CITI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION
COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 23 octobre 1997
Le président (M. Stan Dromisky, Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Je déclare la séance ouverte.
Nous avons l'insigne privilège de recevoir aujourd'hui quatre représentants de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je suis sûr que les membres du comité vont poser beaucoup de questions. Il s'agit d'un domaine très stimulant et intéressant, troublant pour certains, et j'espère que vous êtes prêts à faire face au barrage de questions que l'on va vous poser.
Aujourd'hui, pour la période des questions, je commencerai par l'opposition officielle, mais au lieu de procéder par ordre autour de la table, j'alternerai entre les partis d'opposition et le parti ministériel afin que les questions posées soient aussi diverses que possible.
Monsieur Thibault, je pense que c'est vous qui allez faire l'exposé, et j'espère que vous commencerez par présenter vos collègues.
M. Paul Thibault (directeur exécutif, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Merci, monsieur le président. Honorables députés.
[Français]
Je m'appelle Paul Thibault et je suis directeur exécutif à la CISR. M'accompagne aujourd'hui Mme Benimadhu, qui est directrice générale de la Direction générale des services de gestion, mais qui était auparavant directrice générale de l'arbitrage.
[Traduction]
Je suis également accompagné de Mme Evelyn Levine, directrice générale, Politique, planification et recherche; et de M. Philip Palmer, avocat général, Services juridiques.
Je suis directeur exécutif depuis cinq mois environ. Je voudrais partager avec vous mes premières observations; ensuite, nous vous présenterons des documents qui résument la situation. Puis, évidemment, nous aurons le plaisir de répondre à vos questions.
Mes observations porteront essentiellement sur certains aspects de la situation, et elles découlent de mes quelques mois d'expérience dans ce poste. La première porte évidemment sur la complexité de la situation et son incidence sur le CISR.
La question primordiale est celle des mouvements de population à l'échelle mondiale et de leur caractère imprévisible; ils peuvent avoir des conséquences diverses, non seulement au Canada mais dans plusieurs pays occidentaux. Bon nombre de ces conséquences sont tout à fait imprévisibles. Un exemple classique en est l'effet qu'une émission de télévision diffusée dans la République tchèque a eu sur la population locale et sur notre système.
[Français]
En ce qui concerne les procédures, nous avons plusieurs partenaires et tous nos partenaires peuvent influer sur nos activités. Nous ne contrôlons pas toutes les étapes ni tous les intrants dans la longue chaîne d'activités qui mène vers la décision de la CISR. C'est vrai partout dans le monde dans le sens qu'on est dépendants des pays d'origine pour la documentation, par exemple, ou pour ce qui est du bien-fondé de la demande. On est également dépendants, au Canada, du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration qui nous envoie les candidats. On est aussi influencés par les avocats et consultants qui représentent les intervenants pour ce qui est de la durée d'un processus particulier.
• 1555
De la même façon, les provinces qui accordent
des avantages sociaux et de l'aide
juridique sous différentes formes peuvent influer sur la
durée de nos audiences et la façon dont elles sont tenues.
Finalement, on est influencés par les individus qui se présentent devant nous. Certains arrivent avec une documentation complète; d'autres n'ont aucune documentation et viennent d'un pays qui, en fait, n'existe plus. C'est le cas, par exemple, de la Somalie où il est impossible d'aller chercher la documentation si la personne ne l'a pas.
Tout cela a des incidences sur l'information, sur les procédures, sur les audiences, sur l'inventaire, sur le délai de traitement, sur les décisions de renvoi et ainsi de suite.
Nous nous efforçons présentement de renforcer nos structures horizontales et d'améliorer notre collaboration avec nos partenaires. Nous avons une entente avec le ministère en vue d'améliorer la gestion du portefeuille. Nous avons des comités consultatifs avec les barreaux des provinces. Nous avons apporté des contributions au groupe consultatif sur la révision de la Loi sur l'immigration qui doit présenter son rapport à la fin de décembre. Nous essayons, par exemple, d'améliorer nos liaisons avec le ministère de la Justice et d'autres intervenants.
Évidemment, il y a un équilibre délicat entre la tradition canadienne d'ouverture et les inquiétudes qui se manifestent concernant des abus possibles et leurs répercussions, que ce soit sur le système ou sur le coût des services sociaux.
Il y a également des craintes qui s'expriment concernant la sécurité, car il y a parfois des criminels qui demandent le statut de réfugié. Il n'est pas de notre avis que les abus sont systématiques, mais nous devons répondre à ces préoccupations. Ce sont des préoccupations légitimes auxquelles nous devons apporter des réponses.
Nous continuerons, avec les renseignements que nous possédons, d'assurer l'intégrité du système. Mais la tâche n'est pas facile, je vous l'avoue. La tâche est complexe et elle n'est pas facile.
[Traduction]
En vertu de la loi, le Programme canadien d'immigration et de détermination du statut de réfugié vise les arrivées spontanées, les demandes d'immigration et les revendications du statut de réfugié qui sont présentées volontairement en dehors du processus de sélection classique—autrement dit les personnes qui arrivent au Canada et revendiquent le statut de réfugié. Pour trancher ce genre de cas, le Canada a adopté un système judiciaire et une loi prévoyant l'examen des dossiers cas par cas et leur transmission par le ministère, qui, comme je l'ai déjà dit, contrôle la porte d'entrée du processus de détermination du statut de réfugié.
À titre d'exemple, 42 759 cas ont été transmis à la commission en 1996-1997. Chaque cas doit être jugé en toute objectivité. On n'évalue pas globalement la situation des revendicateurs issus de certains pays ou de certains groupes. Dans un sens, la façon d'examiner chaque dossier est peut-être l'une des meilleures garanties de limitation des abus, car chaque cas doit être étudié de façon systématique.
Les décisions sont fondées sur les informations provenant du demandeur, des pays d'origine, des sources internationales et des services d'information et de recherche du ministère. Nous avons de plus en plus d'information, notamment sur la situation des pays, mais souvent, la faille réside dans la précision des renseignements sur le demandeur, lorsque ce dernier arrive sans aucuns papiers permettant de l'identifier. Par définition, dans certains pays, il est pratiquement impossible d'obtenir des preuves tangibles de l'identité du demandeur.
Dans un sens, le système a beaucoup changé depuis 30 ans environ. Nous avons toujours accueilli des réfugiés, mais il y a dix ou quinze ans, l'identité des demandeurs était moins contestable que le traitement qui leur avait été infligé, que ce soit la discrimination ou la persécution. Actuellement, nous passons beaucoup de temps à déterminer si le demandeur est vraiment la personne qu'il prétend être.
Voilà ce que je peux dire en guise d'introduction. Permettez-moi de vous assurer que nous avons l'intention, dans le cadre de notre loi, de relever ce genre de défi avec les moyens dont nous disposons.
• 1600
Il est vrai que la conjoncture est imprévisible et qu'elle
pourrait nous obliger à changer de priorités assez rapidement pour
faire face à des événements imprévus. Nous reconnaissons la
nécessité d'améliorer davantage les délais de traitement des
dossiers et de prise de décisions. Pour nous, c'est un défi
important. Nous sommes déterminés à le relever.
Après cette brève introduction, je donne la parole à M. Palmer qui vous parlera de la structure et de l'organisation de la CISR.
M. Philip Palmer (avocat général, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Merci beaucoup, monsieur le président, honorables députés.
[Français]
Je vais parler surtout en anglais, mais n'hésitez pas à me poser des questions en français. Je pense que tout devrait être très clair.
