée, et il y a des exemples semblables sur la côte Ouest.
Il est donc possible de trouver des endroits où les gens ont confiance dans ce genre de processus, où on pourrait mettre les programmes en place, ce qui permettrait à d'autres régions qui ont certains doutes d'en tirer des leçons.
[Français]
Le président: Madame Tremblay.
Mme Suzanne Tremblay: Je vous remercie de votre présentation, mais vous ne m'avez ni l'un ni l'autre convaincue du bien-fondé de ce projet de loi.
• 1155
Nous avons entendu trop de témoins qui étaient
défavorables au projet, entre autres des témoins de
Terre-Neuve qui n'ont rien contre
la protection marine, mais qui ne veulent surtout pas que
cela soit implanté à Bonavista, où ils ont
35 fermes d'aquaculture.
Votre prémisse, docteur Lien, est que
[Traduction]
la loi reflète un processus consciencieux d'études et de consultations.
[Français]
Vous avez commencé en disant cela. On nous a dit ici, à ce comité, que le gouvernement du Québec avait été consulté et que quatre ministères avaient répondu. On a déposé les quatre lettres des ministères: l'un demande de changer l'adresse parce que ce n'était pas la bonne; l'autre dit qu'il nous remercie beaucoup, qu'il a bien reçu le document et nous demande de le tenir au courant de la situation. Ce sont des accusés de réception et non des réponses à des consultations.
Nous avons toujours prétendu que les consultations avaient été mal faites. Nous n'accordons aucune importance et aucune valeur scientifique à ces consultations. Ce n'est pas parce qu'on nous donne une liste de gens qui ont reçu le document qu'on peut prétendre avoir consulté ces gens. S'ils ont tous répondu comme le gouvernement du Québec, cela ne peut pas aller bien loin.
Vous avez écrit il y a 25 ans à Parcs Canada pour lui demander de faire quelque chose. Pourquoi Parcs Canada doit-il absolument faire quelque chose quand deux ministères, le ministère de l'Environnement et le ministère des Pêches et des Océans, sont déjà impliqués dans ce processus? Pourquoi faut-il que Parcs Canada aille marcher là avec ses gros sabots et mécontenter beaucoup de gens d'une côte à l'autre?
[Traduction]
Le président: Monsieur Lien.
M. Jon Lien: Tout d'abord, en ce qui concerne la comparution du comité d'étude de faisabilité de Terre-Neuve, j'ai entendu leur témoignage et je comprends ce qu'ils ont dit. Il y a tout un débat pour décider si nous allons créer l'aire de conservation marine sur la côte Nord-Est. Cependant, je tiens à vous dire que depuis que ce groupe a comparu devant votre comité, ils sont retournés dire au comité ce qu'ils avaient dit—que si on insistait ils diraient sans doute non—mais le comité a voté et décidé de faire cette étude de faisabilité. Il trouve cette étude extrêmement valable et le comité ne peut pas vous dire de quelle façon cela va se terminer. Ils n'ont pas produit le modèle avec lequel ils veulent travailler, etc.
Je crois que la consultation faite dans le cadre de cette étude de faisabilité a été excellente. Ils viennent tout juste de terminer une série d'ateliers. La participation à ces ateliers a été excellente. Il y a eu des débats très intéressants. Ils sont en train de préparer un document qui résume ces débats et présentent leurs propres idées, les idées des membres du comité, au sujet de ce qui pourrait être fait, ce qui serait pratique, nécessaire, etc.
Je pense qu'il est important de comprendre que cela ne représente qu'un type de programme relatif aux aires de protection marine. Ce genre d'aire de protection marine qu'envisage de créer le ministère des Pêches et Océans sert à protéger un habitat unique ou crucial. Bon nombre de ces aires sont exceptionnellement petites. Par exemple, l'un de leurs projets pilotes est dans les Race Rocks en Colombie-Britannique, et il s'agit d'une très petite aire. À l'heure actuelle, on n'envisage pas utiliser ce projet de loi en particulier pour protéger de façon générale tout un écosystème marin représentatif.
La loi qui relève d'Environnement Canada vise en fait à protéger l'habitat vital pour la faune et vise donc dans une grande mesure à protéger des zones de production particulières, c'est-à-dire un groupe d'oiseaux marins ou quelque chose du genre. C'est vraiment la seule façon d'atteindre les objectifs nationaux de biodiversité dans les océans. Je pense que cette loi a un rôle très unique à jouer. On pourrait faire valoir que cela n'est pas important ou quelque chose du genre, mais je ne pense pas que l'on puisse dire que cela représente entièrement un dédoublement des activités des autres ministères.
Le président: Monsieur Nelson, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Gordon Nelson: Oui. J'ai participé à un projet de recherche de maîtrise dans le cadre d'un processus de planification de consultations publiques pour l'aire de conservation marine proposée pour Bonavista. Le comité d'évaluation de l'étudiant et des gens qui ont participé à la thèse a été fort élogieux à leur égard et a été impressionné par le processus de consultation qui a été utilisé. Cette thèse a été appuyée par Parcs Canada, et l'étudiant en question travaillait pour Parcs Canada pendant qu'il faisait sa thèse.
Donc, d'après ce que je crois comprendre de cette situation et d'après les rapports que j'ai reçus et les commentaires que d'autres ont fait à ce sujet, le tout s'étant déroulé il y a environ deux ou trois ans, ce fut une expérience très positive.