[Traduction]
Tout d'abord, un mot sur notre mission. Elle consiste à rendre, avec efficacité et équité, et au nom de tous les Canadiens, des décisions éclairées sur les questions touchant les immigrants et les réfugiés, conformément à la loi. Nous prenons plus de 40 000 décisions par année.
La commission est composée de trois sections: la section du statut de réfugié (SSR), la section d'appel de l'immigration (SAI), et la section d'arbitrage. La CISR est le plus grand tribunal administratif au Canada. Elle est constituée de la présidente et des commissaires et arbitres des trois sections. Actuellement, la SSR compte 162 commissaires. La SAI compte 23 commissaires, sur un maximum de 30. La section d'arbitrage compte 34 arbitres. La commission compte 600 employés qui travaillent dans des bureaux un peu partout au pays effectuant des opérations de soutien. Nos principaux bureaux sont situés à Montréal, Toronto et Vancouver; nous avons des bureaux moins importants à Ottawa et à Calgary, et nous servons de façon itinérante la plupart des autres régions du pays, y compris Terre-Neuve, les provinces de l'Atlantique et les autres régions des Prairies.
Tout d'abord, la section du statut de réfugié, qui fait souvent la une des médias, a pour mission d'entendre les revendications du statut de réfugié et de statuer sur elles conformément à la loi.
Il importe que je m'attarde un peu sur ce point, qui n'est pas toujours clair et qui peut faire l'objet d'une comparaison entre notre système et les autres. Le système canadien est fondé sur la prise d'une décision quasi judiciaire relative à une demande de statut de réfugié. La décision initiale n'est pas prise par un agent administratif, ni par un fonctionnaire du ministère de l'Immigration. Ce qui nous distingue du reste du monde, c'est que la première décision concernant une demande du statut de réfugié est prise par un décideur indépendant qui n'est responsable de ses décisions que devant les tribunaux, et non pas devant un ministre ni un haut fonctionnaire du gouvernement.
Je vais vous parler rapidement du processus de revendication.
Les personnes qui arrivent au Canada ont le droit de présenter leur demande en territoire canadien. Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration décide alors si elles sont admissibles à comparaître devant la commission. Pour décider de l'admissibilité, on cherche essentiellement à savoir si le demandeur a déjà obtenu le statut dans un autre pays, s'il a commis des crimes graves, des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité. Si l'on présume que le candidat n'appartient à aucune de ces catégories inadmissibles, son dossier est transmis à la commission. En fait, 99,95 p. 100 des revendicateurs qui présentent leur demande au Canada sont transférés devant la commission. À ce moment-là, nous devons déterminer si les intéressés sont effectivement des réfugiés au sens de la convention.
• 1605
Nous procédons d'abord à l'examen initial du cas. Il s'agit
essentiellement de déterminer comment nous allons traiter la
demande. Nous avons trois façons de les traiter.
Le traitement prioritaire est accordé aux personnes qui ont été détenues ou qui sont détenues d'une manière ou d'une autre et qui sont donc privées de leur liberté, ou à d'autres catégories de personnes. Les enfants non accompagnés en sont un bon exemple. Il s'agit des personnes dont nous essayons de traiter les dossiers de façon prioritaire pour nous assurer que la commission les entende rapidement. Ainsi, les autres agents responsables du gouvernement canadien peuvent s'en occuper de façon appropriée.
Notre processus accéléré permet de déterminer le statut sans tenir une audience complète. Il vise essentiellement les personnes venant de pays fort probablement générateurs de réfugiés. Elles sont issues de groupes dont on sait qu'ils ont été visés, qui ont été victimes par le passé, et dont bien des membres ont déjà été acceptés comme réfugiés. En même temps, nous examinons séparément chaque cas afin de nous assurer que ces personnes ne sont pas des criminels ou qu'elles n'ont pas commis de crimes de guerre ni d'autres actes nécessitant au minimum une audience complète.
Enfin, il y a l'audition complète, qui est notre procédure classique et ordinaire. Nous allons vous la décrire maintenant.
Habituellement, après l'examen initial du cas, nous organisons une conférence préparatoire. Il ne s'agit peut-être pas d'une conférence officielle, mais elle permet d'examiner la nature des preuves qui seront présentées et des questions qui seront soulevées au cours de l'audience. Nous voulons ainsi limiter le temps de traitement de la demande et nous assurer que la documentation issue de la recherche soit présentée assez tôt pour que l'on puisse rapidement étudier le dossier et prendre une décision au cours de l'audience.
Il convient peut-être de noter qu'à ce même stade, nos membres sont répartis en équipes spécialisées par région géographique. Nous le faisons pour qu'ils connaissent à fond la situation des pays, ce qui les rend plus efficaces. Ils connaissent le contexte, l'histoire, la situation des droits de la personne dans divers pays, et cela est extrêmement utile lorsqu'il faut entendre les revendications et décider rapidement.
La nature de nos audiences n'est pas unique au monde, mais ce qui distingue notre système judiciaire des autres est le fait que la détermination du statut de réfugié est un processus non contradictoire. Cela signifie simplement que l'État n'est pas partie prenante et qu'en principe, il ne conteste pas la revendication du statut de réfugié. Au fond, notre système est fondé sur l'idée que la commission cherche à déterminer si le demandeur est vraiment un réfugié au sens de la Convention.
D'ordinaire, le ministre n'est ni présent, ni représenté à nos audiences. En fait, il n'est représenté que dans 2 p. 100 environ de toutes les audiences de la SSR. L'exception au caractère non contradictoire de nos audiences survient lorsque le ministre intervient par l'entremise d'un agent des appels, d'un employé du ministère ou d'un représentant du ministère de la Justice comparaissant au nom du ministre. Cette intervention se fait normalement aux termes des clauses d'exclusion, qui représentent en gros 2 p. 100 des cas.
• 1610
Nous l'avons dit, l'audience est quasi judiciaire, et ce pour
plusieurs raisons.
La nature des droits en jeu est très importante. La Cour suprême du Canada a décidé que les réfugiés qui arrivent au pays ont droit à la protection de la Charte canadienne des droits et libertés et qu'une décision négative peut avoir pour effet de mettre en danger leur vie, leur liberté et la sécurité de leur personne, ce dont on ne peut les priver en vertu de notre Constitution sans leur accorder une audience devant un tribunal indépendant. Voilà le fondement juridique de l'existence de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et du système que le Canada a mis en place.
Devant nos commissaires, le revendicateur a le droit de se faire représenter par un conseil, qu'il s'agisse d'un avocat ou d'un conseiller juridique, et il a droit à des services d'interprétation. Les interprètes sont fournis et rémunérés par la commission.
D'une manière générale, les audiences de la section du statut des réfugiés se font à huis clos, et le haut commissaire des Nations Unies pour les réfugiés peut assister à toutes les audiences à titre d'observateur.
Les revendications sont habituellement entendues par un tribunal composé de deux membres. Ceci est important parce que nos textes réglementaires fonctionnent de la façon suivante. Si les deux membres ne s'entendent pas sur une décision, c'est-à-dire si l'un estime que le demandeur est un réfugié au sens de la Convention et l'autre maintient le contraire, notre loi prévoit que le demandeur soit accepté comme réfugié.
Les revendicateurs ont le droit de produire des preuves, d'interroger des témoins et de présenter des observations. Je pense qu'il est important de dire qu'il ne s'agit pas simplement d'un droit sans valeur et illusoire. C'est un plein droit qui est également garanti par le fait que nous divulguons entièrement au demandeur toutes les informations dont nous disposons sur son cas, soit des informations précises sur la demande ou des informations générales sur la situation de son pays et sur les droits de la personne dans son pays d'origine.
Le ministre a le droit d'être présent à toutes nos audiences et de présenter des éléments de preuve. Évidemment, il s'agit là d'une protection essentielle des intérêts de la population canadienne.
Exclusion de la définition de réfugié: vous en avez probablement entendu parler; il en est question de temps en temps dans les journaux. La définition du réfugié ne s'applique pas à certaines catégories de personnes, notamment les revendicateurs qui sont déjà protégés dans un autre pays—et qui sont visés par l'article 1E) de la Convention—et les revendicateurs qui ne méritent pas de protection. Il s'agit de personnes ayant commis un crime de guerre, un crime contre l'humanité ou des actes contraires aux principes des Nations Unies.
Il faut dire que la commission est un pionnier dans l'exploration des limites, si on veut, des clauses d'exclusion.
La contrepartie de la générosité du système canadien réside peut-être dans le fait qu'il est très dur à l'égard des demandeurs ayant violé les droits de la personne en particulier. Par exemple, nous prévoyons l'exclusion des trafiquants de drogues et de personnes qui autrement pourraient être acceptées comme réfugiés.
Au Canada, la définition du concept de réfugié fait l'objet d'un grand débat. Évidemment, il y en a qui pensent que cette définition a été élargie ici. Ce n'est pas nécessairement vrai. Je puis dire que les tribunaux canadiens ont donné une signification concrète, réelle et contemporaine à la Convention et ont examiné en profondeur ses fondements en matière de droits de la personne d'une manière qui fait l'envie de tous les milieux judiciaires occidentaux.
• 1615
Au fond, trois éléments ont présidé à la définition du
réfugié. Le premier est évidemment la Charte canadienne des droits
et libertés, qui incorpore largement et représente une grande
partie du droit international en matière de droits de la personne.
Elle s'inspire beaucoup du droit international.
Deuxièmement, il y a les décisions de la Cour fédérale et de la Cour suprême du Canada, que la commission est tenue de respecter.
Troisièmement, il y a le fait que le droit canadien doit être conforme au droit international, qu'il s'agisse des traités internationaux ou des lignes directrices des Nations Unies, notamment le manuel des réfugiés du HCR.
Avant de passer à la section d'appel, il convient probablement de noter que les décisions négatives de la commission doivent être rédigées et communiquées aux demandeurs. La commission est particulièrement tenue non seulement de raccourcir la justification écrite de ses décisions, mais aussi de donner davantage d'explications afin d'accélérer la prise de décision et de rassurer les demandeurs quant à leur statut, et ce le plus rapidement possible.
La deuxième section est celle des appels, qui s'occupe des appels des personnes visées par les ordonnances de renvoi provenant de la section de l'arbitrage, ou des appels du ministre en cas de refus d'émettre des mesures de renvoi. Cela arrive souvent dans des cas de criminalité.
Enfin, la section entend des appels contre le rejet des demandes parrainées de résidence permanente. Il s'agit des appels provenant de résidents permanents qui ont le droit de parrainer des membres de leur famille, mais dont la demande de parrainage a été rejetée. Je sais que beaucoup de députés ici présents ont déjà entendu parler de certains électeurs qui se sont présentés devant nos sections et qui ont vu rejeter leur demande de parrainage des membres de leur famille.
À la section d'appel, les audiences sont de type contradictoire et se font en public. C'est la loi qui exige que les audiences soient publiques.
Le mandat de la section d'arbitrage est de tenir des enquêtes. Les gens sont convoqués aux enquêtes ouvertes par le ministre de la Citoyenneté et de l'immigration. Il s'agit, par exemple, de personnes qui séjourneraient au Canada illégalement. Elles ont dépassé la durée de séjour de leur visa de visiteur, d'étudiant, ou de travail, contrairement aux conditions de leur admission au pays. Si la personne a été admise comme étudiant, et si elle travaille et gagne ici un revenu, elle peut faire l'objet d'une enquête et est passible de renvoi.
Le deuxième volet du mandat de la section d'arbitrage est de procéder aux examens des motifs de détention. Il s'agit de ceux qui ont été placés en détention avant l'audience relative à leur renvoi du pays. Il s'agit d'une personne qui a peu de chance de comparaître à son audience. Dans d'autre cas, il peut s'agir de quelqu'un qui présente un danger pour la population.
Ici encore, la procédure à la section d'arbitrage est de nature contradictoire et se tient en public. Dans les deux sections, toute personne qui comparait a le droit d'être représentée par un conseil, qui peut participer sans réserve à l'audience.
• 1620
Enfin, il faut se rappeler que toute décision de la CISR est
assujettie à un contrôle judiciaire, à la demande du revendicateur
ou de l'appelant ou du ministre, à la réserve près que tous les
appels des décisions d'immigration doivent être autorisés par la
Cour fédérale du Canada avant d'être entendues.
Merci. C'était mon exposé.
Mme Evelyn Levine (directrice générale, Politique, planification et recherche, Commission de l'immigration et du statut de réfugié): Monsieur le président, je vais maintenant vous brosser un tableau de l'activité de la Commission de l'immigration. Je vous exposerai quels sont les principaux pays d'origine des immigrants, nos engagements vis-à-vis du Parlement, un bref rapport de situation de notre rendement et de ce que nous comptons faire pour l'avenir.
Je vais commencer par la diapositive suivante, qui porte sur le processus de détermination du statut de réfugié.
Voici une illustration des principaux pays sources. À gauche se trouve les dix principaux pays d'où sont provenus les revendications en 1996-97. À droite est représenté le premier trimestre de l'année financière. La situation est assez stable. Certains pays disparaissent et réapparaissent avec le temps. Au moment où je vous parle, la situation est peut-être différente, mais elle est sensiblement la même.
Vous remarquerez, par exemple, qu'en 1996-97, le Chili représentait 7 p. 100 alors qu'en 1997-98, il n'apparaît pas.
L'an dernier, nous avons reçu quelque 23 500 revendications et cette année nous en prévoyons 22 000.
Sur la diapositive suivante, vous verrez à quoi la section du statut de réfugié s'est engagée auprès du Parlement dans son rapport sur les plans et les priorités déposé en février 1997.
À ce moment-là, la section s'est engagée à réduire le nombre de revendications en instance à 206 000 d'ici à la fin de 1997-98 et de réduire le délai moyen de traitement des revendications à huit mois dans les douze à venir, c'est-à-dire d'ici à septembre 1998. Ces engagements ont été pris dans l'hypothèse où trois conditions seraient remplies. La première, que soit adoptée la norme de la tenue d'audiences à un seul commissaire; deuxièmement, que l'effectif de commissaires de la section soit augmenté; et que la section conserve une masse critique de commissaires d'expérience.
La question est donc de savoir dans quelle mesure nous avons respecté ces engagements.
La diapositive suivante illustre le nombre de revendications en instance, l'arriéré. Vous constaterez qu'en septembre 1996, on a atteint un sommet de 30 722 qui baisse depuis. La tendance est la bonne et nous nous attendons à atteindre l'objectif promis de 226 000 d'ici à la fin de l'année financière.
La diapositive suivante illustre le délai moyen de traitement. Nous reconnaissons tous que la tendance va dans le mauvais sens. Elle est à la hausse. Nous nous sommes certes engagés à la baisser, et dans quelques instants je vous expliquerai certaines initiatives que nous avons prises. Mais c'est un schéma important parce qu'il illustre nos antécédents.