En ce qui concerne la différence entre les divers types de réserves, par exemple dans les Grands Lacs, Long Point a une réserve nationale de la faune qui est l'équivalent terrestre des réserves nationales marines de la faune. Lorsque nous avons fait notre étude dans la région du lac Érié et dans d'autres régions, on s'est aperçu que les gens là-bas avaient une attitude assez positive face à la possibilité de créer une réserve nationale marine de la faune pour Long Point, car c'était leur tradition. Cela protège les oiseaux migrateurs et la sauvagine. Cela protège leur habitat. Il ne s'agissait pas de créer de grandes réserves, comme Jon vient de le dire.
Il y a vraiment une distinction entre les deux objectifs. La réserve de la faune, d'une part, est axée sur les espèces et l'habitat de ces espèces particulières. L'autre type de réserve tente plutôt de viser des régions largement représentatives et, à mon avis, devrait servir surtout à la science et à la surveillance, ou le plus possible à la science et à la surveillance plutôt qu'à autre chose, comme je l'ai dit dans mon mémoire. Ce n'est pas nécessairement le cas pour certaines de ces réserves de la faune.
Le président: Merci.
Monsieur Laliberte.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): J'ai un certain nombre de questions à poser. Je pense qu'on a distribué un document spécifiquement sur le titre. Je voudrais par ailleurs revenir sur la question de M. Mark concernant le titre de parcs marins par opposition à aires de conservation. J'ai un problème à cet égard pour ce qui est des aires de protection du ministère des Pêches et Océans. En ce qui concerne les aires marines de protection et les aires marines de conservation, il semble y avoir une zone grise pour ce qui est de savoir qui en a la responsabilité et qui peut en premier déclarer qu'il s'agit d'une aire protégée ou une aire de conservation. Il y a ensuite toute la question de l'obligation relative aux ressources, à la permanence de cette loi, des intentions du ministère des Pêches et Océans, des conséquences à long terme et du processus de consultation. On parle des responsabilités de certains secteurs. On peut avoir une préférence, comme l'a indiqué le groupe Bonavista qui a témoigné devant notre comité. D'après ce qu'ils nous ont dit, il semblerait qu'ils préfèrent le processus du ministère des Pêches et Océans, même si le MPO est considéré comme étant un promoteur de l'industrie également, non seulement comme un organe de réglementation, mais aussi comme un promoteur de l'industrie de la pêche.
La question du titre du parc marin du Saguenay n'a pas été mentionnée dans ce document. Je pense qu'il vient tout juste d'être adopté l'an dernier, et ce parc a certainement sa raison d'être.
Ce que je tente de dire ici, c'est que je ne me suis jamais rendu compte des obligations internationales relativement à la zone de 12 à 200 milles. Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir un parc marin qui aurait plutôt une zone centrale entourée d'une zone de conservation? Peut-être que les activités de science et de recherche permettront d'en arriver là.
Mon autre préoccupation, c'est que lorsque le projet de loi a été déposé, les parcs marins étaient limités aux grands lacs, mais il y a deux grands lacs qui portent le nom de Grand Lac dans les Territoires du Nord-Ouest—le Grand Lac de l'Ours et le Grand Lac des Esclaves. Par ailleurs, il y a toute une série d'énormes lacs le lac Athabasca et le lac Winnipeg, qui relient les grands lacs du Nord aux grands lacs du Sud. Pourquoi ne pourrions-nous pas envisager une aire de protection marine dans ces lacs également, même si ce sont des lacs intérieurs d'eau douce? C'est une question qui me préoccupe.
Le président: Votre deuxième question s'adresse-t-elle aux témoins ou aux fonctionnaires?
M. Rick Laliberte: Les témoins se sont dits d'accord avec le projet de loi, mais les 29 aires sont limitées aux Grands Lacs et aux océans. J'aimerais savoir ce qu'ils pensent des autres grands lacs du pays.
Un parc marin a été créé dans le Saint-Laurent, au Québec. Pourquoi ne pourrions-nous pas concevoir une aire qui répondrait aux deux besoins, une aire de conservation, mais aussi peut-être un parc marin qui servirait aussi de zone de protection?
Le président: Brièvement, monsieur Lien.
M. Jon Lien: Je pense que les fonctionnaires du ministère des Pêches et Océans et ceux des Parcs devront régler certaines choses. Je peux vous dire qu'un de nos principaux problèmes dans l'étude de faisabilité qui a été menée à Terre-Neuve, c'est que le MPO s'est contenté d'observer. Ce ministère a le mandat de contrôler les pêches, et les pêcheurs préfèrent un mal connu à un mal inconnu. Ils savent ce qui a été fait dans le passé, cela ne leur plaît pas nécessairement, mais cela, ils le comprennent.
J'estime qu'il faut mettre à profit les points forts des deux ministères. Parcs Canada est la source d'informations sur l'environnement la plus respectée au Canada. Le MPO a une réputation mondiale en matière de recherche et de gestion des océans. Nous devrions combiner leurs talents respectifs dans un programme véritablement national.
Pour ce qui est de créer une zone marine de protection entourée d'une aire de conservation, cela me semble une excellente idée.
C'est un peu ce qu'on a fait dans l'aire marine de conservation sur la côte Nord-Est. On y trouve des zones de protection du homard sous le coup d'une dérogation de pêche, où la pêche est interdite. Ces zones sont surveillées. Elles plaisent bien aux pêcheurs et, si elles s'avèrent un succès, elles se multiplieront sans doute.
En matière de pêche, bon nombre des zones de protection visent une seule espèce d'intérêt commercial ou l'habitat qu'il lui faut. Les aires de conservation, elles, sont plus vastes.