• 1625
Sur la diapositive suivante, nous vous donnons certaines des
raisons qui expliquent la tendance apparente à la hausse. Le délai
de traitement est toujours élevé parce que le nombre de cas en
instance a augmenté très rapidement en 1994-1995 et pendant les
deux années qui ont suivi en raison à la fois du nombre élevé de
revendications reçues et d'afflux soudains. Un cas a été celui du
Chili. M. Thibault vous a dit que nous devons réagir au milieu
ambiant.
C'est donc dire que les délais s'allongent toujours et que la production n'a pas été aussi élevée que prévue ou espérée. L'effectif moyen des commissaires depuis 1996-1997 était de 160 alors que l'effectif nécessaire pour répondre à nos engagements est de 182. Comme nous le savons tous, la loi relative aux tribunaux à un seul commissaire n'a pas été adoptée, ce qui nous oblige pour l'essentiel à faire travailler deux commissaires à la fois.
La diapositive suivante montre les bonnes nouvelles. Un graphique montre nos productions et le fait que nous avons commencé à entamer la montagne de cas que nous avons. La ligne pointillée représente le nombre de revendications que le ministère nous a déférées. La chaîne de montagne représente le nombre de revendications que nous avons réglées. Si je peux établir une analogie avec le déficit et la dette, je dirais que depuis juin 1995, nous n'avons plus de déficit et que nous sommes en train de résorber la dette.
Vous voyez ici les indicateurs positifs qui montrent que le nombre de revendications réglées dépasse celui des revendications déférées. Autre facteur positif: la proportion des audiences à un seul commissaire «ce qui est possible aux termes de la loi avec le consentement du revendicateur» est passé de 9 p. 100 ces deux dernières années à 23 p. 100 au premier trimestre de l'exercice financier courant.
Nous avons aussi pris certaines initiatives ou adopté de bonnes pratiques de gestion des cas et nous améliorerons notre productivité et réduirons le temps de traitement. Comme M. Thibault l'a dit, nous avons des équipes de gestion des cas spécialisées selon les régions. Le regroupement des compétences dans ce domaine nous permet de traiter les revendications plus rapidement.
Nous regroupons les revendications pour qu'elles puissent être traitées plus rapidement. Nous effectuons également une mise au rôle rapide des nouvelles revendications afin de réduire le délai moyen de traitement. Nous mettons l'accent sur les décisions rendues de vive voix pour améliorer l'efficacité et comme M. Palmer l'a dit, nous rédigeons des motifs plus courts.
La diapositive suivante représente l'issue de nos décisions. Le jaune représente les décisions positives. Comme vous le voyez, la tendance est de réduire le nombre de décisions positives, qui est passé de 62 p. 100 il y a trois ans à 40 p. 100 au présent trimestre. Le bleu représente les décisions négatives et le rosé les renonciations et les retraits. Voilà donc l'issue de nos décisions.
À la section d'appel de l'immigration, nous nous étions engagés dans le Rapport sur les plans et les priorités de réduire le nombre d'appels en instance à 5 300 d'ici à la fin de 1997-1998. Il s'établit actuellement à un peu plus de 5 600 et nous pensons donc atteindre notre objectif. Nous avons aussi promis de réduire le délai moyen de traitement à neuf mois. C'est-à-dire à partir du moment où est reçu le dossier en provenance du ministère de l'Immigration d'ici à la fin de 1999-2000. Le délai s'établit actuellement à 11 mois.
• 1630
Les deux conditions posées étaient très semblables,
c'est-à-dire d'avoir un effectif complet de commissaires
d'expérience et, que le nombre d'appels demeure à peu près le même
à 3 200. Cette prévision était juste puisque le nombre des appels
est resté à peu près stable à 3 200 par année.
Sur la diapositive suivante, vous verrez qu'encore une fois nous avons commencé à entamer l'arriéré des cas à la section des appels. Au cours des cinq derniers trimestres, nous avons réglé plus de cas que nous n'en avons reçus.
La diapositive suivante donne les statistiques d'arbitrage et l'échelle ou les milliers de décisions prises à la fin d'examens des motifs de garde ou d'enquêtes terminées. Vous pouvez constater que la charge de travail a diminué. Et j'ai le plaisir de vous informer qu'il n'y a pas de dossiers en souffrance à la section d'arbitrage.
Nous vous avons parlé des défis, de nos contraintes et de nos promesses d'amélioration de notre rendement et vous vous demandez peut-être comment nous allons y parvenir.
L'été dernier l'équipe de direction de la Commission d'immigration a estimé important d'informer tous les employés des orientations nécessaires pour atteindre nos objectifs. Nous leur avons annoncé notre vision pour l'avenir, vision qu'il m'a semblé utile de partager avec vous aujourd'hui.
Nous nous sommes fixé comme objectif de viser l'excellence dans toutes nos activités et de traiter chacun simplement, rapidement et équitablement—adverbes clés de notre réussite—en faisant preuve d'innovation, nous formerons ainsi un tribunal administratif d'avant-garde et contribuerons, avec nos partenaires, à tracer l'avenir du système d'immigration du Canada.
Nous sommes conscients de l'impossibilité d'y arriver sans changer nos méthodes ou en exigeant encore plus de notre personnel. C'est tout simplement insuffisant. Seule l'innovation, bien entendu dans les limites des contraintes de notre système et de notre législation, seule une meilleure gestion des dossiers, en collaboration avec nos partenaires, nous permettront d'y arriver.
Je vous remercie de votre attention, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup. Est-ce que cela met fin à votre exposé?
M. Paul Thibault: Oui.
Le président: Nous passons donc aux questions des membres du comité. Nous commencerons par M. McNally.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de cet exposé. Je vous remercie également d'avoir partagé avec nous votre vision de l'avenir et je reconnais l'influence de la législation sur sa réalisation.
J'ai quelques questions de procédure à vous poser. À propos du caractère non contradictoire de la procédure de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et du fait que le représentant du ministre... je crois que quelqu'un a avancé le chiffre de 2 p. 100 pour le nombre d'audiences où le ministre est représenté.
Je crois que les Canadiens manifestent une certaine inquiétude. On vient me parler dans mon bureau de personnes qui profitent de la bonne nature des Canadiens, de notre générosité d'accueil. Nous savons que le Canada est le fruit de l'immigration, mais il est certain qu'il y a des abus évidents. C'est peut-être au niveau de la procédure qu'on pourrait trouver le moyen de les éviter.
Vous nous avez parlé de tous les droits des réfugiés qui se réclament, dès leur arrivée au Canada du statut de réfugié mettant automatiquement la machine en branle. Ils ont le droit de se faire représenter et tous ces autres droits, et pourtant les représentants du gouvernement ne semblent pas être capables de réfuter, voire même simplement de mettre en doute les dépositions.
Si quelqu'un qui arrive chez nous est un criminel de guerre ou fait même partie de ce deuxième groupe que vous avez mentionné, ce grand nombre de réfugiés qui nous sont arrivés de la Bosnie, par exemple, ou de cette région... comment s'assurer de la crédibilité des dires de ces gens? S'il s'agit de quelqu'un appartenant à ce genre de groupe et qu'il fait sa déposition devant un tribunal, nous ne pouvons réfuter ce qu'il avance. Si c'est un criminel de guerre, qu'est-ce qui l'empêche de ne pas dire la vérité sur ses véritables antécédents à un tribunal?
• 1635
La procédure elle-même est l'une des principales sources
d'inquiétude des Canadiens.