Pour répondre à votre dernière question sur l'opportunité d'inclure d'autres grands lacs, je n'ai pas d'opinion bien arrêtée à ce sujet, mais si ça peut aider ces régions, pourquoi pas. Un des principaux avantages des aires marines de conservation, c'est que Parcs Canada fait de l'interprétation dans ces aires et y tient des activités pour le public canadien. Au Saguenay, par exemple, on mène des travaux très importants sur les bélugas.
Parcs Canada est le chef de file du pays en matière de contrôle des bélugas. Ce n'est pas le MPO qui a fait cela. La réglementation en matière d'observation des baleines adoptée au Saguenay est devenue le modèle. Voilà pourquoi j'estime que les deux ministères doivent apporter leur contribution à ce processus de création d'un réseau national de zones de protection.
Le président: Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Nelson, ou êtes-vous d'accord?
M. Gordon Nelson: Il me paraît utile d'envisager ces mesures législatives et ces politiques visant les aires marines et les lacs d'eau douce en comparaison avec les mesures qui ont été prises au fil des ans pour les aires terrestres. Dans bien des régions du pays, vous trouverez des parcs nationaux qui ont été créés pour protéger et conserver de grandes zones représentatives des régions naturelles où se trouvent ces parcs. Mais il y a aussi des réserves fauniques tel Long Point qui ont été établies, parfois en collaboration avec les provinces, pour protéger certaines espèces particulières d'oiseaux ou d'autres animaux et qui, à cet égard, constituent un complément aux parcs nationaux.
Il y a aussi toutes sortes de réserves et parcs provinciaux. En fait, en Ontario, il y a environ sept catégories de parcs provinciaux, chaque catégorie ayant un but précis.
De plus, les paliers municipal et régional se dotent aussi de zones à des fins de protection de la nature. On a inclus des réserves naturelles au plan municipal de grandes régions telles que Kitchener-Waterloo, Halton ou Toronto. Au fil des ans, cette approche souple et graduelle donnera lieu à un ensemble de zones qui serviront à la protection, à la conservation et à d'autres utilisations des océans.
• 1210
Prenons encore l'exemple du lac Érié: c'est un parc national
comprenant des aires de conservation dans les eaux du large. Il y
a aussi une réserve faunique nationale et, du côté américain, une
réserve nationale de recherche estuarienne. Le ministère des
Ressources naturelles de l'Ontario y a créé différents sanctuaires
de poissons, dont certains sont saisonniers, pour assurer la
reproduction de certaines espèces. Tout cela s'inscrit dans un
régime de développement durable sensible et imaginatif.
Nous avons donc ici l'occasion de poursuivre sur cette voie, grâce à la collaboration des différents ministères compétents, afin que les aires marines de conservation soient associées à des espèces précises et répondent à des préoccupations particulières du point de vue faunique.
Les parcs nationaux ou marins permettront de conserver des systèmes entiers. La Loi sur les océans ne s'applique même pas aux Grands Lacs, il n'y a donc pas de possibilité de pêche comparable dans les Grands Lacs; la loi ne s'applique qu'aux océans. Il faut donc prévoir pour les Grands Lacs des mesures qui s'apparentent à la Loi sur les océans.
Le président: Monsieur Muise.
M. Mark Muise (West Nova, PC): Merci, monsieur le président, et merci à nos invités.
Monsieur Lien, vous avez dit une chose à laquelle j'aimerais donner suite, si c'est possible. Vous avez dit que nous n'avons pas suffisamment d'expérience des aires marines de conservation et que, par conséquent, nous devrons probablement modifier des choses en cours de route. Cela n'est-il pas risqué? Une fois qu'une aire de conservation est établie, elle ne peut être modifiée.
Vous avez demandé si nous, à Ottawa, nous investissons émotivement dans ce genre de dossier. Je peux vous dire que moi, je le fais, car là où j'habite, dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, une bonne partie de notre économie dépend de l'océan et les localités côtières vivent de la mer. Je crains que si nous commettons une erreur, nous ne puissions la corriger et que les localités côtières en souffriront. Je voudrais éviter cela, et j'aimerais que vous m'en disiez plus long à ce sujet.
M. Jon Lien: Dans la région de Southwest Nova, on a entrepris bien des initiatives en vue d'établir les zones marines de protection pour diverses espèces. Il y a notamment le Fundy Fixed Gear Council, la gestion communautaire et les contingents communautaires. On y a fait des choses très intéressantes et très enthousiasmantes, on a trouvé de nouvelles façons de gérer les pêches et de préserver ces localités côtières. C'est la priorité absolue.
Je suis d'accord avec vous pour dire qu'une des principales préoccupations des localités côtières, c'est que toute mesure inédite soit réversible. Je crois qu'on accepterait bien mieux le projet de loi si on prévoyait une période d'essai ou une certaine réversibilité. Si on pouvait tenter l'expérience dans le cadre d'un projet pilote pour ensuite mener une évaluation et déterminer s'il s'agit bien là de ce qu'on veut, je sais que cela apaiserait grandement les craintes de bien des gens relativement à ce projet de loi.
Les mesures réversibles ne permettent pas de réaliser la conservation, car on a tendance à faire un usage toujours plus intense des océans. Il ne faut pas l'oublier. Je ne vois pas d'objection à ce qu'on prévoie une période d'essai, mais je ne serais pas d'accord pour que tout le processus soit réversible. À un moment donné, il faut prendre une décision définitive.
M. Mark Muise: Des témoins nous ont dit que nous créons une nouvelle bureaucratie. Le parc marin du Saguenay a été établi. On a mené de vastes consultations avant de le créer. Étant donné que certains nous ont dit qu'ils craignent l'apparition d'une nouvelle bureaucratie, et étant donné que la création du parc du Saguenay s'est bien déroulée, pourquoi n'opterions-nous pas plutôt pour cette approche plutôt que pour l'adoption du projet de loi C-48?
M. Jon Lien: Je ne suis pas sûr que ces solutions s'opposent l'une à l'autre. Je sais qu'au Saguenay, on a adopté une approche de cogestion. C'est une approche qui a été mise au point dans la région des Maritimes. J'imagine qu'on peut parler de nouvelle bureaucratie si les organisations communautaires deviennent des partenaires actifs de la gestion de leurs collectivités et de leurs ressources, mais ça fonctionne bien et les gens aiment bien avoir voix au chapitre.
Au Saguenay, les gens se sont vus dotés de pouvoirs efficaces. Ils ont un nouveau partenaire puisant: le gouvernement fédéral. Ce partenaire est à l'écoute et leur donne l'occasion de présenter leurs idées. Il en va de même pour les ententes de cogestion dans les pêches. Je suppose que cela constitue un nouveau palier de bureaucratie, mais cela me paraît positif.
Le président: M. Godfrey, suivi de M. McWhinney et de M. Dumas.
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): J'ai deux questions. Elles s'adressent à vous deux. La première porte sur les interdictions, et je crois que c'est M. Nelson qui a proposé clairement d'en élargir la liste, chose qu'avaient déjà proposée d'autres témoins. J'ai remarqué avec intérêt que M. Lien n'y a pas fait allusion dans son exposé.
Pour ma première question, si l'on voulait élargir la liste, quelle serait la première chose qu'il faudrait y ajouter en priorité?
Ma deuxième question porte sur l'aquaculture. J'ai entendu M. Lien dire que les pratiques actuelles ne sont pas formidables, mais que l'on s'entend à dire que tout ce secteur d'activités s'améliore de façon globale. Certains témoins qui ont comparu devant le comité nous ont fait part de préoccupations particulières au sujet de l'aquaculture des poissons. Ma deuxième question porte simplement sur le fait que vous avez tous deux mis l'accent, de façon très utile, sur l'aspect de l'écologie humaine. Ce n'est pas du tout la même chose que pour bon nombre de parcs nationaux. Si l'on estime normal que ce secteur relève du ministère du Patrimoine canadien, c'est entre autres précisément en raison de l'interaction entre les collectivités côtières—l'histoire humaine, l'activité humaine—et le milieu naturel; toute tentative artificielle en vue de faire abstraction de cette interaction est non seulement vouée à l'échec sur le plan politique, mais elle se fait en outre au mépris de tous les progrès que nous avons réalisés au cours des 200 dernières années.
Mes deux questions portent sur les interdictions et sur l'aspect humain.
Le président: Monsieur Lien et monsieur Nelson, je vous demanderais de répondre tous deux brièvement à ces deux questions.
M. Jon Lien: S'agissant des interdictions, nous n'avons pas beaucoup d'expérience dans ce domaine. Certains souhaitent élargir considérablement la liste et d'autres préconisent qu'on supprime les interdictions. Je ne pense pas que, pour le moment, nous disposions de suffisamment de renseignements sur la question, et je m'en teindrai donc pour commencer à la liste minimum actuellement prévue.
Quant à l'idée de faire participer les êtres humains au processus, vous n'avez pas le choix. On peut bien discuter du pour et du contre, l'aspect humain est un incontournable. La colonisation de notre littoral s'est faite grâce à la richesse de l'océan, de sorte que dans toutes les zones productives, il y a une collectivité humaine qui dépend de ces ressources. Les collectivités côtières sont le reflet de la structure inhérente de l'océan et de tout le reste. On ne peut pas faire artificiellement une telle distinction.
Le président: Monsieur Nelson?
M. Gordon Nelson: Il m'est très difficile de traiter des interdictions, à l'instar de la plupart des gens, je suppose. Nous avons maintenant de nombreuses preuves que la pêche au chalut endommage considérablement l'habitat au fond de l'océan et nuit à la vitalité du système à l'avenir. Il en a été fait mention dans le Journal of Conservation Biology, qui a été publié dernièrement, et un certain nombre d'imminents spécialistes sont arrivés à cette conclusion.
Dans d'autres cas, je pense que ce n'est pas aussi évident et c'est pourquoi j'aime cette idée de l'évaluation environnementale comme mesure de précaution. Il y a peut-être des différences selon les régions pour certaines de ces choses. D'après les constatations que j'ai pu faire dans la mer du Nord, les Shetlands et dans une certaine mesure en Norvège, il semble que l'aquaculture des poissons, si elle n'est pas gérée, risque d'avoir de nombreux effets néfastes sur d'assez vastes aires marines.
• 1220
Là encore, c'est une approche gradualiste. Elle peut se fonder
sur une évaluation minutieuse, sur le patrimoine humain et sur les
conditions dans la région. Certaines interdictions se fondent
totalement sur des preuves convaincantes, je pense, mais pour les
autres, il faut procéder à des évaluations, des examens minutieux
et tenir compte des interactions.