L'autre, c'est l'accumulation des dossiers. D'après les chiffres publiés aujourd'hui, la cible pour les réfugiés est fixée à environ 30 000 et si le taux d'acceptation est de 44 p. 100, cela signifie qu'il y a environ 75 000 demandes. C'est à peu près cela?
Mme Evelyn Levine: D'après nos prévisions, au cours de cette année financière, on nous déférera environ 22 000 dossiers. Cela donne donc 40 p. 100 de 22 000.
M. Grant McNally: Mais plus tôt on a dit que 44 p. 100 de tous les revendicateurs étaient acceptés.
Mme Evelyn Levine: Maintenant c'est 40 p. 100, donc ce serait...
M. Grant McNally: Vous dites donc que 40 p. 100 des 22 000 sont acceptés?
Mme Evelyn Levine: C'est juste.
M. Grant McNally: Une des choses qui me préoccupe, c'est qu'il y a ces gens qui viennent dans notre pays puis qui prétendent être des réfugiés et il y a cet arriéré qui s'accumule et qui fait que des réfugiés d'autres pays ne peuvent pas venir ici, ne peuvent pas présenter de demande. Je pense que vous avez mentionné qu'il y a environ 22 000 personnes à l'étranger qui présentent des demandes à d'autres consulats.
M. Philip Palmer: Je devrais peut-être apporter une précision. À l'extérieur du pays, les demandes sont présentées à des bureaux des visas, à des agents des Affaires étrangères qui sont spécialement délégués ou à des agents d'immigration dans des missions à l'étranger.
M. Grant McNally: Combien y en aurait-il?
M. Philip Palmer: Je ne peux pas vous donner de chiffres. Nous n'avons aucune idée.
Le nombre de demandes présentées au Canada n'a aucun effet sur celui des demandes qui peuvent être présentées. Si plus de gens venaient, ils auraient le droit de présenter leurs demandes.
M. Grant McNally: Je pense qu'on s'inquiète du fait qu'il y a beaucoup de gens qui viennent ici et qui prétendent être des réfugiés alors qu'ils n'en sont pas, puis il y a ce processus qui fait que... On a parlé d'ordonnances de renvoi. Comment cela se passe-t-il pour ceux qui ne sont pas réputés être de véritables réfugiés? Quel pourcentage d'entre eux font l'objet d'une ordonnance de renvoi, et dans quel délai celle-ci est-elle exécutée? Des problèmes surgissent parce que des ordonnances d'expulsion n'ayant pas été exécutées, des actes criminels sont commis. On sait que différents cas ont retenu l'attention du public, surtout sur la côte Ouest de même que dans tout le pays.
Tout ce processus et la façon dont nous pourrions le simplifier suscitent des interrogations chez mes électeurs. Je sais que vous avez parlé d'un éventuel tribunal composé d'un seul membre. Je me demande si la première chose à faire ne serait pas d'agir dès le point d'entrée, au moment de l'arrivée. Quelqu'un a dit plus tôt que sur tous ceux qui débarquent, 99 p. 100 font l'objet d'une audience. Combien de temps cela prend-il, à partir du moment où quelqu'un arrive jusqu'à ce qu'il ait franchi toutes les étapes du processus de la CISR et qu'une décision soit prise, soit pour soit contre?
Mme Evelyn Levine: Nous commençons à compter à partir du moment où nous avons l'affaire en main, c'est-à-dire au moment où celle-ci nous est renvoyée.
M. Grant McNally: Et pourquoi pas à partir du moment où la personne arrive? Supposons que je vienne d'un autre pays. Je dis que je suis un réfugié. Avant qu'on décide si j'en suis un ou pas, combien de temps s'écoule-t-il?
Mme Evelyn Levine: Ils doivent remplir un formulaire et on leur donne 28 jours pour le faire.
M. Grant McNally: Donc à partir du moment où ils arrivent et jusqu'à ce qu'une décision soit rendue par la CISR, combien de temps faut-il, en moyenne? Avez-vous des données là-dessus?
Mme Evelyn Levine: J'ajouterais une période de un mois à six semaines à notre chiffre, parce que quand ils arrivent on leur remet un formulaire. Ils ont 28 jours pour remplir le FRP, formulaire de renseignements personnels et nous le remettre. Puis il peut y avoir des motifs de prorogation. J'ajouterais donc deux mois au délai que nous aurions, et comme nous en sommes maintenant à 14 mois, on pourrait dire qu'il s'agit en fait de 16 mois.
M. Grant McNally: Et cela n'inclut pas le processus d'appel qui s'y ajoute, si on interjette appel de la décision et qu'elle est renvoyée à une juridiction d'appel?
Navré, j'ai peut-être dépassé mon temps de parole.
Le président: Oui. Nous allons donc passer du côté du parti ministériel. À qui la parole d'abord?
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): J'étais un peu préoccupée par le temps et je pensais que les cinq minutes étaient...
Le président: Oui. Le greffier surveille l'heure et vous n'avez pas à vous en inquiéter.
Le Parti libéral.
Une voix: Est-ce un à la fois?
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Ou est-ce deux avocats en même temps?
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib): Pour faire suite à la question de M. McNally relativement aux taux d'acceptation, je regarde le plan annoncé aujourd'hui. Il y a une différence entre les réfugiés parrainés par le gouvernement et ceux qui le sont par le secteur privé. Est-ce que votre taux d'acceptation d'environ 40 p. 100, ou de 44 p. 100 ou de tout autre pourcentage, diffère selon les diverses catégories de réfugiés? Autrement dit, pour la catégorie des réfugiés parrainés par le gouvernement, le taux d'acceptation est-il aussi de 44 p. 100 ou est-il supérieur ou inférieur?
M. Philip Palmer: Cela n'inclut pas la catégorie de parents aidés. Pour cela, l'acceptation est déterminée seulement par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.
M. John McKay: Cette catégorie n'en fait donc pas partie.
M. Philip Palmer: Elle n'en fait pas partie pour ce qui est de notre processus de détermination du statut de réfugié.
M. John McKay: D'accord. En est-il de même pour les réfugiés parrainés par le secteur privé?
M. Philip Palmer: Oui.
M. John McKay: D'accord, il n'est donc ici question que des 14 à 18 000 qui arrivent au Canada.
M. Philip Palmer: C'est limité à ceux qui arrivent au Canada et qui présentent une revendication du statut de réfugié.
M. John McKay: C'est donc le nombre dont on s'occupe annuellement.
M. Philip Palmer: C'est le nombre de nos cas à traiter.
M. John McKay: Donc les 44 p. 100 correspondent aux 14 à 18 000, n'est-ce pas?
M. Philip Palmer: C'est 40 p. 100 d'environ 22 000 personnes dont on s'attend qu'elles revendiqueront le statut de réfugié en territoire canadien cette année.
M. John McKay: D'accord, c'est un fait intéressant à préciser.
Ma deuxième question a trait à la définition de réfugié et notre passage de la notion de gens qui ont besoin de protection à celle de personnes qui sont victimes de discrimination systémique. Si le comité cherchait à établir une définition canadienne du mot réfugié, quelles seraient ses contraintes juridiques? Bien sûr, il faudrait tenir compte de la Charte. Compte tenu de la Charte, pourrait-on envisager d'établir des zones d'arrivée où les droits garantis en vertu de la Charte ne s'appliqueraient pas? Serait-ce défendable sur le plan du droit?
M. Paul Thibault: Il nous est très difficile de répondre à cette question.
M. John McKay: Nous ne posons que des questions difficiles.
M. Paul Thibault: C'est très difficile pour nous de répondre, parce que nous agissons dans le cadre législatif existant. Comme vous le savez, le ministre a constitué un groupe consultatif pour faire rapport de changements à la législation qui porteront sur toutes ces questions. Ce groupe consultatif présentera son rapport au ministre à la fin décembre. Nous avons un cadre législatif, quel qu'il soit et quelle qu'en soit la perception qu'on en ait, notre travail est de fonctionner dans les limites de ce cadre et d'essayer de voir comment nous pouvons rendre le système aussi efficace que possible sur le plan administratif.
Il est certain que le Parlement pourrait adopter de nombreux changements d'ordre législatif, mais cela ne relève certainement pas de notre domaine de compétence étant donné que quelle que soit la décision du Parlement, nous aurons à nous y soumettre. Mais de là à nous prononcer au sens large sur la façon dont nous devrions traiter de ces choses qui échappent à notre mandat... Par exemple, quand les gens qui revendiquent le statut de réfugié arrivent, ils ne sont pas notre responsabilité. Nous ne nous occupons que de ceux qui nous sont renvoyés par le ministère de l'Immigration. C'est vraiment difficile.
Il nous est presque impossible de dire que s'ils étaient traités de telle ou telle façon nous pourrions faire ceci ou cela. Tout dépend vraiment du cadre législatif que le ministre propose et que le Parlement examine ensuite au cours d'un débat auquel vous aurez à participer, je suppose, au début de l'an prochain. Pour l'instant, nous nous faisons un plaisir de répondre aux questions que vous pouvez avoir à nous poser à propos de nos imperfections, mais il est vraiment difficile pour nous de parler déjà de celles que nous n'avons pas encore.
Le président: Madame Guay.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Je vous remercie pour votre exposé. Mon collègue parlait des délais de traitement des demandes. Qui prend ces gens-là en charge quand ils arrivent ici? Vous avez parlé tantôt de délais allant jusqu'à 14 ou 16 mois quand on fait une enquête. Cela veut dire que, si un réfugié arrive ici et qu'on se rend compte que c'est un criminel, il va disposer de 14 à 16 mois pour commettre des crimes. Donc, quand ce genre de réfugié est sur notre sol, qui le prend en charge? D'autre part, est-ce que vous pensez que ces délais sont beaucoup trop longs?
M. Paul Thibault: Je vais commencer par répondre à votre dernière question, à savoir si les délais sont trop longs présentement. Évidemment, ils sont trop longs. On a dit au comité précédent qu'on tâcherait d'améliorer les délais de traitement. Il est donc évident que nous allons tâcher de prendre les mesures administratives nécessaires et essayer de modifier le système en tentant de travailler plus intelligemment afin de rendre des décisions plus rapidement, pour qu'il y ait moins de gens dans le système et que les délais soient moins longs.
En ce qui concerne la question de savoir qui les prend en charge, je dois vous dire que les intervenants, à cette étape, sont multiples. Il y a les provinces pour le bien-être social et l'aide juridique, qui peuvent varier selon la province, les municipalités dans certains cas, surtout celles des grandes agglomérations, et il y a également les organisations non gouvernementales. Il y a donc toute une panoplie d'acteurs qui interviennent dans le système.
Mme Monique Guay: Je pense qu'on procède souvent au cas par cas. Si on sait qu'un pays est en situation de guerre permanente, on sait qu'on devra accueillir des réfugiés. Quand un certain nombre de personnes arrivent en même temps, n'est-il pas possible d'accélérer le processus, puisqu'on a une information privilégiée les concernant et qu'on sait qu'on va prendre des réfugiés de ce pays? Est-ce qu'il serait possible d'accélérer le processus dans ce cas-là?
M. Paul Thibault: Ceci serait du ressort du ministère de l'Immigration, qui devrait décider du genre de visa à accorder aux ressortissants de ce pays-là. De notre côté, notre mandat se limite aux gens qui arrivent au Canada par leurs propres moyens, une fois qu'ils nous sont envoyés par le ministère de l'Immigration. En ce qui concerne les intervenants à l'étranger, qui décident s'ils doivent donner un visa ou non ou s'ils doivent accorder la priorité ou non à telle personne, ce sont des questions que vous devriez poser poser au ministère de l'Immigration.
Mme Monique Guay: Donc, s'il y avait une crise quelque part, ce serait à la ministre de décider du processus à suivre.
M. Paul Thibault: Voilà.
Mme Monique Guay: C'est à elle de décider d'ouvrir les portes à tant de réfugiés.
M. Paul Thibault: Effectivement.
Mme Monique Guay: Tout ceci ne vous concerne pas.
M. Paul Thibault: Ces gens-là, en effet, ne passeraient pas par notre système.
Mme Monique Guay: Très bien. Pour terminer, je vous demanderais de me dire si la ministre a un pouvoir discrétionnaire sur des décisions. Autrement dit, est-ce qu'elle a le pouvoir de faire avancer un dossier et est-ce qu'elle a le pouvoir—discrétionnaire toujours—de refuser des réfugiés?
M. Paul Thibault: Je vais demander à M. Palmer de répondre du point de vue juridique, mais je voudrais tout simplement rappeler aux membres du comité que l'essentiel, le fondement de notre système, c'est que les preneurs de décisions sont indépendants. Chaque décision est prise de façon indépendante. On ne traite pas les gens comme membres d'un groupe ou comme citoyens d'un pays. On traite chaque cas individuellement, et le preneur de décision doit être indépendant de toute influence, que ce soit du ministre, d'un groupe, d'une organisation non gouvernementale ou de n'importe quel autre groupe; le preneur de décision doit avoir la possibilité de prendre sa décision seul.
M. Palmer va vous donner quelques précisions sur l'intervention du représentant du ministre dans un cas particulier.
M. Philip Palmer: S'il y a une intervention dans un cas particulier, ce sera évidemment au niveau du processus. Cela peut influencer le tribunal dans ses décisions. En général, le ministre ne cherche pas à influencer une décision individuelle. S'il y a un grand nombre de demandeurs arrivant d'un pays donné, nous allons, sur le plan administratif, chercher des moyens d'accélérer le processus d'intégration. Nous avons d'ailleurs un processus accéléré, que l'on appelle en anglais expedited hearing, et qui est justement réservé aux cas qui sont clairs concernant les réfugiés que l'on accepte en raison des abus perpétrés dans leur pays d'origine.
Le président: Madame Augustine.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Je vous félicite pour cette présentation claire et concise. C'était très clair.
J'ai été frappée par votre énoncé de vision. J'aimerais demander si vous pensez que la perception qu'a le public de votre énoncé de vision est... Et je regarde les mots «simplement», «rapidement» et «équitablement». Si vous posez la question à M. ou à Mme Tout-le-monde, je suis certaine qu'elle ne vous dirait pas que le système correspond à votre énoncé de vision.
Que fait-on pour garantir que cet énoncé de vision soit bien connu de tous les Canadiens, ou que les bureaux qui traitent avec vous de façon régulière—et quand je dis «traite avec vous», je veux dire traiter avec les électeurs qui passent par votre système—ont vraiment l'impression que vous traitez chacun simplement, rapidement et équitablement?
M. Paul Thibault: Je suis heureux que vous ayez été frappée par l'énoncé de vision. Pour parler clairement, la différence entre une mission et une vision, c'est que celle-ci correspond à ce que nous souhaitons réaliser. Nous n'y sommes pas encore. C'est ce que nous visons. C'est une des choses auxquelles j'attache personnellement beaucoup d'importance. Cela donne le ton à l'organisation et une indication de l'orientation de toutes les décisions.