Quant à l'idée de l'écologie humaine, du patrimoine humain, je pense que les deux sont étroitement liées. Il est possible, à mon avis, de les développer tout en fonction de la fierté qu'ont les gens pour leur patrimoine maritime, de la pêche dans les Grands Lacs et d'autres patrimoines des lacs. Témoin l'intérêt que les gens portent aux épaves, et à partir de là on peut utiliser une aire marine à des fins différentes. Cela pousse les gens à se rendre compte que dans certains des Grands Lacs, par exemple, il y a deux espèces qui fournissent presque toute la biomasse pour la pêche: la petite perche, de quatre pouces de long ou un peu plus, et les gaspareaux qui sont une espèce exotique. Tout le reste du système a disparu.
Les gens peuvent comprendre que si l'on adopte une stratégie axée sur le patrimoine humain ou l'écologie humaine, grâce à une série de décisions prises au cours d'une certaine période, on peut provoquer des modifications importantes dans cette pêche et dans l'écosystème. À mesure qu'il y a une interaction entre l'histoire humaine et l'écosystème, les gens sont de plus en plus enclins à rétablir celui-ci et à faire le lien entre l'aspect humain et l'aspect nature. À mon avis, c'est une approche très prometteuse sur laquelle on ne met peut-être pas suffisamment l'accent dans la loi.
M. John Godfrey: Merci.
Le président: Monsieur McWhinney.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): J'ai des questions qui découlent de cette note intéressante en réponse à la question de M. Mark. L'avez-vous lue?
Le président: Non je ne pense pas qu'il l'ait reçue.
M. Ted McWhinney: Cette feuille n'a pas été distribuée?
Le président: Elle a été distribuée aux membres du comité, car...
M. Ted McWhinney: Je pourrais peut-être la leur remettre directement.
Il existe une dichotomie, peut-être simplement d'ordre terminologique, entre les parcs marins et les aires marines de conservation. On dirait que cette distinction est due au respect des classifications juridiques prévues aux termes des lois internationales. Chacun sait que le MPO et le ministère des Affaires étrangères ont une interprétation juridique différente de la Convention sur le droit de la mer. Je me demande simplement s'il y a des mesures que vous pouvez prendre dans les parcs nationaux, selon leur définition stricte, et que vous ne pensez pas pouvoir prendre dans une aire de conservation.
Autrement dit, il y a une distinction entre les secteurs auxquels s'appliquent la souveraineté, la compétence des entités nationales, etc. Cela semble s'appliquer lorsqu'on sait mieux ce qui s'y passe que dans les aires de conservation. Les pouvoirs de conservation prévus aux termes du droit international augmentent continuellement. En fait, chacun sait que le ministre des Pêches, à une époque, a fait fi des conseils prudents qui lui étaient donnés et a accordé ce que l'on aurait pu appeler certains pouvoirs souverains à l'Espagne et au Portugal ou à leurs navires.
Y a-t-il dans la notion de parc quelque chose qui vous empêche de poursuivre vos objectifs en matière environnementale?
M. Jon Lien: Monsieur, je pense que nous essayons de régler des problèmes de sémantique plus qu'autre chose...
M. Ted McWhinney: Je veux m'écarter de la sémantique. Je m'intéresse aux pouvoirs, aux fonctions. Que faites-vous pour les parcs, selon la définition stricte, que vous ne pensez pas pouvoir faire dans les aires de conservation? Ou s'agit-il en fait d'une distinction inutile, selon vous?
M. Jon Lien: D'après moi, c'est une distinction inutile. Je ne pense pas que nous ayons exploré les besoins en matière de gestion ou les avantages susceptibles d'en découler, quelle que soit la façon dont on parle de ces aires. Si vous envisagez un modèle de parc national terrestre, il nous sera impossible d'emmener les gens et de les promener autour d'un étang de castors. Il faudra procéder à une campagne d'éducation et de sensibilisation du public tout à fait différente. C'est un système de gestion tout à fait différent, je pense que nous ne savons pas encore ce qui nous attend. Si vous me posez la question dans une centaine d'années, je pourrais sans doute... j'aurais aimé pouvoir y répondre, mais à l'heure actuelle cela m'est impossible. Je ne peux pas faire de distinction entre ce qui va se passer.
M. Ted McWhinney: Pour ce qui est du fonctionnement du ministère, avez-vous remarqué qu'il fait une distinction au niveau des opérations?
M. Jon Lien: Je ne suis pas au courant.
M. Ted McWhinney: Monsieur Nelson, avez-vous une idée à ce sujet?
M. Gordon Nelson: Oui, mais vous me demandez de vous faire un cours magistral d'une heure.
M. Ted McWhinney: Je n'ai pas besoin d'un cours magistral d'une heure, mais j'aimerais savoir en quelques mots ce que vous en pensez.
M. Gordon Nelson: Je serai bref. La terminologie et la sémantique à ce sujet ont évolué au cours d'une longue période, dans l'esprit des gens qui essaient de comprendre ce qu'ils veulent conserver et comment ils veulent utiliser ces aires. Dans les années 60, on parlait de «parc marin». Lorsque l'objet de ces aires marines a évolué, selon les pays et les régions, on a donné des noms différents à l'objet principal de chaque programme. Par conséquent, à l'heure actuelle, ce que l'on appelait autrefois un «parc marin» deviendra désormais une «aire marine de conservation». Par exemple, Fathom Five est encore un parc marin, même s'il va changer de désignation lorsque le projet de loi sera adopté.
Les aires marines de conservation ont pour objet la préservation de vastes secteurs ou de régions représentatives. C'est à cela que ça correspond dans notre pays. Aux États-Unis, les sanctuaires marins nationaux jouent plus ou moins le même rôle, et la terminologie n'est donc pas toujours la même. Au Canada, il importe de comprendre que nous nous intéressons à trois types de conservation et utilisation des océans tout à fait justifiés. Dans notre pays, on leur donne certains noms, mais on les appelle peut-être différemment dans d'autres pays.