Quand je parle de décisions, je songe aux décisions administratives qui permettront de façonner l'organisation. D'ici à ce que des changements législatifs soient apportés, nous avons une période de—qui sait?—un ou deux ans, et nous n'allons pas nous croiser les bras. Nous allons essayer d'améliorer les choses dans le cadre où nous fonctionnons.
La vision concerne essentiellement nos employés de même que les gens à l'extérieur du système et vise à montrer ce que nous voulons essayer de réaliser. Toute décision que nous prenons sur le plan administratif sera analysée sous cet angle. Qu'il s'agisse d'informations fournies aux décideurs, qu'il s'agisse du processus décisionnel ou qu'il s'agisse de la façon dont nous traitons nos clients—et par clients nous entendons tout le monde, les parlementaires tout autant que les revendicateurs—nous le ferons simplement, équitablement et rapidement. L'innovation est un facteur clé, et nous n'allons pas survivre sans recourir davantage et mieux encore à la technologie. Nous avons six bureaux régionaux. Nous recourons déjà aux vidéotéléconférences, nous devons nous mettre à tenir des audiences par vidéoconférence au lieu d'envoyer des gens un peu partout. Nous devons recourir à la technologie dans la salle d'audience, le cas échéant. Nous devons nous en servir pour envoyer de l'information aux décideurs—de l'information concernant le pays ou quoi que ce soit d'autre. Nous devons utiliser tout cela de façon allégée, plus rapide et améliorée.
Il ne s'agit pas ici de travailler plus dur mais de travailler plus intelligemment. Nous pensons qu'il y a beaucoup à faire, et c'est ce que nous allons tenter par ce moyen.
Le président: Merci.
Vous avez une question?
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): J'aimerais vous remercier pour votre séance d'information qui nous a permis de nous familiariser avec le statut de réfugié. Ma question se rapporte au renvoi. Votre collègue, M. Campbell, nous disait mardi que lorsqu'il y avait renvoi, un autre pays devait accepter le réfugié. Dans le cas où aucun autre pays n'accepte de le recevoir, qu'est-ce que vous en faites?
M. Paul Thibault: Je demanderais à Mme Benimadhu, qui était jusqu'à récemment la directrice générale de l'arbitrage, de vous expliquer un petit peu comment cela fonctionne chez nous à cet égard.
Mme Jennifer Benimadhu (directrice générale, Services de gestion): Est-ce que vous parlez des gens qui sont détenus?
Mme Diane St-Jacques: Supposons qu'il y a une question de renvoi, pour un crime ou toute autre raison.
Mme Jennifer Benimadhu: La personne est détenue pour renvoi, par exemple?
Mme Diane St-Jacques: Oui, en attendant d'être acceptée par un autre pays. Si aucun pays ne la veut, qu'est-ce qui se passe?
Mme Jennifer Benimadhu: La détention est révisée tous les 30 jours. Lors de cette audition, la personne en cause et son avocat, ainsi que le ministre, doivent prouver à l'arbitre que tous les efforts sont entrepris pour obtenir les documents et faire les arrangements en vue du renvoi.
Mme Diane St-Jacques: Vous pouvez le dire en anglais, si vous voulez.
Mme Jennifer Benimadhu: L'arbitre doit avoir l'assurance à chaque examen de cas en vue d'un éventuel maintien en incarcération que les mesures sont prises pour trouver les titres de voyage et pour renvoyer l'intéressé. Si le renvoi devient illusoire, on ne peut alors pas dire que la personne est détenue en vue d'un renvoi, et dans ce cas l'arbitre devrait la libérer.
Mais cela cause un dilemme, parce que souvent ces gens sont considérés comme un danger public. Le ministre a certifié, en vertu du paragraphe 70.(5) de la Loi sur l'immigration qu'ils posent un danger pour la population, et c'est pourquoi ils sont détenus en vue d'un renvoi. Le dilemme consiste donc à protéger la société canadienne, mais si les titres de voyage ne nous parviennent pas, il est alors très difficile de détenir l'intéressé en vue de son renvoi. C'est donc...
Mme Diane St-Jacques: Mais vous le gardez là, en prison ou quoi?
Mme Jennifer Benimadhu: Non. Si l'arbitre en arrive à estimer que d'après lui, ou elle, ce renvoi est en fait...
Mme Diane St-Jacques: Impossible.
Mme Jennifer Benimadhu: ... illusoire, ou comme je dis, très improbable, alors nous n'avons aucun motif de le détenir, parce qu'il n'y a pas renvoi, et nous devons donc le libérer. Je dis simplement que c'est une décision difficile à prendre pour un arbitre...
Mme Diane St-Jacques: Vous le libérerez alors?
Mme Jennifer Benimadhu: ... parce que nous savons que certaines de ces personnes ne sont pas du genre de celles qu'on souhaite avoir comme voisins.
Mme Diane St-Jacques: Vous le libéreriez pour qu'il reste ici?
Mme Jennifer Benimadhu: Oui. Habituellement on les relâche. On fait des efforts pour trouver quelqu'un pour déposer un cautionnement. Des membres de leur communauté, ou des églises, souvent viennent déposer un cautionnement pour la personne, et on les garde donc, à certaines conditions, mais, oui, on les libère.
Mme Diane St-Jacques: Est-ce qu'on ne peut pas faire autre chose à ce propos?
Mme Jennifer Benimadhu: L'arbitre ne le peut certainement pas, et c'est du domaine de l'immigration.
M. Paul Thibault: Un des dilemmes que pose cette question particulière, c'est que d'une part une partie de la population souhaite clairement que ces personnes soient détenues indéfiniment dans la mesure où il existe des motifs raisonnables de le faire. En même temps, on nous critique et on nous reproche d'ailleurs dans la presse d'aujourd'hui, de détenir des gens trop longtemps. Nous ne nous plaignons pas, c'est la simple réalité, mais nous sommes souvent pris entre deux feux, entre le risque de nous montrer trop généreux et celui de ne pas l'être assez, et il est presque impossible de satisfaire tout le monde en optant pour la voie médiane. C'est une difficulté inhérente à cette fonction.
Le président: Madame Minna.
Mme Maria Minna (Beaches-East York, Lib.): À propos de cette audience et de l'équilibre à garder, je regardais votre document, et en ce qui concerne les cas approuvés, les pourcentages d'acceptation dont nous parlions tout à l'heure, je constate que pour 1994-1995 le taux d'approbation est de 62 p. 100, puis il diminue en 1995-1996 à 54 p. 100, puis à 41 p. 100 et à 40 p. 100 en 1997-1998, bien que l'année ne soit pas encore terminée... De 1993 à 1997, c'est assez faible, et il y a un déclin continu et peut-être que cette tendance se poursuivra, je n'en sais rien. Mais j'aimerais savoir à quoi on peut attribuer cette forte diminution. QQu'est-ce qui a fait la différence?
Mme Evelyn Levine: Plusieurs facteurs jouent. Je vais commencer à répondre puis Philip pourra ajouter quelque chose s'il le souhaite.
Le taux d'acceptation peut bien sûr être un facteur dépendant de la nature des cas, de la nature des gens et du pays qui serait à l'origine de la persécution. À mesure que le monde évolue, le taux d'acceptation fluctue.
L'autre facteur serait le facteur humain, l'expérience du décideur. Si le taux de roulement des décideurs est élevé, il faut de six mois à un an pour se sentir à l'aise face à l'information fournie et à la façon de rendre ces décisions, étant donné qu'il peut s'agir de questions de vie ou de mort. Ainsi à mesure qu'un décideur se sent plus à l'aise, qu'il a plus d'expérience, il a moins d'hésitation à dire non, au lieu de courir le risque de dire...