Par aires marines de conservation, on entend donc la préservation de zones représentatives et de l'intégrité écologique dans de très vastes régions, à des fins scientifiques et autres. On met l'accent sur les espèces et les habitats, mais on tient compte en même temps des autres éléments, comme le laissait entendre la question qui a été posée. C'est la deuxième définition ou la troisième, c'est la protection des fonds marins, dans le but précis de protéger le poisson et la pêche. Le centre d'intérêts de ces trois types de mesure n'est peut-être pas tout à fait le même, cela se comprend, mais on peut les combiner dans une même région ou dans divers endroits d'une région, pour atteindre des objectifs différents qui serviront notre intérêt à tous.
M. Ted McWhinney: Il y a une proposition concernant la zone économique exclusive de 200 milles. Selon certaines personnes, nous n'avons pas la souveraineté à l'égard de cette zone et les mesures que nous pouvons prendre sont limitées. Cela n'est pas une bonne idée, selon vous.
M. Gordon Nelson: Non, à mon avis, les mesures que nous prenons dans les zones économiques exclusives, dans le monde entier, sont très précaires et prétentieuses.
M. Ted McWhinney: L'usage peut varier, mais y a-t-il selon vous des limites à la souveraineté que nous pouvons exercer, d'après cette déclaration? M. Lien a adopté la position contraire—soit dit en passant, c'est une opinion que je recommande au comité—et c'est pourquoi je voulais avoir votre avis d'expert.
Le président: Nous devrions peut-être laisser M. Lien...
M. Ted McWhinney: Je pose la question pour la forme.
Le président: Monsieur Dumas.
[Français]
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau, BQ): Bonjour, messieurs.
Ma question s'adresse à M. Lien. Si la traduction a été fidèle, vous avez dit qu'il ne fallait pas modifier le projet de loi C-48, mais vous avez ajouté qu'il y aura probablement des lacunes et qu'il faudra prévoir un mécanisme d'examen et revoir la loi dans trois ans. Cependant, entre l'adoption prochaine du projet de loi et la fin de cette période de trois ans, il y aura sûrement des gens qui seront pénalisés.
Évidemment, les pêcheurs et la population autochtone se sont opposés au projet de loi C-48. Ne croyez-vous pas qu'on devrait attendre? Vous avez écrit à Parcs Canada il y a 25 ans. Il ne s'agirait peut-être pas d'attendre plusieurs années, mais de rendre ce projet de loi le plus parfait possible. Nous, de l'opposition, allons sûrement y proposer des amendements.
Ce que je crains un peu, c'est qu'entre-temps, des gens ne soient pénalisés par cette loi parce qu'elle n'est pas parfaite. Quand les gens sont pénalisés, c'est difficile. La loi, c'est la loi.
[Traduction]
M. Jon Lien: Mon père m'a toujours dit que le mieux était l'ennemi du bien. Il est sans doute possible d'approfondir la question en tirant profit de l'expérience de chacun, à en discutant à fond, en tenant davantage compte de l'opinion de chacun, etc. Je suis toutefois fermement convaincu que nous réussirons davantage à améliorer cette loi en commençant à comprendre ce qui va se passer, et les possibilités qu'offrent ces zones. Nous apprendrons sur le terrain. Nous en discutons déjà depuis très longtemps et je crois que le moment est venu de mettre en pratique nos connaissances.
• 1230
Quant à la protection des gens, c'est une question importante,
à mon sens. J'ai dit qu'il serait peut-être utile de mettre à
l'essai certaines mesures de gestion pour entreprendre des
activités dans une aire marine de conservation, et je crois qu'il
sera utile d'examiner à nouveau la question lorsque nous aurons
acquis un peu plus d'expérience. Toutefois, rien de tout cela ne
devrait nous empêcher de nous mettre au travail. Le moment est venu
de décider d'aller de l'avant avec ce projet.
Le président: M. Laliberte va poser la dernière question.
M. Rick Laliberte: J'ai essayé de feuilleter toutes les pages concernant la consultation. À mon avis, c'est l'élément clé de toute cette loi, une consultation intensive. Les fonctionnaires du ministère voudront peut-être donner leur avis à ce sujet, mais le paragraphe 5.1 prévoit la constitution ou l'agrandissement des aires marines de conservation composées:
-
d'eaux ou de terres immergées dans les eaux intérieures, la mer
territoriale, la zone économique exclusive du Canada ou sur les
côtes ou les îles du Canada.
À aucun endroit dans cette loi il n'est question des 29 aires précises dont nous ont parlé les fonctionnaires. Il s'agit d'un instrument et d'un processus juridiques visant à créer une aire de conservation, de sorte que «eaux intérieures» pourraient très bien s'appliquer aux lacs dont j'ai parlé plus tôt. Cela pourrait s'appliquer au Grand Lac des Esclaves ou au Grand Lac de L'Ours, car ce sont des eaux intérieures selon l'interprétation de la loi.
À l'article suivant, où il est question de consultation, on parle uniquement des «communautés côtières touchées». Pourquoi veut-on limiter cette consultation, relativement aux plans de gestion, aux communautés côtières? S'il s'agit d'un problème d'immersion, est-ce qu'on ne peut pas considérer qu'il y a immersion lorsqu'on déverse une substance dans la rivière qui rejoint une aire marine de conservation? Les permis pourraient avoir une incidence, alors pourquoi ne pas vouloir consulter les communautés non côtières en amont également?
Mon autre question porte sur l'élargissement de la question des organismes autochtones. Il faudrait peut-être parler plus précisément de collectivités autochtones, car «organisme» pourrait devenir la terminologie juridique des associations nationales, provinciales ou autres. Il pourrait s'agir d'une association de pêche autochtone ou d'une association d'écotourisme autochtone. Ce sont des organismes autochtones, mais je crois que l'objet poursuivi dans ce projet de loi c'est de s'occuper précisément des collectivités touchées en vue de simplifier le processus de consultation et de ne pas brouiller les pistes.
Le président: Monsieur Amos.
M. Bruce Amos (directeur général, Parcs nationaux, ministère du Patrimoine canadien): Un certain nombre de points ont été soulevés dans cette question, monsieur le président. Il est vrai qu'il n'est pas fait précisément mention dans le projet de loi du réseau de 29 régions marines sur lesquelles se fonde Parcs Canada pour planifier un réseau futur d'aires marines de conservation. Dans l'énoncé de l'objectif du projet de loi, au paragraphe 4(1), il est question de protéger et conserver des «zones marines représentatives» mais c'est une expression générale. C'est d'une certaine façon compatible avec l'approche que nous avons adoptée pour le réseau des parcs nationaux au Canada, ou systématiquement, depuis le début des années 70, nous nous fondons sur des régions terrestres représentatives. Le Parlement n'a toutefois jamais enchâssé dans la loi ce genre de méthode de planification. Vous avez raison de dire que les 29 régions et leur emplacement exact ne sont pas mentionnés dans la loi. C'est parce qu'on considère qu'il s'agit d'un instrument de politique visant à réaliser l'objectif énoncé pour les régions représentatives, et c'est un instrument qu'il faudra modifier au fil des ans, de sorte que la délimitation des emplacements n'a peut-être pas sa place dans la loi.
• 1235
Voilà pour vous expliquer ces dispositions. Il est un fait que
vous avez entendu des responsables des parcs vous expliquez le
processus que nous utilisons, les 29 régions marines. Depuis le
temps que le principe est en vigueur et compte tenu des données
scientifiques pertinentes, il y a tout lieu de croire que c'est
bien de cette façon que nous comptons procéder, mais ce n'est qu'un
énoncé de principe.
Quant aux nombreuses suggestions concernant la liste des parties qu'il conviendra de consulter, je pense que ces remarques sont pertinentes.
Le président: Pourriez-vous répondre à la question qu'a posée M. Laliberte au sujet des eaux intérieures, dont il n'est fait aucune mention dans les dispositions prévoyant la tenue de consultation, ou il n'est question que des communautés côtières?
M. Bruce Amos: Il y a ici des spécialistes des océans qui pourront peut-être vous fournir une réponse d'ordre juridique, mais à mon sens, «eaux intérieures» est une expression technique qui s'applique aux eaux de certaines baies. Jon Lien pourra peut-être ajouter quelque chose à ma réponse.
Quant à la phrase citée par le député qui se trouve à l'article 5, à savoir «composée d'eaux et de terres immergées»—et trois endroits sont ensuite énumérés—«dans les eaux intérieures, la mer territoriale, la zone économique exclusive», d'après ce que je sais, les rédacteurs ont mentionné cela pour préciser qu'une aire marine de conservation pouvait se trouver dans n'importe laquelle de ces trois régions, y compris les eaux de la zone économique exclusive.
Quant à savoir si cette expression limite les eaux intérieures susceptibles d'être incluses, je ne le crois pas. Vous voudrez peut-être poser la question à M. Lien ou obtenir une interprétation juridique du sens exact de l'expression «eaux intérieures» par rapport aux lacs d'eau douce. Je crois que cela inclut les Grands Lacs. Si vous me permettez de poser la question, l'expression engloberait-elle d'autres eaux intérieures aussi?
Le président: Monsieur Lien.
M. Jon Lien: Je ne suis pas certain de pouvoir dire quelle sera la politique à la place de Parcs Canada mais j'avais plutôt compris que l'expression devait désigner les terres submergées, le fond de l'océan. Il est important que nous protégions cette ressource qui ne renferme pas que de l'eau, mais l'expression désigne aussi la colonne d'eau au-dessus des terres submergées, tout ce volume d'eau. Dans un parc national, l'équivalent serait une mention des terres et de l'atmosphère au-dessus.
Le président: Si l'intéressé veut répondre directement, c'est parfait.
M. Bruce Amos: Non, je vais continuer.
Nous avons cru comprendre que l'expression «eaux intérieures» a été ajoutée ici de façon à inclure particulièrement les Grands Lacs. Habituellement, quand on parle d'aires marines de conservation, on pense aux trois océans mais pas aux Grands Lacs. Nous voulions, comme ceux que nous avons consultés, que les aires marines de conservation incluent les zones représentatives des Grands Lacs et cette expression a pour but de les inclure.
M. Ted McWhinney: Ce n'est donc pas une notion en droit international; c'est une expression utilisée à des fins purement canadiennes. J'avoue ne pas avoir examiné la question en détail, mais il y a un lien au droit international que M. Lien s'apprêtait à mentionner. Nous pourrions peut-être demander au ministère quel était le but visé.
Le président: Oui. Je pense que M. Laliberte cherchait à savoir ce qu'il en est du lac Athabasca ou du lac Winnipeg, l'un des grands lacs?