Mme Maria Minna: Vous dites donc que vous avez plus d'expérience que vous en aviez en 1994?
Mme Evelyn Levine: Oui, parce qu'il y avait à cette époque un fort roulement des décideurs.
Philip, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Philip Palmer: Non, je pense que c'est tout.
Mme Evelyn Levine: C'est la conséquence du roulement.
Le président: Oui.
Madame Folco.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Je voudrais tout d'abord vous remercier d'être venus cet après-midi. J'ai évidemment un intérêt tout particulier à écouter votre présentation, car cela me rappelle des souvenirs qui sont bons dans certains cas mais assez douloureux dans d'autres.
Très souvent, on oublie que 99 p. 100 des gens qui viennent devant nous ont vécu des difficultés de diverses sortes. Parfois ce sont des difficultés économiques. Ce ne sont pas des réfugiés, mais ils ont quand même connu des difficultés.
Je me demande, et c'est ma première question, si on pourrait avoir des statistiques sur le nombre de criminels de guerre et autres personnes de ce genre qui comparaissent devant la Commission. Je vous pose cette question parce qu'on entend tellement parler de cette chose par l'opposition qu'on a l'impression qu'un nombre extrêmement important de personnes qui se présentent devant la Commission ont déjà commis des actes criminels dans leur pays d'origine et risquent d'en commettre d'autres ici, au Canada.
Deuxièmement, bien que votre présentation ait été de grande qualité, j'aurais souhaité que la présidente soit ici aujourd'hui. Son nom était sur la liste des personnes qui devaient venir nous rencontrer aujourd'hui et, malheureusement, je ne la vois pas parmi vous. Je voulais simplement dire que je regrette qu'elle soit absente.
Parlons d'un pays qui fait malheureusement figure d'exemple: l'Algérie. Plusieurs autres que moi ont parlé d'accélérer le processus. Il est certain que le processus doit être accéléré encore davantage, et je vous parle à partir de mon expérience vécue, bien entendu. En effet, beaucoup ont remarqué qu'entre le moment où le demandeur atterrit sur le territoire canadien et le moment où il obtient une décision positive ou négative de la part de la Commission, il se passe beaucoup de temps. Dans le cas de l'Algérie, et même d'autres pays où la guerre civile sévit, n'y aurait-il pas moyen d'accélérer spécialement le processus?
Quand des Chiliens sont venus en masse—et là je réponds un peu à la question de Mme Minna—, on connaissait la situation du Chili. On savait que ces gens-là n'étaient pas des réfugiés, mais qu'ils étaient venus parce que leurs agences de voyage leur avaient dit qu'on vivait mieux au Canada. On a donc mis en place des équipes qui ne s'occupaient que de ce problème et qui connaissaient bien ce pays. Ces gens possédaient de nombreux documents qui leur permettaient de régler les cas très rapidement. Je me demande donc pourquoi on ne pourrait pas faire cela pour ceux que l'on sait être de vrais réfugiés, des gens qui viennent de pays où il y a la guerre civile.
J'ai une autre question par rapport à la période de temps qu'on laisse passer. J'ai souvent remarqué que la personne qui se présentait devant nous avait eu beaucoup de temps pour préparer sa demande, avec l'aide d'un ou de plusieurs avocats, ce qui fait que dans certains cas, il y avait beaucoup de différence entre le questionnaire rempli à l'arrivée sur le territoire et la demande qui nous était ensuite présentée.
C'est pourquoi je me dis qu'il faudrait obtenir la demande du client dans les 24 heures qui suivent son arrivée sur le territoire et non pas attendre 28 jours comme c'est le cas actuellement. Je pense qu'on verrait alors des demandes bien différentes. Ce serait aussi une façon de réduire le nombre de fausses revendications et les délais. C'est une suggestion que je vous fais et je vous encourage à la prendre en considération.
Je voudrais dire encore deux choses. J'ai souvent constaté, au cours du travail que j'ai effectué à la Commission, que la grande majorité des commissaires prenaient leur travail très à coeur, travaillaient très fort, pendant de longues heures, et surtout ne voulaient pas faire entrer des gens qui n'étaient pas de vrais revendicateurs.
• 1705
Cela dit, la Commission a compris qu'il y avait
en quelque sorte une institution parallèle au travail de la
Commission. Je parle ici des revendicateurs qui
avaient été refusés par la Commission et qui ensuite
s'adressaient au ministère de l'Immigration, qui
pouvait accepter leurs revendications pour des motifs
humanitaires.
Je peux vous dire que cela affecte beaucoup le moral des membres de la Commission. En effet, ils se disent qu'ils ont passé beaucoup de temps à écouter le revendicateur, qu'ils ont jugé, après discussion, que la revendication n'était pas valable et qu'ensuite le ministère renverse leur jugement.
Je pourrais vous en parler plus longtemps, mais je vais m'arrêter là. Je vous remercie.
M. Paul Thibault: Je vais essayer de répondre à vos questions, madame.
Tout d'abord, comme vous le savez, l'identification des criminels se fait, en grande partie, avant leur arrivée chez nous. Nous n'avons pas ici les statistiques qui nous permettraient de vous dire combien de revendicateurs qui sont arrivés chez nous ont finalement été identifiés comme criminels. On peut essayer de faire de la recherche, mais on ne peut pas vous répondre aujourd'hui là-dessus.
Mme Raymonde Folco: Si je peux me permettre de vous interrompre, monsieur Thibault, je pense qu'il serait important pour nous, les parlementaires et pour vous, de la Commission, de faire connaître ces chiffres.
M. Paul Thibault: Nous reviendrons vous parler de cela une prochaine fois.
En ce qui concerne l'Algérie, je peux vous donner les statistiques aujourd'hui. Le nombre de revendicateurs en provenance de l'Algérie est en moyenne de 60 par mois depuis le mois de janvier. Il y en a donc eu environ 500 en huit mois.
Comme vous le savez, les mesures spéciales pour encourager ou décourager des citoyens algériens de venir au Canada en tant que réfugiés ne dépendent pas de la Commission. Pour l'instant, leur nombre est assez limité. Comme vous le savez, nous avons maintenant un système pour traiter les cas par groupe, par spécialisation régionale. C'est notamment le cas à Montréal. Pour l'instant, étant donné le volume, nous faisons notre possible pour améliorer la spécialisation. Je vous dirais également que le taux d'acceptation des revendications d'Algériens se situe entre 60 et 70 p. 100.
Vos deux dernières questions, qui concernaient d'abord la rapidité de traitement des cas à l'arrivée et ensuite l'action du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration dans le domaine humanitaire une fois qu'une décision a été rendue pour la Commission, dépassent encore une fois nos petites frontières, qui sont déjà bien occupées. C'est sûrement une question que vous pourrez poser lors de l'examen de la loi et du rapport qui vous sera sans doute présenté au début de l'année, car il y aura sans doute des accommodations à cet effet.
[Traduction]
Le président: Merci.
Comme il n'y a pas d'autres questions, je remercie les témoins qui ont comparu aujourd'hui. L'information fournie était très éclairante et stimulante. J'espère que nous nous reverrons à nouveau, car je suis convaincu que dans l'année qui vient vous allez voir que nous aurons une multitude d'autres questions à vous poser relativement aux tâches que nous aurons à accomplir dans les douze prochains mois.
Merci beaucoup. La séance est levée.