Monsieur Amos, pourriez-vous répondre à cette question et nous dire si les communautés côtières incluraient, aux fins des consultations, un groupe vivant sur les rives du lac Athabasca? Est-ce que ce serait une communauté côtière?
Il me semble, mais je ne veux présumer de rien, que les légistes songeaient vraisemblablement à une communauté du littoral de Terre-Neuve ou de la Colombie-Britannique. Je n'en sais rien; je vous pose la question. C'est, je crois, ce qu'il voulait savoir.
M. Bruce Amos: Si vous me le permettez, je vais vous expliquer pourquoi Parcs Canada s'intéresse particulièrement aux Grands Lacs plutôt qu'à d'autres grands lacs d'eau douce. Nous n'avons toujours pas tiré au clair le sens précis de l'expression «eaux intérieures». Nous y reviendrons.
Comme vous le savez, nous avons un réseau de parcs nationaux qui sont censés être représentatifs des régions terrestres naturelles du Canada et qui sont réputés depuis toujours inclure les lacs d'eau douce qui se trouvent à l'intérieur des limites de ces régions naturelles. Quand il s'agit d'élaborer une politique applicable aux régions marines du Canada, il est bien clair que les trois océans sont inclus. La question était de savoir si les Grands Lacs doivent être inclus et on a conclu que oui puisqu'ils sont essentiellement une grande mer intérieure liée intimement à l'océan adjacent.
Quant aux autres grands lacs, on a jugé qu'ils n'ont pas le même lien aux océans et qu'il était difficile de savoir où s'arrêter. Dans le contexte des aires marines de conservation, comment décider quels grands lacs d'eau douce inclure? Ainsi, nous avons délibérément décidé d'inclure les Grands Lacs. Quant aux autres grands lacs d'eau douce, nous nous assurerons d'inclure des lacs représentatifs dans notre réseau de parcs nationaux. Il y a déjà quelques cas où les démarches en ce sens sont en cours. Le parc national prévu pour l'interlac manitobain irait jusqu'au lac Winnipeg, et le projet de parc national du Bras-Est-du-Grand-Lac-des-Esclaves inclurait une zone adjacente au Grand-Lac-des-Esclaves.
Il s'agit donc de choisir d'inclure une aire de conservation dans la famille des aires marines ou des aires terrestres, et c'est la distinction que nous avons faite: dans la politique nationale de conservation, ni l'une ni l'autre n'est négligée.
M. Ted McWhinney: Dans le cas des Grands Lacs, il y a aussi une dimension internationale puisqu'ils font l'objet d'un accord international avec les États-Unis. Nous serions obligés de défendre nos intérêts. Ce problème ne se pose pas dans le cas des lacs situés à l'intérieur des limites provinciales.
Le président: J'aimerais clore la discussion ici.
Monsieur Amos, si vous pouviez fournir quelques précisions additionnelles à M. Laliberte et aux membres du comité sur ces points, nous vous en serions reconnaissants. J'aimerais remercier très sincèrement M. Lien et M. Nelson d'être venus participer à nos travaux. M. Nelson a fait quelques suggestions d'amendements.
Monsieur Lien, pour ce qui est de vos suggestions, particulièrement l'examen périodique, il y a certainement de nombreuses lois fédérales qui renferment de telles dispositions. Il y en a dans les lois environnementales, dans la Loi sur les océans et d'autres encore. Nous allons tenir compte de votre suggestion. Merci d'être venu. Nous l'apprécions grandement.
J'aimerais demander aux membres du comité de rester pour une séance de travail.
Comme je vous l'ai dit, la ministre préférerait comparaître le 10 mars plutôt que demain étant donné le grand nombre de témoignages entendus et reçus par le comité. Ainsi, le comité ne siégera pas demain. Quoi qu'il en soit, nous méritons bien un répit. Jeudi, nous commencerons l'examen détaillé du projet de loi avec les fonctionnaires et je propose donc que nous ayons une séance de travail jeudi, pendant laquelle nous pourrons prendre les décisions voulues sur certaines questions dont la demande de quatre membres du comité au sujet du CNA. Nous nous réunirons pour trancher ces questions.
Jeudi, il y aura une réunion à huis clos à 11 heures mais au lieu de consacrer cette séance à l'examen détaillé du projet de loi, nous traiterons des travaux futurs du comité. Il s'agit d'une suggestion de M. Mark que je trouve parfaitement sensée. Nous aborderons la question du CNA et d'autres questions laissées en suspens.
Monsieur Mark.
M. Inky Mark: Monsieur le président, j'espère que le comité m'accordera le privilège de participer à l'examen article par article du projet de loi. Comme vous le savez, la semaine dernière nous étions tous à l'extérieur et nous n'avons pas réellement eu la possibilité de faire un examen approfondi du projet de loi afin de préparer l'examen article par article.
Le président: Monsieur Mark, comme la ministre ne comparaîtra que le 10, et que l'examen article par article ne commencera pas avant le jeudi suivant, le 18, au plus tôt.
Oui, cela vous donnera une semaine pour préparer des amendements après la comparution de la ministre. Ce sera donc le 17 ou le 18.
M. Rick Laliberte: À quelle heure?
Le président: Le jeudi, ce sera à 11 heures.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: On n'a pas de réunion demain.
Le président: Il n'y a pas de réunion demain. La réunion aura lieu jeudi.
Mme Suzanne Tremblay: Jeudi matin.
Le président: Ce sera une réunion portant strictement sur les affaires du comité. Nous siégerons à huis clos.
[Traduction]
L'examen article par article commencera le mercredi 17, soit dans deux semaines.
[Français]
Merci.
La séance est levée.